racine [ rasin ] n. f.
• XIIe; bas lat. radicina, de radix, radicis
I ♦
1 ♦ Partie axiale des plantes vasculaires qui croît en sens inverse de la tige et par laquelle la plante se fixe et absorbe les éléments dont elle se nourrit. ⇒ pivot, radicelle, souche; rhizo-. Racine pivotante, fasciculée; traçante. Racines adventives, aériennes. Racines comestibles. ⇒ betterave , carotte, céleri, navet , radis, rutabaga. « les plantes dont les racines grasses sont bonnes et savoureuses » (Maupassant). — Loc. Prendre racine, se dit d'un végétal qui pousse ou développe des racines capables de le fixer et de le nourrir (⇒ s'enraciner) ; fig. attendre longtemps debout au même endroit (avec une nuance d'impatience) (cf. Faire le planton, le poireau); par ext. ne plus partir, s'installer. Un invité qui prend racine. — Manger les pissenlits par la racine.
2 ♦ Par métaph. Origine, principe profond. Les racines de notre civilisation. ⇒ source. « nos actes ne plongeaient aucune racine dans cette foi » (F. Mauriac). — Loc. Attaquer le mal à la racine, à la base, au principe premier. ⇒ éradiquer.
♢ Les racines de qqn, ce qui constitue le fondement de son identité (milieu, pays d'origine, ascendance...). « Je n'ai jamais été en conflit avec mes racines. Je les retrouve avec naturel et je les respecte » (Ben Jelloun). « c'est à cela que je dois d'être né au loin, d'avoir grandi séparé de mes racines, dans ce sentiment d'étrangeté » (Le Clézio) ⇒ déraciner .
II ♦ Par anal. Portion (d'un organe) par laquelle qqch. est implanté; côté opposé à l'extrémité libre. ⇒ base, naissance. La racine du nez. — Racine d'une dent, partie conique plus ou moins effilée, fixée au maxillaire dans une cavité alvéolaire. Dents à une, deux, trois racines. « une injection de novocaïne pour procéder à l'extraction d'une racine de molaire » (A. Gide). — Anat. Origine, point de départ (d'une structure anatomique, d'un organe). Racine des poils, la partie enfoncée dans le follicule pileux. Racine de la langue, par laquelle elle s'attache au plancher de la bouche. Racines rachidiennes, les deux cordons (antérieur et postérieur) qui se détachent de la moelle épinière pour former, par leur réunion, un nerf rachidien (⇒ radiculaire) . Racine de l'ongle. — Cour. La racine des cheveux, la partie la plus proche du cuir chevelu.
III ♦ Fig.
1 ♦ (XIIIe) Racine nième d'un nombre a : nombre qui, élevé à la puissance n, donne a. Racine carrée, cubique. Degré d'une racine, représenté par son radical. Extraire une racine, la calculer (⇒ radical ) . — Racine d'une équation : valeur de la variable qui satisfait à l'équation.
2 ♦ (1548) Élément signifiant (morphème lié) irréductible d'un mot complexe, obtenu par élimination des affixes et indices grammaticaux, et qui constitue un étymon (⇒ radical; base).
● racine nom féminin (bas latin radicina, du latin classique radix, -icis) Organe généralement souterrain des plantes vasculaires, qui les fixe au sol et qui assure leur ravitaillement en eau et en sels minéraux. Follicule pileux, bulbe d'un poil, d'un cheveu : Arracher le poil avec sa racine. Partie par laquelle un organe, un membre est implanté dans un autre organe ou une partie du corps. Partie par laquelle une structure organique s'attache à un autre organe ou au reste du corps. Ce qui est à la base, à l'origine de quelque chose : Découvrir la racine du mal. Littéraire. Lien solide, attache profonde à un lieu, un milieu, un groupe : Nous tenions à ce pays par des racines profondes. Anatomie Partie d'une dent située dans l'os alvéolaire du maxillaire. Géologie Sous les chaînes de montagnes, partie profonde de la croûte continentale caractérisée par un enfoncement du moho jusqu'à 70-80 km. Linguistique Forme virtuelle à laquelle conduit l'analyse d'un mot après élimination de tous les éléments de formation et indices grammaticaux et qui est porteuse des sèmes essentiels, communs à tous les termes constitués à partir de cette forme. ● racine (citations) nom féminin (bas latin radicina, du latin classique radix, -icis) Jean Racine La Ferté-Milon 1639-Paris 1699 Le ciel même peut-il réparer les ruines De cet arbre séché jusque dans ses racines ! Athalie, I, 1, Abner Antoine de Saint-Exupéry Lyon 1900-disparu en mission aérienne en 1944 Fruits et racines ont même commune mesure qui est l'arbre. Citadelle Gallimard Confucius, en chinois Kongzi ou Kongfuzi [maître Kong] 551-479 avant J.-C. Le sage donne son principal soin à la racine. Entretiens, I, 1 (traduction S. Couvreur) Frédéric Mistral Maillane, Bouches-du-Rhône, 1830-Maillane, Bouches-du-Rhône, 1914 Les arbres aux racines profondes sont ceux qui montent haut. Lis aubre que van founs soun li que mounton aut. Les Îles d'or ● racine (expressions) nom féminin (bas latin radicina, du latin classique radix, -icis) Familier. Prendre racine, s'attarder quelque part, sans manifester l'intention de partir. Racine entière, racine qui est égale à un entier. Racine d'une équation algébrique de la forme P(x) = 0, solution de cette équation. Racines nième d'un réel positif a, réel positif unique α, noté ou a1°n, tel que αn = a. [On a donc ou (a1°n)n = a. Pour n = 2, on dit racine carrée (notée ; pour n = 3, on dit racine cubique.] Racine dorsale, racine ventrale, faisceaux de fibres nerveuses, l'un dorsal, pourvu de ganglions rachidiens, à fonctions sensorielles, l'autre ventral, à fonctions motrices, dont la réunion forme le nerf rachidien. Racine médullaire, racine dorsale ou ventrale d'un nerf rachidien. ● racine (synonymes) nom féminin (bas latin radicina, du latin classique radix, -icis) Organe généralement souterrain des plantes vasculaires, qui les fixe au...
Synonymes :
- pied
Follicule pileux, bulbe d'un poil, d'un cheveu
Synonymes :
- base
Ce qui est à la base, à l'origine de quelque chose
Synonymes :
- assise
Littéraire. Lien solide, attache profonde à un lieu, un milieu, un...
Synonymes :
- origine
Racine
(Jean) (1639 - 1699) poète dramatique français. Il tenta en vain d'entrer dans la carrière ecclésiastique en 1661 et s'établit en 1663 à Paris, où il se lia avec Boileau et La Fontaine. Il fit représenter la Thébaïde (1664) par la troupe de Molière puis confia Alexandre (1665) aux comédiens de l'Hôtel de Bourgogne. Il donna ensuite ses chefs-d'oeuvre: Andromaque (1667), qui fut un triomphe, les Plaideurs (1668), son unique comédie, Britannicus (1669), Bérénice (1670), Bajazet (1672), Mithridate (1673), Iphigénie (1674) et Phèdre (1677), qu'une cabale fit échouer. Malgré les succès remportés auprès du public et de la Cour, Racine renonça au théâtre pour occuper la charge d'historiographe du roi et épousa Catherine de Romanet. Réconcilié avec ses anciens maîtres de Port-Royal (avec lesquels il s'était brouillé en 1666), il mena une vie dévote et veilla à l'éducation de ses sept enfants. Toutefois, sur la demande de Mme de Maintenon, il écrivit deux pièces à thèmes bibliques pour les jeunes filles de Saint-Cyr: Esther (1689) puis Athalie (1691). Il se tourna de plus en plus vers Port-Royal (rédigeant dans le secret Abrégé de l'histoire de Port-Royal), ce qui lui valut une certaine disgrâce auprès du roi. Racine, poète de la passion, plus lyrique qu'héroïque, maîtrise un style approprié au caractère et à la situation de ses personnages. Sa langue, élégante et sobre, vaut par sa précision et par des alliances inattendues de mots. Acad. fr. (1673).
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Racine
n. f.
d1./d Partie des végétaux (à l'exception des thallophytes et des mousses) qui les fixe au sol et par où ils puisent les matières (eau et sels minéraux) nécessaires à leur nutrition.
|| Loc. fig. Prendre racine: rester trop longtemps en un endroit.
|| Racines-échasses: racines maintenant les arbres au-dessus du sol dans les zones marécageuses ou humides (palétuviers).
d2./d Fig. Lien, attache solide qui fonde la stabilité de qqch. Tradition qui a de profondes racines.
|| Cause profonde, principe. Prendre le mal à la racine: s'attaquer résolument aux causes du mal.
d3./d Par anal. Partie par laquelle est implanté un organe. Racine des ongles, des cheveux, des poils.
— Racine d'une dent: partie de la dent implantée dans un alvéole.
— ANAT Racine nerveuse: chacune des deux branches d'un nerf rachidien à l'émergence de la moelle.
d4./d Fig. MATH Racine carrée d'un nombre A: nombre, noté A, dont le carré est égal au nombre A. Racine cubique d'un nombre A: nombre, noté A, dont le cube est égal au nombre A. Racine n ième d'un nombre A, nombre noté A: nombre B tel que B n = A.
|| Racine d'une équation: valeur de l'inconnue qui satisfait à l'équation.
d5./d LING élément irréductible, commun à tous les mots d'une même famille et qui constitue un support de signification.
⇒RACINE, subst. fém.
I. A. — 1. BOT. Partie inférieure, le plus souvent souterraine, d'une plante vasculaire, qui permet la fixation du végétal dans le sol tout en assurant son alimentation en eau et en sels minéraux. Racine principale, secondaire; racine charnue, ligneuse, tubéreuse; racine séminale; racine d'ancrage; collet, poils absorbants, coiffe d'une racine. Tout propriétaire peut couper lui-même, à la limite de sa propriété, les racines, ronces, brindilles qui empiètent sur son héritage (RÉAU-ROND. 1951). [La racine d'un arbre] s'accroît chaque année en longueur et en diamètre. Elle se ramifie en racines secondaires de plus en plus petites dont les dernières s'appellent les radicelles (COCHET, Bois, 1963, p. 15):
• 1. ... sous l'influence de ce milieu tiède, humide, le gland se gonfle, l'écaille de sa robe se fend, (...). L'embryon (...) qui sommeillait s'éveille et émet sa radicule, sa racine filiforme aussitôt orientée perpendiculairement vers le fond.
PESQUIDOUX, Livre raison, 1928, p. 14.
♦ Racine pivotante. Racine principale formant pivot, beaucoup plus développée que ses ramifications. Les arbres à racines traçantes s'arrachent (...) plus aisément que ceux à racines pivotantes (BALLU, Mach. agric., 1933, p. 26).
♦ Racine fasciculée. Racine principale produisant à sa base des racines secondaires de même taille, et dont l'ensemble forme une touffe étalée à peu de profondeur du sol. Les racines fasciculées d'un plant de blé sont étalées en surface (Encyclop. Sc. Techn. t. 9 1973, p. 283).
♦ Racine traçante. Racine qui prend naissance à la partie supérieure du pivot et qui s'étend horizontalement sous la surface de la terre. Souvent il s'y joint des saules et des aunes, dont les racines traçantes sont semblables à des cordes. Si un de ces arbres vient à être renversé par quelque inondation fortuite, il pousse des rejetons de chacun de ses rameaux, et reproduit à lui seul une forêt (BERN. DE ST-P., Harm. nat., 1814, p. 240).
♦ Racines adventives. Racines qui prennent naissance latéralement sur une tige ou sur un rhizome. Le système des racines se complète par des racines dites adventives, parce que développées sur la partie souterraine de la tige. (...) par exemple (...) les racines qui paraissent là où les tiges des ronces touchent terre, ou sur les gourmands des fraisiers (PLANTEFOL, Bot. et biol. végét., t. 1, 1931, p. 32). V. adventif ex. 4, 5.
♦ Racines-crampons. ,,Racines adventives restant courtes et dures, et servant à fixer les plantes grimpantes au support`` (GATIN 1924).
♦ Racines aériennes. ,,Racines naissant à une hauteur plus ou moins grande sur les branches d'une plante, et se développant tout d'abord dans l'air avant d'atteindre le sol`` (GATIN 1924). Certaines Monocotylédones, par exemple les Orchidées et les Aroïdées épiphytes, produisent d'abondantes racines aériennes; c'est le cas des Vanda des tropiques dont les racines ressemblent à de longs cordages enroulés autour des arbres (Encyclop. Sc. Techn. t. 9 1973, p. 284).
2. DR. CIVIL. ,,Fruits pendants par (les) racines. Fruits qui ne sont pas encore coupés et cueillis. Des fruits pendants par les racines font partie du fonds`` (Ac.).
3. Loc. verb.
a) Prendre racine. [Le suj. désigne un végétal] Se fixer au sol, commencer à se développer. Synon. s'enraciner. Cette bouture prend racine. Dans les disjoints de leur masse avaient pris racine des touffes de framboisiers et des sapins en aigrettes (POURRAT, Gaspard, 1930, p. 289).
♦ Proverbe. À la Sainte Catherine, tout bois prend racine. Ce sont les morts qui veillent aux germinations durant ce long mois [de novembre] où « à la Sainte Catherine tout bois prend racine » (LA VARENDE, Normandie en fl., 1950, p. 223).
— P. anal. Demeurer longtemps debout et immobile. Autour d'eux, la foule semblait avoir pris racine, les yeux restaient obstinément tournés vers le mystère de cette façade obscure, gardée par la police (MARTIN DU G., Thib., Été 14, 1936, p. 553).
— Au fig.
) [Le suj. désigne une pers.]
♦ S'installer chez quelqu'un, prolonger trop longtemps une visite sans manifester l'intention de partir. Synon. s'implanter, s'incruster. Il prend racine chez vous (Ac. 1935).
♦ Se fixer dans un lieu, s'y créer des attaches solides. Me voici en chemin pour Naples, je n'y veux être qu'un mois si je puis, mais c'est un pays où je prends aisément racine (COURIER, Lettres Fr. et Ital., 1811, p. 845). Le Survenant ne repartira pas. À la première nouvelle, il épousera Angélina Desmarais. À son tour il prendra racine au Chenal du Moine pour le reste de ses jours (GUÈVREMONT, Survenant, 1945, p. 196).
) [Le suj. désigne une chose abstr.] Se fixer profondément, solidement. Mais ce que j'essaie de vous expliquer, c'est comment ces passions politiques ont pris racine dans la bourgeoisie et pourquoi elles sont au même degré d'exaspération alors qu'elles devraient être oubliées et déjà regrettées (AYMÉ, Confort, 1949, p. 160).
b) Jeter des racines. [Le suj. désigne un végétal] Émettre des racines. Les Corinthiens vénèrent cet arbre [un antique figuier] (...). Il a plongé dans la terre des branches qui y ont jeté des racines et se couronne encore d'un épais feuillage (A. FRANCE, Pierre bl., 1905, p. 132).
— Au fig., vieilli. ,,S'attacher fortement`` (LITTRÉ).
c) Manger les pissenlits par la racine.
4. Vieilli. Plante dont la seule partie souterraine est comestible (carotte, betterave, navet, etc.); partie souterraine que l'on mange. Se nourrir de racines. C'est un homme qui ne vit que de racines (Ac.). Potage aux racines (Ac. 1798-1878). Julienne. Ce potage est composé de carottes, navets, poireaux (...) ces racines seront coupées en filets de la grosseur d'une demi-ligne (VIARD, Cuisin. impérial, 1814, p. 4). La nouvelle arriva dans les gazettes qu'un brave homme, nommé Parmentier, avait planté de ces racines [la pomme de terre] aux environs de Paris (ERCKM.-CHATR., Hist. paysan, t. 1, 1870, p. 58). Le cultivateur de la Chine, vivant de riz, de fruits, de racines, de poisson (FAURE, Espr. formes, 1927, p. 88).
B. — [Utilisation des racines]
1. PHARM. Partie souterraine de certains végétaux que l'on utilise le plus souvent en infusion ou en décoction, dans un but thérapeutique. Racines apéritives majeures, celles d'ache, d'asperge, de fenouil, de persil et du petit houx; racines apéritives mineures, celles de chiendent, de câprier, de garance (LITTRÉ). Plusieurs racines sont aussi employées en médecine. On peut citer la racine de la guimauve, qui est adoucissante et la racine de la gentiane, qui est amère (G. BONNIER, Élém. de Bot., Paris, P. Dupont, 1892, p. 16):
• 2. ... on fera boire abondamment d'une tisanne faite avec les racines de chiendent, fraisier et chicorée (...). Lorsque la fièvre sera tombée et que les douleurs seront diminuées, on nourrira un peu plus le malade...
GEOFFROY, Méd. prat., 1800, p. 410.
2. ÉBÉN. Partie souterraine de certains arbres ou végétaux que l'on utilise pour fabriquer meubles et objets divers. Un meuble de racine d'orme, d'if, d'olivier; pipe en racine de bruyère. Une boîte de racine de buis (Ac.). Dans le vestibule, (...) la canne en racine de chêne, (...) que mon grand-père avait rapporté d'Irlande (GREEN, Journal, 1933, p. 171). Le style du berceau pouvait changer, mais il avait en général la forme d'un coffre et il était en bois ou en fibres de racines de cèdre (PAGE, Dern. peuples primit., 1941, p. 112):
• 3. Les ébénistes surent tirer un parti merveilleux de bois qu'on avait jusqu'alors traités en parents pauvres. (...), les fabricants utilisèrent du frêne rosé, du thuya moucheté, (...), de la racine de buis...
VIAUX, Meuble Fr., 1962, p. 146.
— En partic. Bois de racine. ,,Bois pris dans les racines ou le collet d'un arbre pour en faire des marqueteries`` (FONV. 1974). Le bois de racine, comme celui de loupe, possède des fibres très serrées formant des mouvements variés qui ont un effet décoratif (FONV. 1974).
C. — Au fig.
1. a) Origine, principe. Il faut couper le mal dans sa racine (Ac. 1935). Je désire dégager la racine des causes diverses de ma défaite (SAINT-EXUP., Pilote guerre, 1942, p. 370).
— Loc. verb.
♦ Avoir sa racine dans. Avoir son origine dans. Je suis persuadé que le talent de Mme Sand a sa racine dans la corruption (CHATEAUBR., Mém., t. 4, 1848, p. 555).
♦ Être à la racine de. Être à l'origine de:
• 4. Sur les photos de famille, je tire la langue, je tourne le dos: autour de moi on rit. Ces menues victoires m'encouragèrent à ne pas considérer comme insurmontables les règles, les rites, la routine; elles sont à la racine d'un certain optimisme qui devait survivre à tous les dressages.
BEAUVOIR, Mém. j. fille, 1958, p. 18.
b) Au plur. Les racines (de qqn). Ses origines considérées sur le plan de l'hérédité sociale. Avoir des racines dans un lieu. C'est ici, c'est à Borville, c'est dans cet étroit sillon, que l'on s'enfonce jusqu'aux racines des trois Baillard (BARRÈS, Colline insp., 1913, p. 86). Sans doute à cause de ses racines paysannes, il [Proudhon] réagit violemment contre le mysticisme saint-simonien (BEAUVOIR, Deux. sexe, t. 1, 1949, p. 190).
2. Attache, lien profond. On est vieux sans avoir rien fait de ce que font les autres; sans aucune attache, aucune racine, aucun lien, presque sans amis, sans parents, sans femmes, sans enfants! (MAUPASS., Contes et nouv., t. 2, Ermite, 1886, p. 1055):
• 5. ... ces attachements de l'enfance laissent de si profondes racines, qu'il nous suffisait d'être de nouveau ensemble pour que renaisse, chaque fois, d'emblée, notre confiante et affectueuse amitié d'autrefois.
MARTIN DU G., Souv. autobiogr., 1955, p. LVIII.
II. — P. anal.
A. — [À propos d'un être vivant]
1. ANATOMIE
a) ,,Origine d'une structure`` (Méd. Biol. t. 3 1972). Racine nerveuse (Méd. Biol. t. 3 1972).
♦ Racine rachidienne, du nerf rachidien. Chacune des deux parties par lesquelles chaque nerf rachidien se détache de la moelle épinière. Les expériences de Magendie établissaient pour la première fois qu'un nerf rachidien, formé par la réunion des fibres de ses deux racines, les unes sensitives (celles de la racine postérieure), les autres motrices (celles de la racine antérieure), est un nerf mixte (CAMEFORT, GAMA, Sc. nat., 1960, p. 257).
b) Partie constituant la base d'un organe. Synon. naissance. Racine du doigt, de la langue, des ongles. Ses sourcils s'étendaient comme des arcs d'ébène, et leurs pointes se rencontraient à la racine d'un nez mince, aquilin (GAUTIER, Rom. momie, 1858, p. 275). Figurez-vous, Suzanne, que nous avons tous une petite tache brune à la racine du cou (DUHAMEL, Suzanne, 1941, p. 242). C'est à cette période que se développe une obésité vraie portant surtout sur le visage, le ventre et la racine des membres (QUILLET Méd. 1965, p. 486).
— ODONTO-STOMATOLOGIE. Racine dentaire, racine (de la dent). ,,Portion de la dent qui est incluse dans l'alvéole`` (Méd. Biol. t. 3 1972). Dent à une, deux, trois racines. Hier, (...) injection de novocaïne pour procéder à l'extraction assez pénible d'une racine de molaire (GIDE, Journal, 1942, p. 128).
— Racine d'un poil, d'un cheveu. Partie enfoncée dans le follicule pileux. Le poil naît (...) par une partie renflée formant la racine et portant le nom de bulbe (RICHER, Nouv. anat. artist., t. 2, 1920, pp. 103-107).
♦ À la racine de. À la base de. On s'est contenté de frapper trois coups (...) — au lieu d'aller ouvrir, il est resté assis, sentant sa peau se soulever à la racine de ses poils, dans ses cheveux, dans sa barbe (RAMUZ, Gde peur mont., 1926, p. 142). La lampe lui chauffait le visage et faisait perler des gouttes de sueur à la racine de ses cheveux (GREEN, Moïra, 1950, p. 59).
— Loc. fig. Jusqu'à la racine des cheveux, des ongles. Entièrement. Geneviève était Métidieu jusqu'à la racine des ongles (BOSCO, Mas Théot., 1945, p. 13). Il arpentait sa chambre d'un air méditatif, quand on entendit deux coups de sonnette impérieux; Lambert rougit jusqu'à la racine des cheveux: « Mon père! Je ne l'attendais pas si tôt! » (BEAUVOIR, Mandarins, 1954, p. 243). De la plante des pieds jusqu'à la racine des cheveux. Même sens.
2. PATHOL., vx. Racine d'un cancer, d'un polype. Prolongement que ces tumeurs morbides envoient dans les parties voisines (d'apr. NYSTEN 1824).
— Loc. verb.
♦ Couper le mal dans sa racine. ,,En détruire la cause et l'empêcher de se reproduire`` (NYSTEN 1814).
♦ Couper, trancher le mal dans/à sa racine (au fig.). Détruire, de manière définitive, ce qui peut être néfaste. Les Strozzi d'abord, qui, prévoyant l'avenir, ont voulu trancher le mal dans sa racine (DUMAS père, Lorenzino, 1842, I, 13, p. 217). L'abbé: J'ai agi ainsi parce qu'il fallait couper le mal à sa racine (MONTHERL., Ville dont prince, 1951, I, 1, p. 855).
♦ Aller à la racine du mal (au fig.). Attaquer ses bases, ses origines. Votre commission a proposé des amendements utiles sans doute, mais qui ne vont point à la racine du mal (CHATEAUBR., Disc. et opin., 1826, p. 484). Seulement ces mesures ne peuvent par elles-mêmes arrêter la crise de notre temps, parce qu'elles ne vont pas à la racine du mal (MAUROIS, Journal, 1946, p. 32).
B. — [À propos d'une chose]
1. Partie inférieure, base. La racine de la flamme près de l'arc subsiste longtemps, mais la partie médiane s'éteint plus vite que l'extrémité (J. Phys. et Radium, 1926, p. 115D). [Dans une hélice aérienne] la fraction de pas partielle est rarement constante de la racine de l'aile à son extrémité (MARCHIS, Nav. aér., 1904, p. 610).
a) MINES et CARR. ,,Partie enterrée d'une masse de pierres en cours d'exploitation`` (NOËL 1968).
b) GÉOL. ,,Base d'un pli anticlinal qui a été couché puis étranglé par l'effort orogénique`` (NOËL 1968).
♦ Racine des montagnes. Base, pied. Le sol arrivait du bout de l'horizon (...) sans rencontrer l'obstacle d'une haie, et il s'étendait d'un seul tenant jusqu'à la racine des montagnes (BOSCO, Mas Théot., 1945, p. 54).
c) PÊCHE. Synon. de bas de ligne (v. bas1 II A 1 d). La racine était faite autrefois en crin japonais ou de Florence (ou racine anglaise); la racine japonaise (...) disputait le marché à la racine anglaise. (...) le nylon (...) a détrôné définitivement les racines (POLLET 1970).
2. RELIURE. ,,Veau utilisé en reliure dont la surface a été parsemée de taches foncées imitant les veines d'une planche de bois sciée dans le sens des fibres`` (BRUN 1968).
III. — Spécialement
A. — 1. LING. ,,Élément irréductible récurrent dans les formes lexicales apparentées par le sens et considéré en linguistique historique comme la forme la plus ancienne expliquant tous les dérivés ultérieurs`` (D. D. L. 1976). Hovesh (...). C'est celui qui a le droit de mettre en prison, c'est le gouverneur. Le mot qui, en hébreu moderne, désigne le prisonnier est tiré de la même racine et se dit havoush (GREEN, Journal, 1939, p. 238):
• 6. La distinction entre racine et radical n'est pas toujours très claire. Le terme racine est souvent réservé à la linguistique diachronique: ainsi des « racines indo-européennes » sont reconstituées à partir de la comparaison du grec, du latin, etc.
Lang. 1973.
2. Racines grecques. Recueil de mots grecs classés par famille et destinés à être appris par cœur. Les leçons surtout étaient mon écueil; je passais des heures à apprendre deux stances de racines grecques (MICHELET, Mémor., 1822, p. 203). Ces chapitres ne sont pas destinés à être régulièrement, et l'un après l'autre, appris par cœur, comme on faisait jadis des Racines grecques (M. BRÉAL, A. BAILLY, Les Mots gr. groupés d'après la forme et le sens, 1911, p. VII).
♦ Jardin des racines grecques. V. jardin B 7.
B. — 1. INFORMATIQUE
♦ Racine d'un programme. ,,Segment principal, en mémoire centrale, pendant l'exécution d'un programme segmenté`` (GING.-LAURET 1973). La racine contient notamment les données nécessaires à l'appel des autres segments (MORVAN Informat. 1981).
♦ Racine d'un arbre. ,,Dans une structure en arbre, point de départ de la structure`` (GING.-LAURET 1982).
2. MATHÉMATIQUES
a) Racine nième d'un nombre. Nombre qui, élevé à la puissance n, donne le nombre proposé. Racine carrée, cubique, quatrième. Nous allons tout d'abord supposer, à seule fin de faciliter les calculs, que le refroidissement suit la loi particulière indiquée par la formule [X], (...): le rayon terrestre, avec cette loi, varierait comme l'inverse de la racine septième du temps (H. POINCARÉ, Hyp. cosmogon., 1911, p. 182).
♦ Racine carrée d'un nombre positif a. Nombre positif dont le carré est égal à a. Claudine, au tableau. Extrayez la racine carrée de deux millions soixante-treize mille six cent vingt (COLETTE, Cl. école, 1900, p. 120).
♦ Racine cubique d'un nombre a. Nombre dont le cube est égal à a. Toi, Tambour, tu vas m'additionner 3.977 et 7.896. Et toi, Gorgô, s'il te plaît, tu m'extrairas la racine cubique de 27. Allez, vous avez de quoi vous amuser (CLAUDEL, Protée, 1914, I, 4, p. 320).
— Extraire une racine. Calculer une racine. V. ex. de Colette et de Claudel supra.
b) Racine d'une équation algébrique. Toute valeur de la quantité inconnue qui satisfait à cette équation. La théorie de l'élimination algébrique permet de montrer immédiatement que toute racine d'une équation algébrique à coefficients algébriques est aussi racine d'une équation algébrique à coefficients entiers (E. BOREL, Paradoxes de l'infini, 1946, p. 106).
REM. 1. Mot-racine, subst. masc., ling. Dérivé ayant une forme identique à celle du mot dont il dérive, ou plus brève encore (d'apr. Ling. 1972). Le mot-racine (...) est celui qu'on peut considérer comme constitué par l'élément irréductible dit racine, sans addition d'aucun élément de formation (MAR. Lex. 1933). 2. Racinaire, adj., anat., bot. Qui se rapporte aux racines. En 1810, Rufz de Lavison établissait le rôle de l'endoderme dans la sélection des matières dissoutes. Celles-ci, refusées par le cytoplasme des parenchymes racinaires, peuvent cependant pénétrer dans les poils absorbants et circuler jusqu'à l'endoderme par le simple jeu des lois physiques (Hist. gén. sc., t. 3, vol. 1, 1961, p. 461). L'ensemble des racines d'une plante constitue l'appareil radiculaire, encore appelé système racinaire (Lar. agric. 1981).
Prononc. et Orth.:[]. Att. ds Ac. dep. 1694. Étymol. et Hist. A. 1. a) 1re moit. XIIe s. empl. p. im., désigne les provignements du peuple d'Israël (Psautier de Cambridge, éd. Fr. Michel, LXXIX, 9); 1188 id. (AIMON DE VARENNES, Florimont, 8395 ds T.-L.: Amors li ot el cuer planté Un arbre [...] Les racines sont de sospir, Et tuit li rain sont de desir); b) 1155 fig. « principe, source, cause » (WACE, Brut, 1883, ibid.); 1160-74 (ID., Rou, éd. A. J. Holden, III, 11287: coveitise [...] Ele est racine de pechié); c) 1155 id. « souche, origine (d'une personne) » (ID., Brut, 3927 ds T.-L.); 2. 1155 bot., cette partie de la plante étant utilisée comme nourriture (ID., op. cit., 237, ibid.: vivre de racines Come bestes e salvagines); ca 1160 comme médecine (Eneas, 7969, ibid.); spéc. ca 1256 rachine de fonoil, de fleurs de glai (ALDEBRANDIN DE SIENNE, Régime du corps, 51, 11; 78, 19, ibid.). B. P. anal. « partie d'un élément implantée dans une autre » 1. dans le corps d'un être vivant ca 1200 (Li Dialoge Gregoire, 171, 1, ibid.: lur lengues jus trencier de la racine); XIVe s. la racine dou col [des oiseaux] (Moamin et Ghatrif, III, 8, 2, ibid.); av. 1549 racine des cheveulx (MARGUERITE DE NAVARRE, Heptaméron, LIV, éd. M. François, p. 342); 1575 racine [des dents] (PARÉ, Œuvres, XV, 26, éd. J.-Fr. Malgaigne, t. 2, p. 444b); 1690 racine [de poil] (FUR.); id. pathol. racine [de cancer; de cor au pied] (ibid.); 2. 1269-78 « base, fondation d'une construction » la racine [de la forteresse] (JEAN DE MEUN, Rose, éd. F. Lecoy, 7860). C. Fig. 1. XIIIe s. [ms.] math. la racine cube d'aucun nombre (Comput [Bibl. nat. fr. 7929], fol. 15 ds LITTRÉ); 2. 1578 ling. (H. ESTIENNE, Deux Dialogues, éd. P.-M. Smith, p. 421: mot [...] qui est procedé de la mesme racine). Du b. lat. « racine » (Pelagonius, mil. IVe s.), dér. de radix, -icis, d'où l'a. fr. raïs, v. raifort. Fréq. abs. littér.:2 862. Fréq. rel. littér.:XIXe s.: a) 4 878, b) 3 278; XXe s.: a) 3 194, b) 4 330.
DÉR. Racinage, subst. masc. a) Bot., rare. [En parlant d'un végétal] Fait de produire des racines et de se fixer au sol. Synon. enracinement. La vérification de la soudure [des greffes-boutures] et du bon racinage est faite [au printemps] (BRUNET, Matér. vitic., 1909, p. 15). b) Agron. alim. Ensemble des racines alimentaires (carottes, salsifis, navets, betteraves, etc.) (d'apr. FÉN. 1970). — []. — 1re attest. 1869 « ensemble des racines alimentaires » (LITTRÉ); de racine, suff. -age.
racine [ʀasin] n. f.
ÉTYM. V. 1130; du bas lat. radicina, de radix, radicis « racine », a supplanté l'anc. franç. raiz.
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1 Partie axiale des plantes vasculaires, qui croît en sens opposé à la tige et par laquelle la plante se fixe et absorbe les éléments dont elle se nourrit. || Parties d'une racine. ⇒ Coiffe, collet, culasse, poil (poils absorbants). || Faisceaux libériens (⇒ Liber), faisceaux ligneux de la racine. || La racine n'a pas d'épiderme. || Racine principale (⇒ Pivot); petite racine (⇒ Fibrille, radicelle; → Gangue, cit. 3) issue de ramifications. || La, les racines d'une plante. || Assise des racines. ⇒ Souche. || Sortes de racines. ⇒ Fasciculé, fibreux, pivotant, tuberculeux. || Les racines qui s'enfoncent plus ou moins profondément dans le sol ne doivent pas être confondues avec les tiges rampantes (⇒ Stolon) ou souterraines (⇒ Rhizome). || Aspect des racines : racine fusiforme, didyme, tubéreuse (⇒ Griffe), présentant une partie renflée, dite racine bulbeuse (⇒ Bulbe, bulbille, caïeu, oignon). || Racine en botte, en paquet, chevelue (⇒ Chevelu, queue-de-renard). || Direction des racines (→ Géotropisme, cit.). || Racine verticale, profonde; racine traçante. || Rejeton qui pousse sur la racine. ⇒ Accru, boulure. || Racine de l'embryon, de la plantule. ⇒ Radicule. || Racines qui naissent de la tige. ⇒ Adventif; crampon. || Racines aériennes des orchidées épiphytes, du palétuvier. || Racines munies de suçoirs. || Plantes parasites sans racines, munies de suçoirs. || Association d'une racine et d'un champignon. ⇒ Mycorhize. || Relatif à la racine. ⇒ Racinaire; radical; et rhizo-, -rhize. — ☑ Loc. Prendre racine : pousser, développer des racines servant à fixer et à nourrir. || Plante qui prend racine en un lieu (→ Cimenter, cit. 2). ⇒ Raciner; enraciner (s'). || Rameau de figuier (cit. 1), marcotte, bouture qui prend racine (→ aussi fig., ci-dessous, 2.). — Arbre qui envoie, jette des racines. ⇒ Pivoter. || Plantes qui maintiennent (cit. 13) des sols, fixent des sables par leurs racines. || Enfouissement des racines pour les plantations (cit. 1). || Pralinage des racines. || Racine émottée. || Racines apparentes, noueuses des gros arbres (→ Épaulement, cit. 2; parasite, cit. 9). || S'asseoir sur une racine (→ 1. Canette, cit.). || Arracher une plante avec ses racines. ⇒ Déraciner (→ Destin, cit. 17); arrache-racines, arrachoir. || Racine d'une plante déracinée (cit. 3), déchaussée (→ aussi Hérisser, cit. 9).
♦ ☑ Loc. fam. Manger les pissenlits par la racine (cf. dans le même sens, Fumer [cit. 26] les mauves par la racine) : être mort et enterré. — Dr. || Les fruits pendants par les racines sont des biens immeubles (cit. 1).
1 On les voyait pendant des heures entières à genoux dans les plates-bandes, maculant leurs robes et leurs mains occupées à introduire la racine des jeunes plantes en des trous qu'elles creusaient d'un seul doigt piqué d'aplomb dans la terre.
Maupassant, Une vie, XI.
2 (…) de formidables chênes dont les racines, échappées du sol, ressemblaient à des nids effarés de grands serpents.
Huysmans, Là-bas, VIII.
3 La tige et la racine ordinairement comparables par leur forme à un cylindre ou à un cône, sont, comme eux, considérées par Van Tieghem comme symétriques par rapport à un axe; leur symétrie est une symétrie axiale et leur coupe transversale est un cercle, figure symétrique par rapport à un point, qui est son centre. La feuille, généralement aplatie, se montre au contraire symétrique par rapport à un plan (…) la tige est un axe qui porte des feuilles, la racine est un axe sans feuilles.
F. Moreau, in Encycl. Pl., Botanique, p. 507.
♦ Racines comestibles. ⇒ Betterave (cit. 2), carotte, céleri, chicorée, chou-navet, chou-rave, gingembre, navet, radis, raifort, rutabaga, salsifis… || Racine de curcuma. ⇒ Arrow-root. || Racines fourragères (→ Prairie, cit. 1). || Racine de gentiane, de guimauve, de jalap, de réglisse, utilisées en pharmacie. || Racine de garance. ⇒ Alizari. || Racine d'orcanète. || Pipe en racine de bruyère.
4 (…) on ne voyait que des carottes, des navets, des oignons, des salsifis, toutes les plantes dont les racines grasses sont bonnes et savoureuses, et dont la feuille inutile sert tout au plus à nourrir les bêtes.
Maupassant, Clair de lune, « Légende du Mont Saint-Michel. »
♦ (V. 1155). Vx. Racine comestible. || « Prenez six gros oignons, trois racines de carottes… », trois carottes (Brillat-Savarin, → Hacher, cit. 3). || La pomme de terre (cit. 1), racine farineuse. || « Ils vivent de pain noir (cit. 8), d'eau et de racines » (La Bruyère). || Manger des racines.
♦ Techn. Bois des racines d'un arbre, utilisé pour faire des marqueteries.
2 ☑ (Av. 1690, Furetière). Loc. Prendre racine : rester longtemps debout au même endroit. || Il a pris racine au milieu de ces tulipes (La Bruyère, → Planter, cit. 21). — Par ext. || Prendre racine chez qqn : ne plus partir, s'installer. ⇒ Enraciner (s'), implanter (s'). — (Sujet inanimé; plus particult : sentiments, affects). S'enraciner. || Le désir qui prend racine en qqn (→ Emporter, cit. 49).
5 (…) je n'avais plus la puissance de bouger, mes genoux vacillaient sous moi, et j'avais pris racine dans le sol, regardant fixement le cadavre (…)
6 Enfin, les situations, les combinaisons de personnages, les sujets de récits et de drames ne trouvent pas en moi de quoi prendre racine et produire des développements dans une seule direction.
Valéry, Variété, Œ., t. I, Pl., p. 1467.
7 Mais, autour d'eux, la foule semblait avoir pris racine.
Martin du Gard, les Thibault, t. VII, p. 204.
♦ (Mil. XIIe). Par métaphore ou fig. Origine, liens profonds. || Les racines de l'orgueil (cit. 8), d'un amour (→ 1. Mère, cit. 10), de l'honneur (cit. 30). — Jeter, pousser, plonger des racines… || L'esprit de sédition a poussé des racines profondes (→ Libéralisme, cit. 1). ☑ Attaquer (cit. 40) le mal à sa racine, dans ses racines; couper le mal à sa racine. ⇒ Principe. — Les racines de qqn : ce qui constitue le fondement de son identité (ascendance, milieu, pays d'origine…). — Les racines de la lignée capétienne. ⇒ Origine (→ Légitimité, cit. 3). || Écrivain qui parvient jusqu'à la racine des choses. ⇒ Commencement (→ Fulguration, cit. 2).
8 Les racines de la société française n'étaient point dans les Bourbons, mais dans la nation. Ces obscures et vivaces racines ne constituaient point le droit d'une famille, mais l'histoire d'un peuple. Elles étaient partout, excepté sous le trône.
Hugo, les Misérables, IV, I, I.
9 C'est là, c'est dans l'absolue ignorance de notre raison d'être qu'est la racine de notre tristesse et de nos dégoûts.
France, le Jardin d'Épicure, p. 67.
10 Nos pensées, nos désirs, nos actes ne plongeaient aucune racine dans cette foi à laquelle nous adhérions des lèvres.
F. Mauriac, le Nœud de vipères, II, XX.
11 Les Français sont attachés sur la terre d'Algérie par des racines trop anciennes et trop vivaces pour qu'on puisse penser les en arracher. Mais cela ne leur donne pas le droit, selon moi, de couper les racines de la culture et de la vie arabes.
Camus, Actuelles III, p. 127.
11.1 La perte d'Euréka (le domaine familial) me concerne aussi, puisque c'est à cela que je dois d'être né au loin, d'avoir grandi séparé de mes racines, dans ce sentiment d'étrangeté, d'inappartenance.
J.-M. G. le Clézio, Voyage à Rodrigues, p. 113.
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II
1 (Fin XIIe). Origine, point de départ (d'une structure anatomique, d'un organe). ⇒ Naissance. || La racine du nez, de la langue, des ongles. || Racine des cuisses (→ Girl, cit. 2). || Racine des cornes. ⇒ Base.
♦ (Après 1650). Spécialt. || Racine d'une dent : partie conique plus ou moins effilée, fixée au maxillaire dans une cavité alvéolaire. || Couronne, collet et racine(s) d'une dent. || Dents à une racine (incisives, canines, prémolaires), à deux racines accolées ou non (molaires inférieures), à trois racines (molaires supérieures). || Les racines sont recouvertes de cément, elles laissent en leur milieu le passage aux nerfs et aux vaisseaux aboutissant à la pulpe dentaire. || Apex d'une racine. — Dent à racines recourbées. ⇒ Barré. || Extraction d'une racine de molaire (→ Flanchage, cit.). — Dent à pivot enfoncé dans la racine.
♦ Racine des poils : partie des poils enfoncée dans le follicule pileux. || Racines grumelées (cit. 1) des cheveux. — Par ext. Partie des cheveux la plus proche du cuir chevelu. || Couper une mèche (1. Mèche, cit. 8) à la racine, au ras du crâne. — Racines blanchissantes des cheveux (cit. 17) teints. — Cuir chevelu. || Frisson (cit. 20) né à la racine des cheveux. — ☑ Fig. Jusqu'à la racine des cheveux : entièrement (→ Documenter, cit. 2).
12 Il était maintenant très près de cette Madeleine, retardant le moment de passer devant elle, s'occupant à regarder son oreille, la racine de ses cheveux épais, tordus, serrés comme un écheveau.
Loti, Matelot, XXXI.
13 (…) ses cheveux noirs de l'espèce qui se peigne si bien qu'on en voit les racines, qui fait des hommes chauves à trente ans, mais qui donne à vingt-cinq l'air d'être mieux nettoyé que les autres.
Aragon, les Beaux Quartiers, II, XVII.
♦ Anat. || Racine rachidienne : chacun des deux cordons (antérieur et postérieur) qui se détachent de la moelle épinière pour former, par leur réunion, un nerf rachidien (⇒ Radiculaire). || Racine postérieure, antérieure d'un nerf. || Le ganglion spinal, renflement de la racine postérieure.
♦ Méd. || La racine d'une tumeur, la partie la plus profonde. — Racine d'un cor, base de la partie centrale, très durcie.
14 Ils disent qu'il y a de l'eau dans le genou; on croit que le mal est borné à la place brûlante que recouvre la couche de ouate. Mais il sent la racine bien plus profonde.
J. Chardonne, les Destinées sentimentales, p. 497.
2 Pêche. Crin solide, fil de nylon attaché au bas de la ligne pour supporter les hameçons. ⇒ Florence. || Racine anglaise.
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III Fig.
1 (XIIIe). Math. || Racine nième (ou n-ième, n-ième) d'un nombre N : nombre qui, élevé à la puissance n, est égal à N. || Symbole représentant la racine. ⇒ Radical. || Racine carrée, cubique, quatrième de 10 (, , ). || Calcul des racines par approximation. || Extraire, tirer une racine carrée, la calculer (→ Effort, cit. 6). || Les racines carrées de 4 sont 2 et −2. || La racine carrée d'un nombre (cit. 6) négatif est un nombre imaginaire (cit. 6). — (1875). Alg. || Racine d'une équation : valeur de l'inconnue qui satisfait à l'équation. ⇒ Solution.
2 (1578, H. Estienne, in D. D. L.). Ling., gramm. Élément irréductible d'un mot, obtenu par élimination de tous les éléments de formation et indices grammaticaux, qui correspond à une productivité dans l'histoire (⇒ Étymologie) et qui constitue un support de signification. → aussi Mot primitif, mot souche. || « Bataille » (cit. 1) et « combat » ont la même racine « battre » (bat-). || Racine et affixes. ⇒ aussi Radical (cit. 4); base, formant, monème. || Recherche de la racine. ⇒ Étymologie (cit. 8). || Racine latine de mots français, de mots des langues romanes. || Racines grecques et latines servant à former des composés savants en français, en allemand, en anglais… || « Le Jardin des racines grecques », de Lancelot (1657). || Racines germaniques, indo-européennes. || Mots classés par racines. || Dictionnaire des racines.
15 Comme la langue française a des mots primitifs, et des mots dérivés et composés, on a jugé qu'il serait agréable et instructif de disposer le Dictionnaire par racines, c'est-à-dire de ranger tous les mots dérivés et composés après les mots primitifs dont ils descendent, soit que ces primitifs soient d'origine purement française, soit qu'ils viennent du latin ou de quelque autre langue.
Dict. de l'Académie, 1694, Préface.
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CONTR. Faîte.
DÉR. 2. Racinage, racinaire, racinal, raciner.
COMP. Déraciner, enraciner, indéracinable. — Arrache-racines, coupe-racines.
Encyclopédie Universelle. 2012.