cri [ kri ] n. m.
1 ♦ Son perçant émis avec violence par la voix. Jeter, pousser des cris. ⇒ crier. « ce nouveau-né va respirer, et sa respiration autonome commence par un cri » (F.-B. Michel). Pousser son premier cri : naître, voir le jour. Cri primal. Pousser des cris de paon. Un long cri. Étouffer un cri. Cri aigu, déchirant, strident; étouffé, inarticulé, plaintif, sourd. Cri de surprise, de joie, de triomphe; de fureur, de colère (⇒fam. gueulante) , de douleur, de désespoir (⇒ couinement, gémissement, glapissement, grognement, hurlement, plainte) .
2 ♦ Parole(s) prononcée(s) très fort, sur un ton aigu. ⇒ éclat (de voix). Cri d'alarme, d'appel, de détresse. Cri de guerre. Cris de dispute, de protestation, d'indignation. ⇒ braillement, clameur, criaillerie, exclamation, gueulement, haro, huée, tollé, vocifération. — Cris d'approbation. ⇒ acclamation, 2. bis, bravo, hourra, ovation, vivat. — Spécialt Annonce des marchands ambulants. « Dans les grandes artères retentissaient les cris des vendeurs de journaux » (Martin du Gard). — Loc. Jeter, pousser les hauts cris : protester véhémentement. À cor et à cri.
♢ (1892) Fig. et fam. Le dernier cri de la mode, sa toute dernière nouveauté. Ce chapeau est du dernier cri. Un modèle dernier cri.
3 ♦ Par ext. Opinion manifestée hautement. Les cris des opprimés. « Un cri général, un crescendo public, un chorus universel de haine et de proscription » (Beaumarchais). Loc. C'est le cri du cœur, l'expression non maîtrisée d'un sentiment sincère.
4 ♦ Didact. Son émis par la voix des animaux variant avec les espèces. Cri et bruit des animaux. Le cri du chat est le miaulement. Pousser son cri. REM. Se dit surtout des oiseaux, ou des animaux dont le cri spécifique n'a pas de nom. Les hirondelles « lançaient leur cri comme une fusée » (Loti). Le cri de la chouette.
5 ♦ Par anal. Bruit aigre, crissement.
⊗ CONTR. Chuchotement, murmure.
● cri nom masculin Son ou suite de sons émis par un animal et caractéristiques de son espèce : Imiter le cri de la chouette. Son inarticulé émis par quelqu'un : Le premier cri du nouveau-né. Parole, son émis par quelqu'un sous l'effet d'une émotion, d'un sentiment, d'une sensation ; hurlement : Pousser un cri de douleur. Opinion, sentiment manifestés avec vigueur et spontanéité : Le cri de la conscience. Bruit produit par quelqu'un qui s'exprime en criant ; paroles brèves émises avec force par quelqu'un qui crie (surtout pluriel) : On entendait des cris dans la pièce à côté. Chasse Cane utilisée comme appelant par les chasseurs de gibier d'eau. ● cri (expressions) nom masculin À grands cris, en insistant avec force. Jeter, pousser les (des) hauts cris, protester, se récrier énergiquement. Le cri du cœur, l'expression spontanée d'un sentiment profond. Le dernier cri de quelque chose, être du dernier cri, se dit de ce qu'il y a de plus récent, de plus perfectionné, de plus à la mode (peut s'employer en apposition sans article) : Il a acheté un téléviseur dernier cri. Cris ou chants séditieux, cris ou chants qui portent atteinte à l'autorité publique et qui peuvent constituer un élément matériel de certaines infractions (provocation à un attroupement, à la rébellion, etc.). Cri de guerre ou d'armes, mot ou groupe de mots, inscrit sur une banderole placée en général au-dessus de l'écu, qui servait de signe de ralliement aux combattants d'une même bannière. Cri de l'étain, petit craquement que ce métal fait entendre lorsqu'on le plie. (C'est un des premiers exemples découverts de l'émission acoustique.) ● cri (synonymes) nom masculin Son inarticulé émis par quelqu'un
Synonymes :
- gémissement
Parole, son émis par quelqu'un sous l'effet d'une émotion, d'un...
Synonymes :
Bruit produit par quelqu'un qui s'exprime en criant ; paroles brèves...
Synonymes :
- huée
- tollé
Contraires :
- murmure
- silence
cri, ie
adj. Relatif aux Cris. La langue crie.
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cri
n. m.
d1./d Son de voix aigu ou élevé qu'arrache la douleur, l'émotion, ou destiné à être entendu de loin. Pousser un cri. Cri d'horreur, de peur, de joie, de surprise. Pousser des cris d'indignation. Protester, demander à grands cris, avec force, insistance.
— Loc. Jeter les hauts cris. à cor et à cri: à grand bruit (V. cor).
|| Dernier cri: dernière mode, suprême élégance. Une robe (du) dernier cri.
d2./d Fig. Opinion manifestée hautement. Un cri unanime d'admiration. Un cri d'amour.
|| Appel. Cette lettre est un cri.
d3./d Par ext. Mouvement intérieur (qui nous pousse à réagir). Un cri du coeur. Le cri de la conscience.
d4./d Bruit caractéristique émis par la voix d'un animal. Le cri de la chouette est le hululement.
d5./d Bruit aigre produit par certaines choses. Le cri de la scie.
⇒CRI, subst. masc.
A.— Son(s) généralement bref(s) et aigu(s), émis instinctivement par les cordes vocales sous l'effet de certaines émotions.
1. Expression phonique d'une sensation, d'un état physique ou moral, ressenti en profondeur très intensément.
a) Domaine physique :
• 1. En songe quelque temps son âme sommeilla.
Comme un coup dans le cœur un cri la réveilla :
C'était ce cri de soif, insensible à l'oreille,
Auquel dans son repos une mère s'éveille,
De ses pauvres petits le doux vagissement,
Qui venaient à sa mort demander l'aliment :
LAMARTINE, La Chute d'un ange, 1838, p. 901.
b) Domaine moral : Un choc épouvantable eut lieu, suivi d'un immense cri de désespoir et d'effroi (PONSON DU TERRAIL, Rocambole, t. 4, Les Exploits de Rocambole, 1859, p. 17) :
• 2. On n'est pas maître du soulèvement de toutes les puissances de l'âme, d'une pareille lame de fond : un cri de détresse vient aux lèvres; je ne l'ai pas retenu. Je n'en ai pas honte...
BERNANOS, L'Imposture, 1927, p. 341.
SYNT. a) Cri + adj. Cri aigu, déchirant, désespéré, douloureux, étouffé, général, guttural, joyeux, perçant, plaintif, rauque, sauvage, sourd, terrible. b) Adj. + cri. Faible, grand, horrible, léger, long, petit, seul cri. c) Cri + de + subst. Cri d'admiration, d'angoisse, de colère, de désespoir, d'effroi, d'épouvante, d'étonnement, d'horreur, de joie, de rage, de révolte, de soif, de souffrance, de surprise, de terreur, de triomphe, de victoire. d) Cri + verbe. Jaillir, monter, redoubler, s'élever. e) Verbe + cri. Arracher, entendre, étouffer, jeter, laisser échapper, répéter, retenir un/son cri.
2. Son de voix caractérisant un animé et, p. ext., une situation, un événement.
a) [À propos d'un être humain ou, p. ext., d'une situation propre à un être humain] Le son de la voix de celui qu'elle aimait, (...) le premier cri de l'enfant qu'elle portait dans son sein (CHATEAUBR., Mém., t. 1, 1848, p. 413). Un cri de femme surprise (ZOLA, Nana, 1880, p. 1207).
b) [À propos d'un animal] :
• 3. Quelques chiens aboyaient à la lune; la chouette poussait son cri funèbre, et les crocodiles vagissaient entre les roseaux du fleuve, imitant le cri d'un enfant en détresse.
GAUTIER, Le Roman de la momie, 1858, p. 287.
SYNT. Cri de bête, de chouette, de cigale, d'oiseau. PARAD. (Quasi-)synon. beuglement, braillement, braiment, glapissement, grognement, gueulement, hurlement, mugissement.
— P. anal. [À propos d'une pers.] Pousser des cris de merluche, d'orfraie, de paon. Céline (...) poussa des cris de merluche (HUYSMANS, Sœurs Vatard, 1879, p. 164).
3. P. anal.
a) [À propos d'un instrument de musique] :
• 4. ... ce cri de flûte à peu près effacé introduit dans la plainte des hautbois et des violoncelles comme un rappel des joies du monde qui la rend plus désespérée.
FAURE, L'Esprit des formes, 1927, p. 212.
b) [À propos d'un objet métallique qui frotte contre un autre objet] Avec une valeur légèrement péj. Bruit aigre, peu harmonieux. Cri des ciseaux. Le chantonnement plaintif des pompes et des puits, le cri du silex sur les faux (ARLAND, Ordre, 1929, p. 32).
— Spéc. Bruit de l'étain qu'on plie. Une de ses propriétés les plus spéciales, le cri ou bruissement qu'il [l'étain] fait entendre lorsqu'on le plie (BERTHELOT, Orig. alchimie, 1885, p. 230).
c) [À propos de diverses choses] (Quasi-)synon. bruissement, crissement. D'innombrables cuisines, d'où (...) s'échappe un cri de friture (CLAUDEL, Connaiss. Est, 1907, p. 31).
— En partic. Cri de la soie. Le cri d'une étoffe de soie (BALZAC, Curé vill., 1839, p. 250).
B.— Brèves paroles prononcées à pleine voix pour prévenir quelqu'un, pour exprimer quelque chose.
1. Appel ou avertissement, en cas de danger ou pour encourager à la lutte. Un grand bruit d'armes et le cri de guerre des Français :« Mont-Joye et Saint Denis » (BARANTE, Hist. ducs Bourg., t. 1, 1821-24, p. 259) :
• 5. ... le cri de trahison retentit jusqu'au bout des promenades : « Nous sommes perdus! ... Trahis! ... » On n'entendait que cela (...) c'était une clameur immense, épouvantable.
ERCKMANN-CHATRIAN, Le Conscrit de 1813, 1864, p. 210.
— P. métaph. En vain le sensible Fénelon avoit jeté le premier cri d'alarme au commencement du siècle. « Qui pourra remédier, disoit-il, aux maux de nos églises » (BONALD, Législ. primit., t. 1, 1802, p. 205). Il y a, sur la tombe d'une Américaine, ce beau cri de guerre de la foi : Resurgam (GONCOURT, Journal, 1860, p. 808).
♦ Cri d'armes. Phrase de ralliement propre à une armée, une famille; p. méton. inscription sur les armoiries de cette phrase de ralliement. Les armoiries sont complétées par le cri qui se place à la partie supérieure de la composition (L'Hist. et ses méth., 1961, p. 754).
— P. ext. Bruit d'un instrument destiné à appeler, à avertir. Aussi longtemps que le clocher lancerait dans l'espace son cri d'appel (BERNANOS, M. Ouine, 1943, p. 1514) :
• 6. Lentement empli du long cri d'une sirène, le vent, qui apportait la rumeur presque éteinte de la ville en état de siège et le sifflet des vedettes qui rejoignaient les bateaux de guerre, passa sur les ampoules misérables allumées au fond des impasses et des ruelles; ...
MALRAUX, La Condition humaine, 1933, p. 192.
2. Annonce faite publiquement à voix haute.
— En partic. Annonce d'un marchand ambulant. Le cri des marchandes « d'oublies » (DUMESNIL, Hist. théâtre lyr., 1953, p. 202) :
• 7. ... j'ai retrouvé un à un, comme du fond de ma fatigue, tous les bruits familiers d'une ville que j'aimais et d'une certaine heure où il m'arrivait de me sentir content. Le cri des vendeurs de journaux dans l'air déjà détendu, les derniers oiseaux dans le square, l'appel des marchands de sandwiches, la plainte des tramways...
CAMUS, L'Étranger, 1942, p. 1192.
♦ P. ext. Dernier cri (gén. en appos. avec une valeur d'adj. inv.). Dernière nouveauté consacrée par l'opinion publique. Vêtues à la française; les femmes très « mode » tout dernier cri (JOUHANDEAU, M. Godeau, 1926, p. 294). Il paraît que Marconi a des disques dernier cri (BEAUVOIR, Mandarins, 1954, p. 147).
— Spéc. Proclamation d'un magistrat. Faire le cri :
• 8. L'arrêt fut lu trois fois en présence du peuple, et chaque fois le cri fut fait par l'exécuteur de la haute-justice, c'est-à-dire par mon père.
BALZAC, Œuvres diverses, t. 1, 1850, p. 564.
3. Expression à voix haute d'une opinion, notamment d'une protestation, émanant généralement d'une foule. Ce fut comme la clameur montant d'une marée. Nana! Nana! Nana! Le cri roulait, grandissait, avec une violence de tempête, emplissant peu à peu l'horizon (ZOLA, Nana, 1880, p. 1404) :
• 9. Soldats tyrans du peuple obscur et gémissant,
Et juges endormis aux cris de l'innocent;
Ministres oppresseurs, dont la main détestable
Plonge au fond des cachots la vertu redoutable.
CHÉNIER, Épître sur ses ouvrages, 1794, p. 203.
♦ Cri (public). Opinion générale. A s'en tenir aux noms qui sont en ligne [pour l'Académie], et puisque le cri public ne proclame personne, M. Mazères semble avoir pour lui l'ancienneté des titres (SAINTE-BEUVE, Nouv. lundis, t. 1, 1863-69, p. 397). Cris séditieux, cris de sédition. Opinion portant atteinte à l'autorité et manifestée dans un lieu public :
• 10. ... on ne prêche plus aux citoyens que le repos et la confiance; le mot de liberté passe presque pour un cri de sédition...
ROBESPIERRE, Discours, Sur le jugement de Louis XVI, t. 9, p. 91.
— Expr. et loc. Crier, jeter, pousser les hauts cris (cf. POINCARÉ, Hyp. cosmogon., 1911, p. LIX). Arg. Aller au(x) cri(s). Protester. Chez les I.P.A. [Inspecteurs Principaux Adjoints] le Nantais [arrêté comme malfaiteur] allait au cri. Puisque j'vous dis que j'suis commerçant! Vous avez pas le droit (LE BRETON, Razzia, 1954, p. 100). Faire du cri. Faire du scandale. Le cri terrible qu'ils osaient [eux, des caves] lui faire certains jours [à lui, vieux teneur de loterie truquée]! (SIMONIN, Pt Simonin ill., 1957, p. 266). Ce n'est qu'un cri, il n'y a qu'un cri. Il n'y avait qu'un cri... de tous côtés on me répondait :« Oscar charmant jeune homme! » (LABICHE, Choix d'un gendre, 1869, 3, p. 363).
PARAD. (Quasi-)synon. clameur, huée, improbation, protestation, réclamation, récrimination, tapage, tumulte, vacarme.
— P. métaph. Expression écrite ou figurative d'un idéal :
• 11. Dans une partie de la Phrygie chrétienne, d'humbles épitaphes font retentir le cri courageux du défi de la secte montaniste devant la persécution : « tombeau élevé par des chrétiens à des chrétiens ».
L'Hist. et ses méthodes, 1961, p. 462.
♦ En partic. [À propos d'un artiste] Du Michelet encore! — Il a de beaux cris, dit Pierre (MORAND, Homme pressé, 1941, p. 108).
— P. anal. Ce qui possède une expressivité puissante, propre à attirer vivement l'attention. Des nuances, des demi-teintes : Évite le cri des couleurs (LORRAIN, Gris., Évangile, 1887, p. 115). Les façades blêmes des maisons endormies, épuisées de réclames électriques, de grimaces et de cris de lumière (SEM, Ronde de nuit, 1923, p. 94).
4. Voix intérieure puissante, traduisant spontanément une opinion sincère, un élan de l'âme. Cri du cœur, de mort. Des hommes assez infortunés pour étouffer le cri de la conscience (CHATEAUBR., Génie, t. 1, 1803, p. 239). Vraie prière et cri de l'âme (DUPANLOUP, Journal, 1864, p. 253).
Prononc. et Orth. :[]. Ds Ac. 1694-1932; Ac. 1694 et 1718 admettent également la graph. cry. Étymol. et Hist. 1. a) Ca 950-1000 « son émis avec force par la voix de l'homme (en signe d'appel) » (Passion, éd. d'A. S. Avalle, 314); av. 1510 a cry et a cors (G. COQUILLARD, Monologue, éd. M. J. Freeman, 105); 1691 fig. (RACINE, Athalie, V, 6 : de leur sang ... faire cesser les cris); b) 1120-35 en parlant des animaux (PH. DE THAON, Bestiaire, éd. E. Walberg, 789); 2. 1165-76 « réputation (le plus souvent défavorable), réprobation publique » (CHR. DE TROYES, Cligès, éd. M. Roques, 5269); 3. ca 1230 « publication, proclamation publique, ban » (Gaydon, 199 ds T.-L.); p. ext. 2e moitié XIIIe s. [ms.] « appel, annonce d'un marchand des halles » (G. DE LA VILLENEUVE, Crieries de Paris, éd. Barbazan et Méon, II, 109); 1892 du dernier cri (COURTELINE, Conversion d'Alceste, Bonnes occasions, p. 228). Déverbal de crier. Fréq. abs. littér. :12 522. Fréq. rel. littér. :XIXe s. : a) 15 612, b) 22 521; XXe s. : a) 22 246, b) 14 375. Bbg. DOKOUPIL (G.). Elle eut un cri. In : [Mél. Haskovee (P.M.)]. Brünn, 1936, pp. 110-115. — GOTTSCH. Redens. 1930, p. 99, 287, 455. — GOUG. Mots t. 2 1966, p. 104. — QUEM. Fichier. — ROG. 1965, p. 127, 180. — SAIN. Arg. 1972 [1907], p. 140.
cri [kʀi] n. m.
ÉTYM. Xe, criz; déverbal de crier.
❖
1 Son intense, souvent aigu, perçant, émis par la voix humaine. ⇒ Éclat (de voix). || Élever un cri, des cris. || Faire, pousser des cris. ⇒ Crier. Vx. || Jeter, répandre des cris. || Un long cri s'est fait entendre, a retenti. || Un grand cri jaillit de sa poitrine. || Le Cri, film d'Antonioni. || Percer, remplir l'air de ses cris. || Appeler à grands cris. ⇒ Appel (→ Oh, hé !). || Cris de querelle. || Aimer les cris (→ Casse, cit. 1). || Redouter les cris. || Avoir les oreilles rebattues des cris de qqn. || Ne faire qu'un cri, en parlant de cris ininterrompus, continuels. || Étouffer un cri. || Cri aigu, assourdissant, bref, déchirant, éclatant, fort, perçant, strident, stridulant (⇒ Beuglement, braillement, braiment, gueulement, hurlement, rugissement). || Des cris épouvantables. || Cri étouffé, inarticulé, plaintif, sourd. || Cri de surprise (→ Oh ! Ah !); de joie, de triomphe; de frayeur, de colère, de douleur. ⇒ Gémissement, grognement, hurlement, plainte, pleur, protestation, râle, sanglot; lamentation. Littér. || Des cris de damné. ☑ Loc., vx. Hauts cris : cris forts et aigus. → ci-dessous, cit. 2 et, dans un autre contexte, au sens 2.
1 Elle jeta des cris, elle versa des pleurs.
Corneille, Médée, I, 1.
2 Je le trouvai (La Rochefoucauld) criant les plus hauts cris des douleurs extrêmes de la goutte.
Mme de Sévigné, 148, 23 mars 1671.
3 D'une mère en fureur épargne-moi les cris (…)
Racine, Iphigénie, I, 1.
3.1 Elle avait caché là sa tête, afin d'assourdir ses horribles cris, obéissant à une sorte d'instinct pudique : c'étaient des sanglots, des pleurs d'enfant, mais plus pénétrants, plus plaintifs; il n'y avait plus rien dans le monde pour elle.
Balzac, le Message, éd. 1834, p. 23.
4 À quoi sert de pleurer ? À quoi bon ces clameurs ?
Les cris n'éveillent point les morts.
Leconte de Lisle, les Érinnyes, II, IV.
5 (…) j'entendis des cris, des cris humains, plaintifs, étouffés, déchirants.
Maupassant, Clair de lune, « Le père », p. 230.
6 L'homme s'exprime souvent, comme les animaux, par des cris, réflexes ou non, qui traduisent surtout ses sensations et ses sentiments. Les uns sont de vrais cris : Bah ! Pst ! Hop ! les autres sont des mots : Halte !
F. Brunot, la Pensée et la Langue, I, I, p. 3.
7 (…) Vanini poussa un cri de douleur si fort, et si déchirant que les assistants en frémirent.
Gide, Journal, 3 avr. 1945.
8 L'enfant laissa échapper un cri bref, qui se mua bien vite en rire forcé.
Martin du Gard, les Thibault, t. III, p. 146.
9 Le cri, si fort et si vivant qu'on en fera quelque chose, un jour. Il est absurde que cette énorme somme d'énergie s'évapore ainsi, se perde dans l'espace.
G. Duhamel, Scènes de la vie future, VIII, p. 129.
10 Ce trouble, elle (la muette) était impuissante à l'exprimer par la parole. Prise de désespoir, un cri lui montait à la gorge, dont elle retenait douloureusement l'émouvante et terrible bestialité (…) et j'appréhendais toujours l'éclat de ce cri qu'elle contenait avec peine, c'est-à-dire passionnément.
H. Bosco, Un rameau de la nuit, V, p. 202.
11 Longtemps la voix rauque des hommes, les cris des femmes, les hurlements des chiens, la tenaient éveillée sous ses couvertures.
J. Chardonne, les Destinées sentimentales, II, p. 183.
11.1 Je devais rester fidèle à ce cri qui était sorti de moi quand l'énorme obus s'était abattu sur Thiaumont. Voilà : il fallait me raccrocher à ce cri. Car ce cri était bien resté en moi.
Drieu La Rochelle, la Comédie de Charleroi, p. 309.
♦ ☑ Loc. Pousser des cris d'orfraie (cit. 1), de paon (→ le sens 7) : des cris aigus, des protestations (→ le sens 2). ⇒ Protester.
2 Ensemble des paroles, des phrases brèves émises simultanément par un groupe de personnes, une assemblée, une foule. || Concert de cris. ⇒ Clameur. || Un long cri monta de la foule. || Cris séditieux. || La foule pousse des cris de mort. || Cri de protestation, de révolte, de désapprobation, d'indignation… ⇒ Bas (à bas), charivari, clabaudage, clabaudement, clabauderie, criaillerie, crierie, exclamation, glapissement, grognement, gueulement, haro, hou !, hourvari, huée, hurlement, improbation, interjection, mouvement, mugissement, murmure, piaillerie, protestation, réclamation, récrimination, tapage, tollé, tumulte, vacarme, vocifération… || Protester à grands cris (→ Applaudir, cit. 5; bousculer, cit. 4).
12 Chiens, chasseurs, villageois, s'assemblent pour sa perte.
Jupiter est là-haut étourdi de leurs cris (…)
La Fontaine, Fables, X, 5.
13 Nous nous levons alors, et tous en même temps
Poussons jusques au ciel mille cris éclatants.
Corneille, le Cid, IV, 3.
14 Tout le peuple à grands cris demande Nicomède.
Corneille, Nicomède, V, 4.
♦ Cris d'approbation. ⇒ Acclamation, ah, applaudissement (cit. 4), ban, battement (des mains), bis, bravo, hourra, ovation, vivat, vivre (vive). → Hip hip hip, hourra ! || Être accueilli aux cris de vive… — Cri de louange. ⇒ Hosanna. || Cri de joie, d'allégresse (⇒ Alléluia). || Cris d'adieu. || Cri d'encouragement. ⇒ Aller (allez-y), courage (bon courage); incitation. || Cri de supplication. ⇒ Prière. || Cri des bacchantes. ⇒ Évoé.
♦ Vx. || Hauts cris : cris aigus, perçants. ☑ Loc. mod. Jeter, pousser les hauts cris : protester véhémentement.
15 J'eus dans le même temps une autre affaire, qui occasionna la dernière lettre que j'ai écrite à M. de Voltaire : lettre dont il a jeté les hauts cris, comme d'une insulte abominable, mais qu'il n'a jamais montrée à personne.
Rousseau, les Confessions, X.
16 Les prêtres, attaqués dans la Confession du vicaire savoyard, jetèrent les hauts cris (…)
Chamfort, Maximes, I, « Sur la philosophie et la morale », XCIV.
16.1 D'abord, son frère Saturnin avait poussé les hauts cris : jamais d'la vie é n'irait voir Meussieu Narceuse. Qu'est-ce quelle lui voulait ? De quoi qu'è s'mêlait.
R. Queneau, le Chiendent, p. 169.
♦ ☑ À cor et à cri. ⇒ Cor (cit. 5 et 6).
♦ ☑ Argot. Faire du cri, aller au cri : faire du scandale, protester bruyamment.
3 ☑ (1892). Loc. fig. Dernier cri. || Le dernier cri de la mode, sa toute dernière nouveauté. || Ce chapeau est du dernier cri, de la suprême élégance. ⇒ Mode, vogue… — En appos. || Des voitures dernier cri (ces emplois ont vieilli).
17 Nous pouvons dès la semaine prochaine commencer les travaux d'un établissement hydrominéral, dernier cri, sans avoir rien eu à payer que le prix du terrain.
J. Romains, les Hommes de bonne volonté, t. V, XXII, p. 180.
17.1 Son chauffe-eau, son frigo, elle me les céderait volontiers, elle choisirait des modèles dernier cri (…)
Violette Leduc, la Folie en tête, p. 409 (1970).
4 Par anal. Parole(s) lancée(s) très fort en signe d'appel, d'avertissement. ⇒ Appel (cit. 1 et 2), avertissement. || Cri d'alarme. ⇒ Arme (aux armes), assassin (à l'assassin), garde (prenez garde), moi (à moi), voleur (au voleur)… || Cri de détresse. ⇒ Sauver (sauve qui peut), secours (au secours), S. O. S. || Cri de la sentinelle. ⇒ Aller (qui va là ?), vivre (qui vive ?). — Cri de guerre. || Cri d'armes, et, ellipt., cri. ⇒ Devise, slogan. || « Mont-joie Saint-Denis », ancien cri des Français. || « Notre-Dame », cri de la maison de Bourbon. || « Dieu premier servi », cri de Jeanne d'Arc. || « Toujours prêt », cri des scouts. || Cri de ralliement.
18 Le seul chapitre des cris d'exhortation remplirait des pages. Il y a des cris de guerre, depuis Montjoie jusqu'à En avant ! des cris de chasse, de marche, de sport, etc. La conversation la plus banale en fournit : Attention ! Prenez garde ! Un peu de patience ! Allons, courage !
F. Brunot, la Pensée et la Langue, XII, V, V, p. 566.
♦ Cri des chasseurs. ⇒ Hallali, hourvari, huée, taïaut.
♦ Spécialt. Annonce des marchands ambulants (⇒ Criée). || Le cri du rémouleur, du chiffonnier. || Les cris des marchands de journaux. || Les cris de Paris.
19 Dans les grandes artères retentissaient les cris des vendeurs de journaux (…)
Martin du Gard, les Thibault, t. VII, p. 114.
5 Littér. Opinion manifestée hautement. || Il n'y a qu'un cri sur cet homme politique (⇒ Bruit). || Un cri général et unanime s'élève contre lui. || Les cris de la cabale. || Des cris de vengeance, de haine; de misère. || Les cris des opprimés. || Cri d'amour, de désir… || Cri d'ardeur. — Spécialt. || Le cri public. ⇒ Opinion (publique). || Braver le cri public.
20 (…) un cri général, un crescendo public, un chorus universel de haine et de proscription.
Beaumarchais, le Barbier de Séville, II, 8 (→ Calomnie, cit. 5).
6 Fig. Mouvement intérieur (de la conscience). ⇒ Appel, voix; avertissement, aveu. — ☑ Loc. Cri du cœur. || C'est le cri du cœur, l'expression non maîtrisée d'un sentiment sincère. — Le cri de la conscience. || Cri de l'âme (→ Auditoire, cit. 8; blues, cit. 2.). || Cri du sang, de la nature. || Le cri de l'amour maternel.
21 Le premier langage de l'homme, le langage le plus universel, le plus énergique, et le seul dont il eût besoin avant qu'il fallût persuader des hommes assemblés, est le cri de la nature.
Rousseau, De l'inégalité parmi les hommes, I, p. 53.
22 Un cri sorti du cœur, un geste un mouvement,
Et nos cœurs confondus n'avaient qu'un battement.
Lamartine, Jocelyn, Sixième époque, Lettre à sa sœur, 26 sept. 1800.
♦ Le cri de la chair. ⇒ Exigence, protestation.
23 Saisie par ce grandiose, soupçonnant que le bonheur devait justifier cette immolation, entendant en elle-même les cris de la chair révoltée, elle demeura stupide en face de sa vie manquée.
Balzac, le Lys dans la vallée, Pl., t. VIII, p. 960.
7 Didact. Son vocal émis par les animaux et variant avec les espèces. || Désignation des cris des animaux. ⇒ Aboyer (aboi, aboiement; chien), babiller (babil, babillage; corneille, merle, pie), bareter (éléphant, rhinocéros), barrir (barrissement, barrit; éléphant), bêler (bêlement, rare béguètement; bélier, brebis, chèvre, mouton), bégueter (béguètement; chèvre), beugler (beuglement; bœuf, buffle, taureau, vache), blatérer (bélier, chameau), bourdonner (bourdonnement; abeille, mouche), brailler (braillement; paon), braire (braiement; âne), bramer (bramement, régional bramée; cerf, chevreuil, daim), cacaber (perdrix), cacarder (oie), cajoler (geai, pie), caqueter (caquet; poule), caracouler (ramier), carcailler (caille), chanter (chant; cigale, coq, fauvette, rossignol…, oiseau), chicoter (souris), chuchoter (chuchotement; moineau), chuinter (chuintement; chouette), clabauder (clabaudage; chien), clapir (lapin), clatir (clatissement; chien de chasse), coasser (coassement; crapaud, grenouille), coqueriquer (cocorico ou coquerico; coq), coucouler (coucou; coucou), courailler (caille), crailler (craillement; corneille), craquer et craqueter (craquètement; cigale, cigogne, grue), crételer (poule), criailler (criaillement; oie, paon), croasser (croassement; corbeau), ébrouer (s') (ébrouement; cheval), feuler (feulement; chat, tigre), flûter (merle), frigotter (pigeon), gazouiller (gazouillement et gazouillis; hirondelle…, oiseau), gémir (gémissement; tourterelle), glapir (glapissement; grue, renard), glatir (aigle), glouglouter et glogloter (glouglou; dindon), glousser (gloussement; gélinotte, perdrix, poule), grailler (graillement; corneille), grésiller et grésillonner (grésillement : grillon), gringotter (rossignol), grisoller (alouette), grogner (grognement; ours, porc), grommeler (grommellement; sanglier), hennir (hennissement; cheval), hôler (hulotte), huer (chouette, hibou), hululer (hululation, hululement; chouette, hibou), hurler (hurlement; chien, loup, ours), jacasser (jacassement, jacasserie; pie), japper (jappement; chien), jargonner (jars), jaser (jasement; geai, pie), lamenter (crocodile), margauder et margoter (caille), meugler (meuglement; bœuf, taureau, vache), miauler (miaulement; chat), mugir (mugissement; bœuf, buffle, taureau, vache), nasiller (nasillement; canard), parler (perroquet), pépier (pépiement; moineau, poussin… oiseau), piailler, piauler (piaulement, piaulis; poulet… oiseau), pupuler (huppe), raire (cerf, chevreuil, daim), râler, raller, réer (cerf, chevreuil, daim, faon, tigre), ramager (oiseau), rauquer (rauquement; tigre), ronronner (ronronnement; chat), roucouler (roucoulement; colombe, pigeon, ramier, tourterelle), rugir (rugissement; lion), siffler (sifflement; courlis, loriot, marmottfe, merle, serpent), souffler (soufflement; buffle), striduler (stridulation; cigale), tirelirer (tire-lire; alouette), trisser (hirondelle), trompeter (aigle, cygne, grue; mammifères marins), ululer (ululation, ululement; chouette, hibou)… et aussi voix. || Imitation du cri de certains oiseaux. ⇒ Frouer (frouée; chouette), rossignoler (rossignol), turluter (courlis), etc.
REM. Le mot s'applique surtout à propos des oiseaux dont le cri spécifique ne porte pas de nom, ou porte un nom peu connu; il paraît anormal lorsqu'il est appliqué au son non vocal produit par un insecte (→ ci-dessous cit. 29).
♦ Collectif. || Le cri du loup.
24 L'aigle, étant de retour et voyant ce ménage,
Remplit le ciel de cris (…)
La Fontaine, Fables, II, 8.
25 Un cri par l'éléphant est aussitôt jeté;
Le peuple aussitôt sort en armes.
La Fontaine, Fables, X, 13.
26 Les sifflements du courlis et le cri de la barnacle perchée sur les framboisiers de la grotte, m'annoncèrent le retour du matin (…)
Chateaubriand, les Natchez, VIII, 333.
27 (…) en se cachant le visage avec leurs manches, elles poussèrent ensemble un cri bizarre, pareil au hurlement d'une louve (…)
Flaubert, Salammbô, VII, p. 140.
28 (…) dans le ciel, passaient et repassaient les tourbillons d'hirondelles noires, ivres de mouvement et de lumière, qui, de minute en minute, à chaque tour de leur vol, lançaient dans le collège silencieux leur cri comme une fusée.
Loti, Matelot, III, p. 12.
29 La lande n'était qu'un infini cri de cigales.
F. Mauriac, le Mal, I, p. 27.
29.1 Plusieurs fois, (Jules Matrat) s'arrêta pour écouter piauler une bête dont il ne reconnaissait pas le cri. Plus doux que le glapissement du renard, c'était aussi plus clair comme son. Il y avait si longtemps qu'il n'avait entendu de marmottes qu'il n'en pouvait plus reconnaître le sifflement.
Charles Exbrayat, Jules Matrat, p. 242.
♦ Imiter, faire des cris d'animaux.
8 Bruit aigu et peu harmonieux (d'une chose). ⇒ Bruit. || Le cri de la lime, des ciseaux. ⇒ Crissement, frottement. || Cri de la soie. ⇒ Bruissement. || Cri de la girouette. ⇒ Gémissement, grincement. || Le cri d'une chaussure, d'un vieux meuble. ⇒ Craquement. || Cri d'une locomotive. ⇒ Sifflement.
30 Véronique reconnut à sa douceur exquise l'organe du curé, le frôlement de la soutane, et le cri d'une étoffe de soie qui devait être une robe de femme.
Balzac, le Curé de village, Pl., t. VIII, p. 739.
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CONTR. Silence.
Encyclopédie Universelle. 2012.