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escamoter

escamoter [ ɛskamɔte ] v. tr. <conjug. : 1>
• 1558, « changer une marchandise contre une autre »; probablt d'un type occitan, de escamar, du lat. squama « écaille »
1(1640) Faire disparaître (qqch.) par un tour de main qui échappe à la vue des spectateurs. Prestidigitateur qui escamote une carte. Tour de passe-passe pour escamoter un mouchoir.
2(1658) Faire disparaître subtilement; s'emparer furtivement, frauduleusement de (qqch.). attraper, dérober, subtiliser. Un voleur lui a escamoté son portefeuille.
3Techn. Rentrer ou effacer (l'organe saillant d'une machine, d'un mécanisme). rentrer, replier. Escamoter le train d'atterrissage d'un avion.
4(Choses) Faire disparaître. 1. cacher, effacer. « la montagne demeure invisible, voilée, escamotée par les brumes » (Tharaud).
5(XIXe) Fig. Éluder habilement, de façon peu sérieuse, peu honnête. contourner, éluder, esquiver, éviter, tourner. Escamoter une objection. Enfant qui escamote un devoir, une leçon, une commission désagréable (cf. Passer à l'as). Grandville « n'escamotait aucune difficulté » (Gautier). « cet accusé si prolixe escamotait les accusations précises d'escroquerie et de chantage » (Barrès ).
6Fig. Sauter en allant trop vite. Soldat qui escamote les temps dans le maniement de son arme. Escamoter un mot, le prononcer très vite ou très bas pour qu'on ne l'entende pas. « la méticulosité — et je choisis exprès ce mot dont il est presque impossible d'escamoter une syllabe » (Duhamel). avaler. Escamoter une note au piano, ne pas la jouer ou la rendre trop brièvement.

escamoter verbe transitif (provençal escamotar, de escamar, effilocher, du latin squama, écaille) Faire disparaître un objet par un tour de main qui échappe à l'attention des spectateurs : Escamoter une carte. Dissimuler quelque chose quelque part par un procédé approprié : D'un seul geste, on escamote la table dans le placard. Dérober subtilement quelque chose à quelqu'un ; subtiliser, faucher : On lui avait escamoté son portefeuille. Supprimer un mot, un son, une note, les éviter ou les sauter. Éluder habilement, mais de façon peu sérieuse ou peu honnête ; esquiver : Vous escamotez la difficulté. Replier un élément d'avion dans la voilure, le fuselage ou les fuseaux moteurs. ● escamoter (synonymes) verbe transitif (provençal escamotar, de escamar, effilocher, du latin squama, écaille) Dérober subtilement quelque chose à quelqu'un ; subtiliser, faucher
Synonymes :
- faucher
- subtiliser
Éluder habilement, mais de façon peu sérieuse ou peu honnête ;...
Synonymes :
- couper à (familier)
- écarter
- éluder
- esquiver
- se soustraire à
- tourner
Contraires :
- affronter

escamoter
v. tr.
d1./d Faire disparaître adroitement sans que l'on s'en aperçoive. Prestidigitateur qui escamote des cartes.
d2./d Faire disparaître frauduleusement. Escamoter un portefeuille.
d3./d TECH Faire rentrer automatiquement l'organe saillant d'une machine, d'un appareil, dans un logement ménagé à cet effet. Escamoter le train d'atterrissage d'un avion en vol.
d4./d Fig. Esquiver (ce qui embarrasse). Escamoter une question gênante.

⇒ESCAMOTER, verbe trans.
A.— Faire disparaître, dissimuler (quelque chose ou plus rarement quelqu'un) par une manœuvre habile.
1. a) Dans le domaine du spectacle, vieilli. Faire disparaître par un tour de passe-passe, un artifice qui échappe à l'observation des spectateurs. Escamoter des boules, des dés, un mouchoir. Escamoter une muscade (vieilli). Des charlatans qui escamotent aux regards des spectateurs les objets qu'ils leur présentent (STAËL, Allemagne, t. 2, 1810, p. 246). Le souffle des saltimbanques (...) lorsqu'ils veulent faire disparaître un objet qu'ils escamotent, est un acte certainement venu des lieux de ténèbres (BLOY, Journal, 1894, p. 146). Jean Borlin, vêtu comme le prestidigitateur Méliès, escamotait ses poursuivants avant de s'escamoter lui-même (SADOUL, Cin., 1949, p. 188).
Absol. Ce prestidigitateur escamote bien (Ac. 1932).
b) Usuel
) Soustraire à la vue (en changeant de place, en dissimulant). Il va pour lui offrir la chaise de droite, y trouve sa pipe et l'escamote en replaçant vivement la chaise sous la table (SARDOU, Rabagas, 1872, II, 11, p. 77). Avant qu'elle ne l'escamote derrière son dos, j'ai vu le portefeuille (...) dont elle a résolu de m'imputer le vol (H. BAZIN, Vipère, 1948, p. 260) :
1. Il [le photographe] est soumis à la tyrannie du sujet; il doit compter avec une cheminée en zinc, un panneau-réclame, et des poteaux télégraphiques, que le peintre ne verrait pas; et pour escamoter ces accidents, il lui faut accéder (...) à des lieux où le peintre se transporte par le seul effort de l'imagination.
PRINET, Phot., 1945, p. 117.
Emploi pronom. réfl. D'un pas de côté, il démasqua son compagnon, jusqu'alors rigoureusement invisible (...). Je me rendis compte (...) du trait essentiel qui caractérise ce personnage si habile à s'escamoter lui-même (FARRÈRE, Homme qui assass., 1907, p. 62). Cf. aussi SADOUL, loc. cit.
[Le suj. désigne ce qui dissimule] Le col empesé, haut et large, escamotait les bajoues et les fanons (MAURIAC, Nœud vip., 1932, p. 54). Un tunnel que l'on achève de creuser va escamoter les automobiles dont la présence détruirait l'illusion d'une ville du dix-huitième siècle (GREEN, Journal, 1941, p. 107). Le mimétisme non seulement les dissimule [les ocelles], mais escamote en même temps leur propriétaire. Il le confond avec le milieu, il empêche qu'on l'en distingue (R. CAILLOIS, Méduse et Cie, Paris, Gallimard, 1960, p. 137).
Emploi pronom. passif. Les portiques nécessaires à la manutention pourront s'escamoter dans des constructions spéciales situées aux extrémités du barrage (ROMANOVSKY, Mer. source én., 1950, p. 99).
) P. ext. Faire disparaître de façon plus ou moins définitive. (Quasi-)synon. effacer, éliminer. L'impératrice Catherine escamota son mari, pour le déposer (AUDIBERTI, Mal court, 1947, III, p. 195).
2. Spéc. Effacer, replier (une chose, notamment l'organe saillant d'une machine) par un dispositif conçu à cet effet. Les autres [meubles], plus légers peuvent être transportés, escamotés, échangés, selon les besoins du moment (SERRIÈRE, T.N.P., 1959, p. 87).
Emploi pronom. passif. Peugeot avec son coach à toit métallique pouvant s'escamoter entièrement dans la pointe arrière de la voiture (TINARD, Automob., 1951, p. 334).
3. En partic. Faire disparaître (une chose) furtivement pour s'en emparer. (Quasi-)synon. subtiliser. Il [le baron] eut l'idée lumineuse d'escamoter les petits carrés de papier portant les votes d'un des partis (STENDHAL, Rouge et Noir, 1830, p. 258). Quelle peine il avait eue pour escamoter la facture, sous le nez d'Auguste (ZOLA, Pot-Bouille, 1882, p. 238) :
2. ... Georges, bondissant par-dessus son banc, avait réussi à escamoter l'arme sans être remarqué de personne; il l'avait d'abord repoussée en arrière, d'un coup de pied, tandis que les autres se penchaient vers Boris, s'en était prestement emparé et l'avait dissimulée sous sa veste, puis subrepticement passé à Ghéridanisol.
GIDE, Faux-monn., 1925, p. 1245.
P. ext. S'emparer par fraude, par d'habiles manœuvres. Le gouvernement escamote les droits et l'argent du populaire tout en jurant tous les matins de les respecter (STENDHAL, L. Leuwen, t. 2, 1835, p. 256). En en [des Affaires Étrangères] sortant je dédaignai d'escamoter les fonds secrets (CHATEAUBR., Mém., t. 4, 1848, p. 230) :
3. Je pourrais, à ce sujet, vous citer cent traits d'infidélité de MM les Académiciens de Paris, (...) cent mémoires escamotés et publiés sans façon, sous le nom de ces déhontés plagiaires...
MARAT, Pamphlets, Charlatans mod., 1791, p. 294.
Emploi pronom. réfl. indir. Que de bassesses n'ont-ils pas faites à l'Académie des Sciences, de 1815 à 1830 et depuis, pour s'escamoter des croix (STENDHAL, H. Brulard, t. 2, 1836, p. 265).
B.— P. anal. ou au fig.
1. Passer quelque chose sous silence; cacher abusivement quelque chose. C'est à nous, maintenant, à faire assez de bruit autour de l'incident pour qu'on ne puisse pas l'escamoter (MARTIN DU G., J. Barois, 1913, p. 408). Pour éviter la tentation d'escamoter, en les hachant menu, n'importe quelles pertes d'exploitation, un décret a précisé, en 1955, l'objet de ces contrats (CHENOT, Entr. national., 1956, p. 71). Beaucoup de morts cardiaques sont escamotées sous d'autres rubriques vagues, telles qu'urémie et, surtout, sénilité (R. SCHWARTZ, Nouv. remèdes et mal. act., 1965, p. 79).
Escamoter qqc. dans qqc. :
4. On a dérobé le réel et le grandiose sous des enveloppes plus ou moins splendides, on a escamoté le cortège impérial dans le cortège militaire, on a escamoté l'armée dans la garde nationale, on a escamoté les chambres dans les Invalides, on a escamoté le cercueil dans la cénotaphe.
HUGO, Choses vues, 1885, p. 27.
2. (Quasi-)synon. éluder, esquiver, tourner.
a) Faire en sorte, par des manœuvres habiles ou des artifices, que quelque chose (de gênant) ne se produise pas, ne se déroule pas normalement. D'abord, il tâcha d'escamoter le vote en plaisantant, selon sa manœuvre adroite (ZOLA, Œuvre, 1886, p. 304) :
5. Son discours (...) est de ceux qui peuvent le mieux éclairer l'opinion; un de ceux, par conséquent, qu'il importe d'escamoter si l'on veut conserver la direction de celle-ci.
GIDE, Journal, 1917, p. 615.
b) Se soustraire à (une chose difficile, ennuyeuse ou délicate); éviter de traiter (un sujet délicat). Escamoter un problème, une difficulté. Les anomalies que tout rationalisme escamote ou dont il se détourne plus ou moins visiblement pour tisser sa toile conceptuelle (MARCEL, Journal, 1923, p. X). Il faut nous élever contre l'excès de profondeur qui escamote les questions (NIZAN, Conspir., 1938, p. 65). Si je me mêle d'apporter à un problème sa solution, il ne faut pas du moins que j'escamote par cette solution même un des termes du problème (CAMUS, Sisyphe, 1942, p. 49).
3. a) Effectuer, réaliser de façon trop rapide. À Paris on a l'habitude d'escamoter les enterrements qui se font toujours dans les vingt-quatre heures (FLAUB., Corresp., 1872, p. 435). Scène que Céard a cherché à escamoter avec de la non-accentuation et de la célérité (GONCOURT, Journal, 1885, p. 500).
b) Écourter (un processus, une action en plusieurs temps) en omettant d'(en) exécuter des étapes. Elle (...) se rendait au piano avec une sorte de hâte crispée, pour jouer, si l'on peut dire, certains airs dont elle escamotait toutes les finales (CÉLINE, Voyage, 1932, p. 149).
En partic., dans le domaine de l'expr. verbale. Ils rompaient, escamotaient, dénaturaient les alexandrins (GIDE, Journal, 1934, p. 1202). Il escamota la fin de sa phrase dans un accès de toux (MARTIN DU G., Thib., Été 14, 1936, p. 246). Ma gorge en feu m'obligeait à escamoter des syllabes (ABELLIO, Pacifiques, 1946, p. 322).
Par brachylogie, ARM., vieilli. Escamoter l'arme. ,,Supprimer, dans le maniement du fusil, certains mouvements voulus par l'ordonnance, afin d'exécuter les temps avec plus de promptitude`` (Ac. 1835, 1878).
Rem. La docum. atteste le part. passé en emploi adj. Quand les heures s'enveloppent de causeries, on ne peut plus les mesurer, même les voir, elles s'évanouissent, et tout d'un coup c'est bien loin du point où il vous avait échappé que reparaît devant votre attention le temps agile et escamoté (PROUST, Guermantes 2, 1921, p. 350).
Prononc. et Orth. :[], (j')escamote []. Ds Ac. dep. 1694. Étymol. et Hist. 1558 « faire disparaître subrepticement un objet » (P. BOAISTUAU, Théâtre du monde, 1. 2, f° 40 r°; cf. GDF. Compl.). Prob. empr. à un prov. escamo(u)tar qui n'est attesté qu'en prov. mod. (1785 d'apr. FEW t. 12, p. 216a), dér. de escamar « effilocher » qu'on suppose avoir signifié d'abord « écailler » (cf. ital. squamare, esp. port. escamar « écailler »), dér. de escama « écaillé » (dep. XIIIe s. d'apr. PANSIER), issu d'un lat. vulg. d'abord scama pour lat. class. squama (écaille); à l'appui de cette hyp., v. ds FEW t. 12, p. 215b et 216a d'autres dér. occitans de escamar ayant tous en commun le sens « faire disparaître, ôter quelque chose ». Fréq. abs. littér. :190. Bbg. HOTIER (H.). Le Vocab. du cirque et du music-hall en France. 1973, p. 105. — SAIN. Sources t. 1 1972 [1925], p. 328, 329, 409; t. 3 1972 [1930], p. 114, 350.

escamoter [ɛskamɔte] v. tr.
ÉTYM. 1558, « changer une marchandise contre une autre »; probablt d'un type occitan escamotar, de escamar, du lat. pop. scama, lat. class. squama « écaille ».
1 (1640). Faire disparaître (qqch.) par un tour de main qui échappe à la vue des spectateurs. || Prestidigitateur qui escamote une carte. || Tour de passe-passe pour escamoter un mouchoir.Absolt. || Le prestidigitateur sait escamoter.
1 La Rosine escamote le poulet avec une habileté digne du plus adroit prestidigitateur (…)
Th. Gautier, Souvenirs de théâtre…, « le Barbier de Séville », p. 123.
Par métaphore :
2 Nous tenons le présent dans nos mains; mais l'avenir est une espèce de charlatan qui, en nous éblouissant les yeux, nous l'escamote.
Fontenelle, Bonheur, in Littré.
2 (1658). Faire disparaître subtilement; s'emparer furtivement, frauduleusement de (qqch., qqn). Attraper, dérober, subtiliser. || Escamoter des bulletins de vote. || Un voleur lui a escamoté son portefeuille en un tournemain. || Il s'est fait un nouvel ami, qui lui a escamoté sa maîtresse.
2.1 (…) ou ils séduisent de jeunes filles par le moyen de la confession, ou ils en escamotent, s'ils le peuvent; autant de nouvelles recrues qui supposent toujours des réformes.
Sade, Justine…, t. I, p. 204.
3 Le scélérat ! (…) c'est lui qui me mena à cette fatale foire de Cabul; c'est lui qui m'escamota le diamant que m'avait donné la princesse (…)
Voltaire, le Blanc et le Noir.
3 Techn. Rentrer ou effacer (l'organe saillant d'une machine, d'un mécanisme). Rentrer, replier. || Escamoter le train d'atterrissage d'un avion.
Pron. (passif). || Toit, roue qui s'escamote. Escamotable.
4 (Choses). Faire disparaître. Cacher, effacer. || Robe large qui escamote les formes.
4 Ce matin, comme presque toujours en été, la montagne demeure invisible, voilée, escamotée, par les brumes.
Jérôme et Jean Tharaud, Marrakech, VIII, p. 146.
Pron. || S'escamoter (soi-même) : se soustraire à la vue des autres.
5 (XIXe). Fig. Éluder habilement, de façon peu sérieuse, peu honnête. Éluder, esquiver, tourner. || Escamoter une objection. || Enfant qui escamote un devoir, une leçon, une commission désagréable. Passer (au bleu, à l'as). || Escamoter un problème au lieu de le résoudre. || Orateur qui escamote une question gênante en la passant sous silence, en n'en tenant pas compte.
5 (…) il (Grandville) voulait, dans ce monde de son invention, une clarté prosaïque, une netteté bourgeoise; il n'escamotait aucune difficulté.
Th. Gautier, Portraits contemporains, p. 232.
6 Puis il (Flaubert) ajoute sur une note mélancolique : après tout, le travail, c'est encore le meilleur moyen d'escamoter la vie.
Ed. et J. de Goncourt, Journal, p. 237.
7 Sturel admirait avec quelle liberté magistrale cet accusé si prolixe escamotait les accusations précises d'escroquerie et de chantage.
M. Barrès, Leurs figures, p. 257.
8 Je ne parviens pas encore à comprendre pourquoi dans ce livre certaines scènes, certains dialogues, sont traités; d'autres passés sous silence, escamotés; en particulier certaines conversations, que, entre toutes, on eût souhaité connaître.
Gide, Journal, 23 nov. 1928.
6 Fig. Sauter en allant trop vite. Avaler, bouffer. || Escamoter des étapes.Spécialt. || Escamoter un mot, le prononcer très vite ou très bas pour qu'on ne l'entende pas. || Il escamote ses mots en parlant : il n'articule pas distinctement toutes les syllabes. || Pianiste qui escamote une note, qui la passe ou la rend trop brièvement. Croquer.
9 Arcos poussait le goût de l'ordre domestique à la méticulosité, — et je choisis exprès ce mot dont il est presque impossible d'escamoter une syllabe.
G. Duhamel, Biographie de mes fantômes, IX, p. 159.
Milit. (Vx). || Soldat qui escamote l'arme, les temps (dans le maniement de son arme).
DÉR. Escamotable, escamotage, escamote, escamoteur, escamotoir.

Encyclopédie Universelle. 2012.