exalter [ ɛgzalte ] v. tr. <conjug. : 1>
1 ♦ Littér. Élever très haut par ses discours, ses enseignements; proposer à l'admiration. ⇒ glorifier, magnifier. Exalter les mérites de qqn. ⇒ célébrer, 1. louer, vanter. « Les enfants ont toujours une tendance soit à déprécier, soit à exalter leurs parents » (Proust). ⇒ admirer (cf. Porter aux nues).
2 ♦ (XVIIe) Chim. anc. Redoubler la vertu de (une substance), accroître l'activité, l'énergie de. ⇒ augmenter, renforcer. « il se trouve dans ce ballon une poudre solaire souverainement propre à exalter le feu qui est en nous » (France).
♢ Méd. Rendre plus actif (un agent pathogène). Certaines conditions exaltent la virulence du microbe.
♢ Littér. Rendre plus fort (une odeur, une sensation lumineuse, etc.). ⇒ rehausser. La tiédeur de la pièce exaltait le parfum des fleurs. « La nuit tombait, exaltant les lumières » (A. Gide).
3 ♦ (Sujet chose) Élever à un haut degré de perfection. Vous supposez « que tout ce qui n'exalte pas l'homme jusqu'au séjour des béatitudes, le rabaisse nécessairement au niveau de la brute » (Senancour).
4 ♦ (fin XVIIIe) Élever (un sentiment) à un haut degré d'intensité. ⇒ animer, exciter, grandir. « cette fierté qu'exalte la pauvreté chez les hommes d'élite » (Balzac).
5 ♦ Élever (qqn) au-dessus de l'état d'esprit ordinaire, échauffer son imagination, son besoin d'idéal. ⇒ animer, électriser, enflammer, enivrer, enthousiasmer, exciter, galvaniser, passionner, soulever, transporter. « les nouvelles, propagées par cette immense rumeur, exaltaient beaucoup la population parisienne » (Duhamel).
♢ Pronom. (réfl.) Elle s'exalte à la pensée de ce grand projet. « on rêve, on fait des châteaux en Espagne, on se crée sa chimère; peu à peu l'imagination s'exalte » (Laclos).
⊗ CONTR. Abaisser, décrier, dénigrer, déprécier, mépriser, rabaisser. Adoucir, attiédir, éteindre, refroidir; calmer.
● exalter verbe transitif (latin exaltare, élever, de altus, haut) Faire de grands éloges de quelqu'un, d'une action, d'une qualité, célébrer les mérites de quelqu'un : Exalter la beauté de la jeunesse. Inspirer à quelqu'un de l'enthousiasme, l'enflammer, le transporter : Les grandes aventures l'avaient exalté dans sa jeunesse. Littéraire. Rendre un sentiment plus violent, plus fort : Son ingratitude exalta ma rancœur. Rendre une substance plus active, plus agissante : Exalter la virulence d'un microbe. ● exalter (synonymes) verbe transitif (latin exaltare, élever, de altus, haut) Faire de grands éloges de quelqu'un, d'une action, d'une qualité...
Synonymes :
- chanter
- élever
- vanter
Contraires :
- abaisser
- bafouer
- blâmer
- dénigrer
- déprécier
- mépriser
Inspirer à quelqu'un de l'enthousiasme, l'enflammer, le transporter
Synonymes :
- électriser
- exciter
- ravir
Contraires :
- abrutir (familier)
- endormir
- ennuyer
Littéraire. Rendre un sentiment plus violent, plus fort
Synonymes :
- attiser
- aviver
- raviver
Contraires :
- apaiser
- calmer
- diminuer
Rendre une substance plus active, plus agissante
Synonymes :
exalter
v. tr.
d1./d Litt. Louer hautement (une qualité, une personne). Exalter les vertus d'un saint. Exalter un homme illustre.
d2./d élever (l'esprit) par la passion, l'enthousiasme. Exalter l'imagination.
— Par ext. Exalter son auditoire.
|| v. Pron. S'exalter facilement.
⇒EXALTER, verbe trans.
I.— [L'action reste extérieure à l'obj.]
A.— Domaine spatial, peu fréq. Porter vers le haut (dans l'espace), élever très haut. Exalter haut. Et les Dieux, à la proue héroïque exaltés (VALÉRY, Alb. vers anc., 1900, p. 76). On l'a crucifié [saint Pierre] la tête en bas, vers le ciel sont exaltés les pieds apostoliques (CLAUDEL, Corona Benignitatis, 1915, p. 403).
— Emploi pronom. passif. Être porté vers le haut. Rossignol (...) Tout près du seringa jaillissant, dont la fleur S'exalte et luit ce soir aussi haut que votre arbre? (NOAILLES, Éblouiss., 1907, p. 205). Nous remontions le Salat qui dévalait à grand bruit et s'exaltait par endroits contre d'énormes barrages de rochers (ABELLIO, Pacifiques, 1946, p. 102).
— P. métaph. Crucifier l'argent? Mais quoi! c'est l'exalter sur la potence, ainsi qu'un voleur; c'est le dresser, le mettre en haut, l'isoler du Pauvre (BLOY, Salut par Juifs, 1892, p. 51).
♦ Emploi pronom. passif :
• 1. Plus les sens deviennent prodigues et faciles, plus l'amour se contient, s'appauvrit ou fait l'avare : quelquefois il s'en dédouble nettement, et rompant tout lien avec eux, il se réfugie, se platonise et s'exalte sur un sommet inaccessible, tandis que les sens s'abandonnent dans la vallée aux courants épais des vapeurs grossières.
SAINTE-BEUVE, Volupté, t. 1, 1834, p. 63.
B.— Au fig., domaine moral, en gén.
1. [Le compl. d'obj. dir. désigne une pers.] Porter quelqu'un à un rang très haut (dans la hiérarchie des valeurs sociales ou individuelles). On a vu, à des époques différentes, les cabales exalter Pradon et dénigrer Racine; s'élever contre l'antimoine et préconiser le système de Law; poursuivre Voltaire et canoniser le diacre Pâris (JOUY, Hermite, t. 2, 1812, p. 193). Je vous sais gré d'exalter l'individu si rabaissé de nos jours par la démocrasserie (FLAUB., Corresp., 1866, p. 88). La mère estime qu'elle s'est acquis des droits sacrés par le seul fait d'enfanter... En exaltant son fruit, c'est sa propre personne qu'elle porte aux nues (BEAUVOIR, Deux. sexe, t. 2, 1949, p. 410).
— Emploi pronom. réfl., rare. Se glorifier soi-même. Cette littérature leur apparaît le mandataire de leur génération, en sorte qu'en l'exaltant ils s'exaltent eux-mêmes; celui qui la ravale leur semble un ennemi personnel (BENDA, Fr. byz., 1945, p. 206).
2. [Le compl. d'obj. dir. désigne une chose, gén. abstr.] Rendre honneur à, donner beaucoup d'importance, de valeur à, louer. Je m'occupais (...) d'exalter l'inculture et d'en dresser l'apologie (GIDE, Immor., 1902, p. 418). Dans les salles d'attente de troisième classe, les compagnies de chemins de fer ont cette délicatesse suprême d'exalter les vertus du cinzano au lieu de vanter les sites alpestres et méditerranéens (AYMÉ, Brûlebois, 1926, p. 146). Saint Paul condamne la chair et exalte l'état de virginité (GILSON, Espr. philos. médiév., t. 1, 1931, p. 111).
3. Domaine relig., rare (sans doute par réf. à l'emploi I C de exaltation). Élever en gloire, célébrer, prôner. Elle ne pourrait être à la fois sainte et républicaine. Du jour où Rome l'exalta sur les autels et dans sa hiérarchie canonique, Jeanne devint suspecte aux libres penseurs (BARRÈS, Cahiers, t. 12, 1919-20, p. 163).
II.— [L'action affecte l'obj. dans ses caractères propres]
A.— Domaine matériel, sensible. Porter (quelque chose) à un très haut degré d'intensité, développer, mettre en valeur fortement ses qualités essentielles. On a cherché à accélérer la pourriture des pâtes, et à l'exalter même, avec des eaux marécageuses (Al. BRONGNIART, Arts céram., t. 1, 1844, p. 117). La neige, demeurée sur les toits, exalte la lumière et la lumière exalte la chaux de la cellule qui semble plus blanche encore (H. BAZIN, Lève-toi, 1952, p. 141). La couleur (...) joue un rôle plastique, dans la mesure où elle sert à souligner, à qualifier les formes; elle joue un rôle pictural dès l'instant où elle devient solidaire de la pâte pour exalter ses effets (HUYGHE, Dialog. avec visible, 1955, p. 76) :
• 2. Ces parfums froids, flottant sur les jardins, apparaissaient dans toute la distinction de leurs détails et de leurs composantes, exaltés contre la fraîche immobilité du crépuscule. Tout prenait une netteté reposée. Tout ce qu'on goûtait se goûtait mieux.
MALÈGUE, Augustin, t. 1, 1933, p. 83.
— Emploi pronom. réfl. ou passif. Prendre une intensité accrue, être nettement dégagé. L'odeur du seringa s'exalte dans l'air chaud (JAMMES, Clairières, 1906, p. 82). L'effet qu'il [un tableau] produit dépend du ton de la tenture sur laquelle il se détache : suivant qu'il apparaît sur un fond de tonalité chaude ou amortie, sa couleur s'exalte ou s'affadit (RÉAU, Archives, bibl., 1909, p. 40). Sa voix [de Pierre] se hausse, s'exalte pour ne plus entendre le martèlement des pas et le bruit des tanks (SARTRE, Jeux sont faits, 1947, p. 167).
— BIOL., PHYSIOL. [Le compl. d'obj. dir. désigne un (système d')organe(s), une fonction, une substance, etc.] Augmenter l'activité, intensifier les propriétés de Exalter l'énergie, la vie. Ils exaltent la sensibilité de cette partie, dont la peau (...) devient susceptible des plus vives impressions, et qui, fortement excitée par les frottements du coït, exalte à son tour la sensibilité des autres organes de la génération (CUVIER, Anat. comp., t. 5, 1805, p. 84). Ici la sensibilité propre de la fibre nerveuse n'est pas exaltée pour la perception des impressions les plus délicates; elle est plutôt émoussée, affaiblie par des organes protecteurs (COURNOT, Fond. connaiss., 1851, p. 160). Qu'elles aient exalté la faculté de cicatrisation, ou diminué l'action frénatrice du sérum (J. ROSTAND, La Vie et ses probl., 1939, p. 129).
♦ Emploi pronom. passif. Devenir plus actif, plus intense, plus virulent. L'appareil nutritif s'émeut tout entier : l'estomac devient sensible; les sucs gastriques s'exaltent (BRILLAT-SAV., Physiol. goût, 1825, p. 59). La virulence du virus rabique s'exalte quand on passe de lapin à lapin, de cobaye à cobaye. Lorsque la virulence est exaltée et fixée au maximum sur le lapin, elle passe exaltée sur le chien et elle s'y montre beaucoup plus intense que la virulence du virus rabique du chien « à rage des rues » (PASTEUR, Travaux, 1884, p. 392).
B.— Domaine moral, en gén.
1. [Le compl. d'obj. dir. désigne une pers.]
a) Domaine éthique, relig., philos., pol., idéol. Inspirer des sentiments élevés, nobles; porter aux réflexions métaphysiques, aux grandes émotions spirituelles, aux opinions extrêmes; développer l'ardeur à convaincre, combattre. Cette continence qu'on vous impose, à vous autres prêtres, influence votre vision du monde, l'exalte et la spiritualise (VAN DER MEERSCH, Invas. 14, 1935, p. 73). C'est vous qui avez exalté les courages, sanctifié l'effort, cimenté les résolutions. Vous fûtes les inspirateurs de tous ceux et de toutes celles qui ont triomphé du désespoir et lutté pour la patrie (DE GAULLE, Mém. guerre, 1959, p. 501).
— Emploi pronom. passif. Devenir supérieur, se perfectionner, se quintessencier, etc. J'ai retrouvé l'instinct animal pour qu'il s'exalte et s'ennoblisse et qu'il devienne enthousiasme. J'ai gagné les régions supérieures enchaîné dans la grappe humaine (BARRÈS, Cahiers, t. 6, 1907-08, p. 230).
— Péj. Rendre fanatique; faire dépasser la mesure. Foi que, sans interruption aussi, les prophètes avaient exaltée en eux et portée à un haut degré de fanatisme (P. LEROUX, Humanité, t. 2, 1840, p. 732). Natacha est victime des mauvais livres qui ont exalté la cervelle de tous ces pauvres enfants révoltés (...) elle divague, et je me suis dit plus d'une fois qu'avec des idées pareilles sa place n'était point dans notre salon, mais derrière une barricade (G. LEROUX, Roul. tsar, 1912, p. 39).
b) Domaine affectif, intellectuel, artistique. Inspirer des idées, des impressions, des sentiments très vifs; porter à un très haut degré d'émotion sentimentale, d'activité mentale. Exalter l'imagination, l'orgueil, la personnalité, les sentiments; l'amour, la solitude exalte. Ses premiers effets [de l'opium] sont toujours de stimuler et d'exalter l'homme, cette élévation de l'esprit ne durant jamais moins de huit heures (BAUDEL., Paradis artif., 1860, p. 412). L'enfant n'est plus exalté par des récits de bataille, mais n'est remué, intéressé que par des livres de science (GONCOURT, Journal, 1884, p. 380). La rencontre d'une femme, aimée autrefois, l'exalte et le bouleverse jusqu'à l'affoler (BOURGET, Nouv. Essais psychol., 1885, p. 225) :
• 3. La passion peut exalter notre âme au point de nous faire croire qu'elle a la puissance de nous rendre immortels.
L'amour est sans contredit ce qui donne le plus d'exaltation à l'âme : c'est une seconde création.
CHÊNEDOLLÉ, Journal, 1807, p. 18.
— Emploi pronom. réfl. ou passif. Devenir plus ardent, plus passionné. Tu t'exaltes et tu ne raisonnes pas (GOBINEAU, Pléiades, 1874, p. 279). Si jadis je m'étais exalté en croyant voir du mystère dans les yeux d'Albertine, maintenant je n'étais heureux que dans les moments où de ces yeux (...) je parvenais à expulser tout mystère (PROUST, Prisonn., 1922, p. 75). Une passion à son sommet s'exalte des plus grands obstacles. À son déclin, le plus petit obstacle la fait fléchir et douter (FAURE, Espr. formes, 1927, p. 135).
— Emploi pronom. réciproque. Se communiquer mutuellement une plus grande ardeur. Cette vie toute passionnée et idéale, où l'amour et la poésie se confondent, s'exaltent et se ravivent l'une de l'autre (FLAUB., 1re Éduc. sent., 1845, p. 22).
— PSYCHOPATHOL. Surexciter l'activité psychique de façon morbide. L'affection mélancolique (...) où l'esprit et l'imagination, dont la sensibilité est singulièrement augmentée et exaltée, sont encore plus malades que le corps (GEOFFROY, Méd. prat., 1800, p. 485).
♦ Emploi pronom. passif. Être affecté d'une surexcitation morbide. Son amour s'exalta, il devint fou, et parla de se brûler la cervelle (STENDHAL, Chartreuse, 1839, p. 21). Cette imagination d'homme du nord, triste et rêveuse (...) s'exalta peu à peu jusqu'au délire; il fut obsédé par des pensées de mort violente (THIERRY, Récits mérov., t. 1, 1840, p. 127).
2. [Le compl. d'obj. dir. désigne un aspect du comportement humain] Donner plus de vivacité à l'expression. L'effort de sa posture scabreuse et peut-être aussi la peur des blessures faisaient affluer sous ses joues un sang chaleureux et foncé qui exaltait encore l'éclat de ses yeux ouverts (, Aphrodite, 1896, p. 144).
— Emploi pronom. réfl. S'exprimer avec une force, une violence accrue. Ils voyaient rouge, ils s'exaltaient jusqu'à la rage. C'étaient des scènes atroces, des étouffements, des coups, des cris ignobles, des brutalités honteuses. D'ordinaire, Thérèse et Laurent s'exaspéraient ainsi après le repas (ZOLA, Th. Raquin, 1867, p. 191).
Rem. La docum. atteste a) Exaltable, adj., rare. Qui peut s'exalter. L'essentiel, pour faire la conquête d'une Italienne, c'est d'avoir l'âme exaltable (STENDHAL, Prom. ds Rome, t. 1, 1829, p. 78). b) Exaltateur, subst. masc. Personne qui exalte. Il fut un magnifique exaltateur, un créateur d'énergies françaises (BARRÈS, Scènes et doctr., t. 1, 1902, p. 243). Les héros aussi servent de modèles et d'exaltateurs. Tous communiquent à l'homme une force (ID., Cahiers, t. 11, 1914-18, p. 329). c) Exaltatif, ive, adj. Qui exalte. Les chutes s'effritent en ruines Qui s'illuminent En obsèques exaltatives (VERHAEREN, Villes tentac., 1895, p. 160).
Prononc. et Orth. :[] ou [e-], (j')exalte [] ou [e-]. Cf. é-1. Ds Ac. 1694-1932. Étymol. et Hist. 1. Xe s. « élever (en mérite, en dignité), glorifier » (St Léger, éd. J. Linskill, 45); 2. 1680 chim. anc. (RICH. : Exalter. Ce mot se dit en Chimie. Dépouiller de toutes choses impures); 3. 1770 « élever à un haut degré d'intensité (un sentiment) » (RAYNAL, Hist. phil., V, 1 ds LITTRÉ). Empr. au lat. class. exaltare « exhausser, élever, honorer » (cf. exaltation). Fréq. abs. littér. :1 280. Fréq. rel. littér. :XIXe s. a) 1 320, b) 1 063; XXe s. : a) 2 523, b) 2 229. Bbg. GOHIN 1903, p. 344.
exalter [ɛgzalte] v. tr.
ÉTYM. Xe; lat. exaltare « élever », au sens fig. du lat. ecclés., de ex- intensif, et altus « haut, élevé ».
❖
1 Littér. Élever, porter très haut par ses discours, par ses enseignements, proposer à l'admiration. ⇒ Glorifier, magnifier. || Exalter les mérites de qqn. ⇒ Louer, vanter. || Ce romancier, ce roman exalte la passion, la volupté. ⇒ Auréole. || La doctrine du Christ exalte les humbles. || Homère exalte la gloire d'Achille. ⇒ Célébrer, chanter. || Exaltons les bienfaits, le nom du Seigneur. ⇒ Bénir. || Celui qu'ils exaltent entre tous. ⇒ Pavois (mettre sur le pavois). || De tous côtés, on l'encense, on l'exalte. ⇒ Admirer (cit. 8); élever, porter (élever jusqu'aux nues, porter aux nues). → Emboucher, cit. 3. || Ils l'exaltent au point d'en faire un dieu. ⇒ Déifier, diviniser.
1 De tout mon cœur (je) t'exalterai
Seigneur (…)
Clément Marot, Psaumes de David, IX.
2 S'il (Dieu) les exalte (les humbles), ce n'est point tant eux qu'il exalte, que ses dons qu'il exalte en eux, qu'il magnifie et qu'il canonise en eux (…)
Bourdaloue, Panégyrique de St François de Paule, II.
3 (…) en quelque ode insipide,
T'exalter aux dépens et de Mars et d'Alcide (…)
Boileau, Épîtres, I.
4 Tout grand poète, tout grand romancier a son cortège d'admirateurs, et surtout de femmes, qui l'exaltent, qui l'entourent (…)
Sainte-Beuve, Causeries du lundi, 29 avr. 1850, t. II, p. 63.
5 Le défunt n'eut pas à se plaindre. Oh ! il fut royalement traité, louangé comme un mort de grande marque : vingt minutes on le couvrit de gloire, on exalta son tact exquis, le désintéressement de son zèle.
Courteline, Messieurs les ronds-de-cuir, VIe tableau, II.
6 (…) c'est toujours le cœur qu'il exalte (Pascal), et la raison qu'il humilie.
André Suarès, Trois hommes, « Pascal », p. 28.
♦ Exalter qqn, qqch. à ses propres yeux : se faire une idée trop élevée de qqn, qqch. || Les enfants ont tendance soit à déprécier (cit. 5), soit à exalter leurs parents.
2 (XVIIe). Anc. chim. Redoubler la vertu de (une substance), accroître l'activité, l'énergie de. ⇒ Augmenter, renforcer. || Exalter une substance en la purifiant.
7 Les Chymistes (chimistes) et les Fous, qui se disent amateurs des sciences secrètes, aiment fort le terme d'exalter, parce qu'il a plus d'emphase, et ils s'en servent à tout propos. Celui qui a imité leur langage, dans la pensée de les rendre ridicules, leur fait dire : Si l'on veut recouvrer l'empire sur les Salamandres, il faut purifier et exalter l'élément du feu qui est en nous, etc…
Dict. de Trévoux, éd. 1771, art. Exalter.
8 Sachez donc qu'il se trouve dans ce ballon une poudre solaire souverainement propre à exalter le feu qui est en nous. Et l'effet de cette exaltation ne se fait guère attendre. Il consiste en une subtilité des sens qui nous permet de voir et de toucher les figures aériennes flottant autour de nous.
France, la Rôtisserie de la reine Pédauque, XV, Œ., t. VIII, p. 131.
♦ Méd. Rendre plus actif (un agent pathogène). || Exalter la virulence d'un germe. || Certaines influences exaltent la virulence du microbe.
9 Qu'aurait-ce été si le venin (de cette maladie) eût été un peu plus exalté ? et il le serait devenu sans doute, si l'on n'avait été assez heureux pour trouver un remède aussi puissant que celui qu'on a découvert.
Montesquieu, Lettres persanes, CXIV.
10 La bile du natif de Saint-Malo en fut encore plus exaltée (…)
Voltaire, Facéties, Diatr. docteur Akakia.
11 Elle avait pour maxime que, lorsque dans le monde on entendait dire du mal de ses amis, il ne fallait jamais prendre vivement leur défense et tenir tête au médisant; car c'était le moyen d'irriter la vipère et d'en exalter le venin (…)
Marmontel, Mémoires, VI.
♦ Rendre plus agissant. || « Exalter les propriétés d'un médicament » (Littré). — Techn. || Exalter une note dans la composition d'un parfum. Par ext. ⇒ Exciter, fortifier, stimuler. || « Exalter les fonctions du foie » (Littré). || L'air pur exalte les forces. ⇒ Vivifier.
♦ Littér. Rendre plus fort (le compl. désigne une odeur, un parfum, la lumière…). → Divette, cit. 1. || La tiédeur de la pièce exaltait le parfum des fleurs. ⇒ Exhaler (faire exhaler). || Le bleu exalte le jaune et réciproquement. ⇒ Rehausser, relever, ressortir (faire).
12 Il y eut d'abord le printemps qui rajeunit et dilata la pestilence, puis l'été qui la fit bouillir et l'exalta.
Léon Bloy, la Femme pauvre, p. 233.
3 Élever à un haut degré de perfection. ⇒ Améliorer, développer, perfectionner. || Exalter les vertus (→ Auto, cit. 2). || Exalter l'homme, l'élever au-dessus de lui-même. || Une civilisation doit exalter l'homme, assurer son épanouissement. ⇒ Hausser (→ Cœur, cit. 169).
12.1 (…) vous supposez toujours que tout ce qui n'est pas surnaturel est vil, que tout ce qui n'exalte pas l'homme jusqu'au séjour des béatitudes, le rabaisse nécessairement au niveau de la brute (…)
É. de Senancour, Oberman, t. I, p. 218.
4 (Fin XVIIIe). Élever (un sentiment) à un haut degré d'intensité. || Exalter l'audace (→ Décision, cit. 9), le courage de qqn. ⇒ Animer, exciter, grandir. || Ses succès ont exalté son orgueil. ⇒ Enfler. || Exalter un enthousiasme, un moral abattu. ⇒ Ranimer, raviver, réchauffer, relever, remonter, réveiller. || Le calme et la paix exaltaient ce goût natif (→ Bruit, cit. 4).
13 Contrarier ouvertement les grands sentiments est un moyen sûr de les rendre opiniâtres et de les exalter.
14 Des cœurs (des Allemands) brûlant d'une haine patriotique (en 1812, contre les Français), exaltés jusqu'au fanatisme par la mysticité.
Ph. P. Ségur, Hist. de Napoléon, XII, VII.
15 D'ailleurs Athanase avait cette fierté qu'exalte la pauvreté chez les hommes d'élite, qui les grandit pendant leur lutte avec les hommes et les choses, mais qui, dès l'abord de la vie, fait obstacle à leur avènement.
Balzac, la Vieille Fille, Pl., t. IV, p. 236.
16 Nous avons cru que la virtuosité des âmes basses pouvait aider au triomphe des causes nobles, que l'égoïsme habile pouvait exalter l'esprit de sacrifice, que la sécheresse de cœur pouvait, par le vent des discours, fonder la fraternité ou l'amour.
Saint-Exupéry, Pilote de guerre, p. 202.
5 Élever (qqn) au-dessus de l'état ordinaire, échauffer son imagination, son besoin d'idéal. ⇒ Animer, chauffer (à blanc), échauffer, électriser, emballer, émouvoir, enflammer; enivrer, enfiévrer, enthousiasmer, exciter, fanatiser, galvaniser, griser, passionner, soulever, transporter. || Un élan qui exalte les âmes (→ Ardeur, cit. 37). || L'orateur exaltait son auditoire.
17 La croisade religieuse n'en fut pas moins prêchée dans les églises. Les vicaires généraux exaltèrent encore le peuple, en faisant faire, pour le salut de la religion, des prières de Quarante-Heures.
Michelet, Hist. de la Révolution franç., t. II, p. 113.
18 Vraies ou fausses, les nouvelles, propagées par cette immense rumeur, exaltaient beaucoup la population parisienne (…)
G. Duhamel, Cri des profondeurs, X, p. 185.
♦ Absolument :
19 Alors, s'exaltant pour exalter : Eh quoi ! c'est vous, ajoute-t-il, que cette pensée n'enflamme point ?
Ph. P. Ségur, Hist. de Napoléon, VIII, IX.
——————
s'exalter v. pron.
1 Littér., didact. Devenir plus virulent; plus intense, plus fort.
20 L'odeur du seringa s'exalte dans l'air chaud.
Francis Jammes, Clairières, p. 82, in T. L. F.
21 (…) c'est dans un fond de basse-fosse qu'il faut confiner les reptiles; on doit les faire mourir à l'ombre, autrement leur venin s'exalte et devient plus dangereux.
Stendhal, le Rouge et le Noir, II, IV.
22 Lorsqu'une bactérie pathogène est repiquée en série sur des animaux réceptifs, sa virulence s'exalte (…)
Poiré, Dict. des sciences, Exaltation de virulence.
2 Esprit, imagination, cœur qui s'exalte (→ Absence, cit. 10). || Orateur, amoureux qui s'exalte. — Récipr. || Les deux orateurs se sont exaltés l'un l'autre.
23 Malheureusement, quand les journées sont si longues, et qu'on est désoccupé, on rêve, on fait des châteaux en Espagne, on se crée sa chimère; peu à peu l'imagination s'exalte (…)
Laclos, les Liaisons dangereuses, Lettre CXVIII.
24 S'enfermant alors dans l'atelier, il s'exalta devant le portrait (…)
Maupassant, Fort comme la mort, p. 43.
——————
exalté, ée p. p. adj. et n.
ÉTYM. (XVIIIe; gloire exaltée, 1656).
1 Qui est devenu très intense, très actif. || Enthousiasme exalté. ⇒ Délirant. || Imagination exaltée. ⇒ Surexcité (→ Coquille, cit. 2).
2 (Personnes). Qui est dans un état d'exaltation ou porté à l'exaltation. || Il est trop exalté. || C'est un tempérament, un esprit exalté. ⇒ Ardent, enthousiaste, passionné. || Tête exaltée (→ Dramatiser, cit. 1).
♦ Par ext. Qui traduit des sentiments exaltés. || Tenir des propos exaltés. || Air exalté.
25 Fénelon n'était point hypocrite, il a été de bonne foi martyr de ses systèmes; c'était ce qu'on appelle aujourd'hui un esprit exalté. Ce mot est devenu à la mode pour exprimer l'enthousiasme.
26 Il lève les yeux au ciel et déchire lentement ses poèmes, dans l'attitude grave et exaltée d'un homme qui fait un sacrifice solennel.
A. de Vigny, Chatterton, III, 7.
27 Plus tard, je le trouvai passé à des idées politiques très exaltées (…)
Renan, Souvenirs d'enfance…, III, III.
28 (En Toscane) où les hommes de la Renaissance ont jeté des chefs-d'œuvre à pleines mains, on se demande avec stupeur ce que fut l'âme exaltée et féconde, ivre de beauté, follement créatrice, de ces générations secouées par un délire artiste.
Maupassant, la Vie errante, p. 49.
♦ N. || Un exalté, une exaltée. || Cet attentat est le fait de quelques exaltés. ⇒ Brûlé (cerveau brûlé, tête brûlée), énergumène, fanatique, fou, furieux.
29 Je suis croyante, moi. N'allez pas me prendre pour une exaltée, une mystique (…)
J. Green, Adrienne Mesurat, p. 147.
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CONTR. Abaisser, avilir, bafouer, blâmer, censurer, confondre, décrier, dénigrer, déprécier, déshonorer, diffamer, mépriser, rabaisser, ravaler. — Amortir, assoupir, attiédir, atténuer, déprimer, endormir, éteindre, refroidir. — (Du p. p.) Calme, doux, flegmatique, froid, impassible, paisible.
Encyclopédie Universelle. 2012.