mener [ m(ə)ne ] v. tr. <conjug. : 5> I ♦ Faire aller (qqn, un animal) avec soi. A ♦ MENER À, EN, DANS; MENER (et inf.) .
1 ♦ Conduire en accompagnant. ⇒ emmener. « nous allons mener les enfants à l'Exposition » (Duhamel). « on menait les écoliers baigner tous les jeudis » (Chateaubriand). Mener qqn en bateau.
2 ♦ Faire avancer (un animal) en l'accompagnant. Mener les bêtes aux champs. Bêtes que l'on mène à l'abattoir. Mener paître les moutons. « Le vieux mène son chien promener » (Camus). Il mène promener son chien. Fig. Mener qqn en laisse, à la baguette, par le bout du nez.
3 ♦ Conduire en exerçant un commandement, une influence. « Le vieux colonel menait ses troupes au feu » (Mac Orlan). « Vous voulez mener la France à la guerre » (Martin du Gard). ⇒ entraîner.
B ♦ MENER QQN, QQCH.
1 ♦ Être en tête de (un groupe, un cortège, une file). « la farandole menée par un gars de Barbantane » (A. Daudet). Mener le deuil. Mener la danse, le bal. Mener le jeu, la partie.
♢ Absolt, sport Mener (le peloton) pendant un tour. Mener deux à zéro : avoir à la marque un avantage de 2 à 0. — Être mené : être devancé. Notre équipe est menée par deux buts à un.
2 ♦ Fig. Diriger, commander. « Dans les jeux, je ne prétendais mener personne, mais je ne voulais pas être mené » (Chateaubriand). Se laisser mener. — L'intérêt mène le monde. ⇒ gouverner, guider. « Les idées mènent le monde » (Renan). « Le profit n'est pas toujours ce qui mène l'homme » (A. Gide).
II ♦ Faire aller (une chose) en la contrôlant.
1 ♦ Faire marcher, faire fonctionner. ⇒ conduire, 2. piloter. « Ceux qui menaient le navire » (Loti). Fig. Mener la barque.
2 ♦ Fig. Faire avancer, faire évoluer sous sa direction. Mener deux affaires de front. L'inspecteur mène l'enquête. Mener une négociation. « il faut mener nos affaires rondement » (Vigny). « Le docteur dut mener l'opération très vite » (Duhamel). « Une campagne menée avec énergie » (Romains). — MENER À... Mener une chose à bonne fin, à bien, à terme. ⇒ exécuter.
♢ La vie que l'on mène. Mener sa vie comme on l'entend. « Je mènerai joyeuse vie » (Loti). Mener la vie dure à qqn. Mener grand train, grand bruit, grand tapage. Ne pas en mener large.
III ♦ (Choses) Faire aller (qqn) d'un endroit à un autre.
1 ♦ Transporter. Le tramway « qui le mènerait directement chez la papetière » (Romains).
2 ♦ Guider vers tel lieu. Ses empreintes nous ont menés jusqu'à lui.
3 ♦ Permettre d'aller d'un lieu à un autre. « Une rue, puis une autre le menaient [...] vers la petite place » (Green). Ce chemin ne mène nulle part. Tous les chemins mènent à Rome. Fig. « Le journalisme mène à tout, à condition d'en sortir » (Janin). « L'esprit sert à tout, mais il ne mène à rien » (Talleyrand). — Cela peut vous mener loin, plus loin que vous ne pensez, avoir pour vous des conséquences lointaines qui risquent d'être fâcheuses. C'est une somme qui ne vous mènera pas loin, qui ne fournira pas longtemps à vos besoins. Cela ne nous mène à rien, n'avance pas nos affaires. Dieu sait où tout cela va nous mener ! quelles seront les conséquences.
IV ♦ Géom. Tracer. Mener une parallèle à une droite.
● mener verbe transitif (latin populaire minare) Conduire, emmener quelqu'un, un animal, un véhicule, au lieu où il doit se rendre : Mener les bêtes au pâturage. Mener la voiture au garage. Je vous mènerai à la gare en voiture. Donner accès à un lieu en y aboutissant ; transporter d'un lieu à un autre : Cette route vous mènera à la plage. En parlant d'un indice, d'une marque, diriger quelqu'un, le guider vers tel lieu : Ces empreintes nous ont menés jusque-là. Être devant, en tête : Mener le peloton. Diriger, commander quelqu'un, un groupe, une organisation, etc. : Il mène bien l'entreprise. Elle le mène par le bout du nez. Faire parvenir quelqu'un, quelque chose à un certain état, le conduire, l'amener à agir de telle ou telle manière : Cette politique nous mène au désastre. Diriger le cours, le déroulement d'une action, d'une progression, etc. : Mener un débat. Il a bien mené sa carrière. Suivi d'un nom, avec ou sans article, équivaut à un verbe simple : Mener une enquête (= enquêter). Mener joyeuse vie (= vivre joyeusement). Chasse En parlant du chien courant, poursuivre un animal en criant sur la voie. Chorégraphie Conduire une danse, un déplacement en formation. Équitation Conduire, en guides, des attelages. Mathématiques Construire effectivement ou mentalement, généralement en parlant de droites ou de plans. Mécanique Commander, transmettre le mouvement à. (Par exemple, faire mener un pignon par une roue.) ● mener (citations) verbe transitif (latin populaire minare) François de Salignac de La Mothe-Fénelon château de Fénelon, Périgord, 1651-Cambrai 1715 L'homme s'agite, mais Dieu le mène. Sermon sur la vocation des gentils ● mener (difficultés) verbe transitif (latin populaire minare) Conjugaison Attention à l'alternance e/è : mener ; je mène, il mène, mais nous menons ; il mènera ; qu'il mène mais que nous menions ; mené. Construction L'impératif présent suivi d'un pronom complément à la première personne et du pronom y (mène-m'y, menez-m'y) est grammaticalement correct, mais reste inusité pour des raisons d'euphonie. On dit : mènes-y-moi, menez-y-moi. Recommandation Éviter les barbarismes mène-moi-z-y et menez-moi-z-y. ● mener (expressions) verbe transitif (latin populaire minare) Mener une vie + adjectif ou complément, vivre de telle ou telle façon : Mener une vie de fou. Mener quelque chose à bonne fin, à son terme, le faire aboutir. ● mener (synonymes) verbe transitif (latin populaire minare) Conduire, emmener quelqu'un, un animal, un véhicule, au lieu où...
Synonymes :
- conduire
En parlant d'un indice, d'une marque, diriger quelqu'un, le guider...
Synonymes :
- guider
Être devant, en tête
Contraires :
- suivre
Diriger, commander quelqu'un, un groupe, une organisation, etc.
Synonymes :
Faire parvenir quelqu'un, quelque chose à un certain état, le conduire...
Synonymes :
- conduire
- entraîner
- pousser
Diriger le cours, le déroulement d'une action, d'une progression, etc.
Synonymes :
- conduire
- diriger
● mener
verbe intransitif
Avoir l'avantage sur son adversaire : Qui est-ce qui mène à la marque ?
mener
v. tr.
rI./r Conduire (quelque part).
d1./d Faire aller (quelque part) en accompagnant. Mener les bêtes au pâturage.
|| (Sujet n. de chose.) Sa promenade le mena jusqu'au fleuve.
— Fig. Cette affaire peut vous mener loin, peut avoir des conséquences graves. Syn. guider, conduire.
d2./d (Sujet n. de chose.) Aboutir. Ce chemin ne mène nulle part.
— Fig. La débauche mène à la misère.
|| Prov. Tous les chemins mènent à Rome: on peut atteindre un but par de nombreux moyens.
d3./d Tracer. Mener une droite d'un point à un autre.
rII./r Diriger, être à la tête de.
d1./d Conduire, diriger (qqch). Mener une embarcation.
— Par ext. Mener sa vie comme on l'entend.
|| Mener à bien, à mal une affaire, la faire réussir ou échouer.
|| Mener la danse: diriger une affaire, un mouvement.
|| Mener le deuil: marcher en tête du cortège d'un enterrement.
|| SPORT Mener le train: tenir la tête, dans une course.
d2./d Conduire, diriger (qqn, des personnes). Le commandant sait mener son équipage.
d3./d Exercer un ascendant sur (qqn), faire agir. Il le mène par le bout du nez, il en fait ce qu'il veut.
|| Mener la vie dure à qqn, lui rendre la vie difficile, pénible, par un excès d'autorité, d'influence.
|| Fam. Mener qqn en bateau, le berner.
d4./d v. intr. SPORT être provisoirement en tête. Mener par deux points à zéro.
⇒MENER, verbe trans.
A. — [Constr. avec divers types de compl. locatifs; l'idée principale est celle de changement de lieu]
1. a) [Le suj. désigne une pers.]
) [Constr. avec un compl. locatif de destination et/ou un compl. locatif de passage, d'origine et/ou un compl. désignant l'instrument du déplacement]
— [Le compl. d'obj. désigne une pers.] Faire aller quelqu'un quelque part en l'y accompagnant, en l'y conduisant (de force ou avec son assentiment). Synon. accompagner (qqn quelque part), amener, conduire, emmener. Mener qqn chez qqn, au bal, au théâtre; mener qqn en prison. Il a mené le docteur ici pour te voir (LOTI, Mon frère Yves, 1883, p. 33). Le chauffeur de Lamblin, qui déjà nous accompagnait à Rafaï, nous mènera en camion jusqu'au point terminus (GIDE, Voy. Congo, 1927, p. 736):
• 1. ... la pauvre Sidoine fut convaincue par le juge d'avoir fait la ribaude et pour ce mise nue sur un âne, tournée du côté de la queue, et ainsi menée par la ville à la mare aux Évés, où elle fut trempée par trois fois.
A. FRANCE, Orme, 1897, p. 213.
♦Mener qqn à qqn. Conduire auprès de quelqu'un. Je veux vous mener un interlocuteur digne de vous (CHÊNEDOLLÉ, Journal, 1824, p. 130).
♦Locutions
Mener qqn à l'autel, devant monsieur le Maire (fam.). Épouser. Suzanne avait été menée à l'église par son promis. Jamais on n'avait vu un plus riche ni un plus beau mariage (KARR, Sous tilleuls, 1832, p. 129).
Mener qqn en barque, en bateau.
— [Le compl. d'obj. désigne un animal] Faire aller un animal quelque part en l'y conduisant. Synon. conduire. Mener le bétail à la rivière (ERCKM.-CHATR., Ami Fritz, 1864, p.55). Aller là-haut soigner les moutons et les mener de chalet en chalet par la trace (PEYRÉ, Matterhorn, 1939, p.80).
♦Mener une vache au taureau (fam.). Faire saillir une vache. Elles ont mené la vache au taureau comme elles ont fait les autres besognes de la ferme (POURRAT, Gaspard, 1922, p. 139).
— Rare. [Le compl. d'obj. désigne un inanimé concr.] Apporter, transporter. Je mène du savon, de la chandelle, des épices, des pièces de tulle, de la chaudronnerie, depuis Lille jusqu'à Arras (ADAM, Enf. Aust., 1902, p.242). Elle manquait rarement la messe. L'hiver, elle y menait sa chaufferette, l'été son ombrelle (COLETTE, Mais. Cl., 1922, p.183).
— [Le compl. d'obj. désigne un procès] Faire se dérouler dans un ou plusieurs lieux. Hier, nous avons mené notre promenade plus loin que d'habitude (M. DE GUÉRIN, Journal, 1833, p. 157). C'est (...) une vaste contre-attaque, menée de l'ouest à l'est sur Fère-Champenoise et ses abords (FOCH, Mém., t.1, 1929, p. 130).
— [P. méton. du suj. et/ou du compl. d'obj.] Le bon marché de la main-d'oeuvre a mené l'industrie d'Angleterre en Écosse (MICHELET, Journal, 1834, p. 140). La tiède attraction des rayons d'un ciel chaud Sur les monts ce matin m'avait mené plus haut (LAMART., Jocelyn, 1836, p. 742).
) [Constr. avec un compl. prép. à désignant un procès accompli ou subi par la pers. désignée par le compl. d'obj.] Faire aller quelqu'un, en l'accompagnant ou en le conduisant, en un lieu où il fera ou subira quelque chose. Mener qqn à la chasse; mener des soldats au feu; mener qqn à la mort. L'innocent qu'on mène au supplice (LAMENNAIS, Paroles croyant, 1834, p. 182). Je l'avais mené à la pêche sur la barquette de Panisse (PAGNOL, Fanny, 1932, I, 1er tabl., 14, p. 59).
) [Constr. avec une prop. inf.; le compl. d'obj. désigne un animé; avec ou sans compl. locatif] Faire aller quelqu'un, un animal quelque part, en l'y accompagnant ou l'y conduisant, pour qu'il y fasse ou qu'il y subisse quelque chose. Le courrier revenu de la gare menait boire son cheval à l'abreuvoir (PESQUIDOUX, Livre raison, 1928, p. 74). Louise se leva pour la mener prendre une douche, lui donner une serviette, de la poudre (TRIOLET, Prem. accroc, 1945, p. 235).
b) [Le suj. désigne un véhicule ou un lieu; avec ou sans compl. d'obj.]
) [Le suj. désigne un véhicule] Transporter quelqu'un, quelque chose (d'un lieu à un autre). Une charrette, sur le chemin de côte, annonça qu'elle menait des barriques vides (COLETTE, Naiss. jour, 1928, p. 56). Attendu à Laruns un cabriolet qui doit nous mener à Louvie (MICHELET, Journal, 1835, p.191).
— Rare. [Constr. avec une prop. inf.] Nous montions dans l'omnibus ou la voiture qui allait nous mener à la gare prendre le petit chemin de fer (PROUST, Sodome, 1922, p.1035).
) [Le suj. désigne un lieu de passage] Permettre d'aller d'un lieu à un autre. Un chemin qui devait le mener plus directement au sommet de la montagne (SUE, Atar-Gull, 1831, p.27). La porte menant du billard à la salle du bar-dancing (PEYRÉ, Matterhorn, 1939, p. 61).
♦Tous les chemins mènent à Rome.
c) Vieilli. Mener qqn avec soi. Faire aller avec soi dans un déplacement comme escorte ou comme compagnie. Synon. emmener, se faire accompagner par (qqn). Il roule sur l'or! Il mène avec lui trois maîtresses et son cuisinier! (FLAUB., Mme Bovary, t.2, 1857, p. 62).
2. Au fig.
a) [Constr. avec un compl. introd. par une prép. locative] Faire passer quelqu'un d'un état à un autre, faire faire quelque chose à quelqu'un. Synon. conduire, entraîner.
) [Le suj. désigne une pers.] Byron (...) se venge en menant à la douleur par la volupté tout ce qui l'approche (CHATEAUBR., Mém., t. 1, 1848, p. 517). Il (...) lui chercherait une carrière et le mènerait vers une vie où l'argent serait une préoccupation seconde (VAN DER MEERSCH, Invas. 14, 1935, p. 297):
• 2. ... plus ils accumulaient de belles promesses, plus les gens sérieux soupçonnaient des pièges, — en quoi ils n'avaient pas complètement tort, car les utopistes eussent mené le monde à des désastres, à la tyrannie et à la bêtise, si on les avait écoutés.
SOREL, Réflex. violence, 1908, p. 201.
) [Le suj. désigne un inanimé] Un découragement qui le menait au suicide (BALZAC, Illus. perdues, 1839, p. 516). Tu vois où me mènent tes conneries. C'est moi qui paie, comme toujours (H. BAZIN, Vipère, 1948, p. 169):
• 3. Ces contractures peuvent, chez certains tempéraments spasmophiles, se généraliser et mener à l'asphyxie ou à la syncope par tétanose globale des muscles respiratoires.
MOUNIER, Traité caract., 1946, p. 195.
— Littér. [Correspond à supra A 1 b] Ce fut Wilfrid Nore qui le premier mit le pied dans la voie menant aux confidences (GOBINEAU, Pléiades, 1874, p. 17). Cet itinéraire c'est déjà celui qui mène Gide des livres et de la science à la vie (RIVIÈRE, Corresp. [avec Alain-Fournier], 1907, p. 15).
) Locutions
— Mener (qqn) loin
♦Entraîner, exposer quelqu'un à faire des actes ou à subir des conséquences fâcheuses. La petite n'avait pas l'âge, à l'époque, c'est peut-être un détournement, ça pourrait le mener loin! (BERNANOS, Soleil Satan, 1926, p. 72):
• 4. Une grande réceptivité se manifeste chez les jeunes — que de starlettes! que de Tarzan! — chez les oisifs, chez les névropathes, et elle peut mener loin: la mort de Rudolf Valentino a provoqué plus de suicides que Werther.
Hist. spect., 1965, p. 14.
En partic. Entraîner à de grandes dépenses. Les maîtresses de maison elles-mêmes (...) allaient flatter toutes ces têtes hurlantes qui aidaient à dévorer l'héritage. Les chevaux menaient plus loin encore (PESQUIDOUX, Livre raison, 1928, p.174).
♦Amener quelqu'un à une condition avantageuse. Dis-lui que cette éducation m'a mené loin (...) et va peut-être me conduire assez haut! (DUMAS père, Halifax, 1842, II, 6, p. 83).
♦Pourvoir longtemps aux besoins ou à la subsistance de quelqu'un. Ces provisions, cet argent peuvent encore nous mener loin (LITTRÉ).
— Ne pas mener (qqn) à grand chose; ne mener (qqn) à rien, nulle part. N'ouvrir aucune perspective, n'apporter aucun résultat bénéfique. Une très-petite ville (...) oubliée dans un fond de province, ne menant nulle part, ne servant à rien (FROMENTIN, Dominique, 1863, p. 67). — (...) Ça ne te mènera pas à grand-chose. — Les métiers ne mènent jamais à rien, dit Nadine avec une soudaine raideur (BEAUVOIR, Mandarins, 1954, p. 171).
b) [Constr. avec une prop. inf. introd. par à] Avoir pour conséquence de faire faire quelque chose à quelqu'un. Synon. conduire. Une ligne qui nous mène à tirer sur le prolétariat est nécessairement mauvaise (MALRAUX, Cond. hum., 1933, p.294):
• 5. Ne commets pas la sottise immense d'entrer dans la vie active par les grandes portes pourvues sur leurs frontons d'inscriptions comme celles-ci: École militaire; Ponts et chaussées; Affaires étrangères; Magistrature. Cela te mènerait tout simplement à être capitaine à quarante ans...
GOBINEAU, Pléiades, 1874, p. 79.
3. GÉOM. Tracer (matériellement ou idéalement). Par un point on ne peut mener qu'une parallèle à une droite (H. POINCARÉ, Valeur sc., 1905, p. 21).
4. P. anal., dans le domaine temp.
a) [Le suj. désigne un inanimé] Faire passer (à un autre moment dans temps ou dans un déroulement temp.). Ô flamme vive! qui luit toujours au fond de notre passé... qui menait enfin aux parties de billes (PESQUIDOUX, Livre raison, 1928, p. 72). Ce développement imprévu [de l'allegro] mène à une coda dont le thème (...) fait revivre (...) le rythme martial du thème (CHANTAVOINE, Symph. Beethoven, 1932, p. 60).
— En partic. Occuper (jusqu'à un certain moment). Ce tohu-bohu de paniers, de sacs de cuir, de corbeilles, toutes ces jupes filant dans le ruissellement des allées, l'occupaient, le menaient jusqu'au déjeuner (ZOLA, Ventre Paris, 1873, p. 728). Ils commentaient les nouvelles du jour, les faits divers et les événements politiques: cela le menait à l'heure du dîner (MAUPASS., Contes et nouv., t. 2, M. Parent, 1886, p. 613).
b) Rare. [Le suj. désigne une pers.] Synon. de porter. L'huissier (...) leur faisait un crédit de six mois que le grand Cointet menait à un an par la manière dont il le soldait (BALZAC, Illus. perdues, 1843, p. 588).
B. —[Sans complément locatif; l'idée principale est celle de direction donnée par qqn/qqc. dans un déplacement]
1. a) [Le suj. désigne une pers.] Diriger dans un déplacement. Synon. conduire.
) [Le compl. d'obj. désigne une pers., un animal] Mener un cheval en main, par la bride; mener qqn par la main. Un petit garçon, menant une vieille aveugle, demandait l'aumône (MICHELET, Journal, 1834, p. 161). Un jouvenceau (...) mène en laisse un lévrier (BERTRAND, Gaspard, 1841, p.54).
— Vieilli. Mener une dame, une demoiselle. Être le cavalier d'une dame, d'une demoiselle (dans une danse, une cérémonie). Au premier coup d'archet, on se place, et chacun mène sa prétendue (COURIER, Pamphlets pol., Pétition pour vill., 1822, p. 136).
) [Le compl. d'obj. désigne un véhicule, un animal de trait] Mener un équipage (vieilli); mener une charrue (vieilli). Les quatre sauvages qui menaient la barque, pris d'une exaltation furieuse, voulaient jeter à l'eau le sorcier (GONCOURT, Journal, 1887, p.698). Un vigneron de Damery, menant par le guidon sa bicyclette (HAMP, Champagne, 1909, p.165). Ces grands chevaux de filles qui (...) mènent leur voiture, fument du gros tabac et engueulent père et mère (COLETTE, Naiss. jour, 1928, p.38).
— Absol. Mener grand train. Madame conduisait seule; elle avait attelé à deux chevaux, elle menait dur au long trot, parfois au petit galop (GIONO, Que ma joie demeure, 1935, p. 378).
— [P. méton. du compl. d'obj.] Conduire (quelqu'un) dans un véhicule. Les claquements du fouet empêchèrent d'entendre le reste. Au train dont on était mené, on eut bientôt rejoint les paysans (SOULIÉ, Mém. diable, t. 2, 1837, p. 102).
♦ARM. Mener battant.
♦VÉN. [En parlant d'un chien, d'un animal] Poursuivre un animal sur sa trace. L'aboi à deux temps du renard qui mène un gibier (GENEVOIX, Raboliot, 1925, p. 10).
b) En partic. Être à la tête d'un groupe (de personnes, d'animaux) pour en diriger le déplacement. Les chameaux d'une caravane passoient lentement à la file, menés par l'âne intelligent qui leur servoit de conducteur (CHATEAUBR., Martyrs, t.2, 1810, p. 130). M. Madinier ne parlait plus, menait lentement le cortège, qui le suivait en ordre (ZOLA, Assommoir, 1877, p. 445).
♦[P. méton. du compl. d'obj.] La ronde des noces allait et venait toujours (...), les deux enfants qu'on mariait menaient le branle (ZOLA, Travail, t. 2, 1901, p. 152).
Mener la danse, le deuil.
♦[P. méton. du suj.] Regarder la longue chaîne de la gavotte tournoyer et courir, menée par la voix aigre des cornemuses (LOTI, Mon frère Yves, 1883, p. 390).
— SPORTS. Être en tête (d'un groupe engagé dans une compétition). Mener le peloton.
♦[P. méton. du compl. d'obj.] Mener la course, le train. Il est toujours plus fatigant [en course vélocipédique] de mener le train que de le suivre (BAUDRY DE SAUNIER, Cycl., 1892, p. 425). La course a été menée tout le long des 2400 mètres par Bikala, monté par Serge Gorli, qui avait bénéficié de la corde au départ (Le Monde, 6 oct. 1981, p. 18, col. 5-6).
♦Absol. Le Kenyan Keino avait pour principe de mener de bout en bout (AMSLER 1971).
P. ext. Être en tête d'un classement, avoir l'avantage au cours d'une partie, d'un match. Mener à la marque. Au 10e round, notre champion menait nettement (Paris-Soir, 24 janv. 1937). Dix minutes après, les Australiens ont pris le large. Ils mènent 24 à 10 (Le Monde, 12-13 juill. 1981, p. 16, col. 2).
♦[P. méton. du suj.] Paris mène par 6 victoires à 0 (Combat, 19-20 janv. 1951, p. 6, col. 5).
c) Rare. [Le suj. désigne un inanimé] Entraîner dans un mouvement. Les lents bateaux plats que mènent tantôt une voile gonflée, tantôt des chevaux percherons (BOYLESVE, Leçon d'amour, 1902, p. 41). Cette roue dentée mène un pignon (Lar. Lang. fr.).
2. P. anal.
a) [Le compl. d'obj. désigne un groupe de pers., une pers.]
) Diriger dans l'accomplissement de quelque chose. Synon. commander, conduire, diriger. Mener un choeur. Un musicien, le chef, menait l'orchestre de son geste (NOAILLES, Nouv. espér., 1903, p.178). Le général de Moltke (...) menait les armées allemandes dans les premières semaines de la guerre (JOFFRE, Mém., t.1, 1931, p.400).
— P. anal. Synon. conduire, diriger, gérer. Mener son ménage, un pays, sa fortune. Alexis (...) passa quelque temps sans autres soins que ceux de son ménage, réglant, vérifiant ses comptes, et, comme il semble, menant sa maison assez mal (MÉRIMÉE, Hist. règne Pierre le Gd ds Journal des Savants, 1864, p.541). Je me mis à lire une revue qui, bien que menée par des jeunes gens, est excellente (A. FRANCE, Bonnard, 1881, p.489).
♦Part. passé en emploi adj. Une affaire de premier ordre que la sienne et bien menée, avec fermeté et bonne humeur (ARNOUX, Crimes innoc., 1952, p. 187).
♦(Bien/mal) mener la/sa barque.
) Faire agir, inspirer les actions (de quelqu'un). Synon. animer, conduire.
— [Le suj. désigne une pers.] Dieu mène le monde. Je rencontrai l'honnête procureur, qui passe pour mener tout le parti noble ici (COURIER, Pamphlets pol., Lettres partic., 1820, p.65):
• 6. Vous considérez les hommes de nos jours comme de grands enfants très dégénérés et très mal élevés. Et, en conséquence, vous trouvez bon qu'on les mène par des spectacles, du bruit, beaucoup de clinquant, de belles broderies et de superbes uniformes qui, bien souvent, ne sont que des livrées.
TOCQUEVILLE, Corresp. [avec Gobineau], 1857, p. 280.
♦Emploi pronom. passif. Nos voltigeurs n'ont pas assez l'esprit militaire; il convient de le leur inculquer. Une compagnie se mène par l'amour-propre (REYBAUD, J. Paturot, 1842, p. 168).
— [Le suj. désigne un inanimé] La folie mène qqn. Où est le zèle de prosélytisme qui agitait et menait les encyclopédistes? (QUINET, All. et Ital., 1836, p. 118). Il n'est mené que par ses dégoûts ou ses antipathies (MASSIS, Jugements, 1923, p. 37).
) En partic. Faire agir de façon autoritaire ou selon sa volonté. Synon. dominer, manipuler, manoeuvrer, régenter. Se laisser mener par une femme. Fausse avec l'apparence de la plus grande franchise, menant son mari comme un sot, elle se moque de toutes femmes qui sont laides (FIÉVÉE, Dot Suzette, 1798, p.142). Depuis que notre reine mène son mari, chaque femme du royaume se croit le droit de régenter le sien (SCRIBE, Bertrand, 1833, II, 2, p.150):
• 7. Le passé était net comme un os de seiche et Dubreuilh, une impeccable victime de la fatalité historique. Oui: eh bien! Henri ne trouvait pas ça satisfaisant du tout; il n'aimait pas penser que d'un bout à l'autre de cette affaire il avait été mené.
BEAUVOIR, Mandarins, 1954, p. 487.
— Loc. fig.
♦Mener qqn à la baguette, à la trique, en laisse.
♦Mener qqn par le bout du nez, par le nez.
b) [Le compl. d'obj. désigne un procès] Être à l'initiative de quelque chose et/ou en diriger le déroulement, l'exécution; avoir une place déterminante dans le déroulement, l'exécution de quelque chose. Synon. conduire, diriger. Mener des débats; mener une affaire tambour battant, rondement, vite. Hélène est ma filleule; laissez-moi mener cette affaire et morigéner la jeune fille (THEURIET, Mariage Gérard, 1875, p. 117). Celui qui a mené la Résistance a, pour en être l'historien, une autorité particulière (BORDEAUX, Fort de Vaux, 1916, p. 181):
• 8. Zola, qui a mené la conversation sur ce sujet, pour nous pomper à propos de son nouveau livre, prétend que l'amour n'est pas un sentiment particulier...
GONCOURT, Journal, 1877, p. 1186.
♦Mener une enquête.
♦Loc. fig.
Mener le branle, la danse, le deuil (de qqc.), le jeu.
Mener la partie. Nous ne paraissions plus mener la partie, et (...) l'ennemi au contraire nous devançait et tentait à nous imposer sa volonté (JOFFRE, Mém., t. 1, 1931, p. 444).
— Absol. J'ai tenté de faire du Dialogue lui-même une manière de ballet dont l'Image et l'Idée sont tour à tour les Coryphées. L'abstrait et le sensible mènent tour à tour et s'unissent enfin dans le vertige (VALÉRY, Lettres à qq.-uns, 1945, p. 190).
— [Dans la lang. de la crit. littér.] Intrigue alertement menée. Ces dialogues [de Dashiell Hammet] , menés de main de maître, sont à en remontrer à Hemingway ou à Faulkner même, et tout le récit mené avec une habileté, un cynisme implacables (GIDE, Journal, 1943, p. 213).
3. Au fig. [Constr. avec un compl. de manière; le compl. d'obj. désigne une pers.]
a) Vieilli. Diriger de telle ou telle manière dans un enseignement, un apprentissage. Mener durement un enfant. Mon hôte voulut bien me donner quelques leçons; moins durement mené, je pus faire des progrès (BALZAC, Lys, 1836, p.75).
b) Synon. de traiter. Bouvier a été assez vertement mené ce matin par le Journal de Genève (AMIEL, Journal, 1866, p.122). Jory avait manqué d'avoir un duel (...) pour un de ses derniers articles du Tambour. C'est qu'il les menait raide, les peintres de quatre sous, les réputations volées! (ZOLA, Œuvre, 1886, p.114).
♦Mener la vie dure à qqn, une vie impossible à qqn. Rendre l'existence pénible pour quelqu'un. Je vous préviens, mon gaillard, que si jamais vous tombez sous ma coupe, je vous mènerai la vie dure (BRUANT 1901, p.153). À croire que ses enfants la martyrisaient, lui menaient une vie impossible! (QUEFFÉLEC, Recteur, 1944, p.184).
C. —[Sans idée de déplacement ni de direction]
1. [Le compl. d'obj. désigne un procès] Assurer l'exécution de quelque chose (généralement qui s'étend dans le temps). Synon. accomplir, faire. Mener une action, une analyse, une étude, une politique, des recherches. Un tel travail ne peut être mené en cinq jours, ni même en cinq années, bien que toute ma vie m'y ait préparé (BARRÈS, Cahiers, t. 3, 1902, p.63). Toutes les mines en effet sont explosées simultanément (...). La perforation doit être menée rapidement, surtout si la marée existe dans la localité (BOURDE, Trav. publ., 1929, p. 240):
• 9. ... je refis plusieurs chapitres des Oiseaux, suppléant à l'inspiration par la volonté. L'Introduction fut achevée et le tout mené presque sans lacune, sauf La Mort, La Chasse, ajournés, et Le Chant, ce grand but du livre, que je réservais.
MICHELET, Journal, 1855, p. 292.
♦Mener le combat.
♦Mener l'assaut, une campagne, la lutte, l'offensive. Ils avaient pensé mener en paix leur assaut contre cette maison isolée à la sortie du bourg (ALAIN-FOURNIER, Meaulnes, 1913, p.130). Le mistral mène à fond son offensive (COLETTE, Pays. et portr., 1954, p.265).
♦Mener campagne. On y menait campagne [au café] contre le naturalisme allemand (Arts et littér., 1936, p. 48-8).
♦Mener à bout, à (son) terme, à bien. Synon. achever, réaliser. Son frère Louis-Napoléon avait eu l'honneur de mener à bien la souscription au grand emprunt sibérien (VOGÜÉ, Mort, 1899, p.225). Il avait jusqu'à présent mené à bout tout ce qu'il avait voulu avec opiniâtreté (MARTIN DU G., Thib., Pénitenc., 1922, p.716).
♦Mener à (sa) fin, à bonne fin.
♦Mener de front, de pair, à la fois. Cette jolie et délicate femme (...) voulait à la fois mener la maternité, le monde et le Chat noir (GONCOURT, Journal, 1887, p. 676). Sur ce grand affluent du Gange, électrification, irrigation, agronomie et industrialisation ont été menées de pair (LESOURD, GÉRARD, Hist. écon., 1966, p. 544).
— Emploi pronom. passif. Au-dessus de la table, l'oncle ne recevait que des sourires. Au-dessous se menait une guerre sournoise (COCTEAU, Enfants, 1929, p.72).
2. [Le compl. d'obj. désigne un comportement; il est obligatoirement qualifié]
— Mener une vie (ou un terme du même paradigme). Synon. de avoir. Quand depuis quarante ans on mène une conduite irréprochable... on n'aime pas à la voir ternir (SUE, Atar-Gull, 1831, p. 24). Depuis six mois, tu veilles, tu te morfonds; tu mènes une vie de séminariste qui a fait des voeux (FROMENTIN, Dominique, 1863, p. 141).
♦Mener (un) train (obligatoirement qualifié). Mener un train de prince. Elle menait grand train, logeait dans un Louvre, tenait le milieu de la chaussée les jours de Longchamp (MURGER, Scène vie boh., 1851, p. 192).
♦Mener grande, joyeuse vie. Vivre luxueusement, joyeusement. L'on (...) menait joyeuse vie; le duc chassait du matin au soir, et la nuit il se plaisait encore à entendre bramer les cerfs (BARANTE, Hist. ducs Bourg., t. 4, 1821-24, p. 41). Les entraîneurs [à Maison-Laffitte] menaient grande vie. Max Lebaudy (...) lavait ses calèches au champagne et organisait des corridas (COCTEAU, Portr-souv., 1935, p. 31).
P. ell., pop. et fam., vieilli. La mener joyeuse. Il paraît qu'on la mène douce et joyeuse, ici (DUMANOIR, A. D'ENNERY, Les Drames du cabaret ds Dict. arg. mod., 1881, p.247).
— Mener un bruit (ou un terme du même paradigme). Synon. de faire. Le bruit infernal que menaient les trompettes (DUMAS père, Monte-Cristo, t. 1, 1846, p. 478). Toute la nuit, les rats ont mené un train d'enfer (TRIOLET, Prem. accroc, 1945, p.12).
♦Mener grand bruit, grand tapage. On menait grand bruit, ce matin. Les chiens aboyaient, les chasseurs préparaient leurs armes (NERVAL, Filles feu, Angélique, 1854, p. 525).
Rem. La docum. atteste qq. constr. où le compl. d'obj. non précédé de l'art. n'est pas qualifié. Son ami, le célèbre traducteur Perrot D'Ablancourt, avec qui il menait jeunesse, le servit fort en cette intrigue (SAINTE-BEUVE, Caus. lundi, t. 5, 1852, p. 279). Cette foule menait sarabande, entraînant avec elle des gens que Raboliot était surpris d'y voir (GENEVOIX, Raboliot, 1925, p. 171).
— Loc., fam. Ne pas en mener large. Ne pas (paraître) être à son aise, se faire petit. Pendant qu'on l'acclamait avec transport, il «n'en menait pas large» et semblait accablé de tristesse (CLADEL, Ompdrailles, 1879, p. 52). V. aussi large III A au fig.
REM. 1. Menant, -ante, part. prés. en emploi adj., technol. Qui entraîne le mouvement de quelque chose. Brin menant. Ils [les arbres de transmission] doivent résister à (...) un effort de torsion produisant un angle de torsion d'autant plus grand que la distance entre la partie menante de l'arbre et la partie menée est plus grande (GORGEU, Machines-outils, 1928, p. 4). 2. Mené, -ée, part. passé en emploi adj. a) Technol. Qui est entraîné par un élément moteur. V. supra rem. 1 ex. de Gorgeu. b)Emploi subst. Anton. meneur. Quelle honte pour les meneurs comme pour les menés! (STENDHAL, Racine et Shakspeare, t. 1, 1825, p. 141).
Prononc. et Orth.:[], (il) mène []. Conjug. change e en è devant syll. muette: je mène, mènerai(s). Att. ds Ac. dep. 1694. Étymol. et Hist. I. 1. Fin Xe s. trans. «accompagner quelqu'un en le dirigeant» (Passion, éd. D'Arco Silvio Avalle, 202); 2.ca 1100 «conduire fermement, avec autorité» ici une armée (Roland, éd. J.Bédier, 211); en partic. ca 1100 «contraindre une personne à aller dans un endroit» (ibid., 3680: E. Bramidonie, qu'il meinet en sa prisun); 3.a)1re moitié XIIe s. «marcher à la tête d'un groupe, d'un cortège; diriger un groupe de danseurs» merrums charoles [deducemus choros] (Psautier Cambridge, éd. Fr. Michel, XIX, 5) cf. début XIIIe s. M.DE SULLY, Homelies, éd. C. A. Robson, 16, 13: les femmes mener les karoles; b)1892 sports «être à la tête de» mener la course (BAUDRY DE SAUNIER, Cycl., p. 440) d'où 1937 id. intrans. «avoir l'avantage» (Paris Soir, supra); 4. ca 1170 «obliger un animal à se rendre dans un lieu en 'y conduisant» (CHRÉTIEN DE TROYES, Erec et Enide, éd. M. Roques, 4859); 5. fin XIIIe s. [ms.] «diriger, entraîner une collectivité vers un état déterminé» (Bible de Hugue de Berzi, éd. F. Lecoy, 797 [var. ms. A]; 6. 1538 «introduire auprès de quelqu'un; donner accès» (EST.). II. 1. Ca 1050 «se livrer à une activité particulière» en partic. grant duel mener «exprimer ostensiblement une grande douleur» (Alexis, éd. Chr. Storey, 241); 2. ca 1100 «régler, assurer le déroulement de quelque chose en vue d'une fin» sa guerre mener (Roland, éd. J. Bédier, 906); 3. ca 1170 «transporter quelque chose» (Rois, éd. E. R. Curtius, III, V, 9, p. 121); 4. 1176-81 «faire avancer un véhicule, en assurer la conduite» (CHRÉTIEN DE TROYES, Chevalier Charrette, éd. M. Roques, 357); 5. a) 1283 «administrer, diriger avec efficacité» ici «faire commerce» (PH. DE BEAUMANOIR, Coutumes Beauvaisis, éd. A. Salmon, XI, §346: sans nule marcheandise mener); b) 1663 «exercer un rôle directeur dans n'importe quel domaine» (MOLIÈRE, École des femmes, I, 1: un sort qui tout mène); 6. 1690 géom. mener une ligne d'un point à un autre (FUR.); 7. 1835 mener grand train «vivre luxueusement» (Ac.). III. 1. 1176-81 «conduire à» La voie... vos mainne au Pont de l'Espee (CHRÉTIEN DE TROYES, op. cit., 2144); 2. a) 1179-85 «engager, entraîner» (GACE BRULÉ, Chansons, éd. H. P. Dyggve, XIX, 2); b) ca 1200 «faire aboutir à» (VIDAME DE CHARTRES ds Chansons attribuées au Chastellain de Couci, éd. A. Lerond, XXXII, 32: Rienz fors s'amour, qui a la mort me mainne); 3. 1765 mécan. «transmettre le mouvement» (Encyclop. t. 8). D'un lat. minare, forme active qui s'est substituée au class. minari «menacer», et qui apparaît dans lang. rustique et pop. et particulièrement à basse époque avec le sens de «mener les animaux», le conducteur les menaçant de ses cris, de son fouet, etc.; ce sens s'est conservé dans les lang. rom., cf. p. ex. le roum. mîno «conduire le bétail», le calabrais minare «aiguillonner les bêtes», v. FEW t. 6, 2, p. 111b; il survit également dans la lang. de la vén. en a. fr. dans l'accept. particulière de «poursuivre un animal» ca 1160 (Enéas, 5381 ds T.-L.); v. aussi TILANDER Mél. 1958, p.308, sqq. Fréq. abs. littér. Mener: 9650. Menant: 322. Fréq. rel. littér. Mener: XIXe s.: a)12278, b)13987; XXes.: a)13096, b)15 195. Menant: XIXe s.: a) 338, b) 579; XXes.: a)621, b) 395.
1. mener [məne] v. tr. [CONJUG. lever.]
ÉTYM. Xe; lat. pop. minare « chasser, pousser devant soi », lat. class. minari « menacer ».
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I Faire aller (qqn) avec soi. ⇒ Amener, conduire, emmener. || Mener qqn par la main (→ Étudier, cit. 22). || Mener un enfant en lisière. — Touristes menés par des guides (cit. 3).
A Mener à, en, dans; mener (et inf.).
1 Conduire en accompagnant. ⇒ Emmener. || Mener qqn au café (→ Lier, cit. 16), au théâtre (→ Honneur, cit. 111), jusqu'à sa chambre, dans un jardin… || Je ne sais trop où il me mène. || Malade qu'on mène aux eaux (→ Languir, cit. 5), chez le docteur. — Mener les enfants en promenade le jeudi (cit. 2). — ☑ Loc. fig. Mener qqn en bateau. — (1538). || Mener qqn chez (qqn). || Un ami influent l'a mené chez le ministre.
1 Une fois, ayant confiance dans un beau soleil de septembre, Marius s'était laissé mener au bal de Sceaux par Courfeyrac (…)
Hugo, les Misérables, III, VIII, I.
2 Un soir, papa dit : « nous allons mener les enfants à l'Exposition. »
G. Duhamel, Chronique des Pasquier, I, VIII.
♦ (Avec une proposition inf.). || Mener promener les élèves d'un lycée (cit. 1). || Mener qqn fendre du bois (cit. 35).
3 (…) j'aurais souhaité de pouvoir (…) vous mener voir sur ce chapitre quelqu'une des comédies de Molière.
Molière, le Malade imaginaire, III, 3.
4 (…) on menait les écoliers baigner tous les jeudis (…)
Chateaubriand, Mémoires d'outre-tombe, t. I, p. 109.
♦ Spécialt. a Vieilli. || Mener une femme au bal, être son cavalier. — Père qui mène sa fille à l'autel. ⇒ Conduire. — ☑ Fig. Mener une jeune fille à l'autel, à la mairie, devant Monsieur le maire, l'épouser (→ Conquérant, cit. 4).
5 (…) il répondit par une lettre irréprochable et de ton presque solennel : elle était la première femme qu'il eût jamais voulu mener à l'autel et probablement la dernière.
A. Maurois, la Vie de Byron, II, XXI.
6 Le Roi menait avec lui une partie de son artillerie (…)
Racine, le Siège de Namur.
♦ Par métaphore. || Mener qqn où l'on en a envie (→ Arme, cit. 34, Molière). || « L'espérance nous mène au terme de la vie par un chemin agréable » (cit. 7, La Rochefoucauld).
7 (…) le présent ne nous satisfaisant jamais, l'expérience nous pipe, et de malheur en malheur, nous mène jusqu'à la mort (…)
Pascal, Pensées, VII, 425.
8 On s'étonnerait en vain du paradoxe apparent qui mène la pensée à sa propre négation par les voies opposées de la raison humiliée et de la raison triomphante.
Camus, le Mythe de Sisyphe, p. 68-69.
2 (V. 1175). Faire avancer (un animal) en marchant à sa tête, à ses côtés, ou en le poussant devant soi. || L'ânier (cit. 1) mène ses ânes. ⇒ Guider. || Mener des vaches à l'abreuvoir, en pâture (→ Herbage, cit. 1). || Mener un cheval par la bride, un chien en laisse. || Mener des bœufs attelés de front. || Ce charretier mène ses chevaux à coups de fouet. || Bêtes que l'on mène à l'abattoir. — (Avec un inf.). || Mener paître des moutons.
9 Elle n'est pas méchante, la Coliche (une vache). Seulement, depuis ce matin, elle nous fait rager, parce qu'elle est en chaleur… Je la mène au taureau, à la Borderie.
Zola, la Terre, I, I.
10 Deux fois par jour, à onze heures et à six heures, le vieux mène son chien promener.
Camus, l'Étranger, I, III.
♦ Par anal. || Mener sa voiture au garage. || Le mécanicien mène la locomotive au dépôt.
♦ (Av. 1563). Par métaphore. || Mener des hommes à la boucherie (→ Guerre, cit. 39). || Des naturels rétifs, difficiles à mener. ⇒ Manier (→ Cabrer, cit. 8).
11 (…) il est bien temps de s'occuper de chevalerie, pendant que M. de Contades (…) mène à la boucherie tous les descendants de nos anciens chevaliers, et leur fait attaquer quatre-vingts pièces de canon (…) Cette horrible journée perce l'âme.
Voltaire, Correspondance, 1649, 15 août 1759.
♦ Fig. Traiter. || Elle le mène avec douceur, rudement (⇒ Malmener). — ☑ (Déb. XVIIe). Loc. fig. Mener qqn bon train, tambour battant, à la baguette, à la trique, au doigt et à l'œil. ⇒ Marcher (faire). ☑ Il, elle se laisse, se fait mener par le nez, par le bout du nez. || Vous ne prétendez pas mener en laisse un garçon de vingt ans ?
12 Comment, disait-elle, madame qui menait monsieur le comte, un homme si parfait, au doigt et à l'œil, — car, entre nous, il paraît que tu le faisais tourner en bourrique, — comment madame peut-elle se laisser massacrer par ce polichinelle ?
Zola, Nana, VIII.
3 (1080). Avec un compl. de lieu. Conduire avec autorité, en exerçant un commandement, une influence. || Capitaine qui mène ses troupes au feu (→ Corps, cit. 26), au combat (⇒ Commander). || Mener des armées à la victoire (→ Logistique, cit. 2).
♦ (1080; avec une idée de contrainte, de violence). Spécialt. || Mener un coupable en prison (→ Incarcérer, cit. 2), à l'échafaud (→ Guillotiner, cit. 2), à la potence (→ Échapper, cit. 21).
13 Lors que Maillart, juge d'enfer, menait
À Montfaucon Samblançay l'âme rendre (…)
Samblançay fut si ferme vieillard,
Que l'on cuidait (pensait), pour vrai, qu'il menât pendre
À Montfaucon le lieutenant Maillart.
Clément Marot, Épigrammes, XL.
14 (…) on lui mettrait des menottes, on le mènerait à la mairie et de là, après quelques jours, à la prison du chef-lieu.
J. Green, Léviathan, II, XIV.
♦ (XIIIe). Par métaphore. ⇒ Entraîner. || Mener un pays à la guerre (→ Foi, cit. 16), au bord du gouffre (cit. 18). || Cette discussion pourrait nous mener à une querelle (→ Accent, cit. 6). || Jeune homme qui s'abandonne (cit. 25, Musset) à une chimère sans savoir où elle le mène. — ☑ (1669). Loc. Mener loin qqn, « l'engager dans une affaire plus qu'il ne lui conviendrait » (Académie). || Cela peut (vous) mener loin (cit. 11), plus loin que vous ne pensez : cela peut avoir (pour vous) des conséquences imprévisibles et incalculables, heureuses ou (plus souvent) funestes. || Une petite plaisanterie qui peut vous mener loin.
15 Mademoiselle Temple (…) ne cherchait que l'occasion de se justifier dans son esprit (…) Ces favorables dispositions entre les mains d'un homme comme lui l'auraient pu mener plus loin qu'elle ne le croyait (…)
A. Hamilton, Mémoires du comte de Gramont, XII.
16 J'ai bien besoin d'avoir cette femme, pour me sauver du ridicule d'en être amoureux : car où ne mène pas un désir contrarié ?
Laclos, les Liaisons dangereuses, IV.
B Mener qqn, qqch.
1 (1170). Être en tête de (un groupe, un cortège, une file). || Mener le deuil. — L'animal qui mène le troupeau. — Par métonymie. ☑ Mener la danse.
17 (…) la farandole menée par un gars de Barbantane, le pays des danseurs fameux, se mit en marche lentement, déroulant ses anneaux (…)
Alphonse Daudet, Numa Roumestan, I.
♦ (1949). Sports. || Coureur qui mène le peloton, le train. — Absolt. || Il a mené jusqu'au dernier virage. — Avoir l'avantage dans un match, une compétition. || À la mi-temps, l'équipe de France menait par 3 buts à 2.
17.1 La dynamique du Tour ne connaît que quatre mouvements : mener, suivre, s'échapper, s'affaisser. Mener est l'acte le plus dur, mais aussi le plus inutile; mener, c'est toujours se sacrifier; c'est un héroïsme pur, destiné à afficher un caractère bien plus qu'à assurer un résultat (…)
R. Barthes, Mythologies, p. 115.
♦ Par métaphore. || Les hautbois menaient un chœur de voix d'hommes (→ Castagnette, cit. 3). — Cornemuses (cit.) qui mènent la danse.
♦ ☑ Fig. Mener le branle, la danse. — ☑ Mener le jeu, la partie : être le maître de la situation. ⇒ Dominer.
♦ Par anal. (En parlant d'activités collectives). ⇒ Diriger. || Mener les débats. ⇒ Conduire.
2 Fig. Diriger, commander. || « L'homme s'agite (cit. 17) mais Dieu le mène » (Fénelon). || Financiers (cit. 3) qui mènent la banque. || Dictateur mené par l'opinion publique (→ Flatter, cit. 42). || Il se laisse mener comme un enfant. — Absolt. || Se laisser mener (→ Se laisser faire). — (Sujet n. de chose). || « Les idées (cit. 64) mènent le monde » (Renan). || Les sentiments qui mènent les hommes (→ 1. Général, cit. 27). || Le profit n'est pas toujours ce qui mène l'homme. || Ce n'est pas son intérêt qui le mène. ⇒ Agir (faire), animer, guider.
18 (…) par un sort qui tout mène (…)
Molière, l'École des femmes, I, 1.
19 Ce siècle est grand et fort. Un noble instinct le mène.
Hugo, les Voix intérieures, I.
20 Dans les jeux, je ne prétendais mener personne, mais je ne voulais pas être mené : je n'étais bon ni pour tyran ni pour esclave, et tel je suis demeuré.
Chateaubriand, Mémoires d'outre-tombe, t. I, p. 70.
21 Il (Rioms) croyait mener les deux villes, l'Arsenal et Toulon, justement de même manière, comme une chiourme de forçats, à coups de cordes et de lianes, protégeant la cocarde noire, punissant la tricolore.
Michelet, Hist. de la Révolution franç., III, VI.
22 Elle me mènera, mais discrètement; car elle a beaucoup d'esprit. Et sans en tirer un sentiment de domination, parce qu'elle est tendre, et aussi parce qu'elle est très femme, et qu'elle porte le sentiment profond et traditionnel d'une certaine subordination de la femme à l'homme.
J. Romains, le Dieu des corps, p. 101.
———
II Faire aller (une chose) en la contrôlant.
1 (V. 1175). Faire marcher, faire fonctionner. || Mener sa voiture (→ Courir, cit. 60), une troïka (→ Gentleman-rider, cit. 1). ⇒ Conduire. — Officiers qui mènent le navire (→ Cap, cit. 3).
23 Je ne me sens pas d'humeur à aller porter la soupe aux champs ou à mener une charrette (…)
Balzac, le Médecin de campagne, Pl., t. VIII, p. 416.
♦ Par métaphore :
24 (…) la Gironde, qui semblait mener le vaisseau de la France, n'en avait pas le gouvernail.
Michelet, Hist. de la Révolution franç., VI, VII.
♦ ☑ Loc. fig. Mener la barque (cit. 8 et 9).
♦ (1690). || Femme qui sait mener sa maison, son ménage (⇒ Diriger), sa fortune (⇒ Administrer).
2 (1662). Faire avancer, faire évoluer sous sa direction. || Mener une affaire au trot, bon train, négligemment, prudemment, rondement… || Mener de front (cit. 39) deux affaires. || Le docteur dut mener l'opération très vite (→ Fer, cit. 14).
25 (…) le vieux chat (Mazarin) est bien malade à Narbonne, il va s'en aller ad patres; mais il faut mener nos affaires rondement, car ce n'est pas la première fois qu'il fait l'engourdi.
A. de Vigny, Cinq-Mars, XIV.
26 J'avais toujours jugé ladite une gaillarde chaude, et je vois que je ne me suis pas trompé. Mais elle a l'air de mener ça bien rondement, cavalièrement.
Flaubert, Correspondance, 446, 23 déc. 1853.
♦ (Quant au but poursuivi). || Mener une aventure aussi loin (cit. 9) que possible. — (V. 1200). || Mener à… || Entreprendre (cit. 5) une chose et la mener à bien, à fin (→ Assiduité, cit. 2), à bonne fin, à terme. ⇒ Exécuter, terminer (→ Habiliter, cit. 2).
27 (…) j'aurais eu besoin, pour mener à bien ce travail, de me reporter à des livres que je ne peux trouver qu'à Paris.
Gide, Attendu que…, p. 52.
♦ Spécialt. || L'existence (cit. 26), le train, la vie que l'on mène. ⇒ Vie. — ☑ (1959). Mener la vie dure à qqn. ☑ Ne pas en mener large (cit. 25 et 26).
♦ (XIXe). S'adonner, se livrer à une activité soutenue, organisée dans un but précis, et dont on a (plus ou moins) l'initiative. || Mener une offensive, une dure bataille (→ Aggraver, cit. 8). ⇒ Soutenir. || Mener une négociation. ⇒ Négocier. || Ce pays « allait mener la lutte jusqu'au bout » (→ Liquider, cit. 3). ⇒ Poursuivre. || Mener une partie d'échecs (cit. 19). ⇒ Disputer.
28 J'ai une lutte sévère à mener contre la police.
J. Romains, les Hommes de bonne volonté, t. II, VII, p. 73.
29 On ne peut mener un procès en annonçant la culpabilité générale d'une civilisation.
Camus, l'Homme révolté, p. 226.
♦ (XIIe). S'adonner ou participer à une activité, à des manifestations de caractère apparemment désordonné et généralement bruyant ou spectaculaire. || Moucherons qui mènent leur danse (cit. 14). — ☑ Loc. Mener grand bruit, grand tapage : faire beaucoup de bruit. — ☑ (1690). Mener grand deuil : manifester une grande douleur, un vif regret. — Vx. || Mener bruit (→ Étang, cit. 1), joie (→ Fête, cit. 10), deuil…
30 (…) ayant aperçu un de ses domestiques conduit entre les captifs, il se mit à battre sa tête et mener un deuil extrême.
Montaigne, Essais, I, II.
31 Nous menions grand boucan de roues derrière ce cheval tout en sabots, de caniveaux en passerelles.
Céline, Voyage au bout de la nuit, p. 348.
32 (…) les Curètes et les Corybantes, ivres d'enthousiasme et de fureur, menaient grand bruit, autour des tambours et des sistres.
Émile Henriot, Mythologie légère, p. 67.
♦ Par métaphore :
33 Les feuilles de droite menaient tapage autour des manifestations faites par la Ligue des Patriotes devant la statue de Strasbourg.
Martin du Gard, les Thibault, t. VI, p. 238.
———
III (Choses). Faire aller (qqn) d'un endroit à un autre.
1 (V. 1170). Transporter. || Chevaux et voiture qui mènent grand train un haut personnage à un gala (cit. 1; → aussi Fourrer, cit. 33). || Ce train vous mènera à Lyon en moins de trois heures. ⇒ Conduire.
34 (…) le tramway T A H qui le mènerait directement chez la papetière (…)
J. Romains, les Hommes de bonne volonté, t. IV, XIX, p. 213.
2 Permettre d'aller d'un lieu à un autre, servir de voie de communication. ⇒ Conduire. || Sentier qui mène à un lac (→ Asile, cit. 25). || Chemin qui mène à la ville (→ Enseigner, cit. 1), qui mène de la route à la maison.
35 (…) un corridor menait à un cabinet d'étude (…)
Flaubert, Trois contes, « Un cœur simple », I.
36 J'ai peur du sommeil comme on a peur d'un grand trou,
Tout plein de vague horreur, menant on ne sait où (…)
Baudelaire, Les Nouvelles Fleurs du mal, VIII.
37 Une rue, puis une autre le menaient de plus en plus bas, vers la petite place et la rivière.
J. Green, Léviathan, I, XI.
38 Ils parcoururent en silence le chemin bordé d'acacias qui menait à la petite porte.
Martin du Gard, les Thibault, t. II, p. 221.
♦ (Fin XIIe). Par métaphore. || Chemin qui mène à la perdition (→ Étroit, cit. 5). || Échelons qui mènent à la gloire (cit. 22). || Route qui mène aux honneurs (→ Consentir, cit. 5). || Prendre une route qui ne mène à rien. ⇒ Cul-de-sac (→ Contraire, cit. 8). — ☑ Prov. Tous les chemins mènent à Rome.
39 Tant de routes mènent à la sagesse.
P.-L. Courier, Éloge de Buffon, p. 557.
♦ Fig. || Cela ne nous mènera, ne le mènera à rien (→ Écouter, cit. 18). || « Tout mène à la récompense et au châtiment » (cit. 6, Baudelaire). || « L'immodération (cit. 2) mène à de grands vices » (Vauvenargues). || « La froide tranquillité ne mène pas au bonheur » (→ Insensible, cit. 13, Laclos). — ☑ Allus. || « Le journalisme (cit. 1) mène à tout, à condition d'en sortir » (Janin). — || « L'esprit sert à tout, mais il ne mène à rien », mot attribué à Talleyrand (Guerlac, Cit. franç., p. 227).
40 (…) les excès de la liberté mènent au despotisme mais les excès de la tyrannie ne mènent qu'à la tyrannie; celle-ci en nous dégradant nous rend incapables d'indépendance (…)
Chateaubriand, Mémoires d'outre-tombe, t. VI, p. 322.
41 La littérature mène à tout pourvu que l'on en sorte.
Villemain, Discours à l'Académie, 7 déc. 1871.
♦ Spécialt. (En parlant de ce qui se consomme par l'usage ou se dépense). || Mener loin qqn, fournir longtemps à ses besoins, lui permettre de subsister longtemps. || Il n'a touché que vingt mille francs, cela ne le mènera pas bien loin (cf. Il n'ira pas bien loin avec cela). — Absolt. || Vingt mille francs, cela ne mène pas loin par le temps qui court. — REM. Cette expression s'emploie ordinairement à la forme négative.
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IV (1690). Géom. Tracer. || Mener une parallèle à une droite.
➪ tableau Verbes exprimant une idée de mouvement.
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mené, ée p. p. adj.
♦ Voir ci-dessus (spécialt au sens II; qualifié).
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DÉR. Menable, menage, menée, meneur.
COMP. Amener, emmener, promener, ramener, surmener.
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2. mener [məne] v. intr. défectif.
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♦ Fam. (Langage enfantin ou en s'adressant aux enfants). Se promener (généralement précédé du verbe aller).
0 On va aller mener, dit la biquette. — On va aller menermener, dit le Gendre, surenchérissant (…)
Montherlant, le Démon du bien, p. 137.
Encyclopédie Universelle. 2012.