profond, onde [ prɔfɔ̃, ɔ̃d ] adj. et n. I ♦ A ♦ (Concret)
1 ♦ Dont le fond est très bas par rapport à l'orifice, aux bords. Trou, bassin, puits profond. « Au tournant d'une gorge profonde » (Loti). Un sac profond. « C'était une étroite cuve naturelle [...] profonde d'environ deux pieds » (Hugo).
♢ Dont le fond est très loin de la surface (en parlant des eaux naturelles). Eaux profondes. Un lac très profond. Plonger dans un endroit profond, où il y a du fond. — Racines profondes, qui descendent bas dans le sol.
2 ♦ (1553) Qui est loin au-dessous de la surface du sol ou de l'eau. ⇒ 1. bas, inférieur. « Nous arrivâmes à une crypte profonde » (Baudelaire). — À l'endroit le plus profond de, et ellipt au plus profond de : tout au fond de.
3 ♦ Dont le fond est loin de l'orifice, des bords, dans quelque direction que ce soit. Grottes profondes, grandes, longues. Alcôve profonde. Four, placard profond. Plaie, blessure profonde. Forêt profonde, dont le cœur est très éloigné de l'orée. Baie, rade profonde, où la mer pénètre beaucoup dans les terres.
♢ (Sièges) Dont le bord du siège est éloigné du dossier. « Josette se laissa tomber à côté de lui dans un profond fauteuil » (Beauvoir).
♢ Décolleté profond. Poches profondes.
4 ♦ Très marqué (en parlant d'une trace, empreinte, etc.). Ride profonde. « Il avait sur le front [...] une petite cicatrice assez profonde » (Vigny).
B ♦ Par anal. Qui évoque la profondeur. Des yeux profonds. « Quant au noir artificiel qui cerne l'œil [...] ce cadre noir rend le regard plus profond » (Baudelaire). — Nuit profonde. ⇒ épais, obscur. « C'était pendant l'horreur d'une profonde nuit » (Racine). — Noir, brun, bleu, vert profond, foncé, intense. — Tomber dans un profond sommeil, dans un sommeil intense, d'où le dormeur ne semble pas devoir sortir facilement.
C ♦ Par ext.
1 ♦ Qui descend très bas ou pénètre très avant (mouvement, opération). Forage, sondage profond. Pénétration, percée profonde. Baiser profond.
♢ Profonde révérence, profond salut, où l'on s'incline très bas.
2 ♦ Qui va au fond ou vient du fond des poumons. Aspiration profonde. Soupir profond. ⇒ gros. — Voix profonde. ⇒ grave. « Cette voix grave et sereine, douce et profonde » (Péguy).
II ♦ (XIIIe, repris 1553) (Abstrait)
1 ♦ Qui va au fond des choses (en parlant de l'esprit, de ses activités). Un esprit profond. ⇒ pénétrant. Le fruit de profondes réflexions. « La clarté orne les pensées profondes » (Vauvenargues). C'est trop profond pour moi ! ⇒ 1. fort.
♢ (Personnes) Qui a des pensées, des vues profondes. Écrivain profond. « Paraître profond quand on n'est, comme on dit, que vide et creux » (Beaumarchais).
2 ♦ Intérieur, difficile à atteindre. ⇒ impénétrable, viscéral. « L'ordre profond du grand désordre naturel » (Hugo). Un malaise profond. La signification profonde d'une œuvre. L'être profond. Nos tendances profondes. Au plus profond de soi. — La France profonde : la partie de la population qui représente la réalité la plus permanente de la culture française. « La vraie France, qu'on a tort d'appeler “profonde” alors qu'elle l'est si peu » (Nourissier).
♢ Ling. Qui correspond aux hypothèses d'une théorie quant à la genèse syntactique et (ou) sémantique des formes superficielles du discours. Structure profonde.
♢ Cour. Intense et durable (sentiments). Affections vives et profondes. « Personne ne pourra vous apporter un sentiment pareil au mien, aussi profond » (Martin du Gard). Foi profonde. ⇒ ardent.
3 ♦ Très grand, extrême en son genre. ⇒ grand, intense. Silence profond. ⇒ absolu. Transformation, modification, influence profonde. Différence profonde. Profonde ignorance. Profonde erreur. Un profond mépris. Un profond respect. « La marquise était douée d'une profonde indifférence pour tout ce qui n'était pas elle » (Balzac). ⇒ 1. complet, total. Profond ennui. Joie profonde. « Il est neuf, dit Camille avec un accent de tristesse profonde » (Colette).
♢ Psychol. Débile profond, dont le quotient intellectuel se situe entre 20 et 50. Arriéré profond, dont le quotient intellectuel est inférieur à 20.
III ♦ (Abstrait) N.
1 ♦ N. m. Fig. Profondeur. « Du profond de son être » (F. Mauriac).
♢ Ce qui est profond (II, 1o). Le clair n'exclut pas le profond.
2 ♦ N. f. (1790) Arg. vieilli Poche. « Combien le pantre avait-il dans ses profondes ? » (Hugo).
IV ♦ Adv. (1260) Profondément; bas. Creuser très profond. « Il a cloué comme ça l'araire bien profond dans la terre » (Giono).
⊗ CONTR. Petit, 1. plat, superficiel. Faible, léger, médiocre. — Surface. — Superficiellement.
● profond adverbe À une grande profondeur : Creuser profond. ● profond, profonde adjectif (latin profundus) Dont la profondeur est grande : Un fleuve profond. Un placard profond. Qui a telle profondeur : Creuser un trou profond de 10 mètres. Qui est situé, qui pénètre à une relativement grande profondeur : Un labour profond. La blessure est profonde. Se dit d'un siège où l'on s'enfonce profondément et confortablement : Fauteuil profond. Qui est ample et grave, qui semble provenir du fond de soi : Une voix profonde. Pousser un profond soupir de soulagement. Qui est fondamental, qui régit plus ou moins obscurément le cours des choses, le comportement de quelqu'un : Les causes profondes d'une crise. Qui représente les couches sociales les moins affectées par les changements politiques et reflète les tendances fondamentales d'une nation : La France profonde. Marque l'intensité, le haut degré ; grand, fort : Un profond sommeil. Le mystère le plus profond entoure ce crime. Se dit de quelqu'un qui réfléchit mûrement ou d'une pensée, d'une œuvre riche de substance : Un esprit profond. Se dit d'une couleur foncée : Un bleu profond. Qui est dense, intense : Une obscurité profonde. Se dit d'une salutation faite en inclinant le corps très bas : Faire une profonde révérence. Se dit d'un décolleté qui descend très bas. Se dit de certains muscles, vaisseaux et nerfs de l'organisme, en raison de leur situation. ● profond, profonde (citations) adjectif (latin profundus) Émile Michel Cioran Răşinari, près de Sibiu, 1911-Paris 1995 Il est aisé d'être « profond » : on n'a qu'à se laisser submerger par ses propres tares. Syllogismes de l'amertume Gallimard ● profond, profonde (expressions) adjectif (latin profundus) Au (du) plus profond de quelque chose, de quelqu'un, dans (de) la partie la plus retirée ou la plus intime de : Un désir jailli du plus profond de l'être. Sommeil profond, phase du sommeil pendant laquelle l'électroencéphalogramme est ralenti, par opposition au sommeil paradoxal. Structure profonde, en grammaire générative, organisation abstraite de la phrase à un niveau sous-jacent, avant que ne soient appliquées les transformations aboutissant à la structure superficielle. ● profond, profonde (synonymes) adjectif (latin profundus) Dont la profondeur est grande
Synonymes :
- creux
- encaissé
Qui est situé, qui pénètre à une relativement grande profondeur
Synonymes :
- creux
- enfoncé
Contraires :
- léger
Qui est ample et grave, qui semble provenir du fond...
Synonymes :
- gros
- sépulcral
Contraires :
- aigre
- aigu
- bref
- perçant
- petit
- strident
Qui est fondamental, qui régit plus ou moins obscurément le...
Synonymes :
- éternel
- foncier
- intime
- secret
- vital
Contraires :
- apparent
- passager
- sensible
- visible
Marque l'intensité, le haut degré ; grand, fort
Synonymes :
- complet
- énorme
- extrême
- grand
- infini
- intense
- majeur
- poussé
Se dit de quelqu'un qui réfléchit mÛrement ou d'une pensée...
Synonymes :
- pénétrant
- sagace
Contraires :
- borné
- bouché (familier)
- frivole
- léger
- obtus
- vain
Se dit d'une couleur foncée
Synonymes :
- sombre
Qui est dense, intense
Synonymes :
- dense
- épais
- obscur
Se dit d'un décolleté qui descend très bas.
Synonymes :
Sommeil profond
Synonymes :
profond, onde
adj., n. m. et adv.
rI./r adj.
d1./d Dont le fond est éloigné de la surface, de l'ouverture, du bord. Puits, étang profond.
— (Belgique) Assiette profonde.
|| Par anal. Qui évoque la profondeur. Nuit profonde, très obscure. Sommeil profond, intense.
d2./d Qui est situé très bas par rapport à la surface. Les zones profondes de la mer.
d3./d Qui pénètre, s'enfonce très avant. Racine profonde.
d4./d Voix profonde, grave.
d5./d Fig. Caché au fond de l'être, au fond des choses. Les intentions profondes de qqn. Le sens profond d'un symbole.
d6./d Qui ne s'arrête pas aux apparences. Esprit profond.
|| Par ext. Pensées profondes.
d7./d Très grand, très intense. Profond chagrin.
rII./r n. m. Le plus profond: la partie la plus profonde.
— Fig. Le plus profond de l'être.
rIII/r adv. Il a creusé profond.
⇒PROFOND, -ONDE, adj., adv. et subst.
I. —Adjectif
A. —Dans le domaine concr.
1. [Suivant une direction vers le bas]
a) [En parlant d'un récipient, d'un contenant]
— Profond de + indication de mesure. Dont la hauteur interne, par rapport aux autres dimensions, est de. [La source était] une étroite cuve naturelle creusée par l'eau dans un sol glaiseux, profonde d'environ deux pieds (HUGO, Misér., t.1, 1862, p.467):
• 1. ... les quatre compagnies d'assaut (...) poussèrent d'un coup jusqu'au fossé même qui, large de 10 mètres et profond de 5 mètres, entre ses murs abrupts de grosses pierres carrées, enferme tout l'ouvrage...
BORDEAUX, Fort de Vaux, 1916, p.274.
— Absol. Dont la hauteur interne est grande par rapport aux autres dimensions; dont le fond est éloigné du bord, de l'orifice, de la surface. Bassin, cratère, fossé, gouffre, précipice, puits, trou, sac profond; boîte, caisse, crevasse, fosse, gorge, grotte, ornière, poche, vallée profonde. Ce petit visage barbare, avec ses pommettes mongoles, la dépression profonde des orbites sous le double arc frontal (BERNANOS, M. Ouine, 1943, p.1376).
♦En partic. [En parlant des eaux naturelles] Fleuve profond; eau, mer, rivière profonde:
• 2. ... [je ne cherche pas] comme cela nous arrivait souvent dans le champ du père Martin, cette fontaine profonde et tarie couverte d'un grillage, enfouie sous tant d'herbes folles qu'il fallait chaque fois plus de temps pour la retrouver...
ALAIN-FOURNIER, Meaulnes, 1913, p.186.
b) Qui pénètre très avant dans le sol, dans une épaisseur. Racines profondes. Immédiatement semé après les pluies d'automne, il profite du bref ralentissement causé par l'hiver pour pousser dans le sol des radicelles profondes (VIDAL DE LA BL., Princ. géogr. hum., 1921, p.134).
c) Qui est situé à un niveau beaucoup plus bas que la surface ou la ligne de référence. Couches, régions, zones profondes; fosses profondes de l'océan; eaux profondes des mers. Pêle-mêle, au hasard du coup de filet, les algues profondes, où dort la vie mystérieuse des grandes eaux, avaient tout livré: les cabillauds, les aigrefins, les carrelets (ZOLA, Ventre Paris, 1873, p.697):
• 3. Il savait qu'on pouvait faire soixante pas en ligne droite, et qu'après, il était nécessaire de suivre le mur à tâtons pour ne pas se heurter à l'escalier souterrain du temple. La grande fraîcheur de la terre profonde le calma peu à peu.
LOUYS, Aphrodite, 1896, p.98.
♦P. métaph. Couches, régions, zones profondes de + subst. (psychol.). V. couche II A 3 c ex. de Bergson et de Druon.
— Spécialement
♦ANAT. Qui est éloigné de la surface; qui est très implanté dans les chairs. Couches profondes du derme; muscle fléchisseur profond. V. cubito-phalangettien (synon. s.v. cubito- A 1).
♦COUT., MODE. Très échancré. Décolleté profond. V. décolleté B ex. de Villard.
♦OCÉANOGR. Benthos profond. Synon. benthos abyssal, benthos aphytal; anton. benthos littoral, néritique. V. abysse ex. 4.
d) [En parlant d'un mouvement] Qui descend très bas. Forage profond; pénétration profonde. V. percée ex. de Sainte-Beuve.
— En partic. En s'inclinant très bas. Profonde révérence; profond salut. V. inclination A ex. de Huysmans.
2. [Suivant d'autres directions dans l'épaisseur de qqc., notamment d'avant en arrière]
a) Qui s'étend très loin de l'ouverture; dont le fond est très retiré par rapport à la façade, à la partie visible. Grotte, maison, pièce profonde; placard profond. Dans un golfe profond est une île dont les flancs se courbent et forment un port (CHÊNEDOLLÉ, Journal, 1833, p.185). L'appartement n'avait qu'une seule pièce, pouvant servir d'atelier, avec une alcôve profonde séparée de l'atelier par un rideau (TRIOLET, Prem. accroc, 1945, p.121).
— [En parlant d'un siège] Dont le fond est reculé du bord, où l'on peut s'enfoncer. Divan, fauteuil profond; banquette profonde. Olivier (...), quittant le jeu, jetant les cartes, bâillant, disant: Je m'ennuie, et allant s'enfouir dans une profonde bergère (FROMENTIN, Dominique, 1863, p.71).
b) Qui pénètre loin à l'intérieur de quelque chose. Blessure, cicatrice, entaille, plaie, ride profonde:
• 4. Pour la première fois les marques profondes que la maladie avait creusées sur le visage de la mère Chapdelaine parurent à son mari et à ses enfants être autre chose que des signes passagers de douleur...
HÉMON, M. Chapdelaine, 1916, p.222.
c) Dont le centre est très éloigné du bord. Synon. épais. Forêt profonde. V. bois ex. 1.
— P. anal. Qui a beaucoup d'épaisseur. En quelques endroits où la terre était moins profonde, l'herbe seule couvrait le sol (TOEPFFER, Nouv. genev., 1839, p.27).
♦DÉFENSE, vx. Ordre profond. ,,Disposition d'une troupe sur une grande profondeur`` (LITTRÉ). Anton. ordre mince (vx). Le règlement d'août 1791 (...) admettait l'attaque en ordre profond, par colonne de bataillon (LEFEBVRE, Révol. fr., 1963, p.278). V. mince I B 1 a ex. de Chateaubriand.
B. —P. métaph. ou p.anal., littér.
1. Dans le domaine visuel. Qui provoque une impression de profondeur, d'épaisseur, d'intensité. Nuit profonde; ténèbres profondes. Les riches plafonds, Les miroirs profonds, La splendeur orientale, Tout y parlerait À l'âme en secret Sa douce langue natale (BAUDEL., Fl. du Mal, 1857, p.87). Ils avançaient lentement (...) et les repoussaient (...) vers l'arrière. L'humidité pénétrante et l'horreur de l'obscurité profonde, collée aux parois du navire, les aidaient (PEISSON, Parti Liverpool, 1932, p.194).
♦[En parlant des yeux, du regard] Yeux profonds. Ce regard anxieux, profond, fixé sur moi, me causait une impression étrange (LOTI, Mon frère Yves, 1883, p.116):
• 5. Elle venait de faire admirer dans Sieglinde, les plus beaux et les plus épais cheveux roux; et voici qu'elle revenait blonde, avec un teint de lys, l'oeil profond, une face étrange, énigmatique.
BOURGES, Crépusc. dieux, 1884, p.27.
— En partic. [En parlant d'une couleur, d'une nuance] Qui est très prononcé. Synon. foncé, intense. Bleu profond. La mare était bleue, d'un azur profond (ZOLA, Assommoir, 1877, p.432):
• 6. Le campo de l'Isla Menor, à trente kilomètres de Séville, s'étendait à perte de vue, couvert d'une herbe grasse, au vert profond et presque sombre, nourrie par les inondations du Guadalquivir.
MONTHERL., Bestiaires, 1926, p.406.
2. Dans le domaine auditif. Qui semble avoir son siège dans un lieu ou une partie du corps très en profondeur. Synon. caverneux, grave, sépulcral. Voix profonde; son, bruit, grondement profond; gémissement, sanglot profond. La lyre sur laquelle elle fait entendre quelques notes profondes (VALÉRY, Variété III, 1936, p.112):
• 7. Un faible et profond murmure entrait par les fenêtres, peuplait maintenant le silence revenu et faisait vivre sourdement autour de nous la chambre vide.
GRACQ, Syrtes, 1951, p.113.
3. [En parlant de la respiration] Très intense, qui se fait jusqu'au fond des poumons. Soupir profond; faire une inspiration profonde. Il fit une profonde aspiration, comme si l'air qu'il inhalait devait calmer ses nerfs, qu'il sentait vibrer à l'intérieur de lui (MONTHERL., Célibataires, 1934, p.793). Conan (...) relança sa pipe, en aspirant quelques profondes bouffées (VERCEL, Cap. Conan, 1934, p.98).
4. Qui affecte la personne humaine en profondeur, dans une de ses parties vitales. Anton. léger. Atteinte, lésion profonde. Le médecin dit qu'elle a un trouble nerveux très profond... Il paraît que la montagne ne lui vaut rien (BOURGET, Disciple, 1889, p.168):
• 8. Telle femme, à l'appel de son ancien nom, tombait comme morte, de terreur et de saisissement, dans une crise nerveuse semi-cataleptique si profonde qu'il fallait parfois plusieurs heures pour la faire revenir à elle.
GIDE, Voy. Congo, 1927, p.800.
— [P. méton.] PSYCHOPATHOL. (Arriéré, débile) profond. (Personne) dont le quotient intellectuel est inférieur à 20. Anton. (débile) léger. Sans compter les débiles profonds, on dénombre en France plus d'un million d'enfants souffrant de troubles psychomoteurs (Le Monde, 3 mars 1976, p.20, col. 1).
C. —Dans le domaine abstr.
1. Dans le domaine des activités des êtres supérieurs correspondant à leurs facultés supérieures (intellectuelles, morales, spirituelles)
a) [Postposé; en parlant d'une pers. ou, p.méton., d'une de ses facultés] Qui approfondit la réalité vécue ou pensée, qui va au fond des choses, qui témoigne d'une grande élévation d'esprit ou de coeur ou de jugement, ou qui a une grande perspicacité (dans les limites de la fonction ou de la capacité de l'agent que désigne le subst.). Synon. élevé, pénétrant. Être, paraître profond; coeur, esprit, écrivain, génie, homme profond; âme, intelligence profonde. Tromper les hommes est l'adresse d'un guide profond (SENANCOUR, Rêveries, 1799, p.123). Il est impossible que celui qui créa le restaurant ne fût pas un homme de génie et un observateur profond (BRILLAT-SAV., Physiol. goût, 1825, p.283):
• 9. En quoi sommes-nous supérieurs aux Grecs? (...) Nos philosophes sont-ils plus sages que ne furent les leurs et voit-on en France ou en Allemagne un penseur plus profond qu'Héraclite d'Éphèse?
A. FRANCE, Vie fleur, 1922, p.539.
— [P. méton.; en parlant d'une activité ou d'une production de l'esprit ou du coeur ou de l'âme] Connaissance, méditation, pensée(s), réflexions, retraite, formule, parole profonde(s); texte profond; oeuvre profonde; sens profond d'un mot, d'une phrase, d'un texte; cause(s), raison(s) profonde(s); réalité, vérité profonde. Peut-être y a-t-il un symbole profond caché dans le dessin de Maurice? (FLAUB., Corresp., 1872, p.355):
• 10. Il faut déjà une science profonde pour comprendre que les passions, et leurs preuves si vives, dépendent des mouvements du corps, et que, pour dénouer la colère, il suffit de dénouer les poings.
ALAIN, Propos, 1914, p.177.
♦En partic., vieilli. Science(s) profonde(s). Science(s) difficile(s) ou réputée(s) telle(s), dont l'accès est réservé à quelques initiés. Parler de la philosophie et des sciences profondes comme de théories trop supérieures à un être borné (CONDORCET, Esq. tabl. hist., 1794, p.166). La religion n'était pas (...) une chose toute claire et facile, mais une science abstraite et profonde que Dieu avait pris soin de couvrir de multiples voiles (THARAUD, Mille et un jours Islam, II, 1938, p.26).
b) [Antéposé à un subst. désignant un agent; à valeur intensive et laudative] Qui a toutes les qualités, les connaissances requises. Profond écrivain, penseur, politique. La solution du problème de la couronne fit jadis tressaillir de joie le plus profond géomètre de l'antiquité (J. DE MAISTRE, Soirées St-Pétersb., t.1, 1821, p.96). Écoutez-moi bien, vous allez voir que je suis un profond diplomate, en dépit de mon sexe (PONSON DU TERR., Rocambole, t.3, 1859, p.334).
— [P. méton.; en parlant d'une activité, ou d'une production de l'esprit ou d'une faculté supérieure] Vous n'avez improvisé, dans ces terribles conjonctures, ni l'admirable jugement tactique, ni la profonde connaissance des hommes, qui furent la substance de l'un et l'autre succès (VALÉRY, Variété IV, 1938, p.56).
2. Qui est intérieur, difficile à saisir mais essentiel. Synon. intime. Nature profonde de qqn; instincts profonds; tendances profondes; le moi profond; causes, intentions profondes; conflit, mal, malaise profond; sens profond; signification profonde. Il était loin, d'ailleurs, de se représenter clairement les raisons les plus profondes de son état d'esprit (ROMAINS, Hommes bonne vol., 1932, p.291).
— Spécialement
♦LING., GRAMM. GÉNÉRATIVE. Structure profonde. ,,Structure d'une phrase telle qu'elle est représentée par le ou les indicateurs de base et par l'indicateur syntagmatique transformationnel`` (MOUNIN 1974). Anton. structure de surface. On réduit une structure de surface souvent complexe en un certain nombre de schémas de phrases représentant la structure profonde à l'intérieur de laquelle les principales fonctions grammaticales sont définies (LEROT-KLEIN, Terminol. gramm., Bruxelles, éd. A. De Boeck, 1984, p.69).
♦SOCIOL. [Toponyme, nom propre de région ou de pays + profond(e)] Dont les habitants ont conservé dans leurs habitudes, leur mentalité, leurs traditions, les traits de l'identité socio-culturelle de l'ensemble national ou régional (désigné par le toponyme qualifié). Anton. évolué, moderne. Amérique profonde; Sud profond; France profonde. Garde républicain. On le recrute généralement dans les provinces profondes. Il plantait des artichauts dans le Finistère, gardait les moutons dans le Larzac (Le Nouvel Observateur, 4 mars 1974, p.56, col. 1).
3. a) Littér. [Postposé; en parlant d'un état affectif, sentiment, émotion, ou d'un état de conscience] Qui atteint la personne jusqu'au fond d'elle-même, qui est intense et durable; qui est essentiel. Affection, foi, joie, paix, passion, solitude profonde; amour, attachement, calme, sentiment, sommeil profond; malaise profond. Une transformation profonde travaille aujourd'hui les peuples allemands. Cette révolution n'est point apparente et bruyante comme celles qui s'opèrent en France, en Angleterre (QUINET, All. et Ital., 1836, p.87). Quelle surprise de découvrir tout à coup un être (...) en accord profond avec lui-même, libre, intact! (BERNANOS, Joie, 1929, p.669).
b) [Antéposé à valeur intensive] Qui est porté à un degré extrême, au physique ou au moral. Profonde brûlure; profonde impression; profond mystère, secret, silence, sommeil; profonde attention, indifférence, inquiétude; profond dégoût, ennui, mépris, respect; profondes modifications, réformes:
• 11. En entendant ces expressions de forfanterie, qui annoncent une profonde ignorance ou un aveuglement complet sur la véritable situation politique et morale de la France, j'éprouvais un sentiment mêlé d'irritation et de pitié...
MAINE DE BIRAN, Journal, 1816, p.170.
II. —Adv. En profondeur. Synon. profondément. Ces séances mornes, ou ces discussions de bureau (...) laissent plus de liberté à l'imagination et nous permettent d'aller plus profond. Il s'agit de trouver la vérité, d'atteindre à ce qui est réel (BARRÈS, Cahiers, t.5, 1907, p.165). Raboliot, toujours couché sur l'ados du fossé, au seuil de la plaine, avait glissé profond dans sa rêverie. Son cerveau s'engourdissait lentement, une torpeur le prenait qui était presque du sommeil (GENEVOIX, Raboliot, 1925, p.297).
Rem. Caractérise le résultat du procès (p.ex. creuser profond), alors que profondément caractérise la manière de l'action exprimée par le verbe (p.ex. creuser profondément).
III. —Substantif
A. —masc.
1. Le profond de; au profond de. (Dans) la partie profonde de. Synon. entrailles, profondeurs. Ainsi frappe le coin une yeuse abattue Au profond des forêts pour former la charrue (MORÉAS, Éryphile, 1894, p.210). Le corps de l'ouvrier suivait le mouvement de la hache. Tout l'arbre frémissait, même les radicelles dans le profond de la terre (R. BAZIN, Blé, 1907, p.8).
— Au fig. Oui, dans son lait, ou dans ses fruits, exclama soudain la Belcredi, du profond de sa méditation (BOURGES, Crépusc. dieux, 1884, p.282).
2. Le plus profond de
a) La partie la plus enfoncée ou reculée de. La sonnette de ma maison me réveilla, non par le bruit: il est grêle et enfoui au plus profond de la bâtisse (DUHAMEL, Confess. min., 1920, p.75).
b) Au fig. La partie la plus intime de; le degré extrême de. C'est sans doute le plus profond de l'amour que d'être absolument et réciproquement inexpiable (VAILLAND, Drôle de jeu, 1945, p.116):
• 12. À cet instant-là, il était libre de gagner la porte et d'appeler à l'aide, mais la menace éveillait en lui, au plus profond de la bête, un certain sentiment de chevalerie: il acceptait que l'affaire se déroulât dans un ordre convenu.
AYMÉ, Jument, 1933, p.299.
B. —fém.
1. Arg. Poche. —Voyons, c'est pas Dieu possible! R'gard' voir un peu à tes profondes! (...) Eux fouillaient leurs poches, les coiffes huileuses de leurs shakos, palpaient jusqu'aux coutures intérieures de leurs pantalons (COURTELINE, Train 8 h 47, 1888, II, 9, p.196).
2. SKI. [P. ell. de neige] Couche épaisse de neige (fraîchement tombée de la nuit ou de la journée). Marcher, s'enfoncer dans la profonde; descente en profonde. Dans une station pleine de neige, et glissante de verglas (...) le matin (...) le skieur impatient (...) ne veut pas perdre un mètre de profonde (L'Écho de la Mode, 1er janv. 1967, p.22, col. 1).
Prononc. et Orth.:[], fém. [-]. Att. ds Ac. dep. 1694. Étymol. et Hist. I. A. 1. a) Fin XIVe s. [ms.] «dont le fond est très loin de la surface (en parlant de l'eau)» (NICOLE ORESME, Le Livre du Ciel et du Monde, 119, 6-8, ms. C d'apr. A. D. MENUT et A.-J. DENOMY ds Med. St. t.5, p.314); b) 1476 «dont le fond est très bas par rapport aux bords» profons fossez (GUILLAUME LESEUR, Histoire de Gaston IV de Foix, II, 229 ds Fonds BARBIER); c) 1580 «qui est loin au-dessous de la surface du sol» terres profondes (B. PALISSY, Disc. adm., p.414 ds IGLF); 2. a) 1492 «qui pénètre très en avant» playes profondes (G. TARDIF, Art de faulc., I, 124, Jullien ds GDF. Compl.); b) 1559 «qui présente une grande longueur perpendiculairement au front (d'une troupe rangée)» (AMYOT, César, 58 ds LITTRÉ); c) 1690 «qui présente une grande longueur perpendiculairement à la façade» (FUR.). B. Fig. 1. a) ca 1480 «qui va au fond des choses» (en parlant de l'esprit, de ses activités) (Mystère du Vieil Testament, 36196 ds IGLF); b) 1534 sciences profundes (RABELAIS, Gargantua, Prol., éd. R. Calder et M. A. Screech, p.17); c) 1636 «qui pénètre fort avant dans la connaissance des choses» (MONET); 2. 1524-27 «qui est intense et durable» amour profonde (P. GRINGORE, Vie Ms. S. Loys, II, 3 ds IGLF); 3. 1668 «qui est extrême en son genre» ennui profond (LA FONTAINE, Fables, II, 14, éd. H. Regnier, t.1, p.171); 4. 1727 «qui est difficile à atteindre» (RAMSAY, Les Voyages de Cyrus, t.2, p.172). C. P. anal. 1. a) 1535 en parlant de ce qui évoque la profondeur profondes tenebres (J. CALVIN, Ep. au Roy, éd. Lefranc, XXXII ds Fonds BARBIER); b) 1559 profond sommeil (AMYOT, Caton d'Utique, 38 ds LITTRÉ); 2. 1548 p.ext. «qui descend très bas» profonde reverance (N. DU FAIL, Baliverneries, 193 ds IGLF); 3. id. «qui vient du fond (des poumons)» profonds soupirs (ID., ibid., p.148, ibid.). II. Adv. fin XIIIe s. [ms.] «profondément» (Menestrel de Reims, ch. 60, var. du ms. BN 24430, f° 62a ds GDF. Compl.). III. Subst. A. subst. masc. 1. 1529 «partie la plus profonde» (G. TORY, Champ Fleury, 34 r° cité par P. LAURENT ds Romania t.51, p.42: du profond de leur gouzier); 2. 1535 fig. le profond des cueurs (MAROT, Epitre, 36, 51, éd. C. A. Mayer, 199); 3. 1552 «fond, profondeur» (RABELAIS, Quart Livre, éd. R. Marichal, XX, 62); 4. 1628 «endroit profond dans un cours d'eau» (Arch. des notaires de Nevers, Minutes Taillandier ds GDF.). B. Subst. fém. 1790 «poche» (Le Rat du Chatelet ds SAIN. Sources arg. t.1, p.339). Réfection sous l'infl. du lat. profundus «profond, dense, épais» de l'a. fr. parfunt (1100, Roland, éd. J. Bédier, 1831) issu de profundus avec substitution de préf. Le fait que le par- de parfunt fut ressenti comme le préf. augm. «très» et -funt comme un adj. simple entraîna son élimination au profit de profond. On rencontre en a. prov. les formes preon et pregon (LEVY Prov.), directement issues de profundus avec dissim. de la 1re syll. en e (v. FEW t.9, p.434b). Fréq. abs. littér.:17066. Fréq. rel. littér.:XIXe s.: a) 25883, b) 24093; XXe s.: a) 25169, b) 22445. Bbg. (O.). Déficiences du lex. Ét. rom. Brno. 1974, n° 7, p.9. — GRUNDT (L.-O.). Ét. sur l'adj. invarié en fr. Bergen-Oslo-Tromsø, 1972, p.153; pp.287-294. — NIQUE (Ch.). Notes et déf. pour une approche des ouvrages de ling. Fr. auj. 1972, n° 19, p.61. — WIND 1928, p.40.
profond, onde [pʀɔfɔ̃, ɔ̃d] adj. et n.
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I Concret.
1 Dont le fond est très bas par rapport à l'orifice, aux bords. || Un trou profond (⇒ Grand, → Plantation, cit. 1), peu profond (⇒ Creux), pas profond. || Bassin, puits profond. || Fossés larges et profonds (→ Flanc, cit. 12). || Gorge (cit. 32 et 33), crevasses, ornières (cit. 1) profondes. || Cratère profond. || Vallée profonde. — Un sac profond, une boîte profonde (→ Pâtisserie, cit. 2). || Poches profondes (→ ci-dessous Les profondes).
♦ Profond de : qui a une profondeur de (tant).
1 C'était une étroite cuve naturelle, creusée par l'eau dans un sol glaiseux, profonde d'environ deux pieds (…)
Hugo, les Misérables, II, III, V.
♦ Dont le fond est très loin de la surface, en parlant des eaux naturelles. || Flots (cit. 7) profonds, eaux profondes (→ Couler, cit. 24; haut-fond, cit. 2), mer profonde. || Fleuve large et peu profond (→ Guéable, cit. 2). || Plonger en un endroit profond, où il y a du fond. — Par ext. || Terres fortes et profondes (→ Labourer, cit. 5).
♦ Par comparaison :
2 Vous trouvez que je m'explique assez clairement (dans les Éléments de la philosophie de Newton); je suis comme les petits ruisseaux; ils sont transparents parce qu'ils sont peu profonds (…) Je me donne bien de la peine pour en épargner à nos Français, qui, généralement parlant, voudraient apprendre sans étudier.
Voltaire, Correspondance, 440, 20 juin 1737.
♦ Racines profondes, qui descendent bas dans le sol. — Par métaphore (→ Étendue, cit. 5; libéralisme, cit. 1).
2 (1553). Qui est loin au-dessous de la surface du sol ou de l'eau. ⇒ Bas, inférieur. || Les couches profondes du sol (→ Fossile, cit. 1; houille, cit. 2). || Galerie, cave profonde. || Cachot noir et profond (→ Immonde, cit. 1).
3 Fuyons sous la spirale
De l'escalier profond !
Hugo, les Orientales, XXVIII.
4 (…) nous descendîmes; nous fîmes quelques pas, et, descendant encore, nous arrivâmes à une crypte profonde (…)
Baudelaire, Trad. E. Poe, Nouvelles histoires extraordinaires, « Barrique d'Amontillado ».
♦ La faune des eaux profondes, des grands fonds. ⇒ Abysse, abyssal.
5 Le géographe ne peut pas plus de désintéresser de l'état des couches profondes dans les océans que de celui des couches élevées de l'atmosphère (…)
E. de Martonne, Traité de géographie physique, t. I, p. 354.
♦ ☑ Loc. À l'endroit le plus profond de…, et, ellipt, au plus profond de… : tout au fond de.
3 (1377). Dont le fond est loin de l'orifice, des bords, dans quelque direction que ce soit (horizontale…). || Grottes (cit. 1) profondes. || Profondes narines (→ Face, cit. 2). || Alcôve profonde. ⇒ Enfoncé. || Four, placard profond. || Porche profond (→ Enfoncement, cit. 4). — Dont la dimension perpendiculaire à la façade, ou à un observateur qui fait face, est grande. || Maison profonde. || Pièces larges, profondes et hautes (→ Enfilade, cit. 2). — Milit. || Colonne profonde, dont les hommes sont disposés en nombreuses lignes derrière le front (→ Attaque, cit. 1). Par ext. || Ordre profond, cette disposition, par oppos. à ordre mince. — Forêt profonde, dont le cœur est très éloigné de l'orée (→ 2. Dôme, cit. 5). — Baie, rade profonde, estuaire profond, où la mer pénètre très loin dans les terres.
♦ (Sièges). Dont le bord est éloigné du dossier. || Fauteuil profond et confortable. || Banquette d'automobile profonde. — (En parlant d'un siège où l'on s'enfonce). || Profondes bergères (cit. 2).
6 (…) Josette se laissa tomber à côté de lui dans un profond fauteuil (…)
S. de Beauvoir, les Mandarins, p. 288.
♦ Qui est intérieur, loin de la surface. || Muscles profonds. || Lésion profonde. || Couches profondes du derme.
♦ Très marqué, en parlant d'une trace, d'une empreinte, etc. || Profondes entailles, profondes fissures (→ Exfolier, cit. 1). || Plaie, blessure, balafre (cit.), cicatrice (cit. 3), ride profonde (→ Entassement, cit. 1). || L'empreinte profonde de ses pas.
B Par anal.
1 (XVIIe). Qui évoque la profondeur. || Perspective profonde d'un tableau. || Miroir profond (→ Natal, cit. 1). — Poét. || Ciel profond, sans fond (→ Étinceler, cit. 3; ou, cit. 11). — Des yeux, un regard profond (→ Fenêtre, cit. 7; lèvre, cit. 3; obscur, cit. 6). || Nuit profonde. ⇒ Épais, obscur (→ Dérober, cit. 6). || « C'était pendant l'horreur (cit. 33) d'une profonde nuit » (Racine). — (D'une couleur). Foncé et intense. || Couleur, nuance profonde (→ Franger, cit. 5). || Noir (→ Panthère, cit. 2), brun (→ Lichen, cit.), bleu (→ Gentiane, cit. 1), vert (→ 1. Mousse, cit. 3) profond.
7 Vois-tu briller là-bas cette profonde étoile ?
Hugo, les Feuilles d'automne, XII.
2 (Du sommeil). Intense, d'où le dormeur ne semble pas devoir sortir facilement. || Tomber dans un profond sommeil. || Sommeil, assoupissement (cit. 2) profond (→ Bourdonnement, cit. 2). || Profond somme (→ Ours, cit. 4).
C (Impliquant un mouvement).
1 Qui descend très bas ou pénètre très avant (mouvement, opération). || Labour profond (→ Fouiller, cit. 3). || Forage, sondage profond. || Pénétration, percée profonde. || Affouillement (cit.) profond de la côte par la mer. — Profonde révérence, profond salut, où l'on s'incline très bas.
2 Qui va au fond ou vient du fond (des poumons). || Aspiration profonde. || Soupir profond. ⇒ Gros (→ Inintelligible, cit. 4).
♦ (1532). Voix, sons. || Voix profonde. ⇒ Caverneux, grave, sépulcral (→ Bramer, cit. 1; guttural, cit. 1). || Rire profond (→ Fusée, cit. 7). || Sons profonds et son aigus (→ Éteindre, cit. 34). || Notes profondes et passionnées (→ Mélodique, cit. 2).
8 Tout à coup, le son monte : il y en a de profonds, il y en a d'aigus, il y en a qui tintent, il y en a d'autres qui grondent.
R. Rolland, Jean-Christophe, L'aube, II, p. 58.
9 (…) cette voix grave et sereine, douce et profonde (…)
Ch. Péguy, la République…, p. 260.
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II (Abstrait).
1 (1636). Qui va au fond des choses, en parlant de l'esprit et de ses activités. || Un esprit profond. ⇒ Pénétrant. || Intelligence profonde (→ Organisation, cit. 1). ⇒ aussi Beau (une belle intelligence). || Méditation profonde (→ Besoin, cit. 77; force, cit. 62). || Examen profond (→ Désintéressé, cit. 9). || Une profonde analyse de la situation. || Le fruit de profondes réflexions (→ Examen, cit. 4). || Connaissance profonde des sciences (→ Différencier, cit. 6). || Science profonde (→ Poing, cit. 2). || Les conseils les plus profonds de Molière (→ 2. Farce, cit. 3). || On n'a rien écrit de plus profond sur ce sujet (→ Lumineux, cit. 8). || Pensées, vues profondes (→ Intérieur, cit. 15; lecture, cit. 7). || Un mot profond (→ 1. Meule, cit. 1; place, cit. 26). || Banalités (cit. 7) qui semblent profondes mais qui sont creuses. || C'est trop profond pour moi. ⇒ Abstrait, abstrus, élevé, fort.
10 La clarté orne les pensées profondes.
Vauvenargues, Réflexions et maximes, 4.
11 Lorsqu'une pensée s'offre à nous comme une profonde découverte, et que nous prenons la peine de la développer, nous trouvons souvent que c'est une vérité qui court les rues.
Vauvenargues, Réflexions et maximes, 9.
12 (…) souvent on prend pour une politique profonde ce qui n'est que l'alternative de l'ambition et de la faiblesse. L'histoire attribue presque toujours aux individus comme aux gouvernements plus de combinaisons qu'ils n'en ont eu.
Mme de Staël, De l'Allemagne, I, VI.
13 Les enfants (…) sont bons pour les femmes malheureuses ! Et le docteur Torty finit brusquement son histoire sur ce mot, qu'il croyait profond.
Barbey d'Aurevilly, les Diaboliques, « Bonheur dans le crime », p. 199.
♦ (Personnes). Qui a des pensées, des vues profondes. || Écrivain profond (→ Héritier, cit. 15). || Génies profonds (→ Frivolité, cit. 3). || Un profond politique (→ 1. Politique, cit. 24). || Cromwell, le plus profond des dictateurs (cit. 4). || Paraître profond quand on n'est que vide et creux (→ 2. Politique, cit. 5). || Être profond en pure perte (cit. 16).
14 Le doux éclat d'une épaule assez pure n'est pas détestable à voir poindre entre deux pensées ! (…) les messieurs sont ainsi, même profonds.
Valéry, Monsieur Teste, p. 43.
♦ Vx. Qui possède à fond les qualités de son état. || Un profond scélérat (→ Légalité, cit. 1). — Qui possède à fond les connaissances (d'une discipline).
2 Intérieur, peu sensible, difficile à atteindre, à pénétrer. ⇒ Impénétrable. || La nature profonde et non apparente (→ Foncièrement, cit.). ⇒ Intime. || « L'ordre profond du grand désordre naturel » (cit. 2, Hugo). ⇒ Mystérieux. || L'être profond qui est le moi (cit. 53). || Éléments profonds de l'homme (→ Pénétration, cit. 2). ⇒ Essentiel. || L'âme (cit. 43) est ce qu'il y a de plus profond en nous-mêmes. || Profonds instincts (→ Pétrir, cit. 13), instinct profond de l'homme (→ Accord, cit. 17). || Vocation profonde (→ Critère, cit. 6). || Le travail profond de la chair (→ Excitation, cit. 3). — La France profonde : la partie de la population française qui représente la réalité la plus permanente de la culture (et qui s'exprime le moins en fonction de l'actualité, de la mode). — Psychol. Qui est inconscient ou caractériel. || Nos tendances profondes (→ Eudémonisme, cit.). || Nature profonde d'un homme (→ Freudien, cit.). || Conflit profond (→ Obsessionnel, cit. 1). — Causes profondes (→ Machinisme, cit. 3). || Les raisons profondes d'un choix. — Mal, malaise profond (→ Anévrisme, cit. 3; malade, cit. 8). || Sens profond d'une allégorie (→ Musique, cit. 4), de la langue (→ Génie, cit. 17). || Signification profonde d'une époque (→ Histoire, cit. 31), de la personne (cit. 16).
15 (…) elles aiment le courage aventureux, imprudent, pas du tout le courage tranquille et magnanime de Turenne ou du maréchal Davoust. Tout ce qui est profond n'est ni compris, ni admiré en France : Napoléon le savait bien; de là ses affectations, ses airs de comédie (…)
Stendhal, Mémoires d'un touriste, t. I, p. 24.
16 Mais l'incohérence n'est pas le monopole des fous : toutes les idées essentielles d'un homme sain sont des constructions irrationnelles édifiées tant bien que mal pour expliquer ses sentiments profonds.
A. Maurois, les Silences du colonel Bramble, XIX.
♦ Ling. || Structure profonde, celle des suites produites par la partie syntagmatique (ou base) d'une grammaire générative, avant les transformations qui produisent, à partir de ces suites, les structures superficielles des phrases.
♦ (Déb. XVIe). Sentiments. Cour. Intense et durable. || Sentiments trop profonds qu'on n'exprime pas (→ Délicatesse, cit. 18). || Sentiment plus profond que violent (→ Disparate, cit. 4). || Le respect profond est intérieur (→ Autorité, cit. 48). || Affections vives et profondes (→ Poésie, cit. 17). || Amour profond, passion profonde. || Vouer à qqn une haine profonde. || Foi profonde (→ Béer, cit. 13). ⇒ Ardent, extatique…
17 (…) il avait pour sa Sophie un amour contenu, immense, de ces passions profondes d'autant plus qu'elles sont tardives, plus profondes que la vie même, et qu'on ne peut pas sonder.
Michelet, Hist. de la Révolution franç., V, IV.
18 (…) personne ne pourra vous apporter un sentiment pareil au mien, aussi profond, aussi ancien, resté aussi vivace, en dépit de tout !
Martin du Gard, les Thibault, t. VI, p. 162.
3 (1559). Très grand, extrême en son genre. ⇒ Extrême, intense. || Calme profond (→ Annonciateur, cit. 6); silence profond (→ Approfondir, cit. 16). ⇒ Absolu. || Immobilité, paix profonde (→ Attrait, cit. 12). || Transformation, modification, influence profonde (→ Amener, cit. 20; douteux, cit. 2). || Différence profonde (→ Distinction, cit. 14; litière, cit. 8). || Un profond sérieux (→ Amateur, cit. 7). || Profonde ignorance (→ Dogmatique, cit. 4), ignorance profonde. || Profonde erreur (→ Inoffensif, cit. 4). || Un profond mépris. || Un profond respect (→ Fraternité, cit. 10). || Intérêt (cit. 27) profond. ⇒ Immense, puissant. || Profonde indifférence. ⇒ Complet (→ Ataraxie, cit. 1). || Profond ennui (→ 1. Brouillard, cit. 13), dégoût (→ Avilir, cit. 27). || Tomber dans une mélancolie profonde. ⇒ Aigu (→ Nostalgie, cit. 4). || Joie (cit. 9), volupté profonde (→ Gâter, cit. 22). || Oubli profond (→ Insister, cit. 2).
19 La marquise était douée d'une profonde indifférence pour tout ce qui n'était pas elle (…)
Balzac, l'Interdiction, Pl., t. III, p. 41.
20 Il est neuf, dit Camille avec un accent de tristesse profonde, comme elle eût dit : « Il est mort ».
Colette, la Chatte, p. 197.
21 L'expression de ma profonde et hautement masculine admiration, Comtesse.
Giraudoux, la Folle de Chaillot, II, p. 174.
♦ Psychol. (Par métonymie). || Débile profond, dont le quotient intellectuel (Q. I.) se situe entre 20 et 50. || Arriéré profond, dont le Q. I. est inférieur à 20. ⇒ Idiot.
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III N. m.
1 (1552). Vx ou régional. Partie la plus profonde. ⇒ Profondeur(s). || Le profond des eaux (→ Pied, cit. 8). || Au profond de la mer (→ Étonner, cit. 35), de la terre (→ Millésimer, cit.). ⇒ Entrailles. — Figuré :
22 C'était bien un bruit de pas qu'elle guettait, qu'elle entendait venir du profond de son être (…)
F. Mauriac, la Fin de la nuit, VI.
♦ Régional. || Un profond : un endroit profond dans un cours d'eau.
2 (Fin XVe). Ce qui est profond. || Le clair n'exclut (cit. 21) pas le profond.
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IV Profonde, n. f.
1 (1790). Argot. Poche (d'un vêtement).
23 Thénardier reprit : — Finissons. Combien le pantre avait-il dans ses profondes ?
Hugo, les Misérables, V, III, VIII.
23.1 Les uns pleuraient l'absence de leur montre et les autres celle de leur porte-monnaie et, tout pochetés qu'ils étaient, ils en arrivaient à supposer que la dispute des deux lascars était combinée pour laisser à un troisième complice le soin d'explorer les « profondes ».
24 Quelle poche ! un gouffre qui commençait à la hanche et finissait aux chevilles. Ayant retenu un terme de troupier, il l'appelait sa « profonde », et c'était sa profonde, en effet !
Maupassant, Contes du jour et de la nuit, « Tombouctou ».
2 Neige non tassée, dans laquelle on enfonce profondément. || Skier dans la profonde. || « L'un des apprentis skieurs (…) perd son ski dans la profonde » (F Magazine, févr. 1981, p. 54).
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V Adv. (1260). Profondément, bas. || Creuser très profond, loin de la surface. || Il faut aller plus profond.
25 Il a pesé sur le pieu du frein et il a cloué comme ça l'araire bien profond dans la terre.
J. Giono, Regain, II, IV.
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CONTR. (De I., A., 1.) Petit; supérieur. — Plat, superficiel. — (De B.) Léger (sommeil). — Aigu (voix, son). — (De C.) Superficiel. — (De II., 1.) Banal, plat, superficiel. — Apparent. — Accidentel, passager, superficiel. — Facile. — Borné, faible, médiocre.
DÉR. Profondeur, profondément.
COMP. Approfondir.
Encyclopédie Universelle. 2012.