emprunter [ ɑ̃prœ̃te ] v. tr. <conjug. : 1>
• v. 1150; « prêter » v. 1125; d'une forme pop. du bas lat. impromutuare (VIIe), lat. jurid. promutuum « avance d'argent », class. mutuum → mutuel
1 ♦ Obtenir à titre de prêt ou pour un usage momentané. Emprunter qqch. à qqn. Emprunter de l'argent à un ami (⇒fam. 2. taper) , à la banque. « Il a fallu que je monte chez Emmanuel pour lui emprunter une cravate noire » (Camus). — Absolt Emprunter pour acheter une maison. ⇒ s'endetter.
2 ♦ Fig. Prendre ailleurs et faire sien. ⇒ 1. devoir, prendre, puiser (dans), tirer (de). Le français a emprunté de nombreux mots au grec. Mot emprunté à l'anglais. « Le chant grégorien semble emprunter au gothique ses lobes fleuris » (Huysmans). — « Mes façons de penser, je les emprunte volontiers : je ne tiens qu'à mes façons de sentir » (Renard).
3 ♦ Prendre (une voie réservée à d'autres, ou à d'autres usages). Conducteur qui emprunte la voie de gauche. — Par ext. Emprunter les passages souterrains.
4 ♦ Vx Revêtir (une apparence étrangère), imiter. « Il faut d'un suppliant emprunter le visage » (Racine).
⊗ CONTR. Avancer, céder, prêter.
● emprunter verbe transitif (latin populaire imprumutare, latin classique promutuari) Se faire prêter quelque chose par quelqu'un : Il m'a emprunté ma voiture pour la journée. Se faire prêter de l'argent : Emprunter de l'argent à la banque. User de quelque chose dont on n'est pas le créateur, qui a son origine ailleurs : Racine a emprunté des métaphores aux tragiques grecs. Utiliser une route, une voie pour circuler : Veuillez emprunter le passage souterrain. ● emprunter (difficultés) verbe transitif (latin populaire imprumutare, latin classique promutuari) Construction et registre 1. Emprunter à : emprunter de l'argent à quelqu'un ; l'auteur emprunte son thème à la tragédie grecque ; c'est un terme emprunté au latin. Construction la plus courante. Remarque La construction avec de, dans ce sens (« obtenir à titre de prêt ; demander et recevoir en prêt »), n'est plus en usage aujourd'hui : « j'ai emprunté mille francs de mon ami »(Littré). 2. Emprunter de : les planètes, à la différence des étoiles, empruntent leur lumière du Soleil ; le pouvoir législatif emprunte sa légitimité du suffrage des citoyens ; expression empruntée de l'anglais. Cette construction appartient au registre soutenu et n'est employée qu'en parlant de choses, avec le sens de « recevoir de, devoir à ». Emploi Emprunter une voie, une rue, etc. Cette tournure naguère critiquée est aujourd'hui passée dans l'usage : la traversée des voies est strictement interdite, veuillez emprunter le passage souterrain. ● emprunter (synonymes) verbe transitif (latin populaire imprumutare, latin classique promutuari) Se faire prêter de l'argent
Synonymes :
- devoir à
User de quelque chose dont on n'est pas le créateur, qui...
Synonymes :
- copier
- imiter
- plagier
- puiser
- tirer
Utiliser une route, une voie pour circuler
Synonymes :
- prendre
- suivre
emprunter
v. tr.
d1./d Se faire prêter. Emprunter des livres, de l'argent.
d2./d Fig. Prendre, s'approprier. Corneille a emprunté le sujet d'"Horace" à Tite-Live. Emprunter un mot au grec.
d3./d Imiter. Emprunter la voix de qqn.
— Fig. Emprunter les apparences de la vérité.
d4./d Prendre (un chemin). Emprunter un nouvel itinéraire.
d5./d Utiliser (un moyen de locomotion). Emprunter sa voiture pour se déplacer.
⇒EMPRUNTER, verbe trans.
A.— [Le suj. désigne une pers.; le compl. d'obj. désigne une chose concr.; le verbe peut être suivi d'un compl. second. introduit par de (vieilli) ou par à, désignant la pers. à qui on emprunte] Recevoir à titre de prêt. Emprunter de qqn (Ac.) Elle n'avait point de robe. Sa mère emprunta une robe rayée, un fichu, une coiffe de dentelle à la citoyenne Blaise (FRANCE, Dieux ont soif, 1912, p. 254). Je lui rendais les livres que je lui avais empruntés, il m'en prêtait d'autres (BEAUVOIR, Mém. jeune fille, 1958, p. 201) :
• 1. J'étais un peu étourdi parce qu'il a fallu que je monte chez Emmanuel pour lui emprunter une cravate noire et un brassard. Il a perdu son oncle, il y a quelques mois.
CAMUS, L'Étranger, 1942, p. 1125.
— En partic. [Le compl. d'obj. désigne une somme d'argent] La question entre nous (...) se réduit à savoir si je vous présente des garanties suffisantes pour la somme que je viens vous emprunter (BALZAC, Gobseck, 1830, p. 410). J'ai emprunté de mon oncle dix mille francs (Ac. 1835, 1878). Disraëli (...) prêtait à des amis de l'argent emprunté pour eux et qu'ils ne lui rendaient jamais (MAUROIS, Disraëli, 1928, p. 103).
♦ [Avec un compl. introduit par sur, désignant un gage, une garantie] Remboursement (...) des sommes que nous avons empruntées sur les titres de Joseph et de Ferdinand (DUHAMEL, Terre promise, 1934, p. 13).
♦ Emploi abs. Être obligé d'emprunter. Il entra dans la voie terrible des usures; il emprunta aux pires bourgeois, hypothéqua ses châteaux, aliéna ses terres (HUYSMANS, Là-bas, t. 1, 1891, p. 78). Pour reconstruire (...) tout ce qui avait été détruit (...) on avait dû continuellement emprunter, dévaluer la monnaie, renoncer aux dépenses de modernisation (DE GAULLE, Mém. guerre, 1959, p. 235) :
• 2. Donnez vos bronzes à Christie qui les vendra, et empruntez sans crainte. Les bronzes et mes diamants payeront pour le voyage. Sur cette certitude vous pouvez emprunter de l'évêque.
STAËL, Lettres inédites à L. de Narbonne, 1793, p. 156.
[Avec un compl. introduit par sur, désignant un gage, une garantie] On ne la mange pas, la terre! (...) j'ai emprunté dessus, parce que c'est ma façon à moi, d'y faire pousser des pièces de cent sous (ZOLA, Terre, 1887, p. 330).
B.— Au fig.
1. Vieilli ou littér. [Le suj. désigne une pers. ou une manifestation d'une pers.; le compl. d'obj. désigne un attribut, une manifestation d'une pers.; le verbe est suivi d'un compl. second. introduit par de (vieilli) ou par à, désignant la pers. ou la chose à qui on emprunte] Recevoir, tenir de. Ce raisonnement emprunte de la circonstance présente une nouvelle force (Ac.). Les magistrats empruntent leur autorité du pouvoir qui les institue (Ac. 1835, 1878). Cette huile sacerdotale et royale qui nous confère notre éminence de chrétiens (...), cette huile à qui nous empruntons notre nom qui propre ment est « oints » (CLAUDEL, Poète regarde Croix, 1938, p. 264) :
• 3. ... lorsqu'une classe n'est pas encore prête historiquement, (...) lorsque sa révolution empruntant sa force du mouvement ennemi n'est encore qu'une révolution parasitaire, elle ne peut se promettre quelque succès que si elle tient la révolution ouverte et « en permanence » ...
JAURÈS, Ét. socialistes, 1901, p. XX.
— En partic. [Le compl. d'obj. désigne la lumière] Tous les Tartares en général ont le plus grand respect pour le soleil; ils le regardent comme le pere de la lune, qui emprunte de lui sa lumière (DUPUIS, Orig. cultes, 1796, p. 22).
2. Prendre quelque chose pour se l'approprier, pour l'utiliser ou pour l'imiter.
a) [Le suj. désigne une pers.; le compl. d'obj. désigne un attribut, une manifestation d'une pers.; le compl. second. introduit par de (vieilli) ou par à (ou le compl. du nom du compl. d'obj.) désigne une pers. ou une manifestation d'une pers.] Emprunter l'apparence, la manière de penser de quelqu'un. L'état royal emprunta à l'inquisition beaucoup de ses procédés et suivit presque toujours ses principes (SOREL, Réflex. violence, 1908, p. 147). Steeny n'est qu'un faux nom, un sobriquet emprunté par Michelle à son roman anglais favori (BERNANOS, M. Ouine, 1943, p. 1355) :
• 4. ... je n'éprouve qu'un sentiment très pénible devant ces modernes églises gothiques, bâties par un architecte en redingote, rajustant des fragments de dessins empruntés aux vieux temples.
RENAN, L'Avenir de la sc., 1890, p. 192.
— En partic. [Le compl. d'obj. désigne un fait de lang. ou de discours]
♦ CRIT. LITTÉR. [Le compl. d'obj. désigne un procédé, un fait littér.] Emprunter un exemple, une tournure, un personnage à un auteur, à une œuvre; emprunter une comparaison à la mythologie. Je serais tenté de croire que Schiller a emprunté le beau caractère de Max Piccolomini (...) de celui du comte Maximilien de Wallstein (CONSTANT, Wallstein, 1809, p. 196). Paris est vide, il n'y a pas d'idées à emprunter, et j'ai la tête trop malade pour en trouver dans mon propre fonds (MÉRIMÉE, Lettres ctesse de Boigne, 1870, p. 166) :
• 5. Paris n'a pas été capable de créer un schème dramatique nu, populaire, original : au XVIIe et au XVIIIe siècles il a emprunté Arlequin et Polichinelle à l'Italie, au Guignol à Lyon, au XIXe Ubu aux collégiens de Rennes.
THIBAUDET, Réflexions sur la litt., 1936, p. 172.
♦ LING. [Le suj. et le compl. second. désignent une lang.; le compl. d'obj. désigne une unité de lang. en partic. un mot] Soulager les mots empruntés au grec de leurs vaines lettres parasites (GOURMONT, Esthét. lang. fr., 1899, p. 60) :
• 6. Très peu de mots marins appartiennent au français d'origine; ils ont été empruntés aux langues germaniques et scandinaves, au provençal, à l'italien...
GOURMONT, Esthét. lang. fr., 1899 p. 90.
♦ [Le compl. d'obj. désigne un nom, une dénomination] On a souvent noté que les noms des instruments de force ou des bois de charpente sont empruntés aux animaux (GOURMONT, Esthét. lang. fr., 1899 p. 174) :
• 7. Ils nous montrèrent encore et le pic de l'Épée, et plusieurs autres auxquels ils donnent des noms le plus souvent empruntés de leurs ustensiles, de leurs armes, ou de la configuration des lieux les plus frappants.
DUSAULX, Voyage à Barège, t. 1, 1796, p. 272.
b) [Le suj., le compl. d'obj. et le compl. second. désignent une chose abstr.] De midi à 3 h, c'est l'heure creuse et calme où le jour emprunte à la nuit son silence (MARTIN DU G., Thib., Épil., 1940, p. 934). Le sentiment emprunte à l'instinct son masque et son langage, mais n'épouse ses formes que pour mieux libérer son contenu (J. VUILLEMIN, Essai signif. mort, 1949, p. 101) :
• 8. ... les apparences du malheur sont si fréquemment empruntées par la ruse et l'artifice, qu'on est porté à se mettre en garde contre des formes si souvent trompeuses.
CONSTANT, Journaux intimes, 1805, p. 195.
c) Rare, recherché ou style précieux. [Le suj. désigne une pers. ou une chose; le compl. d'obj. désigne une chose concr.; le verbe est suivi d'un compl. second. introduit par à, désignant la chose à qui on emprunte] Des villages et même des villes, dans les contrées sèches de Chaldée (...) ont emprunté exclusivement à l'argile et aux briques crues leurs matériaux (VIDAL DE LA BL., Princ. géogr. hum., 1921, p. 153). Des poisons variés qu'il avait empruntés à son arsenal de chimiste (MAUROIS, Ariel, 1923, p. 34) :
• 9. La porte, bâtie de trois morceaux de planches vermoulues évidemment empruntées aux débris du plancher de la cabane supérieure, n'avait d'autre serrure qu'un loquet de bois...
LAMARTINE, Le Tailleur de pierre de Saint-Point, 1851, p. 411.
3. [Le suj. désigne une pers.; le compl. d'obj. désigne un attribut, une manifestation d'une pers.] Avoir recours à, utiliser occasionnellement. Emprunter le langage de la raison. Je suis même obligé d'emprunter la main d'un secrétaire pour vous répondre (CHATEAUBR., Corresp., t. 1, 1789-1824, p. 306) :
• 10. ... comme tous les mystiques, ces philosophes parlent volontiers d'une naissance de Dieu en notre âme ou, pour emprunter le langage significatif de Claudel, d'une co-naissance de Dieu et de notre âme.
BÉGUIN, L'Âme romantique et le rêve, 1939, p. 51.
— P. ext., style recherché.
♦ [Le compl. d'obj. désigne une voie de communication] Emprunter une rue. L'itinéraire de Marco Polo, empruntant les vallées et les cols (GIRAUDOUX, Simon, 1926, p. 105). Louis VII, renonçant à poursuivre sa route par terre jusqu'en Syrie, décida d'emprunter la voie de mer (GROUSSET, Croisades, 1939, p. 169).
♦ [Le compl. d'obj. désigne un moyen de transport] J'ai décidé d'emprunter le train de 11 h 09 (BERNANOS, Joie, 1929, p. 708).
Prononc. et Orth. :[], (j')emprunte []. Ds Ac. 1694-1932. Étymol. et Hist. 1. 1125-50 « prêter » (Pèl. de Charlemagne, éd. E. Koschwitz, 593); 2. ca 1150 « se faire prêter » (WACE, St Nicolas, éd. E. Ronsjo, 731); ca 1200 part. passé « gauche, maladroit » (RAIMBERT DE PARIS, Ogier le Danois, 4789 ds T.-L.); 3. p. ext. 1er quart XIIIe s. « utiliser » (RENCLUS DE MOLLIENS, Charité, 177, 5 ds T.-L.). Du lat. pop. imprumutuare, altération par assimilation régressive d'un lat. vulg. impromutuare formé sur le lat. class. jur. promutuari « emprunter ». Fréq. abs. littér. :1 507. Fréq. rel. littér. :XIXe s. : a) 2 506, b) 1 857; XXe s. : a) 1 858, b) 2 156. Bbg. COHEN 1946, p. 15. — GOTTSCH. Redens. 1930, pp. 140-141, 183, 310. — JORDAN (L.). « Impromutare » > « emprunter ».
emprunter [ɑ̃pʀœ̃te] v. tr.
ÉTYM. V. 1150; « prêter », v. 1125; du lat. pop. impromutuare, VIIe; du lat. jurid. promutuum « avance d'argent », de pro- « à l'avance », et lat. class. mutuum « réciprocité, emprunt ». → Mutuel.
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1 Obtenir, recevoir (qqch.) à titre de prêt ou pour un usage momentané. || Emprunter un livre, un parapluie à un ami. || Je vous emprunte votre stylo pour noter ceci. ⇒ Prendre. || Rendre, restituer ce que l'on a emprunté. — Emprunter de l'argent à un ami. || Emprunter mille francs à qqn. — Emprunter une chose, une somme d'argent de qqn (vx), à qqn (⇒ Taper, fam.). || Emprunter de l'argent aux banques. — (Sans compl. ind.). || Emprunter dix mille francs. — (Sans compl. dir.). || Emprunter sur gages, sur hypothèque. || Emprunter sans intérêts, à gros intérêts. || Il emprunte à tous ses amis (→ Dette, cit. 10).
1 Il se vit (…) obligé à en emprunter (de l'argent) de ses amis.
Racine, Hist. de Port-Royal.
2 (…) ce qui l'acheva, ce fut d'apprendre que Daniel, en son nom, avait emprunté de l'argent à l'imprimeur.
Alphonse Daudet, le Petit Chose, II, XIII.
3 J'étais un peu étourdi parce qu'il a fallu que je monte chez Emmanuel pour lui emprunter une cravate noire et un brassard. Il a perdu son oncle, il y a quelques mois.
Camus, l'Étranger, I, p. 10.
♦ Absolt. Contracter des emprunts, des dettes.
4 Ceux qui empruntent sont bien malheureux (…)
Molière, l'Avare, II, 1.
5 (…) il avait fallu emprunter, hypothéquer le bien de campagne, les orangers hérités de famille et les champs de roses.
Loti, Matelot, IV, p. 16.
2 Fig. Prendre ailleurs et faire sien. ⇒ Devoir, prendre, puiser (dans), tirer (de). || Civilisation qui emprunte une coutume à l'Europe. || Le français a emprunté de nombreux mots au grec, à l'anglais, etc. || Mot emprunté du latin, au latin. ⇒ Emprunt. || Emprunter une idée, un thème. || Emprunter une pensée en la transposant à un auteur. || Emprunter à une légende populaire le thème d'une œuvre. ⇒ aussi Copier, imiter, répéter, reproduire.
REM. Certains grammairiens puristes se rangent encore à l'avis de Littré, qui écrit : « Quand le régime indirect d'emprunter est un nom de chose, il faut de ». Cette règle, conforme à l'usage classique (→ ci-dessous, cit. 7 et 8, et aussi Comparaison, cit. 12, La Bruyère) n'est plus guère suivie, depuis le XIXe s. La plupart des écrivains modernes y compris Littré lui-même (→ ci-dessous, cit. 12) emploient emprunter à…, avec un nom de chose (→ Appel, cit. 14; chant, cit. 3; divertir, cit. 15), comme avec un nom de personne pour complément. Emprunter de… est vieilli, avec un nom de personne (→ Accise, cit. 1, Montesquieu; Ce, cit. 1, Racine).
6 La vérité et la raison sont communes à un chacun, et ne sont non plus à qui les a dites premièrement qu'à qui les dit après (…) Les abeilles pillotent de çà, de là les fleurs; mais elles en font après le miel, qui est tout leur : ce n'est plus thym ni marjolaine. Ainsi les pièces empruntées d'autrui, il les transformera et confondra pour en faire un ouvrage tout sien, à savoir son jugement.
Montaigne, Essais, I, XXV.
7 La lune empruntant du soleil la clarté qu'elle rend (…)
d'Aubigné, Création, 7.
8 C'est un ajustement des mouches emprunté.
La Fontaine, Fables, IV, 3.
9 Aimez donc la raison; que toujours vos écrits
Empruntent d'elle seule et leur lustre et leur prix.
Boileau, l'Art poétique, I.
10 Virgile a emprunté d'Homère quelques comparaisons, quelques descriptions.
Voltaire, Essai sur la poésie, III.
11 Sa muse (de Voltaire) qui eût été si belle de sa beauté, emprunta souvent ses prestiges aux enluminures du fard et aux grimaces de la coquetterie (…)
Hugo, Littérature et Philosophie mêlées, Sur Voltaire.
12 Mon dictionnaire à moi a pour éléments fondamentaux un choix d'exemples empruntés à l'âge classique et aux temps qui l'ont précédé (…)
Littré, Dict., Préface, p. 5.
13 Elle (la muse de Gautier) emprunte au poème (…) la pompe ou l'énergie concise de son langage.
Baudelaire, Art romantique, Gautier.
14 Quelle distillation nous donnera l'essence, toujours la même, à laquelle tant de produits divers empruntent ou leur indiscrète odeur ou leur parfum délicat.
H. Bergson, le Rire, p. 1.
15 Seules, les passions fécondent l'intelligence du poète; et c'est aux passions seulement que les idées empruntent la vie.
André Suarès, Trois hommes, « Ibsen », p. 98.
♦ (Sans compl. indirect) :
16 L'esprit le plus sec ne parle pas sans métaphores, et s'il paraît s'en garantir à dessein c'est que les images qu'il emprunte, étant vieilles et usées, ne frappent ni lui, ni les lecteurs.
Rivarol, Pensées et maximes, I.
17 Mes façons de penser, je les emprunte volontiers : je ne tiens qu'à mes façons de sentir.
J. Renard, Journal, avr. 1898.
3 Vx. ou littér. Recourir à (une aide étrangère). ⇒ Employer, recourir (à), servir (se), user. || Emprunter l'aide, le secours, le crédit de qqn. || Emprunter la voix de qqn, s'exprimer par sa bouche.
18 Ne saurait-il rien voir qu'il n'emprunte vos yeux ?
Racine, Britannicus, I, 2.
19 C'était le désir et l'espoir de pouvoir vous répondre moi-même, qui me faisait différer chaque jour; et vous voyez qu'encore aujourd'hui, je suis obligée d'emprunter la main de ma femme de chambre.
Laclos, les Liaisons dangereuses, Lettre CXII.
20 Trop souvent (…) les artistes empruntent les ailes de la circonstance, ils croient se grandir en se faisant les hommes d'une chose, en devenant les souteneurs d'un système, et ils espèrent changer une coterie en public.
Balzac, les Comédiens sans le savoir, Pl., t. VII, p. 47 (→ Célébrité, cit. 6).
21 Gardons tout, par respect pour les voies qu'empruntent la dispersion et le retour.
Colette, l'Étoile Vesper, p. 96.
4 Mod. Prendre (une voie réservée à d'autres, ou à d'autres usages). || « Le conducteur ne peut emprunter la moitié gauche de la chaussée… » (Code de la route). — REM. Cet emploi est courant dans la langue administrative, technique, journalistique.
21.1 (…) au retour de Logone-Birni, nous avons « emprunté » le bras profond du Logone.
Gide, le Retour du Tchad, III, in Souvenirs, Pl., p. 916.
5 Vx. ou littér. Revêtir (une apparence étrangère), imiter. || Emprunter le masque de l'indifférence. || Emprunter les apparences du courage. ⇒ Revêtir. || Emprunter l'allure, l'aspect de qqn. ⇒ Imiter, modeler (se modeler sur), singer.
22 Il faut d'un suppliant emprunter le visage (…)
Racine, Mithridate, III, 1.
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emprunté, ée p. p. adj.
23 Moi-même, revêtu d'un pouvoir emprunté (…)
Racine, Britannicus, IV, 4.
24 Qu'on ne se moque donc plus de ceux qui se font honorer pour des charges et des offices, car on n'aime personne que pour des qualités empruntées.
Pascal, Pensées, V, 323.
♦ Ling. || Mots empruntés au grec, à l'anglais, ou du grec, de l'anglais. ⇒ Emprunt.
2 Mod. Qui manque d'aisance ou de naturel. ⇒ Contraint, embarrassé, gauche. || Un air, un comportement emprunté. — Il est tout emprunté.
25 Chacun chercha pour plaire un visage emprunté.
Boileau, Épîtres, IX.
26 Même elle avait encor cet éclat emprunté
Dont elle eut soin de peindre et d'orner son visage.
Racine, Athalie, II, 5.
27 Mme la duchesse de Chartres se trouvait tout empruntée à Saint-Cloud, comme en pays inconnu.
Saint-Simon, Mémoires, 93, 229.
28 Le père, timide, emprunté dans la vie, effaré à l'idée des démarches à faire pour se procurer un permis (…)
Alphonse Daudet, Contes du lundi, « Les mères ».
29 C'est tout ce que je pus trouver à dire, de la manière la plus banale et la plus empruntée.
Gide, les Faux-monnayeurs, III, X, p. 404.
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CONTR. Avancer, céder, prêter. — (Du p. p.) Authentique, personnel. — Aisé, naturel.
DÉR. Emprunt, empruntable, emprunteur.
HOM. V. Empreindre, empreinte.
Encyclopédie Universelle. 2012.