1. savoir [ savwar ] v. tr. <conjug. : 32>
• fin XIIe; saveir 980; savir 842; lat. pop. °sapere (e long), class. sapere (e bref) « goûter, connaître »
I ♦ Appréhender par l'esprit.
A ♦
1 ♦ Avoir présent à l'esprit (un objet de pensée qu'on identifie et qu'on tient pour réel); pouvoir affirmer l'existence de. ⇒ connaître. « Je ne sais pas votre nom » (Duhamel). « Tout Saint-Ouen sut l'accident en quelques minutes » ( Zola). ⇒ apprendre (cf. Être au courant, être informé de). C'est bon à savoir. Je sais ce que je sais : j'ai mon opinion là-dessus. — EN SAVOIR (qqch.). J'en sais quelque chose : j'en ai fait l'expérience. « Ce que j'en sais n'est pas direct, je le tiens de lui » (A. Gide). Qu'est-ce que tu en sais, d'abord ? Je voudrais en savoir davantage. — N'EN SAVOIR RIEN. Je n'en sais (fam. j'en sais) rien. « Il n'en sait rien encore » (Lesage). Il n'en a rien su. « ce que j'aurai à vous faire savoir » (Sand),à vous annoncer, à vous communiquer. — Pronom. (Pass.) Tout se sait, tout finit par se savoir. Ça se saurait ! si cela était vrai, on en aurait entendu parler. — Par euphém. Que vous savez, sert à désigner une personne, une chose que l'on ne veut pas nommer et qui est connue de l'interlocuteur. Cet argent « vient de qui vous savez pour ce que vous savez » (Hugo).
♢ (Suivi d'une subordonnée) « Des sujets que je savais l'intéresser » (B. Constant). « On la savait bien dotée » (Maupassant). « Nous autres, civilisations, nous savons que nous sommes mortelles » (Valéry). Nous croyons savoir que..., s'emploie quand l'information n'est pas absolument sûre. J'ai l'honneur de vous faire savoir que..., s'emploie quand un supérieur informe un subordonné. Je sais bien que..., s'emploie avec une valeur concessive. Je sais à quoi m'en tenir, de quoi il retourne. — (Belgique) (emploi critiqué) Je ne sais de rien : je ne sais rien. — Je sais pourquoi il est fâché. Savez-vous s'il doit venir ? Reste à savoir s'il en est capable (toutes les autres conditions étant réunies, encore faut-il savoir si...). La question de savoir si..., la question à l'étude. Elle « s'était remise à le considérer, depuis qu'elle lui savait des rentes » (Zola).
2 ♦ Être conscient de; connaître la valeur, la portée de (tel acte, tel sentiment). Littér. Je sais mes obligations envers vous. — Cour. « il ne sait plus ni ce qu'il dit, ni ce qu'il fait » (Molière) . Vous ne savez pas ce que vous voulez ! — Sans le savoir : sans en être conscient. Faire de la prose sans le savoir. — Fam. Je ne veux pas le savoir ! je ne veux pas connaître vos excuses, vos raisons. Il ne veut rien savoir : il refuse de tenir compte des objections, des observations, des injonctions. — Pronom. (suivi d'un attribut) Avoir conscience d'être. Il se sait condamné. « Ils se savent invulnérables » (Maurois).
3 ♦ Avoir dans l'esprit (un ensemble d'idées et d'images constituant des connaissances sur tel ou tel objet de pensée). ⇒ connaître. « Les gens de qualité savent tout sans avoir jamais rien appris » (Molière). « Un homme d'esprit avait soutenu que Poincaré savait tout et ne comprenait rien » (Maurois). Fam. Il en sait, des choses : il est instruit, savant. En savoir plus, moins, autant que qqn (sur qqch.). La seule chose que je sais, c'est que je ne sais rien, mot de Socrate. — Que sais-je ? devise de Montaigne.
♢ Absolt Avoir des connaissances rationnelles, de l'expérience. Savoir, c'est pouvoir, aphorisme de Bacon. « Savoir, faute de pouvoir, c'est toujours ça, dit Jeannot. Qu'est-ce qu'elle a dû nous faire espionner ! » (H. Bazin). Loc. Si jeunesse savait. C'est jeune et ça ne sait pas. Tu parles sans savoir. — « L'appétit de savoir naît du doute » (A. Gide). « Savoir c'est comprendre comment la moindre chose est liée au tout » (Alain).
4 ♦ Vieilli Connaître, être en mesure de retrouver ou d'utiliser. « Ne sauriez-vous pas le moyen de me faire trouver un trésorier ? » (Voltaire). Ne vous dérangez pas, je sais le chemin.
5 ♦ Être en mesure de pratiquer, d'exécuter, grâce à des connaissances théoriques. « Elle s'acquitta de sa besogne en coiffeuse qui sait son métier » (Gautier). ⇒ connaître. Il ne sait pas l'orthographe. « Un homme qui sait quatre langues vaut quatre hommes » (Mme de Staël). Réunissant le peu d'espagnol que nous savions.
6 ♦ Avoir présent à l'esprit dans tous ses détails, de manière à pouvoir répéter. Savoir son rôle par cœur. — Savoir sa leçon, sa table de multiplication. Il sait cette question sur le bout du doigt.
B ♦ (Sens affaibli, dans des expr.)
1 ♦ Être au courant de, être au fait de. « Ce qui est, comme tu le sais ou comme tu ne le sais pas, un véritable tour de force » (Gautier). « On sait que les Romains étaient formalistes » (Montesquieu). Vous n'êtes pas sans savoir que... : vous n'ignorez pas que... Dieu sait.
2 ♦ (À l'impér.) Sachez que... : apprenez que...
♢ (En incise ou en tête de phrase, pour souligner une affirmation) « Il est gentil, vous savez » (Proust). « T'as de beaux yeux, tu sais » (Prévert, « Quai des brumes », film). « ses prix sont excessifs, savez-vous » (Proust). Savez-vous, sais-tu ? (incises cour. dans le fr. de Belgique) :n'est-ce pas ?
♢ Loc. conj. de coordin. À SAVOIR : c'est-à-dire. Il manque l'essentiel, à savoir l'argent. Ellipt Savoir... « Les deux objets à la mode alors [...] , savoir un kaléidoscope et une lampe de fer blanc » (Hugo).
3 ♦ (En loc. interrog.) Peut-on savoir ? je vous prie de me l'apprendre. — Fam. Tu sais quoi ? (annonçant une information).— Fam. Va savoir ! Allez savoir ! c'est bien difficile à savoir. — « Ça m'intéresse, ce qui se passe là-dedans [...] Savoir si ça va décider Buteau ! » (Zola),je me demande si ça va le décider. « Savoir quel temps il fera demain ! » (Romains). — Qui sait ? ce n'est pas impossible. ⇒ peut-être.
4 ♦ (En tour négatif, avec ne, dans des loc. indéf.) « L'amour, ne vous déplaise, est un je ne sais quoi » ( Regnard). ⇒ je ne sais quoi. « Comme un nuage dont la foudre va tomber on ne sait quand ni sur qui » (Romains). Il y a je ne sais combien de temps, très longtemps. « Il a je n'sais plus qui dans sa famille qui est je n'sais plus quoi » (Barbusse). « Notre départ est remis à je ne sais quand » (A. Gide). Sorti de je ne sais où. « Elle a avoué avoir été toute drôle, toute je ne sais comment » (Baudelaire),dans un état indéfinissable.
♢ (Interrog. indéf. à l'inf.) Ne savoir que faire, quoi faire. Ne savoir que devenir, où se mettre. Ils ne savent qu'inventer. Ne savoir sur quel pied danser, à quel saint se vouer; où donner de la tête, où se fourrer. On ne sait par quel bout le prendre.
5 ♦ (Au subj., en loc. restrictive) QUE JE SACHE : autant que je puisse savoir, en juger. « Sibylle n'a pas la prétention, que je sache, d'imposer silence à mes amis » (Barbey). — Littér. (par anal. avec le tour restrictif) Je ne sache : je ne connais. « Je ne sache pas d'actrice, en ce moment, qui ait pu la réaliser d'une façon plus charmante » (Goncourt).
II ♦ (1080) SAVOIR (et inf.). Être capable de, en mesure de.
1 ♦ Être capable par un apprentissage, par l'habitude, de (faire qqch.). À quatre ans, elle savait déjà lire et écrire. Savoir nager, conduire. « Devant un piano dont il ne sait pas jouer » (Larbaud).
♢ Être capable, par une habileté naturelle ou acquise, de (faire qqch.). « Ah ! si je savais dire comme je sais penser ! » (Diderot). « Il a toujours su s'y prendre » (Péguy). Fam. Il sait y faire : il est habile. Il ne sait pas vivre.
2 ♦ Avoir par aptitude, effort de volonté, la possibilité de. « Savoir dire non aux faits » (Sartre). Savoir écouter, attendre. Savoir vieillir. « Il sut rester jeune bien longtemps » (Sainte-Beuve).
3 ♦ (Belgique) Pouvoir. Il ne sait pas rester tranquille.
4 ♦ (Au condit. et en tour négatif avec ne seul) Pouvoir. Je ne saurais vous répondre. « Couvrez ce sein que je ne saurais voir » (Molière ),que je ne peux voir, que je n'ai pas le droit de voir. « On ne saurait penser à tout », de Musset, il est impossible de penser à tout.
♢ (Sujet chose) « Ni la goutte, ni la colique ne sauraient lui arracher une plainte » (La Bruyère). « Quand Norpois écrit : “Ces dévastations systématiques ne sauraient persuader [...] ” il est certain que ces dévastations [...] sont des choses inanimées, qui ne peuvent pas savoir » (Proust). Il ne saurait être question de...
5 ♦ Fam. (après un v.) Tout ce qu'il sait : beaucoup, énormément, sans se retenir. Elle pleura tout ce qu'elle savait.
⊗ CONTR. Ignorer.
⊗ HOM. Saurais :saurais (saurer); sus :sue (suer); susse :suce (sucer).
savoir 2. savoir [ savwar ] n. m.
• fin XIIe; savir 842; de 1. savoir
1 ♦ Ensemble de connaissances plus ou moins systématisées, acquises par une activité mentale suivie. ⇒ 1. acquis, connaissance, 2. culture, érudition, instruction, lumières, science. « Il fut surpris de l'étendue de son savoir » (Stendhal). « la petite part de savoir que je possède, qui m'a coûté tant de peine à acquérir » (Bernanos).
♢ Spécialt Le gai savoir.
2 ♦ Philos. État de l'esprit qui sait; relation entre le sujet et l'objet de pensée dont il admet la vérité (pour des raisons intellectuelles et communicables). « La foi ne méconnaît ni ne renie le savoir » (Blondel).
⊗ CONTR. Ignorance.
● savoir verbe transitif (latin populaire sapere, avoir du discernement) Avoir appris quelque chose, et pouvoir le dire, le connaître, le répéter : Savez-vous le nom de cette plante ? Être au courant de quelque chose, le tenir ou le donner comme vrai, réel : Je sais qu'il voulait démissionner. Être convaincu de quelque chose, avoir dans l'esprit la connaissance, la certitude de quelque chose : Nous savons combien vous regrettez cet échec. Littéraire. Connaître la valeur, l'importance de quelque chose : Je sais mes obligations envers vous. Avoir des connaissances sur quelque chose, quelqu'un : Je sais bien des choses sur lui. Avoir une connaissance étendue d'une matière qui peut s'enseigner, se transmettre : Savoir plusieurs langues étrangères. Savoir son métier. Avoir la capacité, après étude et apprentissage, de pratiquer, d'exercer une activité : Savoir nager. Il ne sait pas jouer aux échecs. Avoir assez de talent, d'habileté, etc., pour faire telle chose : Une femme qui a su rester jeune. En parlant de quelque chose, être capable de, pouvoir faire : Un livre qui a su nous convaincre. Avoir des connaissances étendues, approfondies, avoir une grande expérience : Prendre conseil auprès de ceux qui savent. ● savoir (citations) verbe transitif (latin populaire sapere, avoir du discernement) Félix Arvers Paris 1806-Paris 1850 Le mal est sans espoir, aussi j'ai dû le taire, Et celle qui l'a fait n'en a jamais rien su. Mes heures perdues Georges Bataille Billom 1897-Paris 1962 Qu'il est beau, qu'il est sale de savoir ! L'Abbé C. Éditions de Minuit Giovanni Giacomo Casanova, dit Jean-Jacques Casanova de Seingalt Venise 1725-Dux, Bohême, 1798 Savoir mal est pire qu'ignorer. Mémoires Michel Deguy Paris 1930 L'amour se résigne à ne pas savoir. Biefs Gallimard Bernard Le Bovier de Fontenelle Rouen 1657-Paris 1757 Tout le monde ne sait pas douter : on a besoin de lumière pour y parvenir, et de force pour s'en tenir là. Réflexions sur la poétique André Gide Paris 1869-Paris 1951 L'appétit de savoir naît du doute. Cesse de croire et instruis-toi. Les Nouvelles Nourritures Gallimard Remy de Gourmont Bazoches-au-Houlme, Orne, 1858-Paris 1915 Savoir ce que tout le monde sait, c'est ne rien savoir. Promenades philosophiques Mercure de France Sacha Guitry Saint-Pétersbourg 1885-Paris 1957 Le peu que je sais, c'est à mon ignorance que je le dois. Toutes Réflexions faites Éditions de l'Élan Marcel Jouhandeau Guéret 1888-Rueil-Malmaison 1979 Savoir aimer, c'est ne pas aimer. Aimer, c'est ne pas savoir. Algèbre des valeurs morales Gallimard Jean-Baptiste Poquelin, dit Molière Paris 1622-Paris 1673 La faiblesse humaine est d'avoir Des curiosités d'apprendre Ce qu'on ne voudrait pas savoir. Amphitryon, II, 3, Sosie Henri Monnier Paris 1799-Paris 1877 On ne va jamais plus loin que lorsqu'on ne sait pas où l'on va, a dit un homme politique célèbre. Mémoires de M. Joseph Prudhomme Michel Eyquem de Montaigne château de Montaigne, aujourd'hui commune de Saint-Michel-de-Montaigne, Dordogne, 1533-château de Montaigne, aujourd'hui commune de Saint-Michel-de-Montaigne, Dordogne, 1592 Savoir par cœur n'est pas savoir : c'est tenir ce qu'on a donné en garde à sa mémoire. Essais, I, 26 Gérard Labrunie, dit Gérard de Nerval Paris 1808-Paris 1855 Il voulait tout savoir mais il n'a rien connu. Poésies diverses, Épitaphe Blaise Pascal Clermont, aujourd'hui Clermont-Ferrand, 1623-Paris 1662 Il est bien plus beau de savoir quelque chose de tout que de savoir tout d'une chose ; cette universalité est la plus belle. Pensées, 37 Commentaire Chaque citation des Pensées porte en référence un numéro. Celui-ci est le numéro que porte dans l'édition Brunschvicg — laquelle demeure aujourd'hui la plus généralement répandue — le fragment d'où la citation est tirée. Pablo Ruiz Picasso Málaga 1881-Mougins 1973 Si l'on sait exactement ce qu'on va faire, à quoi bon le faire ? Conversations avec Christian Zervos, 1935 in Cahiers d'art Marcel Proust Paris 1871-Paris 1922 […] Ce qu'on sait n'est pas à soi […]. À la recherche du temps perdu, À l'ombre des jeunes filles en fleurs Gallimard Ernest Renan Tréguier 1823-Paris 1892 La vérité sera un jour la force. « Savoir, c'est pouvoir » est le plus beau mot qu'on ait dit. Dialogues et fragments philosophiques, III, Rêves Lévy Jean-Jacques Rousseau Genève 1712-Ermenonville, 1778 Généralement, les gens qui savent peu parlent beaucoup, et les gens qui savent beaucoup parlent peu. Émile ou De l'éducation Jean Pic de La Mirandole, en italien Giovanni Pico Della Mirandola Mirandola, province de Modène, 1463-Florence 1494 Sur toute chose qu'on puisse savoir. De omni re scibili. Commentaire Devise de Pic de La Mirandole, savant universel qui se déclarait capable de tenir tête à quiconque « de omni re scibili ». On fit à sa devise une addition ironique : « … et quibusdam aliis » — et sur quelques autres. Platon Athènes vers 427-Athènes vers 348 ou 347 avant J.-C. Ô humains, celui-là, parmi vous, est le plus savant, qui sait, comme Socrate, qu'en fin de compte, son savoir est nul. Apologie de Socrate, 23b (traduction M. Croiset) Commentaire Le Banquet : Alcibiade parlant de Socrate : « Son ignorance est générale et il n'y a rien qu'il sache, du moins son apparence est telle. » Ibidem : « Avec les gens il passe toute sa vie à faire le naïf et l'enfant. » Voir aussi Le Sophiste : « Ne point savoir et croire qu'on sait : c'est bien là la cause de toutes les erreurs auxquelles notre pensée est sujette. » Farid al-Din Attar Nichapur vers 1119-vers 1190 ou vers 1220 Tout ce que tu as su ou vu n'est ni ce que tu as su ni ce que tu as vu. Langage des oiseaux Luís Vaz de Camões Lisbonne 1524 ?-Lisbonne 1580 Un je ne sais quoi, qui surgit je ne sais d'où, vient je ne sais comment, et fait mal je ne sais pourquoi. Um não sei quê, que nasce não sei onde, Vem não sei como, e dói não sei porquê. Sonnets, 12 Pie II (Enea Silvio Piccolomini) Corsignano, aujourd'hui Pienza, 1405-Ancône 1464 Plus on sait, plus on doute. Chi più sa, più dubita. Lev [en français Léon] Nikolaïevitch, comte Tolstoï Iasnaïa Poliana, gouvernement de Toula, 1828-Astapovo, gouvernement de Riazan, 1910 Nous ne savons rien. Le seul espoir de savoir, c'est de savoir tous ensemble, c'est de fondre toutes les classes dans le savoir et la science. Carnet, 28 mars 1861 ● savoir (difficultés) verbe transitif (latin populaire sapere, avoir du discernement) → savoirConjugaison À l'exception de la troisième personne du singulier (qu'il, qu'elle sÛt), les formes du subjonctif imparfait (que je susse, que nous sussions) sont très rarement employées à cause de leur homophonie avec plusieurs formes de la conjugaison du verbe sucer. Emploi 1. Le verbe savoir n'admet comme sujet qu'un nom de personne, sauf s'il y a métaphore, métonymie ou personnification : le pays savait que tout espoir était perdu (le pays signifie ici non pas « le territoire national » mais « la population du pays »). 2. Je ne saurais = je ne peux. Le verbe savoir employé au conditionnel et à la forme négative (avec omission de pas) est un équivalent atténué de pouvoir : on ne saurait accepter une telle situation (= on ne peut l'accepter). 3. À savoir loc. conjonctive = c'est-à-dire. De nombreux chercheurs, à savoir des historiens et des linguistes, ont participé à ce projet. Recommandation Éviter d'employer savoir seul pour à savoir. 4. Que je sache = dans la mesure où je peux en juger. Ce tour s'utilise soit en incise, soit en tête ou fin de phrase, et seulement avec une proposition négative. Il n'a rien fait de si terrible, que je sache. Remarque L'emploi à une autre personne que la première personne du singulier (que tu saches, que nous sachions, etc.) est rare et littéraire. Sens 1. Savoir gré de (+ infinitif), savoir gré de ce que (+ indicatif) = être satisfait, reconnaissant de. Je vous sais gré de ce que vous êtes intervenu en ma faveur. Nous vous saurions gré de répondre au plus vite (et non nous vous serions gré). 2. Savoir qqn, qqch = avoir connaissance de l'existence de qqn, de qqch. « Je sais un paysan qu'on appelait Gros-Pierrre »(Molière). Cet emploi est aujourd'hui sorti de l'usage. Registre Je ne sache pas que (+ subjonctif), exprimant une affirmation atténuée, est du registre littéraire. « Je ne sache pas que vous ayez rien à vous reprocher »(Marivaux). Je ne sache personne, rien... qui, que (+ subjonctif), tour très proche du précédent, relève également de la langue littéraire : je ne sache rien qui vaille un tel sacrifice. ● savoir (expressions) verbe transitif (latin populaire sapere, avoir du discernement) (À) savoir, introduit un terme explicatif, une énumération ; c'est-à-dire : Il manque l'essentiel, à savoir les capitaux. Dieu sait que, si, combien, formules employées pour renforcer une affirmation. Dieu seul le sait, les raisons, les causes sont obscures, inconnues. En savoir quelque chose, l'avoir (malheureusement) éprouvé, en avoir fait l'expérience. Faire savoir quelque chose à quelqu'un, l'en informer : Veuillez me faire savoir les raisons de votre absence. Je ne sais qui, quoi, formules dubitatives indiquant une personne ou un objet indéterminés, que l'on ne peut dénommer avec précision. Ne pas (plus) savoir ce qu'on dit, ce qu'on fait, ne pas (plus) contrôler ses paroles, ses actions. Ne pas savoir ce qu'on veut, être indécis ou versatile. Ne pas vouloir le savoir, ne pas vouloir entrer dans les raisons de quelqu'un, refuser toute discussion. Ne rien vouloir savoir, s'obstiner, persister dans sa décision. Pas que je sache, forme de réponse négative dont on ne peut pas affirmer qu'elle est sûre. Qui sait ?, ce n'est pas impossible ; peut-être. Qui vous savez, la chose que vous savez, désignent par allusion quelqu'un ou quelque chose que l'interlocuteur connaît bien, auxquels il pense. Familier. Sans le savoir, sans en être conscient. Savez-vous, sais-tu, synonyme courant en Belgique de n'est-ce pas. Savoir vivre, être bien élevé. Familier. Va savoir, on ne sait rien de certain, on ne peut rien affirmer. ● savoir (homonymes) verbe transitif (latin populaire sapere, avoir du discernement) ● savoir (synonymes) verbe transitif (latin populaire sapere, avoir du discernement) Avoir appris quelque chose, et pouvoir le dire, le connaître, le...
Synonymes :
- connaître
Être au courant de quelque chose, le tenir ou le donner...
Synonymes :
- être au courant de
- être au fait de
Contraires :
- ignorer
Avoir une connaissance étendue d'une matière qui peut s'enseigner, se...
Synonymes :
- connaître
Faire savoir quelque chose à quelqu'un
Synonymes :
- annoncer
- avertir
- aviser de
- informer
● savoir
nom masculin
Ensemble cohérent de connaissances acquises au contact de la réalité ou par l'étude.
● savoir (citations)
nom masculin
Georges Bataille
Billom 1897-Paris 1962
Du savoir extrême à la connaissance vulgaire, la différence est nulle.
Méthode de méditation
Gallimard
Charles Baudelaire
Paris 1821-Paris 1867
Amer savoir, celui qu'on tire du voyage !
Les Fleurs du Mal, le Voyage
Pierre Augustin Caron de Beaumarchais
Paris 1732-Paris 1799
Pour gagner du bien, le savoir-faire vaut mieux que le savoir.
Le Mariage de Figaro, V, 3
Nicolas Boileau, dit Boileau-Despréaux
Paris 1636-Paris 1711
L'ignorance vaut mieux qu'un savoir affecté.
Épîtres
Jean Henri Casimir Fabre
Saint-Léon, Aveyron, 1823-Sérignan-du-Comtat 1915
Le savoir humain sera rayé des archives du monde avant que nous ayons le dernier mot d'un moucheron.
Souvenirs entomologiques
Delagrave
Jean-Baptiste Poquelin, dit Molière
Paris 1622-Paris 1673
Et, dans ce vain savoir qu'on va chercher si loin,
On ne sait comme va mon pot, dont j'ai besoin.
Les Femmes savantes, II, 7, Chrysale
Michel Eyquem de Montaigne
château de Montaigne, aujourd'hui commune de Saint-Michel-de-Montaigne, Dordogne, 1533-château de Montaigne, aujourd'hui commune de Saint-Michel-de-Montaigne, Dordogne, 1592
Quand bien nous pourrions être savants du savoir d'autrui, au moins sages ne pouvons-nous être que de notre propre sagesse.
Essais, I, 15
Luc de Clapiers, marquis de Vauvenargues
Aix-en-Provence 1715-Paris 1747
Ni l'ignorance n'est défaut d'esprit, ni le savoir n'est preuve de génie.
Réflexions et Maximes
Héraclite d'Éphèse
vers 550-vers 480 avant J.-C.
Un savoir multiple n'enseigne pas la sagesse.
Fragment, 40 (traduction Battistini)
Bible
La crainte de Yahvé, principe de savoir.
Ancien Testament, Livre des Proverbes I, 7
Commentaire
Traduction plus répandue : « La crainte du Seigneur est le commencement de la sagesse. »
Citation empruntée à la « Bible de Jérusalem ».
Albert Einstein
Ulm 1879-Princeton 1955
L'imagination est plus importante que le savoir.
Imagination is more important than knowledge.
On Science
Herbert Spencer
Derby 1820-Brighton 1903
La science est du savoir organisé.
Science is organized knowledge.
Education, 2
● savoir (synonymes)
nom masculin
Ensemble cohérent de connaissances acquises au contact de la réalité...
Synonymes :
- bagage
- culture
- érudition
- science
Contraires :
savoir
n. m. Ensemble des connaissances acquises par l'apprentissage ou l'expérience.
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savoir
v. tr.
rI./r
d1./d Connaître, être informé de. Tu sais la nouvelle?
|| (Avec une subordonnée.) On ne savait pas qui était son père. Reste à savoir s'il en a vraiment envie.
|| v. Pron. (Passif) Tout finit par se savoir, par être su, connu.
d2./d Avoir présent dans la mémoire. Il sait sa leçon par coeur.
d3./d Avoir une bonne connaissance de. Elle croit tout savoir.
|| (S. comp.) Si jeunesse savait.
d4./d (Avec un inf.) être capable de. Un ami qui sait écouter.
|| (Au conditionnel, et avec une nég.) Pouvoir. On ne saurait tout prévoir. ça ne saurait être pire.
— (Belgique) Pouvoir, avoir la faculté de, être en état de.
d5./d Avoir conscience de. Il ne savait plus ce qu'il faisait.
rII./r Loc. à savoir ou savoir: c'est-à-dire.
|| Que je sache: pour autant que je puisse en juger.
|| Savoir si: on peut se demander si. Il est parti, savoir s'il arrivera!
|| (Renforçant une affirmation.) Je crois qu'il est sincère, tu sais.
|| Ne rien vouloir savoir: se refuser à faire qqch.
|| Il est sorti avec je ne sais qui, pour je ne sais combien de temps.
— Un je ne sais quoi: qqch d'indéfinissable.
I.
⇒SAVOIR1, verbe trans.
I. — [Verbe de sens plein; le suj. désigne le plus souvent une pers. phys. ou morale, douée de conscience; le compl. d'obj. premier désigne un objet de connaissance qui est concr. ou abstr. (le plus souvent abstr.), existant ou non, prés. ou absent]
A. — [L'accent est mis sur le contenu du savoir]
1. a) Appréhender par l'esprit, avoir la connaissance complète de, pouvoir affirmer l'existence de. Savoir le pourquoi et le comment d'une chose. Quand j'ouvre ce livre, n'ai-je pas la conscience de l'ouvrir et la conscience de pouvoir ne pas l'ouvrir? Quand je regarde, ne sais-je pas à la fois que je regarde et que je puis ne pas regarder? (COUSIN, Hist. philos. XVIIIe s., t. 2, 1829, p. 500). Ne parlez point comme ceux qui n'ont pas de foi. Nous savons avec assurance que Dieu existe, Et que l'homme, ou non, le confesse du vent de sa bouche (CLAUDEL, Violaine, 1901, IV, p. 647). V. ignorer ex. 1.
— P. anal. Appréhender par l'instinct. La brute sait tout ce qu'on affirme que vous ne savez pas, et elle n'a besoin que de l'instinct pour le savoir (LAMENNAIS, Paroles croyant, 1834, p. 175).
— Absol. V. deviner B 2 b ex. de Ramuz.
— Empl. pronom. passif. V. inachevé ex. 2.
— PHILOS. Appréhender par un acte cognitif, à la fois conceptuellement et en organisant un système rationnel. V. croire ex. 3, mortel ex. 3, philosophe I A 2 a ex. de Valéry.
♦ Tout savoir. Posséder la science universelle. L'homme est si faible que, lorsqu'un de ses semblables se présente disant: « Je peux tout », comme Bonaparte, ou: « Je sais tout », comme Mahomet, il est vainqueur et a déjà à moitié réussi (VIGNY, Journal poète, 1829, p. 898). V. aigle ex. 16, philosophe ex. 1.
♦ Que sais-je? [D'apr. l'aphorisme de Montaigne servant à mettre en question l'ensemble des connaissances et à poser le doute philosophique] Empl. subst. masc. Le doute philosophique:
• 1. — Tu me fais douter de la puissance de Dieu (...). Notre cher Rabelais a résolu cette philosophie par (...) Peut-être, d'où Montaigne a pris son Que sais-je? Encore, ces derniers mots de la science morale ne sont-ils guère que l'exclamation de Pyrrhon restant entre le bien et le mal, comme l'âne de Buridan entre deux mesures d'avoine.
BALZAC, Peau chagr., 1831, p. 78.
♦ Savoir que + verbe savoir. Je sais que je ne sais rien, que je ne sais pas. Après les avoir lus [des romans] on revient à dire avec Socrate:Ce que je sais, c'est que je ne sais rien (SÉNAC DE MEILHAN, Émigré, 1797, p. 1757).
♦ Absol. Le vrai savoir ne revient jamais à quelque petite chose tout près des yeux; car savoir c'est comprendre comment la moindre chose est liée au tout (ALAIN, Propos, 1911, p. 114).
Savoir qu'on sait. « Savoir, c'est savoir qu'on sait ». Ainsi aurons-nous défini la réflexion ou conscience positionnelle de la conscience (SARTRE, Être et Néant, 1943, p. 18).
♦ Proverbe. Savoir, c'est pouvoir [d'apr. l'aphorisme trad. de Bacon, signifiant que les finalités sociopolitiques du pouvoir vont de pair avec le développement de la connaissance scientifique en Occident (d'apr. REY-CHANTR. Expr. 1979)].
b) Avoir dans l'esprit, avoir la révélation de l'existence, de la réalité, de l'identité, de la vérité de quelque chose; avoir présent à l'esprit un ensemble de connaissances rationnelles (concepts, idées, notions, images, représentations, affects), acquises par l'étude et par la réflexion, et constituant une synthèse ordonnée sur un objet de connaissance. Synon. connaître (v. ce mot II A). Savoir qqc. par intuition, par raisonnement, par induction, parfaitement, à fond, par expérience, avec exactitude, à n'en pas douter, de façon certaine. V. abstrait ex. 10, apprendre ex. 35, 36, certitude ex. 27.
— [Le compl. d'obj. est le plus souvent un indéterm., un indéf., un pron. dém.] Savoir qqc.; ne pas savoir grand' chose; savoir une chose; (croire, vouloir) tout savoir. Les enfants (...) ça doit obéir aux parents!... nos pères et nos mères savent mieux que nous ce qui nous convient (DUMAS père, L. Bernard, 1843, II, 8, p. 237):
• 2. Je ne veux plus rien savoir d'autre, ni si les champs fleurissent, ni ce qu'il adviendra du simulacre humain... Je ne veux pas le savoir. Ou plutôt c'est parce que j'ai une vision trop exacte de cet avenir que je prétends m'anéantir dans la seule destinée qui en vaille la peine: une nature insondée et vierge, un amour mystérieux.
BENOIT, Atlant., 1919, p. 311.
♦ Ne rien savoir. J'ai su que je ne savais rien et ceci, mon secret: « le non-savoir communique l'extase » (G. BATAILLE, Exp. int., 1943, p. 95).
— [Le compl. d'obj. est un subst. abstr.] Savoir l'existence de, les circonstances de, le détail de, les particularités de (qqc.); savoir la vérité; savoir un secret. Que Magdeleine ignorerait sa mort ou du moins n'en saurait pas la cause; que cette mort n'interromperait pas d'une minute ses plaisirs. (...) il s'indigna contre elle, pensant qu'il lui avait sacrifié toute sa vie (KARR, Sous tilleuls, 1832, p. 170).
♦ (La question de) savoir si. La question à l'étude, en débat, porte sur. Et dans ce moment, la question entre nous se réduit à savoir si je vous présente des garanties suffisantes pour la somme que je viens vous emprunter (BALZAC, Gobseck, 1830, p. 410). Il s'agit de savoir si... (ou, ... ou non). V. apprendre ex. 8.
— [Le compl. d'obj. est un subst. concr.] Savoir le nom, l'âge, l'adresse de qqn; savoir l'heure, la date, le jour; savoir qqc. de qqn. V. adresse1 ex. 10.
♦ Littér. [Substitué à connaître, à valeur expressive] Je sais des chants de tous les pays. J'en sais qui sont doux comme le bruit des sources, d'autres qui sont terribles comme l'approche du tonnerre (, Aphrodite, 1896, p. 56). V. creux II B 2 a ex. de Sainte-Beuve, immortel D 2 ex. de Musset.
♦ Loc. verb. Savoir le fin du fin (v. fin2 I B), savoir le fin fond de l'affaire (v. fin2 I A), savoir le fin mot de l'histoire (v. fin2 I A). V. fin2 I B ex. de Stendhal. Savoir le (vrai) mot de qqc. V. mot I A 2 c.
Loc. proverbiale, fam. Plaider le faux pour savoir le vrai. V. plaider II B 3.
— Littér. [Le compl. d'obj. est un subst. abstr.] Connaître de façon rationnelle en ayant dans l'esprit un système organisé notionnel et psychologique. Synon. connaître. Les femmes de Myrina, la Tanagra d'Asie Mineure, savaient leur puissance d'amour (FAURE, Hist. art, 1909, p. 120).
♦ En savoir. En savoir des choses; en savoir assez, beaucoup, plus que qqn; en savoir long (sur qqn, sur qqc.) (v. long II B 1, en2 II B 2 c). Il n'avait pas non plus très envie d'en savoir davantage sur leur compte à ces territoires. Les arbres, la forêt, après tout, on sait ce que c'est, on les voit très bien de loin (CÉLINE, Voyage, 1932, p. 197). V. en2 ex. 13.
♦ Savoir qqc. de qqc., de qqn, sur qqc., sur qqn, au sujet de qqc., de qqn. Voilà bien les gens littéraires et de cabinet, qui ne savent rien de la campagne; c'est un pivert qui fait son trou (BALZAC, Paysans, 1850, p. 364).
— [Suivi d'une complét. ou d'une prop. interr. indir.] Savoir que; il faut savoir que; vous devez savoir que; j'aurais dû savoir que; savoir ce qu'on doit faire, ce que c'est (que qqc.), comment cela se passe, où l'on est, où l'on va, où l'on en est, en quoi consiste; sans (trop) savoir où, pourquoi; aller, avancer, marcher sans savoir où. V. ce1 ex. 15, combien ex. 10, jamais I B 3 ex. de Rolland:
• 3. GIACCOMO: Je sais que lorsque les vents du matin tournent avec le soleil, je sais que la pluie approche. Et Savonarole le sait aussi. UDERIGO: Pas besoin d'être un prophète pour savoir d'où viennent les vents de pluie.
SALACROU, Terre ronde, 1938, III, 2, p. 240.
♦ Loc. verb. Savoir à quoi s'en tenir; savoir de quoi il retourne (v. retourner); savoir ce que parler veut dire (v. dire1 III A 3 et ex. 39).
♦ Expr. Quand tu fais l'aumône, que ta main gauche ne sache pas ce que fait ta main droite (v. droit1 A 1 loc.).
— [En constr. de prop. imbriquées] Dont on sait que; que l'on sait que. V. dont III C rem. 2 b. Et dans la rime, un abus que je sais Combien il pèse et combien il encombre, Mais indispensable à notre art français (VERLAINE, Œuvres compl., t. 3, Épigr., 1894, p. 221).
♦ Savoir + prop. interr. indir. avec un inf. délibératif. Ne pas savoir où s'arrêter; savoir à qui s'adresser, à qui parler. V. quand I B 1 ex. de Chateaubriand.
— [En interr. indir.; posant une alternative] Savoir si. Je ne sais pas du tout encore si je vais vers une convalescence (GIDE, Journal, 1949, p. 340). V. jamais I B 3 ex. de Zola.
♦ Savoir si... ou..., si... ou non. Son âge était un problème: on ne pouvait pas savoir s'il était vieux avant le temps, ou s'il avait ménagé sa jeunesse (BALZAC, Gobseck, 1830, p. 383).
♦ [À la forme nég., en nég. double] Il était déjà si malade que je ne sais pas s'il n'est pas mort (R. BAZIN, Blé, 1907, p. 326).
— [En cont. exclam., à forte valeur affective; en réaction devant une pers. qui atermoie] Fam. Faudrait savoir!:
• 4. ... il leur donnerait s'ils le souhaitaient sa parole d'honneur, mais (...) une parole d'honneur n'administre pas mieux la preuve qu'une simple négation et (...) il voyait bien qu'ils étaient résolus à lui refuser leur confiance. — Il faut pourtant savoir! s'écria Rosenthal.
NIZAN, Conspir., 1938, p. 179.
— [Avec le, le savoir porte sur la phrase précédente] Mais nous sommes désormais les plus forts... Nous savons ce qu'elle fait et elle ignore que nous le savons (G. LEROUX, Roul. tsar, 1912, p. 33).
— Absol. Le besoin, le désir, l'ardeur, la passion de savoir; avoir besoin, être avide, être curieux de savoir. Ils sont divisés en deux castes, les akkals ou ceux qui savent, les djahels ou ceux qui ignorent (LAMART., Voy. Orient, t. 2, 1835, p. 112).
♦ [À la forme nég.] Synon. de ignorer. Je ne sais pas. V. dieu 1re Section I B 1 ex. de Arland. Fam. J' sais pas; sais pas. V. je I D 4 a ex. de Martin du Gard.
SYNT. Savoir qqc. à fond, superficiellement, en gros, en détail, exactement, parfaitement, d'avance, à l'avance, précisément, avec précision, avec certitude, par soi-même, par expérience, d'expérience.
2. [Le compl. d'obj. désigne un élém. d'inform.] Être au courant de, être informé de et/ou sur l'existence ou la nature de quelqu'un ou de quelque chose. Synon. avoir appris (v. apprendre), avoir connaissance de, connaître (v. ce mot II B 1), être averti de, être instruit de, être au fait de. Synon. vx ou littér. connaître (v. ce mot II B 1). « Je t'accompagne un bout de chemin, cher », dit Paterson, quand il sut que Jacques allait chez Meynestrel (MARTIN DU G., Thib., Été 14, 1936, p. 238):
• 5. Hier, un homme qui passait nous dit qu'il y avait eu des explosions, des morts, des troubles affreux. Nous ne le savons pas trop; mais mon père, qui vit la dépêche à Cahuzac, nous a assuré que c'était vrai.
E. DE GUÉRIN, Lettres, 1835, p. 94.
♦ Savoir si. Allo!... Ici le commissaire Maigret... Non, il ne s'agit pas d'une enquête... Je voudrais seulement savoir si le docteur Bellamy n'est pas chez vous (SIMENON, Vac. Maigret, 1948, p. 82).
♦ N'en rien savoir. — Et vous revenez d'excursion? — Non, j'y vais. — Et où allez-vous? — Je n'en sais rien. Je ne connais pas les environs (...). Que me conseillez-vous? (BILLY, Introïbo, 1939, p. 7).
♦ Ne savoir rien de rien. Être tout à fait ignorant; ignorer tout de quelque chose. Synon. n'en savoir rien. Aux temps où la planète à la dérive (...) Ne savait rien d'rien (LAFORGUE, Poés., 1887, p. 243).
♦ Région. (Belgique). Ne savoir de rien. ,,Ne savoir rien de rien. Employé surtout par les bilingues populaires, calqué sur le néerl. (...) Moi, je ne sais de rien`` (BAET. 1971, p. 421).
♦ Absol. [Dans une réponse] Savoir; ne pas savoir. Quelle est cette église? dis-je à mon guide, qui s'était arrêté pour reprendre haleine. Il me répondit par cet expressif haussement d'épaules qui signifie:Je ne sais pas (HUGO, Rhin, 1842, p. 292). — (...) Sa couronne lui a été volée... — Par celui à qui elle était confiée... Oui... Je sais!... — Tiens!... — fit Grand-père étonné — comment sais-tu ça?... — Par des livres (GYP, Souv. pte fille, 1928, p. 13).
SYNT. Savoir qqc.; savoir que + ind.; savoir qqc. de bonne source, de bonne part (v. part1 vx), de source certaine, de source autorisée, de science certaine; savoir qqc. de la bouche de qqn, par ouï-dire; savoir qqc. par le détail, par le menu; vous savez la nouvelle?, vouloir savoir des nouvelles de qqn, comment va qqn, ce que devient qqn; vous allez bientôt, enfin le savoir; j'ai su par hasard que; être avide, curieux de savoir qqc.; savoir ce qui se passe; (tout) ce qu'il faut savoir (sur qqc., pour qqc.); c'est bon, utile à savoir; chercher à savoir; tâcher de savoir; il tarde à qqn de savoir (qqc.); ne rien savoir (synon. n'avoir ni vent ni nouvelle (v. nouvelle1), ne savoir rien de rien).
— Loc. verb., au fig., fam. Savoir ce que qqn a dans le ventre.
— Loc. verb. (servant à maintenir ou à établir la communication avec l'interlocuteur)
♦ Fam. Vous savez ou vous ne savez pas (que). Apprenez que, au cas où vous n'en seriez pas informé. (Dict. XXe s.).
♦ [Pour exprimer une affirm. dont qqn n'est pas sûr] Nous croyons savoir que; je crois savoir que; on croit savoir que. Apprenez que; j'ai appris que. On n'était même pas bien sûr qu'il se nommât Gutmann (...). Sur tout le reste, on croyait seulement savoir qu'il était marié et qu'il avait des enfants (ZOLA, Débâcle, 1892, p. 503).
♦ [Pour refuser de s'expliquer; avec une idée de menace] Je sais ce que je sais. J'ai mon idée là-dessus, je n'en dirai rien. Les Lorilleux, devant la prospérité du ménage, étaient devenus très aimables, faisaient un éloge outré de Gervaise, en laissant échapper de petits gestes restrictifs, des hochements de menton, des battements de paupières, comme pour ajourner leur vrai jugement. Enfin, ils savaient ce qu'ils savaient (ZOLA, Assommoir, 1877, p. 469).
♦ [Pour renforcer une affirm.] Si tu veux le savoir! Marie: Tu l'aimes donc bien? Blanche: Oui, je l'aime! Je l'adore, si tu veux le savoir! (BECQUE, Corbeaux, 1882, II, 5, p. 123).
— Absol. Qui est-ce? Je veux savoir. Tu parleras (...)! (GENEVOIX, Raboliot, 1925, p. 222).
— Faire savoir qqc. à qqn. Informer quelqu'un de quelque chose. Synon. faire assavoir (vx), faire connaître, faire part de (v. part1), avertir, communiquer, diffuser, divulguer, aviser, annoncer, apprendre, mander (littér.), dénoncer (vieilli), notifier, signifier, prévenir. Du moins je ferai savoir à qui voudra l'entendre Comment il advint qu'une âme des plus égarées (...) Revint au bercail des Innocences ignorées (VERLAINE, Œuvres compl., t. 2, Amour, 1888, p. 17).
♦ Dans la lang. épistolaire ou admin. J'ai l'honneur de vous faire savoir. [Formule de politesse empl. par un supérieur hiérarchique pour s'adresser à un inférieur] (Dict. XXe s.).
♦ Vx, DR., DIPLOM. Savoir faisons. Théodebert de Chantemerle, chevalier (...), sénéchal de Lyon, savoir faisons que: Par-devant les conseillers du roi, notaires à Lyon, soussignés (BOREL, Champavert, 1833, p. 135).
— Empl. pronom. à sens passif. Être connu de tous. Synon. vieilli être à jour. Tout se sait; tout, cela finit par se savoir; ça se saurait! Ici on se passionne pour les affaires et pour les clients! et cela commence à se savoir (BALZAC, Début vie, 1842, p. 436). Car enfin (...) si le christianisme était faux, cela se saurait (FRANCE, Révolte anges, 1914, p. 307). V. ignorer I B 2 c ex. de Musset.
3. a) Spécialement
♦ Dans l'ordre de la prescience. [Le suj. désigne Dieu, le compl. d'obj. porte sur le passé, le présent ou l'avenir] Dieu sait tout; Dieu sait mieux que nous ce que (v. dieu 2e Section II B 2 d). — Assez, dit Dieu; l'avenir ne te regarde pas: je me suis réservé la prescience. — Alors tu sais, répondit le Prince de ce monde, quel usage fera l'homme de l'intelligence que tu lui as donnée (L. MÉNARD, Rêv. païen, 1876, p. 142).
♦ Dans le domaine de la parapsychol. [Dans l'ordre de la précognition; le compl. d'obj. porte sur l'avenir] Préconnaître; deviner. Savoir l'avenir. Absol. V. baratin ex. 2, impossible ex. 2.
b) Absol. [Souvent en oppos. avec croire, sentir, agir] Avoir des connaissances rationnelles acquises par l'étude, la réflexion et l'expérience, de façon approfondie et dans des domaines étendus. Savoir, pouvoir et vouloir; appétit, besoin, désir, avidité, passion de savoir; avoir besoin de savoir; être avide, curieux de savoir. Voir, n'est-ce pas savoir?... Oh! savoir, jeune homme, n'est-ce pas jouir intuitivement? N'est-ce pas découvrir la substance même du fait et s'en emparer essentiellement? (BALZAC, Peau chagr., 1831, p. 38). V. croyance ex. 1.
— Péj. Savoir pour savoir. V. approprier ex. 10.
4. En partic. Avoir dans l'esprit de façon à pouvoir répéter, après avoir appris par l'étude, par la mémorisation, par l'instruction. Savoir son alphabet; savoir son catéchisme; savoir sa leçon, sa récitation, sa poésie, sa table de multiplication, ses verbes irréguliers, son rôle, sa partie; savoir un poème, une histoire, une chanson; savoir qqc. par cœur (v. cœur II A 3 expr.), sur le bout des doigts, du bout du doigt (v. doigt I D 2 expr. et loc.), sur l'ongle (v. ongle A 1), à moitié, parfaitement, très bien; savoir le résultat, la réponse, la recette. V. apprendre ex. 4, iota ex. 2, jamais III B 2 ex., osé ex. 4.
♦ [P. méton. du compl. d'obj.] Turenne savait et récitait Marot (SAINTE-BEUVE, Tabl. poés. fr., 1828, p. 280).
— Loc. verb., fam. Ne savoir ni A ni B (v. A1 expr.); ne savoir que son pater (v. pater1); savoir qqc. comme son pater (v. pater1); ne pas savoir le premier mot d'une chose (v. mot II B 1 b).
— Loc. verb., arg. du théâtre. Savoir son rôle au rasoir. ,,Connaître son rôle mot à mot`` (SANDRY-CARR. Th. 1963).
— Loc. verb., au fig., vx, fam. Savoir qqn par cœur, savoir qqn sur le bout du doigt. Bien connaître quelqu'un, sa nature, son caractère, son comportement habituel. [Elle] les détaillait, les prenait par tous les bouts, les savait « par cœur » (ZOLA, Ventre Paris, 1873, p. 668).
— Absol. Locke (...) prête aux philosophes spiritualistes la croyance qu'un fœtus dans le sein de sa mère sait les mathématiques, ou que nous pouvons savoir sans apprendre, c'est-à-dire, en d'autres termes, apprendre sans apprendre; et que c'est là ce que ces philosophes nomment idées innées (J. DE MAISTRE, Soirées St-Pétersb., t. 1, 1821, p. 162).
— Part. passé en empl. adj. J'aime les livres lus et sus, Je suis fou de claires paroles (VERLAINE, Œuvres compl., t. 3, Épigr., 1894, p. 261).
B. — [L'accent est mis sur la compétence partic. qui accompagne ou conditionne le savoir]
1. Être en mesure de pratiquer une activité de façon suivie; posséder la science et la pratique d'une science, un art, une technique. Savoir la musique; savoir bien, à fond, parfaitement (une discipline, un art, une science, une technique); savoir un peu d'histoire; savoir les mathématiques:
• 6. Bernardin se plaignant un jour, comme de coutume, au premier consul, du silence des savants à son égard, celui-ci lui dit: « Savez-vous le calcul différentiel, monsieur Bernardin? — Non. — Eh bien! allez l'apprendre, et vous vous répondrez à vous-même ».
LAS CASES, Mémor. Ste-Hélène, t. 1, 1823, p. 317.
♦ Savoir son métier. Bien pratiquer son métier; p. ext., être compétent dans sa partie. Synon. s'y connaître. V. métier I B ex. de Claudel et ex. 3.
— En partic. [Le compl. d'obj. désigne une lang.] Posséder la maîtrise de, pouvoir bien s'exprimer en. Savoir le latin, le grec, l'anglais, l'allemand; savoir du latin, du grec, un peu de (telle langue); savoir une langue, plusieurs langues, la langue du pays; savoir un peu, bien, passablement, parfaitement (telle langue). [Les habitants des Pays-Bas] savent les langues, ils lisent, et ils sont instruits (TAINE, Philos. art, t. 1, 1865, p. 254).
♦ (Se vanter de, se flatter de) savoir sa langue. (Prétendre) bien s'exprimer, pratiquer aisément sa langue maternelle; bien parler, bien écrire. D'ailleurs, elle se flattait de savoir sa langue; on lui faisait souvent compliment de la façon dont elle parlait de tout, même devant des enfants, sans jamais blesser la décence (ZOLA, Assommoir, 1877, p. 681).
2. Vx, littér. ou région. (notamment Centre). Être à même de retrouver ou de se servir de quelque chose parce qu'on en connaît l'existence, les caractères.
♦ [Le compl. d'obj. est un subst. abstr.] Savoir un moyen, une façon, un tour:
• 7. Le petit [boxeur] courait, frappait, sautait, grinçait, doublait la vigueur par la vitesse, savait les ruses. D'un côté le coup de poing primitif, sauvage, inculte, à l'état d'ignorance; de l'autre le coup de poing de la civilisation.
HUGO, Homme qui rit, t. 3, 1869, p. 52.
♦ Loc. verb. Savoir la carte du pays et, p. ell., savoir la carte. Bien connaître le comportement du monde, d'un groupe social, de la vie en société. P. anal. Si vous saviez votre Paris, vous connaîtriez tout ce que cet envoi accuse de soins, de courses, de peines (BALZAC, Lettres Étr., t. 2, 1844, p. 362).
♦ Dans la lang. usuelle. Savoir le chemin, savoir son chemin. Depuis un mois, des bauchetons [travailleurs de la terre argileuse] travaillaient dans une pineraie de maritimes, à la Patte d'Oie. Ils savaient tous le chemin de Bouchebrand (GENEVOIX, Raboliot, 1925, p. 302).
C. — [Souvent avec forte valeur affective, l'accent est mis sur l'expérience qui accompagne ou conditionne le savoir]
1. Connaître en vivant ou pour avoir vécu, expérimenté quelque chose. Synon. emphatiques connaître (v. ce mot II D), se rendre compte de, avoir conscience de. Son courroux, d'ordinaire, s'exhalait par des sorties violentes, et c'était là tout. Ceux qui le connaissaient le savaient bien (LAS CASES, Mémor. Ste-Hélène, t. 1, 1823, p. 370).
— [P. réf. à la conscience de soi, à la lucidité d'esprit]
♦ Loc. adv. Sans le savoir et, absol., sans savoir. Inconsciemment; sans réfléchir; sans intention. Anton. consciemment, sciemment, intentionnellement. Agir, parler sans savoir. Chapelain est burlesque avec gravité; c'est un Scarron sans le savoir (FRANCE, J. d'Arc, t. 1, 1908, p. LX).
Faire de la prose sans le savoir. V. prose B 2.
♦ Expressions
Savoir ce qu'on dit. Mesurer ses paroles; parler en connaissance de cause (souvent à la 1re pers.). Le roi: (...) je vous dis, madame, que c'est la mort qui arrive... Eh! je sais ce que je sens, et je sais ce que je dis (DUMAS père, Reine Margot, 1847, V, 1, p. 174). Ne savoir/ne plus savoir ce qu'on dit (ni ce qu'on fait). Être troublé, perdre ses moyens. Synon. s'affoler, perdre la tête (fam.), perdre la boule (fam.), la boussole (pop.), perdre ses moyens (v. moyen2). Ce silence le réveilla; il fit un brusque effort sur lui-même, et sans savoir ce qu'il disait: — Oui! répondit-il, je suis parti (BOURGES, Crépusc. dieux, 1884, p. 217). V. aussi infra III C 2 les loc. verb. interr. indir.
Savoir ce qu'on fait. Garder toute sa lucidité, ses facultés pour agir; peser, contrôler ses actes. L'architecte veut recourir à l'entrepreneur général, qui lui répond que son sous-traitant sait ce qu'il fait; qu'il ne se connaît pas, lui, entrepreneur général, en plomberie ou en serrurerie (VIOLLET-LE-DUC, Archit., 1872, p. 418). Ne savoir/ne plus savoir ce qu'on fait. V. faire1 I F 2 a et infra. Ne plus savoir où l'on en est. V. être1 ex. 78.
Savoir ce qu'on veut. Être fermement déterminé dans ses intentions, dans sa ligne de conduite, dans ses actes. V. contradictoire ex. 6. Ne/ne pas/ne plus savoir ce qu'on veut. Être indécis, hésiter; atermoyer, se montrer inconséquent. Plein de désirs contradictoires et ne sachant même plus ce qu'il voulait, il éprouvait une tristesse démesurée (FLAUB., Éduc. sent., t. 2, 1869, p. 8). V. infra III C 2 ex. 17.
♦ [À la 1re pers. du sing., à la forme nég., pour exprimer une perte de contrôle de ses moyens]
Je ne sais pas ce que j'ai. Se sentir mal, n'être pas dans son assiette. Je ne sais pas ce que j'ai, ce matin; je me sens tout chose (FEYDEAU, Dame Maxim's, 1914, I, 3, p. 7).
Je ne sais pas ce qui m'a pris. Je me suis énervé ou emporté. Tu dois m'en vouloir terriblement. Je ne sais pas ce qui m'a pris. En rentrant dans le bois avec Elsa, elle... enfin je l'ai embrassée et Anne a dû arriver à ce moment-là et... (SAGAN, Bonjour tristesse, 1954, p. 178).
Je ne sais pas ce qui me retient de. Je ne sais pas ce qui me retient d'amocher ta large petite gueugueule en or! Ça viendra (MARAN, Batouala, 1921, p. 97).
♦ [Dans des expr. ou loc. verb. à forte valeur affective, souvent en cont. exclam., à la 1re ou à la 2e pers. du sing.]
En savoir quelque chose (!) En parler en connaissance de cause, avoir expérimenté quelque chose à ses dépens, être passé par là. Les lions n'exigent pas qu'on leur parle comme à des hommes. C'est surtout avec leurs yeux qu'ils écoutent, ce dont la brute humaine est presque toujours incapable. Nous en savons quelque chose... (BLOY, Femme pauvre, 1897, p. 55).
Ne le savoir que trop (!) En avoir fait la dure expérience. V. être1 ex. 2.
Savoir ce que c'est que (qqc.), que (de + inf.) et, absol., savoir ce que c'est (!) Avoir éprouvé, expérimenté, souvent à ses dépens. V. ce1 ex. 16. À la forme nég. Ne pas savoir ce que c'est que (p. euphém., pour exprimer l'intensité de qqc.). N'avoir quasiment jamais éprouvé, subi ou ne pas subir habituellement. Vous ne savez pas ce que c'est que d'être gardien d'un feu aux îles Farsan! (...) Il n'y a au milieu qu'un chenal (...) où l'on peut passer. Le reste est plein de bancs de coraux, ou bien de volcans éteints (MILLE, Barnavaux, 1908, p. 115). Ne plus savoir ce que c'est que. Avoir perdu le sens, la notion (morale) de l'usage, la pratique de. Un libéral réfugié en Suisse dit: « Nous ne savons plus ce que c'est que la liberté civique. Nous avons cru qu'il n'y avait qu'à nous laisser diriger » (BARRÈS, Cahiers, t. 11, 1918, p. 383).
Expr. Être bien placé pour le savoir. Être à même d'en parler, pour l'avoir vécu. Avant deux ans, peut-être l'année prochaine, nous aurons la guerre, des gens bien placés pour le savoir me l'ont dit en confidence (AYMÉ, Jument, 1933, p. 93). Fam. Être (bien) payé pour le savoir, pour savoir qqc. V. payer I C 1 c. (Aller) savoir de quel bois qqn se chauffe. V. chauffer III A 1.
Si j'avais su + subst. ou que + compl. au subj. ou au cond. + princ. au cond. passé. Chère mademoiselle, disait-il, si nous avions su votre visite, nous aurions eu soin de tout préparer pour que vous soyez reçue avec les égards que nous devons à notre propriétaire (BARRÈS, Colline insp., 1913, p. 214). Si elle avait su qu'on lui ferait des difficultés, elle n'aurait pas loué cette chambre (BARBUSSE, Feu, 1916, p. 81). [P. ell. de la princ.] Si j'avais su! V. abstrait ex. 10.
Si vous saviez comme, combien, ce que...! V. comme ex. 6, 7, jamais II B 2 ex. de Claudel. Absol. Si vous saviez! Oh! si vous saviez! Je vous comprends tant! (LAFORGUE, Moral. légend., 1887, p. 32).
Vous ne pouvez pas savoir comme, combien, ce que...! Absol. Vous ne pouvez pas savoir! Nicole, suppliante: Elle n'entrera pas! Il l'embrasse encore. Ah! ce que je t'aime!... Tu ne peux pas savoir! (BOURDET, Sexe faible, 1931, I, p. 244).
Ne pas savoir que + subj. N'avoir jamais soupçonné ou expérimenté que. Je ne savais point qu'elle m'aimât (CLAUDEL, Tête d'Or, 1901, 1re part., p. 173).
2. P. ext.
a) Avoir conscience de, apprécier à sa juste valeur. Synon. connaître (v. ce mot II D). Savoir ses limites, ses faiblesses; vous ne savez pas la chance que vous avez; savoir le prix, la place, le rôle, la valeur de qqc.; savoir la valeur des choses; savoir ce qu'il en a coûté à qqn de. Je l'ai répété cent fois, Mouchette; je ne suis pas un méchant homme, je sais mon tort (BERNANOS, Soleil Satan, 1926, p. 77).
— Loc. verb. Savoir gré à qqn de qqc. V. gré D 2. Loc. proverbiale. Savoir ce qu'en vaut l'aune. V. aune D.
b) Avoir l'expérience de; apprécier et tenir compte de (dans la pratique). Savoir les usages. Il y a dans ce monde des gens pas délicats qui ne savent pas les usages (MAUPASS., Contes et nouv., t. 1, Trou, 1886, p. 578).
— Loc. verb.
♦ Savoir la vie. Avoir l'expérience du monde, de la vie humaine. C'est vrai que je vis d'une manière très indépendante, et que je travaille... Mais, tout de même, vous savez assez la vie pour comprendre qu'il y a des heures pas drôles (COLETTE, Naiss. jour, 1928, p. 37).
3. a) Avoir la conscience morale de, apprécier et respecter dans le comportement. Synon. connaître (v. ce mot II E). Savoir ses obligations. Et si, ce soir, j'oubliais, aux premières notes du Ramble, de jouer mon rôle, le colonel me dirait: « Allons, messiou, allons », en esquissant des jongleries, mais je sais mes devoirs et je n'oublierai pas (MAUROIS, Sil. Bramble, 1918, p. 42).
— Locutions
♦ (Je ne) veux pas le savoir! (fam.). Je refuse de reconnaître vos objections comme plausibles, aucune de vos excuses ne tient comme argument. Se lever, N'gakoura! pourquoi se lever? Il ne voulait même pas le savoir, dédaigneux qu'il était des résolutions simples à l'excès ou à l'excès compliquées (MARAN, Batouala, 1921, p. 20).
♦ N'en rien vouloir savoir. Refuser d'écouter les objections, les conseils de quelqu'un; rester ferme et buté sur ses positions. David lui avait annoncé que des camions allemands viendraient enlever la marchandise (...). — Je ne veux pas! Je ne veux rien savoir! je ne tiens pas à me faire fusiller! (VAN DER MEERSCH, Invas. 14, 1935, p. 150).
b) Absol. [Dans des loc. verb. et expr.] Avoir de la sagesse pratique, morale et intellectuelle, acquise par l'expérience de la vie et par la connaissance du monde.
— Loc. verb. proverbiale. Si jeunesse savait, si vieillesse pouvait. V. jeunesse III A. Pop. C'est jeune et ça ne sait pas. V. jeune I B 1 b.
D. — [Constr. le plus souvent avec l'attribut de l'objet; l'accent est mis sur les qualités, les caractéristiques portées à l'objet du savoir] Avoir la révélation de la réalité d'un caractère que l'on attribue à quelqu'un ou à quelque chose, le mode d'acquisition du savoir étant inductif ou déductif.
1. a) [Le compl. d'obj., qqn ou qqc., est suivi d'un attribut adj. ou d'un compl. circ. exprimant le caractère connu] Synon. connaître (v. ce mot III C). Savoir qqn heureux, malheureux, malade, en bonne santé, à l'abri, en bonnes mains, en sûreté, près de qqn. Nous ne voyons pas plus de courage à s'exposer à un danger auquel on ne croit pas, qu'à mettre le pied sur un plancher que l'on sait ou que l'on croit, ce qui est la même chose, parfaitement solide (KARR, Sous tilleuls, 1832, p. 157).
— Empl. pronom. réfl. Se savoir faible, fragile, aimé (de qqn). Essentiellement nous sommes tristes là où nous nous sentons et nous savons vulnérables (DU BOS, Journal, 1924, p. 79).
b) ) Littér. [Le compl. d'obj., déterminé ou non, est spécifié par un qualificatif ou un compl. circ.] À dix minutes de marche, il sait un endroit certainement plein de camarades (BARRÈS, Barbares, 1888, p. 252).
) Dans la lang. usuelle. [Le compl. d'obj. est le suj. de l'inf.] Un petit nombre d'individus que, par expérience, nous savons être des niais, des fumistes ou des intrigants (BRETON, Manif. Surréal., 2e Manif., 1930, p. 129).
Rem. Tour en concurrence avec la sub. complexe qui... que, que... que.
— Empl. pronom. réfl. V. agir ex. 3.
2. [Avec ell. du verbe avoir] Savoir qqc. à qqn. Synon. plus usuel connaître (v. ce mot II B 3). Savoir à qqn des amis; savoir à qqn des opinions, des qualités, des défauts, tel talent. Pour la correspondance, à l'heure actuelle je suis réduit au choix de Constance Garnett et aux quelques additions de Gerhardi, mais qui, avec le scrupule que je leur sais à tous deux, lorsque Tchekhov est en cause, doit contenir l'essentiel (DU BOS, Journal, 1924, p. 129).
— Empl. pronom. réfl. indir. Se savoir des défauts. Elle ne se savait pas une telle curiosité de ce que devenait ce malheureux, qui s'était si mal conduit avec elle (ZOLA, Assommoir, 1877, p. 549).
II. — [(Semi-)auxil. suivi d'un inf., servant à exprimer la modalisation assertive]
A. — (Être en état de) pouvoir pratiquer une activité suivie, grâce à l'acquisition, par l'étude, par l'application, de connaissances théoriques et pratiques, et à la suite d'une opération intellectuelle; être capable de. Le greffier du tribunal dressera procès-verbal, qui sera signé (...) par les parties (à moins qu'elles ne déclarent ne savoir ou ne pouvoir signer, auquel cas il en sera fait mention) (Code civil, 1804, art. 287, p. 54).
SYNT. Savoir lire/lire et écrire/lire, écrire et compter; ne savoir ni lire ni écrire; savoir parler, marcher, nager, danser, conduire, jouer de (+ n. d'instrument), jouer au(x)/à la (+ n. de jeu), faire du/de la (+ n. de jeu, d'instrument), faire du vélo, de la voile, du ski, du piano; savoir parler anglais, l'anglais.
— En partic. Être en mesure de pratiquer une profession, d'exécuter un travail à la suite d'un apprentissage, d'une expérience, et d'une habileté naturelle ou acquise. Savoir coudre, faire la cuisine. Quelques-uns étaient chaussés avec ces sabots que les paysans de la Bretagne savent faire eux-mêmes (BALZAC, Chouans, 1829, p. 5).
B. — 1. Être capable de faire telle chose, d'avoir tel comportement par compétence, par habileté naturelle ou acquise. Savoir bien s'exprimer; savoir s'habiller, se maquiller; savoir plaire, obéir, se défendre, venir à bout de qqc.; savoir acheter, choisir, distinguer qqc., reconnaître qqn, qqc. Il lui semblait qu'il avait appris le métier de prêtre et qu'il saurait l'exercer (QUEFFÉLEC, Recteur, 1944, p. 20). V. métier I D ex. de Baudelaire.
— Loc. verb.
♦ Savoir s'y prendre. Le tout est de savoir s'y prendre: une main serrée à propos, un regard lancé en temps et lieu, un soupir bien appliqué, vous avancent souvent beaucoup dans une intrigue d'amour (JANIN, Âne mort, 1829, p. 37).
♦ Savoir y faire (fam.). V. faire1 II B 1.
— Loc. proverbiales
♦ Savoir hurler avec les loups. V. hurler I B 1.
2. En partic. Être en mesure d'accomplir quelque chose à la perfection, selon les règles de l'art. Savoir recevoir; savoir se tenir dans le monde; savoir manger; savoir apprécier les bonnes choses. Rien de plus difficile, en effet, que de savoir boire, reprit le pédant Goëllo (STENDHAL, L. Leuwen, t. 2, 1835, p. 111).
♦ Savoir vivre. Avoir envers les autres un comportement plein d'égards et d'attentions comme il convient dans la vie en société, en respectant les règles de la politesse, des bons usages de la vie sociale. Un visiteur qui sait vivre reste debout jusqu'à ce qu'on lui indique une place (LOWIE, Anthropol. cult., trad. par E. Métraux, 1936, p. 301).
C. — 1. Se montrer capable, dans une circonstance donnée, d'accomplir un acte d'ordre moral, grâce à une aptitude intérieure. Synon. avoir l'esprit de. Savoir dire non; savoir se taire; savoir écouter; savoir faire des sacrifices, renoncer à qqc., se restreindre, se modérer, se priver; savoir tenir sa langue; savoir unir, allier qqc. à qqc. C'est un talent que de savoir vieillir; il faut l'apprendre, sous peine d'être un jour insupportable ou ridicule (JOUY, Hermite, t. 3, 1813, p. 217). V. mesure ex. 5.
— Loc. proverbiales
♦ Entre deux maux il faut (savoir) choisir le moindre. V. mal3 II A 1.
♦ Tout vient à point à qui peut/sait attendre. V. attendre II B 1 c.
— Loc. verb., néol. Savoir prendre le virage.
— [À la forme nég.] Ne pas savoir + inf. Être incapable de; n'être pas dans son caractère, dans sa nature, dans ses habitudes de. Synon. ne jamais (faire qqc.). Ne pas savoir mentir, avoir de la rancune. Le vieux Bob a fait de cette tour son cabinet d'études. C'est dommage, car nous aurions eu là une magnifique salle à manger... Mais je n'ai jamais rien su refuser au vieux Bob! (G. LEROUX, Parfum, 1908, p. 39).
♦ [P. méton. du subst., le suj. est une chose] Ma flûte ne sait plus, hélas! me réjouir, Mon cœur est travaillé de crainte et de désir (MORÉAS, Sylves, 1896, p. 161).
— [À la forme restrictive] Les jeunes cherchent à imiter, les vieux ne savent que répéter. Ceux-ci sont fidèles à leurs propres habitudes. Les autres singent les habitudes d'autrui (SIEYÈS, Tiers état, 1789, p. 61).
2. [À l'impér., comme renforcement de l'inf., avec une valeur optative, servant à exprimer p. euphém. un ordre atténué, un souhait] Sache, sachons, sachez + inf. Synon. puisses-tu, puissiez-vous (v. pouvoir1). — Sachez d'abord vous taire. — Or, celle Qui vous parle est coquette et folle. Oui, je le suis (VERLAINE, Jadis, 1884, p. 220).
D. — [Croisements sém. avec pouvoir1]
1. Littér. [Au cond. et au plus-que-parfait du subj. avec ne seul] Ne pas avoir le droit, la permission, la possibilité intérieure de (faire quelque chose, poser tel acte). Synon. réussir à, s'autoriser à, s'accorder de, être autorisé à (v. autoriser), tolérer de, oser; (à la 1re pers.) je ne puis (v. pouvoir1). On ne saurait dire; on ne saurait en conclure, en déduire (qqc., que), en dire autant de; on n'en saurait douter; on ne saurait trop rappeler, insister sur, recommander (qqc.). V. ne I A 2 e:
• 8. ... « savoir », dans les articles de Norpois, est le signe du futur, c'est-à-dire le signe des désirs de Norpois (...) chaque fois que Norpois dit: « L'Amérique ne saurait rester indifférente à ces violations répétées du droit », (...) de telles phrases expriment les désirs de Norpois (comme les miens, comme les vôtres) mais enfin là, le verbe peut encore garder malgré tout son sens ancien, car un pays peut « savoir », l'Amérique peut « savoir », la monarchie « bicéphale » elle-même peut « savoir » (malgré l'éternel « manque de psychologie »).
PROUST, Temps retr., 1922, pp. 782-783.
♦ Rare. [À la forme interr.] Ma poitrine est en feu! Mugnoz, ne sauriez-vous me donner quelque chose pour calmer ces douleurs aiguës? (MÉRIMÉE, Jaquerie, 1828, p. 375).
— [Pour exprimer une affirm. atténuée]
♦ [En cont. compar. ou superl. abs.] On ne saurait mieux dire, mieux conclure; on ne saurait être plus aimable. Quarante ans, c'est pardieu! le bel âge (...); on choisit alors femme douce et bonne, ayant un patrimoine alléchant; c'est ainsi que j'ai fait, on ne saurait mieux faire (BOREL, Champavert, 1833, p. 113).
♦ [Le suj. désigne une chose ou un indéf. neutre] Rien ne saurait + inf. J'ai pu songer au tourment de ne vous revoir jamais, et m'y condamner; rien ne saurait plus ébranler mon courage (LEMERCIER, Pinto, 1800, II, 11, p. 67). Empl. impers. Il ne saurait y avoir, être question de, en être autrement. Il ne saurait y avoir erreur là où il n'y a pas encore vérité, mais réalité, nécessité (MERLEAU-PONTY, Phénoménol. perception, 1945, p. 396).
♦ [Pour exprimer la probabilité] Je vais vous montrer mon oncle Edward Sharper. Je l'ai laissé ici. Où diable s'est-il sauvé? Il ne saurait être bien loin! (ABOUT, Roi mont., 1857, p. 294).
2. [Avec ne seul]
a) [À l'ind.] Il n'a su en venir à bout (Ac.).
Rem. GREV. 1975, § 693 rem. N.B., le note avec un sens voisin de « pouvoir ». Je remets en vos mains l'enfant que j'ai volée! Faites ce que je n'ai su faire; gardez-la de tous ses ennemis (FRANCE, Bonnard, 1881, p. 485).
b) Fam. Pouvoir. Mère Ubu: Père Ubu, ton cheval ne saurait plus te porter, il n'a rien mangé depuis cinq jours et est presque mort. Père Ubu: Elle est bonne, celle-là! On me fait payer douze sous par jour pour cette rosse et elle ne me peut porter (JARRY, Ubu, 1895, III, 8, p. 66).
♦ Région. (Belgique). Pouvoir (à l'exception des empl. au cond. à la forme nég.) au sens d'avoir la possibilité matérielle de. (Ds BAET. 1971, p. 421). (Rwanda, du fr. de Belgique). Pouvoir. Il n'est pas permis de faire des dettes qu'on ne saura jamais payer (Servir, n ° 6, 16ème année, 1955, p. 240 ds Fr. JOUANNET, Le Fr. au Rwanda, Paris, SELAF, 1984, p. 175).
3. Loc. adv., pop., vieilli (si le verbe est au prés.). Tout ce qu'il/elle sait. Tout ce qu'il/elle peut, beaucoup, de toutes ses forces (sert à exprimer l'intensité de l'action). Il crie tout ce qu'il sait. Avec don Juan [de Byron], ils (...) raillent la vertu, l'amour, et la première blonde qui passera va leur faire (...) pleurer tout ce qu'ils savent (VALLÈS, Réfract., 1865, p. 177).
Rem. Lorsque le verbe est accordé en temps avec celui de la princ., la loc. perd sa valeur fam. ou pop. (d'apr. ROB. 1985).
III. — [Pour exprimer l'assertion, l'interr., le doute, l'incertitude; en constr. dans des loc. div. et des expr., princ. à la forme impér., interr. et nég., avec un sens affaibli, sert à modaliser l'assertion de la phrase]
A. — [L'assertion porte sur l'information de l'interlocuteur, dans le style de la conversation cour. ou de l'information écrite]
1. a) [Dans des loc. verb. de la lang. orale, savoir est empl. dans des loc. signifiant que l'interlocuteur est ou est supposé être informé, au courant de la chose dont il s'agit qui est tenue pour avérée du locuteur ou du public]
♦ Vous n'êtes pas sans savoir que. V. être1 2e Section I B 3 b et rem.
♦ [En incise, à valeur argumentative, l'interlocuteur étant pris à partie] Comme vous le savez, comme vous savez; comme on le sait, comme on sait, comme chacun sait. La tête de la Gorgone Méduse dont la seule vue changea en montagne le géant Atlas, comme on sait (LAFORGUE, Moral. légend., 1887, p. 246). Aujourd'hui c'est ma fête et j'ai droit à des fleurs (...) Car sachez-le bien tous, je m'appelle Marie (VERLAINE, Œuvres poét. compl., Poèmes div., Paris, NRF, 1938 [1896], p. 816). V. apostrophe1 ex. 1.
♦ [En déb. de phrase, pour prendre à témoin le locuteur ou la rumeur publique de la véracité de la loc.] Vous savez que; vous savez bien que. Vous savez que, vers l'an 400 de notre ère, les habitants de l'Allemagne et de la Russie (...) eurent l'idée de venir habiter la France et l'Italie (STENDHAL, Hist. peint. Ital., t. 1, 1817, p. 3).
[Le fait est patent, connu de tous] Tout le monde sait que; qui ne sait que; chacun sait que. Chacun sait qu'il est des droits qui ne se peuvent prescrire (PROUDHON, Propriété, 1840, p. 199).
♦ [En déb. de phrase, à la 1re pers. du sing., avec valeur concessive, pour exprimer une objection] Je sais bien que. Vous me direz que. Cela ne veut évidemment pas dire que l'espace a souvent trois dimensions, mais pas toujours. Je sais bien qu'il est aisé de s'en tirer et que, si les faits ne se vérifient pas, on l'expliquera aisément en disant que les objets extérieurs ont bougé (H. POINCARÉ, Valeur sc., 1905, p. 124).
♦ [En réponse ou en reprise] Je ne le sais que trop. V. être1 ex. 2. Je le sais bien et, absol., je sais, je sais bien. Vois mes pleurs sur mes joues (...); Avant ces pleurs déjà tant de pleurs sont passés, Que je ne suis plus belle aujourd'hui, je le sais (DUMAS père, Christine, 1830, I, 3, p. 219).
b) [Dans des expr. qui permettent de ne pas désigner nommément une pers., une chose, une manière]
) Verbe + tu sais comment, où, quand.
) Verbe + rel. + qui tu sais, qui vous savez, où vous savez.
♦ P. euphém. [Pour qualifier qqn, qqc. qu'on ne veut pas nommer, de connivence avec le locuteur] Qui vous savez; que vous savez; qu'on sait; ce/celui que vous savez. Peut-être ne serait-il pas inutile, dans une époque où ne manquent (...) ni la facilité ni l'incohérence, entretenues et constamment pourvues de nouveaux prétextes par les puissants moyens que vous savez, de célébrer ces nobles exercices spirituels (VALÉRY, Variété IV, 1938, p. 216).
♦ Fam. (Un coup de pied) où vous savez. Au derrière. Synon. (p. euphém., fam.) où je pense (v. penser), quelque part (v. part1), au bon endroit. V. allonger ex. 17.
♦ Pop. Avoir qqn où vous savez. Ne pas pouvoir supporter quelqu'un. Elle le trouvait trop rossard, cet entripaillé, elle l'avait où vous savez (ZOLA, Assommoir, 1877, p. 751).
c) [Pour prendre Dieu à témoin d'un fait présenté comme connu de lui seul et comme vrai, d'un énoncé déclaratif] Dieu sait où; Dieu sait comme; Dieu sait quand; Dieu sait si. V. dieu 2e Section III B 2 d, comme rem. c, comment II B 2 a. [Pour renforcer l'expr. de l'incertitude ou de l'ignorance] Dieu sait + pron. interr. ou prop. interr. (V. dieu 2e Section III B 2 d, comme rem. c, comment II B 2 a.). [Avec un pron. de rappel] Dieu le sait; Dieu seul le sait (V. dieu 2e Section III B 2 d, comme rem. c, comment II B 2 a.). Le bon Dieu le sait bien. P. anal. Le diable sait où.
2. [À l'ind., en déb. de phrase ou en incise, pour mettre en relief une affirm.] Vous savez! Tu sais! Vincent ne m'a pas écrit, dit Passavant; mais j'ai reçu une lettre de Lady Griffith — vous savez bien la remplaçante — où elle me parle de lui longuement (GIDE, Faux-monn., 1925, p. 1193).
— Péj., empl. abs.:
• 9. LARDIER: (...) Et puis, elle s'est remise petit à petit... Je lui apportais du raisin, des oranges... Elle riait... Les femmes, vous savez... BROTONNEAU: Oui... oui...
FLERS, CAILLAVET, M. Brotonneau, 1923, I, 2, p. 8.
♦ [À la forme interr.] Rare ou région. (Belgique). Savez-vous? Sais-tu? Et la chose est bien dite dès que chacun l'entend; d'autant mieux dite qu'elle l'est plus brièvement, mérite non commun, savez-vous? (COURIER, Pamphlets pol., Pamphlet des Pamphlets, 1824, p. 217). Tu me donneras les petits souliers de daim que j'ai laissés ici mardi (...). Et puis, sais-tu? Je ne m'en irai pas ce soir (BERNANOS, Soleil Satan, 1926, p. 94).
♦ [En déb. de prop., ou en incise, ou en fin de phrase] Tu sais? (fam.). Le convalescent (...) vint apporter une nouvelle si stupéfiante que le chagrin de Bibiche du coup s'envola. — Savez pas? Y a un Américain qu'est v'nu voir Gaspard! (BENJAMIN, Gaspard, 1915, p. 151). [Lorsque qqn cherche ses mots pour préciser sa pensée] Je ne sais pas (moi). Tu criais... je ne sais pas moi: « Pardon! Ne me tuez pas! » (VERCEL, Cap. Conan, 1934, p. 176).
— À savoir (suivi ou non de deux points), loc. conj. ou adv. de coord. de phrase. [Sert à introduire une explication, un développement] Synon. c'est-à-dire. Quant aux Bains de mer du Sud de la Loire, à savoir: Pornic, les Sables-d'Olonne, La Rochelle, Royan, Arcachon, Saint-Jean-de-Luz, Biarritz, etc. (MALLARMÉ, Dern. mode, 1874, p. 725). À partir de 1886, considérant la question de la cryoscopie suffisamment élucidée, Raoult s'attaque à ce qui (...) avait été le point de départ de ses recherches sur les solutions, à savoir l'étude de leurs tensions de vapeur (Hist. gén. sc., t. 3, vol. 1, 1961, p. 289).
♦ Littér., DR., ADMIN. C'est à savoir. Le député (...) lui dit que toute la chrétienté était maintenant unie, excepté un grain de blé dans le boisseau; c'est à savoir les comtes de la comté d'Armagnac qui sont encore dans l'obéissance de Pierre de Luna, lequel est déclaré hérétique et schismatique (BARANTE, Hist. ducs Bourg., t. 4, 1821-24, p. 149).
♦ P. ell. Savoir. Synon. arch. assavoir (v. ce mot II). De là, Locke distingue trois lois ou règles, savoir: la loi divine, la loi civile, la loi d'opinion ou de réputation (COUSIN, Hist. philos. XVIIIe s., t. 2, 1829, p. 277).
♦ À savoir que, loc. conj. Synon. c'est-à-dire que. Mais vous ne pouvez ignorer ce que l'Église enseigne, à savoir que la malédiction divine prononcée contre les juifs poursuit leur crime et non leur race (FRANCE, Anneau améth., 1899, p. 83).
B. — [L'assertion porte sur la réponse à une demande; savoir sert à exprimer l'interr. ou le doute, en cont. interr. dir. ou indir.]
1. [Pour exprimer l'interr., pour formuler une question exigeant une réponse impliquant un choix] Il n'y a que des fous ou des malades qui puissent trouver du bonheur à battre les cartes tous les soirs pour savoir s'ils gagneront quelques sous (BALZAC, Gobseck, 1830, p. 390).
— [Pour amener le locuteur à exprimer la réponse, l'explication sur la question débattue, sur le sujet de conversation]
♦ Absol., fam. On peut savoir? Peut-on savoir? Roger, allant à Suzanne qui cause avec Bellac: Oh! je veux savoir! (PAILLERON, Monde où l'on s'ennuie, 1869, I, 17, p. 72).
♦ Je voudrais bien savoir si. Je me demande si; je me pose la question suivante: est-ce que...? (ou non?). Si votre façon de traiter la morale ressemble à votre manière d'envisager l'histoire, dit Lucien, je voudrais bien savoir quel est en ce moment le mobile de votre apparente charité? (BALZAC, Illus. perdues, 1843, p. 714).
2. [Pour exprimer le doute, l'incertitude]
— Pop., fam. Va savoir! Allez savoir! C'est difficile à trancher. La camelote pouvait être n'importe où à présent: dans un recoin de cargo ou de chalutier, derrière les tubulures d'un avion. Va savoir? (LE BRETON, Rififi, 1953, p. 188).
— Qui sait? Qui peut savoir? Qui sait si?... [Pour exprimer une éventualité possible] Mangin prétend vouloir (...) nous donner la possibilité de résister aux coups d'une artillerie plus sérieuse, — celle des Anglais, par exemple. Voilà une éventualité qui ne se produira pas, très vraisemblablement. Pourtant, qui peut savoir? (ÉMILY, Fachoda, 1898 ds Rec. textes hist., p. 229). Qui sait? Paulina parviendrait peut-être un jour, heureuse, à ce monde de la félicité complète (JOUVE, Paulina, 1925, p. 124).
— Que sais-je? Est-ce que je sais! [À la suite d'une énumération; parfois à la suite d'une progression dramatique, pour ne pas désigner un fait trop grave] Tu as semé du linge sale, des cendres de cigarettes, que sais-je? (COCTEAU, Parents, 1938, I, 2, p. 192). [Pour exprimer le doute] Y aurait-il une sagesse cachée dans ce livre qui étale une folie si divertissante? Que sais-je? (FRANCE, Vie littér., 1890, p. 340). [Pour exprimer la difficulté à identifier qqc.] — Quoi encore, ma chère enfant? — Est-ce que je sais!... Des étouffements... Des vertiges... (FRANCE, Hist. comique, 1903, p. 2).
— Reste à savoir si, quel. Un animal, le rat ou le kangourou (...) sert de « totem », c'est-à-dire de patron, à tout un clan. (...) les membres du clan déclarent ne faire qu'un avec lui; ils sont des rats, ils sont des kangourous. Reste à savoir, il est vrai, dans quel sens ils le disent (BERGSON, Deux sources, 1932, p. 193).
— Quant à savoir si, quel, comment. Nous dirons (...) ce dont s'occupent le cabinet, les divisions et les bureaux de la préfecture de Lot-et-Garonne. Quant à savoir comment ils s'en occupent, cette recherche est impossible dans une étude générale (BARADAT, Organ. préfect., 1907, p. 124).
♦ Absol., pop., fam. [Pour poser la question de façon détournée] Savoir si. Est-ce que. Sans doute... sans doute... dit le roi (...). Tout cela est fort beau... seulement voilà... savoir si nous pourrons tenir (A. DAUDET, Rois en exil, 1879, p. 138).
Pop., fam. Savoir quel, quand. Savoir quel temps il fera demain (ROMAINS, Les Travaux et les jours, 1943, p. 187 ds ROB. 1985).
♦ Pop., fam. [Avec idée de réfutation polie] C'est à savoir. C'est encore à voir. — (...) J'aime à croire que tant que nous serons là, l'on interdira au baron des Atours et à sa famille de chanter de la musique profane dans notre église... — C'est à savoir! s'exclama Durtal (HUYSMANS, Oblat, t. 1, 1903, p. 225).
Absol. Savoir. — (...) Les hommes de troupe, j'sais pas si c'est vrai (...) et si, au fond, ce ne sont pas des hommes à peu près comme nous. — C'est probablement des hommes comme nous, fait Eudore. — Savoir!... s'écria Cocon (BARBUSSE, Feu, 1916, p. 39).
— Littér. Que savons-nous si. V. création ex. 1.
C. — 1. [L'assertion porte sur le terme modifié par ne + savoir; sert à exprimer l'indétermination, l'hésitation sur une action] Ne savoir au juste, exactement ce que. Avec Marceline Desbordes-Valmore, on ne sait parfois ce que l'on doit dire ou retenir (VERLAINE, Œuvres compl., t. 4, Poètes maud., 1884, p. 57). V. ne rem. 2 ex. de Gide, esprit 2e Section I B 3 b ex. de Hugo, pardonner A 3, oser ex. 4:
• 10. ... la presse, se divisant en trois fractions, a pris parti, qui pour la transaction ministérielle, qui pour l'exclusion de l'État, qui pour l'exclusion des compagnies. En sorte qu'aujourd'hui, pas plus qu'auparavant, ni le public, ni M. Arago, malgré leur volte-face, ne savent ce qu'ils veulent.
PROUDHON, Syst. contrad. écon., t. 1, 1846, p. 292.
— Absol. Nous avons détruit le paradis et l'enfer. Avons-nous bien fait, avons-nous mal fait, je ne sais. Ce qu'il y a de sûr, c'est que la chose est faite (RENAN, Avenir sc., 1890, p. 330).
b) [Suivi d'un pron. ou adj. ou adv. interr.] Je ne sais qui, quoi, quel; on ne sait qui, quoi. V. falloir B 1 ex. de Lemaître. [Suivi d'un adv. interr.] Je ne sais où, je ne sais comment, je ne sais quand. Je ne sais combien de temps. V. combien I B 1 a ex. de Pourrat, espèces B ex.:
• 11. Cette madame de Rioja, une Péruvienne, une Mexicaine, je ne sais quoi, tombée on ne sait d'où, veuve d'on ne sait qui! On reçoit cela! Ces étrangers c'est comme la garde nationale, ça entre partout!
FEUILLET, Scènes et prov., 1851, p. 172.
— Je ne sais où, loc. adv. indéf. V. où III B 3.
— (Être) je ne sais comment, loc. indéf. fam. (Être) tout(e) drôle, tout chose (v. chose2), pas dans son assiette (v. ce mot au fig., fam.). Depuis deux ans qu'ils l'ont nommé adjoint au maire, il est tout je ne sais comment (BALZAC, C. Birotteau, 1837, p. 6).
— P. euphém. Je ne sais qui; je ne sais quoi. Un beau cadre ajoute à la peinture (...) Je ne sais quoi d'étrange et d'enchanté (BAUDEL., Fl. du Mal, 1860, p. 64).
♦ Empl. subst. masc. inv. Je(-)ne(-)sais(-)quoi. P. plaisant., empl. adj., fam. [Dans un nom propre] Charny (...) vient de donner à mademoiselle je ne sais qui des Variétés un attelage de vingt-cinq mille francs (FEUILLET, Mariage monde, 1875, pp. 85-86). Des radio-je-ne-sais-quoi déversaient une sorte de vomissement musical (MONTHERL., Célibataires, 1934, p. 842).
c) Je ne sais si, je ne sais + interr. indir. ou inf. introd. par un mot interr. Je n'ai aucune nouvelle de L'Occident. Je n'ai même pas reçu le numéro de juin et je ne sais s'il a paru. Ils sont insensés dans cette boîte (RIVIÈRE, Corresp. [avec Alain-Fournier], 1907, p. 194). V. ne I A 2 e, quand B 1 ex. de Chateaubriand.
2. [Pour exprimer la confusion, le désordre, l'embarras ou la perplexité, dans des loc. verb. au fig. en constr. d'interr. indir.]
♦ Ne savoir que dire. Être embarrassé pour s'exprimer. Dîné chez M. Thiers. Je ne sais que dire aux gens que je rencontre chez lui, et ils ne savent que me dire (DELACROIX, Journal, 1847, p. 169).
♦ Ne savoir que faire, quoi faire. Être indécis; être désemparé. Une autre faculté, placée aussi parmi les intellectuelles par les phrénologistes, et dont les philosophes ne savaient que faire, c'est le sens des tons, de la mélodie (BROUSSAIS, Phrénol., leçon 14, 1836, p. 493).
♦ Ne savoir que faire de qqc. Être embarrassé de quelque chose; ne trouver aucune utilisation à quelque chose d'encombrant ou d'inutile. Je saisis l'occasion de faire comprendre à M. Stangerson que, puisque vous ne saviez que faire de votre congé (...), vous seriez très touché d'une invitation qui vous permettrait de le passer parmi nous (G. LEROUX, Parfum, 1908, p. 32).
♦ Ne savoir que faire de ses bras, de ses bras et de ses jambes. V. bras I A 2 c.
♦ Ne savoir que devenir. Être angoissé sur son avenir. V. devenir2 I A 1 c ex. de Triolet.
♦ Ne/ne pas/ne plus savoir où se mettre, où se fourrer (fam.). V. fourrer II B 2 b.
♦ Ne savoir où donner de la tête. V. donner II A 2.
♦ Ne savoir sur quel pied danser. V. danser I A 3.
♦ Ne savoir à quel saint se vouer.
♦ Ne savoir par quel bout prendre qqn. V. bout I A 1 b.
♦ Ne savoir que faire, qu'inventer pour + inf. Avoir déployé toutes les ressources pour réussir une entreprise délicate. Vous ne savez quoi vous inventer pour dépenser de l'argent. Le deuil est dans le cœur et non dans les habits (BALZAC, E. Grandet, 1834, p. 118). Il ne sait que faire pour s'en emparer assez vite [du monde] (QUINET, All. et Ital., 1836, p. 74).
3. [Dans des expr. d'intensité ou de politesse] Ne savoir comment qualifier. V. qualifier ex. 2. On ne sait quoi admirer le plus de... ou de. Je lui ai écrit que nous ne savons comment le remercier, que nous sommes heureux d'être ses obligés (GONCOURT, Journal, 1858, p. 472).
♦ À ne savoir qu'en faire, loc. adv. ou adj. à valeur intensive. Beaucoup; à satiété. Synon. en veux-tu en voilà. Avoir de l'argent à ne savoir qu'en faire. Si nous avions de l'argent à n'en savoir que faire, toutes nos dettes payées, nos chemins réparés, nos pauvres soulagés (COURIER, Pamphlets pol., Disc. souscr. acquis. de Chambord, 1821, p. 72).
♦ À ne savoir + inf. (pour exprimer une situation embarrassante à l'extrême) Pour quelques caisses de quincailleries, j'en chargeais mon brick [de bois d'ébène] à ne savoir où mettre les pieds (SUE, Atar-Gull, 1831, p. 2). Ça te fait rien que j'aie mal à plus savoir où me mettre; ça devrait être prêt depuis une heure (GIONO, Baumugnes, 1929, p. 84).
D. — [L'assertion porte sur une restriction, ou une affirm. ou une nég. atténuée, au subj. de la 1re pers. du sing., dans des loc. à valeur restrictive]
1. Dans la lang. soignée
— Pour autant que je (le) sache; autant que je sache. À ma connaissance, autant que je puisse en être averti ou en juger. (Ds ROB. 1985).
♦ Que je sache, loc. verb. Synon. je suppose (v. supposer), à mon avis, si mes souvenirs sont bons (v. souvenir2), apparemment, je crois (v. croire), autant qu'il m'en souvienne (v. souvenir1). M. le Curé de Mégère a le droit d'aller et venir comme il lui plaît, je suppose. Il n'est pas sous mandat d'arrêt, que je sache? (BERNANOS, Crime, 1935, p. 801).
[À d'autres pers. que la 1re du sing.] Rare, littér. Cette forêt de Merlin est-elle profonde, que l'on sache? (FEUILLET, La Fée, in TOBLER, 1, p. 151 ds ROB. 1985).
— Pas que je sache. Pas à ma connaissance. Mme de Savageat: M. Le Guenn n'a pas encore demandé sa main? Gabrielle: Pas que je sache. Mme de Savageat: Mais il l'aime toujours? Gabrielle: Je le pense (BERNSTEIN, Secret, 1913, I, 2, p. 5).
2. Vieilli, littér.
♦ Je ne sache pas que + subj. ou inf. Je suis certain que. Voyez-vous, me dit mon guide, cette crevasse perpendiculaire, pleine par intervalle de terre éboulée? Hé bien! c'est par-là qu'il faut monter (...). Non, je ne sache pas avoir, dans le reste des Pyrénées, franchi de pas plus difficile (DUSAULX, Voy. Barège, t. 1, 1796, p. 322). Je ne sache pas que jusqu'à présent, on eût jamais vu en France, sous la monarchie légitime, des chambres, des ministres responsables, un budget (CHATEAUBR., Corresp., t. 2, 1818, p. 36).
♦ Je ne sache rien, personne + subj. Je ne connais rien, personne. Je ne sache personne qui puisse dire avoir eu l'audace de crier contre moi (CHATEAUBR., Mém., t. 4, 1848, p. 441).
E. — [L'assertion porte sur un ordre atténué, à l'impér. suivi d'un inf.; à valeur optative, à rapprocher de puisses-tu] Parlons à présent des choses sérieuses! (...) Et puis écoute et sache comprendre! (CÉLINE, Mort à crédit, 1936, p. 499).
Prononc. et Orth.:[], (il) sait [], [se]. NOD. 1844: je sais [e], mais PASSY 1914: je, tu sais, il sait [e], []; ds BARBEAU-RHODE 1930, renversement de cet ordre [], [e]; WARN. 1968: je sais, soutenu [e], cour. [], tu sais [], il sait [], MARTINET-WALTER 1973: il sait, uniquement []. ,,Dans tu sais, il sait l'[e] fermé ne surprend pas (...) puisqu'il vient du A latin et qu'on écrivait en ancien français ses, set ([e] dans je sais, venant de ai, peut être un résultat direct de celui-ci ou une prononciation analogique des formes de la 2e et de la 3e p. sg)`` (G. STRAKA ds Trav. Ling. Litt. Strasbourg t. 19 n ° 1 1981, p. 211). La prononc. avec [] s'explique par l'infl. de la graph. Fut. et cond.: saurai, -as, -a; saurais, -ait; 1re syll. [] ou [o] selon PASSY 1914, WARN. 1968, MARTINET-WALTER 1973. Homon. savons/savon; sussions/sucions. Ac. 1694, 1718: sçavoir; dep. 1740: sa-. Conjug.: ind. prés. je sais, tu sais, il sait, nous savons, vous savez, ils savent; imp. je savais; passé simple je sus, nous sûmes; passé comp. j'ai su; fut. je saurai; cond. prés. je saurais; impér. sache, sachons, sachez; subj. prés. que je sache, que nous sachions; subj. imp. que je susse, qu'il sût; part. prés. sachant; part. passé su. Étymol. et Hist. 842 inf. subst. v. savoir2; 1. a) fin Xe s. + verbe à l'inf. « avoir la possibilité, la capacité de » (Passion, éd. d'Arco Silvio Avalle, 478: de Crist non sabent mot parlar); b) ca 1100 « être capable de faire quelque chose (en vertu d'un talent, d'un effort de volonté) » (Roland, éd. J. Bédier, 3784: Ben set parler [Pinabel] et dreite raisun rendre); 2. a) 2e moit. Xe s. + complét. « connaître quelque chose pour en avoir été informé » (St Léger, éd. J. Linskill, 156: Ne soth nuls om qu'es devenguz); b) ca 1165 faire saveir (BENOÎT DE STE-MAURE, Troie, éd. L. Constans, 1732); 3. ca 1050 équivalent atténué de pouvoir (Alexis, éd. Chr. Storey, 125: Ne vus sai dire cum il s'en firet liez); 4. a) ca 1100 ne savoir mot de « ne pas avoir conscience de » (Roland, 1173); b) fin XIIe-déb. XIIIe s. avec adj. attribut (Vie de Saint Grégoire, éd. H. B. Sol, A2, 2019: Molt le set felon et cruel); 5. a) ca 1100 à l'impér., pour attirer l'attention dans un discours (Roland, 520: par veir sacez); b) 1176-81 au subj. « pour autant que je le sache » (CHRÉTIEN DE TROYES, Chevalier Lyon, éd. M. Roques, 430: ja, que je sache a escïant, ne vos an mantirai de mot); 6. a) 1120 part. passé tout a soüt « d'une manière certaine » (St Brendan, éd. I. Short et B. Merrilees, 373); b) ca 1155 (WACE, Brut, éd. I. Arnold, 11984: Senz le seü nostre seinur); c) ca 1470 au sçu de (qqn) (G. CHASTELLAIN, IV, 149, 6 ds HEILEMANN Chastellain, p. 51 [réf. erronée]); av. 1615 à son veu et sceu (PASQUIER, Recherches, p. 884); 7. a) 1130 ceo est a saveir (Lois de Guillaume, éd. J. E. Matzke, 15); b) ca 1160 (Eneas, éd. J.-J. Salverda de Grave, 8500: Vos i avez tot oblïé la premeraine question, A savoir se ge aim o non); 8. a) 1155 saveir de « s'y connaître en quelque chose » (WACE, op. cit., 3675); b) 1306 en partic. (JOINVILLE, Vie de St Louis, éd. N. L. Corbett, § 335, p. 151: Il avoit gens illec qui savoient le sarrazinnois et le françois); 9. 1155 saveir gré (WACE, op. cit., 1707); 10. a) 1229 pronom. réfl. (GERBERT DE MONTREUIL, Violette, 5481 ds T.-L.: nus ki tant se sache Preu ne hardi); b) 1580 sens passif (MONTAIGNE, Essais, II, XII, éd. P. Villey et V. L. Saulnier, t. 1, p. 541: tout se sçait et connoit). Du lat. pop. , altér. du class. absol. « avoir de la saveur, du goût, du parfum (en parlant de choses) » et « avoir du goût, du discernement, être sage (en parlant de personnes) », qui, empl. transitivement a signifié ensuite « se connaître (en quelque chose), comprendre, savoir » évinçant dans ce sens scire peu représenté dans les lang. rom.; le sens originel du lat. a vécu dans l'anc. lang., où savoir, empl. absol., a signifié « sentir » et « plaire » du XIIe au XIVe s. (v. T.-L. et EUSTACHE DESCHAMPS, Œuvres, éd. G. Raynaud, t. 9, p. 51). Fréq. abs. littér. Savoir1: 123 526. Sachant: 2 574. Fréq. rel. littér.:XIXe s. Savoir1: a) 150 084, b) 163 724; XXe s.: a) 184 390, b) 198 664. Sachant: XIXe s.: a) 2 800, b) 4 644; XXe s.: a) 4 848, b) 3 152. Bbg. ALEXANDRESCU (S.). Sur les modalités Croire et savoir. Langages. Paris. 1976, n ° 43, pp. 19-27. — ARMENGAUD (Fr.). Moore et Wittgenstein: je crois que/je sais que. In: On Believing: de la Croyance. Berlin-New-York, 1983, pp. 31-47. — BORILLO (A.). Deux aspects de la modalité assertive: croire et savoir. Langages. 1982, n ° 67, pp. 33-53. — FONTANILLE (J.). Un Point de vue sur croire et savoir ... Actes sémiot. Doc. 1982, t. 4, pp. 5-31. — GROSS (M.). About the French verb to know. St. Ling. 1971, t. 25, pp. 122-124. — LAVIS (G.). L'Ét. de la synon. verbale dans l'anc. lang. fr.: l'ex. de savoir et conoistre en moy. fr. In: Sém. lex. et sém. gramm. en moy. fr. Brussel, s.d., pp. 97-128. — LERAT (P.). Le Champ ling. des verbes savoir et connaître ... Cah. Lexicol. 1972, n ° 20, pp. 53-63. — MARTIN (R.). L'Opérateur intensionnel savoir. Hist. Épistémol. Lang. 1983, t. 5, pp. 213-227. — MOIGNET (G.). Syst. de la lang. fr. Paris, 1981, pp. 276-277. — PICOCHE (J.). Savoir et connaître ou Marthe et Marie dans la lang. fr. Foi Lang. 1982, pp. 134-140. — POTTIER (B.). Le Croire dans une perspective sémio-ling. dynamique. In: De la croyance. Approches épistémologiques et sémiotiques. Berlin; New York, 1983, pp. 267-273. — QUEM. DDL t. 15, 19. — RÉMI-GIRAUD (S.). Ét. comparée du fonctionnement synt. et sém. des verbes savoir et connaître. Lyon, 1986, pp. 169-306. — SAKARI (A.). Le Fr. savoir et ses pendants dans d'autres lang. Actes du 6e Congrès des Romanistes Scandinaves. Uppsala, 1977, pp. 211-217. — WILMET (M.). Ét. de morpho-syntaxe verbale. Paris, 1976, pp. 107-128.
II.
⇒SAVOIR2, subst. masc.
A. — 1. Souvent au sing.
a) Ensemble des connaissances d'une personne ou d'une collectivité acquises par l'étude, par l'observation, par l'apprentissage et/ou par l'expérience. Synon. acquis, bagage (fam.), connaissance(s), érudition, culture, science, instruction; anton. ignorance. Grand, profond, immense, vaste, vrai savoir; savoir approfondi, encyclopédique, étendu, livresque, superficiel, universel; homme de savoir; étendue, profondeur de son savoir; acquérir du savoir; mettre tout son savoir à faire qqc. Ce refuge des livres et du savoir [une abbaye] abritait des ateliers de tout genre (THIERRY, Tiers État, 1853, p. 17). Une trop grande richesse de désir ou une certaine nonchalance de l'action nous poussent à nous disperser dans trop de savoir, d'avoir et de savoir-faire accumulés (MOUNIER, Traité caract., 1946, p. 720). V. abstrait ex. 10.
b) Ensemble de connaissances acquises, d'expériences vécues dans un domaine, dans une discipline, dans une science, dans une profession. Savoir culinaire, intellectuel, scientifique. Quel profond savoir, quelle variété de connaissances ne supposent pas les monuments primitifs de l'Égypte et de l'Inde dans les corporations sacerdotales qui les conçurent! (Ch. BLANC, Gramm. arts dessin, 1876, p. 59).
2. Connaissances et compétence dans un art, dans une discipline, dans une science, dans une profession. Synon. art, métier, maîtrise, possession, compétence, expérience, pratique, talent. On remarque dans ses trois toiles [les Hercules du Guide] (...) une outrance de vigueur et une volonté de faire montre d'un grand savoir anatomique (GAUTIER, Guide Louvre, 1872, p. 103). Il leur apprenait aussitôt des vérités si merveilleuses que beaucoup s'engageaient parmi les maçons du nouvel œuvre comme apprentis, compagnons ou maîtres, selon la mesure de leur savoir (ADAM, Enf. Aust., 1902, p. 35).
3. P. méton.
a) Au plur. Ce que quelqu'un connaît par l'étude, par l'approfondissement, par la recherche. Synon. connaissances:
• ... je dois mourir. (...) cette certitude est un savoir et non pas une expérience, le plus certain de tous mes savoirs concernant mon avenir, mais seulement un savoir. (...) à la différence de la vie, d'abord révélée par le sentiment, la mort est d'abord découverte par la connaissance...
RICŒUR, Philos. volonté, 1949, p. 430.
— [Suivi d'un déterminatif précisant le champ d'application des connaissances] En dépit de leurs acquisitions limitées, la rationalisation et la quantification des savoirs économiques particuliers peuvent être considérées comme encourageantes (Univers écon. et soc., 1960, p. 4-7).
b) Au sing. Le savoir
) Vx. Le corps des savants. Synon. la science, les savants. (Ds ROB.).
) ,,Ensemble des énoncés verbaux compréhensifs et justifiables qui ont été élaborés au cours de l'histoire par les philosophes et par les savants`` (LAFON 1969). Cette sagesse pratique, ce côté positif du savoir, est précisément ce qui distingue les deux célèbres écoles du XVIIe siècle: celle de Descartes (...) et celle de Leibnitz (OZANAM, Philos. Dante, 1838, p. 265).
4. Littér. Le gai savoir. V. gai I B 2.
B. — PHILOS. État de la conscience d'une personne qui sait, qui a pleine connaissance de quelque chose; entendement, connaissance, relation entre le sujet qui pose l'acte de savoir et l'objet de pensée, point d'aboutissement, par opposition à la certitude, à la croyance, à la foi; p. méton., cet objet de pensée; ,,relation entre le sujet connaissant et la proposition connue pour vraie`` (LAL. 1968). Savoir objectif; fondement, limites du savoir. Mais alors que l'imagination de la chose comme existant ailleurs (...) implique un savoir sur la réalité, l'imagination du plaisir implique un savoir sur la valeur (RICŒUR, , Philos. volonté, 1949, p. 97). Toute la distance qui sépare le savoir abstrait, conceptuel, générique qu'on a de ces choses à vingt ans et l'intuition gnostique qu'on en prend à soixante quand on les découvre du dedans et que la mort devient notre affaire privée (JANKÉL., Je-ne-sais-quoi, 1957, p. 146).
— Absol. V. ignorance I A 1 b ex. de Sartre.
REM. 1. Non-savoir, subst. masc., philos. La mort apaise la soif de non-savoir (G. BATAILLE, Exp. int., 1943, p. 172). 2. Savoir-, élém. de compos. [entrant dans la constr. de qq. subst. masc. inv. (hapax ou fantaisies verbales);] le 2e élém. est un verbe. V. savoir-faire, savoir-vivre et aussi: a) Savoir-aimer. Sous cet éclairage, l'érotisme devient l'art suprême de la vie, le savoir-aimer dépassé en splendeur et en intensité le savoir-peindre, le savoir-écrire ou le savoir-bâtir (Paris-Match, 10 févr. 1968 ds GILB. 1971). b) Savoir-bâtir. V. supra ex. de Paris-Match. c) Savoir-décliner. Attendre, attendre... Cela s'apprend à la bonne école, où s'enseigne aussi la grande élégance des mœurs, le chic suprême du savoir-décliner (COLETTE, Naiss. jour, 1928, p. 70). d) Savoir-dire. Pour provoquer la curiosité et l'effort, conditions de l'efficacité pédagogique, tout enseignement doit associer le savoir, le savoir-dire et le savoir-faire (L. CROS, Explosion scol., 1961, p. 120). e) Savoir-écrire. Ce texte (...) ne ressemble à aucun autre — il tient des souvenirs d'enfance, de la confidence, du savoir-écrire (Le Point, 21 mars 1977, p. 138, col. 3). f) Savoir-être. Les élèves doivent pouvoir acquérir ou découvrir un savoir-être, à travers les rôles qu'ils adopteront tout au long de leurs études et les responsabilités qu'ils prendront dans le déroulement de celles-ci (B. SCHWARTZ, Réflex. prospectives, 1969, p. 8). g) Savoir-lire. Il a tout vu, tout lu (...) possédant au plus haut point ce « savoir-lire » que le vieux Goethe prétendait modestement avoir passé quatre-vingts ans de sa vie à acquérir (L. FEBVRE, Du goût class. au foisonnement romant., [1939] ds Combats, 1953, p. 72). h) Savoir-manger. On dîne en beauté à Los Angeles. À côté d'un petit traité de « savoir-manger » californien, Claude Deloffre nous présente quelques palais de la nourriture et leurs surprenants metteurs en scène (City, févr. 1985, p. 54). i) Savoir-mourir. Maîtres charmants du savoir-vivre, Joignez-y le savoir-mourir! (POMMIER, Paris, 1866, p. 56). j) Savoir-peindre. V. supra ex. de Paris-Match. k) Savoir-rire. [Les surdoués] Bernard Mabille promu examinateur du « savoir-rire », reçoit chaque jour deux invités et les met à l'épreuve (Télérama, 18 mars 1981, p. 130, col. 1). 3. -savoir, élém. de compos.; le 1er élém. est un verbe. Faire-savoir, subst. masc. inv. Le aire-savoir/ qui présidait à la communication devenait un faire persuasif ayant, à l'autre bout de la chaîne, un faire interprétatif correspondant et opposé. Le changement de perspective ainsi obtenu se résumait en ceci que persuader, s'il reste encore en partie un faire-savoir, est surtout, et en premier lieu, un faire-croire (A.-J. GREIMAS, Du Sens, t. 2, 1983, p. 115).
Prononc. et Orth.:[]. Ac. v. savoir1. Étymol. et Hist. a) 842 savir « fait de savoir, connaissance » (Serments de Strasbourg ds HENRY Chrestomathie, p. 1); b) fin Xe s. savier « sagesse » (St Léger, éd. J. Linskill, 23); c) ca 1120 être de grant saveir (St Brendan, éd. I. Short et B. Merrilees, 527); d) ca 1470 « étiquette, fait de savoir se conduire comme il faut » (CHASTELLAIN, Chronique, éd. Kervyn de Lettenhove, t. 1, p. 86). Subst. de savoir1. Fréq. abs. littér. Savoir2, v. savoir1. Savoirs: 12. Bbg. BRUCKER (Ch.). Prudentia/prudence aux XIIe et XIIIe s. Rom. Forsch. 1971, t. 83, n ° 4, p. 467; Sage et son réseau lex. en anc. français... Lille, 1979, pp. 636-689. — GREIMAS (A.). Du Sens II, Essais sémiotiques. Paris, 1983, pp. 115-133.
1. savoir [savwaʀ] v. tr.
CONJUG. je sais, tu sais, il sait, nous savons, vous savez, ils savent; je savais; je sus, nous sûmes; j'ai su; je saurai; je saurais; sache, sachons, sachez; que je sache, que nous sachions, que vous sachiez; que je susse, qu'il sût (REM. Les homonymes avec sucer rendent l'emploi de ce temps exceptionnel à toutes les formes, sauf qu'il sût → Ne, cit. 4); sachant, su.
ÉTYM. Fin XIIe; savir, 842; saveir, 980; lat. pop. sapere (e long), class. sapere (e bref) « goûter, connaître ».
❖
———
I Appréhender par la connaissance, par l'esprit.
1 Ce qu'on sait le mieux, c'est 1o ce qu'on a deviné; 2o ce qu'on a appris par l'expérience des hommes et des choses; 3o ce qu'on a appris, non pas dans les livres, mais par les livres (…); 4o ce qu'on a appris dans les livres ou avec des maîtres.
1 Avoir présent à l'esprit (un objet de pensée qu'on identifie et qu'on tient pour réel); pouvoir affirmer l'existence de… ⇒ Connaître; connaissance, idée. || Savoir qqch. intuitivement, par intuition (⇒ Conscience). || Savoir par représentation, par raisonnement. — Savoir le nom de qqn (→ Facile, cit. 10; fugitif, cit. 9). || Savoir en gros l'existence d'une chose, en connaître (cit. 3) les particularités. || « Hélas ! qui peut savoir le destin (cit. 7) qui m'amène ? ». || « Quand tu sauras mon crime et le sort qui m'accable » (→ Mourir, cit. 22). — (Fin Xe). || Savoir une nouvelle (cit. 5), en avoir été informé. || Savoir des nouvelles de qqn. ⇒ Avoir. || Apprendre et savoir qqch. ⇒ Apprendre (cit. 7 et 31), courant (être au), découvrir, instruire (être instruit de…). || Savoir qqch. par ouï-dire, par la rumeur publique. || Savoir qqch. de source sûre. ⇒ Sûr. || Savoir d'avance, par avance, ce qui va arriver. ⇒ Attendre (s'), prévoir (→ Échiquier, cit. 1). || Si j'avais su ! — Les choses qu'on sait et celles qu'on ignore (cit. 1; → aussi 2. Politique, cit. 5, Beaumarchais). — Le désir de savoir qqch. ⇒ Curiosité. || C'est bon à savoir, utile à savoir. ☑ Je sais ce que je sais : j'ai mon idée là-dessus (→ Chanson, cit. 11). || Savez-vous qui vient là ? || Est-ce que tu sais qui c'est ? || Savoir à quelle date (→ Panache, cit. 5), dans quelles conditions, jusqu'à quel point… (→ Intervertir, cit. 1). ☑ Savoir à quoi s'en tenir, de quoi il retourne. — Savoir qqch. de…, au sujet de… || « Deux ou trois choses que je sais d'elle ». — Savoir la vérité (à propos de qqch.). → Faussaire, cit. 9. ☑ Loc. Plaider le faux pour savoir le vrai. — Absolt. || La souffrance de savoir (→ 2. Charme, cit. 5).
2 Tout Saint-Ouen sut l'accident en quelques minutes. Les canotiers le racontaient comme des témoins oculaires. Une foule apitoyée stationnait devant le cabaret.
Zola, Thérèse Raquin, XI.
3 Je conviens que vous seul savez ce que vous faites (…)
Hugo, les Contemplations, IV, XV.
4 Il savait qu'elle était amoureuse de lui, ou du moins qu'elle le lui disait. Le reste, il l'ignorait. Il savait son titre, et ne savait pas son nom. Il savait sa pensée, et ne savait pas sa vie.
Hugo, l'Homme qui rit, II, IV, I.
5 Je sais les cieux crevant en éclairs, et les trombes
Et les ressacs et les courants : je sais le soir,
L'Aube exaltée ainsi qu'un peuple de colombes,
Et j'ai vu quelquefois ce que l'homme a cru voir !
Rimbaud, Poésies, « Le bateau ivre ».
REM. Le verbe savoir admet peu de compléments substantifs, par rapport à connaître; ces compléments désignent en général des caractères abstraits (savoir les circonstances, les particularités de…) ou des signes (savoir une nouvelle). Cependant, même dans ces emplois, savoir est marqué (vieilli → ci-dessus, cit. 2 ou poétique → cit. 5) par rapport à connaître, et l'usage courant construit ce verbe avec des compléments indéterminés (savoir qqch., savoir une chose), démonstratifs, indéfinis (ci-dessous). La langue classique admettait des emplois où seul connaître serait aujourd'hui possible : avec une proposition (savoir que…), un infinitif, un nom concret.
5.1 Cet homme, qui ne savait pas précisément la demeure de son beau-père, qu'il avait changée depuis peu, était aussi embarrassé que nous.
J.-F. Regnard, Voyage en Laponie, p. 144.
♦ Stylistiquement, savoir peut s'employer pour suggérer une connaissance organisée, ajoutant à connaître la valeur de savoir, A., 2.
5.2 On peut sentir de l'amitié pour un homme qui ne parle pas votre langue, on se tait. Mais on sait mieux l'amitié de celui avec qui on parle. Qui peut s'exprimer.
Claude Roy, Nous, p. 336.
♦ En savoir (qqch.). || J'en sais qqch. || Ce que j'en sais. → Écho, cit. 11. || Qu'est-ce que tu en sais, d'abord ? — En savoir davantage. → Numéro, cit. 1. — ☑ N'en savoir rien. → Blanc, cit. 27; futaine, cit. || Je n'en sais (fam. j'en sais) rien. || Il n'en sait rien du tout.
♦ Par euphém. ☑ Qu'on sait, que vous savez, sert à qualifier une personne, une chose que l'on ne veut pas désigner (et qui est connue de l'interlocuteur). || Je vous envoie le portrait que vous savez (→ 1. Lieu, cit. 30). || À qui vous savez (→ Enfariner, cit. 3). || Dire, d'un ton que je sais… (→ Faire, cit. 255). || Ce que…, celui que vous savez.
6 (Cet argent) Vient de qui vous savez pour ce que vous savez.
Hugo, Ruy Blas, IV, 3.
♦ Suivi d'un complément déterminé. (Avec un attribut du compl. d'objet). || Il sera fâché (cit. 16) de savoir maman malade, de savoir qu'elle est malade. → aussi Parti, cit. 8. || Savoir qqn en mauvaises mains (→ Mécontent, cit. 3).
♦ Littér. (Avec un compl. déterminé ou non, suivi d'une spécification). || Je sais un lieu très agréable. || Je sais un homme qui pourra vous renseigner. — Cour. (Suivi d'un inf.). || Il aide ceux qu'il sait être dans le besoin. (Cf. le tour relatif « … qu'il sait qui est ». La personne que je sais être venue; que je sais qui est venue).
7 Je sais un paysan qu'on appelait Gros-Pierre.
Molière, l'École des femmes, I, 1.
8 Je ramenai la conversation sur des sujets que je savais l'intéresser (…)
B. Constant, Adolphe, II.
9 Il la savait là, tout près, séparée de lui par deux portes (…)
Maupassant, Notre cœur, II, I.
♦ Savoir au subj. → ci-dessous B., 5.
10 Une petite phrase de Hamlet, que je ne sache pas avoir été beaucoup remarquée (…)
Gide, Journal, 10 juil. 1931.
♦ Savoir qqch. à qqn : savoir que qqn a qqch. (⇒ Connaître). || Savoir à qqn des opinions… (→ Impénitence, cit. 2), des ennemis. || Je ne lui sais pas d'ennemis.
11 (…) celle-là aussi s'était remise à le considérer, depuis qu'elle lui savait des rentes.
Zola, la Terre, IV, IV.
♦ Faire savoir (qqch. à qqn). ⇒ Annoncer, apprendre, communiquer, notifier (→ Ambassade, cit. 1; poursuite, cit. 7). Correspond, avec la construction inverse aux verbes avertir, aviser, mander, prévenir (qqn de qqch.). || Ce que j'aurai à vous faire savoir (→ Ébruiter, cit. 2). || Faire savoir qqch. à qqn par écrit (⇒ Apprendre). — Spécialt. (Dans le style épistolaire administratif, militaire). || J'ai l'honneur de vous faire savoir… (employé par un supérieur qui s'adresse à un inférieur).
♦ (Fin XIIe). Spécialt. Être conscient de…; connaître la valeur, la portée de… (un acte, un sentiment concernant le sujet). || Savoir ce qu'on dit, ce qu'on fait. || Il ne sait pas ce qu'il dit (cf. Il dit n'importe quoi, il dit des bêtises…). || Savoir ce qu'on veut (→ aussi Flotter, cit. 7). || Il ne sait pas ce qu'il veut : il est indécis. || Il ne sait plus ni ce qu'il dit ni ce qu'il fait : il est troublé (→ Cervelle, cit. 2). || « Ils ne savent pas ce qu'ils font » (→ Crucifier, cit. 1). — Littér. || « Je sais mes perfidies… » (cit. 1). ⇒ Reconnaître. || Ressentir (cit. 4) et savoir une peine. — Cour. || Il sait son devoir (cit. 19), ses obligations. ☑ Loc. cour. Savoir gré (de qqch. à qqn). ⇒ Gré (cit. 23 à 26).
12 Il n'est pas permis de dire qu'on sait une chose alors même qu'on la fait tant qu'on ne sait pas qu'on la fait.
Léon Brunschvicg, Connaissance de soi, p. 68, in Foulquié, Dict. de la langue philosophique, art. Science.
♦ Cour. ☑ Sans le savoir : sans en être conscient (→ 1. Mère, cit. 10; 1. peuple, cit. 14). || « Le Philosophe sans le savoir », comédie de Sedaine (→ aussi Juron, cit. 2; personnification, cit. 1). — || « Il y a plus de quarante ans que je dis de la prose (cit. 8) sans que j'en susse rien (…) » (Molière). — ☑ Fam. Je ne veux pas le savoir : je ne veux pas connaître vos raisons, vos objections. ☑ Il ne veut rien savoir : il refuse de tenir compte des objections, des observations, des injonctions (→ Remorque, cit. 2).
13 Je ne veux rien savoir, ni si les champs fleurissent;
Ni ce qu'il adviendra du simulacre humain (…)
Je me dis seulement : « À cette heure, en ce lieu,
Un jour, je fus aimé, j'aimais, elle était belle. »
A. de Musset, Poésies nouvelles, « Souvenir ».
2 Avoir dans l'esprit un ensemble d'idées et d'images constituant des connaissances organisées rationnellement à propos de (un objet de pensée). — (Avec un compl. déterminé). Vx. || Savoir les preuves de la religion (→ Prouver, cit. 2). ☑ Loc. Savoir le fin (cit. 9) des choses, d'une affaire, le fort (cit. 65) et le faible de…
14 Maintenant vous savez l'affaire aussi bien que moi. Tout ce que vous venez de lire est l'histoire du procès.
Beaumarchais, Mémoires… dans l'affaire Goëzman, p. 91.
♦ Mod. Avec un compl. démonstratif, indéfini (tout, rien…). || Savoir des choses, qqch. (→ Apprendre, cit. 8 et 54; curiosité, cit. 3). Fam. || Il en sait, des choses : il est instruit, savant. || Ce que chacun sait (→ Expérience, cit. 16 et 29). || Tout ce qu'on est capable de savoir (→ Philosophe, cit. 4; philosophie, cit. 2). ⇒ Sagesse. — Ne rien savoir en chimie, en psychologie. Vx. || N'y rien savoir (→ ci-dessous, cit. 15, Descartes). — Savoir qqch. de science certaine (→ Énoncer, cit. 7). || Savoir qqch. par expérience. || Savoir qqch. parfaitement, sur le bout du doigt, sur l'ongle (vx). → ci-dessous, 6., savoir par cœur. — En savoir plus, moins, autant que qqn (sur qqch.). → 1. Balance, cit. 9; écolier, cit. 2. ☑ En savoir long sur qqn. || Savoir peu, beaucoup… (→ Instruire, cit. 26; 1. parler, cit. 11; raisonner, cit. 1). — Savoir ce qu'est… ce que c'est que… (→ Bonheur, cit. 13; croyance, cit. 6). ☑ Loc. Savoir ce que parler veut dire : comprendre une allusion. — La seule chose que je sais, c'est que je ne sais rien, mot de Socrate (cité par Cicéron, Académiques, I, 4). — Que sais-je ?, devise de Montaigne (Essais, II, XII). ⇒ Doute (→ Peut-être, cit. 4). — Il croit tout savoir (→ Grume, cit. 2). || Ne rien savoir (→ Lunettes, cit. 5). — ☑ Loc. Il ne sait rien de rien, il ne sait ni (cit. 4) A ni B : il est ignare, ignorant.
15 Pour la Physique, je croirais n'y rien savoir, si je ne savais que dire comment les choses peuvent être, sans démontrer qu'elles ne peuvent être autrement (…)
Descartes, Lettres, 11 mars 1640.
16 Puisqu'on ne peut être universel et savoir tout ce qui se peut savoir sur tout, il faut savoir peu de tout. Car il est bien plus beau de savoir quelque chose de tout que de savoir tout d'une chose (…)
Pascal, Pensées, I, 37.
17 Pour bien savoir les choses, il en faut savoir le détail, et comme il est presque infini, nos connaissances sont toujours superficielles et imparfaites.
La Rochefoucauld, Maximes, 106.
18 — (Pyrrhon) N'est-ce pas savoir beaucoup, que de savoir qu'on ne sait rien. — Non, ce n'est pas savoir grand'chose. Un paysan bien grossier et bien ignorant connaît son ignorance (…) mieux (…) que vous la vôtre, car vous vous croyez au-dessus de tout le genre humain en affectant d'ignorer toutes choses.
Fénelon, Dialogue des morts, XXIX.
19 Nous ne savons plus rien de ce qu'on nous a lu,
Nous ne savons plus rien de ce qu'on nous a dit.
Nous ne connaissons plus qu'un éternel édit,
Nous ne savons plus rien que Votre ordre absolu.
Ch. Péguy, la Tapisserie de Notre-Dame, « Cinq prières… », IV.
20 On a mal jugé Montaigne; et de là vient sans doute qu'on ne le lit pas assez. Et sur quoi le juge-t-on ? Sur son « que sais-je ? » qui n'est nullement son dernier mot, mais qu'il propose seulement à ceux qui voudraient douter de tout par jeu de sophistique, comme la formule la moins affirmative qui soit.
Alain, Propos, 8 juin 1912, Le doute.
21 Un homme d'esprit avait soutenu que Poincaré savait tout et ne comprenait rien, tandis que Briand ne savait rien et comprenait tout (…)
A. Maurois, Mémoires I, XVI.
N. B. Il s'agit de Clemenceau.
♦ Spécialt. Avoir bien compris, bien assimilé (un objet de connaissance). || Il a tout appris par cœur, mais en fait il ne sait rien (→ le sens opposé, ci-dessous, 6.).
♦ (XVIIe). Absolt. Avoir des connaissances rationnelles (⇒ 2. Savoir, science). || Savoir et apprendre (cit. 27 et 32). || L'ardeur de savoir. ⇒ Apprendre (→ Pâture, cit. 5). || Savoir, vouloir et pouvoir. ⇒ Pouvoir. ☑ Savoir, c'est pouvoir (aphorisme traduit de Bacon). || « L'homme ne peut ni savoir, ni ne désirer point de savoir » (→ Dieu, cit. 3). || L'homme, être qui sait (cf. Homo sapiens), « qui sait qu'il sait » (→ Réfléchir, cit. 18). || Savoir, opposé à croire, à sentir, à agir… || « Je vois, je sais, je crois (cit. 62), je suis désabusée ».
22 Vouloir nous brûle et Pouvoir nous détruit; mais savoir laisse notre faible organisation dans un perpétuel état de calme.
Balzac, la Peau de chagrin, Pl., t. IX, p. 40.
23 Savoir est le premier mot du symbole de la religion naturelle : car savoir est la première condition du commerce de l'homme avec les choses, de cette pénétration de l'univers qui est la vie intellectuelle de l'individu : savoir, c'est s'initier à Dieu.
Renan, l'Avenir de la science, II, Œ. compl., t. III, p. 741.
24 L'appétit de savoir naît du doute. Cesse de croire et instruis-toi.
Gide, les Nouvelles Nourritures, p. 292.
25 (…) savoir c'est comprendre comment la moindre chose est liée au tout; aucune chose n'a sa raison en elle (…)
Alain, Propos, 15 mai 1911, Regarde au loin.
♦ Avoir des connaissances et de l'expérience (→ ci-dessous, 4.). ☑ Si jeunesse savait. || C'est jeune et ça ne sait pas.
3 (Suivi d'une complétive; au sens 1. ou 2., selon le contenu de la proposition). — Savoir que… || « Nous autres, civilisations (cit. 13), nous savons que nous sommes mortelles ». — Nous croyons savoir que…, s'emploie pour annoncer une nouvelle qui n'est pas confirmée. — (Au sens 2.). || Je sais qu'elle est (l'âme), sans savoir quelle est son essence (→ Moi, cit. 64), je pense, je crois que… pour des raisons intellectuelles. || L'homme sait qu'il meurt, il a une connaissance rationnelle du phénomène qu'est la mort (→ Écraser, cit. 1, Pascal). — Je sais bien que…, s'emploie avec une valeur concessive. — Ne pas savoir que…, construit avec le subj. || « Oh ! je ne savais pas qu'on souffrît à ce point ! » (Hugo, Hernani, V, 6).
26 Ô toi que j'eusse aimée, ô toi qui le savais !
Baudelaire, les Fleurs du mal, « Tableaux parisiens », XCIII.
♦ Avec un double élément conjonctif. || « Ces frontières de l'Est dont elle savait qu'était issue sa race transplantée » (Henriot).
27 « Dans de la nuit qu'on sait qui deviendra moins noire » Rost., Chantecl., II, 1; « Il (le chrétien) se rend dans son Arche, qu'il sait qui ne sombrera pas » H. de Montherl., Écho de Paris, 20 mars 1934. Cette construction est parfaitement naturelle (…) Elle nous semble bien préférable au tour avec infinitif qui sent par trop le latin (…)
G. et R. Le Bidois, Syntaxe du franç. moderne, §580.
♦ Savoir où (cit. 78 et 83), quand (cit. 23)… || Savoir si… || Savoir pourquoi (cit. 19). — Savoir combien…, comme, comment (cit. 13 et 14). || Savez-vous où, quand, si… ?
4 Vx, archaïque ou régional. Être en mesure de retrouver ou d'utiliser une chose, parce qu'on en connaît l'existence (→ ci-dessus, 1.) ou les caractères (→ ci-dessus, 2.). ⇒ Connaître. — Savoir un moyen, une façon (→ Net, cit. 5). || Si l'on sait la méthode (cit. 2) de trouver la vérité… || Savoir la route, le pays. || Savoir la carte. Mod. || Savoir le chemin, son chemin.
28 (…) Michu débarrassa ses pierres et découvrit l'entrée du caveau. La comtesse, qui croyait savoir sa forêt, fut surprise au dernier point en se voyant sous un berceau de cave.
Balzac, Une ténébreuse affaire, Pl., t. VII, p. 511.
5 (V. 1050). Être en mesure de pratiquer (une activité réglée), d'exécuter…, grâce à des connaissances théoriques et pratiques. — Savoir l'orthographe (cit. 4) : savoir écrire en respectant les règles de l'orthographe. || Savoir la musique (cit. 23). || Savoir son métier (→ Coiffeur, cit. 1). — Spécialt. || Savoir une langue (cit. 42; → Commandement, cit. 12; écrivain, cit. 12). || Réunissant le peu d'espagnol que nous savions (→ Parvenir, cit. 7). — Savoir d'une langue, en connaître des éléments. || « Quoi, monsieur sait du grec ? » (cit. 14).
♦ Vx. || Se flatter de savoir sa langue, de bien parler, de bien écrire (→ Décence, cit. 3; éplucher, cit. 7). || Savoir la cour (→ Dissimuler, cit. 7, La Bruyère). || Il sait la guerre (cit. 21). || Savoir le monde (supra cit. 50).
6 Mod. Avoir présent à l'esprit dans tous ses détails, de manière à pouvoir répéter, reproduire. ⇒ Mémoire. (1580). || Savoir qqch., un texte, un passage, un poème… || Savoir par cœur. ⇒ Cœur (cit. 138, 140 et 141; et aussi lac, cit. 2; moi, cit. 12). || « Savoir par cœur n'est pas savoir » (ce dernier étant pris au sens 2.). → 1. Mémoire, cit. 6; livresque, cit. 1, Montaigne. || Savoir son rôle. — Savoir sa leçon, sa table de multiplication, ses verbes irréguliers… || « Ce que je sais le mieux (cit. 14) c'est mon commencement ». — Absolt. || Une fois qu'il a appris (le pédant), il sait (→ Résumé, cit. 3).
29 Il apprit à lire et à écrire, sans doute selon la méthode de l'Orient, consistant à mettre entre les mains de l'enfant un livre qu'il répète en cadence avec ses petits camarades, jusqu'à ce qu'il le sache par cœur.
Renan, Vie de Jésus, III, Œ. compl., t. IV, p. 104.
♦ Par ext. || Savoir quelqu'un par cœur (cit. 142). || Je sais mon Don Juan sur le bout du doigt (→ Coureur, cit. 4).
B (Sens affaibli, dans des expressions surtout impératives, interrogatives, négatives).
1 Être au courant de, être au fait de. || Comme on (le) sait (→ Ciel, cit. 45). || C'est, comme vous savez… (→ 1. Apostrophe, cit. 1). || On sait que… (→ Formaliste, cit. 1), on sait assez que… || Tout le monde sait (→ Moindre, cit. 2). || Qui ne sait que… (→ Disposer, cit. 13). — ☑ Vous n'êtes pas sans savoir que : vous n'ignorez pas que… — Ils votent tu sais comment (→ Aveuglette, cit. 2).
♦ ☑ (V. 1050). Dieu sait…, introduit un fait qu'on présente comme connu de Dieu (vrai, sûr) ou encore comme caché des hommes. ⇒ Dieu (infra cit. 50). || Dieu sait comme. ⇒ Comme. — Par anal. || Le diable sait… (→ Mettre, cit. 73).
2 (À l'impér.). || Sachez que… : apprenez, prenez garde que… (→ Céder, cit. 15; cruche, cit. 7). || Sache donc que… (→ Destinée, cit. 17; faner, cit. 18). || Sachons-le bien ! : soyons en persuadés, certains (→ Province, cit. 7).
♦ (À l'indic.). En incise ou en tête de phrase, pour souligner une affirmation. (→ Intense, cit. 4; mentir, cit. 7; rentier, cit. 1). || « Il est gentil, vous savez » (Proust, VI, 98).
♦ (1819, in D. D. L.). En interrogation. || Savez-vous, sais-tu ? (incises courantes dans le français de Belgique) : n'est-ce pas ?
30 Monsieur, il y avait tant de ferraille dans l'air, savez-vous ? qu'une mouche aurait été infailliblement écrasée entre deux boulets, si elle eût osé traverser le village, sais-tu ? (Savez-vous, sais-tu, sont deux locutions parasites dont les Belges se servent à chaque instant dans la conversation).
31 (…) ses prix sont excessifs, savez-vous, ses prix je les trouve inconvenants !
Proust, À l'ombre des jeunes filles en fleurs, Pl., t. I, p. 603.
♦ En tête de proposition ou en incise. || Tu sais… ?, sais-tu… ? || Il est gentil, tu sais.
32 (…) il a repris : — Sais-tu, j'ai fait les comptes (…)
C.-F. Ramuz, la Grande Peur…, III.
♦ ☑ (1090, ço est a savoir). À savoir (loc. conj. de coordination) : c'est-à-dire ⇒ Assavoir, II. (→ Abeille, cit. 4; nivellement, cit. 1; opiner, cit. 3). || C'est à savoir (→ Fable, cit. 11). — Ellipt. || Savoir… (→ Exécutif, cit. 1; kaléidoscope, cit. 1).
3 (Expressions interrogatives). || Je voudrais savoir… (→ Divan, cit. 1). ☑ Peut-on savoir ? (→ Qui, cit. 88). — (Pour marquer le doute). ☑ Fam. Va savoir !, allez savoir ! : c'est bien difficile à savoir. — Qui sait ? (→ Magistrature, cit. 2). || Qui sait si… — ☑ On raconte ceci, cela…, est-ce que je sais ?, je ne peux pas savoir le reste, tout ce qu'on raconte (→ Piment, cit. 5). || Que sais-je ? à savoir… (→ Docte, cit. 4). ☑ Reste (cit. 34) à savoir si… || Savoir si… || Je me demande si (→ Gueuserie, cit. 4).
33 (…) ça m'intéresse, ce qui se passe là-dedans (…) Savoir si ça va décider Buteau !
Zola, la Terre, I, IV.
34 (…) on peut présenter la question d'une façon détournée au moyen de la formule figée savoir si (ou : qui sait si) : « Savoir si l'usine de Bertrand est en grève ? » J. Romains, 6 octobre, 170; « Savoir s'ils me rendront mes galons. » Id., Verdun, 237; Cf. avec un mot interrogatif : « Savoir quel temps il fera demain ! » Id., Travaux et j., 187 (…) — (…) « Mais qui sait si elle trouverait Albertine ! si celle-ci ne serait pas dans les coulisses… » (Proust, R. t. p., XI, 211-12). Ces deux locutions (…) permettent d'éviter l'inversion interrogative.
R. Le Bidois, l'Inversion du sujet, p. 50.
4 (En tour négatif, avec ne). ☑ On ne sait jamais (cit. 21).
35 Savoir est chose absolue; s'en écarter le moins du monde n'est plus savoir, mais penser, croire, supposer. Aussi le discordantiel (ne « explétif ») a-t-il sur lui le même effet que sur pouvoir, oser (…) La nuance sémantique entre je ne sais et je ne sais pas est assez nette. Je ne sais marque l'incertitude, l'hésitation. Au contraire je ne sais pas marque positivement qu'on est certain de ne pas savoir.
J. Damourette et É. Pichon, Essai de grammaire de la langue franç., §2235.
♦ Je ne sais qui a dit je ne sais où… (→ Influer, cit. 6). || Je ne sais quoi (→ Amour, cit. 9; démodé, cit. 2; inconstant, cit. 3; midi, cit. 7). || Je ne sais, on ne sait quel… || On (cit. 56 et 58) ne sait quoi de… || Il y a je ne sais combien (cit. 9 et 14) de temps, très longtemps. || Je ne sais où (→ Côtoyer, cit. 1). || Je ne sais pourquoi (→ Cheminée, cit. 2).
36 Je ne sais si mon cœur s'apaisera jamais (…)
Racine, la Thébaïde, IV, 1.
37 L'amour, ne vous déplaise, est un je ne sais quoi,
Qui vous prend, je ne sais ni par où ni pourquoi,
Qui va je ne sais où, qui fait naître en notre âme
Je ne sais quelle ardeur que l'on prend pour la femme,
Et ce je ne sais quoi qui paraît si charmant,
Sort enfin de nos cœurs, et je ne sais comment.
J.-F. Regnard, Démocrite amoureux, I, 5.
38 Il a je n'sais plus qui dans sa famille qui est je n'sais plus quoi. Comme ça, il est renseigné.
H. Barbusse, le Feu, I, II.
39 — Faudrait voir à ne pas abandonner si vite un ami, Monsieur Lafcadio Lonnesaitpluski ! (…)
Gide, les Caves du Vatican, V, V.
40 Thérèse attendait elle ne savait quoi de ce ciel inaltérable.
F. Mauriac, Thérèse Desqueyroux, VIII.
REM. Les expressions On ne sait…, je ne sais qui… (quoi, quel), Dieu sait…, se placent souvent en bloc après la proposition sujet (→ N'importe qui, quoi…). Sorti de je ne sais où (→ Oiseau, cit. 14). || « Une fois là, mon oncle Jules s'établit marchand de je ne sais quoi » Maupassant, Mon oncle Jules (in Le Bidois, Syntaxe du franç. moderne, §1905). || « Notre départ est remis à je ne sais quand » (Gide, Journal, 1916, p. 543). || « Vers elle ne savait quoi de périlleux » (Mauriac, Thérèse Desqueyroux, p. 129). — Sorti je ne sais d'où (→ Jumeau, cit. 1). On ne sait dans quel arrière-fond… (cit. 3). || « Des vestiges d'idées étrangères venues Dieu sait d'où » J. Romains (in G. et R. Le Bidois, Syntaxe du franç. moderne, §1905).
41 Rien n'est plus vrai que ma grand-mère radote avec son histoire de je ne sais quels habitants qui, dans je ne sais quel temps, abordèrent ici de je ne sais où, d'une contrée au delà de nos mers.
Diderot, Entretien d'un philosophe avec la maréchale de
42 (…) une petite pièce de dix sous oubliée depuis on ne sait quand, là, dans le gousset de son gilet.
Gide, les Faux-monnayeurs, I, X.
♦ N. m. || Un je ne sais quoi. ⇒ Je-ne-sais-quoi. || Cet on ne sait quoi (→ Halo, cit. 4). — Un je ne sais qui (vieilli) : un inconnu, un individu quelconque.
♦ Adj. Fam. || Des radio-je-ne-sais-quoi (→ 2. Radio, cit. 3). — Vieilli. || Un je ne sais quel homme.
♦ Fam. || Il est, elle est tout(e) je ne sais comment (→ Drôle, cit. 11). || « Je me suis trouvée toute je ne sais comment » (Diderot, Jacques le fataliste, Pl., p. 680).
♦ (Suivi d'une interrogative indirecte à l'infinitif). Être dans l'embarras, la confusion. || Ne savoir que faire, quoi faire (→ aussi Journée, cit. 2). || Ne savoir que faire de qqch…, n'en avoir nul besoin. || Ne savoir que devenir (cit. 13), où se mettre. || Ils ne savent qu'inventer (cit. 9 et 10) pour… — ☑ Loc. Ne savoir sur quel pied danser, de quel côté se tourner, à quel saint se vouer; où donner de la tête : être dans une situation embarrassante. ☑ Ne savoir où se fourrer (cit. 26). ☑ On ne sait par où, par quel bout le prendre.
43 Un autre cas où ne suffit à marquer la négation, c'est celui des tours réduits d'interrogation indirecte, comportant le verbe savoir (…) un interrogatif non sujet, et un infinitif : « Vous ne savez quoi inventer pour dépenser de l'argent » Balzac, Eug. Grandet, 121; « Hivert ne savait auquel répondre » Flaubert, Bov., II, ch. 1 (…)
G. et R. Le Bidois, Syntaxe du franç. moderne, §1773.
5 ☑ (Au subj. : sache, dans des loc. restrictives). Pour autant que je sache (→ Parentage, cit.), autant qu'on sache.
♦ ☑ Que je sache : autant que je puisse savoir, en juger, dans la mesure où je le sais. || Je n'avais jamais rien lu, que je sache (autant que je peux m'en souvenir); → Local, cit. 4. ⇒ Que.
44 (…) la locution que je sache (…) correspond à peu près au latin quod sciam. Il s'agit ici primitivement d'une proposition relative sans antécédent : que je sache : ce que je sache et le subjonctif est employé parce qu'on « se contente de supposer une certaine étendue de son savoir (A. Tobler). »
K. Nyrop, Grammaire historique, t. VI, p. 322.
45 Et il se porte bien, que vous sachiez, mon père ?
46 — Sibylle n'a pas la prétention, que je sache, d'imposer silence à mes amis (…)
Barbey d'Aurevilly, les Diaboliques, « Dessous de cartes… », p. 210.
47 Cette fontaine de Merlin est-elle profonde, que l'on sache ?
48 Nul être, que je sache, n'a été agencé pour produire comme nous ce fluide étrange, que nous appelons pensée (…)
Maeterlinck, la Vie des abeilles, VII, XIX.
49 Il n'écrivait pas de vers, qu'on sache, ni ne composait de chansons.
A. Arnoux, Suite variée, « Le fauteuil », p. 207.
50 Vous avez, lui dis-je, signé un pacte avec Benès. Or son gouvernement est, que je sache, provisoire.
Ch. de Gaulle, Mémoires de guerre, t. III, p. 65.
♦ Littér. En principale, et à la forme négative, au subjonctif, à la 1re pers. || Je ne sache pas que… (→ Haut, cit. 62). || Je ne sache guère de… (Brunetière). || Je ne sache personne, rien… (→ Concupiscence, cit. 4).
51 Je ne sache guère que le Misanthrope où le héros de la pièce ait fait un mauvais choix.
Rousseau, Lettre à d'Alembert.
52 — (…) méprisez-vous le nom de votre père, à présent ? — Je n'en sache pas de plus honorable (…)
Émile Augier, les Effrontés, I, 2.
53 La petite Cerny fait incontestablement une charmante Renée Mauperin, et je ne sache pas d'actrice, en ce moment, qui ait pu la réaliser d'une façon plus charmante.
Ed. et J. de Goncourt, Journal, 5 nov. 1886, t. VII, p. 111.
54 Nous ne sachions pas qu'on l'ait jamais faite en ces termes.
♦ (Avec la forme incorrecte sachons) :
55 Quand Victor Hugo a écrit cette phrase : « Nous ne sachons pas qu'on ait fait des mots nouveaux », il a commis un barbarisme et s'est infligé du même coup un démenti en prouvant que l'on fait parfois, sans le savoir, des mots nouveaux.
———
II (V. 980; suivi d'un infinitif).
1 Être capable de (pratiquer une activité) par un apprentissage, par l'acquisition d'habitudes (→ ci-dessus, I., A., 5. et 6.). || Savoir lire, écrire, compter (→ Caqueter, cit. 1; parchemin, cit. 3). || Enfant qui sait marcher, parler (→ Langue, cit. 26). || Savoir nager, skier, conduire… || En quinze jours, elle a su danser (→ Duvet, cit. 3). || Savoir jouer du piano (→ Accord, cit. 24), manier (cit. 6 et 8) un instrument. || Savoir parler l'anglais : savoir l'anglais.
56 Le verbe savoir exprime alors (lorsqu'il est construit avec l'infinitif régime direct) que l'on possède entièrement la technique d'une action, de sorte que, sauf empêchement matériel, on peut répéter cette action à volonté.
J. Damourette et É. Pichon, Essai de grammaire de la langue franç., §1122.
2 (1080). Être capable de (faire qqch.), par une habileté naturelle ou acquise (→ Autant, cit. 28; mot, cit. 11). || Savoir bien, mal s'exprimer (cit. 42). — Fam. || C'est un malin (cit. 12, 13 et 14), il sait s'y prendre, il sait s'arranger. || Savoir y faire. ⇒ Savoir-faire.
♦ Spécialt. Être capable de (faire qqch.) le mieux possible, selon les règles. || Savoir vivre. ⇒ Savoir-vivre. — Savoir manger (1. Manger, cit. 16) : être gastronome. ⇒ aussi Savoir-.
3 Avoir par aptitude, par un effort de volonté la possibilité de. || Savoir dire non (cit. 19 et 20). || Savoir écouter (cit. 12 et 13), se taire… || Qu'« elle sache ignorer les choses qu'elle sait » (→ Aimer, cit. 58). || L'avenir est à ceux qui savent attendre (→ 1. Patience, cit. 14). || Celui qui ne sait pas attendre et souffrir (→ Impatience, cit. 1). || Savoir vieillir, savoir rester jeune (cit. 11 et 12). || Savoir faire des sacrifices. || Savoir renoncer à… (→ Délivrer, cit. 12). || Il ne sait pas refuser. ⇒ Incapable. || Savoir aimer, haïr (cit. 17 et 18). || Boris n'aurait pas su aimer une fille de son âge (→ Cafouiller, cit.).
57 En gros (…) savoir, avec un infinitif suppose une certaine opération intellectuelle — et pouvoir suppose une puissance, un potentiel (…) Des chevauchements peuvent se produire, quand il s'agit d'exprimer l'idée de « avoir le moyen de » ou de « être capable de… ». S'il fallait des exemples de cette particularité sémantique, on donnerait bien cette phrase de François Mauriac : « De quoi était-elle faite (une souffrance) ? Il n'aurait su le dire » (L'Agneau, p. 72) … et celle-ci encore, d'Henri Guillemin : « Ici un mot que je n'ai pas su lire » (Note, dans Pierres, de V. Hugo, p. 151). — Dans ces phrases, on eût pu employer pouvoir.
M. Grevisse, Problèmes de langage, p. 218.
♦ (À l'impér.). || Sache vivre de la vie intérieure (→ Domaine, cit. 2). Cf. Puisses-tu…
58 La République nous appelle;
Sachons vaincre, ou sachons périr (…)
M.-J. Chénier, le Chant du départ (1794).
4 (Au conditionnel et en tour négatif avec ne seul). || « Couvrez (cit. 17) ce sein que je ne saurais voir ». || On ne saurait rien imaginer de plus… (→ Intense, cit. 1). || On ne saurait croire combien (→ Jaloux, cit. 12). || On ne saurait penser à tout, comédie de Musset. — (En tour interrogatif). Vx. || « Après ce qu'il a fait, que saurait-il donc faire ? » (Racine, Andromaque, II, 1).
59 Je n'ai jamais aimé, pour ma part, ces bégueules
Qui ne sauraient aller au Prado toutes seules (…)
A. de Musset, Premières poésies, « Don Paez », I.
60 En Wallonie, pouvoir répond à l'allemand dürfen; à l'allemand können répond savoir, ex. : — Il fallait bien la suivre, dit l'un d'eux. On ne savait rien lui refuser. En Belgique et dans le Nord de la France, on met le verbe savoir pour pouvoir (…) (Antoine Redier, La Guerre des femmes, chap. III, p. 66) …
J. Damourette et É. Pichon, Essai de grammaire de la langue franc., §1698.
6 (Sujet n. de choses). → Aigu, cit. 10, La Bruyère; délicat, cit. 26, La Fontaine. || Aucune image romanesque ne saurait être complète (cit. 8; et aussi Pamphlet, cit. 1, Courier). || Cette tentative ne saurait être taxée de… (→ Dédale, cit. 7, Renan). — (Avec un impersonnel). || Il ne saurait être question de… — (À la forme interrogative, vx). || Eh ! que me saurait-il arriver (cit. 61) que la mort ?
61 (…) « savoir », dans les articles de Norpois, est le signe du futur, c'est-à-dire le signe des désirs de Norpois (…) Vous comprenez bien que si « savoir » n'était pas devenu le simple signe du futur, on comprendrait à la rigueur que le sujet de ce verbe pût être un pays. Par exemple chaque fois que Norpois dit : « L'Amérique ne saurait rester indifférente à ces violations répétées du droit » (…) il est clair que de telles phrases expriment les désirs de Norpois (…) mais enfin là, le verbe peut encore garder malgré tout son sens ancien, car un pays peut « savoir », l'Amérique peut « savoir » (…) Mais le doute n'est plus possible quand Norpois écrit : « Ces dévastations systématiques ne sauraient persuader aux neutres », « la région des Lacs ne saurait manquer de tomber à bref délai aux mains des alliés » (…) Or il est certain que ces dévastations, ces régions (…) sont des choses inanimées qui ne peuvent pas savoir.
Proust, le Temps retrouvé, Pl., t. III, p. 783.
62 Vous m'avez reçu avec une absence de façons, et de défiance, dont je ne saurais vous dire combien elle m'a touché (…)
J. Romains, les Hommes de bonne volonté, t. II, XX, p. 215.
7 Fam. ☑ Loc. (Après un verbe). Tout ce qu'il sait : beaucoup, énormément, autant qu'on peut, sans se retenir. || Il cognait tout ce qu'il sait. — REM. Si savoir est accordé en temps, la phrase n'est plus familière :
63 Vénus arriva trop tard pour défendre son incomparable Adonis : sa douleur ne connut plus de bornes, elle pleura tout ce qu'elle savait.
Émile Henriot, Mythologie légère, p. 35.
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se savoir v. pron.
♦ (Déb. XIXe). Sens réfléchi. (Avec un attribut). || Se savoir invulnérable (→ Blasphème, cit. 5). || Ceux qui se savent aimés (→ Despotisme, cit. 10; frétiller, cit. 2). — (Avec un compl.). || Se savoir des défauts.
64 (Gervaise) ne se savait pas une telle curiosité de ce que devenait ce malheureux (Lantier), qui s'était si mal conduit avec elle.
Zola, l'Assommoir, VI, t. I, p. 238.
65 Elle se savait une grande pécheresse car elle avait une foi inébranlable, et tenait l'orgue pour un cachet minime afin de contrebalancer un peu auprès de Dieu la fureur de sa chair.
Paul Vialar, M. Dupont est mort, I, p. 11.
♦ (1671). Sens passif. Être su. || Tout finit par se savoir. ☑ Ça se saurait !
66 Avez-vous vécu jusqu'à cet âge sans avoir appris que tout se sait, que la haine est aux aguets et que chaque mauvaise nouvelle trouve aussitôt son messager ?
A. Maurois, les Roses de septembre, III, V.
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su, sue p. p. adj.
ÉTYM. (XIIe).
♦ (D'après c'est tout vu). Rare. || C'est tout su.
66.1 — Tu n'as pas besoin d'interprète pour les papiers. Ils sont parfaits, tes papiers. — Mais si, mais si. On ne sait jamais. — C'est tout su, dit Maillat.
Robert Merle, Week-end à Zuydcoote, p. 184.
♦ N. m. || Le su : la connaissance que l'on a d'une chose (au sens I., A., 1., de savoir). Dans des expressions. ☑ Au vu et au su de qqn (→ Légitimation, cit. 3). Littér. || Au su et à l'insu (cit. 3)…
67 (…) sa coquine de femme (…) vit au su de tout Combray avec un certain monsieur de Charlus.
Proust, Du côté de chez Swann, Pl., t. I, p. 34.
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CONTR. Douter, ignorer.
DÉR. Savant, 2. savoir.
COMP. Assavoir, insu, savoir-faire, savoir-vivre.
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2. savoir [savwaʀ] n. m.
ÉTYM. Fin XIIe, saveir; savir « sagesse, intelligence », 842; de 1. savoir.
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1 (V. 1155). Ce que l'on sait (I., A., 2.); ensemble de connaissances assez nombreuses, plus ou moins systématisées, acquises par une activité mentale suivie. ⇒ Acquis, connaissance(s), culture (cit. 12), érudition, lumière(s), science (→ Onguent, cit. 2, France). || Un savoir acquis par l'étude (⇒ Instruction), par l'expérience. || Grand savoir. || Le savoir de qqn. || L'étendue de son savoir (→ Examiner, cit. 16). — Plein de savoir (→ Haut, cit. 46). || Pauvre (cit. 18) de sens et de savoir. || Mettre l'astuce (cit. 1) à la place du savoir. — Le vrai savoir (→ Fondement, cit. 5). || Un savoir affecté (2. Affecter, p. p. adj., cit. 14), un vain savoir (→ Pot, cit. 12). — Le savoir de qqch. ⇒ Connaissance.
1 Quel grand et vrai savoir des choses de ce monde (…)
A. de Musset, Poésies nouvelles, « Une soirée perdue ».
2 Amer savoir, celui qu'on tire du voyage !
Baudelaire, les Fleurs du mal, « Tableaux parisiens », CXXVI, VII.
3 (…) je respecte trop la petite part de savoir que je possède, qui m'a coûté tant de peine à acquérir, pour y introduire des éléments douteux.
Bernanos, les Grands Cimetières sous la lune, p. 248.
4 À proportion que la science élargit son pouvoir, elle se tient moins assurée de son savoir.
Jean Rostand, Pensées d'un biologiste, p. 139, in Foulquié, Dict. de la langue philosophique, art. Science.
♦ Un, des savoirs. ⇒ Connaissance.
5 Tel que l'on croit complet et maître en toute chose
Ne dit pas les savoirs qu'à tort on lui suppose (…)
A. de Vigny, Poèmes philosophiques, « La flûte », III.
2 Le savoir : les savants, la science. || « Que la raison conduise et le savoir éclaire » (cit. 19).
6 Le savoir est honteux, depuis que l'ignorance
A versé son venin dans le sein de la France.
Théophile de Viau, Élégie, « À une dame ».
♦ ☑ Loc. Le gai (cit. 4) savoir.
3 Philos. État de l'esprit qui sait (I., A., 2.); connaissance. Relation entre le sujet et l'objet de pensée dont il admet la vérité, pour des raisons intellectuelles et communicables, à la différence de certitude, croyance, foi (cit. 26); cet objet de pensée. || Dans la perception (cit. 8), un savoir se forme.
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CONTR. Ignorance.
Encyclopédie Universelle. 2012.