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COULEUR
COULEUR

Les radiations lumineuses perçues par notre œil se distinguent non seulement par leurs intensités, mais aussi par des caractéristiques qualitatives, leurs couleurs, qui n’ont d’abord été définies que par des comparaisons souvent grossières: les lumières comparables à celle du jour sont dites blanches, celles qui nous viennent de la plupart des feuilles au printemps sont vertes... Les mêmes adjectifs peuvent s’appliquer aux corps d’où nous recevons ces lumières, et aussi aux sensations qui leur correspondent.

Lorsqu’une lumière, soumise à des expériences convenables, comme la traversée d’un prisme, se trouve «décomposée» en des constituants de couleurs diverses, elle est qualifiée de complexe. Dans le cas contraire (lumière des lampes au sodium, par exemple), elle est simple (ou monochromatique ); elle peut alors être repérée par la longueur d’onde du phénomène vibratoire qui la constitue. Les lumières complexes, de beaucoup les plus nombreuses, peuvent être caractérisées par leur composition spectrale , c’est-à-dire par les longueurs d’onde et par les proportions relatives de leurs constituants. En fait, la plupart des lumières colorées obtenues en filtrant une lumière blanche par une lame de verre bleu, vert, jaune... sont loin d’être monochromatiques.

On ne saurait, naturellement, comparer entre elles les sensations de deux observateurs différents. Mais il est possible à chacun, considérant simultanément deux plages voisines, d’en régler les modes d’éclairement de façon qu’elles paraissent identiques non seulement en luminance, mais aussi en couleur, leurs compositions spectrales n’étant pas nécessairement les mêmes. Les lumières correspondantes sont dites alors homochromes.

On appelle excitation la cause lumineuse, évaluée physiquement, d’une sensation visuelle. Deux excitations différentes mais provoquant des sensations identiques seront dites équivalentes . La colorimétrie visuelle repose sur les hypothèses suivantes, dites souvent «principes colorimétriques», ou encore lois de Grassmann . On peut admettre que l’expérience les vérifie en première approximation, et sauf cas exceptionnels:

– Deux excitations équivalentes à une troisième sont équivalentes entre elles.

– Quand plusieurs excitations agissent simultanément sur l’œil, on ne change pas la sensation perçue si l’on remplace l’une quelconque d’entre elles par une autre équivalente.

– Par suite, si des excitations E1 et E2 sont respectivement équivalentes à E 1 et E 2, la somme E1 + E2 est équivalente à E 1 + E 2. En particulier, si E et E’ sont équivalentes, n E et n E’ (n quelconque) le sont aussi.

Un même équilibrage colorimétrique (quelconque) peut être obtenu par l’action d’excitations qui sont sensiblement les mêmes pour la plupart des observateurs: ceux-ci sont dits normaux , et la moyenne de leurs réponses a permis de caractériser un observateur moyen (idéal), auquel on se réfère conventionnellement. Mais il existe aussi, surtout dans le sexe masculin, une proportion notable d’observateurs s’écartant sensiblement de la moyenne; les plus «anormaux» d’entre eux, qui discernent mal certaines couleurs, sont dits daltoniens.

Et, même chez les observateurs normaux, il faut tenir compte de phénomènes «accidentels» d’adaptation, de fatigue, d’éblouissement, de contraste simultané ou successif, affectant plus ou moins la perception des couleurs. Celle-ci devient en outre médiocre ou impossible en vision nocturne, alors que celle des formes persiste plus ou moins: «La nuit, tous les chats sont gris.»

Sous ces réserves, l’expérience montre que, dans un système de référence bien défini (et dont le choix est en partie arbitraire), on peut, malgré l’infinie variété des compositions spectrales, déterminer une couleur quelconque par un ensemble de données numériques limité à trois; cette possibilité correspond à ce qu’on appelle parfois la trivariance visuelle.

Lorsqu’ils ne sont pas lumineux par eux-mêmes, les corps ne font (sauf cas de luminescence ) que renvoyer, par transmission ou réflexion régulières ou diffuses, tout ou partie de la lumière qu’ils reçoivent. Leur couleur dépend donc de cette dernière: sauf indication contraire, on la suppose blanche, mais, pour être rigoureux, il faut préciser de quelle lumière blanche il s’agit. Il peut arriver, comme on le verra, que la direction d’observation ainsi que la structure physique d’un corps influent sur la couleur observée. D’autre part, des facteurs psychologiques interviennent parfois dans notre appréciation des couleurs: si nous savons qu’une surface est blanche, nous croyons la voir blanche, même lorsque, éclairée par une lampe au sodium, elle ne renvoie vers nous que de la lumière jaune.

L’adjectif «coloré» est habituellement utilisé par opposition à blanc, gris ou noir, mais l’on parle aussi de «couleurs» blanche, grise ou noire... D’ailleurs, le vocabulaire utilisé pour désigner les couleurs est trop souvent fondé sur des conventions arbitraires et peut varier d’un métier à l’autre. Le préciser, et poser, malgré les difficultés que l’on vient d’évoquer, les bases d’une étude physique des couleurs, fut une tâche difficile et qui demeure encore inachevée.

1. Couleur des diverses lumières

Couleurs du spectre

On attribue à Newton la première interprétation de la décomposition d’une lumière complexe par un prisme. Un ensemble d’images (d’une même fente, par exemple) juxtaposées ou distinctes, obtenues à l’aide des diverses radiations simples constituant une lumière, en forme le spectre. Toute radiation simple correspond à une vibration, extrêmement rapide, de période déterminée T que l’on repère, comme en radioélectricité, par sa longueur d’onde , égale au produit de T par la vitesse de propagation de la lumière dans le vide.

Mais alors que, pour les ondes radio-électriques, se chiffre en kilomètres, mètres, ou éventuellement millimètres, sa valeur n’est, pour les ondes lumineuses, que de quelques dix-millionièmes de mètres; on utilisera, pour l’exprimer, le milliardième de mètre, ou nanomètre (symbole nm).

Suivant que les longueurs d’onde des éléments d’une lumière complexe forment une suite ininterrompue ou bien ont des valeurs distinctes, cette lumière est dite à spectre continu ou à spectre de raies.

Chaque lumière visible simple a une couleur déterminée; l’ensemble des couleurs forme une suite sans variation brusque, et la correspondance qu’indique le tableau 1 n’a qu’une valeur indicative, aucune convention générale ne spécifiant pour quelle longueur d’onde on passe du rouge à l’orangé, de l’orangé au jaune, etc.

Le nombre même des couleurs principales du spectre est arbitraire; on l’a longtemps fixé à sept (par analogie, peut-être, avec les notes de la gamme), en donnant un nom spécial (indigo) au bleu-violet, ce qui ne paraît pas plus nécessaire que d’en donner un au vert-bleu ou au vert-jaune... Rappelons, d’autre part, qu’on ne doit pas confondre les couleurs du spectre avec les couleurs de l’arc-en-ciel, qui sont différemment disposées et dues à des lumières complexes.

Les radiations de longueurs d’onde supérieures à celle du rouge extrême (infrarouge) ou inférieures à celle du violet extrême (ultraviolet) étant invisibles n’ont pas de couleur. Mais la présence d’ultraviolet dans une lumière peut provoquer de la part de certains des corps qu’elle éclaire, en particulier dans les milieux oculaires, une émission de plus grande longueur d’onde (luminescence ), parfois visible, ce qui influe sur leur couleur.

Les limites du spectre visible n’ont pas les valeurs précises que suggère le tableau 1: elles varient suivant la puissance des faisceaux considérés, et aussi selon les observateurs.

Lumières complexes. Mélanges de lumières

La composition spectrale d’une lumière complexe, qui conditionne sa couleur, se détermine à l’aide d’instruments appelés spectrophotomètres , par des mesures physiques dont on peut présenter le résultat, dans le cas d’un spectre de raies, sous la forme d’un tableau donnant, pour chacune des longueurs d’onde présentes, la portion correspondante P de la puissance P (énergie transportée par unité de temps, ou flux d’énergie). S’il s’agit d’un spectre continu, on évalue, pour toutes ses régions, la puissance dP transportée sous forme de radiations de longueurs d’onde comprises entre et + d , d étant très petit, et l’on calcule le rapport P size=1 = dP /d , qu’on appelle « flux d’énergie monochromatique» (expression critiquable, car P size=1 ne s’évalue pas en unités de flux, mais en unité de flux par unité de longueur d’onde). On peut alors construire la courbe de répartition spectrale d’énergie de la lumière, en portant en abscisses et P size=1 en ordonnées (en valeurs absolues ou plus souvent relatives).

L’intensité d’un faisceau de lumière peut s’évaluer, comme nous venons de le rappeler, par son flux d’énergie P , qui n’est en général qu’une petite fraction de watt. Si le faisceau est visible, on considère aussi son flux lumineux F , qu’on évalue en lumens, par les méthodes de la photométrie . Le rapport K = F/P est appelé efficacité lumineuse. Nul en dehors du spectre visible, il varie en fonction de la longueur d’onde pour les lumières monochromatiques, comme l’indique la figure 1 (dans le cas de l’observateur moyen conventionnel). Sur cette figure, les ordonnées sont les valeurs V size=1 = K/K m, K m étant la valeur maximale de K, qui correspond à la longueur d’onde = 555 nm. L’expérience a donné K m = 680 lm/W. L’efficacité d’une lumière complexe est déterminée par les proportions relatives de ses divers constituants monochromatiques, chacun d’eux étant affecté d’un «poids» proportionnel à son efficacité propre.

Quand plusieurs lumières simples ou complexes agissent simultanément sur l’œil, la couleur du «mélange additif» ainsi réalisé dépend de leurs longueurs d’onde, ou de leur composition spectrale, et de leurs intensités relatives. Ces mélanges peuvent résulter de la superposition géométrique de deux faisceaux lumineux dont l’un est transmis et l’autre réfléchi par une lame semi-transparente, ou de leur emploi pour éclairer simultanément un même écran blanc. On peut aussi les substituer périodiquement l’un à l’autre, à intervalles assez rapprochés, ou même leur donner pour origine des plages voisines juxtaposées, assez petites pour que l’œil ne les voie pas séparées (pointillisme).

Toutes les lumières complexes ont une teinte comparable à celle d’une lumière simple, plus ou moins «lavée» de blanc, à l’exception des pourpres , qui n’existent pas dans le spectre et résultent du mélange de lumières rouges et violettes (ou bleues). Il faut noter qu’on appelle couramment violettes des lumières complexes qui sont, en réalité, des pourpres, contenant des radiations rouges, lorsque celles-ci ne s’y trouvent qu’en proportion relativement faible.

L’expérience montre qu’une même sensation de couleur peut être due à des lumières de compositions spectrales très diverses. Par exemple, des sensations de couleur jaune très analogues peuvent être produites soit par une lumière monochromatique de longueur d’onde voisine de 580 nm, soit par une lumière blanche privée au moins partiellement de ses composantes spectrales bleues, soit même par un mélange de lumières rouges et vertes, dans lequel le jaune monochromatique fait totalement défaut.

Lumières blanches. Lumières complémentaires

On considère habituellement comme blanches des lumières de compositions spectrales aussi différentes que celles des lampes à filament incandescent et celle du ciel bleu (fig. 2). On peut aussi percevoir une sensation subjective de blanc en observant un mélange de deux lumières monochromatiques (ou d’un plus grand nombre) convenablement choisies, les autres étant absentes ou réduites. Tel est le cas, en particulier, de lumières (produites dans certaines expériences) dont le spectre, comportant alternativement des bandes brillantes et des bandes sombres, est dit cannelé.

Lorsqu’une lumière a même composition spectrale que la lumière émise par un «corps incandescent noir», de température T c, celle-ci est appelée température de couleur de la source qui émet la lumière en question. Cette notion est souvent employée pour la caractérisation précise ou approchée de certaines lumières blanches, mais beaucoup de lumières dites blanches ne peuvent pas être ainsi spécifiées. Rappelons que l’incandescence est l’émission de lumière par un corps du seul fait de sa température (par opposition à la luminescence). Les physiciens appellent corps noirs tous ceux qui absorbent intégralement les radiations reçues; on démontre que l’émission de lumière par incandescence est, à surface égale, la même pour tous ces corps, et supérieure à celle de tous les corps non noirs.

Pour les besoins de la colorimétrie, la Commission internationale de l’éclairage (C.I.E.) a recommandé l’usage de l’une ou l’autre des trois sources A, B, C, définies comme suit: l’étalon A est une lampe à filament de tungstène en atmosphère gazeuse, d’une température de couleur de 2 850 degrés absolus; les étalons B et C sont constitués par la même lampe, devant laquelle on place des filtres formés de solutions bien spécifiées, contenant notamment des sels de cuivre et de cobalt; leurs températures de couleur sont respectivement voisines de 4 800 et 6 500 0C, et leurs lumières se rapprochent de celles que nous recevons du soleil (pour B) et du ciel bleu (pour C).

On fait également intervenir une lumière théorique, dite à spectre d’égale énergie, que nous désignerons par la lettre W.

L’initiale W du mot anglais white et de l’allemand weiss est employée souvent en colorimétrie pour évoquer les blancs, la lettre B étant réservée à la couleur bleue. Sa répartition spectrale d’énergie, en fonction de la longueur d’onde, serait constante (dans le visible); on l’obtient approximativement à l’aide d’un étalon A et d’un filtre convenable, analogue aux précédents. Comparée à celle du Soleil, elle contient à la fois un peu plus de bleu et de rouge; sa couleur est donc légèrement pourpre.

Deux lumières (simples ou complexes) sont dites complémentaires quand, agissant simultanément et en proportions convenables sur l’œil moyen, elles lui donnent l’impression d’une lumière blanche; la correspondance entre elles ne peut être établie avec précision que si l’on a bien fixé la lumière blanche de référence. Pour les verts de longueurs d’onde comprises entre 500 et 560 nm (environ), les complémentaires sont des pourpres (tabl. 1).

Longueur d’onde dominante et facteur de pureté

L’expérience montre qu’en superposant (de façon homogène) un faisceau blanc, de flux lumineux F W et un faisceau monochromatique, de longueur d’onde d et de flux F d on peut réaliser un faisceau chromatiquement équivalent (pour l’œil moyen) à un faisceau coloré quelconque (mais non pourpre) de flux F . Il faut, à cet effet, choisir convenablement d, F d et F W, la somme de ces deux flux étant égale à F : F d + F W = F . La lumière blanche de référence doit être bien précisée: c’est, en général, la lumière W définie plus haut.

d est appelée longueur d’onde dominante de la lumière étudiée L; il ne faut pas la confondre avec celle du maximum de la courbe de répartition spectrale, dont elle diffère en général (nous avons vu qu’il peut même arriver, exceptionnellement, que la radiation d n’existe pas du tout dans la lumière L). d indique, avec plus de précision que les vocables bleu, vert, etc., ce qu’on appelle couramment la teinte de la lumière considérée.

Le rapport p = F d/F = 1 漣 F W/F est appelé facteur de pureté . Il est égal à 1 pour une lumière monochromatique (couleur dite pure ou saturée), et diminue à mesure que la couleur est de plus en plus lavée de blanc.

Une lumière pourpre P n’a pas de longueur d’onde dominante, mais on peut déterminer sa longueur d’onde complémentaire c, ainsi que le flux c de cette longueur d’onde qui, superposé à un flux F de P, donne un flux F W de lumière blanche: F + F c = F W. L’expression 1 漣 F W/F est alors négative: aussi préfère-t-on, dans ce cas, définir le facteur de pureté comme le rapport F P/F (compris entre 0 et 1), F P étant le flux d’un faisceau pourpre pur (mélange en proportions convenables de bleu et de rouge pris aux extrémités du spectre), capable, par mélange avec du blanc, d’équilibrer le flux F .

Le plus petit écart appréciable (seuil différentiel) de longueur d’onde dominante, pour une lumière saturée, non pourpre, varie d’un bout à l’autre du spectre, comme l’indique la figure 3; il peut à ce sujet exister des différences appréciables entre divers individus «normaux», mais, pour tous, la teinte varie beaucoup moins vite dans le rouge et dans le violet que dans le jaune ou le bleu-vert.

La figure 4 indique d’autre part, pour les diverses teintes, la plus petite variation perceptible p du facteur de pureté, soit au voisinage du blanc, soit au voisinage de la saturation. En tenant compte des variations perceptibles de la luminance , qui est le quotient du flux par l’«étendue» de faisceau et s’évalue en nits; un nit équivaut à un lumen par stéradian et par mètre carré [cf. PHOTOMÉTRIE], on doit admettre qu’il y a des dizaines de milliers de sensations lumineuses différentes.

Synthèse additive trichrome

Longueur d’onde dominante et facteur de pureté sont des caractéristiques bien explicites d’une couleur, mais leur détermination directe est malheureusement assez incertaine. Aussi la colorimétrie fait-elle souvent appel à la méthode de synthèse trichrome, dont voici le principe.

Trois lumières, dont les couleurs sont dites fondamentales, sont choisies arbitrairement (pourvu qu’aucune d’elles ne soit équilibrable par un mélange des deux autres); en fait, il est avantageux de les choisir respectivement rouge, verte et bleue, et aussi saturées qu’on le peut. On les représente par les lettres R, G (initiale de green , V prêterait à confusion avec le violet) et B. On peut, dans beaucoup de cas, équilibrer un faisceau L de couleur quelconque et de flux F avec un mélange de faisceaux de lumières R, G, B de flux F R, F G, F B, convenablement choisis, ce choix n’étant possible que d’une seule façon. Cet équilibrage se traduit par la relation: F = F R + F G + F B. La figure 5 (pl. coul.) illustre cette possibilité; ses diverses plages sont supposées recevoir soit un seul des faisceaux, soit le mélange de deux d’entre eux, soit le mélange des trois, réglé ici pour donner du blanc.

Dans d’autres cas, on peut équilibrer un mélange convenable de L et d’une des trois fondamentales bien choisie, soit R, avec un mélange convenable des deux autres, ce qu’on écrit: F + F R = F G + F B. Cette équation se ramène à la précédente en convenant de considérer, dans un tel cas, F R comme négatif.

On peut calculer, comme l’indiquent les traités de colorimétrie, trois «composantes colorimétriques» X , Y , Z , fonctions linéaires de F R, F G, F B (Y étant lui-même proportionnel à l’efficacité lumineuse de la lumière à laquelle il se rapporte), puis trois coefficients colorimétriques , x , y , z , de somme 1, proportionnels à X , Y , Z . La connaissance de deux d’entre eux, par exemple x et y , dont on déduit le troisième, renseigne sur la couleur de la lumière L, compte tenu de la luminance.

Il est commode d’utiliser des diagrammes (fig. 6) où chaque couleur correspond à un point ayant pour coordonnées ses coefficients colorimétriques, x et y par exemple. Les points représentatifs des diverses lumières monochromatiques se situent sur une courbe , dite lieu de spectre; toutes les couleurs réelles sont localisées dans la région du diagramme que limitent et la droite II (lieu des pourpres purs) qui joint ses extrémités. D’autres représentations, rapportées à un «triangle des couleurs» équilatéral, et (ou) faisant intervenir d’autres coefficients, ont aussi été utilisées.

Il résulte des lois de Grassmann et des modes d’évaluation de x , y et z que, lorsqu’une lumière, représentée par un point M, équivaut au mélange de deux lumières représentées par M1 et M2, le point M est sur la droite M1M2, entre M1 et M2, sa position étant calculable à partir des valeurs de F R, F G, F B relatives aux deux lumières composantes.

La lumière à spectre d’égale énergie est représentée par le point W de coordonnées x = y = 1/3. Par suite, si une demi-droite WM rencontre (au-delà de M) le lieu du spectre en un point D (fig. 7), celui-ci correspond à la longueur d’onde dominante d de M. Les points N tels que la demi-droite WN ne rencontre pas représentent des pourpres. La demi-droite NW coupe en un point K correspondant à la longueur d’onde complémentaire c de la couleur N.

Les couleurs représentées par M ou N sont d’autant plus lavées de blanc que ces points sont plus voisins de W. On peut démontrer que le facteur de pureté p de la couleur M se déduit de la valeur y qui lui correspond et de la valeur y d qui correspond au point D par la relation:

Pour les pourpres, il faut remplacer y d par l’ordonnée y p correspondant au point où WN coupe 刺.

La figure 7 représente diverses courbes d’égale pureté p , tandis que les courbes de même d ou c sont des droites passant par W. Un tel graphique, tracé à assez grande échelle, permet, par interpolation, de déterminer rapidement les caractéristiques d (ou c) et p d’une couleur, connaissant ses coordonnées x et y (ou inversement). x et y sont eux-mêmes calculables à partir de données spectrophotométriques, de sorte qu’il est possible de déterminer ainsi (indirectement) la longueur d’onde dominante ou complémentaire et la pureté d’une lumière, à partir de sa courbe de répartition spectrale d’énergie. La réciproque n’est pas vraie, ce qu’on pouvait prévoir, puisque des lumières de compositions spectrales diverses peuvent être perçues comme ayant même couleur.

La figure 8 (pl. coul.) indique d’une manière approximative (et sans référence aux efficacités lumineuses) la répartition des couleurs sur un diagramme en xy . Elle ne saurait être très correcte en raison de l’imperfection des reproductions photomécaniques.

2. Variations de la perception des couleurs

Trivariance visuelle

Les valeurs de d et de p , ou de deux coefficients tels que x et y , caractérisent en première approximation une couleur, indépendamment de l’intensité du faisceau qui la transporte. Elles doivent être complétées par une grandeur purement photométrique: flux lumineux F ou mieux, luminance L. Le rôle que joue cette dernière variable, au point de vue de la sensation colorée, apparaît surtout dans le cas des luminances très faibles ou très fortes.

On considère en psychophysiologie, sous les noms de teinte , saturation et luminosité d’une lumière, trois qualités dont chacune dépend principalement de la caractéristique «chromatique» ( d ou p ) ou photométrique (L) correspondante, mais parfois aussi quelque peu des deux autres. Il peut arriver, par exemple, que nous considérions comme des teintes non identiques des lumières résultant du mélange en proportions diverses d’une même lumière monochromatique avec une même lumière blanche, c’est-à-dire ayant même longueur d’onde dominante, mais différant par leur facteur de pureté ou par leur luminance; mais l’étude de ces questions est encore inachevée.

Parmi les hypothèses proposées pour expliquer que la perception colorée dépend de trois variables, et de trois seulement, celle qui paraît la plus acceptable (Young, 1801) suppose dans le système visuel l’intervention de trois types de récepteurs inégalement sensibles aux radiations monochromatiques, et intégrant leurs effets.

Si l’on fait intervenir les composantes chromatiques F R, F G, F B, on constate que la troisième a une influence particulièrement marquée: pour obtenir la couleur W, par exemple, on doit composer des flux lumineux tels que F G = 4,6 F R et F B = 0,06 F R seulement.

Variations des sensations d’un même observateur

Les flèches de la figure 10 (pl. coul.), imprimées d’un même gris, paraissent des couleurs différentes selon leur environnement, de même que les rectangles présentés par la figure 9 (pl. coul.).

Si, d’autre part, on fixe pendant une vingtaine de secondes le point central de la figure 11 a (pl. coul.), puis que l’on reporte l’axe visuel sur le point central de la figure 11 b (pl. coul.), les plages blanches de cette dernière figure paraissent respectivement verdâtre et rougeâtre: c’est un effet de contraste successif.

Sur la mosaïque de la figure 12 (pl. coul.), la lettre R, indiscernable de près pour la plupart des observateurs, devient perceptible à une certaine distance, quand les éléments qui la composent sont vus sous un angle assez petit; cela tient à ce que la région centrale de la rétine n’a pas les mêmes aptitudes colorimétriques que celles qui l’entourent.

Comme l’indiquent ces exemples, qu’il serait facile de multiplier, les conditions d’une «mesure» des couleurs doivent être strictement spécifiées, pour que les résultats soient raisonnablement reproductibles.

Variations avec les observateurs. Daltonisme

On estime à 8 p. 100 chez les hommes et à 0,5 p. 100 seulement chez les femmes la proportion des individus dont la vision colorée n’est pas «normale». Contrairement à ceux qui doivent faire appel, pour un équilibrage quelconque, à trois couleurs fondamentales, et qui sont dits trichromates , les daltoniens, ou dichromates , n’ont besoin que de deux couleurs fondamentales: ils confondent certains verts avec certains rouges et n’auraient, d’après la théorie de Young, que deux des trois types de récepteurs rétiniens.

Il existe même (en très petit nombre) des sujets qui ne perçoivent pas de sensations de couleurs différenciées, mais seulement des sensations plus ou moins lumineuses; on les qualifie de monochromates (on dit aussi achromates).

Les trichromates peuvent être plus ou moins normaux, au point de vue de la colorimétrie. Le dépistage des anomalies, légères ou fortes, se fait à l’aide de colorimètres simplifiés (tel l’anomaloscope de Nagel, à l’aide duquel on détermine en quelles proportions un certain rouge et un certain vert doivent être mélangés pour équilibrer un certain jaune), ou par classement d’échantillons colorés, ou encore par l’examen de tableaux formés de taches de couleurs diverses, convenablement choisies: les observateurs normaux y reconnaissent des lettres ou des chiffres, que n’identifient pas les anormaux, ou inversement (fig. 13, pl. coul.).

Observateur de référence et observateurs réels

On a déterminé, pour un assez grand nombre d’observateurs non anormaux, les valeurs comparatives des trois composantes chromatiques F R, F G, F B de chaque lumière monochromatique d’où les valeurs correspondantes des trois composantes X , Y , Z .

Leurs valeurs moyennes X 漣, Y 漣, Z 漣, appelées coefficients de distribution (sous-entendu du spectre d’égale énergie) pour l’observateur normal moyen conventionnel, définissent ce dernier, pour les besoins de la colorimétrie. Elles ont été choisies telles que Y = 1 pour la lumière monochromatique de longueur d’onde = 555 nm, à laquelle l’œil est le plus sensible.

On peut rattacher aux résultats de l’observateur de référence ceux qui sont obtenus dans un cas quelconque par un observateur réel si l’on connaît les coefficients de distribution de ce dernier. Mais cela demande une étude assez laborieuse.

3. Couleurs des corps

Ce qui a été dit de la couleur des diverses lumières s’applique à celle des sources qui les émettent. Considérons maintenant les corps non lumineux par eux-mêmes, en excluant les cas de luminescence.

Corps blancs, gris, noirs, colorés

Un corps transparent est dit incolore quand il transmet également toutes les radiations visibles. Un corps diffusant est dit parfaitement blanc lorsqu’il diffuse également dans toutes les directions et sans absorption toutes les radiations visibles qu’il reçoit. L’adjectif blanc a donc un sens bien différent selon qu’il s’applique à une lumière ou à une matière. Un corps est parfaitement noir lorsqu’il absorbe intégralement toutes les radiations. Quand un «corps noir» est assez chaud, il est la source d’un rayonnement visible.

Les corps parfaitement gris ou neutres sont ceux qui diffusent ou qui transmettent également, mais partiellement, les diverses radiations visibles. Certains corps peuvent toutefois, sans satisfaire exactement à la définition ci-dessus, donner, sous un éclairage déterminé, une impression de gris apparent.

Si la lumière qui traverse un corps, par exemple une lame non diffusante à faces parallèles, est inégalement absorbée selon les longueurs d’onde, elle a, à l’émergence, une couleur différente de celle qu’elle avait à l’incidence. Il en est de même pour celle diffusée soit par réflexion, soit par transmission par les corps colorés. Dans le cas de la figure 14 (pl. coul.), la lame 2 contient des pigments rouges (représentés schématiquement et très grossis), qui ne diffusent que la composante rouge de la lumière incidente, le reste étant absorbé. Il peut s’ajouter toutefois à la lumière diffusée par réflexion une fraction (généralement faible) de la lumière incidente, réfléchie régulièrement d’une façon peu sélective.

Exceptionnellement, la réflexion régulière peut être, elle aussi, accompagnée d’une absorption sélective (couleur jaune de l’or, éclairé en lumière blanche, couleur bleue de l’argent, rendue mieux visible par plusieurs réflexions successives).

Soit un corps qui réfléchit, transmet ou diffuse la lumière, et présente une luminance L ; soit L 0 la luminance d’un corps éclairé de la même façon, et qui réfléchirait, transmettrait ou diffuserait parfaitement la lumière. Le rapport = L/L 0 est appelé facteur de luminance du corps dans les conditions considérées. (Il se confond, dans certains cas, avec son facteur de réflexion 福 ou son facteur de transmission 精.) S’il s’agit de lumière monochromatique, de longueur d’onde , varie en fonction de suivant une loi représentable dans chaque cas pour une courbe telle que celles de la figure 15.

Cette répartition spectrale, combinée avec celle de la lumière incidente, détermine celle de la lumière transmise, et par suite sa couleur. La figure 16 (pl. coul.) représente les aspects d’un même ensemble d’objets, éclairés par diverses lumières.

Détermination de la couleur d’un corps

Pour caractériser numériquement la couleur d’un corps, la lumière éclairante étant bien définie (blanche en général: on convient souvent que ce doit être la lumière de l’étalon C), on peut utiliser la longueur d’onde dominante d (ou, pour les pourpres, la longueur d’onde complémentaire c) et le facteur de pureté p de la lumière transmise, ou encore ses coefficients colorimétriques x et y , par exemple.

La luminance du corps étudié variant proportionnellement à l’éclairement qu’il reçoit, c’est son facteur de luminance (ou de réflexion, ou de transmission), pour la lumière reçue et dans les conditions d’observation considérées, qui constitue sa troisième caractéristique chromatique. Des exemples, relatifs aux pigments auxquels se rapportent les courbes de la figure 15, sont donnés dans le tableau 2.

Selon les recommandations de l’Association française de normalisation, la couleur d’un corps est décrite par sa teinte (violet, rouge ou pourpre), suivie de l’adjectif clair ou foncé selon que le facteur de luminance est plus ou moins élevé, et de l’indication saturé ou lavé de blanc selon que le facteur de pureté est voisin de un ou de zéro. D’une façon plus concise, la couleur sera dite vive si elle est à la fois claire et saturée, pâle si elle est claire et lavée (voisine du blanc), profonde si elle est foncée et saturée, rabattue si elle est foncée et lavée (voisine du noir).

On remarquera qu’il existe, pour les corps colorés, certaines qualifications qui n’existent pas pour les lumières colorées: on appelle, par exemple, marron un rouge très rabattu, rose ou lilas un pourpre pâle, etc.

Les changements d’aspect coloré d’un corps selon la lumière qui l’éclaire (même si celle-ci est dite blanche) sont parfois fâcheux; on tend actuellement à assurer un rendu des couleurs qui satisfasse aux usages normaux, en spécifiant, pour les lumières choisies, des valeurs maximales et minimales des pourcentages d’énergie dans les diverses régions du spectre visible.

Influence de la concentration et de la structure physique

Lorsqu’on superpose plusieurs lames transparentes colorées identiques, la couleur de l’ensemble est plus rabattue et la pureté plus grande que pour une seule lame; la teinte elle-même peut être modifiée, les proportions relatives des divers constituants monochromatiques n’étant plus les mêmes. Si, par exemple, la courbe de transmission du spectre d’une lame pourpre est celle qu’indique en (a) la figure 17, la courbe (b) relative à quatre lames identiques superposées s’obtient en prenant pour ordonnées les quatrièmes puissances des ordonnées de (a), ce qui, dans le cas supposé, déplace vers le rouge la longueur d’onde dominante. On s’explique de la même façon les changements de couleur d’une solution plus ou moins concentrée, ceux des tissus teints à l’aide de telles solutions, etc.

Dans l’observation par réflexion diffuse, nous avons indiqué qu’une partie de la lumière reçue par l’œil pouvait avoir été réfléchie à la surface des particules colorées, et n’avoir pas subi l’absorption résultant de la traversée de ces particules. Cette fraction augmente avec le nombre des surfaces réfléchissantes rencontrées: ainsi, lorsqu’on réduit en poudre un cristal de sulfate de cuivre, sa couleur, qui était d’un bleu relativement saturé, devient beaucoup plus lavée de blanc. Si l’on mouille cette poudre avec un liquide (tel que l’acétone, où elle ne se dissout pas), ce qui a pour effet de diminuer beaucoup la lumière réfléchie, la couleur redevient saturée. L’effet du vernissage des tableaux, la différence d’aspect de tissus de satin ou de velours ayant fixé un même colorant, sous des concentrations voisines, s’expliquent de façon analogue.

Ces derniers exemples rappellent en outre que les coefficients chromatiques peuvent dépendre (parfois beaucoup) des directions d’éclairage et d’observation, ce dont il faut tenir compte.

Mélanges de lumières colorées

Quand une lumière est transmise par un ensemble de deux filtres superposés, le facteur de transmission résultant est, pour chaque longueur d’onde, le produit de ceux des deux filtres. Un effet analogue se produit lorsqu’on mélange deux solutions colorées (ne réagissant pas chimiquement l’une sur l’autre) ou même deux poudres ou pigments colorés. On dit parfois qu’un tel mélange est soustractif , par opposition aux mélanges additifs de lumières colorées considérés plus haut.

Il se trouve, par exemple, qu’éclairés en lumière blanche, la plupart des pigments jaunes renvoient vers l’œil à la fois du jaune et du vert (en absorbant le bleu), et que les pigments bleus renvoient à la fois du bleu et du vert (en absorbant le jaune), d’où la coloration verte des mélanges de ces pigments (alors qu’un mélange convenable de lumières complémentaires jaune et bleue serait blanc). Si chacun des corps superposés ou mélangés absorbe les radiations que peuvent transmettre les autres, le résultat est noir : c’est ce qui apparaît sur la figure 18 (pl. coul.).

Lorsque deux pigments paraissent avoir des couleurs voisines, bien que n’ayant pas mêmes courbes de transmission spectrale, leurs mélanges respectifs avec un troisième pigment peuvent avoir des couleurs notablement différentes.

4. Applications des études sur les couleurs

Reproduction des couleurs

«Apparier» des couleurs (en teinturerie, par exemple) est relativement aisé si l’on doit appliquer, sur des supports analogues, les mêmes matières colorantes, en en réglant la concentration ou les proportions. Mais lorsque la répartition spectrale des facteurs de luminance des colorants n’est pas la même, un résultat satisfaisant à la lumière du jour peut cesser de l’être sous un éclairage artificiel, même «blanc». Éviter cet effet, appelé métamérie , pose un problème qu’il ne faut pas confondre avec celui du «rendu des couleurs» déjà évoqué.

Il est, d’autre part, souvent impossible, faute de matériaux convenables, de reproduire sur un tableau ou une photographie toute l’étendue des luminances et des saturations apparaissant dans un paysage ou même dans un intérieur. On est alors conduit à accepter une représentation conventionnelle, où le rapport des luminances extrêmes est bien inférieur à celui que présentent les objets à reproduire, et où certains changements de teinte suggèrent (psychologiquement) soit de vives lumières par un renforcement des jaunes et des rouges (tons «chauds»), soit de faibles éclairements par l’intervention de tons «froids» (bleutés, verdâtres).

La reproduction fait appel, dans le cas de la peinture à l’huile , au minimum à trois matières colorantes, dites «primaires», bleue, jaune et rouge, dont le mélange peut fournir des verts, des orangés, des pourpres (plus rabattus que ceux de pigments naturels de même teinte), et auxquels il faut ajouter un blanc, impossible à obtenir par mélange soustractif. La technique du pointillisme (juxtaposition de petites taches colorées) donne des couleurs plus claires.

Les reproductions graphiques peuvent comporter l’emploi de trois filtres de sélection (correspondant aux régions extrêmes et centrale du spectre) et de trois encres colorées. Les filtres placés devant l’objectif de prises de vue permettent d’obtenir, sur une émulsion en noir et blanc, trois négatifs dont les noirs correspondent respectivement aux lumières bleu-violet, vertes et rouges provenant du sujet. Les encres sont l’une jaune (transmettant au mieux le vert et le rouge et absorbant le bleu), la deuxième pourpre (les professionnels disent magenta ) absorbant le vert, la troisième bleu-vert (cyan ) absorbant le rouge. Elles sont imprimées sur un même support, respectivement à partir des trois négatifs: une image rouge, par exemple, est obtenue par la superposition des encrages jaunes et pourpres que permettent les parties claires des deux premiers clichés.

La photographie, le cinéma, la télévision en couleurs, la signalisation, les industries alimentaires ou autres, les recherches chimiques ou biologiques et bien d’autres activités ont à faire appel à des techniques diverses de reproduction des couleurs, et à des méthodes colorimétriques sur lesquelles nous donnerons encore quelques indications.

Méthodes de mesure diverses

La méthode théoriquement la plus satisfaisante pour étudier une lumière colorée consiste à mesurer en fonction de la longueur d’onde, dans le spectre visible, son flux d’énergie monochromatique P size=1 . Cette mesure se faisant le plus souvent en valeurs relatives, on détermine d’autre part directement la caractéristique photométrique globale: flux lumineux F ou luminance L .

Les composantes X , Y , Z se calculent à l’aide des coefficients de distribution X size=1 , Y size=1 , Z size=1 , par l’intégrale (étendue à tout le spectre visible V):

et par deux autres intégrales analogues, ce qui permet de calculer x , y , z .

Si les données P size=1 se rapportent à une lumière qui éclaire un corps de facteur de luminance 1 pour la longueur d’onde , les caractéristiques x , y et z de ce dernier se déduisent de relations telles que:

Les mesures de flux monochromatiques sont malheureusement laborieuses (sauf si l’on a recours à des récepteurs physiques et à des intégrateurs automatiques). La précision des résultats finals est (surtout dans ce dernier cas) généralement inférieure à celle qui est obtenue à partir des déterminations plus simples de F R, F G, F B par un observateur suffisamment «normal». Les appareils servant à toutes ces mesures sont décrits dans les traités de colorimétrie.

Une fois connus x et y , on peut évaluer, en se servant d’un diagramme colorimétrique (cf. supra ), la longueur d’onde dominante ou complémentaire et le facteur de pureté.

Les méthodes précédentes permettent d’étalonner des collections d’échantillons assez nombreux pour que, sous une lumière bien spécifiée, l’un d’entre eux se rapproche suffisamment de la couleur à repérer (ou, tout au moins, pour que deux d’entre eux «encadrent» de près cette couleur). Si ces étalons sont de même nature que les objets à examiner, on peut éliminer l’influence de la structure du support ou de son orientation. Malheureusement, les colorants qui présentent de suffisantes garanties de stabilité pendant un temps raisonnable ne sont pas très nombreux, et la réalisation matérielle d’étalons de couleurs à la fois très claires et très saturées est, pour certaines teintes, impossible.

Beaucoup d’atlas de couleurs utilisent une classification arbitraire. Celle des tableaux de Munsell très employée aux États-Unis est basée, dans la mesure du possible, sur la teinte, la saturation et la clarté (fig. 19, pl. coul.).

Signalons enfin que certains colorimètres utilisent une méthode soustractive en faisant intervenir des lames colorées superposables, permettant de nombreuses combinaisons.

Tolérances

La méthode de comparaison visuelle directe est en général la plus sensible, lorsque la répartition spectrale des lumières considérées ou celle des facteurs de luminance des corps étudiés sont voisines (les cas de métamérie étant ainsi exclus).

Les coefficients chromatiques, qui ont le grand intérêt de permettre des spécifications numériques et des classifications systématiques, ne peuvent malheureusement, dans bien des cas, jusqu’à présent, être déterminés avec toute la précision souhaitable. Quelques indications, en ce qui concerne celle-ci, résultent des données que traduisent les figures 4 et 5. Pour les couleurs de facteur de pureté intermédiaire entre 0 et 1, des résultats rapportés aux variations des coefficients x et y ont été obtenus par McAdam. Ils peuvent se traduire comme l’indique la figure 20, sur laquelle les diverses ellipses sont les lieux de points représentant des couleurs «également écartées» de celle représentée par le centre de l’ellipse. (À partir du tiers de l’écart adopté ici pour la clarté du dessin, la perception des différences est presque certaine.) Ces résultats ne sont qu’indicatifs, et des études complémentaires restent nécessaires.

Colorimétrie et coloristique

On appelle parfois «coloristique» une science des couleurs qui engloberait tous leurs aspects physiques, physiologiques et psychologiques. Il faut reconnaître que la colorimétrie, dont nous avons indiqué les principes, est, pour une grande part, conventionnelle, et que bien des problèmes doivent encore être approfondis, concernant notamment les limites de validité des règles qui permettent de considérer les couleurs comme des grandeurs mesurables, la caractérisation de l’observateur, dit normal, moyen et les corrections à apporter aux résultats qu’obtient un observateur donné... Telle qu’elle est, et bien que susceptible d’améliorations sans doute importantes, la colorimétrie rend déjà, tant pour les réalisations pratiques que pour des recherches très diverses (rapports entre structure chimique et couleur, théories de la vision colorée, appréciation des effets des couleurs sur le comportement psychique, etc.) des services considérables.

couleur [ kulɶr ] n. f.
color 1050; lat. color
I
1 Caractère d'une lumière, de la surface d'un objet (indépendamment de sa forme), selon l'impression visuelle particulière qu'elles produisent (une couleur, les couleurs); propriété que l'on attribue à la lumière, aux objets, de produire une telle impression (la couleur). La couleur, les couleurs d'un objet. coloris, nuance, teinte, 2. ton; -chrome, chromo-. Couleur claire; foncée, sombre; franche, vive; criarde, crue, voyante. Couleur tendre, pâle, délavée, passée, fanée. Couleur tirant sur le bleu. Couleur changeante (moirure, reflet). D'une seule couleur. monochrome, uni, unicolore; camaïeu, grisaille. De deux, de trois couleurs. bicolore , tricolore. De plusieurs couleurs. multicolore, polychrome; bariolé, bigarré, chamarré, chiné, diapré, jaspé, moucheté, panaché. La couleur d'une pierre précieuse, des cheveux, des poils, des plumes, des yeux. « Les parfums, les couleurs et les sons se répondent » (Baudelaire). D'une couleur de chair. Adj. inv. Des rubans couleur chair, couleur paille.
Physiol. Sensation traduisant l'impression reçue par l'œil humain lorsqu'il reçoit de l'énergie électromagnétique dont les longueurs d'onde sont comprises entre 400 et 800 nanomètres (lumière visible). Couleur d'un rayonnement. chromatisme. La lumière blanche (solaire) est décomposée par le prisme en couleurs spectrales (violet, indigo, bleu, vert, jaune, orangé, rouge). Les couleurs de l'arc-en-ciel. Couleurs fondamentales, primaires : jaune, rouge et bleu. Couleurs complémentaires.
Loc. Juger d'une chose comme un aveugle des couleurs. Des goûts et des couleurs.
Aspect d'une surface (quant à la couleur). La couleur d'un vêtement. Une voiture de couleur rouge. Loc. Des yeux couleur du temps, de couleur changeante, allant du gris au bleu. Un manteau couleur de muraille.
Phys. Propriété caractérisant les quarks.
2Vêtements de couleur déterminée. Spécialt Porter les couleurs d'une dame, inclure dans son costume les couleurs qu'elle affectionne. — Courses Les jockeys portent les couleurs d'une écurie. Sport Les couleurs d'un club.
Couleurs du blason. émail; azur, gueules, pourpre, 2. sable, sinople; hermine, vair; contre-hermine, contre-vair.
3(1376) Les zones colorées d'un drapeau. Les couleurs nationales de l'Italie. Les couleurs françaises, les trois couleurs : bleu, blanc, rouge ( tricolore) . Bateau arborant les couleurs de son pays. Milit. Les couleurs. drapeau, pavillon. Envoyer, hisser; amener les couleurs.
4(1694) Chacune des quatre marques, aux cartes. carreau, cœur, 1. pique, trèfle. Avoir des quatre couleurs dans son jeu. Spécialt atout. Jouer dans la couleur. Loc. Annoncer la couleur : proposer aux autres joueurs une couleur qui servira d'atout. Fig. Dévoiler ses intentions.
5Teinte naturelle (de la peau humaine). Les couleurs : carnation rose de la figure (dans la race blanche). Avoir de belles couleurs. Perdre ses couleurs. Reprendre des couleurs. Être HAUT EN COULEUR : avoir un teint très coloré; fig. être pittoresque, truculent. — Changer de couleur, par émotion, colère. Passer par toutes les couleurs. pâlir, rougir. (1779 gens de couleur) Homme, femme DE COULEUR, qui n'appartient pas à la race blanche (se dit surtout des Noirs).
6Teinte, coloris employés dans un tableau. Le fondu des couleurs. Couleurs contrastées, opposées; dégradées. Gamme, harmonie, symphonie de couleurs. palette. Les arts de la couleur. peinture; émail, fresque, 1. mosaïque, tapisserie.
(1669) COULEUR LOCALE : couleur propre à chaque objet, indépendamment de la couleur générale du tableau, de la distribution des lumières et des ombres. — Fig. Ensemble des traits extérieurs caractérisant les personnes et les choses dans un lieu, dans un temps donné. Un paysage, une scène qui font très couleur locale. pittoresque.
II(XIIe) Toute couleur autre que blanc, noir ou gris; spécialt Couleur vive. Aimer la couleur, les couleurs. Sans couleur. incolore. Vêtements noirs ou de couleur. Par ext. Laver le blanc et la couleur.
♢ EN COULEUR (opposé à en noir et blanc) . Photo, carte postale, film en couleur. Télévision en couleur. Mettre en couleur un film noir et blanc. coloriser. Appos. inv. Des téléviseurs couleur.
IIISubstance que l'on applique sur un objet pour produire la sensation de couleur. colorant, pigment; peinture, teinture; aquarelle, badigeon, enduit, fard, gouache, lavis, 2. pastel. Couleurs végétales, animales. Couleurs délayées, à l'huile, à l'eau, à la colle. Région. (Paris) Marchand de couleurs. droguiste. Peint. Broyer, préparer les couleurs. Couleurs en tube. Tube de couleur. Crayon de couleur. Boîte de couleurs. Appliquer, étaler la couleur. colorer, peindre.
Spécialt (t. de coiffure) Faire la couleur : appliquer une teinture ( coloration) sur les cheveux. Se faire faire une couleur, sa couleur.
IVFig.
1Aspect produisant une impression comparable à celle que la couleur donne aux yeux. Exposer qqch. sous des couleurs trompeuses, flatteuses. La couleur d'un style. 2. brillant, éclat, force, véracité, vivacité. Style sans couleur, terne. Description pleine de couleur. « les détails qu'elle donnait avaient de la couleur » (Martin du Gard).
2Apparence, aspect particulier (selon les circonstances). Brusquement, le récit prend une couleur tragique. La couleur du temps : la nature des circonstances.
3(1820) Caractère propre à une opinion. teinte. Ce journal est d'une couleur politique indécise.
4Vx Apparence, raison fallacieuse que l'on donne à une chose, à une action pour la déguiser. motif, 2. prétexte, raison. Loc. prép. SOUS COULEUR DE : avec l'apparence de, sous prétexte de. Attaquer sous couleur de se défendre.
5Fam. La couleur de qqch., son apparence. Son argent, je n'en ai jamais vu la couleur, je n'en ai rien vu. On n'en connaîtra jamais la couleur : la chose ne se fera pas.
En voir de toutes les couleurs : subir toutes sortes de choses désagréables. « il en avait trop vu et de toutes les couleurs » (Simenon). Il lui en a fait voir de toutes les couleurs.

couleur nom féminin (latin color, -oris) Sensation résultant de l'impression produite sur l'œil par une lumière émise par une source et reçue directement (couleur d'une source : flammes, etc.) ou après avoir interagi avec un corps non lumineux (couleur d'un corps). Dans le langage courant, ce qui s'oppose au noir, au gris et au blanc : Le linge blanc et le linge de couleur. Substance, matière colorante : Boîte de couleurs. Ton ou teinte utilisés par un peintre dans un tableau ; effet obtenu par leur combinaison dans un tableau, coloris : La couleur romantique d'un tableau de Delacroix. Éclat, brillant du style, de l'expression, d'une situation, d'un événement. Aspect que prennent les choses dans des circonstances données, parfois trompeuses : La situation apparaît sous de nouvelles couleurs. Teint, coloration du visage : D'un seul coup, il a changé de couleur. Vieux. Caractère propre de l'opinion d'un parti politique, de quelqu'un : Quelle est la couleur de ses idées ? En apposition suivi d'un nom avec ou sans article, indique la couleur, la teinte de quelque chose : Ruban couleur rose. Héraldique Terme désignant certains émaux : azur (bleu), gueules (rouge), sable (noir), sinople (vert), pourpre (rouge violacé). Jeux Chacun des quatre attributs (trèfle, carreau, cœur, pique) qui distinguent les cartes. Physique Appellation imagée d'une charge physique portée par les hadrons et qui régit les interactions fortes. (Selon la « chromodynamique quantique », l'interaction entre quarks se fait par échange de gluons, quanta du « champ de couleur ».) ● couleur (citations) nom féminin (latin color, -oris) Charles Baudelaire Paris 1821-Paris 1867 Les parfums, les couleurs et les sons se répondent. Les Fleurs du Mal, Correspondances Édouard Herriot Troyes 1872-Saint-Genis-Laval, Rhône, 1957 Académie française, 1946 Il y a, pour les écrivains français, une qualité plus belle que la couleur : la lumière. Créer Payot Alphonse de Prât de Lamartine Mâcon 1790-Paris 1869 Entre la race blanche et la famille noire, Il fallait un combat, puisqu'il faut la victoire ! Toussaint Louverture Alphonse de Prât de Lamartine Mâcon 1790-Paris 1869 Je suis de la couleur de ceux qu'on persécute ! Toussaint Louverture Pablo Ruiz Picasso Málaga 1881-Mougins 1973 En réalité on travaille avec peu de couleurs. Ce qui donne l'illusion de leur nombre, c'est d'avoir été mises à leur juste place. Conversations avec Christian Zervos, 1935 in Cahiers d'art Pablo Ruiz Picasso Málaga 1881-Mougins 1973 Quand je n'ai pas de bleu, je mets du rouge. Cité par Paul Éluard dans Donner à voir, Je parle de ce qui est bien Gallimard Nicolas Poussin Villers, près des Andelys, 1594-Rome 1665 Les couleurs dans la peinture sont comme des leurres qui persuadent les yeux, comme la beauté des vers dans la poésie. Observations sur la peinture Isaac Félix, dit André Suarès Marseille 1868-Saint-Maur-des-Fossés 1948 Le dégoût sans borne de la couleur pour la ligne droite est un mystère. Le Voyage du condottiere Émile-Paul Paul Verlaine Metz 1844-Paris 1896 Pas la Couleur, rien que la nuance. Jadis et naguère, Art poétique Messein Anonyme Des goûts et des couleurs il ne faut pas discuter. De gustibus et coloribus non disputandum. Commentaire Proverbe des scolastiques du Moyen Âge. Francis Bacon, baron Verulam Londres 1561-Londres 1626 Dans le noir toutes les couleurs s'accordent. All colours will agree in the dark. Essays, 3couleur (difficultés) nom féminin (latin color, -oris) Orthographe 1. En couleurs. Toujours au pluriel sauf dans la locution haut en couleur : un film en couleurs, des photographies en couleurs, des illustrations en couleurs, un récit haut en couleur. 2. De couleur. Toujours au singulier : un homme de couleur, des vêtements de couleur, des taches de couleur. 3. En emploi épithète. Couleur (= qui restitue la couleur) est toujours invariable : des téléviseurs couleur. Couleur (= qui est de la couleur de) est toujours invariable : des tailleurs couleur fraise écrasée. ● couleur (expressions) nom féminin (latin color, -oris) Annoncer la couleur, dévoiler ses intentions. Avoir des couleurs, avoir le teint rose, vif, sous l'effet d'une bonne santé ou après un effort. Couleur locale, aspect typique, caractéristique du lieu dont il s'agit ; pittoresque. Couleur du temps, bleu ciel. La couleur du temps, la situation actuelle. En couleur(s), qui présente des couleurs variées, par opposition à noir et blanc. En dire de toutes les couleurs sur quelqu'un, faire à son sujet toutes sortes de commérages peu flatteurs. En (faire) voir de toutes les couleurs, (faire) subir toutes sortes d'affronts, de désagréments. Haut en couleur(s), qui a le visage très coloré, très rouge ; coloré, savoureux par sa verdeur, truculent, en parlant d'un style. Homme, femme, gens de couleur, Noirs, mulâtres et, plus généralement, tous ceux qui n'ont pas la peau blanche. Marchand de couleurs, droguiste. Familier. Ne pas voir la couleur de quelque chose, en être totalement frustré alors qu'on comptait dessus, que cette chose était promise ou due. Passer par toutes les couleurs, rougir, pâlir sous l'effet de l'émotion. Perdre ses couleurs, devenir pâle sous l'effet d'une mauvaise santé, de la fatigue, etc. Prendre des couleurs, bronzer, devenir hâlé ; avoir bonne mine. Sous couleur de, sous prétexte de, en masquant ses intentions réelles sous l'apparence de quelque chose. Familier. Voir la couleur de quelque chose, en constater de soi-même l'existence. Faire prendre couleur, laisser une substance alimentaire se colorer sur le feu dans un corps gras. Jouer la couleur, à la roulette, parier sur rouge ou noir. Canon des couleurs, chez les catholiques, ensemble des usages ou des règles pour l'emploi des couleurs des vêtements liturgiques. ● couleur (synonymes) nom féminin (latin color, -oris) Sensation résultant de l'impression produite sur l'œil par une lumière...
Synonymes :
- ton
Contraires :
Substance, matière colorante
Synonymes :
Éclat, brillant du style, de l'expression, d'une situation, d'un événement.
Synonymes :
- caractère
Contraires :
- banalité
Aspect que prennent les choses dans des circonstances données, parfois...
Synonymes :
- côté
Teint, coloration du visage
Synonymes :
Contraires :
- pâleur
Caractère propre de l'opinion d'un parti politique, de quelqu'un
Synonymes :
- étiquette
couleur, couleuse nom (de couler) Ouvrier, ouvrière qui effectue un coulage ou une coulée. Fabricant de bougies.

couleur
n. f.
rI./r
d1./d Impression produite sur l'oeil par les diverses radiations constitutives de la lumière; qualité particulière de ces radiations. Les couleurs du prisme. Couleurs simples, couleurs composées. Robe de couleur claire, vive, passée.
|| (En appos.) Ruban couleur chair, couleur acajou.
d2./d Toute couleur qui n'est ni noire, ni grise, ni blanche. Une carte postale en couleurs.
|| Tissu, vêtement de couleur. Laver le blanc et les couleurs séparément.
d3./d (Plur.) Habit, signe distinctif (d'un groupe). Porter les couleurs d'un club sportif.
|| Les couleurs: le pavillon national. Envoyer, hisser les couleurs.
d4./d Chacune des quatre marques (trèfle, carreau, coeur, pique) dans un jeu de cartes.
|| Annoncer la couleur, la couleur de l'atout; fig. expliquer clairement ses intentions.
d5./d Teint, carnation du visage.
|| Changer de couleur: avoir le visage altéré par une émotion.
|| Homme de couleur, qui n'est pas de race blanche, spécial. homme à la peau noire ou très brune.
d6./d Coloris (d'un tableau). Des couleurs trop contrastées.
rII./r Substance colorante. Broyer, mélanger des couleurs.
rIII/r
d1./d Fig. Couleur locale: ensemble des caractéristiques extérieures des personnes et des choses en un lieu et à une époque donnés.
d2./d Opinion professée (partic. politique). La couleur d'un journal.
d3./d Apparence, aspect sous lequel se présente une situation. Voir l'avenir sous de sombres couleurs. La couleur du temps.
Loc. Haut en couleur: d'une originalité accentuée.
|| Loc. Prép. Sous couleur de: sous prétexte de. Calomnier sous couleur de défendre.
d4./d Loc. prov. Des goûts et des couleurs, il ne faut disputer: chacun peut avoir son opinion.
|| Fam. En faire voir de toutes les couleurs à qqn, l'ennuyer de mille façons.
rIV./r PHYS NUCL Nombre quantique jouant, pour l'interaction forte qui lie les quarks, le même rôle que la charge électrique pour l'interaction électromagnétique. (Le nombre peut prendre trois valeurs, nommées rouge, bleu et vert. Les "antiquarks" sont caractérisés par des "anticouleurs".)
Encycl. Phys. - Un corps apparaît coloré parce qu'il ne diffuse et ne réfléchit qu'une partie de la lumière blanche qu'il reçoit, ou parce qu'il émet lui-même de la lumière s'il est porté à une température suffisante. On peut décomposer une lumière blanche à l'aide d'un prisme; les couleurs fondamentales sont le rouge, l'orangé, le jaune, le vert, le bleu, l'indigo et le violet. Deux couleurs dont la superposition donne la teinte blanche sont dites complémentaires (par ex. le violet est la couleur complémentaire du jaune). Toute couleur peut être créée à partir des trois couleurs primaires (le rouge, le jaune et le bleu) ou de leurs couleurs complémentaires. Ce principe est utilisé dans l'imprimerie, la photographie, le cinéma et la télévision.

⇒COULEUR, subst. fém.
I.— Qualité de la lumière que renvoie un objet et qui permet à l'œil de le distinguer des autres objets, indépendamment de sa nature et de sa forme :
1. « Personne ne peut être sûr de voir les couleurs comme les voit son prochain ». [Rosenstiehl, Traité de la couleur, in-8°, 1913]
Ch. COFFIGNIER, Couleurs et peintures, 1924, p. 17.
A.— [P. réf. à l'ensemble des couleurs, y compris le blanc, le noir, le gris, dites couleurs achromatiques]
1. Usuel. Couleur blanche, noire; couleur lumineuse; couleur (de) chair; les (sept) couleurs de l'arc en ciel et abs. les sept couleurs. Le ciel, en essuyant ses pleurs, Déroule avec Iris l'écharpe aux sept couleurs (BANVILLE, Cariat., 1842, p. 19).
Spéc., MÉD. [En parlant d'un être humain] Les pâles couleurs. Synon. chlorose. Elle mourut à quatorze ans des pâles couleurs (BALZAC, Paysans, 1844, p. 248). P. métaph. L'âne, aux hommes : Votre philosophie est une vieille prude, Votre bigoterie a les pâles couleurs (HUGO, Âne, 1880, p. 324).
Syntagmes
a) Couleur + nom spécifiant la nuance (après un subst. le mot prend une valeur adj. inv.).
Couleur + nom désignant une couleur. Couleur bleu de roi; couleur (d')argent, (d')or; couleur (de) pourpre; la couleur noisette de ses yeux.
Couleur + nom d'obj. dont la couleur est prise comme variété de couleur. Couleur d'encre, de neige; couleur de rose; des gants couleur beurre frais, un manteau couleur de muraille. Dans les circonstances actuelles qui ne sont pas couleur de rose (BARB. D'AUREV., Memor. 1, 1838, p. 182) :
2. J'ai vu sept femmes très belles, vêtues de robes d'or et d'argent et de manteaux couleur du soleil, couleur de la lune et couleur du temps, ...
A. FRANCE, Le Petit Pierre, 1918, p. 111.
Couleur + nom abstr. Couleur de crépuscule, couleur de nuit.
Couleur du temps. Bleu ciel. L'eau roule à ses pieds, couleur du temps, livide (BERNANOS, M. Ouine, 1943, p. 1470). C'est la blonde insouciance, Aux yeux bleus, couleur du temps (BOUILHET, Dern. chans., 1869, p. 165).
Rem. Couleur est masc. dans ces loc. elliptiques, le couleur de feu, le couleur de rose, de chair, de citron, etc... Ce ruban est d'un beau couleur de feu (Ac. 1835, 1878).
b) Couleur + adj. Couleur bleue; couleur cuivrée, dorée; couleur chatoyante, criarde, dégradée, éclatante, éteinte, fanée, sombre, unie, etc.
Couleur chaude, froide :
3. ... le rouge, lié à l'apparence du feu, du métal en fusion, est couleur chaude; le bleu est couleur froide, celle de l'eau, de la glace.
HUYGHE, Dialogue avec le visible, 1955, p. 43.
Couleur pure (saturée, cf. BERGSON, Essai donn. imm., 1889, p. 52), couleur lavée (rompue); couleur claire, foncée; couleur vive (pure et claire), couleur pâle (claire et lavée); couleur profonde (pure et foncée); couleur rabattue (foncée et lavée).
c) Subst. + couleur. Association, combinaison, contraste de couleurs; la gamme, la palette des couleurs; harmonie, intensité de couleurs; orgie, symphonie de couleurs; effet de couleurs :
4. ... les diverses intensités d'une couleur correspondent à autant de nuances différentes comprises entre cette couleur et le noir, les degrés de saturation sont comme des nuances intermédiaires entre cette même couleur et le blanc pur.
BERGSON, Essai sur les données immédiates de la conscience, 1889, p. 52.
d) Verbe + couleur(s). Altérer, assortir, combiner les couleurs; être de la couleur de.
Changer de couleur; être, devenir de toutes les couleurs.
[En parlant d'un être humain] Pâlir, rougir sous l'effet d'une émotion. Il suffisait d'un mot pour la faire changer de couleur; c'était une sensitive (SARTRE, Huis clos, 1944, 5, p. 142).
P. métaph. ou au fig. :
5. ... les samedis pour moi ont changé de couleur depuis que je sais que je ne te trouverai pas le soir en venant dîner.
RIVIÈRE, Correspondance [avec Alain-Fournier], 1909, p. 139.
Spéc., COIFFURE. Faire une couleur. Faire une coloration.
Loc. proverbiales, fig.
Des goûts et des couleurs on ne peut disputer. On ne peut discuter de ce qui est purement subjectif.
Parler de quelque chose comme un aveugle des couleurs. Parler de ce que l'on ne connaît pas. Il est vain de condamner le mal que l'on n'a pas fait. C'est en parler comme l'aveugle des couleurs (VALÉRY, Suite, 1934, p. 76).
(Ne pas) connaître, (ne pas) voir la couleur de quelque chose. (Ne pas) connaître, voir cette chose. Je n'ai pas encore vu la couleur de votre argent (AUDIBERTI, Femmes Bœuf, 1948, p. 125).
En (faire) voir (à qqn) de toutes les couleurs. (Lui faire) subir des épreuves, des tracasseries. Le vieux roublard, qui en a vu de toutes les couleurs et qui est revenu de tout (CENDRARS, Bourlinguer, 1948, p. 13).
En dire de toutes les couleurs. Faire toutes sortes d'avances ou de propositions, parfois grossières. À l'heure où les ouvrières rentrent... bien des jeunes gens vont les voir passer, et leur en content de toutes les couleurs (MÉRIMÉE, Carmen, 1847, p. 30).
2. PHYS. Phénomène visible conditionné par la longueur d'onde de la lumière émise, réfléchie, transmise ou diffusée par un objet. Théorie des couleurs, vision des couleurs :
6. La couleur existe parce que notre œil est constitué de telle sorte qu'il transmet au cerveau, sous forme de couleur, les diverses façons dont les corps absorbent et décomposent, suivant leur constitution chimique, les rayons lumineux qui les frappent.
MAUPASSANT, Contes et nouvelles, t. 2, Lettre d'un fou, 1885, p. 1005.
Syntagmes
a) Couleur + subst. Couleur de polarisation (cf. LAPPARENT, Minér., 1899, p. 497).
Couleurs du prisme, du spectre. Couleurs principales que l'on obtient par décomposition de la lumière blanche à travers un prisme. On a comparé quelquefois l'échelle des couleurs du spectre solaire à la gamme des tons musicaux (COURNOT, Fondem. connaiss., 1851, p. 155) :
7. Le grand peintre, séduit par les mirages chromatiques qui entourent les choses plutôt que par la matière même, songera aux sept couleurs du spectre plutôt qu'à celle de la terre ou du bois.
LHOTE, Peint. d'abord, 1942, p. 69.
b) Couleur + adj.
Couleur complémentaire
[D'une couleur du spectre] Couleur mixte composée de toutes les autres couleurs du spectre et dont le mélange avec la première donne de la lumière blanche par addition de l'ensemble des radiations colorées.
[D'un pigment, d'un colorant] Couleur dont le mélange avec la première donne du noir par absorption (ou soustraction) de l'ensemble des mêmes radiations colorées :
8. Le rouge du drapeau s'éteint et jaunit, parce qu'il se détache sur le bleu du ciel, dont la couleur complémentaire, l'orangé, se combine avec le rouge.
ZOLA, L'Œuvre, 1886, p. 207.
Couleur fondamentale (ou primaire). Chacune des trois couleurs à partir desquelles l'on peut reproduire toutes les autres par des mélanges en proportion convenable. Ce principe scientifique qui fait découler des trois couleurs primaires, le jaune, le rouge, le bleu, les trois couleurs secondaires, l'orange, le vert, le violet (ZOLA, L'Œuvre, 1886p. 270).
c) Subst. + couleur
Indice de couleur. ,,Différence entre la magnitude visuelle et la magnitude photographique d'un objet céleste``(cf. MULLER 1966).
Température de couleur (cf. Hist. sc., t. 3, vol. 2, 1964, p. 546).
3. PEINT. (cf. coloris A). [La couleur envisagée du point de vue de l'effet esthétique qu'elle doit produire] La couleur anglaise importée par Delacroix dans le Massacre de Scio (GONCOURT, Journal, 1893, p. 420) :
9. ... la couleur est posée non plus comme un simple adjuvant du dessin, mais comme une ressource toute différente de l'art de peindre que l'on compare à la musique et à son action.
HUYGHE, Dialogue avec le visible, 1955, p. 207.
P. méton. Effet produit par les couleurs d'un tableau et p. ext. impression générale qui s'en dégage. La couleur est heureuse. La couleur de Van Gogh, si belle qu'elle paraisse encore, n'est qu'une morte par rapport à ce qu'elle fut (LHOTE, Peint., 1942, p. 136).
Couleur locale. ,,Couleur propre à chaque objet, indépendamment de la distribution particulière de la lumière et des ombres`` (Ac. 1835, 1878) et p. ext. peinture exacte d'un personnage, d'un paysage :
10. J'aime ce tableau, me dit-elle, en me montrant l'Arabe qui pleure sur son coursier; cet homme est profondément affligé; ce cheval est bien mort. (...) — Ne trouvez-vous pas qu'il y a là un sentiment bien vrai de la couleur locale?
JOUY, L'Hermite de la Chaussée d'Antin, t. 3, 1813, p. 342.
Fig. Ensemble des détails caractéristiques d'un lieu ou d'une époque. C'est le quartier de plaisir pour étrangers en quête de couleur locale, le pittoresque pour touristes sans initiative (T'SERSTEVENS, Itinér. esp., 1933, p. 109).
Rem. On rencontre aussi couleur locale associée à couleur historique (cf. PROUST, Guermantes 1, 1920, p. 189) et temporelle (cf. DUMESNIL, Hist. théâtre lyr., 1953, p. 113).
4. [Les couleurs en tant que symboles] :
11. Les couleurs expressives de la lumière et du ciel seront toujours solidaires des idées de pureté, de vertu, de sagesse divine.
HUYGHE, Dialogue avec le visible, 1955, p. 270.
a) [En tant que symbole relig.] Couleurs liturgiques. Couleurs des ornements liturgiques adoptées par l'Église pour chaque moment de l'année :
12. ... on rit un tantinet d'elle, dans le village et dans l'abbaye, à cause de sa manie de porter sur sa toilette les couleurs liturgiques du jour; elle est un ordo vivant, un calendrier qui marche; ...
HUYSMANS, L'Oblat, t. 1, 1903, p. 31.
b) [En tant que symbole profane]
D'une nation, d'une collectivité publique, etc. Les couleurs nationales. Gare, (...) pavoisée aux couleurs françaises (VAN DER MEERSCH, Invas. 14, 1935, p. 356) :
13. La plupart des courtisans, (...) étaient enrôlés sous le drapeau tricolore : presque tous avaient fait la guerre d'Amérique et barbouillé leurs cordons des couleurs républicaines.
CHATEAUBRIAND, Mémoires d'Outre-Tombe, t. 1, 1848, p. 236.
Absol. Les trois couleurs (du drapeau français). Et le vent des combats dénouait en jouant L'écharpe aux trois couleurs qui ceignait ce géant (QUINET, Napoléon, 1836, p. 189).
P. méton. Les couleurs. Drapeau, pavillon aux couleurs officielles. Amener, faire flotter, hisser les couleurs :
14. Certains [vaisseaux] arborent le pavillon tricolore. Les autres naviguent sous les couleurs britanniques, hollandaises, polonaises, belges.
DE GAULLE, Mémoires de guerre, 1954, p. 98.
D'une personne en vue ou d'une collectivité. Arborer, porter les couleurs de qqn; faire triompher les couleurs d'un club, d'une écurie. Cravates et (...) porte-cartes en soie aux couleurs des clubs ou des régiments (MORAND, Londres, 1933, p. 171).Porter les couleurs d'une dame. ,,Porter des couleurs semblables à celles que cette dame affectionne le plus`` (Ac.) et au fig. ,,se mettre parmi ses adorateurs`` (Ac.).
P. méton. Nos sujets vêtus, (...) chacun de la couleur de sa profession (MALRAUX, Cond. hum., 1933, p. 197).
Spéc. Couleurs héraldiques. Couleurs particulières utilisées dans l'art du blason. ,,Elles sont au nombre de sept, dont deux métaux et cinq émaux`` (BACH.-DEZ. 1882).
B.— [P. réf. à un sous-ensemble de couleurs excluant le blanc, le noir, le gris] :
15. C'était beau. Tout était gris. Maintenant, tu ne peux pas savoir, tout est déjà rose, jaune vert. C'est devenu une carte postale. Il faut te lever plus tôt, nourrice, si tu veux voir un monde sans couleurs.
ANOUILH, Antigone, 1946, p. 138.
1. [Couleur p. oppos. au blanc] Craie de couleur. Toute couleur tend à s'évanouir dans le blanc, tout objet à se résorber dans l'absence d'objet (BÉGUIN, Âme romant., 1939, p. 382).
a) [En parlant d'êtres humains]
Couleur(s) du visage (cf. bonne, mauvaise mine). Les premiers fruits, le bon air, les ébats des champs, rendront à Félix ses belles couleurs (LAMENNAIS, Lettres Cottu, 1824, p. 156). P. brachylogie. Avoir (un visage qui a) de belles couleurs :
16. Sa mère mourut peu de jours après sa naissance, succombant sans doute à une affection tuberculeuse. Il héritait d'elle « une toux sèche et une couleur pâle qu'il a gardée jusqu'à l'âge de plus de vingt ans ».
VALÉRY, Variété V, 1944, p. 211.
La coloration vive, éclatante du visage (cf. bonne mine) p. oppos. à la pâleur. Perdre, prendre des couleurs. Son visage, toujours sans couleur sous la poudre, blêmit encore (ARAGON, Beaux quart., 1936, p. 351).
(Visage) haut en couleur. Très coloré. Son teint haut en couleur (G. LEROUX, Roul. tsar, 1912, p. 15). C'était un grand paysan du pays de Caux, haut en couleur, gros de poitrine et de ventre, et perché sur de longues jambes (MAUPASS., Contes et nouv., t. 2, St-Antoine, 1883, p. 194).
Fig. Voici un de ses compatriotes qui est plus haut en couleur et plus mordant (SAINTE-BEUVE, Nouv. lundis, t. 12, 1863-69, p. 96). Leurs récits étaient si hauts en couleur (MOUNIER, Traité caract., 1946, p. 130).
Rem. On rencontre ds la docum. l'expr. fort en couleur avec le même sens.
P. anal. Teinte finale obtenue par la nature ou par l'art. Prendre (de la) couleur; les raisins ont pris de la couleur.
Prendre couleur
ART CULIN., PÂTISS. Prendre une teinte dorée. Faites cuire avec feu dessus et dessous; vingt minutes suffisent pour prendre couleur (CHAMPFL., Souffr. profess. Delteil, 1853, p. 84).
Fig. a) L'affaire prend couleur. Se précise, prend tournure. Ça prend couleur, (...); voyons où il veut en venir (REYBAUD, J. Paturot, 1842, p. 43). b) Prendre couleur. Être marqué comme appartenant à un clan ou à un parti :
17. — Monsieur l'abbé, répondit-il [Albert] il m'est impossible de me charger des intérêts de la maison Fatteville, et vous allez comprendre pourquoi ... je ne veux pas prendre couleur, et dois rester une énigme jusqu'à la veille de mon élection...
BALZAC, Albert Savarus, 1842, p. 98.
Homme, race de couleur p. oppos. à la race blanche. Les Français blancs et de couleur (DE GAULLE, Mém. guerre, 1954, p. 258).
b) Étoffe, et plus particulièrement linge de couleur, p. oppos. au linge blanc. On ne met pas du linge de couleur à sécher au soleil (RENARD, Journal, 1903, p. 843). Abs. Les couleurs, p. oppos. au blanc. Laver les couleurs.
2. [Les couleurs dites chromatiques p. oppos. aux couleurs achromatiques] Les daltoniens complets, individus aveugles à toutes les couleurs, voient le monde en noir, blanc, gris (CAMEFORT, GAMA, Sc. nat., 1960, p. 248) :
18. ... Biondetta, renonçant aux couleurs, aux parures, à « l'arc-en-ciel des vanités », souhaite pour elle des vêtements noirs comme le corbeau qui quitta l'arche, blancs comme la colombe qui revint avec le rameau d'olivier.
BÉGUIN, L'Âme romantique et le rêve, 1939, p. 291.
P. métaph. Il n'y a pas de couleurs dans mes livres, il n'y a que du blanc et du noir, des effets de lumière et d'ombres (GREEN, Journal, 1935-39, p. 198).
Spéc., B.-A., ARTS APPL. De (en) couleur. (Capable de produire une image) autre qu'en noir, blanc (et gris) exclusivement. Gravure, impression, lithographie en couleur; photographie, tirage en couleur; film en couleur. La télévision en couleurs est arrivée actuellement à l'état expérimental (MATRAS, Radiodiff. et télév., 1958, p. 108).
Absol. La couleur. Faire de la (photographie en) couleur; avoir la (télévision en) couleur.
II.— P. méton. (cf. aussi supra I A 3)
A.— Substance qui sert à donner de la couleur. Marchand de couleurs. Qui vend des couleurs, p. ext. droguiste. Crayon de couleur. Crayon qui sert à colorier. Ses façades peintes de couleurs vives (BILLY, Introïbo, 1939, p. 14) :
19. Il vit sur la palette les couleurs qui avaient séché, (...); il vit dans sa boîte à couleurs le désordre des tubes jetés là pêle-mêle.
RAMUZ, Aimé Pache, peintre vaudois, 1911, p. 163.
Syntagmes
1. Couleur + subst. Couleur « à l'aquarelle » (cf. ROUSSET, Trav. pts matér., 1928, p. 172), à l'huile; couleur en poudre; couleur d'aniline.
2. Couleur + adj. (cf. aussi supra I A 1). Couleur chimique, minérale, organique (naturelle ou synthétique), pigmentaire. Couleur écaillée; couleur inaltérable, indélébile; couleur opaque, transparente, vitrifiable.
3. Subst. + couleur(s). Pistolet à couleur; charge, couche, touche de couleur; mélange de couleurs; pot, tube de couleur; fabricant de couleurs.
4. Verbe + couleur(s). Appliquer, broyer, délayer, mélanger, préparer les couleurs; mettre en couleur, passer à la couleur; prendre de la couleur.
B.— JEUX
1. Jeu de cartes. Marque des quatre séries, trèfle, carreau, cœur, pique. Jouer dans la couleur.
Annoncer la couleur. Annoncer la série qui servira d'atout.
Fig. Annoncer ses intentions. Question galette, j'annonce la couleur : c'est florissant au possible. On peut tout se payer (GIONO, Gds chem., 1951, p. 213).
2. Jeux de hasard (boule, roulette, etc). ,,Jouer la couleur... miser sur le rouge ou le noir, au lieu de miser sur les numéros`` (Lar. Lang. fr.).
C.— Arg. Soufflet (p. réf. à la couleur rouge qui marque l'endroit qui a reçu le soufflet). « J'bouscule l'usurpateur, Qui m'applique sur la face, Comm' on dit, une couleur ». Le Gamin de Paris, chanson, 184 (LARCHEY, Excentr. lang., 1865, p. 92).
III.— P. métaph. ou au fig.
A.— [P. réf. à la valeur distinctive des couleurs] Aspect distinctif, caractéristique. La couleur typique de qqc. La couleur générale de sa conversation (STENDHAL, Rom. et nouv., t. 1, 1842, p. 69). Ne voyez donc pas l'avenir sous des couleurs si noires (LAMENNAIS, Lettres Cottu, 1819, p. 48). Si Marie-Thérèse eût continué le récit à la place de Manuel, elle eût donné aux événements sa couleur propre (GREEN, Journal, 1933, p. 134) :
20. Don Juan I considérait : qu'une femme n'est qu'une note, un timbre, une couleur d'entre les couleurs, et que même on n'en jouit pas, on n'en tire, on ne lui donne toute sa valeur si on ne la place dans une gamme, une diversité d'autres, parmi lesquelles elle peut valoir et faire valoir ce qu'elle a d'unique...
VALÉRY, Mauvaises pensées et autres, 1942, p. 182.
1. Syntagmes
a) Couleur + subst. Couleur d'ensemble, de justesse; couleur de (l')amitié, de (l')espoir, de (la) haine, couleur de (la) vertu; une couleur de mélodrame; (avoir) la couleur d'un sot.
b) Couleur + adj. Couleur aimable, conventionnelle, cruelle, émotionnelle, épique, exacte, juste, moderne, monacale, morale, originale, paysanne, religieuse, romanesque...
c) Verbe + couleur(s). Peindre sans (avec) des couleurs; présenter (se) sous des couleurs...; prendre des couleurs; représenter sous des couleurs...
2. En partic.
a) MUSIQUE
[P. anal. avec la peint.] Couleur harmonique, instrumentale, musicale. Madame, (...) vous m'avez parlé souvent de la couleur de la musique et de ce qu'elle peignait (BALZAC, Massimilla Doni, 1839, p. 455). Beethoven a su conserver la couleur grave et sombre (...) [qui devait] dominer dans un tel sujet [la symphonie héroïque] (BERLIOZ, À travers chants, 1862, p. 25) :
21. ... à l'oreille d'un musicien deux motifs, matériellement composés de plusieurs des mêmes notes, peuvent ne présenter aucune ressemblance, s'ils diffèrent par la couleur de l'harmonie et de l'orchestration.
PROUST, À l'ombre des jeunes filles en fleurs, 1918, p. 661.
Spéc. Timbre, tonalité. On ne classe pas les voix par leur étendue, c'est-à-dire par leur longueur, mais par leur timbre, leur couleur et leur tessiture (Arts et litt., 1935, p. 3610).
b) PHONÉTIQUE :
22. Couleur. Qualité du timbre d'une voyelle, appréciée d'après la correspondance qu'on croit percevoir entre les impressions acoustiques et les impressions visuelles; on distingue ainsi des voyelles claires (é), sombres (ou), ternes (eu), éclatantes (â), etc.
MAR. Lex. 1933, p. 58.
c) Opinion, tendance. Couleur politique; couleur démocratique, jacobine; la couleur d'un journal. Nous n'avions pas les mêmes pensées, mais nous avions des pensées de même couleur (RENARD, Journal, 1896, p. 364).
[P. oppos. à la banalité, à la neutralité des tons ordinaires] Vie, relief. Cela a beaucoup de couleur. Une voix sans couleur. Sur un fond gris d'existence, la plus légère impression fait couleur (BOURGET, 2e amour, 1884, p. 148). Ma femme sans qui rien n'a chanson ni couleur (ARAGON, Crève-cœur, 1941, p. 37).
En partic. [En parlant du style d'une œuvre littér., d'un aut.] Leur poésie était sans couleur et leur style sans harmonie (MARMONTEL, Essai, 1799, p. 308). Relu un des contes des Seven Gothic Tales d'Isak Dinesen... il y a de la fantaisie, de la couleur et de la verve dans ces récits (GREEN, Journal, 1942, p. 242).
B.— Péj. [P. réf. à la couleur en tant qu'elle masque ce qu'elle recouvre] Prétexte, mensonge. Sous prétexte de mariage ou autre couleur (A. FRANCE, Bonnard, 1881, p. 482) :
23. ... j'aimerais bien être son fils, ô tante Josette! ... j'aurais plus de liberté, mais d'un autre côté, je ne pourrais pas lui raconter les couleurs que je raconte à maman ... ça ne prendrait pas! ...
GYP, M. Fred, 1891, p. 82.
Argot
Monter une couleur. Raconter des mensonges. Ne fais donc pas la bête : est-ce que tu crois que je veux te monter des couleurs? (RABAN, MARCO SAINT-HILAIRE, Mém. forçat, 1828-29, p. 289).
Affranchir la couleur. Renseigner, mettre au courant. Tu vas foncer voir Ali pour lui affranchir la couleur (LE BRETON, Rififi, 1953, p. 74).
Vx. Ne pas être à la couleur. S'en laisser conter, être naïf (cf. être à la coule). Si vous n'êtes pas à la couleur, [vous croyez ce mensonge que l'on vient vous débiter] (POULOT, Sublime, 1872, p. 201).
Sous couleur de. Sous l'apparence de, sous prétexte de. M. Zola, sous couleur de critique littéraire, n'a jamais fait qu'ériger son goût personnel en principe (LEMAITRE, Contemp., 1885, p. 251).
Prononc. et Orth. :[]. Ds Ac. 1694-1932. Après un nom, s'emploie comme adj. inv. : Des écharpes couleur de feuillage; des joues couleur de lys et de rose. Étymol. et Hist. I. 1. Ca 1050 « sensation visuelle » (Alexis, éd. C. Storey, 4 : ici fig. perdre sa color « perdre son caractère »); 2. a) ca 1100 en parlant du visage, de la peau (Roland, éd. J. Bédier, 441); b) 1794 gens de couleur (STAËL, Lettres div., p. 426); 3. 1393 « couleurs distinctives d'un personnage (livrée, etc.) » (Compte de la Cour de Charles VI, B.N. 6743, f° 7 ds GDF. Compl.); 4. 1694 « couleurs des cartes à jouer » (Ac.); 5. 1732 liturg. (Trév.). 6. 1790 couleurs nationales (Mirabeau, oct. ds BUCHEZ, ROUX, Hist. parlementaire de la Révolution fr., t. VII, p. 416 ds BRUNOT t. 9, p. 624). II. 1. Ca 1268 « substance colorante » (ÉTIENNE BOILEAU, Livre des métiers, LIV, I, éd. R. de Lespinasse et F. Bonnardot, p. 111); 2. a) 1699 peint. couleur locale (R. DE PILES, Idée du Peintre Parfait, p. 36 ds BRUNOT t. 6, p. 738, note 8); b) 1772 p. ext. litt. (J.-F. DE LA HARPE, Eloge de Racine, p. 33 ds Mod. Lang. Notes, vol. LX [1945] p. 98). III. 1. XIIIe s. fig. [ms. fin du XIIIe s.] « relief (en parlant du style) » (De III dames qui troverent I. vit, 4 ds A. de Montaiglon et G. Raynaud, Fabliaux, t. 5, p. 32); 2. ca 1280 « raison spécieuse » (Couronnement de Renart, éd. A. Foulet, 2456); 3. 1794 « caractère d'une opinion » (CHAMFORT, Caract. et anecd., p. 135). Du lat. color « couleur, teint du visage » au fig. « aspect extérieur », « couleur, coloris du style; argument (donnant aux faits une couleur favorable) ». Fréq. abs. littér. :11 330. Fréq. rel. littér. : XIXe s. : a) 15 184, b) 16 805; XXe s. : a) 15 606, b) 16 838. Bbg. GOHIN 1903, p. 367. — GOTTSCH. Redens. 1930, p. 142, 206, 336, 446. — KNAUER (K.). Zur Psychologie und Grammatik der französischen Farbbezeichnungen. Sprachkunde. 1936, t. 8, pp. 18-21. — LA LANDELLE (G. de). Le Lang. des marins. Paris, 1859, p. 208, 210, 404. — LE BRETON GRANDMAISON. Le Monde de la limonade. Vie Lang. 1971, p. 635. — LEW. 1960, p. 170. — MALAKIS (E.). The First use of Couleur locale in french literary criticism. Mod. Lang. Notes. 1945, t. 60, pp. 98-99. — MAT. Louis-Philippe 1951, p. 104, 132, 238. — PAULI 1921, p. 44. — RICHTER (B.L.O.). Genesis and fortunes of the term couleur locale. Comparative literature studies. 1966, t. 3, n° 2, pp. 299-308. — RITTER (E.). Les Quatre dict. fr. B. de l'Inst. nat. genevois. 1905, t. 36, p. 386. — ROG. 1965, p. 17, 138. — SAIN. Lang. par. 1920, p. 389.

couleur [kulœʀ] n. f.
ÉTYM. V. 1100, couleur; color, 1050, au sens I, 1; du lat. color « couleur, teint du visage », fig. « aspect extérieur, argument ».
———
I
1 Caractère d'une lumière, de la surface d'un objet (indépendamment de sa forme), selon l'impression visuelle particulière qu'elles produisent (une couleur, les couleurs); propriété que l'on attribue à la lumière, aux objets de produire une telle impression (la couleur). || La couleur, les couleurs d'une lumière, d'un rayonnement, d'un objet. Coloration, coloris, nuance, teinte, ton, tonalité; le préf. chromo- et les suff. -chrome, -colore.Couleur claire; foncée, obscure, sombre. || Couleur ardente, chaude, éclatante, fraîche, gaie, vive. || Couleur chargée, choquante, criarde, crue, poussée, tranchée, voyante. || Couleur franche, nette; couleur fausse, imprécise, indéfinissable, rompue. || Couleur délavée, élavée, éteinte, neutre, tendre, pâle. || Couleur fanée, morne, passée, pisseuse (pop.), sale, terne, triste. || Couleur mate. || Couleur tirant sur le vert… || Couleur changeante (→ Changer, cit. 6), chatoyante. Moirure, reflet; caméléon (cit. 3). || Couleur unie, dégradée. || D'une seule couleur. Monochrome, uni; camaïeu, grisaille. || De plusieurs couleurs. Bariolé, bigarré, billebarré, chamarré, chiné, diapré, jaspé, moucheté, multicolore, panaché, polychrome, taché, truité; en parlant de la robe des chevaux : arzel, balzan, cavecé, mantelé, miroité, pie, pommelé, tigré, tisonné, truité. || Les couleurs de la nature. || Les couleurs des pierres précieuses. || Les couleurs des végétaux. || La couleur des cheveux (blond, brun, roux), des poils ( Pelage, robe), des plumes… || Un plumage de vives couleurs. || Couleurs d'un kaléidoscope.
1 (Les) couleurs du prisme (…) pleines et certaines dans leur milieu, sont toujours un peu équivoques dans les limites où elles se touchent et se confondent.
Rivarol, Littérature, I, V, p. 118.
2 (…) je pensai que les couleurs et les feuillages avaient une harmonie, une poésie qui se faisait jour dans l'entendement en charmant le regard (…) Si la couleur est la lumière organisée, ne doit-elle pas avoir un sens comme les combinaisons de l'air ont le leur ?
Balzac, le Lys dans la vallée, Pl., t. VIII, p. 855.
3 Imagine ce qu'il y a de plus impétueux dans le désordre, de plus insaisissable dans la vitesse, de plus rayonnant dans des couleurs crues frappées de soleil.
E. Fromentin, Une année dans le Sahel, p. 280.
4 Quand le grand foyer descend dans les eaux, de rouges fanfares s'élancent de tous côtés; une sanglante harmonie éclate à l'horizon, et le vert s'empourpre richement. Mais bientôt de vastes ombres bleues chassent en cadence devant elles la foule des tons orangés et rose tendre qui sont comme l'écho lointain et affaibli de la lumière. Cette grande symphonie du jour (…) cette succession de mélodies, où la variété sort toujours de l'infini, cet hymne compliqué s'appelle la couleur.
Baudelaire, Salon de 1846, III, p. 605.
5 Les parfums, les couleurs et les sons se répondent (…)
Baudelaire, les Fleurs du mal, IV, Correspondances.
6 (…) la couleur n'est au physicien qu'une circonstance accessoire; il n'en retient qu'une indication grossière de fréquence. Quant aux effets de contrastes, aux complémentaires, et autres phénomènes de même ordre, il les écarte de ses voies. On arrive ainsi à cette intéressante constatation : tandis que pour la pensée du physicien l'impression colorée a le caractère d'un accident qui se produit pour telle valeur ou telle autre d'une suite indéfinie de nombres, l'œil du même savant lui offre un ensemble restreint et fermé de sensations qui se correspondent deux à deux, tellement que si l'une est donnée avec une certaine intensité et une certaine durée, elle est aussitôt suivie de la production de l'autre. Si quelqu'un n'avait jamais vu le vert, il lui suffirait de regarder du rouge pour le connaître.
Valéry, Variété IV, Disc. prononcé au 2e congrès d'Esthét., p. 263.
Sc. || La sensation de couleur est fonction des propriétés physiques de la lumière (longueur d'onde) et de sa diffusion. || La lumière blanche (solaire) est décomposée par le prisme en couleurs dites spectrales ( Violet, indigo, bleu, vert, jaune, orangé, rouge). || Les couleurs du spectre, du prisme, de l'arc-en-ciel (→ Arc-en-ciel, cit. 3 et 5). || Couleurs simples, primitives. || Couleurs fondamentales : le jaune, le rouge et le bleu, couleurs à partir desquelles on peut produire les autres couleurs. || Couleurs composées. || Couleur complémentaire (d'une couleur primaire), celle qui résulte du mélange des deux autres couleurs primaires. || Le vert, couleur complémentaire du rouge (l'orangé, du bleu; le violet, du jaune). || Le mélange optique d'une couleur et de sa couleur complémentaire donne le blanc. Complémentaire. || Trouble dans l'appréciation des couleurs ( Achromatopsie; daltonisme).
Loc. fig. Juger d'une chose, parler de qqch. comme un aveugle des couleurs. — ☑ Des goûts et des couleurs, on ne dispute (cit. 4) point (ou : on ne discute pas, point). Opinion.
Spécialt. Aspect d'une surface (papier, tissu, etc.), quant à la couleur. || Un papier à lettres de couleur mauve. || Une robe de couleur blanche, verte. || La couleur d'un vêtement. || De belles couleurs vives. || Gamme, palette de couleurs.
7 Les retentissantes couleurs
Dont tu parsèmes tes toilettes
Jettent dans l'esprit des poètes
L'image d'un ballet de fleurs.
Baudelaire, les Fleurs du mal, Pièces condamnées, CXXIX, « À celle qui est trop gaie ».
Couleur de… || Couleur d'encre : noir. || Couleur de rose. || Un manteau couleur de muraille, gris. || Couleur de nuit : gris foncé, noir.
Couleur du temps : couleur changeante, dont les tons vont du gris au bleu. || Des yeux couleur du temps.
Phys. Nom donné à une caractéristique des particules formant les baryons (ensemble de trois quarks) et permettant de différencier les quarks de même type.
7.1 Ce raisonnement conduisit les théoriciens à introduire la notion de « couleur ». Imaginons qu'outre les propriétés connues, il en existe une nouvelle, que l'on baptisera donc « couleur ». Imaginons qu'il existe trois couleurs fondamentales et que chaque quark U, D, S, C ou B puisse exister sous ces trois états de couleur. Le problème est résolu puisque, par exemple, on pourra avoir un U vert, un U bleu et un U rouge, cohabitant sans violer le principe d'exclusion.
Sciences et Avenir, no 373, mars 1978, p. 85.
tableau Désignations de couleurs.
2 Plur. Livrée, vêtements de couleur déterminée.Vx. Porter couleurs : porter une livrée aux couleurs de son maître, et, fig., être laquais, valet. — ☑ Porter les couleurs d'une dame, inclure dans son costume les couleurs qu'elle affectionne, et, fig., se mettre au rang de ses admirateurs.(1877, Littré, Suppl.). || Les jockeys portent les couleurs d'une écurie. || Les couleurs d'un club sportif.
8 Faire par les couleurs distinguer ses valets (…)
Boileau, Satires, V.
9 Les couleurs et les chiffres de Mme de Valentinois paraissaient partout (…)
Mme de La Fayette, la Princesse de Clèves, I, p. 241.
(1732). Liturgie. || Couleurs liturgiques, adoptées pour les ornements liturgiques. || Les couleurs liturgiques ont une signification symbolique.
3 Les couleurs du drapeau : les couleurs adoptées par chaque nation comme marque distinctive et qui sont reproduites sur le drapeau.(1790). || Les couleurs nationales. || Les couleurs françaises. || Les trois couleurs (françaises) : bleu, blanc, rouge. Drapeau, tricolore. || Pavoiser aux couleurs d'un pays, de l'Italie, du Brésil… || Bateau arborant les couleurs britanniques.Absolt (mar. et milit.). || Les couleurs. Drapeau, pavillon. || Envoyer, hisser les couleurs; amener, baisser, rentrer les couleurs. || Aux couleurs !
10 La France reprend ses couleurs. À l'avenir il ne sera plus porté d'autre cocarde que la cocarde tricolore.
Charte de 1830, art. 67.
4 (Au sing. : la couleur). Ce qui est coloré; toute autre couleur que le noir, le gris, le blanc. || Elle est encore en deuil et ne porte pas de vêtements de couleur. || Renoncer à la couleur. || Linge, draps de couleur. || Laver le blanc et la couleur.
5 (1694). Chacune des quatre marques, dans un jeu de cartes. Carreau, cœur, pique, trèfle. || Avoir des quatre couleurs dans son jeu. Au bridge. || Couleur majeure (pique, cœur), mineure (trèfle, carreau).Ensemble des cartes de la même marque, dans le jeu d'un joueur. || Couleur longue (plus de 4 cartes), courte. || Couleur pleine (formant une séquence), percée. || Couleur déclarable, au bridge.Spécialt. Atout. || Donner dans la couleur. || Jouer dans la couleur. || Annoncer la couleur : proposer aux autres joueurs une couleur qui servira d'atout.Loc. fig. Annoncer la couleur : dire ce qu'on a à dire.
10.1 D'ailleurs, le général (…) avait, d'entrée, annoncé la couleur :
— Si je dois mourir je préfère que ce soit sur l'épaule d'une femme que sur celle d'un tirailleur sénégalais (…)
Y. Audouard, in le Canard enchaîné, 16 avr. 1969.
10.2 Hascoët que j'ai aimée presque d'amour ! Elle ne l'a jamais su, bien entendu. On n'annonce pas la couleur à treize ans. Elle a cependant été un de mes vrais sentiments.
Benoîte et Flora Groult, Il était deux fois, p. 39.
Blason. || Les couleurs de l'écu. Émail.
11 (…) ceux-là portent les armes pleines, ceux-ci brisent d'un lambel (…)
Ils ont avec les Bourbons, sur une même couleur, un même métal (…)
La Bruyère, les Caractères, VII, 10.
tableau Termes de blason.
6 (1080). Teinte naturelle (de la peau humaine). || Couleur de la peau, du teint. Carnation, teint. || Couleur pâle, blême, livide… || Couleur vermeille.
12 Je me meurs. — Dieux puissants ! quelle étrange pâleur
De son teint tout à coup efface la couleur ?
Racine, Esther, II, 7.
Les couleurs de qqn : carnation rose de la figure (dans la race « blanche »). || Avoir de belles couleurs. || Elle se donne de fausses couleurs. → Plâtrer, cit. 2. Absolt. || L'animation, l'ardeur, l'éclat des couleurs. || N'avoir pas de couleurs. || Reprendre des couleurs. || Les couleurs lui sont revenues avec la bonne santé. || Devenir de toutes les couleurs. || Passer par toutes les couleurs.Les pâles couleurs. Chlorose.
13 (…) les couleurs dont la santé fleurit un visage bien portant.
Th. Gautier, le Capitaine Fracasse, t. I, p. 122.
Loc. Haut en couleur : qui a le teint très coloré.Fig. Pittoresque. → ci-dessous, cit. 31. — ☑ Changer (cit. 51) de couleur (sous l'effet de l'émotion).
(1791, in D. D. L.). Loc. … de couleur. || Homme, femme de couleur, qui n'appartient pas à la race blanche (se dit surtout des Noirs). || Gens, personnes de couleur. Mulâtre, nègre, noir.
14 L'Américain partage avec l'Anglais l'horreur, presque sacrée, du mariage entre blancs et gens de couleur (…)
(Dans le Sud des États-Unis), contre la « couleur », les blancs constituent un front uni, qui n'a pas de fissure.
André Siegfried, les États-Unis d'aujourd'hui, VI, p. 87 et 90.
7 Aspect que la viande, la pâtisserie, le pain… prennent lorsqu'ils sont cuits à point. || Cette croûte n'a pas de couleur. || Cette viande a, prend couleur.
15 (…) si je ne me trompe à la couleur du mets,
Je dois faire aujourd'hui bonne chère, ou jamais.
La Fontaine, Fables, VIII, 9.
Loc. fig. L'affaire prend couleur : on commence à discerner la tournure qu'elle va prendre. Figure, tournure.
16 L'affaire du quiétisme (…) reprit couleur, et couleur qui commença à devenir fort louche pour M. de Cambrai.
Saint-Simon, Mémoires, 56, 189.
8 Loc. fam. La couleur de qqch. : son apparence (dans quelques locutions). || On ne connaît pas la couleur de son argent : il ne paie pas ses dettes. || Tu n'en reverras plus la couleur, l'apparence. || Je ne connais pas la couleur de sa voix, de ses paroles.
Fam. De toutes les couleurs : de tous les genres (péj.). || En faire voir à quelqu'un de toutes les couleurs, lui faire subir toutes sortes d'avanies, d'épreuves… On dit de même : || Il lui en a dit de toutes les couleurs sur vous (cf. Des vertes et des pas mûres).En voir de toutes les couleurs.
16.1 Cette petite femme-là lui en fait voir de toutes les couleurs (…)
Alphonse Daudet, Fromont jeune et Risler aîné, p. 182.
REM. 1. Dans la langue classique et jusqu'au XVIIIe s., couleur est pris au masc. dans certaines expressions. « Le couleur de rose » (La Fontaine, Psyché, 1).
2. Après un nom, couleur déterminé par un autre nom s'emploie comme adjectif invariable. Rubans, robes couleur de chair, couleur chair.
17 Je vous trouve (…) les lèvres d'un couleur de feu surprenant.
Molière, l'Impromptu de Versailles, 4.
18 (…) des rubans couleur de feu (…)
Molière, Dom Juan, I, 2.
3. Le nom employé pour désigner une couleur reste invariable, « parce qu'il est le complément du mot “couleur” sous-entendu » (Grevisse, le Bon Usage, 381). Des foulards abricot. (Il en est de même pour les adj. composés. Des capotes bleu horizon).
———
II
1 (V. 1268). Substance que l'on applique sur un objet pour produire la sensation de couleur. Colorant, pigment; peinture, teinture; aquarelle, badigeon, enduit, fard, lavis, gouache, pastel || Couleurs végétales, animales. || Couleurs minérales, naturelles, artificielles.Fabrication des couleurs naturelles (cassage, broyage, débourdage, lévigation, décantation, tamisage).Couleurs vitrifiables, servant à la coloration des porcelaines. || Couleurs délayées : couleurs à l'huile, à l'eau, à la colle, à la gomme, à la cire.Cette étoffe prend bien la couleur. || Faire l'apprêt d'un mur avant d'étendre la couleur.
Loc. Marchand de couleurs. Droguiste. || Aller acheter un balai chez le marchand de couleurs. || Des marchands de couleurs.
18.1 (…) un marchand de couleurs posait ses volets arlequins où s'attardait un dernier rayon (…)
Malraux, Antimémoires, Folio, p. 52.
Broyer (→ cit. 4), préparer les couleurs. || Couche de couleur. Frottis, glacis. || Couleurs en tube. || Tube de couleur; godet à couleur. || Pot de couleur. || Crayon de couleur. || Boîte de couleurs. || Pistolet à couleur. || Principales couleurs utilisées en peinture : blanc fixe, blanc d'argent, céruse, blanc de zinc, lithopone, blanc de titane, laque; jaune de chrome, de cadmium, indien, de Naples, de strontium; ocres; terres de Sienne, d'ambre, de Cassel…, bitume, brun Van Dyck, sépia; minium, vermillon, rouges; bleu d'outre-mer, de Prusse, de cobalt, céleste, minéral; vert émeraude, de cobalt, anglais, terres vertes; noirs minéraux, noirs de fumée.
Appliquer, coucher, étaler la couleur. || Peindre à pleine couleur, avec un pinceau chargé en couleur. || Mettre de la couleur, mettre en couleur. Badigeonner, barbouiller (cit. 5), barioler, bigarrer, colorer, colorier, enluminer, farder, panacher, peindre, teindre, teinter. || Les couleurs s'altèrent, passent avec le temps. Décolorer (se), déteindre, détremper, pâlir, ternir; déalbation. || Couleur qui vire. || Couleurs endommagées, craquelées. || Attention à la couleur ! (rare). Peinture.
19 Une palette de fer-blanc, où l'ouvrier avait pratiqué dix-huit à vingt petits enfoncements, c'est à peu près le nombre de couleurs dont un peintre a coutume de composer sa palette.
Diderot, Peinture en cire, Œ., t. XV, in Pougens.
T. de coiffure. || Faire la couleur : appliquer une couleur ( Coloration) sur un cheveu (préalablement décoloré [ Décoloration] ou non). || Se faire faire la couleur, une couleur par un coloriste.
2 Teinte, coloris employé dans une œuvre picturale. || Adoucir, amortir, atténuer les couleurs. || Aviver, ranimer, rehausser, relever, renforcer les couleurs. || Le fondu des couleurs. || Couleurs fondues, assorties, nuées. || Couleurs contrastées, opposées.Gamme, ensemble, combinaison, harmonie, symphonie de couleurs. Palette.Couleurs légères, voisines du blanc. || Couleurs pesantes. || Couleurs rompues, affaiblies par un mélange. || Couleurs amies, qui s'accordent bien ensemble.
19.1 Les couleurs sont encore plus explicatives quoique moins multiples que les lignes par suite de leur puissance sur l'œil. Il y a des tons nobles, d'autres communs, des harmonies tranquilles, consolantes, d'autres qui vous excitent par leur hardiesse.
P. Gauguin, Lettre à Émile Schuffenecker, 14 janv. 1885, in Lettres de Gauguin, p. 45.
Couleur générale d'un tableau, l'impression d'ensemble donnée par le coloris. || « La couleur est composée de masses (cit. 11) colorées » (Baudelaire). || La composition, le dessin, la couleur d'un tableau. || Un maître de la couleur.Par ext. || Couleur d'une estampe, d'une gravure, l'impression colorée qu'elle donne.
Les arts de la couleur. Peinture; émail, fresque, mosaïque, tapisserie.
19.2 La couleur n'est rien, si elle n'est pas convenable au sujet, et si elle n'augmente pas l'effet du tableau par l'imagination.
E. Delacroix, Journal, 2 janv. 1853.
20 En certains endroits (chez Chasseriau) c'est déjà de la couleur, en d'autres ce n'est encore que coloriage (…)
Baudelaire, Curiosités esthétiques, p. 29.
21 J'en viens au dernier élément (de la peinture)… la couleur. Par elles-mêmes et en dehors de leur emploi limitatif, les couleurs, comme les lignes ont un sens. Une gamme de couleurs (…) peut être riche ou maigre, élégante ou lourde. Notre impression varie avec leur assemblage; leur assemblage a donc une expression (…) La valeur propre de la couleur est donc énorme, et le parti que les peintres prennent à son endroit détermine le reste de leur œuvre. — Mais, dans cet élément, il y a plusieurs éléments, d'abord le degré général de clarté ou d'obscurité (…) D'autre part, l'opposition des clairs et des noirs est (…) plus ou moins forte ou plus ou moins ménagée (…) Enfin, outre leur degré de lumière, les tons, selon qu'ils sont ou non complémentaires l'un de l'autre, ont leurs dissonances ou leurs consonances; ils s'appellent ou s'excluent; l'orangé, le violet, le rouge, le vert et tous les autres, simples ou mélangés, forment ainsi par leur proximité (…) une harmonie pleine et forte, ou âpre et rude, ou douce et molle.
Taine, Philosophie de l'art, t. II, V, IV, IV, p. 535.
21.1 Voyez Cézanne, l'incompris, la nature essentiellement mystique de l'Orient (son visage ressemble à un ancien du Levant), il affectionne dans la forme un mystère et une tranquillité lourde de l'homme couché pour rêver, sa couleur est grave comme le caractère des Orientaux.
P. Gauguin, Lettre à Émile Schuffenecker, 14 janv. 1885, in Lettres de Gauguin, p. 45.
22 On lui reproche, comme à Delacroix, l'indigence de son dessin et la frénésie de sa couleur.
Léon Bloy, la Femme pauvre, I, p. 145.
22.1 Le dessin donne sensation de la volonté — et la couleur, magie.
Valéry, Cahiers, t. II, Pl., p. 973.
(1699). Couleur locale : couleur propre à chaque objet, indépendamment de la distribution des lumières et des ombres.Fig. Ensemble des traits extérieurs caractérisant les personnes et les choses dans un lieu, dans un temps donné. || Les peintres et les écrivains romantiques se préoccupaient de reproduire la couleur locale. || L'abus de la couleur locale, du pittoresque.Fam. || Un paysage, une scène qui font très couleur locale. Pittoresque; → Rester, cit. 21.
22.2 Cousin ne trouvait pas la moindre couleur locale dans Racine, qu'il n'aime point (…)
E. Delacroix, Journal, 24 déc. 1853.
23 Les gens du dix-septième siècle étaient bien plus préoccupés que nous ne le sommes de ce qui s'est appelé depuis : couleur locale.
F. Mauriac, la Vie de J. Racine, VI, p. 85.
3 (Même valeur que I., 4.; opposé à noir, blanc). || En couleur, en couleurs. || Gravure en couleur(s). || Des cartes postales en couleurs. Fam. || Des en noir et des en couleurs. || Photo, film, cinéma en couleur (appos. : photo, film couleur). || Télévision en couleur; par appos. une télé couleur.
Absolt. || La couleur. || Faire de la couleur (photo, cinéma). || Je sais qu'elle a la télé, mais est-ce qu'elle a (est-ce que c'est) la couleur ?
———
III Par métaphore ou fig.
1 Littér. Aspect produisant une impression comparable à celle que la couleur donne aux yeux. || Donner des couleurs, de la couleur à une description. || Peindre une situation, un cas sous les plus vives couleurs, avec force, avec vérité, avec vie. || Exposer qqch. sous de fausses couleurs.
24 Je (…) ne me suis servi, dans cette peinture, que des couleurs expresses et des traits essentiels qui font reconnaître d'abord un véritable et franc hypocrite.
Molière, Tartuffe, 1er placet.
(XIIIe). Absolt. || Qualité qui distingue un style. Brillant, éclat, force, véracité; coloré. || Style sans couleur, terne, impersonnel. || Description pleine de couleur. || Cette musique a de la couleur.
25 Tout le monde peut écrire ainsi, sans couleur, sans évocation, sans image, sans peinture.
Antoine Albalat, l'Art d'écrire, p. 60.
26 (…) elle racontait assez bien; les détails qu'elle donnait avaient de la couleur.
Martin du Gard, les Thibault, t. II, p. 171.
27 Les mots riches de couleur et de sonorité sont aussi difficiles d'emploi que les bijoux voyants et que les teintes vives dans la toilette.
Cocteau, la Difficulté d'être, p. 198.
Loc. Haut en couleur : vif, truculent.
2 Apparence, aspect particulier que prend qqch. suivant les circonstances. Allure, apparence, aspect, caractère. || La situation apparut sous de sombres couleurs. || Voir tout couleur de rose ( Rose : voir tout en rose). || Brusquement, le récit prend une couleur tragique. || Donner une couleur nouvelle à un rôle de théâtre par l'interprétation. — ☑ La couleur du temps : la nature des circonstances.
28 (…) je ne trouve point de couleurs assez noires
Pour en représenter les tragiques histoires.
Corneille, Cinna, I, 3.
29 (…) voilà (…) de quelle couleur sont les pensées que l'on a ici; j'espère qu'elles s'éclairciront (…)
Mme de Sévigné, 469, 20 nov. 1675.
30 Un cri de révolte, une protestation qu'explique la longue plainte du premier violon donnent à l'allégro sa couleur sombre (dans le 11e quatuor), sa tragique tristesse.
Édouard Herriot, la Vie de Beethoven, p. 214.
3 (1794). Caractère propre à une opinion. Teinte. || Une légère couleur d'anarchisme. || Ce journal est d'une couleur politique indécise.
4 Vieilli ou littér. Apparence, raison fallacieuse que l'on donne à une chose, à une action pour la déguiser. Motif, prétexte, raison. || Revêtir un mensonge, une infamie de belles couleurs. || Peindre l'avenir d'une entreprise sous de belles couleurs, sous des couleurs flatteuses. || Donner une couleur plausible, spécieuse. || Donner des couleurs, de mauvaises raisons.
31 Ils ont l'art de donner de belles couleurs à toutes leurs intentions (…)
Molière, Tartuffe, 2e placet.
32 Je vous promets (…) que c'est pas moi qui (…) — Pas de couleurs !
Je t'ai vu, n'est-ce pas ?
Colette, la Vagabonde, p. 57.
Loc. prép. Littér. Sous couleur de : avec l'apparence de, sous le prétexte de… || Attaquer sous couleur de se défendre.
33 Vous pourriez, sous couleur de rendre un bon office,
Mettre quelque autre en peine avec cet artifice.
Corneille, Mélite, IV, 2.
34 (…) Je ne veux plus, moi qui garde ce lieu
Qu'on vienne, sous couleur d'y quérir un caïeu
D'ail, piller mes fruitiers et grappiller ma grappe.
J. M. de Heredia, les Trophées, « Hort. », III.
CONTR. Blanc, noir (vêtement). — Pâleur (teint). — Banalité, platitude (style). — Raison (bonne raison).

Encyclopédie Universelle. 2012.