Akademik

dé-

dé-, des-, dés- Élément, du lat. dis-, qui indique l'éloignement, la séparation, la privation.

dé- ou des- ou dés- Préfixes (du préfixe latin dis-) entrant dans la composition de nombreux mots pour exprimer la cessation d'un état ou d'une action, ou l'état, l'action inverses : défaire, dessouder, désintéresser.

de-, dé-, des-, dés-
élément, du lat. de-, indiquant soit un mouvement de haut en bas, soit un renforcement (ou le commencement) de l'action.
————————
de-, dé-, des-, dés-
élément, du lat. dis-, marquant l'éloignement, la séparation, l'opposition.

I.
⇒DÉ-1, DÉS-, DES-, préf.
Préf. issu du préf. lat. dis-, formateur de nombreux termes composés, notamment de verbes, servant à modifier le sens du terme primitif en exprimant l'éloignement, la privation, la cessation, la négation, la destruction de qqc., l'action ou l'état contraire, inverse.
I.— [Fonctionnement du préf. (par ajout, opposition ou permutation).]
A.— [Il s'oppose souvent au préf. en- (em-), parfois au préf. a(c)- ou au préf. in- pour désigner l'action contraire du verbe :]
commander/commander
faireaire
désinstaller/installer
monter/monter
nouer/nouer
baller/emballer
barquer/embarquer
paqueter/empaqueter
brayer/embrayer
célérer/accélérer
croître/accroître
border/aborder [sens différents]
noncer/annoncer [sens différents]
valer/avaler [sens différents]
duire/induire
gurgiter/ingurgiter
jecter/injecter
B.— Il s'oppose au préf. re- qui indique une réitération : faire/refaire ou s'adjoint à un autre préf.
♦ [en première position :]
désaccorder/accorder
désenvenimer/envenimer
désinfecter/infecter
♦ [en deuxième position :]
[Parfois il s'oppose au préf. ren-, rem- (= re- + en-) : ]
blayer/remblayer
C.— Il remplace parfois en- ou s'y accroche dans des formes doubles synon. : bourber /désembourber.
D.— [Il est plus rarement synon. doublet du préf. mal-, mé- : désaise/malaise ;désinculper/ disculper; et très rarement du préf. e(x)- : filocher/ effilocher.
E.— Il est formateur de verbes, de subst. indiquant une action ou un état, de part. passés et d'adj. indiquant l'état subi, plus rarement de subst. indiquant un état issu d'une transformation régressive.
II.— Valeurs sém.
A.— Dé- formateur de verbes d'action indiquant l'idée d'enlever qqc. de, de priver qqn ou qqc. de.
1. Dé- + subst. + -er (le verbe simple anton. en gén. n'existe pas).
a) Verbes trans.
braiser. « Enlever les braises de ». Débraiser un four avant d'enfourner la pâte. Absol. [Si un engorgement se produit], il n'y a d'autre remède que de débraiser (A. BRONGNIART, Arts céram., 1844, p. 228)
nerver. « Enlever les nerfs ou les tendons d'(une viande de boucherie) ». Cent vingt-cinq grammes de chair maigre de veau [poids net après que cette chair a été parée et dénervée] (Gdes heures cuis. fr., P. Montagné, 1948, p. 190). Au fig. Elles [les statues des Reines] (...) sont (...) désallongées, dénervées, appauvries, presque vulgaires (HUYSMANS, Cathédr., 1898, p. 256)
papilloter. « Ôter les papillottes ou l'emballage (papier entortillé) de ». Les piles d'or qu'on dépapillote (GONCOURT, Journal, 1868, p. 438). Elle dépapillota une croquette de chocolat (MARTIN DU G., Thib., Belle sais., 1923, p. 1025)
désailer. « Arracher l'aile ou les ailes de ». Le col vert désailé se sert magnifiquement de ses pattes pour disparaître rapidement sous l'onde (VIDRON, Chasse, 1945, p. 75). Marcette (...) éructait sa gargouillante allégresse d'idiot en désailant patiemment une mouche (H. BAZIN, Tête contre murs, 1949, p. 318)
viander , au fig. « Ôter la viande de, amaigrir » (Canada 1930). Je vais déviander un peu le restant du 2e acte du Roi (DESAYMARD, Chabrier, 1934, p. 119). viandé, adj., région. « Amaigri ». Un blouson de cuir fermeture éclair qui moulait son torse déviandé (ARNOUX, Rêv. policier amat., 1945, p. 160)
b) Part. passés-adj. (néol. d'aut. pour la plupart) :
fleuronné, ée. « Qui n'a plus son ornement en fleuron ». Ogives défleuronnées (ESTAUNIÉ, Empreinte, 1896, p. 74)
penné, ée. « Qui n'a plus de penne ». Le grand aigle était piteux; maigre, battant de l'aile et dépenné (GIDE, Prométhée, 1899, p. 314)
périosté, ée. « Qui n'a plus de périoste ». Les fragments [de la fracture] sont dépériostés au minimum (JUDET, Fractures membres, 1948, p. 2)
poilé, ée. « Qui n'a plus de poils ». Un matou gris sale, long, efflanqué, dépoilé (COLETTE, Cl. école, 1900, p. 164). Rem. On rencontre une var. : dépoilupoilu, ue, adj. Variante de dépoilé; Vieilles peaux dépoilues (, Aphrodite, 1896, p. 122)
vertébré, ée , au fig. « Qui n'a plus d'ossature, de structure, de cohésion ». C'était une lente ribambelle de phrases dévertébrées, sans liaison apparente (DUHAMEL, Combat ombres, 1939, p. 101)
c) Subst. déverbaux en -age, -ment ou -ation (le verbe correspondant existe mais n'est pas toujours attesté, néol. d'aut. princ.) :
mansardage, subst. masc. (de l'adj. mansardé). « Action d'enlever la disposition en mansarde de; état qui en résulte ». Le démansardage des pièces formant le grenier (GONCOURT, Journal, 1894, p. 1685)
musclage, subst. masc. « Action de relâcher les muscles; détente, décontraction musculaire ». Tout en procurant au chanteur et à l'auditeur une impression de détente, de démusclage (Arts et litt., 1935, p. 3610)
2. Domaines prof. spécialisés. Dé- + subst. + -er, -iser ou -ifier (et leurs subst. dér. en -age, -ation). [Pour exprimer une action plus complexe, p. ex. extraire, isoler, supprimer ou faire diminuer de volume un corps, une matière]
a) CHIM., PÉTROCHIMIE et INDUSTR. DU PÉTROLE.
[Le rad. subst. désigne un corps chim. qu'on veut isoler ou extraire] :
benzolage, subst. masc. « Action de débenzoler, d'extraire le benzol contenu dans le gaz de houille » (cf. QUÉRET, Industr. gaz, 1923, p. 274)
butaniser, verbe trans. « Extraire le butane contenu dans un produit pétrolier » (cf. E. SCHNEIDER, Charbon, 1945, p. 318)
nitrification, subst. fém. « Action de dénitrifier, d'enlever l'azote ou ses dérivés de ». Il s'agit d'une dénitrification des sols, qui correspond à une perte d'azote (J. phys. et Radium, Chim. phys., 1935, p. 23).
samination, subst. fém. « Action de désaminer, de priver une molécule organique de sa fonction amine » (cf. Hist. gén. sc., t. 3, vol. 2, 1964, p. 617)
b) MÉD. et PHYSIOL.
globulisation, subst. fém. « Diminution progressive des globules rouges dans le sang (anémie) » (attesté ds Lar. 19e Suppl. 1890-Lar. encyclop. et QUILLET 1965)
toxication, subst. fém. « Élimination naturelle des toxiques par un organisme physiologique » (attesté ds Lar. encyclop. et ROB. Suppl. 1970). Rem. Ne pas confondre avec désintoxication.
c) Autres domaines techn. (les subst. sont en -age ou -ation pour l'action, en -euse pour les machines) :
laitage, subst. masc. « Action de délaiter, d'enlever le petit lait de ». Rem. Le synon. laitement, subst. masc., est attesté ds Lar. 19e Suppl. 1890-Lar. Lang. fr., ROB. et QUILLET 1965
laiteuse, subst. fém. « Machine à délaiter le beurre » (attesté ds BESCH. 1845, Nouv. Lar. ill.-Lar. Lang. fr., LITTRÉ, DG et ROB.)
rader, verbe intrans. mar. « S'éloigner de la rade, du mouillage, à cause du mauvais temps ». Obligé de dérader, Colomb chercha en vain un abri dans le voisinage et n'ayant plus que trois vrais marins à bord, il dut revenir à son précédent mouillage (CHARCOT, Chr. Colomb, 1928, p. 190). Rem. On rencontre ds la docum. lerade, subst. fém. néol. « Dérive ». Des écumes de fleurs ont bercé mes dérades Et d'ineffables vents m'ont ailé par instants (RIMBAUD, Poés., 1871, p. 130)
3. Dé- + verbe trans. (le verbe simple anton. existe). Type : verrouiller/verrouiller (cf. infra C) :
cadenasser, verbe trans. « Enlever un cadenas à (qqc.) pour l'ouvrir ». Décadenasser une porte, une malle. Anton. cadenasser. Venez boire le coup, les gars, dit Papadakis en décadenassant le capot pour descendre dans sa cambuse (CENDRARS, Bourlinguer, 1948, p. 176)
ralinguer, verbe trans., mar. « Enlever les ralingues de; déchirer ». Déralinguer une voile. Anton. ralinguer. La hanche de tribord était défoncée, les mâts tronqués, la voiture déralinguée (HUGO, Travaill. mer, 1866, p. 224). Rem. Balzac parle de ralinguage comme d'un mot barbare (cf. BALZAC, Œuvres div., t. 2, 1850, p. 569)
B.— Dé- formateur de termes indiquant la séparation, l'éloignement.
1. Verbes. Dé- + subst. désignant un contenant ou un lieu + -er ou dé- + verbe :
pocher, verbe trans., vx, fam. « Tirer de sa poche », et au fig. « débourser ». Il [le duc] vivait suivant les préceptes de la philosophie la plus maigrelette (...) il ne dépochait que des piécettes (MORAND, Fin de s., 1957, p. 175)
désalper, verbe trans. Région. (Alpes fr. et de Suisse). Descendre de l'alpage avec le troupeau à la fin de l'estivage. Anton. alper. Désalpe, subst. fém. Région. (id.). Descente de l'alpage à la fin de l'estivage. Avec la fin du mois de septembre, la désalpe commence. Dans un bruit de sonnailles, les bêtes qui ont estivé sur les pâturages jurassiens sont ramenées en plaine (Tribune-Le Matin, Lausanne, 27 septembre 1976)
2. Adjectifs :
réistique, adj., psychol., rare. [En parlant de la pensée, dans la schizophrénie] « Qui s'écarte du réel, non adapté au réel ». Synon. déréel (POROT 1960; cf. autiste, autistique). La peur de l'action entraîne (...) l'imagination déréistique vers l'obsession d'un absolu sans contenu et sans effets (MOUNIER, Traité caract., 1946, p. 717). Le droit de traiter causalement le rêve et les symptômes névrotiques est lié à leur défaut d'objet, à leur caractère « déréistique » [selon une expression de Bleuler] (RICŒUR, Philos. volonté, 1949, p. 371)
C.— Dé- formateur de verbes indiquant une action contraire.
1. [Dé- s'adjoint au verbe trans. simple : murer/murer; il peut s'ajouter à un autre préf. (a-, en-, in-) ou à leurs subst. dér. : désengrenage/engrenage: ]
désasservir, verbe trans. « Libérer de l'asservissement ». Anton. asservir. L'« évangélisme » gidien (...) ramène tout au « vivant désordre », goûté comme la suprême félicité, comme l'entrée même dans « le royaume de Dieu », cette « joie éparse » qui baigne la « terre désasservie » (MASSIS, Jugements, 1924, p. 65)
désenchevêtrer, verbe trans. Synon. démêler; anton. enchevêtrer. Je corrige, enchevêtre, désenchevêtre, délace, entrelace, repars (COCTEAU, Machine infern., 1934, p. 83). Au fig. Ici, ce soir, à mon bureau, sachant l'imbroglio de vivre, je désenchevêtre les raisons pourquoi la chose était charmante (COCTEAU, Potomak, 1919, p. 224)
désencroûter, verbe trans. [Surtout au fig.] « Faire sortir de ses préjugés, de ses habitudes ». Anton. encroûter. Les temps de chambardement ont ceci d'avantageux qu'ils vous désencroûtent (ARNOUX, Roi, 1956, p. 92)
paralyser, verbe trans. « Supprimer la paralysie ». Anton. paralyser. L'expérience des membres paralysés et déparalysés « à la voix du magnétiseur » (JOUY, Hermite, t. 4, 1813, p. 150)
tisser, verbe trans. « Défaire un tissu, un tissage ». Anton. tisser. En détissant à la main fil par fil, on constate que les fils de trame se séparent beaucoup plus aisément du tissu que les fils de chaîne (THIÉBAUT, Fabric. tissus, 1961, p. 62). P. métaph. Le cœur des mères doit tisser, détisser, recoudre, découdre ses sacrifices, pour rien, pour le bon plaisir de la mort (MALÈGUE, Augustin, t. 2, 1933, p. 338)
tricoter, verbe trans. « Défaire un tricot ». Anton. tricoter. Alexis (...), tendait les mains pour dévider la laine détricotée (TRIOLET, Prem. accroc, 1945, p. 224)
2. [Dé- peut permuter avec une autre prép. à valeur anton.]
a) [Avec a-, type : croître/accroître; tacher/attacher.]
bêtir, verbe trans. « Ôter le caractère bête, rendre moins bête ». Anton. abêtir. Vous en avez des jolis sous! Il n'y a que ça qui débêtit le monde (RENARD, Nos frères far., 1910, p. 21)
Rem. La lang. mod., pour former le contraire d'un verbe à préfixe a-, préfère généralement laisser le préfixe et le faire précéder de dés- : désamorcer, désapprouver, désaccorder (d'apr. DUPRÉ 1972)
b) [Avec en-, type : terrer/enterrer; brayer/embrayer; boîter/emboîter; se pêtrer/s'empêtrer; courager/encourager]
poisonner, verbe trans., au fig., fam. « Débarrasser de ». La fatigue des dernières séances m'avait tellement dégoûté de cette grande bête de toile... que je me trouvais payé de mes peines par la seule satisfaction d'être enfin dépoisonné d'elle (COURTELINE, Ah! Jeun., Henriette, 1888, p. 117)
c) [Avec in-, type : gurgiter/ingurgiter (sens d'éloignement, d'extériorité)] :
vaginer, verbe trans., biol. « Déployer vers l'extérieur ». Anton. (s')invaginer. Un étroit sac invaginé (...) se dévagine brusquement, entraînant dans sa cavité nouvelle le reste du corps (CAULLERY, Embryol., 1942, p. 77). L'étoile de mer (...) ouvre de force les écailles de l'huître et lui introduit son propre estomac qu'elle dévagine (CLAUDEL, Journal, Paris, Gallimard, t. 2, 1944)
3. [Dé- en concurrence]
a) [avec désen- pour certains verbes commençant par en- (peut permuter avec en-), type : brayage/désembrayage; clouer/désenclouer; mancher/désemmancher; mailloter/désemmailloter; plumer/désemplumer; dessabler/désensabler]
baller /désemballer. Anton. emballer. Deux ou trois douzaines de petits cadavres désemballés, bientôt appelés à revivre (ARNOUX, Zulma, 1960, p. 126)
prisonner /désemprisonner, verbe trans., vx, rare. « Faire sortir de prison, libérer ». Anton. emprisonner. Commandant... je viens vous déprisonner [vous ouvrir la porte de votre appartement] (SUE, Myst. de Paris, 1842-43, p. 317). Au fig. L'agitation de ses longues oreilles [de l'âne] (...), me disait le bonheur qu'il avait de se sentir libre, déprisonné de sa souffrance et de son infirmité (A. DAUDET, R. Helmont, 1874, p. 58)
vaser, désenvaser, verbe trans., a) technol. « Débarrasser de la vase », b) « sortir de la vase ». Anton. envaser. Emploi pronom. En un hymne à la vie, les grenouilles se dévasant remontaient à la surface de l'eau et célébraient leurs noces avec la lumière du jour (GUÈVREMONT, Survenant, 1945, p. 185). vasement, subst. masc. « Action de dévaser ». Dévasement d'un port. Ostende (...) dont on assura la libre entrée par le dévasement de son cheval (LAS CASES, Mémor. Ste-Hélène, t. 2, 1823, p. 259)
Rem. 1. La forme cour. est avec dé-, avec une nuance de sens, p. ex. dessabler « enlever le sable de » a pour anton. sabler; désensabler « tirer du sable » a pour anton. ensabler. 2. Pour certains verbes, les deux formes n'ont pas le même sens :
désenvelopper, verbe trans. « Ôter l'enveloppe de » [cf. développer, sens différent] (attesté ds Lar. 19e-Lar. Lang. fr., LITTRÉ, GUÉRIN 1892, ROB. et QUILLET 1965)
désembarquer, verbe trans., mar. [En parlant de pers. ou de marchandises à bord] « Faire sortir du navire avant le départ ou avant l'arrivée » (cf. débarquer, sens différent). Il fallut désembarquer les troupes à moitié chemin (Ac. 1798-1932)
b) [avec désé- (rare). [Pour un verbe commençant par é-]] :
chouer /déséchouer, verbe trans., vx, mar. [En parlant d'un bateau échoué] « Remettre à flot ». La baie était presque à sec, et il ne pouvait pas espérer de déchouer ses chaloupes avant quatre heures du soir (Voy. La Pérouse, t. 3, 1797, p. 198)
pingler /désépingler, verbe trans. « Ôter les épingles de ». Ce général, une main crispée sur la poitrine, son ruban rouge plutôt arraché que dépinglé (D'ESPARBÈS, Ceux de l'an 14! 1917, p. 31). C'est un métier pénible. Défaire des pressions, désépingler des robes en dormant à moitié (ARNOUX, Chiffre, 1926, p. 217)
4. [Dé- formateur d'adj. indiquant un état contraire.] Dé- + part. passé-adj. :
pondéré. « Qui a perdu l'équilibre, la pondération ». Synon. déséquilibré, troublé; anton. équilibré, pondéré. Qui elle [la lune] émeut, elle le trouble, mais il est délicieux de se sentir dépondéré par elle (MAURRAS, Chemin Paradis, 1894, p. 65)
timbré. « Qui a perdu son timbre (en parlant de la voix) ». Voix détimbrée. Anton. timbré. Elle [Bijou] chantait d'une voix détimbrée, pleine de trous, en prenant des attitudes burlesques de femme du monde (CARCO, Montmartre, 1938, p. 151)
D.— Dé- formateur de verbes intrans. indiquant une cessation (employés presque toujours à la forme négative; l'anton. est le verbe simple) :
fumer, verbe intrans., fam. « Cesser de fumer ». Je ne défume pas, j'en ai même l'intérieur du bec avarié (FLAUB., Corresp., 1876, p. 329). Ce bonhomme ne défumait De toute la sainte journée (PONCHON, Muse cabaret, 1920, p. 219)
progresser, verbe intrans., rare. « Cesser de progresser » (cf. régresser). J'ai dit, dans mon discours de réception à l'Académie française, que la jeunesse moderne était victime du culte de la hâte. Parallèlement au progrès des machines, l'âme déprogresse, car elle se repose sur le travail des machines (COCTEAU, Poésie crit. 2, 1960, p. 178)
rager, verbe intrans., fam. « Cesser d'être en rage ». Il ne dérage pas (Ac. 1932). Il ne dérageait pas les deux dernières années, fureurs à tout casser, quand on lui apportait le dîner, quand venait le médecin (AMIEL, Journal, 1866, p. 475)
E.— Dé- formateur de subst. abstr. indiquant une absence, une carence, une privation de qqc. (état) ou un phénomène inverse, une transformation régressive (action). Dé- + subst. (ex. désordre/ordre, chronologie/chronologie) :
cristallisation, subst. fém., littér. « Désagrégation d'un sentiment et, en partic., fait de cesser peu à peu d'idéaliser l'être ou l'objet aimé ». On parle sans cesse de la brusque cristallisation de l'amour. La lente « décristallisation » (...) est un phénomène psychologique qui m'intéresse bien davantage (GIDE, Faux-monn., 1925, p. 988). Je traîne cette angoisse avec moi, dans la triste maison que je ne parviens plus à transfigurer. « Décristallisation » sinistre (MAURIAC, Bloc-notes, 1958, p. 1309)
glaciation, subst. fém., géol. « Recul, récession des glaciers ». Anton. glaciation. Périodes de glaciation et de déglaciation (J.-M. PÉRÈS, Vie océan, 1966, p. 162)
natalité, subst. fém., démogr. et cour. « Baisse du taux de natalité, du nombre des naissances dans un pays ». (Quasi-) synon. dépopulation; anton. natalité (hausse, remontée de la), repopulation. Et on y épargnait ces quarante années de paix armée, et de dénatalité (PÉGUY, Argent, 1913, p. 1238)
désaise, subst. masc., rare, arch. « Absence d'aise, peine morale ». Synon. malaise; anton. aise. Je ne souhaite plus qu'une chose, c'est de ne pas être dénuée de mes désaises et de mes peines (HUYSMANS, Ste Lydwine, 1901, p. 110). Rem. Dans certains cas semblables le préf. a un sens analogue au préf. mal-, mé-(s); p. ex. concert, subst. masc., néol. d'aut., fig. « Désaccord, mésentente ». Ce déconcert entre eux (...) ne se voyait à rien, mais se sentait à tout (MORAND, Fin siècle, 1957, p. 32)
désescalade, subst. fém., néol., art milit. « Ensemble d'opérations stratégiques visant à diminuer ou à supprimer la gravité des mesures militaires ». Anton. escalade. Attesté ds Lar. encyclop. Suppl. 1968-Lar. Lang. fr. et ROB. Suppl. 1970. P. ext. [En parlant d'un engagement diplomatique, de luttes ou tensions pol. internes]
F.— Dé- formateur de néol., notamment de verbes en -iser, indiquant l'action de supprimer un caractère ou une influence, ou une condition, un état.
1. Dé- + subst. + -er ou -iser :
prêtrer, prêtriser (se) vx. « Quitter l'état de prêtre ». Il courut (...), éveiller (...), l'évêque Gobet, pour lui offrir ce qu'il appeloit une couronne civique, et l'engager à se déprêtriser solennellement le lendemain à la barre de la Convention (DESMOULINS, V. Cord., 1793-94, p. 62)
prolétarisation, subst. fém. « Action de (se) déprolétariser; processus d'ascension sociale de membres du prolétariat vers la bourgeoisie » (cf. WILLEMS 1970). La véritable déprolétarisation (...), c'est l'action qui lui permet [à l'homme] de dégager sa valeur personnelle, de l'épanouir et de prendre dans la vie sociale la place que cette valeur personnelle lui mérite (Univ. écon. et soc., 1960, p. 5208)
provincialiser (se) , verbe pronom. « Perdre ses manières provinciales ». Et puis encore j'étais avide de me déprovincialiser et de me mettre au courant des choses, au niveau des idées et des formes de mon temps (SAND, Hist. vie, t. 4, 1855, p. 80)
Rem. En part., le rad. est un nom propre de pers. célèbre :
rousseauiser, verbe trans. « Faire perdre l'esprit, l'influence de Rousseau à ». Dérousseauiser mon jugement en lisant Destutt, Tacite, Prévost de Genève, Lancelin (STENDHAL, Journal, 1801-05, p. 89)
staliniser, verbe trans. « Libérer (les pays de l'Est) de l'emprise autoritaire du régime de Staline ». Déstaliniser un régime, un parti (ROB. Suppl. 1970 et Lar. Lang. fr.)
Rem. Le passage du verbe simple à l'anton. composé peut être accompagné d'un changement d'emploi, p. ex. charlataniser, verbe intrans. (cf. charlataner, rem. 2) devient charlataniser, verbe trans. « Ôter le charlatanisme de ». Il [Gui Patin] veut décharlataniser la médecine (SAINTE-BEUVE, Caus. lundi, t. 8, 1851-62, p. 124).
2. Dé- + adj. + -er ou -iser, [verbes type : dramatiser/dramatique/ dramatiser, spiritualiser;/spirituel/spiritualiser ou dé- + verbe trans. (rad. adj. et subst. dér. en -isation), notamment dans les domaines de la pol., de la civilisation, sociol., relig. : civiliser, déshumaniser, militariser, dans des domaines prof. ou techn. spécialisés : caféin(is)er, monétiser, sensibiliser, désintoxiquer, p. ex. en phonét. : nasal(is)er, vocalisation, en psychol. : culpabiliser, dramatiser :]
désembourgeoiser, verbe trans. « Faire perdre la mentalité, les comportements traditionnels d'un bourgeois ». Anton. embourgeoiser. Curieux petit Jacques... Si bien désembourgeoisé, c'est vrai... L'esprit purgé des habitudes, oui! — sauf de la plus foncièrement bourgeoise de toutes! l'habitude de mettre l'esprit lui-même à la base de tout (MARTIN DU G., Thib., Été 14, 1936, p. 81). Une réserve instinctive me donnait à craindre qu'à l'exemple d'un grand nombre de bourgeois désembourgeoisés, ils ne fussent des intellectuels (COCTEAU, Poésie crit. 2, 1960, p. 154)
désidéalisé, ée, part. passé-adj., néol. d'aut. « Dépourvu d'idéalité ». Les idées calcinées escamotées volatilisées désidéalisées (PRÉVERT, Paroles, 1946, p. 1289)
rationaliser, verbe trans. « Ôter le caractère rationnel de ». Il [le génie] n'a que faire des concepts et chasse la raison. Du même coup, il dérationalise et dénationalise (MASSIS, Jugements, 1924, p. 152)
spiritualiser, verbe trans. « Faire perdre la valeur spirituelle de ». Oui c'est la mort de la contemplation, due ici à la mise en accusation de la réflexion elle-même, qui déspiritualise Gide (DU BOS, Journal, 1927, p. 363). spiritualisation. « Action de (se) déspiritualiser ». La gravité du fait de la déspiritualisation, de la perte du sens de l'éternité, de la disparition de cette valeur spirituelle et éternelle précisément enclose dans la grandeur monumentale (DU BOS, Journal, 1927 p. 93)
Rem. Parfois le néol. peut être issu de rad. différents, p. ex. capitalisation, subst. fém. a) [Rad. capitale] « Action d'ôter à une ville la qualité de capitale ». La décapitalisation de Paris, c'est (...) une diminution du pays (Journ. offic., 8 sept. 1871, p. 3294, 1re col. ds LITTRÉ). Le verbe capitaliser n'est pas attesté; l'anton. simple non plus. b) [Rad. capital, dér. de capitalisation] « Action de faire perdre la valeur de capital à ». Décapitalisation des intérêts composés (Lar. 19e). Le souci de la décapitalisation du pays (BELORGEY, Gouvern. et admin. Fr., 1967, p. 52).
Étymol., morphol. et vitalité. 1. Le préf. dé-, un des plus productifs de la lang. fr., indique que l'action s'opère dans le sens inverse; il est issu de la particule lat. dis- (ou di- devant certaines consonnes) marquant la séparation, la rupture, la division, la négation, et appartient à la compos. pop.; resté dis- en b. lat., il a pris la forme des- ou de- en a. fr. (cf. desrenable 1re moitié du XIIIe s., desraisonnable 1370-72; deciller XIIIe s., devenu dessiller; cf. aussi désappointé de l'angl. disappointed, lui-même de l'a. fr. désappointer). 2. Il se rapproche a) du préf. dis-, di- par son orig. et son sens d'éloignement au fig., d'écart (cf. ménager [au fig., fam.]; raisonner, divaguer, extravaguer; désunir, disjoindre; désaccord, dissonance). b) Du préf. mal-, mé- (cf. déshonnête, malhonnête), ce qui explique la valeur péj.-dépréc. qu'il a prise, notamment dans la lang. arg. (cf. guenillé, gingandé, penaillé; veine, malchance). 3. Il se forme le plus souvent à partir d'un verbe simple pour indiquer l'action contraire (verbes ou subst. d'action ou d'état). 4. Il a fonctionné très tôt par substitution d'un préf. anton. (cf. river2 de arriver, rouiller de enrouillé « rouillé », sorption de absorption, tacher de attacher, toxication de intoxication); il s'oppose très souvent au préf. en (em)- (encrasser/crasser, emménager/ménager), au préf. in- (injecter/jecter), au préf. re-, rem-, ren- (mailler/remmailler), plus rarement au préf. a- (accrocher/crocher). 5. On rencontre souvent des verbes doublets (quasi-)synon., avec dé- seul ou adjoint au préf. en- (brayer, désembrayer), au préf. a- (grafer, désagrafer), plus rarement au préf. é- (pingler, désépingler); mais la forme simple est en gén. la plus vivace et la plus conforme à la tradition (plumer a supplanté désemplumer). 6. Dans certains cas la constr. avec le seul préf. dé- donne un sens différent de celle avec deux préf. (désa-, désen-, désin-) : toxicationdésintoxication; barquerdésembarquer; marrerdésamarrer. 7. Il s'adjoint parfois à un subst. rad. d'a. fr. (cf. déshérence de hoir « héritier »; dessiller de ciller « coudre les paupières d'un oiseau de proie »). 8. Il peut s'adjoindre à un préf. lat. ou gr. d'orig. sav. (dé- + oxy- dans désoxyribonucléique (Pt ROB.). 9. Il se forme surtout sur un rad. verbe, puis, pour les néol. princ., sur un adj. pour créer de nombreux verbes en -er et surtout en -iser ( + vitalvitaliser; dé- + vitaminevitaminer, vitaminiser), notamment dans les domaines de la pol., de la diplom., de la civilisation, en relig., sociol., psychol., écon., phonét., et dans de nombreux domaines techn., industr. ou non; enfin en arg. et dans la lang. cour. où les créations verbales foisonnent. 10. Parfois l'anton. de base n'existe pas (désodoriser, caféiné). 11. Parfois se forme un nouveau verbe en doublet avec le premier (mystifier, mythifier; désassocierdissocier). 12. Le verbe peut prendre des emplois nouveaux (désépaissir une sauce, désépaissir des cheveux; désenrayer une roue, désenrayer une arme à feu; désinvestir une place-forte, désinvestir des capitaux, désinvestir une activité (psychanal.); désapprovisionner une arme à feu, compte en banque désapprovisionné. 13. « Le sens d'éloignement ne se retrouve pas dans la formation de nouveaux mots » (DUB.).
Prononc. et Orth. a) Dés- : [dez-] par euphonie devant voyelle et h muet : désagréable, désengrenage, déshydraté, désordre, désunir. À la fin du XVIIe s., Hindret recommande de prononcer [e] fermé en [] muet : [dzabyze] pour désabuser, [] pour désagréable, [] pour désavantage (cf. BOURC.-BOURC. 1967, § 92). b) Dé - : [de-] devant consonne et h d'orig. germ. : débander, défigurer, délacer, déhancher, déharnacher. Devant la consonne s, quand elle fait partie du rad. et qu'elle se trouve en position intervocalique il y a redoublement de s pour conserver à cette consonne sa sonorité sourde. Il n'y a pas d'accent aigu dans la graph. : dessangler, desseller, dessertir. Il y a des exceptions à cette règle de redoublement de s avec l'absence de l'accent aigu, noter qu'il s'agit de néol. : désensibiliser, désolidariser que R. THIMONNIER, Principes d'une réforme rationnelle de l'orth. (inédit), 1967, p. 22, 23, aimerait trouver écrits : dessensibiliser, dessolidariser. Devant ss la prononc. est normalement [] ouvert, mais l'initiale dess- subit dans ce cas l'influence du préf. [de-] devant les autres consonnes et l'on prononce [e] fermé : [], [desale] pour dessaisir, dessaler, etc. Noter cependant que LITTRÉ transcrit avec [] ouvert : dessabler, dessaisir, dessaler, dessécher, desserrer, desservir. LAND. 1834 ne donne [] ouvert que pour desserrer (sur desserre où il y a harmonisation vocalique []). Ces rem. valent aussi pour l'initiale non préf. dés-, dé- : désir, dessein, destin, défendre. Bbg. DUB. Dér. 1962, p. 32 (s.v. détoxication). — GALL. 1955, p. 366. — KÖNIG (W.). Die Präfixe dis-, de- und ex- im Galloromanischen. Berlin, 1934. — LA LANDELLE (G. de). Le Lang. des marins. Paris, 1859, pp. 227-228; p. 405 (s.v. déralinguer). — PETER (M.). Über einige negative Präfixe im Modernfranzösischen als Ausdruck für die Gegensatzbildung. Romanica helvetica. 1949, t. 32, pp. 72-114. — QUEM. Fichier (s.v. débenzolage, décristallisation et désembourgeoiser). — QUEM. 2e s. t. 3 1972 (s.v. défumer et dénatalité). — RUNKEWITZ (W.). Zur Wortbildung in der französischen Pressesprache der Gegenwart. Beitr. rom. Philol. 1967, t. 6, n° 2, pp. 358-366. — SCHIFKO (P.). Semantisch-syntaktische Funktionen des Präfixes dé- im modernen Französisch. In : [Mél. Gossen (C. T.)]. Bern-Liège, 1976, t. 2, pp. 794-825. — SCHMIDT (H.). Fr. vivant. Praxis. 1970, t. 17, p. 188 (s.v. désescalade). — VIDOS (B. E.). Archivum Romanicum. 1930, t. 14, p. 141 (s.v. dénerver). — WIND 1928, p. 123 (s.v. dénerver).
II.
DÉ-2, DÉS-, DES-, préf.
Préf. issu de la particule lat. de-, qui en compos., pouvait donner au mot simple une valeur perfective marquant l'intensité (ex. mirordemiror), et qui en fr. indique le renforcement d'une action (valeur augmentative, intensive) dans les verbes qu'elle sert princ. à former.
A.— [Le verbe simple existe] (dé- + verbe) :
bagouler (dé- + a. fr. « bagouler »)
battre (dé- + battre, au XIIIe s. « battre fortement »)
bouger, verbe intrans. (à la forme négative). « Bouger ». Cependant l'archevêque, dans ces premiers temps, ne débougeait pas de Port-Royal (SAINTE-BEUVE, Port-Royal, t. 4, 1859, p. 219)
bouillir (dé- + bouillir)
cesser, verbe trans. indir. (à la forme négative). « (Ne pas) cesser (de), (ne pas) s'arrêter (de) ». Bavard, bavard de telle sorte qu'il n'a pas décessé de parler depuis la soupe jusqu'au dessert (GONCOURT, Journal, 1891, p. 157). Il n'a pas décessé de pleuvoir (GIDE, Journal, 1927, p. 862). Emploi abs. Ici aussi. La pluie n'a pas décessé que c'matin (BARBUSSE, Feu, 1916, p. 114)
chasser (dé- + chasser). « Chasser, expulser »
couler (dé- + couler)
couper (dé- + couper). « Couper en morceaux »
faillir (dé- + faillir)
goutter (dé- + goutter)
laisser (dé- + laisser). « Laisser complètement, abandonner »
laver ( + laver). « Enlever avec de l'eau; imbiber d'eau »
manger (dé- + manger). « Ronger »
mener (se) (dé- + mener)
nombrer (dé- + nombrer, mais en lat. denumerare)
partager (dé- + partager)
passer (dé- + passer)
tailler (dé- + tailler). « Couper en morceaux »
tenir (dé- + tenir, d'apr. lat. detinere)
tirer (dé- + tirer)
tranger (dé- + a. fr. estrangier « écarter, éloigner », de l'adj. e(s)trange), verbe trans., hortic., vx. « Chasser les petits animaux nuisibles aux plantes et aux cultures ». Il faut détranger les mulots, les taupes (Ac. 1835, 1878). Attesté en outre ds BESCH. 1845, Lar. 19e-20e, LITTRÉ, DG, GUÉRIN 1892 et QUILLET 1965
verser (se) (dé- + verser)
B.— [Le verbe simple n'existe pas] (dé- + subst.) :
visager (dé- + visage, rad. de envisager). « Regarder avec insistance »
Vitalité. 1. L'élément formant a été plus vivace par mode d'empr. au lat. que par mode de compos. en fr., soit en lat. class. : décurrent (lat. currere « courir », decurrere « parcourir d'un bout à l'autre un espace »); déflagration (lat. flagrare « brûler », deflagrare « brûler entièrement, se consumer »); délimiter (lat. limitare « entourer de bornes », delimitare); démontrer (lat. monstrare « montrer », demonstrare « faire voir, démontrer »); dénier (lat. negare « dire non », denegare « nier fortement, refuser »); déperdition (lat. perdere « perdre », deperdere « perdre au point d'anéantir, perdre complètement, sans rémission »); déréliction (lat. relinquere « laisser en arrière », derelinquere « abandonner complètement, délaisser »); détoner (lat. tonare « tonner », detonare « tonner fortement »), soit en b. lat. ou en lat. médiév. : décadence (lat. cadere « tomber », decadere « tomber en ruine »); décalvant, ante (lat. decalvans, de decalvare « rendre chauve, tondre »), adj., méd. « Qui provoque la calvitie ». Pelade décalvante (QUILLET Méd. 1965, p. 157). Rem. ROB. Suppl. 1970 enregistre le subst. fém. décalvation « chute des cheveux »; décevoir (lat. capere « prendre », decipere « attraper, tromper »); décoction (lat. coquere « cuire », décoction « action de faire bouillir »). 2. Il existe pour certains verbes des cas d'homon. interne, à la suite de la formation à partir des deux préf. différents dé-1 et dé-2, l'un privatif, l'autre intensif : dépister1 (lat. de-). « Rechercher la piste de »; dépister2 (lat. dis-). « Faire perdre la piste »; dériver2 (lat. derivare); dériver3 (substitution du préf. a-, arriver/dériver); desservir1 (lat. deservire); desservir2 (préf. des-2 + servir).
Prononc. et Orth. Cf. Dé-1. Bbg. PETER (M.). Über einige negative Präfixe im Modernfranzösischen als Ausdruck für die Gegensatzbildung. Romanica helvetica. 1949, t. 32, pp. 82-85. — SCHIFKO (P.). Semantisch-syntaktische Funktionen des Präfixes dé- im modernen Französisch. In : [Mél. Gossen (C. T.)]. Bern-Liège, 1976, t. 2, pp. 818-823.

1. de-, dé-, des-, dés-
Élément, du lat. dis- (ou di- devant certaines consonnes), indiquant l'éloignement, la négation, la privation, la séparation et entrant dans la formation de nombreux termes. Ex. : débâillonner, déboisement, décolorer, dénuder, dépourvu, désapprobation, dératiser, désillusion, desserrer…
REM. Ce préfixe très productif sert à former des mots éphémères (noms et verbes), d'un usage souvent individuel. Ex. : déblanchir, débleuir, défanatiser, désembrumer, désidentifier (1973, in D. D. L.). Dans un nom : débretonnisation (le Nouvel Obs., 2 mars 1981, p. 46).
1 Elle pleure; ses yeux ne débouffissent pas.
J. Renard, Nos frères farouches, Ragotte, in Œ., t. II, Pl., p. 369.
2 (…) il semble bien qu'un commerçant déchaussé et déchaussetté penché sur ses arpions se met dans une situation inférieure vis-à-vis du client.
R. Queneau, le Dimanche de la vie, p. 159.
3 (…) décuitez-le (dessoûlez-le) en temps utile, à grands coups de torchon mouillé dans le nez, en lui faisant boire un verre d'Eno's ou de café au vitriol (…)
Boris Vian, Vercoquin, p. 30-31.
4 Elle écrit : « D'abord des poèmes, pour “désocialiser” le sens des mots; puis, avec ces mots, des nouvelles. »
S. de Beauvoir, la Force de l'âge, p. 439.
5 (…) les cheveux désondulés, à la pointe desquels frissonnaient encore la raclure légère d'un drap, le duvet d'un oreiller (…)
O. Mirbeau, le Journal d'une femme de chambre, p. 49.
6 Il se leva et dessiégea son épouse sans ménagements.
R. Queneau, Loin de Rueil, p. 102.
7 Pour répondre aux exigences de la situation, on cherche des idéologies nouvelles. On comprend qu'il n'est pas possible de vivre sur le fonds américain des années 1950 à 1960; désidéologisation, résolution de plus en plus harmonieuse des tensions, fin des classes.
Henri Lefebvre, la Vie quotidienne dans le monde moderne, p. 183.
————————
2. de-, dé-, des-, dés-
Élément, du lat. de-, qui a une valeur intensive (achèvement, renforcement de l'action) et entre principalement dans la formation de verbes. Ex. : débagouler, découper, délaver, etc.

Encyclopédie Universelle. 2012.