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souffler

souffler [ sufle ] v. <conjug. : 1>
XIIIe; sofler 1120; lat. sufflare, de flare « souffler »
I V. intr. (et tr. ind.)
1Expulser de l'air par la bouche ou par le nez, par une action volontaire (à la différence de l'acte réflexe de la respiration). exhaler, expirer. Souffler fort. Souffler dans, sur ses doigts (pour les réchauffer), sur sa soupe (pour la refroidir). Souffler sur le feu, pour l'attiser; fig. exciter, attiser (cf. Jeter de l'huile sur le feu). Souffler dans une trompette. jouer, sonner. « Elle avait l'habitude de souffler en l'air pour écarter de son sourcil une mèche indisciplinée » (Larbaud). Fig. et fam. Il croit qu'il va y arriver en soufflant dessus, qu'il n'y a qu'à souffler dessus, que c'est une chose très facile.
2(sofler XIIe) Respirer avec peine, en expirant fort, bruyamment. haleter; s'essouffler. « Il était gris, marchait avec peine, soufflait beaucoup » (Maupassant). Souffler comme un bœuf, comme un phoque, comme une locomotive. Laisser souffler son cheval, lui laisser reprendre souffle. — (1688) Prendre un peu de relâche, de repos. se reposer. Dix minutes pour souffler entre deux cours. « Reprendre haleine, souffler un peu » (La Bruyère). « Laissez-moi le temps de souffler » (Courteline).
3Techn. Faire fonctionner un soufflet, une soufflerie. Souffler à l'orgue.
4(1328) Déplacer un fluide; produire un courant d'air (en parlant du vent). Le vent souffle : il y a du vent. Impers. Il soufflait une brise du sud. Par métaph. « Le désir souffle parfois comme un coup de vent qui emporte la volonté » (Maupassant). Un vent de révolte soufflait. Loc. Regarder, voir d'où, de quel côté souffle le vent : observer comment vont tourner des événements. — Bible L'Esprit souffle où il veut : l'inspiration divine est imprévisible.
II V. tr. dir.
1(XIIe) Envoyer un courant d'air, de gaz sur (qqch.). Souffler une bougie. éteindre.
(1655) Fig. et fam. Souffler qqch. à qqn, le lui enlever. ⇒ dérober, enlever, ôter, fam. piquer, ravir. — Aux dames, Souffler un pion, le prendre quand il n'a pas pris (ancienne règle). Absolt Souffler n'est pas jouer, ne constitue pas un coup.
(1942) Détruire par l'effet du souffle. « Quantité de maisons près du port ont été soufflées par les explosions » (A. Gide).
2Techn. Envoyer de l'air, du gaz dans (qqch.). Souffler l'orgue, au moyen de la soufflerie. Souffler le verre, l'émail ( soufflage) . Gonfler de gaz. Souffler un ballon.
3Envoyer, déplacer, pousser (un fluide, ce qui s'y trouve). « La porte battait, soufflait une odeur forte de graillon » (Zola).
(Personnes) Faire sortir en expirant, en soufflant. Souffler la fumée par la bouche, le nez. Loc. fig. Souffler le chaud et le froid : changer d'avis, d'opinion; faire alterner la douceur et la menace.
4(1538) Dire à voix basse. Souffler qqch. à l'oreille de qqn, le lui dire en confidence. ⇒ chuchoter, glisser, insinuer, 1. parler (à l'oreille).(En incise) Chut, souffla-t-il. Loc. Ne pas souffler mot : ne rien dire.
Fig. suggérer. « Voilà ce que me souffle l'instinct » (Duhamel). « Elle a prononcé le vôtre [nom]. — Quelqu'un le lui avait soufflé » (Montherlant).
Dire discrètement (qqch.) pour aider qqn. Souffler une réplique à un acteur ( souffleur) . « Je te soufflerai tes mots » (Ed. Rostand). Souffler la réponse (à un élève). Absolt Il ne faut pas souffler.
5(1940) Fam. Rendre stupéfait. ahurir (cf. Couper le souffle). Son culot nous a soufflés ( soufflant) .

souffler verbe intransitif (latin sufflare) Chasser de l'air par la bouche ou par le nez : Inspirez, soufflez. Souffler dans une trompette. Respirer avec difficulté, en expirant l'air bruyamment : Terminer une course en soufflant. S'arrêter pour reprendre haleine, pour se détendre : Mettre pied à terre pour laisser souffler son cheval. En parlant de l'air, du vent, se déplacer avec plus ou moins de force dans l'espace : Un vent qui souffle en tempête.souffler (citations) verbe intransitif (latin sufflare) Bible Le vent souffle où il veut ; Tu entends sa voix, Mais tu ne sais ni d'où il vient ni où il va. Ainsi en est-il de quiconque est né de l'Esprit. Évangile selon saint Jean, III, 8 souffler (difficultés) verbe intransitif (latin sufflare) Orthographe Avec deux f, de même que les autres mots de la famille : souffle, soufflerie, soufflet, souffleter (à la différence de boursoufler et de ses dérivés, qui ne prennent qu'un f). ● souffler (homonymes) verbe intransitif (latin sufflare) soufflé nom masculin soufflet nom masculinsouffler (synonymes) verbe intransitif (latin sufflare) Respirer avec difficulté, en expirant l'air bruyamment
Synonymes :
- haleter
En parlant de l'air, du vent, se déplacer avec plus...
Synonymes :
- déferler
- se déchaîner
- s'épandre
souffler verbe transitif indirect Diriger son souffle sur quelque chose : Souffler sur ses doigts.souffler verbe transitif Diriger un souffle d'air sur quelque chose qui brûle, de façon à l'éteindre : Le vent a soufflé les bougies. Déplacer quelque chose, le projeter au moyen du souffle ou d'un courant d'air : Souffler la fumée de sa cigarette au visage de quelqu'un. Détruire une construction par un souffle violent : Les bombes ont soufflé l'immeuble. Dire discrètement quelque chose à quelqu'un, le lui rappeler tout bas, sans être entendu des tiers : Souffler son texte à un acteur. Suggérer quelque chose à quelqu'un : On lui a soufflé de prendre cette décision. Familier. Enlever quelque chose, quelqu'un à quelqu'un par ruse et de façon plus ou moins déloyale : Se faire souffler une affaire par un concurrent. Familier. Causer à quelqu'un une vive stupéfaction, le renverser : La nouvelle de son mariage nous a soufflés. Jeux Au jeu de dames, enlever un pion ou une dame à son adversaire qui a omis de s'en servir pour prendre. Métallurgie Effectuer le soufflage d'un métal ou d'un alliage dans un four d'élaboration métallurgique. Pratiquer le soufflage des noyaux de fonderie à l'aide de machines spéciales. ● souffler (expressions) verbe transitif indirect Familier. Souffler sur le feu, attiser une querelle, un différend, exciter la discorde. ● souffler (homonymes) verbe transitif indirect soufflé nom masculin soufflet nom masculinsouffler (synonymes) verbe transitif indirect Familier. Souffler sur le feu
Synonymes :
- allumer
- attiser
- déchaîner
- exalter
souffler (expressions) verbe transitif Ne pas souffler mot (de quelque chose), ne rien dire, se taire (sur quelque chose). Souffler le chaud et le froid, approuver puis critiquer une même chose, une même personne, selon l'intérêt du moment. Souffler le verre, l'émail, en faire des ouvrages par soufflage à l'aide d'un tube. ● souffler (homonymes) verbe transitifsouffler (synonymes) verbe transitif Dire discrètement quelque chose à quelqu'un, le lui rappeler tout bas...
Synonymes :
- chuchoter
- murmurer
- susurrer
Suggérer quelque chose à quelqu'un
Synonymes :
- conseiller
- dicter
- insinuer
Familier. Enlever quelque chose, quelqu'un à quelqu'un par ruse et de façon...
Synonymes :
- chiper (familier)
- piquer (familier)
- prendre
- rafler (familier)
- s'emparer
Familier. Causer à quelqu'un une vive stupéfaction, le renverser
Synonymes :
- épater (familier)
- époustoufler (familier)
- estomaquer (familier)
- méduser
- renverser
- sidérer
- stupéfier

souffler
v.
rI./r v. intr.
d1./d Expulser de l'air par la bouche ou le nez, volontairement. Souffler dans une trompette.
d2./d Respirer avec effort. Souffler comme un boeuf.
d3./d Reprendre haleine, se reposer. Souffler un moment.
d4./d Agiter l'air. L'harmattan souffle.
rII./r v. tr.
d1./d Envoyer un courant d'air sur (qqch). Souffler une bougie, l'éteindre en soufflant dessus.
d2./d Fig., Fam. Souffler qqch à qqn, le lui subtiliser.
|| JEU Souffler un pion, une dame, l'ôter à son adversaire, aux dames, parce qu'il a négligé de s'en servir pour prendre.
d3./d TECH Envoyer de l'air, du gaz dans (qqch).
Souffler le verre: insuffler de l'air dans une masse de verre pour la façonner.
d4./d Dire tout bas. Souffler son texte à un comédien.
Ne pas souffler mot: ne rien dire.
|| Fig. Suggérer. Quelqu'un lui en a soufflé l'idée.
d5./d Détruire par effet de souffle. L'explosion a soufflé les vitres.
d6./d (Québec) Enlever, déplacer de la neige au moyen d'une souffleuse (sens 4). Souffler la neige dans un camion.

⇒SOUFFLER, verbe
I. — Empl. intrans. et trans. indir.
A. — [Corresp. à souffle I A et II A] Diriger son souffle ou un souffle d'air sur/vers ou dans quelque chose/quelqu'un.
1. [Corresp. à souffle I A; le suj. désigne un être animé]
a) Qqn souffle sur/vers qqc./qqn. Diriger son souffle sur/vers quelque chose/quelqu'un.
[Pour déplacer, enlever, faire voler qqc.] Souffler sur une table pour en ôter la poussière (Ac.). Il n'y avait pas à dire, on pouvait souffler partout, pas un grain de poussière ne s'envolait (ZOLA, Assommoir, 1877, p. 226).
Souffle-moi dans l'œil, loc. fig., fam., vieilli. [Pour exprimer l'étonnement, l'incrédulité] Paul. Folle! (La porte du fond s'ouvre). Oh! Saint-Réault et Madame de Céran! Souffle-moi dans l'œil! (PAILLERON, Monde où l'on s'ennuie, 1869, I, 4, p. 15).
[Pour activer la combustion] Celle-ci [une étincelle] tombe sur un fragment d'écorce sèche faisant office d'amadou et, en soufflant, on obtient une flamme (LOWIE, Anthropol. cult., trad. par E. Métraux, 1936, p. 71).
Souffler sur le feu, loc. fig. V. feu1 I A 1. Le King n'a pas manqué de souffler sur le feu, en sorte qu'aujourd'hui la combinaison du centre gauche pur paraît devenir impossible (MÉRIMÉE, Lettres ctesse de Montijo, t. 1, 1839, p. 3). Le banquier Perregaux distribua de l'argent, pour son compte [de Pitt], à ceux qui se chargeaient de « souffler sur le feu »; à la fin de juillet, on trouva à Lille le portefeuille d'un espion anglais qui avait mission de pousser au désordre (LEFEBVRE, Révol. fr., 1963, p. 362).
Au fig. Activer, augmenter. Synon. exciter. Il s'agit d'activer la haine, et l'on souffle sur les passions pour les amener à incandescence (GIDE, Journal, 1943, p. 190).
[Pour atténuer la chaleur ou éteindre la combustion] Souffler sur une bougie, une calebombe, un chandelier; souffler sur sa soupe. Rocambole, qui avait refermé la porte, souffla sur l'allumette, qui s'éteignit (PONSON DU TERR., Rocambole, t. 5, 1859, p. 292).
Au fig., vieilli. Qqc./qqn souffle sur qqc. Détruire, faire disparaître. Souffler sur des projets. Cette espèce de veine amère qui s'était rompue alors dans sa poitrine, ce froid subit et glacé qui avait soufflé sur son bonheur (SAINTE-BEUVE, Volupté, t. 1, 1834, p. 147). Ne me forcez pas à souffler sur vos rêves (L. MÉNARD, Rêv. païen, 1876, p. 197).
Souffler chaud, souffler froid, loc. fig. V. infra souffler le chaud et le froid. Si d'autres, au même moment, soufflaient chaud, à tort et à travers, on peut dire de lui [Saint-Marc Girardin] qu'il a soufflé froid sur la jeunesse (SAINTE-BEUVE, Corresp., t. 5, 1843, p. 311).
CHASSE. [Le suj. désigne un chien de chasse] Souffler au poil. Suivre de très près un animal chassé, en particulier un lièvre. Quand un chien est sur le point d'atteindre un lièvre, on dit qu'il lui souffle au poil. (...) Pour le gibier à plume, on dit « souffler dans les plumes » (DUCHARTRE 1973).
[P. allus. aux Écritures]
♦ [Le suj. désigne l'Esprit, Dieu] Seul l'esprit, s'il souffle sur la glaise, peut créer l'homme (SAINT-EXUP., Terre hommes, 1939, p. 261). V. esprit 1re Section I B 1 ex. 3.
♦ [Le suj. désigne Jésus-Christ] Jésus-Christ a institué le sacrement de pénitence principalement quand, après sa résurrection, il souffla sur ses apôtres, leur disant:Recevez le Saint-Esprit, etc. (Théol. cath. t. 14, 1 1939, p. 558).
♦ [Le souffle de Dieu étant à l'origine de l'imagination, de l'inspiration]
L'Esprit souffle. V. esprit 1re Section I B 1 ex. 4.
L'Esprit souffle où il veut. V. esprit 1re Section I B 1 rem. Des lieux où souffle l'Esprit. L'esprit souffle où il veut (...) Il incombe au spiritualisme et aux amateurs d'inspiration de nous expliquer pourquoi cet esprit ne souffle pas dans les bêtes et souffle si mal dans les sots (VALÉRY, Tel quel I, 1941, p. 30).
COUTUMES, MAGIE, SORCELLERIE. Enchanter, ensorceler, envoyer ou conjurer un sort en soufflant sur quelque chose/quelqu'un. Que la manufacture brûle, que la récolte brûle! Que les villes brûlent avec les banques et les églises, et les magasins (...). Et que l'entrepôt mammouth pète comme une pipe de rhum! (...) Elle lui souffle à la figure (CLAUDEL, Échange, 1954, III, p. 792). V. souffle ex. 1.
Expr. fig., fam. Les fées ont soufflé sur lui (vieilli). ,,Il tient de sa naissance, de la fortune toute sorte d'avantages`` (Ac. 1835). Tu peux souffler dessus. ,,Se dit pour signifier à quelqu'un qu'il n'obtiendra pas ce qu'il désire`` (Lar. Lang. fr.). Il n'y a qu'à souffler dessus. C'est une chose très facile, qui se fait ou s'obtient comme par enchantement. (Dict. XXe s.).
b) En partic.
) Qqn souffle dans qqc. Diriger son souffle dans quelque chose; insuffler de l'air dans quelque chose.
MUS. [Le compl. désigne un instrument à vent] Souffler pour émettre un son; jouer. Souffler dans un cor de chasse, dans une trompette. Depuis que le premier homme a voulu souffler dans une flûte ou lancer son premier chant (SAMUEL, Art mus. contemp., 1962, p. 604).
Empl. abs. Jouer, sonner. Le bon Josué, soufflant à perdre haleine, ébranlait Jéricho de sa trompe d'airain (BOUILHET, Dern. chans., 1869, p. 115). Les spécialistes du cor de chasse ne disent ni jouer ni sonner, mais souffler, absolument. « Est-ce que vous soufflez, ce soir? » (ESNAULT, [Comment. (IGLF 1949) de Delesalle, Dict. arg.-fr. et fr.-arg. 1896]).
P. méton. [Le suj. désigne un instrument à vent] Émettre un son, jouer, sonner. On entendait au fond un grand bruit de pas, dominé par le son aigu des trompettes qui soufflaient avec furie (FLAUB., Salammbô, t. 1, 1863, p. 166).
VERRERIE. Façonner le verre en soufflant. Souffler dans le verre. J'avais visité en 1914 une verrerie à bouteilles, une foule d'ouvriers s'agitait autour d'un four (...). Les uns promenaient les paraisons, les autres soufflaient dans des moules qu'ouvraient et fermaient des aides accroupis (Cl. DUVAL, Verre, 1966, p. 123).
Empl. abs. Pencroff avait demandé la faveur de « souffler » à son tour, et c'était un plaisir pour lui, mais il soufflait si fort que ses produits affectaient les formes les plus réjouissantes, qui faisaient son admiration (VERNE, Île myst., 1874, p. 295).
) TECHNOL. Actionner un soufflet, manœuvrer une soufflerie. Souffler à l'orgue, à la forge. Un gamin (...) entretenait le feu du réchaud en manœuvrant un énorme soufflet, dont chaque haleine faisait envoler un pétillement d'étincelles. (...) L'aide enfonça les fers à souder du milieu de la braise (...) puis, il se remit à souffler (ZOLA, Assommoir, 1877, p. 479).
ALCHIM. Chercher la pierre philosophale à l'aide de creusets et de fourneaux. Il a dépensé tout son bien à souffler (Ac.). Vous vous tromperiez étrangement, si vous vous imaginiez [en Vinci] une sorte de pédant rogue, ou d'alchimiste hermétique soufflant dans un atelier changé en laboratoire (GAUTIER, Guide Louvre, 1872, p. 202).
) Rejeter quelque chose.
[Le suj. désigne une pers.] Souffler dans son nez (fam.). Expirer par le nez. Louis Ganderaix (...) soufflait tout le temps dans son nez, comme s'il avait eu l'os ethmoïde partiellement bouché (L. DAUDET, Brév. journ., 1936, p. 138). Faire un léger bruit en expirant par le nez en signe de dédain, de mécontentement. Le syndicat dreyfusard, peu riche encore en hommes publics, ne dispose toujours que de Clemenceau. À ce nom, Déroulède souffle dans son nez de polichinelle, avec sa suffisance ordinaire (BERNANOS, Gde peur, 1931, p. 331).
[Le suj. désigne un animal]
♦ [Un cétacé] Rejeter l'air par les évents. Le dauphin souffle. MAR. Elle souffle! [Cri traditionnel par lequel la vigie d'un navire baleinier signalait la présence d'un cétacé venu respirer à la surface]:
1. Je me perdais dans des spéculations quelque peu stériles, quand j'entendis la fameuse clameur des baleiniers: « Elles soufflent! » Un troupeau de baleines globicéphales cernait l'Elie-Monnier (...) Quand un globicéphale remonte à la surface, il souffle un jet de vapeur dans un halètement rauque.
J.-Y. COUSTEAU, F. DUMAS, Le Monde du silence, 1959, p. 305 ds ROB. 1985.
♦ [Une taupe] Creuser des galeries en rejetant la terre à l'extérieur. Les taupes commencent à souffler (Ac. Compl. 1842).
2. [Corresp. à souffle II A; le suj. désigne un inanimé] Produire un souffle, un mouvement d'air.
a) [Corresp. à souffle II A 1 a; le suj. désigne le vent] Se manifester avec plus ou moins de force; se déplacer dans telle ou telle direction. Synon. bouffer, venter. Souffler avec force, furie, en tempête, par rafales; la bourrasque, la bise, l'ouragan, la rafale souffle. L'horrible mistral qui ne cesse de souffler depuis huit jours (LAMART., Corresp., 1832, p. 287). Le vent sonore qui soufflait faisait claquer les manteaux et les draperies (FAURE, Hist. art, 1921, p. 26).
Empl. impers. Il soufflait une brise de sud, et tous les navires, couverts de voiles, s'étaient dispersés comme des mouettes (LOTI, Pêch. Isl., 1886, p. 132).
[En contexte métaph.] Il soufflait un vent séditieux qui leur enflait le cœur et dessillait leurs yeux (LAMART., Chute, 1838, p. 939). Souffler un vent de qqc. Il soufflait un vent de franchise et de liberté, un désir de construire en commun qui faisaient de ce haut lieu un endroit privélégié (CACÉRÈS, Hist. éduc. pop., 1964, p. 132).
Empl. abs., fam. Ça va souffler. Il va faire beaucoup de vent. (Ds MERRIEN).
Regarder/voir d'où/de quel côté souffle le vent.
P. métaph. ou au fig. [Le suj. désigne un inanimé abstr.] Se répandre comme un souffle, se manifester violemment. Au travers de cette campagne éclatante sous le grand soleil d'août, la panique soufflait plus affolée à chaque heure (ZOLA, Débâcle, 1892, p. 38). L'esprit d'irrespect et de révolte qui soufflait partout (FAURE, Hist. art, 1921, p. 135).
b) [Corresp. à souffle II A 2; le suj. désigne une machine ou une cause phys.] Produire artificiellement un mouvement d'air. Ce soufflet est percé, il ne souffle plus (Ac.).
B. — [Corresp. à souffle I C; le suj. désigne un être animé]
1. [Corresp. à souffle I C 1] Respirer. [Angélique] soufflait à peine, pas un des cils de ses paupières closes ne remuait (ZOLA, Rêve, 1888, p. 189).
Loc. vieillies
Ne pas, ne plus souffler (fam.). Ne plus respirer; être mort. Ce n'était pas gai, cette cuisine sombre et nue de paysan pauvre, avec le râle d'agonie de ce corps tassé près de la table. (...) une demi-heure après le départ de Jean (...) Il ne soufflait plus, il était mort (ZOLA, Terre, 1887, p. 112).
Souffler mal (arg., au fig.). Avoir une allure inquiétante; ,,avoir de mauvaises intentions`` (RIGAUD ds LARCH. Suppl. 1880). Synon. avoir mauvais air. La donne souffle mal. Lorsqu'un voleur s'aperçoit qu'il a éveillé l'attention d'un agent, il dit: La donne souffle mal (RIGAUD, Dict. jargon paris., 1878, p. 316).
2. [Corresp. à souffle I C 2]
a) [Corresp. à souffle I C 2 a; le suj. désigne un animal] Expirer en faisant du bruit en signe de peur, de colère ou pour effrayer l'ennemi. Tigre qui souffle. Les chevaux, effrayés, soufflaient fortement et se cabraient (MÉRIMÉE, Double mépr., 1833, p. 32). [Le chat] ne répondit que par un long grondement bas, en soufflant, par intervalles, d'une gueule empourprée (COLETTE, Mais. Cl., 1922, p. 242).
b) [Corresp. à souffle I C 2 b; gén. dans des tournures nég.] Vieilli. (Ne pas oser) ouvrir la bouche pour parler, protester, répliquer. Il est si fier, si impérieux, qu'on n'oserait souffler devant lui (Ac. 1798-1835). Les hommes de 93 étaient des géants, dit Marius avec sévérité. Le vieillard se tut et ne souffla point du reste de la journée (HUGO, Misér., t. 2, 1862, p. 600).
En partic. [Le suj. désigne un animal] Pousser son cri. Un arbre en haut duquel soufflait quelque chouette (A. DAUDET, Fromont jeune, 1874, p. 129).
3. [Corresp. à souffle I C 2 c et II B] En partic. Qqn souffle
a) [L'idée est celle d'une mauvaise capacité respiratoire; le plus souvent souffler fait l'objet d'une compar.] Respirer avec peine, bruyamment; être essoufflé. Souffler comme un taureau. Nos pauvres chiens soufflaient comme des forges dans nos jambes (MAUPASS., Contes et nouv., t. 1, Père, 1887, p. 745). [Testevel] marchait à mes côtés et soufflait comme un asthmatique (DUHAMEL, Maîtres, 1937, p. 165). Souffler comme un cachalot. V. cachalot ex. de Flaubert. Souffler comme un phoque. V. phoque ex. de Flaubert.
P. anal., littér. [Le suj. désigne un mécanisme] Faire un bruit désagréable, haleter. Patissot se mit à fatiguer à tour de bras une espèce de pompe qui sifflait, soufflait, râlait comme une poitrinaire (MAUPASS., Contes et nouv., t. 1, Dimanches bourg. Paris, 1880, p. 296).
b) [L'idée est celle de reprendre sa respiration] Reprendre haleine après un effort en marquant un temps d'arrêt; prendre un peu de relâche, se reposer. Quand elle fut au cinquième, Gervaise dut souffler, elle n'avait pas l'habitude de monter (ZOLA, Assommoir, 1877, p. 423). Joseph s'arrête pour souffler. Je lui dis comme à un enfant: — Nous approchons, nous approchons (BARBUSSE, Feu, 1916, p. 303).
Au fig. Marquer un temps d'arrêt (dans une action, une tâche). Le marché [des valeurs] a paru éprouver le besoin de souffler un peu en cette première séance de la semaine (L'Œuvre, 11 mars 1941). Vite à la besogne, historiens. Assez de discussions. Le temps passe, le temps presse. Vous voudriez peut-être qu'on vous laisse souffler? Le temps de balayer chacun devant sa porte? (L. FEBVRE, Face au vent, [1946] ds Combats, 1953, p. 185).
MAN. Faire souffler, laisser souffler son cheval. Lui laisser reprendre souffle. Faire souffler son cheval après une course. Quand nous les laissions souffler [nos chevaux] un moment, ils mordillaient du bout des dents les petits arbres rabougris qui apparaissaient sous la neige (FLAUB., Corresp., 1850, p. 277).
II. — Empl. trans. Souffler qqc./qqn
A. — [Corresp. à souffle I A et II A]
1. [Corresp. à souffle I A; le suj. désigne un être animé]
a) Diriger son souffle sur/vers quelque chose.
♦ [Pour déplacer, enlever, faire voler qqc.] Souffler du duvet. Souffler la poussière (Ac.).
♦ [Pour activer la combustion] Souffler la braise. Il vaut mieux philosopher et poétiser, souffler la flamme dans le fourneau ou la recevoir du ciel, que de porter des chats sur le pavois (HUGO, N.-D. Paris, 1832, p. 294). Il faut revenir souffler le feu qui ne veut pas prendre (POURRAT, Gaspard, 1931, p. 147).
Souffler le feu, l'incendie, loc. fig., vieilli. V. feu1 I A 1.
P. métaph. ou au fig., vieilli. [Le compl. désigne un inanimé abstr.] Répandre comme par un souffle. Synon. allumer, attiser, exalter, propager, semer. Souffler la colère, l'envie, la haine, la rébellion. La faim, soufflant la révolte, promenait au travers de la plaine rase le peuple hurlant des misérables qui voulait du pain (ZOLA, Dr Pascal, 1893, p. 113).
♦ [Pour éteindre la combustion] Souffler une chandelle, une lanterne. Elle souffla la bougie; et tout le monde bientôt dormit aux deux étages de la maison (MAUPASS., Contes et nouv., t. 1, En fam., 1881, p. 356). Cette lueur s'éteignit: Ricarda venait de souffler la lampe (ABELLIO, Pacifiques, 1946, p. 348).
Souffler le chaud et le froid, loc. fig. V. chaud III A 1. [Monval] fut colonel, ruina d'une vilaine façon une grande dame de Naples; à Grenoble voulut souffler le froid et le chaud vers 1830, fut découvert et généralement méprisé (STENDHAL, H. Brulard, t. 1, 1836, p. 261):
2. En attendant, des deux côtés, on souffle le chaud et le froid. Anouar El Sadate déclare un jour que si aucun accord n'est intervenu avant le 5 février prochain, il ne renouvellerait pas le cessez-le-feu, mais il précise le lendemain que cela ne signifie pas qu'il reprendrait la guerre.
Réalités, févr. 1971, p. 79, col. 2.
CHASSE. [Le suj. désigne un chien de chasse] Souffler le poil. Synon. souffler au poil (supra I A 1 a). On dit qu'un chien a soufflé le poil à un lièvre, pour dire qu'il a presque appuyé le museau dessus et qu'il l'a manqué (BAUDR. Chasses 1834).
b) En partic.
) Diriger son souffle dans quelque chose, insuffler de l'air dans quelque chose.
[Pour gonfler, façonner, former qqc.] Souffler un ballon, une vessie. [Un garçonnet] s'amuse à souffler des bulles de savon à l'aide d'un morceau de sureau évidé (D'ALLEMAGNE, Récr. et passe-temps, 1904, p. 249).
P. anal. Souffler qqn. Engraisser, faire grossir quelqu'un. Elle prenait plaisir à l'engraisser, celui-là, à le faire monstrueux et drôle (...) à le souffler, à lui donner l'apparence d'une santé surhumaine (MAUPASS., Contes et nouv., t. 1, Toine, 1885, p. 179). [Le suj. désigne un inanimé abstr.] Elle était vraiment menue, jadis, avec de petits os, des charnières fragiles. Le bonheur l'a, si j'ose dire, soufflée (DUHAMEL, Maîtres, 1937, p. 14).
VERRERIE. Le jeune monté sur sun escabeau, soufflant un abat-jour, les joues gonflées (GONCOURT, Journal, 1874, p. 1011). En Lorraine, le privilège de souffler le verre fut accordé à 4 nobles, qui juraient de n'enseigner leur art qu'à leurs descendants (Cl. DUVAL, Verre, 1966, p. 7).
[Pour envoyer qqc.] Au moyen d'une canne creuse, il m'a soufflé par la fenêtre une lettre artistement enroulée autour d'un gros grain de plomb (BALZAC, Mém. jeunes mariées, 1842, p. 227).
[Pour jouer d'un instrument de musique] Synon. sonner. [Les soldats] le mènent au calvaire, en soufflant de la trompe et battant du tambour (FLAUB., Champs et grèves, 1848, p. 332).
Souffler qqc. dans qqc. Faire pénétrer quelque chose dans quelque chose en soufflant; insuffler. Je me servis d'une pipette en verre dans laquelle je soufflais de l'éther dans la sonde de gomme élastique (Cl. BERNARD, Princ. méd. exp., 1878, p. 236).
Au fig. Souffler qqc. à qqn. [Le compl. désigne une chose abstr.] Donner, insuffler quelque chose à quelqu'un. Il est des natures qui se découragent; d'autres, au contraire, se sentent heureuses de consacrer leurs loisirs à souffler un peu de courage aux indécis (VIOLLET-LE-DUC, Archit., 1872, p. 119).
) TECHNOLOGIE
Diriger un souffle d'air, de gaz dans ou sur quelque chose en actionnant un soufflet, une soufflerie ou par l'opération du soufflage. C'est de la volupté comme de la fournaise du forgeron, tant plus elle est soufflée, tant plus elle est ardente (PÉLADAN, Vice supr., 1884, p. 236):
3. Il peut arriver que la canalisation se bouche peu à peu par suite des condensations; la pression diminue aux appareils. Pour y remédier il suffit de « souffler » la conduite. On ferme le robinet du compteur, on relie la canalisation à une petite pompe à air, on dévisse tous les appareils en laissant les robinets ouverts, on souffle l'air dans toutes les parties de la canalisation...
QUÉRET, Industr. gaz, 1923, p. 241.
BOUCH. [Le compl. désigne un animal abattu] Insuffler de l'air entre la chair et la peau pour faciliter le dépouillement. Souffler un veau, un mouton (Ac.).
CH. DE FER. Souffler une voie de chemin de fer. ,,La niveler par la méthode du soufflage mesuré`` (Lar. Lang. fr.).
MUS. Souffler l'harmonium, l'orgue. Jouer de cet instrument en actionnant son soufflet. (Dict. XIXe et XXe s.).
MÉTALL. Souffler un alliage, un métal. ,,Le soumettre à l'opération du soufflage dans un four d'élaboration métallurgique`` (Lar. Lang. fr.).
MAR. Souffler un canon. Souffler les canons à la sortie du port, c'est brûler un peu de poudre au fond de l'ame pour ensuite les bien nettoyer avec l'écouvillon (WILL. 1831).
) En partic. Chasser plus ou moins vivement quelque chose par la bouche ou par les narines. Souffler du feu par la bouche. Un yankee qui (...) vous dit dogmatiquement en vous soufflant au nez la fumée de son cigare: « Un misérable vieux monde, votre Europe! (...) » (TAINE, Notes Paris, 1867, p. 281). Comme des Orientaux (...) pétuner et souffler de la fumée (CENDRARS, Bourlinguer, 1948, p. 252).
Souffler sa chandelle, loc. fam. ,,Se moucher`` (FRANCE 1907).
Souffler des pois, loc. pop. V. pois B 2 b. Le baron ne ronflait pas, mais, selon l'expression vulgaire (...) il soufflait des pois (A. THEURIET, La Revanche du mari ds RIGAUD, Dict. jargon paris., 1878, p. 352). Au fig. ,,Faire l'important`` (DELVAU 1866, p. 362).
2. [Corresp. à souffle II A] Qqc. souffle qqc./qqn. Produire un mouvement d'air en vue d'un résultat concret.
a) [Le suj. désigne le vent] Éteindre quelque chose. Souffler une chandelle. De brusques coups de vent soufflaient les becs de gaz (ZOLA, Page amour, 1878, p. 877).
b) [Corresp. à souffle II A 2; le suj. désigne une machine ou un agent phys.] Envoyer, déplacer, pousser un fluide et ce qui s'y trouve. La chaleur est intolérable (...) Et l'air qui s'engouffre par la portière semble soufflé par la gueule d'un four (MAUPASS., Au soleil, La province d'Oran, 1884 ds ROB. 1985).
c) En partic. [Le suj. désigne un vent très violent, un gaz, une explosion] Projeter à distance; anéantir, détruire, faire disparaître par la force du souffle. L'ouragan, le vent a soufflé les toitures, les vitres. En ouvrant la porte, elle laissait en effet, le passage aux gaz chauds qui s'étaient accumulés. Ces gaz, dont la température peut s'élever jusqu'à 100 degrés, ont littéralement soufflé la victime et sa fille (Le Monde, 11 juin 1966, p. 24, col. 6). L'explosion a soufflé la maison (HANSE Nouv. 1983).
Au passif. Henri Blanchet, « soufflé » par une grenade, tombera du mur sur lequel il était monté et mourra d'une fracture du crâne (Le Nouvel Observateur, 19 juin 1968, p. 24, col. 4).
B. — [Corresp. à souffle I B] Qqc./qqn souffle qqc. Exhaler (une odeur), sentir quelque chose. Dans les champs, les chevaux morts d'inanition se décomposaient, soufflaient si violemment la peste, que les Prussiens (...) avaient apporté des pioches et des pelles, en forçant les prisonniers à enterrer les corps (ZOLA, Débâcle, 1892, p. 463). La cave soufflait comme une odeur de pourriture et de mort (CHARDONNE, Varais, 1929, p. 218).
Littér. [Le suj. désigne l'air, le vent] Exhaler, répandre (une odeur, un parfum) par son souffle. Vents qui soufflez une si douce haleine Dans les vallons du pays paternel (LECONTE DE LISLE, Poèmes ant., 1852, p. 66). L'air frais du matin, imprégné de rosée encore, soufflait ses dernières bouffées (PESQUIDOUX, Livre raison, 1932, p. 64).
C. — [Corresp. à souffle I C]
1. [Corresp. à souffle I C 1; le suj. désigne une pers., un aspect de son comportement] Pop., fam.
a) Causer une surprise qui coupe le souffle; remplir d'étonnement, surprendre. Synon. ahurir, couper le souffle, estomaquer, méduser, renverser, sidérer, stupéfier. Attitude, culot, insolence qui souffle. Salut, les mômes, j'ai dit (...). Ça les soufflait de me voir surgir (SIMONIN, Touchez pas au grisbi, 1953, p. 40). Les deux jeunes gens qui en avaient vu de toutes sortes, furent soufflés quelques secondes (LA VARENDE, Saint-Simon, 1955, p. 417).
b) En imposer par son aspect, son allure. Synon. pop., fam. épater, époustoufler. Je la souffle avec ces riclots-là [chaussures], j'ai du chic (Scout, 1901 ds ESN. 1966).
2. [Corresp. à souffle I C 2 b]
a) Vieilli. Dire, prononcer (quelque chose); en partic., dire à voix basse (quelque chose à quelqu'un). Synon. chuchoter, murmurer, susurrer. Dutertre se penchant à son oreille lui souffle: « Faut l'embrasser, voyons! » (COLETTE, Cl. école, 1900, p. 293). Sabine, toujours retenue par le poignet, regardait la grosse figure qui lui soufflait ces paroles avec une lippe de contrition (LACRETELLE, Hts ponts, t. 1, 1932, p. 171).
Ne pas souffler mot, loc. fig. V. mot II A 2.
Souffler qqc. à/dans l'oreille de qqn, loc. verb. Dire discrètement, en confidence quelque chose. Synon. glisser à l'oreille. Les grands mots qui gouvernent tout: la gloire, l'honneur, est-ce la raison qui les souffle à notre oreille? (CUREL, Nouv. idole, 1899, II, 5, p. 219). « Je boirais bien un petit verre de ton corps », lui souffle l'Andalou dans l'oreille (MONTHERL., Bestiaires, 1926, p. 439).
b) En partic.
) Dire discrètement quelque chose à quelqu'un dont la mémoire est défaillante pour l'aider. Souffler une leçon, une réplique, un rôle à quelqu'un. Un des figurants s'est amusé à souffler à l'acteur timide, à la place du vrai texte celui-ci: le « confortable » renvoie son cheval (FREUD, Introd. psychanal., trad. par S. Jankélévitch, 1959 [1922], p. 41). Empl. abs. Parfois le mot ne venait pas, — pénible spectacle! — l'orateur cherchait, se crispait en vain (...). La femme, devinant le mot, soufflait doucement, maternellement (A. DAUDET, Trente ans Paris, 1888, p. 106).
[P. méton.;] [le compl. désigne une pers.] Vx. Souffler qqn. Aider quelqu'un en lui rappelant ce dont il ne se souvient plus. Souffler un acteur, un comédien, un élève. Camille et Pierre, un peu embarrassés de leurs grandeurs, s'embrouillèrent en disant le Credo; le curé fut obligé de les souffler (SÉGUR, Mém. âne, 1860, p. 166). [Noémi] parfaitement soufflée de la coulisse par Denoisel, un peu grisée par tout ce public, joua très-passablement son petit rôle attendrissant de femme négligée (GONCOURT, R. Mauperin, 1864, p. 150).
) Au fig. Suggérer, inspirer à quelqu'un ce à quoi il ne pense pas. Synon. conseiller, dicter, insinuer. Souffler une conduite, un plan à qqn. Il leur souffla l'idée (...) de mettre la maison à bas prix (ZOLA, Pot-Bouille, 1882, p. 222). Cette héroïque armée (...) commence d'écouter des voies inquiétantes. (...) On lui souffle l'abandon du devoir, et même la rébellion déclarée (VALÉRY, Variété IV, 1938, p. 82).
D. — [L'idée est celle de rapidité de l'action]
1. Pop., vx. Avaler d'un trait. Synon. fam. siffler. Souffler un verre d'eau de vie. Il aime à souffler sa goutte (HAUTEL 1808).
2. P. anal.
a) Pop., fam. Souffler qqc./qqn à qqn. Enlever subrepticement, ravir à quelqu'un (une chose sur laquelle il compte, une personne à laquelle il tient). Synon. chiper (fam.), dérober, piquer (fam.), prendre, rafler (fam.), ravir. Souffler un emploi à qqn; souffler une cliente, son petit copain à qqn. C'est vous, finaud, qui avez soufflé l'affaire à mon propriétaire (BALZAC, Initié, 1848, p. 453). Le beau Léon était un peu jaloux de moi parce qu'il croyait que je lui avais soufflé une danseuse (CENDRARS, Bourlinguer, 1948, p. 188).
JEUX DE DAMES. Souffler une dame, loc. Prendre une dame, un pion à son adversaire parce qu'il ne s'en est pas servi pour prendre lorsqu'il le devait. P. iron. Je dépenserais bien cinquante mille francs pour enlever à ce grand bel homme sa maîtresse et lui prouver qu'un gros père à ventre de chef de bataillon (...) ne se laisse pas souffler sa dame sans damer le pion (BALZAC, Cous. Bette, 1846, p. 112).
Au fig. Souffler le pion à qqn. ,,Le supplanter dans un emploi ou lui ravir un avantage sur lequel il comptait`` (HAUTEL 1808).
♦ [P. méton.] Souffler un joueur. ,,Lui ôter une dame, un pion`` (Lar. Lang. fr.).
Empl. abs. Souffler n'est pas jouer. Souffler un pion ne constitue pas un coup. « Jeux de mains, jeux de vilains », « souffler n'est pas jouer », aurait-elle pu me dire sur ce ton de petite fille modèle (M. LEIRIS in La Règle du jeu, t. 2, 1955, p. 218 ds REY-CHANTR. Expr. 1979).
b) Arg., vx. Souffler qqn. Arrêter, attraper, saisir. Soufflée par les agents de police et mise à l'ombre (E. DE GONCOURT, La Fille Élisa, 1877 ds RIGAUD, Dict. arg. mod., 1881, p. 352).
c) DR., vx. Souffler un exploit. Ne pas remettre la copie d'un exploit, tout en déclarant sur l'original que copie a été remise. Le fripon d'huissier lui a soufflé un exploit (Ac. 1835, 1878).
REM. Soufflot(t)er, (Souffloter, Soufflotter)verbe intrans., rare. a) [Le suj. désigne un être animé; le plus souvent au part. prés. à valeur d'adj.] Respirer avec peine, en expirant fort. Il marche [ce vieillard] à petits pas, (...) un tantinet soufflotant (D'ESPARBÈS, Yeux clairs, 1894, p. 29). On grimpait quand même toujours... On se dépêchait de plus en plus!... Vannés, soufflotants (CÉLINE, Mort à crédit, 1936, p. 543). b) [Le suj. désigne le vent] Produire un léger mouvement de l'air; bouffer, venter légèrement. Dans la futaie et sur l'eau le vent soufflotte (MORÉAS, Cantil., 1886, p. 224).
Prononc. et Orth.:[sufle] (il) souffle [sufl]. Att. ds Ac. dep. 1694. Étymol. et Hist. A. Intrans. 1. 1121-34 « expulser de l'air par la bouche ou par le nez » (PHILIPPE DE THAON, Bestiaire, 729 ds T.-L.: sufler); 2. a) ) ca 1160 « respirer avec peine, en expirant fort, bruyamment » (Enéas, éd. J.-J. Salverda de Grave, C.F.M.A., 1231: sofler); ) 1694 « prendre un peu de repos » (LA BRUYÈRE, Caractères ds Œuvres, éd. G. Servois, t. 3, 1re partie, p. 223); b) 1668 « ouvrir la bouche pour répliquer, protester, se plaindre » (MOLIÈRE, George Dandin, II, 7 ds Œuvres, éd. E. Despois et P. Mesnard, t. 6, p. 559: sans que j'ose souffler); 3. 1269-78 « faire fonctionner un soufflet, une soufflerie » (JEAN DE MEUN, Rose, éd. F. Lecoy, 21009: Orgues i ra [...] Ou il meïsme soufle et touche); 4. ca 1328 « se déplacer (du vent) » (Propriétés des choses, II, 6, 16 ds T.-L.: le vent [...] souffle souvent). B. Trans. 1. a) ) ca 1175 « envoyer un courant d'air (de gaz) sur quelque chose » (BENOÎT, Ducs Normandie, 17539 ds T.-L.); ) 1636 « souffler sur quelque chose pour l'enlever » (MONET); b) ) 1560 souffler la chataigne à qqn « enlever quelque chose à quelqu'un » (ANEAU, Alector, f ° 53 ds LA CURNE); ) 1655 souffler qqc. à qqn « id. » (MOLIÈRE, L'Étourdi, III, 5 ds Œuvres,t . 1, p. 183); c) ) 1671 souffler un pion jeu de dames (POMEY, s.v. dame); ) 1690 fig. un homme a soufflé le pion à un autre (FUR.); ) 1757 souffler n'est pas jouer (VADÉ, Il était tems ds Rec. d'opéras comiques de differens auteurs, Paris, t. 7, 1773, p. 38); d) 1942 « détruire par l'effet du souffle » (GIDE, Journal, p. 155); 2. a) XIIIe s. [mss] ne mot sofler (Enéas, var. du v. 2698); 1835 ne pas souffler mot (Ac., s.v. mot); b) ) 1538 souffler qqc. en l'oreille de qqn « dire tout bas » (EST. d'apr. FEW t. 12, p. 408a; déjà 1er quart du XIIIe s. sofler en l'oreille a aucun « inspirer quelqu'un, le faire agir » RECLUS DE MOLLIENS, Miserere, 121, 9 ds T.-L.); ) 1636 souffler à l'oreille (MONET); c) 1549 souffler a aucun par derrière ce qu'il doibt dire (EST.); 3. a) 1393 « insuffler de l'air sous la peau pour détacher » (Ménagier, éd. G. E. Brereton et J. M. Ferrier, p. 247: souffler ung poucin; déjà car soufflee, en 1342 dans un doc. de la ville de Tournai, v. GDF. Compl.); b) 1694 souffler l'orgue (Ac.); c) 1723 souffler le verre (SAVARY ds FEW t. 12, p. 407b); 4. 1940 « causer une surprise qui coupe le souffle » (d'apr. ESN. 1966). Du lat. sufflare « souffler sur, gonfler », comp. de sub-, v. sub- et de flare « souffler, exhaler ». Fréq. abs. littér.:3 866. Fréq. rel. littér.:XIXe s.: a) 3 119, b) 6 573; XXe s.: a) 7 711, b) 5 624.
DÉR. Soufflard, adj. et subst. masc. a) Géol., adj. et subst. masc. (Trou) soufflard. Orifice existant dans certaines fractures du sol d'une région volcanique, d'où jaillit, à une température variant entre 100 et 175 °, un jet naturel de vapeur d'eau et de gaz; ce jet de vapeur et de gaz. On trouve des soufflards dans l'ouest des États-Unis et en Toscane (Lar. Lang. fr.). b) Mines, subst. masc. Orifice par lequel un gaz naturel (le plus souvent le grisou) se dégage brusquement; ce jet de gaz. Le grisou apparaît en un point précis de la mine, il jaillit sous pression (...). Cette émission de gaz s'accompagne d'un bruit qui lui a valu son nom de soufflard (Y. MULLER, Mines, Paris, Dunod, t. 2, 1964, p. 36). []. 1res attest. a) 1464-1506 « bouche à feu » (J. MOLINET, Faicts et Dictz, éd. N. Dupire, t. 2, p. 580, 327: souflars; aussi au fém. plur. souflardes « id. » ID., ibid.), b) 1875 « jet de grisou » (Lar. 19e), c) 1904 géol. (Nouv. Lar. ill.); de souffler, suff. -ard.
BBG. — GLASER (K.). Le Sens péjoratif du suff. -ard en fr. Rom. Forsch. 1910, t. 27, p. 935 (s.v. soufflard). — QUEM. DDL t. 34. — SAIN. Arg. 1972 [1907] p. 79 (s.v. soufflard).

souffler [sufle] v.
ÉTYM. Fin XIIe; sufler, v. 1119; lat. sufflare « souffler sur… »; de sub, et flare « souffler ».
———
I V. intr. (et tr. ind.). Déplacer l'air, un fluide; produire un courant d'air dans une direction déterminée.
1 (1372). Déplacer un fluide; produire un mouvement de l'air, un courant d'air dans l'atmosphère. || Le vent souffle : il y a du vent (→ Enveloppe, cit. 13; impétueux, cit. 2). || La bourrasque (→ Linge, cit. 6), la rafale (→ Agrès, cit. 1); l'âpre (cit. 4) bise, le mistral (cit. 2) souffle. || Le vent soufflait doucement; fort, en rafales, en tourbillons sur la côte. Balayer; aspirer, bouffer. || Vent qui souffle de l'est (cit. 1).Impers. || Il soufflait une brise du sud (→ Disperser, cit. 8). || Ça souffle ! : il y a beaucoup de vent.
1 La bise mord ta douce main,
La haine souffle sur ta joie.
Hugo, les Contemplations, II, XX.
Par métaphore et fig. || Le vent de l'esprit soufflant en tempête (→ Lyrique, cit. 7). || Un vent de fronde (3. Fronde, cit. 5), de révolte… soufflait.Loc. Regarder, voir d'où, de quel côté souffle le vent ( Venir) : observer, scruter la tendance des événements.
2 Comment n'avait-elle pas prévu (…) que dans les cœurs les plus droits le désir souffle parfois comme un coup de vent qui emporte la volonté ?
Maupassant, Fort comme la mort, I, I.
(V. 1120). Bible. L'Esprit (supra cit. 2) souffle où il veut : l'inspiration divine est imprévisible.Par ext. || Il y a des lieux où souffle l'Esprit (cit. 4, Barrès).
2 Expulser de l'air, par la bouche ou par le nez, par une action volontaire (à la différence de l'acte réflexe de la respiration). Expirer, respirer; exhaler (supra cit. 11); souffle. || Souffler fort. || Souffler dans, sur ses doigts (pour les réchauffer; → Pauvresse, cit. 2), sur sa soupe (pour la refroidir). || Souffler sur une bougie, pour l'éteindre (→ ci-dessous, II., 1.); sur une braise (cit. 1), sur la flamme, pour l'attiser (→ Foyer, cit. 4). — ☑ Loc. Souffler sur le feu. Exciter.Souffler dans un tuyau (→ Harmonique, cit. 3), dans un piston (cit. 2), une trompe, une trompette (pour en tirer un son. Jouer, sonner).
3 L'Esprit du vent soufflait dans ses clairons de fer (…)
(…) L'Esprit de la tempête, avec ses mille bouches,
Les appelant, soufflait dans ses trompes farouches.
Mieux que taureaux beuglants et loups hurlants de faim,
D'une égale vigueur, d'une haleine sans fin
Il soufflait ! (…)
Leconte de Lisle, Poèmes barbares, « Le massacre de Mona ».
4 Elle avait l'habitude de souffler en l'air pour écarter de son sourcil une mèche indisciplinée qui retombait toujours.
Valery Larbaud, Enfantines, « Rose Lourdin ».
Fig. et vx. || Souffler sur… : détruire, faire disparaître.
4.1 Nous étions si heureux ! Nous nous aimions tant ! Ah ! vous avez soufflé sur un beau rêve; maintenant, je n'ai plus de mari.
E. Labiche, les Petites Mains, III, 10.
(Dans l'Écriture). || Dieu a soufflé sur… : il a dispersé, détruit…T. de magie, de sorcellerie. Ensorceler (en soufflant sur…). — ☑ Vieilli. Les fées ont soufflé sur lui : la chance lui sourit. — ☑ Fig. et fam. Il n'y a qu'à souffler dessus : c'est une chose très facile, qui s'obtient, se fait comme par enchantement (→ Feignant, cit. 2).
Spécialt. Souffler (2.) fort, avec bruit. || Allons, souffle ! sinon, tu n'éteindras pas toutes les bougies d'un coup.Animal qui souffle en manifestant sa colère (→ Fouir, cit. 3; haret, cit.), son inquiétude (→ Naseau, cit. 2).
(V. 1155, sofler). Respirer avec peine, en expirant fort, bruyamment. Haleter (cit. 3); essouffler (s'). → Épuisement, cit. 3; 2. marche, cit. 3. || Laisser souffler son cheval (→ Halte, cit. 1; repos, cit. 9) : lui laisser reprendre souffle. Ébrouer (s'). || Souffler comme un bœuf, comme un phoque (cit. 3).
5 Je leur demanderais volontiers (à ces prédicateurs) qu'au milieu de leur course impétueuse, ils voulussent (…) reprendre haleine, souffler un peu, et laisser souffler leurs auditeurs.
La Bruyère, les Caractères, XV, 5.
(1688). Prendre un peu de relâche, de repos. Reposer (se). || Donnez-moi le temps de souffler.
6 — Rien ne presse, hasarda-t-il. Laissez-moi le temps de souffler, de grâce. Vous n'êtes pas à un jour près.
Courteline, Messieurs les ronds-de-cuir, VIe tableau, II.
Vieilli. Ouvrir la bouche (pour parler). || Ne pas souffler, n'oser souffler. || Ne pas souffler d'une chose (→ ci-dessous, II., 6.).
7 La mère tremblait, comme si elle eût craint les torgnoles égarées. les enfants ne bougeaient plus, ne soufflaient plus, soumis, domptés.
Zola, la Terre, I, II.
3 a (V. 1265). Techn. Faire fonctionner un soufflet, une soufflerie. || Souffler à l'orgue.
b (1611). Spécialt, vx. Actionner le soufflet de l'athanor; se consacrer à l'alchimie ( 1. Souffleur, I., 2.).
4 Rejeter l'air par les évents, en parlant d'un cétacé. Mar. || Elle souffle ! : cri traditionnel par lequel la vigie d'un navire baleinier signalait la présence d'un cétacé venu respirer à la surface.
7.1 Je me perdais dans des spéculations quelque peu stériles, quand j'entendis la fameuse clameur des baleiniers : « Elles soufflent ! » Un troupeau de baleines globicéphales cernait l'Elie-Monnier (…) Quand un globicéphale remonte à la surface, il souffle un jet de vapeur dans un halètement rauque. Le reste de son corps émerge ensuite lentement, détendu dans le repos.
J.-Y. Cousteau et F. Dumas, le Monde du silence, p. 305.
———
II V. tr. (Sujet n. de personne ou d'animal, sauf en quelques emplois; → 3., 5.).
1 (V. 1155). Envoyer un courant d'air, de gaz sur (qqch.). || Souffler le feu. Activer, attiser. || Souffler la forge (cit. 5), en manœuvrant le soufflet.Souffler une bougie, une chandelle (cit. 2), une lampe (cit. 12), une lanterne (cit. 7). Éteindre.
Souffler la poussière, pour la faire partir.Techn. || Souffler le poil. Soufflage (2.). — ☑ Loc. (Chasse). Le chien souffle le poil au lièvre : il s'en approche à le toucher du museau.
2 (1655). Fig. || Souffler qqch. à qqn : le lui enlever. Approprier (s'), dérober, enlever, ôter, ravir (→ Expéditif, cit. 3; fier, cit. 3).(1671). Au jeu de dames. || Souffler un pion : le prendre quand il n'a pas pris alors qu'il le pouvait (ancienne règle). → Damer, cit. 1. Absolt.Souffler n'est pas jouer : le fait de souffler un pion ne constitue pas un coup.
8 Souffler une maîtresse à un ami, c'est une rouerie trop commune pour moi.
A. de Musset, les Caprices de Marianne, II, XVII.
3 (V. 1940). Détruire par l'effet de souffle.
9 Quantité de maisons près du port ont été soufflées par les explosions (…)
Gide, Journal, 19 déc. 1942.
4 (1690). Techn. Envoyer de l'air, du gaz dans… ( Inspirer, insuffler). || Souffler l'orgue, au moyen de la soufflerie.Souffler le verre, l'émail. Soufflage.Souffler un veau, un mouton : insuffler de l'air sous la peau pour la détacher. Gonfler de gaz. || Souffler un ballon.
Souffler un navire : en épaissir un bordé, le bordage, par le soufflage. Former en soufflant. || Souffler des bulles de savon dans un chalumeau.
5 (1559, le sujet désignant le vent). Envoyer, déplacer, pousser (un fluide et ce qui s'y trouve). a (Sujet n. de chose). || Air soufflé par la gueule d'un four (cit. 8). En parlant du vent (littér.) : || L'air soufflait l'inquiète (cit. 11) douceur du printemps.Machine qui souffle des torrents de vapeur. Vomir (→ Frein, cit. 12; fumée, cit. 8).
10 (…) chaque fois qu'un garçon remontait de la cuisine, la porte battait, soufflait une odeur forte de graillon.
Zola, l'Assommoir, III, t. I, p. 104.
11 La huitième armée anglaise souffle un vent d'héroïsme qui fait battre le cœur.
Gide, Journal, 10 avril 1943.
b (Sujet n. de personne). || Souffler la fumée par le nez, par la bouche (→ 1. Fumer, cit. 27; pétuner, cit.). || Souffler de la fumée au nez de qqn ( Camouflet, étym.). || Souffler l'alcool (→ Cramponner, cit. 5; haleine, cit. 2). Exhaler. — ☑ (1580). Loc. fig. Souffler le chaud et le froid : changer d'avis, d'opinion…, ou encore, faire alterner la douceur et la menace.
6 (V. 1130, ne mot sofler). Dire, prononcer.Ne pas souffler mot : se taire. Sonner (vx); → Garder, cit. 86; pénates, cit. 2. || Sans souffler mot (→ Diable, cit. 40).Dire à voix basse. || Souffler qqch. à l'oreille (cit. 14) de qqn : lui dire en confidence. Chuchoter, glisser, insinuer, parler (à l'oreille).(En incise). || Chut, souffla-t-il (→ Nouvelle, cit. 9).Par ext. Suggérer. || Les choses que souffle la folie (cit. 12). || On lui a soufflé les mesures à prendre, ce qu'il fallait faire, de ne pas répondre, qu'il devrait partir.
12 Voilà ce que me souffle l'instinct qui m'a toujours, mieux que la raison, pris la main et fait cheminer dans l'ombre.
G. Duhamel, le Temps de la recherche, X.
13 — Sa Majesté a prononcé plusieurs noms. Et elle a prononcé le vôtre. — Quelqu'un le lui avait soufflé. — Personne ne le lui avait soufflé. J'étais là.
Montherlant, le Maître de Santiago, III, 3.
Dire discrètement (qqch. à qqn) pour aider. || Souffler une leçon (→ Hésiter, cit. 29).Souffler une réplique, son rôle à un acteur au théâtre. Souffleur.Par ext. || Souffler un acteur.
13.1 Le jour (…) où vous souffliez Angèle, au moment où la femme du fils prend le père, on entendit un grand cri sous la scène (…)
Giraudoux, Siegfried et le Limousin, p. 74.
14 Tout le monde connaît la scène des plaideurs, où le souffleur lassé de l'ineptie de l'avocat Petit-Jean, lui dit : Oh ! le butor ! et où Petit-Jean qui se croit soufflé et non injurié, répète : Le butor !
Beaumarchais, Mémoires… dans l'affaire Goëzman, p. 109.
15 (…) Mets-toi là, misérable !
Là, devant le balcon ! Je me mettrai dessous (…)
Et je te soufflerai tes mots.
Edmond Rostand, Cyrano de Bergerac, III, 3.
7 (1940). Fam. Rendre stupéfait. Ahurir (→ Couper le souffle). || Son culot nous a soufflés ( Soufflant).
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soufflé, ée p. p. adj.
ÉTYM. (1342).
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I (Choses).
1 Gonflé (par le souffle, par un gaz).
16 (…) j'ai répondu légèrement à tant de bouffissures. Pardon; vous fûtes écolier, sans doute, et vous savez qu'au ballon le mieux soufflé il ne faut qu'un coup d'épingle.
Beaumarchais, Mémoires… dans l'affaire Goëzman, p. 182.
(1798). Qui a gonflé à la cuisson. || Beignets soufflés. || Omelette soufflée. || Pommes (de terre) soufflées (→ Pavé, cit. 8).
N. m. 2. Soufflé.
Qui contient des inclusions de gaz.Géol. || Roche bulleuse, soufflée.
Léger, comme un ballon gonflé.
17 Une toilette folle, soufflée, aérienne, fait admirablement valoir cette gentillesse anglaise (…)
Th. Gautier, Portraits contemporains, Mme Anna Thillon.
2 (Air, gaz). Produit, déplacé par un souffle. || Air soufflé. Pulsé. || « Contrôle de la température de l'air soufflé » (la Vie du rail, 14 avr. 1963, p. 23).
3 (Abstrait). Rendu artificiellement plus grand (en parlant d'une somme d'argent, des prix). Gonflé. || Les cours sont un peu soufflés, méfiez-vous !
18 Tu connais mieux que moi la valeur des pétroles en ce moment. Je crois que je n'ai pas de conseils à te donner (…) — Oui, bien sûr, je les connais… Mais Jardot me dit qu'en ce moment les cours sont soufflés…
N. Sarraute, le Planétarium, p. 278.
4 Qui a subi l'effet d'un souffle.(1869). Techn. || Poils soufflés, traités par le soufflage.Vx. || Papier soufflé, sur lequel on a projeté une poussière de laine.
(Mil. XXe). Techn. (D'un produit pétrolier). Traité par l'air comprimé. || Bitume soufflé.Alimenté par surpression. || Foyer soufflé.
5 Cuis. || Sucre soufflé, chauffé jusqu'à ce qu'il forme des bulles.N. m. (1754). || Le soufflé : le degré de cuisson du sucre qui le rend soufflé, intermédiaire entre le lissé et le boulé. || Petit soufflé; gros, grand soufflé, où les bulles ressemblent à des flocons.
19 La densité du sirop est fonction de la teneur en sucre. (…) On est : (…)
— au petit soufflé, (si) une écumoire plongée dans le sirop en laisse sortir de petites bulles quand on souffle dessus (67,8% — 109°)
François Léry, Technique de la cuisine, p. 41.
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II (Personnes).
1 (1767, Diderot). Bouffi (→ Baudruche, cit.).Une figure soufflée. Boursouflé.Par extension :
19.1 (…) il engraissait plutôt, mais de cette graisse soufflée que donnent souvent les excès.
Ed. et J. de Goncourt, Sœur Philomène, p. 236.
2 (1935). Fig., fam. Abasourdi, très étonné, qui a le souffle coupé.
20 Cet arrangement déplut visiblement à M. Rezeau, qui l'accepta de mauvaise grâce. Quant à l'abbé (…), il en resta « soufflé ».
— J'avoue ne rien comprendre aux usages de cette maison, osa-t-il nous dire.
Hervé Bazin, Vipère au poing, p. 84-85.
21 C'était clair comme de l'eau de roche, non ? Eh bien, non : ils étaient soufflés. Ils avaient pensé à tout sauf à ça !
Pierre Daninos, Un certain Monsieur Blot, p. 134.
CONTR. Aspirer.
DÉR. Soufflage, soufflant, soufflard, souffle, soufflement, soufflerie, soufflet, souffleur, soufflure.

Encyclopédie Universelle. 2012.