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ce

2. ce [ sə ] ( c' devant en, et les formes du v. être commençant par une voyelle; ç' devant a) pron. dém.
çoXe; lat. pop. ecce hoc, de hoc « ceci »
Sert à désigner la chose que la personne qui parle montre ou a dans l'esprit. I
1 ♦ C'EST, CE DOIT (PEUT) ÊTRE, met en valeur un membre de phrase. C'était le bon temps. Ce doit être, ce devait être lui. Ce ne peut être cela. C'est un brave homme; ç'a été un brave homme; ce sont de braves gens. Ce sont, c'étaient eux (mais c'est vous, c'est nous). C'est mon ami et son frère. C'est beau. C'était bien. Ce sera mieux ainsi. Ç'allait être dur. Fam. (sans accord) « Ce n'est pas des visages, c'est des masques » (France). Loc. (où être reste au sing.) Si ce n'est; fût-ce.
2Ce dans une phrase interrogative. Est-ce vous ? Qui était-ce ? Redoublement deCE. Qu'est-ce que c'est ? Redoublé dans une propos. subordonnée. Je sais ce que c'est que ce livre.
3 ♦ C'EST... QUI; C'EST... QUE, sert à détacher en tête un élément de pensée. C'est un gros défaut que l'orgueil. (Avec relative) C'est vous qui le dites ! « Hippolyte ? Grands dieux ! — C'est toi qui l'as nommé ! » (Racine). C'est une bonne idée que tu as eue. (Avec inf.) Ce serait faux que prétendre (littér.), que de prétendre.
C'EST QUE (exprime la cause). S'il est malade, c'est qu'il a trop travaillé. (Exprime l'effet). Puisque vous m'avez appelé, c'est donc que vous voulez me parler. Ce n'est pas que je veuille... : je ne veux pas...
4C'EST À... DE... C'est à lui de jouer. C'est à mourir de rire. C'est à voir.
IICE QUE, QUI, DONT...;CE À QUOI, POUR QUOI.
1Ce que tu dis est faux. Regarde ce qu'il fait. « Ce que l'on conçoit bien s'énonce clairement » (Boileau). « Vous êtes aujourd'hui ce qu'autrefois je fus » (P. Corneille). Ce dont on parle. Ce à quoi tu penses. C'est ce pour quoi on l'emploie. Elle a tout ce qu'elle désire, tout ce qui lui fait plaisir.
2Fam. Ce que : combien, à quel point. ⇒ comme. Ce que c'est beau ! Ce que t'es bête ! « On n'imagine pas ce que c'est difficile de le voir » (A. Gide).
IIIVx ou loc.
1CE, objet direct (sans que, qui...). Ce semble. Mod. Ce me semble : il me semble. — REM. Dans cet emploi, ce est aujourd'hui senti comme sujet.
2Cela. Vx En vertu de ce... Mod. Ce disant, ce faisant : en disant, en faisant cela. Pour ce faire. Les tarifs seront augmentés, et ce, dès la semaine prochaine. Sur ce : là-dessus. Sur ce, il nous quitta.

Ce Symbole chimique du cérium.

ce, cet (devant une voyelle, un h muet)
adj. dém. m. Sing., cette f. Sing., ces m. pl. et f. pl.
rI./r Forme simple.
d1./d Indique une personne ou une chose que l'on montre ou que l'on a déjà citée. Cette montagne. Ce conseil est excellent.
d2./d Avec une expression de temps, désigne un moment rapproché. Ce matin, il a plu. Cette année, j'irai souvent chez vous.
|| Un de ces jours: un jour prochain.
d3./d Dans une phrase exclamative, implique une valeur emphatique ou péjorative. Ah! ce coucher de soleil! Ce nigaud!
rII./r En construction avec les adv. -ci et -là, marque respectivement la proximité et l'éloignement, ou insiste sur le signe démonstratif. Je préfère ce livre-ci à celui-là. Ce visage-là m'est inconnu.
————————
ce
(c' devant e; ç' devant a), Pron. dém. neutre. Désigne la personne ou la chose dont on parle, et représente ceci ou cela.
d1./d Ce + v. être, présentatif non analysable précédant un nom, un adj., un infinitif, une proposition introduite par qui ou que. C'est mon frère. Ce sont eux qui me l'ont dit. C'est à toi de jouer. C'est dommage. Partir, c'est mourir un peu. S'il se tait, c'est qu'il n'a rien à dire. Ce doit être fini maintenant. ç'a été une grande joie.
|| C'en est fait: le sort en est jeté.
|| C'est pourquoi: telle est la cause, le motif pour lequel...
|| Est-ce que...? Formule interrogative. Est-ce que vous viendrez ce soir?
d2./d Ce, antécédent d'un Pron. relatif. Je suis surpris de ce que vous me dites. C'est justement ce à quoi je pense. Ce dont je vous parle.
d3./d Ce, complément (surtout dans cert. expressions figées). Ce faisant, il a déçu tout le monde. Et ce, parce qu'il voulait partir. Pour ce faire, je devrais y aller. Sur ce, il se retira.
d4./d Ce que, loc. adv. exclamative. Ce qu'il m'ennuie avec ses histoires! Ce que c'est que d'être vieux!

I.
⇒CE1, C', Ç', pron. dém. neutre et particule.
Désigne un objet inanimé (plus rarement un être animé) présent, tout au moins dans l'esprit du locuteur. Abrév. c' devant e, ç' devant a.
I.— Ce, pron. neutre.
A.— Fam. ou littér. [En dehors de la fonction d'antécédent] (Loc. gén. figées, souvent avec valeur adv.).
1. Ce. Quelque chose de précis qui vient d'être dit ou qui va l'être.
a) Ce, compl. verbal + part. prés. en prop. abs. au début d'une phrase.
Courant
Ce disant. En disant cela :
1. — S'il m'arrivait de mourir demain, (...), je demande que l'on fasse mon autopsie (...).
Ce disant, avec la pointe de l'index, il esquissait, sur le devant de sa blouse, le tracé d'une incision imaginaire...
G. DUHAMEL, Chronique des Pasquier, Les Maîtres, 1937, p. 204.
Ce faisant :
2. Je serrais. Une poigne rose de bambin vaut un étau. Et, ce faisant, pour la mieux considérer et m'instruire, je rapprochais la vipère de mon nez...
H. BAZIN, Vipère au poing, 1948, p. 8.
Ce que voyant :
3. C'était l'automne : les pommes tenaient à peine aux branches et tombaient au moindre souffle. Ce que voyant, chacun de nos promeneurs se disait :
— Puisque cette pomme est tombée, c'est qu'elle est mûre...
REIDER, Mlle Vallantin, 1862, p. 139.
Rare, affecté
Ce étant (ce, suj. du verbe être). Cf. BALZAC, Œuvres diverses, t. 2, 1850, p. 279.
Ce rêvant. En rêvant à cela :
4. Baudelaire et les autres construisent des châteaux de l'âme où ils se réfugient pour échapper à la vie... Ce rêvant, nous sommes voisins des grands esprits religieux, car nous croyons avec eux que la connaissance sensible n'est pas une véritable science...
BARRÈS, Mes cahiers, t. 10, 1913-14, p. 117.
Ce en incise (vx). Ce dit-on. Dit-on. Et, ce dit-on, il en était aimé (CHATEAUBRIAND, Mémoires d'Outre-Tombe, 1848 ds G. MAUGER, Gramm. pratique du fr. d'auj., Paris, Hachette, 1968, p. 127). Ce crois-je :
5. Entre deux beautés qui l'agaçaient, il choisit la plus petite :
La grande en fut, ce crois-je, bien despite...
SAINTE-BEUVE, Tabl. hist. et crit. de la poésie fr. et du théâtre fr. au XVIe s., 1828, p. 36.
Ce en appos. + pron. rel.
Ce que dessus :
6. Comme vous êtes, après ma mère, ce que je révère le plus au monde, je vous fais ces lignes pour vous annoncer ce que dessus.
STENDHAL, Armance, 1827, p. 201.
Ce qu'à Dieu ne plaise (BREMOND, Hist. littér. du sentiment relig. en France, t. 3, 1921, p. 513).
b) Ce, compl. prép., en fonction de compl. circ.
Arch. Nonobstant ce. Soit : mais nonobstant ce, (...) le Christianisme n'est pas passé (CHATEAUBRIAND, Ét. hist., 1831, p. CLIII). Ce nonobstant. Un certain cheval sans tête qui, ce nonobstant, galope fort vite au milieu des pierres (MÉRIMÉE, Mosaïque, 1833, p. 320). Pendant ce. Pendant ce, moi qui cependant ne suis pas un pudibond, je croyais assister à une récréation de bagne (E. et J. DE GONCOURT, Journal, 1892, p. 210). Ce pendant (que). Cf. cependant. À ce. Inscription aux bureaux à ce établis (Code civil, 1804, p. 387). Pour ce. La pauvre Sidoine fut convaincue par le juge d'avoir fait la ribaude et pour ce mise nue sur un âne (A. FRANCE, L'Orme du mail, 1897, p. 213).
Cour., fam. [Avec valeur anaphorique (renvoie à l'antécédence immédiate)] Sur ce. Sur ces mots (souvent pour prendre congé de qqn). Je vous souhaite, sur ce, le bonsoir (GIDE, Correspondance [avec Valéry], 1891, p. 44). Sur ces entrefaites, ensuite. M. Élie vérifia la stabilité de sa chaise. Sur ce, un petit monsieur entra (MONTHERLANT, Les Célibataires, 1934, p. 740). Et ce. Et cela qui vient d'être dit. Des messieurs disaient des douceurs à des têtes de femmes enveloppées jusqu'au cou des rideaux de leurs loges (...) — et ce, pendant qu'on les habillait par derrière (E. DE GONCOURT, La Faustin, 1882, p. 94). Pour ce faire. Saisissant l'occasion d'assister un malade, un blessé, mais n'ayant pour ce faire ni titre, ni facilités (BARRÈS, Les Diverses familles spirituelles de la France, 1917, p. 20).
c) Ce, suj. de est (ou doit être, ou peut être, ou allait être). Des pas légers, des pas de femme qui crièrent tout à coup sur le sable du jardin lui mirent la mort dans l'âme. C'était, ce devait être elle (PONSON DU TERRAIL, Rocambole, t. 3, Le Club des valets de cœur, 1859, p. 286). Vous vous dites peut-être que Michele était pour elle, pour nous deux, une sorte de remords vivant? Non. Ç'aurait pu être, en effet. Ça n'était pas (R. MARTIN DU GARD, Confidence africaine, 1931, p. 1127).
[Valeur anaphorique] Ce, suj. d'une prop. attributive qualificative. C'est beau, c'est bien, c'est vrai, c'est sûr. Ce sont des villes! C'est un peuple (RIMBAUD, Illuminations, Villes I, 1873, p. 276).
Arch. et littér. Ce m'est, ce lui est. C'est pour moi, pour lui (elle) :
7. Et nous qui souffrons de ces raffinements et de cette civilisation, ce nous est une étrange ivresse que de nous plonger, ne fût-ce qu'un instant, au jaillissement primitif de cette source d'universelle activité.
P. BOURGET, Nouv. Essais de psychol. contemp., 1885, p. 115.
♦ [Pour reprendre un adj.] Ce l'est :
8. — Ce que tu m'annonces, ô vierge, s'écria l'apôtre, me semble prodigieux et au-dessus de la puissance humaine.
Ce l'est, répliqua la vierge Orberose.
A. FRANCE, L'Île des pingouins, 1908, p. 120.
Ce désigne parfois une pers., avec une nuance fam., plais. ou iron., péj. Synon. cela, ça. Comme cela s'appelle un roi, comme c'est né Fleurdelysé (...) C'est bien, c'est le damné; vous serez sans entrailles! (HUGO, La Pitié suprême, 1879, p. 153).
♦ [Pour résumer une action énoncée dans la phrase précédente] :
9. L'injection d'essence est terminée? Dans les deux cylindres? Avez-vous pensé à essuyer un peu les bougies? C'eût été prudent après une étape de onze kilomètres. Enveloppez bien le carburateur.
ROMAINS, Knock, 1923, I, p. 2.
Rem. Arch. et littér. (ce + verbe d'état). Ce peut, ce paraît, ce semble, ç'avait l'air... (avec une nuance d'affectation) :
10. Ce jour-là, ç'avait l'air d'un métier si calme, si facile, celui de pêcheur d'Islande; — un métier de demoiselle...
LOTI, Pêcheur d'Islande, 1886, p. 64.
11. Et le verger fut grand où hantait la calandre diserte.
Et quant à la Dame, elle avait ce geste prompt,
Ce « ce me plaît » qui déconcerte; ...
MORÉAS, Le Pèlerin passionné, 1891, p. 11.
12. Un chef-d'œuvre? (...) Ce n'a même pas la prétention d'être un tableau, mais une simple esquisse (il avait raison).
PROUST, Le Côté de Guermantes 1, 1920, p. 223.
Ce en incise, explétif. Ce me semble. Nous avons au grenier un nombre suffisant Ce me semble, de vieilles planches? (BAUDELAIRE, Les Fleurs du Mal, 1857, p. 282). Ce semble. Il convient, ce semble, de distinguer la science de l'instruction (RENAN, L'Avenir de la sc., 1890, p. 112).
[Valeur anaphorique] Ce, suj. d'une prop. attributive d'identification. C'est moi, toi, lui, elle; ce sont eux, elles; fam. c'est eux, elles.
Rem. C'est nous, c'est vous restent toujours au sing. C'était nous, en train de patauger dans la boue jaune (CÉLINE, Voyage au bout de la nuit, 1932, p. 223).
[Le référent n'est pas dans la phrase] Cf. c'est-à-dire, c'est à savoir (s.v. savoir).
[Le référent est dans la même phrase] Ce, suj. d'une prop. attributive qualificative. C'est bien, c'est beau; c'est un homme.
2. Ce. Ce dont on parle, la situation actuelle. C'est aujourd'hui, c'est l'heure; c'est l'hiver. Les armureries n'ouvriront pas aujourd'hui, c'est dimanche (MALRAUX, L'Espoir, 1937, p. 445).
B.— Ce, antécédent du pron. rel. neutre.
1. [En dehors de l'interr., pour introd. une sub. rel.] Ce qui, ce que, ce dont, ce à quoi, ce pour quoi, etc. :
13. L'homme naît avec la faculté de recevoir des sensations; (...) de saisir ce qu'elles ont de commun et ce qui les distingue...
CONDORCET, Esquisse d'un tableau hist. des progrès de l'esprit hum., 1794, p. 1.
14. Vous savez par l'annonce de la quatrième livraison ce dont je m'occupe pour le deuxième volume des Scènes de la Vie privée; mais ce à quoi vous ne vous attendez point, c'est le Père Goriot, une maîtresse œuvre!
BALZAC, Lettres à l'Étrangère, t. 1, 1850, p. 195.
Rem. Ce désigne un être hum. dans l'expr. ce qu'il y a de plus + adj. (superl. abs.). Des lettres venues de Paris, (...) écrites par ce qu'il y a de plus illustre (STENDHAL, Le Rouge et le Noir, 1830, p. 95).
2. [Dans l'interr. indir.] (Demander) ce qui, ce que :
15. Il m'envoie à cette heure lui présenter ses civilités, savoir ce qu'elle fait, ce qu'elle dit et comment elle se porte.
CAMUS, Les Esprits, adapté de P. de Larivey, 1953, I, 1, p. 451.
Forme redoublée ce que c'est que :
16. Entre le père et la mère, dans le pays où vous êtes née, Vous avez crû, comme un arbre dans un jardin. Jeune être heureux, vous ne savez ce que c'est que souffrir...
CLAUDEL, La Jeune fille Violaine, 2e version, 1901, I, p. 573.
3. [Dans l'interr. dir.] Qu'est-ce que c'est que? (cf. la particule interr. est-ce que...?). Qu'est-ce que c'est que cela? dit le bonhomme dont les yeux s'animèrent à la vue d'une poignée d'or que lui montra Charles (BALZAC, Eugénie Grandet, 1834, p. 171). Qu'est ceci?
Rem. Autres loc. interr. cour. : qui est-ce qui...? quand est-ce que...? qu'est-ce que...? n'est-ce pas que...? Cf. aussi le verbe être.
II.— Ce, particule déictique ou base d'incidence.
A.— [Ce, particule déictique en dehors de la fonction de base d'incidence] C'est.
1. C'est, loc. de la mise en relief.
a) C'est à lui de (à) + inf. Il lui appartient de. Glenarvan comprit que c'était à lui de donner l'exemple de l'obéissance (VERNE, Les Enfants du capitaine Grant, t. 2, 1868, p. 54). Vous pensez, n'est-ce pas, plombier, que c'est bien au propriétaire à payer les dégâts? (T. BERNARD, M. Codomat, 1907, I, 2, p. 139).
b) [Pour mettre en relief au début d'une phrase un terme autre que le verbe à un mode pers.] Le gallicisme c'est... qui, c'est... que :
17. Ce fut au pied du tombeau même de Socrate que Platon dicta les leçons qu'il avait reçues de son maître.
CONDORCET, Esquisse d'un tableau hist. des progrès de l'esprit hum., 1794, p. 52.
18. On dit toujours que c'est d'un ver que sort le papillon; chez l'homme, c'est le papillon qui devient un ver.
MONTHERLANT, La Reine morte, 1942, I, 1, 3, p. 143.
Rem. 1. C'est... que se rencontre souvent à la forme interr. qu'est-ce que? et la loc. reste toujours au sing. Qu'est-ce que ces gens-là? Ce sont des gens bien? (DRIEU LA ROCHELLE, Rêveuse bourgeoisie, 1939, p. 11). 2. Forme redoublée qu'est-ce que c'est que (cf. supra I B 3).
c) [Ce est explétif] Ce qui... c'est :
19. Ce qui caractérise surtout le vrai sage, c'est un sentiment profond d'ordre et d'harmonie. Toute erreur lui est pénible, tout mal l'afflige, toute injustice l'indigne...
SENANCOUR, Rêveries, 1799, p. 212.
Celui (celle, ceux...) qui (que, dont...)... c'est (ce sont) :
20. Mais ceux dont on avait le plus de peine à contenir l'indignation vertueuse contre le parti de l'usurpateur, c'étaient les nobles ou leurs adhérents...
Mme DE STAËL, Considérations sur les princ. événements de la Révolution fr., t. 2, 1817, p. 228.
C'est à + inf. C'est de nature à. C'est à mourir de rire. Je me sens aujourd'hui si active, si gaillarde, c'est à ne pas croire (BERNANOS, La Joie, 1929, p. 534).
[Pour marquer une intention] C'est pour + inf. :
21. — Mais, maman, j'ai peur aussi, moi.
— Comment? répond Madame Lepic, un grand gars comme toi! c'est pour rire.
RENARD, Poil de Carotte, 1894, p. 2.
C'est pourquoi. Voilà pourquoi, c'est la raison pour laquelle :
22. Le temps est de nouveau complètement couvert. C'est aussi pourquoi sans doute j'ai mal dormi.
GIDE, Journal, 1914, p. 418.
d) C'est. [Valeur anaphorique d'anticipation, pour annoncer un suj. rejeté en fin de phrase]
C'est..., + suj. :
23. Je me demande souvent comment vivent ceux qui n'ont rien à se reprocher. C'est si mystérieux une âme pure!
GREEN, Journal, 1943, p. 4.
C'est... que (explétif) + suj. Ce ne fut pas une petite affaire pour les Le Pesnel que ce voyage (DRIEU LA ROCHELLE, Rêveuse bourgeoisie, 1939, p. 78).
C'est... de + inf. :
24. À moi, le grand horizon de l'Ouest! Je te salue, Océan, c'est bon de respirer, c'est bon d'être avec toi, c'est bon de te sentir sur la face et sous les pieds!
CLAUDEL, Le Livre de Christophe Colomb, 1929, 1re part., p. 1149.
C'est..., que de + inf. C'est une distraction puissante que d'écrire un roman (GREEN, Journal, 1928, p. 3).
C'est... que + inf. :
25. Mais c'est trop qu'être roi dans un air qu'ils respirent.
C'est trop que les avoir, c'est trop que les conduire.
Et c'est encore trop, hélas! que les haïr.
MONTHERLANT, Encore un instant de bonheur, 1934, p. 677-678.
Rem. Forme redoublée (voilà) ce que c'est que (de), quand...! (exclamatif pour constater un résultat défavorable). Il allait bientôt nous en cuire. Ce que c'est quand on n'a pas d'expérience [!] (F. VIDOCQ, Mémoires de Vidocq, t. 2, 1828-29, p. 73). Connaissant enfin par lui-même ce que c'est que de trembler et de souffrir pour ce qu'on aime... (G. SAND, Histoire de ma vie, t. 1, 1855, p. 79). Une baronne! ... Un marquis! ... Ce que c'est que les hasards de la navigation... Me voilà dans le monde, alors... dans le plus grand monde... (MEILHAC, HALÉVY, La Cigale, 1877, II, 13, p. 87).
[Valeur anaphorique de reprise ou d'anticipation, pour annoncer ou reprendre une prop. introd. par si, comme ou quand] :
26. Il avait sombré plus d'une fois dans les sables, la montagne, la nuit et la mer. Et quand il était revenu, ç'avait toujours été pour repartir.
SAINT-EXUPÉRY, Terre des hommes, 1939, p. 156.
[Valeur anaphorique de reprise, c'est reprend un suj. exprimé en tête de phrase] :
27. ... ce qui a été dur, ç'a été de me trouver dans la petite salle, avant l'audience, avec la mère de Greslou...
P. BOURGET, Le Disciple, 1889, p. 233.
Le gallicisme c'est reste au singulier
♦ quand il est suivi d'une somme, d'un nombre d'heures, d'une quantité au plur. :
28. ... c'était vingt mille francs qu'elle voulait de ma part, comme des autres...
RESTIF DE LA BRETONNE, M. Nicolas, 1796, p. 99.
29. JACQUES. — Mais ce n'est pas vingt ans que tu sembles avoir, mon Jean, et l'on dirait que tu en as à peine douze.
CLAUDEL, La Nuit de Noël 1914, 1915, II, p. 568.
♦ quand il est suivi de plusieurs subst. au sing. ou dont le premier est au sing. :
30. ... l'enthousiasme se rallie à l'harmonie universelle : c'est l'amour du beau, l'élévation de l'âme, la jouissance du dévouement, réunis dans un même sentiment qui a de la grandeur et du calme.
Mme DE STAËL, De l'Allemagne, t. 5, 1810, p. 187.
Rem. Sauf dans le cas d'une énumération. Ce sont :
31. Plate-forme au sommet d'une tour destinée à l'observation et à l'adoration des astres. Quatre figures colossales de génies marquent les points cardinaux : ce sont : Sed, taureau à face humaine; Nergal, lion à face humaine; Oustour, l'homme; Nattig, à tête d'aigle.
VALÉRY, Variété III, 1936, p. 124.
♦ dans les interr. est-ce là...? qu'est-ce que?
Rem. La plupart des écrivains évitent d'écrire sont-ce là...? par souci d'euphonie.
♦ devant une prép. Dans la jeunesse, les pensées me venaient en sonnets; maintenant c'est en maximes (SAINTE-BEUVE, Pensées et maximes, 1840, p. 15).
♦ avec le pron. en. C'en est :
32. Lahirel, en toilette du matin, un petit peigne d'une main, et de l'autre, un miroir dans lequel il se regarde. (...) Voyons donc! c'en est bien un... c'en est même trois! Il arrache un ou deux cheveux.
PAILLERON, L'Âge ingrat, 1879, I, 1, p. 1.
Rem. Loc. c'en est fait. Cf. faire.
♦ ds l'expr. si ce n'est. Excepté, sinon :
33. Dans l'air silencieux ni souffles ni bruits d'ailes,
Si ce n'est, enivré d'arome et de chaleur,
Autour de l'églantier et du cytise en fleur,
Le murmure léger des abeilles fidèles.
LECONTE DE LISLE, Poèmes antiques, Paysage 1864, 1874, p. 232.
♦ devant nous et vous (cf. supra I A 1 c c'est valeur d'identification)
Rem. Dans tous les autres cas, c'est ou ce sont sont empl. concurremment devant un plur., bien que c'est + subst. ou pron. plur. soit plus fam. Ce n'est pas des visages, c'est des masques (A. FRANCE, La Rôtisserie de la Reine Pédauque, 1893, p. 317).
2. C'est que, loc. conj.
Si ce n'est que. Excepté que.
Si..., c'est que + ind. (causal, explicatif = c'est parce que) :
34. Si les préfaces de cette édition complète de mes œuvres, tiennent de la nature des mémoires, c'est que je n'ai pu les faire autrement.
CHATEAUBRIAND, Essai sur les Révolutions, préf., t. 1, 1797, p. XLIX-XLX.
Ce n'est pas que + subj. Ne pensez pas que, il n'est pas exact que :
35. Ce n'est pas que je croie que S. Luc, avant d'être chrétien, eût été pharisien. Loin de là, je crois qu'il était Essénien avant sa conversion au christianisme...
P. LEROUX, De l'Humanité, t. 2, 1840, p. 807.
B.— [Ce, base d'incidence d'un élément non pronominal.]
1. Ce, base d'incidence de que adv. (dans une phrase exclam.). Ce que...! Loc. adv. indiquant une quantité ou une intensité.
Devant un adv. Synon. combien...!
Devant un adj. Synon. comme...! :
36. Ce que nous étions serrés sur cette plate-forme d'autobus! Et ce que ce garçon pouvait avoir l'air bête et ridicule!
QUENEAU, Exercices de style, 1947, p. 14.
2. Ce, base d'incidence de que conj. de subordination.
[Non soudé]
À ce que :
37. Il faut toujours s'attendre à ce que les choses se passent conformément à la pesanteur, sauf intervention du surnaturel.
S. WEIL, La Pesanteur et la grâce, 1943, p. 11.
Rem. [En style de chancellerie] À ce que nul n'en ignore. Afin que nul n'en ignore.
De ce que. Darius se plaignoit de ce que les Grecs entretenoient la révolte des villes d'Ionie (CHATEAUBRIAND, Essai sur les Révolutions, t. 2, 1797, p. 9).
En ce que :
38. ... les paroles de Saint-Loup ne me déplaisaient pas en ce qu'elles rappelaient que la prétention avoisine la bêtise et que la simplicité a un goût un peu caché mais agréable.
PROUST, Le Temps retrouvé, 1922, p. 740.
Jusqu'à ce que :
39. Elle [Eurydice] tricotera pendant toute la tragédie jusqu'à ce que son tour vienne de se lever et de mourir.
ANOUILH, Antigone, 1946, p. 136.
Pour ce que (arch., littér.). Cf. parce que :
40. Laissons le rustre, l'immonde
Ignorant dénier à notre Apollon le prix
Des larmes, pour ce qu'il est si bien appris
À couvrir de beauté la misère du monde.
MORÉAS, Sylves, À R... de la Tailhede, 1896, p. 165.
De façon, de manière à ce que (vx ou fam. pour de façon que) :
41. Eugénie fit cacher Louise dans l'angle de la porte, de manière à ce que le concierge, s'il lui plaisait par hasard de se réveiller, ne vît qu'une personne.
A. DUMAS Père, Le Comte de Monte-Cristo, t. 2, 1846, p. 523.
[Soudé] Cf. parce que.
Prononc. et Orth. :[s()]. Ce, c', ds Ac. 1694-1932; ç' ds Ac. 1835-1932. Étymol. et Hist. [Ca 881 czo pron. neutre inv. (Eulalie ds BARTSCH Chrestomathie, 3, 21); ca 1100 ce forme affaiblie (Roland, éd. J. Bédier, 984)]. A. Employé avec un verbe 1. a) le plus souvent être 2e moitié Xe s. (Passion, éd. D'A. S. Avalle, 14); — avec d'autres verbes (dont les plus fréquents sont sembler, paraître, devenir, rester, pouvoir) ainsi ca 1040 (Alexis, éd. Chr. Storey, 92); rare, subsiste dans un style soutenu et plus ou moins archaïque, v. infra C 1b; b) peut s'employer dans une phrase interrogative ca 1100 (Roland, 334), employé dans des périphrases d'insistance qui deviendront des interrogatifs composés du fr. mod., v. G. MOIGNET, Gramm. de l'a. fr., Paris, Klincksieck, 1973, p. 152; 2. pour mettre en relief c'est peut a) reprendre — un élément (subst., pron., inf.) ca 1040 (Alexis, 258); — un membre de phrase, une phrase ca 1040 (ibid., 366); b) c'est + attribut suivi du nom qui reprend l'élément de pensée précédé de que 1580-92 (MONTAIGNE, I, 105 ds LITTRÉ); c'est + attribut + que de + inf., ca 1463 (Maistre Pathelin, éd. R. T. Holbrook, 1411); c) c'est à ... de ou à « il appartient à » 1512 c'est à ... de (Gringore 2, 5 ds IGLF); 1666 c'est aux ... à (MOLIÈRE, Misanthrope, III, 1); 3. c'est ... qui, c'est ... que a) mettent en valeur un élément de phrase . ca 1040 c'est ... + relative (Alexis, 49); ca 1463 (Maistre Pathelin, 1263 : c'est a vous a qui je vendi, Six aulnes de drap); la lang. mod. ne met pas la prép. devant que, ca 1463 (ibid., 1442 : c'est a vous mesmes que je parle), alors que la lang. class. préférait ne la mettre que devant que, qui : 1699-1717 (FÉNEL., Tél., III ds LITTRÉ : C'est vous [...] pour qui mon cœur s'attendrit); . ca 1040 c'est + conjonctive (Alexis, 440); b) peuvent s'employer à la forme interrogative 1561 (CALVIN, 154 ds LITTRÉ); c) avec un attribut adv., adj. ou part. ce peut prendre la valeur de il impersonnel, mais souvent avec valeur d'insistance 1561 (CALVIN, 218, ibid.), v. GREV. § 524 et BRUNOT t. 6, 2, p. 1645; de même avec l'expr. c'est ... de + inf., av. 1696 (LA BRUY., XI ds LITTRÉ); [cf. ca 1100 Roland, 1427]; 4. ce + être entrent dans la formation de loc. a) ca 1040 ço m'est vis que « il me semble que » (Alexis, 343); b) début XIIe s. ceo est a + inf. « il faut » (Lois G. le Conquérant, éd. J. E. Matzke, § 1 : ceo est a saver) v. aussi c'est-à-dire; c) 1er quart XIIIe s. se ne fust chou que (Le Livre de Lancelot del Lac, 3, 351 ds IGLF); d'où ca 1450 se ce n'estoit (J. REGNIER, Fortunes et adversités, 156, 4441, ibid.); d) av. 1742 ce n'est pas que + subj. écarte une opinion (MASS., Avent, Mort du pêcheur ds LITTRÉ); e) introduisant une explication 1751 c'est de + inf. (VOLT., Louis XIV, 14, ibid.); 1863 c'est que (LITTRÉ); f) av. 1510 c'est pour marque l'intention (G. COQUILLART, Poésies, 1, 149 ds IGLF); c'est pourquoi v. pourquoi. B. 1. Ce annonce une relative a) — compl. (ou suj.) ca 1040 (Alexis, 369); parfois en relation avec ce explétif (surtout avec le verbe être) 1463 (Maistre Pathelin, 1553); ce explétif non exprimé 1662 (MOLIÈRE, École des femmes, vers 729); — attribut XVe s. (CH. D'ORLÉANS, Ballades, éd. P. Champion, 36); — en appos. fin XIIe-début XIIIe s. (Aymeri de Narbonne, 2352 ds T.-L.); b) ce qui/que pour la personne qui/que 1er quart XIIIe s. ce qui (Le Livre de Lancelot del lac, 1, 260 ds IGLF) — XVIIIe s. : 1732, VOLT., Zaïre, II, 1 ds LITTRÉ; à nouv. aux XIXe et XXe s. : v. GREV. § 527 hist.; rare; 2. une interrogation indirecte 1re moitié Xe s. (Jonas ds BARTSCH Chrestomathie, 4, 6); parfois ce est sous-entendu 1463 (Maistre Pathelin, 685), que peut être sous-entendu av. 1695 (LA FONT. Jum. ds LITTRÉ); 3. une conjonctive ca 1040 (Alexis, 363); parfois la conjonction n'est pas exprimée ca 1100 (Roland, 2297); parce que; 1160 a çou que « pendant que » (Flore et Blancheflor, Append. 117, Du Méril ds GDF.); attest. isolée; 1174-1200 a ce que « afin que » (Renart, éd. Méon, 8243), subsiste comme terme de chancellerie dep. 1690, FUR.; 4. av. 1710 ce que fam. loc. adv. exclamative « combien » (Fléch. ds BESCH.); 1894 (A. FRANCE, Le Lys rouge, p. 79 ds GREV. § 845 rem. 2). C. Subsiste dans certains tours anc. ou rares, à la place des formes composées ceci, cela 1. employé seul a) régime d'un verbe ca 1100 (Roland, 233), ne subsiste que dans certaines expr. figées ca 1450 ce faire (J. REGNIER, op. cit., p. 83, 2318); 1540 pour ce faire (NICOLAS HERBERAY DES ESSARS, Amadis, 37 ds IGLF); ca 1450 ce faisant (Mist. Viel Testament, éd. J. de Rothschild, 10061); b) suj. d'un verbe — 1291-1328 ce samble (Ovide moralisé, éd. C. de Boer, X, 3550), encore attesté au XVIIe s. : 1653 [VAUGELAS], Quinte-Curce, 7, 2 ds BRUNOT, t. 6, p. 1646, supplanté par ce me semble, ca 1450 (Mist. Viel Testament, 21828); — 1er quart XIIIe s. avec des verbes de temps (Livre de Lancelot del lac, I, 316), subsiste comme tour littér. jusqu'au XVIIIe s., Rousseau ds BRUNOT t. 6, p. 1646; 2. précédé d'une prép. ou d'une conjonction — 1re moitié Xe s. de ce (Jonas ds BARTSCH Chrestomathie, 4, 2); 1310 en tesmoing de cheu (S. Evroult, Arch. Orne [VI, 346, Luce, ms. Amiens] ds GDF.); — Xe s. et cio (St Léger, éd. J. Linskill, 43 : et cio li dist); XIIIe s. et ce (Amadas et Ydoine, éd. C. Hippeau, 5286). Du lat. vulg. ecce hoc, qui, au fur et à mesure qu'il est devenu inaccentué, a été remplacé comme pron. accentué par cela, sauf dans les loc. archaïques, supra C. Les formes iço, ice, attestées de ca 1040 (Alexis, 528 : Par iço) au XVe s. (BL.-W.5), semblent provenir de l'adv. i < hic, p. ext. anal. à partir de l'adv. ici < híc ecce híc (G. MOIGNET, op. cit., p. 43). Bbg. DARM. Vie 1932, p. 193. — GOUG. Lang. pop. 1929, pp. 115-116. — HATCHER (A. G.). From ce suis je to c'est moi. P.M.L.A. 1948, t. 63, pp. 1053-1100. — HENKEL (W.), MULLER (C.). Ce dont — de quoi. Praxis 1972, t. 19, pp. 220-221. — LORIAN (A.). Ce pour quoi, ce pourquoi ou c'est pourquoi? R. Ling. rom. 1968, t. 32, n° 127/128, pp. 341-361. — YVON (H.). Cil et cist, pron. dém. Romania. 1952, t. 73, pp. 433-461.
II.
⇒CE2, CET, CETTE, CES, adj. dém.
[Ce devant un subst. (ou un pron.) masc. sing. commençant par une consonne ou un h aspiré, cet devant un subst. masc. commençant par une voyelle ou un h muet, cette devant un subst. fém. sing., ces devant un subst. plur.] Sert à désigner, montrer un être, un objet, une idée que le locuteur a présente sous les yeux ou dans sa pensée, la désignation pouvant dans le premier cas être accompagnée éventuellement d'un geste d'indication :
1. Cet avion a sa place exacte dans ce hangar, comme dans cinq minutes dans ce ciel.
SAINT-EXUPÉRY, Courrier Sud, 1928, p. 5.
A.— [Pour présenter qqn, qqc., une idée, une action]
1. Présence spatiale
a) Présence réelle (pour indiquer le lieu où l'on est). Cet homme à demi couché sur la banquette, en face de moi, là (SARTRE, La Nausée, 1938, p. 161) :
2. CHRISTOPHE COLOMB I. — J'ai épousé la volonté de Dieu.
LE MAJORDOME. — Et où donc est le gage de ces saintes épousailles?
CHRISTOPHE COLOMB I, montrant son anneau à son doigt. — Cet anneau qu'une colombe m'a apporté.
CLAUDEL, Le Livre de Christophe Colomb, 1929, 1re part., p. 1154.
Rem. Pop., prononc. défectueuse : c'te. Cette. — Qué qui faisaient dans c'té cahute? (MAUPASSANT, Une Vie, 1883, p. 197).
[Pour indiquer avec plus de force la proximité d'un être, d'un obj. dans l'espace p. rapp. au locuteur] Ce ...-ci. Ce ... que voici :
3. Josille ramena la conversation sur les tables anciennes. Mes souvenirs réveillaient les siens.
— C'est comme cette table-ci, monsieur... Jolie certainement, de bon bois, du châtaignier long veiné.
PESQUIDOUX, Le Livre de raison, 1932, p. 11.
[Pour indiquer avec plus de force l'éloignement d'un être, d'un obj. dans l'espace p. rapp. au locuteur] Ce ...-là. Ce ... que voilà. Sur les indications du petit prince, j'ai dessiné cette planète-là (SAINT-EXUPÉRY, Le Petit prince, 1943, p. 426).
[En corrélation, pour distinguer simplement deux êtres, deux obj., deux faits, sans idée de proximité ou d'éloignement]
Ce ...-ci, ce ...-là :
4. Les Hollandais, oh non, ils sont beaucoup moins modernes! Ils ont le temps, regardez-les. Que font-ils? Eh bien, ces messieurs-ci vivent du travail de ces dames-là.
CAMUS, La Chute, 1956, p. 1477.
(Celui-ci) ..., cet autre. Synon. celui-là :
5. ANTOINE, trépignant, passe la main sur son front. — D'où viennent-ils? Pourquoi! À cause? ... Ils passent... Je n'ai pas le temps... Quel est celui-ci? ... Cet autre?
LE DIABLE. — Celui que tu vois là, c'est Attis de Phrygie, ...
FLAUBERT, La Tentation de st Antoine, 1849, III, p. 471.
Vx. Ce + adj. poss. Ce mien cousin :
6. LE PAPE. — Il n'est rien que ces miens frères ne puissent ni ne doivent entendre de vous en ce moment.
MONTHERLANT, Malatesta, 1946, II, 4, p. 468.
b) Présence fictive
Ce ...-ci. L'être, l'objet dont on parle, dont il est question :
7. « Hélas! disait tout bas Candide à Martin, j'ai bien peur que cet homme-ci [Milton] n'ait un souverain mépris pour nos poètes allemands! »
CHATEAUBRIAND, Mémoires d'Outre-Tombe, t. 4, 1848, p. 332.
8. Moi, le roi, me contredire, c'est contredire Dieu. Mais me contredire en cette affaire-ci, c'est le contredire deux fois.
MONTHERLANT, La Reine morte, 1942, I, 1er tabl., 3, p. 146.
Ce ...-là. L'être, l'objet, l'idée que le locuteur veut présenter avec plus de force :
9. AUGUSTE. — Je ne pouvais plus croire que vous étiez cette femme-là.
ISABELLE. — Quelle femme?
AUGUSTE. — Celle que je dis! celle que je dis... cette femme-là.
ACHARD, Voulez-vous jouer avec moâ?, 1924, II, 2, p. 133.
10. César fait le tour du bar, dans un grand silence, et sort de nouveau.
M. BRUN. — Cet homme- va certainement mourir de chagrin.
PAGNOL, Fanny, 1932, I, 1er tabl., 2, p. 13.
2. Présence temporelle
a) [Dans l'espace de temps actuellement vécu par le locuteur et précisé par le subst.] Ce matin, cet après-midi, ce soir, cette année; en ce moment; à compter de ce jour :
11. « Mais je demande en vain quelques moments encore,
Le temps m'échappe et fuit;
Je dis à cette nuit : Sois plus lente; et l'aurore
Va dissiper la nuit.
LAMARTINE, Méditations, Le Lac de B, 1820, p. 137.
12. Avant que cette année finisse, bon Alfred, je veux lui dérober un moment pour vous, et de force ou de gré je vous écrirai enfin aujourd'hui.
HUGO, Correspondance, 1824, p. 396.
Arch. [Dans le style épistolaire] Ce dimanche, ce 15 août :
13. À Mme Necker.
Ce samedi soir fin 1776 — début 1778.
Ma chère maman, ...
Mme DE STAËL, Lettres de jeunesse, 1778, p. 6.
[Dans la lang. de la correspondance comm.] Ce jour.
[Dans la lang. parlée] Ce ...-ci. Ces jours-ci, ce mois-ci, à cette heure-ci :
14. La marche reprise, M. Baslèvre commença pour dire quelque chose :
— Beaucoup de grippes, ces temps-ci?
— Pas outre mesure.
ESTAUNIÉ, L'Ascension de M. Baslèvre, 1919, p. 23.
b) [Pour indiquer un temps rapproché du temps présent]
[Dans le passé : passé récent, voire immédiat]
Ce, cet, cette, ces. Ces derniers temps, cette semaine, ce matin, ces jours derniers. Tu es sorti cet après-midi? (GIRAUDOUX, Judith, 1931, I, 1, p. 17); — Une jeune fille est morte cette nuit, à la clinique... (SIMENON, Les Vacances de Maigret, 1948, p. 23).
Ce ...-ci. Ces temps-ci, ce mois-ci. Ces jours-ci ont paru dans les journaux des photographies de Paris (GREEN, Journal, 1940, p. 15).
[Dans l'avenir : futur proche, futur immédiat]
Ce, cet, cette, ces. Cet après-midi, ce soir, cette nuit, cette semaine, ces vacances, cette année. « Que ferai-je cet hiver? » se demanda-t-elle (DANIEL-ROPS, Mort, où est ta victoire?, 1934, p. 40).
Ce ...-ci. Ces jours-ci. Il faudra voir les choses à leur place dans l'ensemble du volume que je recevrai ces jours-ci (DU BOS, Journal, 1924, p. 10).
Loc. fam.
♦ [Passé ou futur proche] Ce midi. Nous l'[Gertrude] attendons pour ce midi (GIDE, La Symphonie pastorale, 1919, p. 925). Ce tantôt. Si vous aviez été là ce tantôt (MONTHERLANT, Les Célibataires, 1934, p. 739).
Rem. Ces 2 loc. sont contestées par les puristes.
♦ [Futur proche]
Un de ces jours. Un des jours à venir :
15. Il est très probable qu'un de ces jours j'adhérerai officiellement au parti. Je serai un bon militant parce que j'en aurai décidé ainsi.
VAILLAND, Drôle de jeu, 1945, p. 175.
Un de ces matins :
16. Trarieux se leva brusquement et il foudroya Henri du regard : « Un de ces matins, l'Espoir fera faillite. Ça sera la récompense de votre entêtement! »
S. DE BEAUVOIR, Les Mandarins, 1954, p. 460.
Un de ces quatre matins (pop.).
c) [Pour indiquer le passé révolu]
[Dans le style hist., pour évoquer comme présent un fait passé] :
17. Gardons-nous d'ailleurs de faire du jeune poète revenu à Paris un monstre d'insensibilité : En cette année 1663, il se montre fort affecté par la mort de sa grand'mère, Marie Desmoulins.
MAURIAC, La Vie de Jean Racine, 1928, p. 52.
[Pour indiquer avec netteté un temps éloigné] Ce ...-là. En ce temps-là, à ce moment-là, ce jour-là, ce soir-là :
18. De l'état d'âme qui, cette lointaine année-, n'avait été pour moi qu'une longue torture, rien ne subsistait.
PROUST, Le Temps retrouvé, 1922, p. 695.
Rem. La lang. littér. omet souvent la particule renforçative -là. À ce moment, à cet instant, ce soir, cette année.
B.— [Dans la conversation ou dans le récit, pour évoquer qqn, qqc., un fait déjà connu ou à faire connaître avec plus de précision]
1. [P. réf. au passé proche ou éloigné]
a) [Pour rappeler qqn, qqc., un fait déjà nommé, mentionné ou suggéré dans le discours] Toutes les voitures, cette nuit, allaient à quatre-vingts à l'heure (MALRAUX, L'Espoir, 1937, p. 443) :
19. En cet an de grâce 1922, où j'étouffais les vipères, nous étions, Frédie et moi, confiés à la garde de notre grand'mère.
H. BAZIN, Vipère au poing, 1948, p. 21.
[En partic. une chose évoquée par un mot antécédent] :
20. Verdun : ces deux syllabes que l'histoire avait déjà marquées sonnent aujourd'hui comme les notes cuivrées d'un clairon. En France, nul ne les entend sans frissonner d'orgueil.
BORDEAUX, Les Derniers jours du fort de Vaux, 1916, p. 1.
21. Jacques sanglotait. M. Thibault vit dans ces larmes une preuve de ses remords, de ses bonnes résolutions; ...
R. MARTIN DU GARD, Les Thibault, Le Pénitencier, 1922, p. 760.
b) [Pour évoquer un être, une chose présents à l'esprit de tous] :
22. Les Espagnols n'étaient pas moins impatiens de battre ce César, cet ami des Gaulois, qui croyait avoir déjà soumis l'Espagne en un hiver.
MICHELET, Hist. romaine, t. 2, 1857, p. 277.
23. — Cette palombe dont vous parlez, mademoiselle, c'est cet oiseau que nous avons mangé aujourd'hui à la crapaudine?
MÉRIMÉE, Colomba, 1840, p. 40.
Souvent. [Dans le style de la conversation, dans une prop. interr. ell., pour s'informer de qqc. dont on a déjà parlé et qu'il suffit de désigner p. allus.] Eh bien?... Cet appartement (MEILHAC, HALÉVY, La Boule, 1875, II, 8, p. 61).
♦ [Notamment pour s'informer de l'état de santé de qqn] :
24. ... [il] (...) lui tendit la main cordialement et lui dit avec un bon sourire : — Cette santé? ...
A. FRANCE, L'Anneau d'améthyste, 1899, p. 270.
Ce ...-là. [Pour donner plus de relief à l'être, à l'obj., à l'action ou l'idée qu'on rappelle] :
25. ... il y a seulement six mois que le notaire a commencé de se fâcher. Et quand il se fâche, cet homme-! Tu ne le connais pas : une encolure de taureau, positivement.
G. DUHAMEL, Chronique des Pasquier, Le Notaire du Havre, 1933, p. 47.
c) Avec valeur emphatique. [Pour renvoyer à qqn, qqc., un fait, une idée déjà connue par l'histoire, la légende, etc.] :
26. Nous sommes comme ces jeunes Perses, dont parle Hérodote et qui, jusqu'à l'âge de vingt ans, n'apprenaient que trois sciences : monter à cheval, tirer à l'arc et ne pas mentir.
MAUROIS, Les Silences du colonel Bramble, 1918, p. 14.
2. [P. réf. à l'avenir]
a) [Pour annoncer qqn, qqc., un fait dont il n'a pas encore été question et qu'on va développer, une explication qui va suivre] :
27. Je me pose ces questions : Qu'est-ce que j'aime? Qu'est-ce que je suis? Qu'est-ce que je veux?
J'y répondrai avec sincérité, car je veux avant tout m'éclairer moi-même.
RENARD, Journal, 1897, p. 377.
[Pour attirer l'attention sur le mot qui va être déterminé, sur ce qui va être expliqué, énoncé] Ce ...-ci. Ce ... que voici :
28. Ce paysage-ci par exemple, que cite Sainte-Beuve : « Sept heures du soir. Le ciel est bleu pâle, d'un bleu presque vert, comme si une émeraude y était fondue; ... »
DU BOS, Journal, 1921, p. 8.
b) Avec valeur souvent emphatique. [Dans la lang. écrite, en concurrence avec l'art. déf., pour présenter avec plus de force un fait, une idée, des paroles qui vont être développées]
[Par un inf.] :
29. Sa physionomie étoit douce et gaie, ses yeux vifs et spirituels; son visage, son sourire, sa maniere d'être, annonçoient cette paix de l'ame, cette habitude d'être heureux par soi qui se communique aux autres.
FLORIAN, Fables, De la fable, 1792, p. 5.
[Par une prop. rel., ou complétive, ou consécutive] À ce point que, en ce sens que, cet avantage que, avec cette différence que; il faut lui rendre cette justice que. Une de ces filles des champs qui sont comme des fleurs simples, avec du bleuet dans l'œil (GIONO, Regain, 1930, p. 11) :
30. Tends-nous aujourd'hui' comme jou'e
Cette rose où l'aube se joue.
MALLARMÉ, Vers de circonstance, Dédicaces, autographes, divers, 1898, p. 166.
31. ... on nous rendra au moins cette justice que si chaotique, impénétrable et rébarbatif que soit notre Manifeste il n'esquive pas la véritable question; ...
A. ARTAUD, Le Théâtre et son double, 1939, p. 138.
C.— Valeurs affectives
1. Fam. [Dans une exclam. souvent ell., pour marquer l'étonnement, l'admiration, etc.]
[Étonnement, indignation] Synon. quel! :
32. LE PRINCE PAUL, avec colère. — Fritz! ... Encore! ... Ah! Cet homme! Cet homme! ...
MEILHAC, HALÉVY, La Grande-duchesse de Gérolstein, 1867, II, 3, p. 239.
[Mépris] Cette vieille bête de don Christoval (MONTHERLANT, La Reine morte, 1942, I, 1er tabl., 3, p. 143).
[Admiration, emphase] :
33. Ah! Cet Ulianow! Mon père dit toujours : « C'est notre Bismarck. » Il en a le génie au service de cette universelle destruction du capitalisme que nous rêvons.
P. BOURGET, Nos actes nous suivent, 1926, p. 100.
[Respect, politesse, en s'adressant à plusieurs à la 3e pers. du plur.] Ces messieurs, ces dames, ces messieurs-dames :
34. LA BONNE. — Madame a dit, si ces messieurs veulent bien attendre, parce que le cabinet de toilette n'est pas en état.
T. BERNARD, Monsieur Codomat, 1907, I, 4, p. 143.
[Tendresse, pitié] Regardez-moi cette mine de paille mâchée! (DRUON, Les Grandes familles, t. 1, 1948, p. 12).
2. Ce ...-là
[Avec une nuance d'admiration ou de sympathie] :
35. Monsieur de Restaud a beaucoup de talent, il est instruit... Je ne doute pas qu'il ne devienne un homme très-remarquable. Ce garçon- trouvera tout autant de fortune qu'il en voudra, le jour où il sera parvenu au pouvoir.
BALZAC, Gobseck, 1830, p. 382.
[Avec une nuance péj.] « Comment s'appelle-t-il, cet ostrogoth-là! me demanda Albertine » (PROUST, À l'ombre des jeunes filles en fleurs, 1918, p. 880).
Prononc. et Orth. :[s()], fém. [], plur. []. Le timbre du est, en principe, celui d'une voyelle centrale (ni d'avant, ni d'arrière, ni ouverte, ni fermée); en réalité, il s'agit souvent, avec des différences selon les personnes et les contextes d'une voyelle antérieure arrondie moyenne ouverte ou moyenne fermée. Cette voyelle ne se confond pas pour autant avec les voyelles [ø] et [œ], lesquelles ne sont pas sujettes à élision. À noter toutefois que dans une prononc. [] pour déjeûner [] se substitue, en tant que voyelle élidable, à [ø]. Devant voyelle ou h initial non aspiré (ce hêtre, mais cet honneur) le masc. a la forme [] cet. Le plur. ces hésite, quant à la voyelle, entre [] et [e] ([e] est admis par LITTRÉ, PASSY 1914 (var.), Pt ROB., WARN. 1968 (var.), Lar. Lang. fr.). ,,L'[] ou l'[e] non accentué s'amuït parfois dans la prononciation rapide et négligée; c'est en particulier le cas pour les monosyllabes (...) cet, cette (...) : cet homme [], cette année [stane]`` (NYROP Phonét. 1951, p. 71). Ds Ac. 1694-1932. Étymol. et Hist. ADJ. A. Sert à indiquer la proximité (p. oppos. à cil v. celui, qui indique l'éloignement) 1. valeur dém. a) désigne ce dont on parle : la proximité est — soit locale 842 cist cas régime second, masc. sing., forme isolée, renforce un adj. poss. (Serments de Strasbourg ds HENRY Chrestomathie 1, 4); début XIIIe s. ce vostre (Aymeri de Narbonne, 243 ds T.-L.), encore au XVIIIe s. : Voltaire cité par LITTRÉ, v. aussi GUÉRIN 1892; proximité indiquée par un nom de lieu 2e moitié Xe s. cest cas régime masc. sing. (Passion, éd. D'A. S. Avalle, 310); ca 1130 cest désigne celui qui parle (Gormont et Isembard, éd. A. Bayot, 654), encore employé dans la lang. class. 1643 (CORNEILLE, Polyeucte, 169); — soit d'intérêt 1re moitié Xe s. cest le lecteur est concerné par les paroles de l'auteur (Jonas, 31 ds Altfranzösisches Übungsbuch, éd. W. Foerster et E. Koschwitz, p. 58); ca 1100 ceste cas sujet fém. sing., en rapport avec l'auteur du récit, réflexion de l'auteur (Roland, éd. J. Bédier, 3489); 1165-74 ceste cas régime fém. sing. concerne l'œuvre elle-même (WACE, Chron. ascendante, éd. H. Andresen, 17); — soit temporelle 842 ist cas régime masc. sing. (Serments de Strasbourg, loc. cit., 1, 2); 1re moitié Xe s. cist cas régime masc. plur., forme isolée (Jonas, 30, loc. cit., p. 54); d'où les loc. en cest di 2e moitié Xe s. (Passion, 299); un de ces jors cas régime masc. plur. 1re moitié XIIIe s. (Aucassin et Nicolette, éd. M. Roques, 2, 32); indique une situation, des circonstances présentes 1re moitié Xe s. ceste (Jonas, 22, loc. cit., p. 57); b) désigne ce dont on a parlé 2e moitié Xe s. ces (Passion, 349); c) annonce ce dont on va parler ca 1170 cest (Livre des Rois, éd. E. Curtius, IV, XXII, 15); 2. employé avec cil peut indiquer l'opposition proximité/éloignement ca 1040 cesta cas régime fém. sing. (Alexis, éd. Chr. Storey, 612); 3. employé avec les particules : a) ci indique la proximité 1165-70 cist ... ci cas suj. masc. sing. (CHR. DE TROYES, Erec et Enide, éd. M. Roques, 5334), v. aussi cil-ci, celui-ci; b) la indique l'éloignement 1260-1311 ce ... la (Auberon, éd. J. Subrenat, 450); XIVe s. cest ... la indique une insistance (FROISS., Chr., XI, 32 ds MATHEWS, Cist and cil, Baltimore, 1907, p. 24), la forme démonstrative résidant dans la particule. B. Peut être déterminé 1. par une relative 1re moitié Xe s. cest (Jonas, 32, loc. cit., p. 58); 2. par de + subst. 2e moitié XIIe s. ces (Dialogue Gregoire, éd. W. Foerster, p. 56, 22); 3. par un adj. 1249 (J. SARRAZIN, Lettre à Nicolas Arrode, XIX, éd. L. Foulet, p. 9, ligne 12); 4. quand il est évident, le déterminant peut être omis 1268-69 (RUTEBEUF, Disputaison du croisé et du décroisé, 123-124, éd. E. Faral et J. Bastin, p. 474). C. 1. Ca 1100 peut prendre la valeur de l'article défini cez cas régime masc. et fém. plur. (Roland, 2632); 2. 1670 peut remplacer l'article pour insister davantage (MOLIÈRE, Bourgeois gentilhomme, II, 4); 3. 1672 sert à marquer l'ironie, le mépris (ID., Femmes savantes, II, 8, 631); 4. 1867 indique la surprise avec le sens « quel » (MEILHAC, HALÉVY, supra ex. 32). PRON. A. Valeur démonstrative 1. indique la proximité spatiale, temporelle ou d'intérêt a) ce dont on parle ca 1040 cestui cas régime masc. sing. « celui-ci » (Alexis, 504), v. aussi HUG., répertorié par les dict., jusqu'à Lar. 20e, qui indiquent que son emploi est limité au style marotique; ca 1160 cest pron. dém. neutre (Eneas, éd. J. Salverda de Grave, 6721); b) ce dont on a parlé ca 1100 cist cas sujet masc. plur. (Roland, 1100); c) ce dont on va parler début XIIe s. cez (Lois G. le Conquérant, éd. J. E. Matzke, ligne 1); d) employé avec cil peut indiquer une opposition proximité/éloignement ca 1170 cil ... cist (Livre des rois, II, XVIII, 26-27); 2. valeur indéfinie 1160-74 cist ... cist (WACE, Rou, éd. H. Andresen, 801); 3. employé avec les particules a) ca 1220 cestui-ci (Huon de Bordeaux ds BARTSCH Chrestomathie 37, 342); b) XVe s. cestuy la cas sujet masc. sing. (Chansons du XVe s., éd. G. Paris, XCIX, 24), ces particules, le plus souvent employées avec cestui et ceste (MATHEWS, op. cit., pp. 22-25) forment des pron. composés répertoriés par les dict. jusqu'à Lar. 19e, mais qui ne sont plus utilisés que dans le style burlesque (Trév. Suppl. 1752). B. Emploi anaphorique 1. ca 1100 chest + rel. (ALBERIC DE PISANÇON, Alexandre ds BARTSCH Chrestomathie, 7, 24); 2. ca 1130 cist de (Gormont et Isembard, éd. A. Bayot, 78). Au système du lat. class. comprenant trois démonstratifs hic (désignant l'objet présent ou celui qui concerne le locuteur), iste (l'objet intéressant l'allocuteur), ille (l'objet éloigné) auquel s'ajoutaient is pron. anaphorique ou de renvoi, idem pron. d'identité, ipse pron. adversatif, se trouve substitué vers le VIe s. un système simplifié (iste, ipse, ille), dû à la disparition de is (en raison de sa brièveté) que remplace hic auquel se substitue à son tour iste (JUVÉNAL, 4, 67 : iste dies « ce jour [aujourd'hui] »), seul le neutre hoc subsistant, v. ce, pron. neutre; ipse qui perd sa valeur de pron. adversatif sert alors de dém. anaphorique en concurrence avec iste et ille (VÄÄN., p. 128). L'a. fr., peut-être sous l'infl. du frq. (WARTB. Évol., p. 66), ne retient de ce système que deux dém. marquant l'opposition entre rapprochement (à la fois du locuteur et de l'allocuteur) : cest (< ecc(e) istum) et éloignement (ce qui concerne la personne non présente, la 3e pers.) : cel (< ecc(e) illum, v. celui). À côté de cist (cas suj. sing. masc. cist < eccísti; cas régime sing. masc. et neutre cest < eccístum; cas suj. et cas régime fém. ceste < eccísta; cas régime second masc. cestui < eccistúi; cas régime second fém. cesti < ), on relève la forme ist (non appuyée sur écce) et la forme icist qui semble provenir de l'adv. i < hic p. ext. anal. à partir de l'adv. ici < híc ecce (G. MOIGNET, Gramm. de l'a. fr., Paris, Klincksieck, 1973, p. 43). Les formes fléchies de cist sont susceptibles d'être employées comme adj. et pron.; leur spécialisation à l'emploi adj. semble postérieure au XVIe s. L'évolution qui mène au système moderne de l'adj. dém. (sing. masc. ce/cet, fém. cette; plur. ces) est complexe. D'apr. A. DEES, Étude sur l'évolution des dém. en a. et m. fr., Groningue, 1971, le point de départ est la rencontre des deux adj. ces, issu de cez (cas régime masc. sing. de cist) et ces issu de cels (cas régime masc. plur. de cil) qui introduit un nouveau type d'adj. dém. ne reposant pas sur la distinction proximité/éloignement, et qui s'étend p. anal. au fém. (d'où le système des adj. dém. : — masc. sing. cas suj. cist/cil, cas régime cest/cel; plur. cas suj. cist/cil, cas régime ces, — fém. sing. cas suj., cas régime ceste/cele; plur. cas suj. cas régime ces). L'apparition fin XIIe s.-début XIIIe s. en position préconsonantique d'une forme analogique ce entraîne dans la 1re moitié du XIVe s. la disparition des adj. cest et cel dans cette même position. À la suite de la substitution des formes du cas régime à celles du cas suj. à partir du dernier quart du XIIIe s., cist et cil disparaissent. Enfin, entre le milieu du XIVe s. et la fin du XVe s., étant donné la fréquence des formes indifférenciées ces et ce, le fr. renonce à la distinction entre adj. exprimant la proximité et adj. exprimant l'éloignement et abandonne de ce fait les adj. cel et cele, aboutissant au système mod. À partir de cette date, l'emploi des adv. -ci et -là devient plus courant pour exprimer les notions de proximité et d'éloignement que ne pouvaient plus par eux-mêmes exprimer les adj. Pour l'évolution de cist pron. et l'aboutissement au système mod. des pron. dém. v. celui.
STAT. — Ce (mot grammatical). Fréq. abs. littér. : 306 914. Fréq. rel. littér. :XIXe s. : a) 343 323, b) 425 878; XXe s. : a) 487 629, b) 490 873. Ce (adj.). Fréq. abs. littér. : 514 143. Fréq. rel. littér. :XIXe s. : a) 718 506, b) 706 957; XXe s. : a) 730 048, b) 755 650. Cet. Fréq. abs. littér. :53 499. Fréq. rel. littér. :XIXe s. : a) 91 200, b) 71 708; XXe s. : a) 67 153, b) 70 894. Cette. Fréq. abs. littér. :230 997. Fréq. rel. littér. : XIXe s. : a) 349 403, b) 306 260; XXe s. : a) 320 782, b) 327 239. Ces. Fréq. abs. littér. :171 479. Fréq. rel. littér. :XIXe s. : a) 293 844, b) 229 320; XXe s. : a) 227 830, b) 218 642.
BBG. — BAARSLAG (A. F.). Le suj. neutre il, ce, cela. R. des Lang. vivantes. 1964, t. 30, pp. 3-14. — COHEN 1946, pp. 53-54. — DEES (A.). Ét. sur l'évolution des dém. en a. fr. et en m. fr. Groningen, 1971, 164 p. — GOUGENHEIM (G.). Les Pron. dém. celui et ce aux points de vue syntaxique et fonctionnel. B. Soc. Ling. 1965, t. 60, pp. 88-96. — GOUG. Mots t. 2 1966, p. 110. — GUIRAUD (P.). L'Assiette du n. ds la Chanson de Roland. Romania. 1967, t. 88, pp. 59-83. — MELANDER (J.). Le Tour fr. cet homme je le connais. St. neophilol. 1943/44, t. 16, pp. 195-200. — PISCOLLA (V.). L'Evoluzione del dimostrativo neutro ce dalle origini della lingua. Campobasso, 1965, pp. 7-29. — PRICE (G.). Quel est le rôle de l'oppos. cist/cil en a. fr.? Romania. 1968, t. 89, pp. 240-253; La Transformation du syst. fr. des dém. Z. rom. Philol. 1969, t. 85, pp. 489-505. — YVON (H.). Cil et cist, art. dém. Romania. 1951, t. 72, pp. 145-181.

Ce [seø]
Symbole chimique du cérium.

Encyclopédie Universelle. 2012.