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dérober

dérober [ derɔbe ] v. tr. <conjug. : 1>
desrober fin XIIe; de l'a. fr. rober, frq. °raubôn;cf. all. rauben « dépouiller »
I V. tr.
1Littér. S'emparer furtivement de (ce qui appartient à autrui). 2. voler. Dérober une montre, un bijou, un vêtement à qqn. Receler des objets dérobés.
2Fig. et vieilli Obtenir (qqch.) par des moyens peu honnêtes. extorquer, prendre. Dérober un secret. surprendre. Dérober un baiser : embrasser qqn par surprise. ⇒ prendre, 2. voler.
3(Choses) Empêcher de voir, masquer à la vue. 1. cacher, dissimuler, masquer, 1. voiler. Ce mur dérobe la vue. Dérober qqch. à la vue de qqn, aux regards. La fumée nous dérobe le paysage. Abstrait « Le plus grand danger des idées c'est de nous dérober souvent le spectacle des réalités » (Duhamel).
4Littér. Cacher ou éloigner de qqn. enlever, ôter, retirer, soustraire. « Son regard rencontre rarement le mien, que je dérobe » (Colette). « Elle voulut m'embrasser, mais je dérobai mon front » (F. Mauriac).
IISE DÉROBERv. pron.
1(XVIe) SE DÉROBER À : éviter d'être vu, pris par (qqn). ⇒ échapper, se soustraire. Se dérober aux regards. se cacher, se dissimuler. « Elle exige qu'au lieu de se dérober à la police, il aille à sa rencontre » (Romains). éviter, fuir.
Fig. Se dérober à son devoir, à ses obligations, à son travail; s'y dérober. manquer (à). « Je me dérobe au travail, commence à la fois six livres » (A. Gide). « Elle avait compris la question et ne s'y dérobait pas » (Martin du Gard). éluder, esquiver.
Absolt Éviter de répondre, de réagir, d'agir. fam. 1. se défiler. « Plus le Conseil de la Commune se dérobe, plus les hommes d'action le pressent » (Jaurès).
2Absolt S'éloigner, s'écarter de qqn. se dégager, se refuser, se retirer. « Il lui prit le bras comme jadis. Elle ne se dérobait pas, ne marquait aucun refus, aucun recul » (Romains).
Spécialt (cheval) Faire un écart pour éviter l'obstacle à franchir.
3(Choses) Se dérober sous : s'effondrer. ⇒ manquer. Elle « croyait sentir les tapis, le parquet se dérober sous ses genoux » (Loti). « Il était tellement tremblant que ses genoux se dérobaient sous lui » (Stendhal),qu'il était près de tomber ( dérobement) .
⊗ CONTR. Rendre, restituer. Livrer, montrer. — Affronter.

dérober verbe transitif (ancien français rober, piller, du germanique raubôn) Littéraire S'emparer furtivement de quelque chose, le voler : On lui a dérobé son portefeuille. Soustraire habilement quelqu'un à ce qui le menace : Dérober un coupable à la justice. Empêcher de voir quelque chose, quelqu'un, le cacher, le dissimuler, le masquer : Les arbres nous dérobent la vue de la mer.dérober (expressions) verbe transitif (ancien français rober, piller, du germanique raubôn) Littéraire Dérober un baiser, le prendre par surprise et avec adresse. Dérober un secret, le surprendre. ● dérober (synonymes) verbe transitif (ancien français rober, piller, du germanique raubôn) Littéraire S'emparer furtivement de quelque chose, le voler
Synonymes :
- barboter (familier)
- chiper (familier)
- faucher (populaire)
- piquer (populaire)
Contraires :
Soustraire habilement quelqu'un à ce qui le menace
Synonymes :
Empêcher de voir quelque chose, quelqu'un, le cacher, le dissimuler, le...
Synonymes :
dérober verbe intransitif se dérober verbe pronominal En parlant du cheval, échapper à la main de son cavalier par un mouvement brusque, en particulier pour éviter de sauter un obstacle.

dérober
v.
rI./r v. tr.
d1./d Prendre en cachette, voler (qqch). On lui a dérobé sa montre.
Fig. Dérober un secret.
|| Prendre subrepticement ou par surprise. Dérober un baiser.
d2./d Litt. Soustraire. Dérober un coupable à la justice.
d3./d Cacher, empêcher de voir. Ce mur me dérobe le paysage.
rII./r v. Pron.
d1./d Se dérober à: se soustraire à. Se dérober à toutes les questions.
|| (S. comp.) Chaque fois qu'on l'interroge, il se dérobe.
d2./d Fléchir, faiblir. Ses genoux se dérobèrent sous lui.
d3./d EQUIT Cheval qui se dérobe devant un obstacle, qui se dérobe, qui refuse de sauter un obstacle.

⇒DÉROBER, verbe trans.
I.— Emploi trans.
A.— 1. S'emparer furtivement de ce qui appartient à autrui en prenant soin de ne pas être aperçu (cf. subtiliser).
a) Vieilli. Dérober qqn. Aga Hashem s'aperçut un jour que son fils le dérobait (GOBINEAU, Nouv. asiat., 1876, p. 342).
b) Dérober qqc. (à qqn). Dérober de l'argent, un bijou, une bourse, un livre, une montre, un vêtement. Dérober le pain d'autrui (DUPUIS, Orig. cultes, 1796, p. 555). Le gouvernement français a fait dérober des papiers confidentiels dans les ambassades (CLEMENCEAU, Iniquité, 1899, p. 33) :
1. ... les Allemands, ayant eu vent que de fausses cartes circulaient, changeaient les formats et le papier, et exigeaient l'apposition de la photo du détenteur, avec le sceau de la Kommandantur. Cette fois, Alain obtint une vraie carte, grâce au courage d'un employé de la mairie qui en dérobait aux Allemands.
VAN DER MEERSCH, Invasion 14, 1935, p. 47.
c) Emploi abs. Tu ne tueras point. Tu ne déroberas point (BONALD, Législ. primit., t. 2, 1802, p. 57).
2. Soustraire quelqu'un ou quelque chose à (quelqu'un ou quelque chose), en le mettant à l'écart ou en le cachant à la vue. Dérober un criminel à la justice; dérober qqn au péril (Ac. 1932). Inflexibles destins, (...) craignez-vous qu'un mortel ne dérobe sa tête (CHÉNIER, Élégies, 1794, p. 166). Dérober au châtiment qui lui est dû un de ces coupables qu'aucune classe de la société ne réclame (NODIER J. Sbogar, 1818, p. 162) :
2. Quand ce fut au tour de Rosa, il s'acharna à trouver sa bouche que celle-ci, riant derrière ses lèvres fermées, lui dérobait chaque fois par un rapide mouvement de côté.
MAUPASSANT, Contes et nouvelles, t. 1, La Maison Tellier, 1881, p. 1201.
3. En partic. Soustraire à la vue, dissimuler. Car, en s'en allant, il ne cherchait plus à dérober le bruit de ses pas (STENDHAL, Abbesse Castro, 1839, p. 155).
a) Vieilli :
3. Virgile nous assure (...) que Rhadamante contraint les coupables d'avouer les crimes qu'ils ont commis sur la terre, et dont ils s'étaient flattés de dérober la connaissance aux mortels.
DUPUIS, Abr. de l'org. de tous les cultes, 1796, p. 511.
4. ... un peignoir du matin, qui dérobe les formes fines et gracieuses d'un corps de femme, les indique encore, et trahit leur souplesse.
BOURGET, Essais de psychol. contemp., 1883, p. 97.
[Le suj. désigne une armée] Dissimuler une sortie à l'ennemi. Dérober sa marche (Ac. 1932).
Dérober à qqn que. Votre humilité vous dérobe que chacun vous connaît et que votre nom est une fleur durable (SAINTE-BEUVE, Corresp. gén., t. 3, 1818-69, p. 238)
b) [En liaison avec le subst. vue]
Dérober la vue de qqc. à qqn. Un reste de brouillard m'en dérobait la vue (DUSAULX, Voy. Barège, t. 1, 1796, p. 240).
Dérober qqc. à la vue de qqn. Un voile dérobait la statue à nos regards (Ac. 1932).
P. anal. Dérober un baiser. Embrasser par surprise :
5. Le taureau profita de ce que la vache tournait la tête pour lui lécher le cou, comme un homme peu aimé, qui a peur d'un rebut, attend que son amie se détourne pour dérober un baiser.
MONTHERLANT, Les Bestiaires, 1926, p. 489.
B.— Au fig. S'approprier de façon illégitime ce qui est propre à autrui (cf. usurper). Dérober à qqn la gloire qui lui est due, le mérite d'une belle action (Ac. 1932); dérober un secret :
6. Et jetant avec dextérité dans le même temps qu'elle [Françoise] tournait la poignée de la croisée et prenait l'air, un coup d'œil désintéressé sur le fond de la cour, elle y dérobait furtivement la certitude que la duchesse n'était pas encore prête...
PROUST, Le Côté de Guermantes 1, 1920, p. 17.
Dérober du temps (sur un temps qui est dû à autre chose ou à qqn d'autre). Passez au manège les heures que vous déroberez à l'étude (ADAM, Enfant Aust., 1902, p. 417).
Dérober les idées, la pensée, les écrits d'un auteur. Plagier les idées, la pensée, les écrits d'un auteur :
7. L'impuissance sans nom d'Oreste devant Hermione, l'inexistence même d'Hermione devant Pyrrhus, c'est cela que le monde n'osait plus regarder en face, qu'il avait oublié depuis les grands anciens et que Racine dérobe à Euripide.
MAURIAC, La Vie de Jean Racine, 1928, p. 110.
II.— Emploi pronom.
A.— 1. Se dérober à. Se soustraire à quelqu'un ou à quelque chose en se mettant à l'écart (cf. échapper à). Se dérober au monde; se dérober à la présence de qqn; se dérober aux yeux de, à la vue de, aux regards de; se dérober aux coups de qqn (Ac. 1932); se dérober à la surveillance de :
8. ... l'on voudrait, ainsi que dans un gros temps, fermer les sabords de sa maison et se dérober aux gens qui frappent à votre porte, aux lettres que le facteur dépose dans votre boîte.
GONCOURT, Journal, 1879, p. 27.
Spéc., terme de man. [Le suj. désigne un cheval] S'échapper de dessous l'homme qui le monte :
9. Mon cheval alezan brûlé se dérobait sous moi. Les rênes brisées flottaient sur sa croupe en sueur, et il me fallut de grands efforts pour l'empêcher de se coucher à terre.
BÉGUIN, L'Âme romantique et le rêve, 1939, p. 364.
2. Se retirer en essayant de passer aussi inaperçu que possible (cf. s'esquiver, s'éclipser; fam. filer). Auguste (...) rentrait dans le salon et se dérobait, rouge et penaud, derrière la belle Juive (HUYSMANS, À Rebours, 1884, p. 96). Ernest ne pouvait plus se dérober. Il suivit son père de mauvaise grâce (AYMÉ, Jument, 1933, p. 198) :
10. N'avons-nous pas vu un jour (...), ce pommadin de sacristie, ce merlan gâteux qu'on nomme Auguste Roussel, congédiant, le mufle en l'air deux rétrogradants évêques pliés devant lui et se dérobant à reculons dans leur robe violette...
BLOY, Le Désespéré, 1886, p. 234.
P. ext., au fig. Éviter de manifester sa présence. Il se dérobe, il refuse de dire ce qu'il pense (LEMAITRE, Contemp., 1885, p. 223). Les amis se dérobent dès qu'on a besoin d'eux (ROMAINS, Hommes bonne vol., 1932, p. 124).
3. Se dérober (sous). Faire défaut, perdre sa consistance (cf. manquer; s'effondrer, s'écrouler, s'affaisser). La terre, le sol se dérobe :
11. Tout à coup, ses bras me désenlacèrent et retombèrent, inertes, sur le lit; ses lèvres se dérobèrent et abandonnèrent mes lèvres.
MIRBEAU, Le Journal d'une femme de chambre, 1900, p. 150.
12. Nous continuions à descendre, ou plutôt le chemin continuait à se dérober, à s'ébouler sous nos pas.
ROMAINS, Les Hommes de bonne volonté, La Douceur de la vie, 1939, p. 144.
P. anal. [En parlant de membres inférieurs] Perdre leur force, refuser leurs services. Les genoux se dérobent sous lui (Ac.).
B.— Au fig.
1. [Le suj. désigne une pers.] Se soustraire à une obligation morale qui vous incombe ou à un danger qui vous menace. Se dérober à un devoir, à un travail, à une responsabilité, à une obligation; se dérober à un péril, à un obstacle; se dérober à une question. La bassesse de sa dialectique m'empêcha de me dérober à ma nouvelle tâche (BARRÈS, Jard. Bérén., 1891, p. 91). C'est ce problème devant lequel je ne me déroberai pas (DU BOS, Journal, 1924, p. 156).
2. [Le suj. désigne une chose] Se retirer jusqu'à disparaître (cf. s'estomper, s'effacer). Son attention se dérobait, son regard heurtait la surface des pages (MARTIN DU G., Devenir, 1909, p. 100). Je sentais le temps se dérober sous moi (DUHAMEL, Confess. min., 1920, p. 101).
Rem. 1. La plupart des dict. du XIXe s. ainsi que QUILLET 1965 et Lar. encyclop. enregistrent le sens « dépouiller de sa première peau ou de son écorce ». Des fèves dérobées (Ac. 1835, 1878). Vous déroberez nos amandes, c'est-à-dire vous les mettrez dans une casserole avec de l'eau que vous ferez bouillir; vous verrez si la peau de l'amande s'en va (VIARD, Cuisin. roy., 1831, p. 21). Prenez de grosses fèves, dérobez-les (AUDOT, Cuisin. campagne et ville, 1896, p. 174). 2. On rencontre ds la docum. l'adj. dérobable. Qui peut être dérobé. N'a-t-il [l'homme] pas le sens de la courte beauté dérobée et de l'accessible et longue beauté dérobable (BRETON, Manif. Surréal., 1930, p. 183).
Prononc. et Orth. :[], (je) dérobe []. Ds Ac. dep. 1694. Étymol. et Hist. 1. 1160-70 « dépouiller, piller » (WACE, Rou, éd. A. J. Holden, appendice, 413 [t. 2, p. 321]); 2. a) ca 1360-70 « enlever par larcin ce qui appartient à autrui » (Baudoin de Sebourc, IX, 876 ds T.-L.); b) 1549 « prendre par surprise d'une façon adroite » loc. à la desrobee (EST.); 1588 victoire desrobee (MONTAIGNE, Essais, éd. A. Thibaudet, livre 1, chap. 6); 3. 1534 pronom. équit. (RABELAIS, Gargantua, éd. R. Calder, chap. 40, ligne 37 : le cheval se desrobe dessoubz luy); d'où 1677 se derober sous (ici, en parlant des genoux) (RACINE, Phèdre, I, 3); 4. 1538 pronom. se desrober de/à « s'échapper de, se soustraire à quelque chose » (EST.); 5. 1636 trans. « soustraire habilement quelqu'un, quelque chose pour le préserver de ce qui le menace » (CORNEILLE, Le Cid, III, 1); 6. 1549 « cacher, dissimuler aux regards » enfant desrobbé (EST.); 1603, 23 juin appartements derobés (Mémoires de Sully, t. IV, p. 355 ds HAVARD); cf. 1677 trans. (RACINE, op. cit., V, 3). Dér. de l'a. fr. rober « piller, ici un pays » ca 1130 (Couronnement Louis, éd. E. Langlois, 2287) du germ. raubôn « voler, dérober », cf. h. all. roubôn « id. » (GRAFF t. 2, p. 358), got. bi-raubôn (FEIST), VIe s. raubaverit (Loi Salique, Pactus Legis Salicae, éd. K. A. Eckhardt, t. II, 1, p. 344, 4), all. rauben; préf. dé- (lat. de-). Fréq. abs. littér. :2 076. Fréq. rel. littér. :XIXe s. : a) 3 707, b) 2 183; XXe s. : a) 2 423, b) 3 036. Bbg. GOTTSCH. Redens. 1930, p. 65, 321. — TOURNEMILLE (J.). Var. sur le mot robe. Déf. Lang. fr. 1968, n° 42, pp. 12-13. — WALT. 1885, p. 79.

dérober [deʀɔbe] v. tr.
ÉTYM. V. 1165, desrober; de 2. dé-, et de l'anc. franç. rober, francique raubôn, all. rauben, « dépouiller ».
1 (V. 1365). Littér. S'emparer furtivement de (ce qui appartient à autrui). Agripper (argot), attraper, barboter (fam.), chaparder, chiper, choper (fam.), dépouiller (vx), détourner, distraire, emparer (s'emparer de), emprunter (iron.), enlever, escamoter, escroquer, étouffer (fam.), faire (fam.), faucher (fam.), friponner (vx), gripper (vx), marauder, picorer, piller, piquer (fam.), prendre (furtivement), rafler (fam.), refaire (fam.), soustraire, subtiliser, voler; larcin (faire un larcin). || Dérober un portefeuille, une montre, un bijou, un vêtement à qqn. || On lui a dérobé un livre (→ Adresse, cit. 13; côté, cit. 30). || Dérober subrepticement de l'argent à un naïf. || Dérober une affaire, un marché à quelqu'un. Souffler.
1 On ne méprise pas un voleur qui dérobe pour satisfaire sa faim, quand il n'a rien à manger (…)
Bible (Crampon), Proverbes, VI, 30.
2 Au voleur ! au voleur ! à l'assassin ! au meurtrier ! Justice, juste Ciel ! je suis perdu, je suis assassiné, on m'a coupé la gorge, on m'a dérobé mon argent.
Molière, L'Avare, IV, 7.
Absolument :
3 Elle donnait comme on dérobe,
En se cachant aux yeux de tous.
Hugo, les Contemplations, IV, VI.
2 Fig. Obtenir (qqch.) par des moyens peu honnêtes. Extorquer, prendre. || Dérober un secret. Surprendre. || Dérober à qqn le mérite qui lui est dû. Enlever. || Dérober un baiser : embrasser qqn par surprise. Prendre, voler.
4 Chaque fois que je suis tenté de vous dérober la moindre caresse (…)
Rousseau, Julie ou la Nouvelle Héloïse, I, lettre X.
Dérober les idées, la pensée, les écrits d'un auteur. Approprier (s'), copier, emprunter, imiter, plagier.Dérober quelques heures, quelques instants à ses affaires, à son travail, pour faire autre chose. Distraire, prendre.
5 Quoi ? pour vous confier la douleur qui m'accable,
À peine je dérobe un moment favorable (…)
Racine, Britannicus, II, 6.
3 (Sujet n. de choses). Cacher, empêcher de voir, masquer à la vue (de qqn). Cacher (cit. 20), dissimuler, masquer, voiler. || Un rideau d'arbres lui dérobait le paysage. || Les nuages dérobent les sommets enneigés.
6 (…) mais ensuite une noire tempête déroba le ciel à nos yeux, et nous fûmes enveloppés dans une profonde nuit.
Fénelon, Télémaque, I.
7 (…) il (le château) était situé au pied d'une montagne, au milieu d'un bois dont les arbres élevés le dérobaient à notre vue.
A. R. Lesage, Gil Blas, XII, XIII.
8 Ce geste simple et naturel (de la Vénus de Syracuse), plein de pudeur et d'impudicité, qui cache et montre, voile et révèle, attire et dérobe, semble définir toute l'attitude de la femme sur la terre.
Maupassant, la Vie errante, p. 122.
Figuré :
9 C'est un peu simpliste. Encore faut-il reconnaître que le plus grand danger des idées c'est de nous dérober souvent le spectacle des réalités, de nous en retirer le sens.
G. Duhamel, Défense des lettres, III, p. 252.
Milit. || Dérober sa marche (en parlant d'une armée, d'une troupe) : progresser sans que l'ennemi s'en aperçoive.Fam. (Sujet n. de personne). Partir dans une direction après avoir laissé croire qu'on allait en emprunter une autre.Fig. Dissimuler les moyens que l'on utilise pour parvenir à ses fins (→ Donner le change).
4 Littér. Cacher ou éloigner de qqn. Enlever, ôter, retirer, soustraire. || Dérober un criminel à la justice (→ Bras, cit. 31).Figuré :
10 (…) l'avantage d'être rencontrée la première ne doit point dérober aux autres les justes prétentions qu'elles ont toutes sur nos cœurs.
Molière, Dom Juan, I, 2.
11 Son regard rencontre rarement le mien, que je dérobe.
Colette, la Vagabonde, II, p. 89.
12 Elle voulut m'embrasser, mais je dérobai mon front et allai m'asseoir à l'écart, loin de la lampe.
F. Mauriac, la Pharisienne, XII, p. 195.
——————
se dérober v. pron.
1 (XVIe). || Se dérober à : éviter d'être vu, pris par (qqn). Échapper, soustraire (se). || Se dérober à, devant un visiteur importun. Éclipser (s'), esquiver (s'), fuir, sauver (se). || Se dérober à ses créanciers. || Se dérober aux regards. Cacher (se), dissimuler (se), échapper (à la vue), réfugier (se), retirer (se); invisible (être invisible). || Se dérober aux coups d'un adversaire. Éviter.
13 (…) pour me dérober à de semblables coups (…)
Molière, Mélicerte, I, 5.
14 Elle exige qu'au lieu de se dérober à la police, il aille à sa rencontre, qu'il aille « se jeter à sa tête ».
J. Romains, les Hommes de bonne volonté, t. II, XII, p. 130.
Fig. || Se dérober à son devoir, à ses obligations, à son travail… Manquer (à). || Homme lâche qui se dérobe à ses engagements, à ses devoirs. || Se dérober à la discussion. Éluder, esquiver, éviter, fuir, reculer (→ fam. Prendre la tangente).
15 Je demandais à M (…) pourquoi, en se condamnant à l'obscurité, il se dérobait au bien qu'on pouvait lui faire. « Les hommes, me dit-il, ne peuvent rien faire pour moi qui vaille leur oubli ».
Chamfort, Caractères et Anecdotes, Oubli des hommes.
16 Mais je me dérobe au travail, commence à la fois six livres, ne sachant derrière quoi me cacher, pour ne répondre pas encore à l'exigence (…)
Gide, Journal, mars 1916.
17 Elle avait compris la question et ne s'y dérobait pas; elle semblait même prendre un sauvage plaisir à surmonter toute réticence.
Martin du Gard, les Thibault, t. I, p. 246.
Absolt. Éviter de répondre, de réagir, d'agir; être insaisissable (personnes ou choses).
18 (…) plus le Conseil de la Commune se dérobe, plus les hommes d'action le pressent.
Jaurès, Hist. socialiste…, t. VII, p. 486.
19 Les plus grands penseurs, depuis Aristote, se sont attaqués à ce petit problème (le rire) qui toujours se dérobe sous l'effort, glisse, s'échappe, se redresse, impertinent défi jeté à la spéculation philosophique.
H. Bergson, le Rire, I, p. 1.
20 Elle ne se dérobait pas lorsque je faisais allusion aux événements passés (…)
F. Mauriac, la Pharisienne, XVI, p. 262.
2 Sans compl. a S'éloigner, s'écarter de qqn. Dégager (se), refuser (se), retirer (se).Absolt. (Sujet n. de personnes).
21 Il souleva les plis de la cape, et lui prit le bras comme jadis. Elle ne se dérobait pas, ne marquait aucun refus, aucun recul, mais ne parvenait pas à s'abandonner.
J. Romains, les Hommes de bonne volonté, t. IV, XXI, p. 221.
(Sujet nom de chose).
22 (Il) lui prenait doucement la main qui ne se dérobait pas et se réchauffait vite.
J. Romains, les Hommes de bonne volonté, t. V, XXVI, p. 267.
b (1677). || Se dérober sous… : ne pas offrir un appui ferme à, faillir à résister à (une poussée, une force d'enfoncement). Manquer. || Le sol se dérobe sous ses pas.
23 Tantôt nous montions sur le dos des vagues enflées; tantôt la mer semblait se dérober sous le navire et nous précipiter dans l'abîme.
Fénelon, Télémaque, IV.
24 (Elle) croyait sentir les tapis, le parquet se dérober sous ses genoux (…)
Loti, les Désenchantées, III, X, p. 88.
Ses genoux se dérobèrent sous elle, en parlant d'une personne en proie à une forte émotion. Faiblir.
25 (…) je sentais que mes pieds ne pouvaient se mouvoir, que mes genoux se dérobaient sous moi (…)
Fénelon, Télémaque, IV.
26 Julien avait raison de s'applaudir de son courage, jamais il ne s'était imposé une contrainte plus pénible. En ouvrant sa porte, il était tellement tremblant que ses genoux se dérobaient sous lui, et il fut forcé de s'appuyer contre le mur.
Stendhal, le Rouge et le Noir, I, XV, p. 85.
c (Le sujet désigne un cheval). Manège. Faire un écart pour éviter l'obstacle à franchir. || Se dérober, se dérober devant l'obstacle.Se dérober sous, dessous son cavalier : essayer de s'échapper de dessous le cavalier.
——————
dérobé, ée p. p. adj.
1 Pris, volé. || Receler des objets dérobés.Fig. || Secret dérobé.
27 (…) se parer (…) d'un titre dérobé, se vouloir donner pour ce qu'on n'est pas.
Molière, le Bourgeois gentilhomme, III, 12.
28 (…) une copie dérobée de ma pièce (…)
Molière, les Précieuses ridicules, Préface.
2 (1603). || Escalier dérobé, porte dérobée, qui permet de sortir d'une maison ou d'y entrer sans être vu. Secret. || S'enfuir par une porte dérobée.
29 (…) simple grand seigneur, qui tous les jours se sauve
Par un escalier dérobé.
La Fontaine, Fables, XII, 7.
3 (1864). Agric. || Culture dérobée : culture de quelques semaines pratiquée dans l'intervalle des cultures principales.
4 N. f. || La dérobée, danse populaire bretonne (Côtes-du-Nord).
5 Loc. adv. À la dérobée. Cachette (en), catimini (en), furtivement, secrètement, sournoisement, subrepticement, tapinois (en). (Cf. argot En douce). || Faire qqch. à la dérobée. || Regarder qqn à la dérobée (opposé à en face).
30 Qu'ils étaient charmants, ces regards inquiets et curieux qui se portaient sur nous à la dérobée et se baissaient aussitôt pour éviter les miens !
Rousseau, Julie ou la Nouvelle Héloïse, I, lettre XXXIV.
31 Un soir, à table, je m'avisai de mettre à la dérobée une pincée de poivre sur la part de tarte à la crème réservée à la vieille Mélanie qui raffolait de sucreries.
France, le Petit Pierre, XVII, p. 107.
32 D'ailleurs, Mionnet, loin de chercher l'occasion de regarder les gens à la dérobée, les considérait le plus souvent bien en face.
J. Romains, les Hommes de bonne volonté, t. III, XI, p. 154.
CONTR. Rendre, respecter (le bien d'autrui), restituer. — Montrer, voir (faire voir, laisser voir). — Livrer. — Affronter, faire.
DÉR. Dérobade, dérobement, dérobeur.

Encyclopédie Universelle. 2012.