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père

père [ pɛr ] n. m.
XIIe; pedre fin XIe; paire v. 980; lat. pater, tris
1Homme qui a engendré, qui a donné naissance à un ou plusieurs enfants. Devenir, être père. Être (le) père de deux enfants. « Allons donc, et que les Cieux prospères Nous donnent des enfants dont nous soyons les pères » (Molière). Père biologique. Le père de qqn. plaisant géniteur; arg. ou pop. 1. dab, paternel, vieux. Le père et la mère (les parents) et leurs enfants. famille. Tes père et mère honoreras. Comme père et mère, comme le feraient les parents. « Mon père, ce héros au sourire si doux » (Hugo). Enfant né de père inconnu. Autorité du père ( paternel) . Traiter qqn comme un père traite ses enfants. paternellement. Nouveau père : père qui s'occupe beaucoup de ses enfants et prend part aux soins du ménage. Mauvais père. parâtre. Meurtre du père. 2. parricide. Loc. Tuer père et mère : commettre les pires méfaits. Psychol. Image du père. imago. Loc. prov. Tel père, tel fils. Tradition transmise de père en fils. Magistrats de père en fils. Alexandre Dumas père. Entreprise Dupont père et fils. Je vous présente mon père. Monsieur votre père. Appellatif papa. « Dis donc, père (elle appelait son mari “père” dans la maison) » (Maupassant).
Dr. Ascendant mâle au premier degré. Père naturel et père légal. Père putatif. « L'enfant conçu pendant le mariage a pour père le mari » ( CODE CIVIL ). Père du père ou de la mère ( grand-père) , du conjoint ( beau-père) .
2 ♦ PÈRE DE FAMILLE, qui a un ou plusieurs enfants qu'il élève. ⇒ chef (de famille), pater familias. Les responsabilités du père de famille. Dr. En bon père de famille : sagement. « Ils occupaient les lieux en bons pères de famille, selon la lettre et l'esprit de leurs baux » (Aymé). Fig. Placements, valeurs de père de famille, qui garantissent un profit régulier.
3Le parent mâle (de tout être vivant sexué). Le père de ce poulain était un pur-sang.
4Plur. Littér. aïeul, ancêtre, 2. ascendant. L'héritage de nos pères. « Nos pères sur ce point étaient gens bien sensés » (Molière).
5La première personne de la sainte Trinité. Dieu le Père. Au nom du Père, du Fils et du Saint-Esprit, formule qui accompagne le signe de la croix. « Notre Père qui êtes aux cieux » (prière). Subst. Dire un Notre Père. 1. pater.
6Fig. Le père de qqch. créateur, fondateur, inventeur. Louis Lumière, père du cinéma. « Le travail est souvent le père du plaisir » (Voltaire). Le « Journal des savants » est le père de tous les ouvrages de ce genre. ancêtre.
7Par anal. Celui qui se comporte comme un père, est considéré comme un père. Père adoptif ( adoption) . Père nourricier. « Je serai votre père, jusqu'à ce que vous ayez retrouvé celui qui vous a donné la vie » (Fénelon). Être un père pour quelqu'un.
Relig. Père spirituel. directeur (de conscience).
8Père noble : personnage âgé et solennel, au théâtre. Jouer les pères nobles, les nobles vieillards (iron.).
9Antiq. rom. Les pères conscrits.
10(Titre de respect) Relig. Père abbé : religieux assurant la direction d'un couvent, d'une communauté. Cour. Les pères de l'Oratoire. Les Pères Blancs. Le père Bourdaloue. « Quelle idée aussi de mener cet enfant chez les Pères » (A. Daudet). Le révérend père Untel. Le Saint-Père. pape. Les Pères de l'Église : les docteurs de l'Église (du I er au VI e siècle). ⇒aussi patrologie. Les Pères du concile, les évêques qui y sont présents.
Mon père, se dit en s'adressant à certains religieux.
11(XVIIe) Avant le nom de famille Désignant un homme mûr et de condition modeste, ou avec condescendance. « Le Père Goriot », roman de Balzac. Le père Ubu, personnage de Jarry. Loc. Jouer les pères la pudeur. Le coup du père François : un coup mortel sur la nuque. Le père Hugo. Le père Fouettard. Le père Noël. Un père tranquille : un homme qui aime la tranquillité. En père peinard : tranquillement, en évitant les soucis.
Loc. Un gros père : un gros bonhomme placide. ⇒ bonhomme, pépère. Fam. Alors, mon petit père, comment ça va ?
⊗ HOM. Pair, paire, pers.

père nom masculin (latin pater, -tris) Homme qui a engendré un ou plusieurs enfants : Il ressemble à son père. Homme, ayant ou non engendré un enfant, qui joue auprès de lui le rôle de parent dans la cellule familiale : Elle préfère son père adoptif à son vrai père. En apposition à un nom propre, distingue le père du fils : A. Dumas père. Créateur d'une œuvre, promoteur d'une doctrine, d'une technique : Hérodote est le père de l'histoire. Homme qui se comporte comme un père, qui est considéré comme tel : Il est pour moi un père. Parent mâle d'un être vivant, sexué, d'un animal : Le père du cheval vainqueur est un célèbre étalon. Avant un nom propre, appellation familière donnée à quelqu'un, souvent d'un certain âge : Le père Durand prend le frais devant sa porte. En Afrique, tout homme âgé que l'on respecte. En Afrique, oncle paternel. (On dit aussi père cadet ou petit père, par opposition à vrai père.) Électroacoustique Synonyme de disque père. Religion Titre donné aux membres des congrégations religieuses. Appellation, depuis Vatican II, des prêtres ou évêques. En Afrique, prêtre de race blanche (par opposition à abbé). Théologie La première personne de la Trinité. ● père (citations) nom masculin (latin pater, -tris) Guillaume Apollinaire de Kostrowitzky, dit Guillaume Apollinaire Rome 1880-Paris 1918 On ne peut pas transporter partout avec soi le cadavre de son père. Les Peintres cubistes Hermann Charles Victor Prévost, vicomte d'Arlincourt près de Versailles 1789-Paris 1856 Mon père, en ma prison, seul à manger m'apporte. Le Siège de Paris Émile Augier Valence, Drôme, 1820-Paris 1889 Académie française, 1857 Ô père de famille, ô poète, je t'aime. Gabrielle, dernier vers Michel Lévy Pierre Corneille Rouen 1606-Paris 1684 À qui venge son père, il n'est rien d'impossible. Ton bras est invaincu, mais non pas invincible. Le Cid, II, 2, Rodrigue Pierre Corneille Rouen 1606-Paris 1684 Père dénaturé, malheureux politique ! Polyeucte, V, 6, Sévère Gustave Courbet Ornans 1819-La Tour-de-Peilz, Suisse, 1877 À quoi sert la vie si les enfants n'en font pas plus que leurs pères ? Manuscrit du Cabinet des Estampes Denis Diderot Langres 1713-Paris 1784 Le Dieu des chrétiens est un père qui fait grand cas de ses pommes et fort peu de ses enfants. Addition aux Pensées philosophiques Victor Hugo Besançon 1802-Paris 1885 Mon père, ce héros au sourire si doux, […] Parcourait à cheval, le soir d'une bataille, Le champ couvert de morts sur qui tombait la nuit. La Légende des siècles, Après la bataille Jean de La Bruyère Paris 1645-Versailles 1696 Il y a d'étranges pères, et dont toute la vie ne semble occupée qu'à préparer à leurs enfants des raisons de se consoler de leur mort. Les Caractères, De l'homme Henry Millon de Montherlant Paris 1895-Paris 1972 Académie française, 1960 La pire colère d'un père contre son fils est plus tendre que le plus tendre amour d'un fils pour son père. La Reine morte, I, 2, Don Manoel Gallimard Alfred de Musset Paris 1810-Paris 1857 Où le père a passé, passera bien l'enfant. Poésies, le Rhin allemand, réponse à la chanson de N. Becker Jacques Prévert Neuilly-sur-Seine 1900-Omonville-la-Petite, Manche, 1977 Notre Père qui êtes aux cieux Restez-y Et nous nous resterons sur la terre Qui est quelquefois si jolie. Paroles, Pater Noster Gallimard Paul Verlaine Metz 1844-Paris 1896 Il est grave : il est maire et père de famille. Son faux-col engloutit son oreille. Ses yeux Dans un rêve sans fin flottent insoucieux, Et le printemps en fleur sur ses pantoufles brille. Poèmes saturniens, Monsieur Prudhomme Messein Marguerite de Crayencour, dite Marguerite Yourcenar Bruxelles 1903-Mount Desert Island, Maine [É.-U.], 1987 On choisit son père plus souvent qu'on ne pense. Électre ou la Chute des masques, II, 4, Pylade à Oreste Plon Anonyme Celui-là est le père, que désigne le mariage. Is pater est, quem nuptiae demonstrant. Commentaire Principe du droit romain reproduit par notre Code : « L'enfant conçu pendant le mariage est réputé avoir pour père le mari. » Horace, en latin Quintus Horatius Flaccus Venusia, Apulie, 65-Rome ? 8 avant J.-C. L'âge de nos pères ne vaut pas celui de nos aïeux. Aetas parentum pejor avis. Odes, III, VI, 46 Pindare Cynoscéphales, près de Thèbes, 518 avant J.-C.-Argos ? 438 avant J.-C. Le temps même, père de toutes choses, ne saurait faire qu'elles n'aient pas été accomplies. Deuxième Olympique, 19 (traduction Puech) Sophocle Colone, près d'Athènes, entre 496 et 494 avant J.-C.-Athènes 406 avant J.-C. Ô mon fils, sois un jour plus heureux que ton père. Du reste avec honneur tu peux lui ressembler. Ajax, 550-551 (traduction Racine) quant au reste Commentaire Cette traduction a été écrite par Racine, en marge de son Sophocle. Bible Honore ton père et ta mère, comme te l'a commandé Yahvé, ton Dieu, afin d'avoir longue vie et bonheur sur la terre que Yahvé ton Dieu te donne. Ancien Testament, DeutéronomeV, 16 Commentaire Citation empruntée à la « Bible de Jérusalem ». Robert Burton Lindley, Leicestershire, 1577-Oxford 1640 Diogène frappait le père quand le fils jurait. Diogenes struck the father when the son swore. The Anatomy of Melancholy, III Fedor Mikhaïlovitch Dostoïevski Moscou 1821-Saint-Pétersbourg 1881 Tous les hommes veulent la mort de leur père. Les Frères Karamazov Aleksandr Sergueïevitch Griboïedov Moscou 1795-Téhéran 1829 Ô mon Dieu, comme il est difficile d'être le père d'une jeune fille. Le Malheur d'avoir trop d'esprit, I, 10 père (difficultés) nom masculin (latin pater, -tris) Orthographe 1. Jamais de majuscule pour nommer un ecclésiastique (le père Durand, le père abbé, les pères jésuites) sauf dans les abréviations (le P. Durand, les PP. Durand et Legrand). 2. Toujours avec une majuscule pour nommer le Saint-Père (le pape) et les Pères de l'Église. 3. De père en fils, avec père au singulier. Construction Le père et la mère, ton père et ta mère. Recommandation Dans l'expression soignée, répéter l'article ou le possessif. Le tour avec un seul article ou un seul possessif au pluriel pour les deux noms (les père et mère, tes père et mère) est familier. ● père (expressions) nom masculin (latin pater, -tris) En (bon) père de famille, comme le ferait un administrateur soigneux et diligent. Familier. Gros père, homme gros et placide, ou enfant potelé. Mon petit père, appellation affectueuse et familière pour s'adresser à un homme quel que soit son âge. Père de famille, homme marié qui a des enfants. Père spirituel, directeur de conscience ; maître à penser. Le petit père des peuples, appellatif des tsars, puis de Staline. De père de famille, se dit de placement, de valeurs qui présentent toutes les garanties de sécurité et de rendement pour son détenteur. Meurtre du père, dans la théorie freudienne, assassinat mythique du chef de la horde primitive par ses fils, constitutif de l'articulation entre la névrose et l'histoire de l'humanité. (Cette hypothèse freudienne, exposée dans Totem et Tabou [1912], est aujourd'hui abandonnée.) Nom(-)du(-)père, pour Jacques Lacan, signifiant susceptible de rendre compte de l'existence du sujet. (Ce signifiant fait place au désir de l'enfant en le séparant de la demande maternelle, et sa forclusion serait la donnée génératrice des psychoses.) Père blanc, membre de la congrégation des Missionnaires de Notre-Dame d'Afrique, fondée en 1868 par le cardinal Lavigerie. Pères d'un concile ou pères conciliaires, membres d'un concile œcuménique. Pères du désert, anachorètes célèbres des déserts d'Égypte, considérés comme les initiateurs du mouvement monastique. Pères de l'Église, anciens écrivains chrétiens qui, par leurs œuvres, la valeur de leur doctrine, font autorité en matière de foi. Père ministre, supérieur d'une maison de franciscains. Notre premier père, Adam. ● père (homonymes) nom masculin (latin pater, -tris) pair adjectif pair nom masculin paire nom féminin perd verbe perds verbe pers adjectif pers adjectif masculinpère (synonymes) nom masculin (latin pater, -tris) Homme qui a engendré un ou plusieurs enfants
Contraires :
- mère
Créateur d'une œuvre, promoteur d'une doctrine, d'une technique
Synonymes :
- ancêtre
- auteur
- instaurateur
- instigateur
- inventeur
Synonymes :
- Électroacoustique. disque père

père
n. m.
d1./d Homme qui a engendré un ou plusieurs enfants. De père en fils: par transmission du père aux enfants.
|| Père de famille, qui élève un ou plusieurs enfants.
DR En bon père de famille: avec la sagesse, l'esprit d'économie qu'un père de famille est censé posséder.
|| (Afr. subsah.) Oncle paternel (on dit aussi petit père).
d2./d Géniteur d'un animal.
d3./d RELIG CHRET Dieu le Père, le Père éternel: la première personne de la Trinité.
d4./d Révérend père ou, absol., père: titre donné à la plupart des prêtres catholiques membres du clergé régulier. Les pères jésuites.
Le Saint-Père: le pape.
Les Pères de l'église: les apologistes et les docteurs des cinq premiers siècles de l'église chrÉtienne.
Les Pères du désert: les anciens anachorètes.
Les Pères du concile (ou conciliaires): les évêques qui ont voix délibérante aux débats d'un concile.
|| (Afr. subsah.) Prêtre blanc.
d5./d Créateur, fondateur (d'une oeuvre, d'une doctrine). Freud, père de la psychanalyse.
d6./d Celui qui se conduit, qui est considéré comme un père. Vous avez été un père pour moi.
d7./d (Suivi d'un nom, pour désigner un homme d'un certain âge et de milieu social modeste.) Le père Jérôme.
|| Gros père: gros homme d'allure bonasse; enfant joufflu, replet.
d8./d (Afr. subsah.) Homme que son âge rend respectable.
d9./d (Plur.) Ancêtres, aïeux. Le sang de nos pères.

⇒PÈRE, subst. masc.
I.— Ce qui est la source, l'origine.
A.— Celui qui a engendré.
1. [Dans l'ordre naturel]
a) Homme qui a engendré, qui a un ou plusieurs enfants. Synon. littér., vx ou plais., fam. papa, auteur des jours, géniteur, procréateur; très fam. ou pop. paternel, vieux; arg. dab(e), daron. Ah! c'est moi qui suis l'auteur de ta joie, comme je suis l'auteur de tes jours. Les pères doivent toujours donner pour être heureux. Donner toujours, c'est ce qui fait qu'on est père (BALZAC, Goriot, 1835, p. 235). Bref, je serais un père comme les autres, alors que je n'ai voulu redevenir père que pour être un père différent des autres. Mais pourquoi un père comme les autres? Parce que tu auras été un enfant comme les autres, au lieu d'être supérieur aux autres (MONTHERL., Fils personne, 1943, III, 4, p. 331). En exerçant à l'égard de l'enfant ce rôle tutélaire du père, je renouvelle en moi l'assurance d'avoir moi-même reçu l'être de mes parents : filialité et paternité forment en effet un unique rapport à deux pôles qui est pressenti dans sa totalité quand j'aborde ce lien vivant par l'une ou l'autre de ses extrémités (RICŒUR, Philos. volonté, 1949, p. 414). V. aussi auteur ex. 3, 4 et géniteur ex. :
1. Quelqu'un a soufflé la bougie qui éclairait pour moi le doux visage maternel penché sur le repas du soir. Quelqu'un a éteint la lampe autour de laquelle nous étions une famille heureuse, à la nuit, lorsque mon père avait accroché les volets de bois aux portes vitrées.
ALAIN-FOURNIER, Meaulnes, 1913, p. 14.
SYNT. Un bon, un tendre père; un père autoritaire, barbare, dénaturé; un amour, une tendresse, un cœur de père; l'autorité, la puissance du père; les devoirs, les responsabilités du père; être père, devenir père; être bon père, bon époux; bon mari, bon père; aimer, honorer, respecter son père; obéir à son père; succéder à son père. [Domaine de la psychanal.] L'image du père, la fixation au père.
En compos. Beau-père, grand-père, arrière-grand-père.
Loc., expr. et proverbes
De père en fils. D'une génération à l'autre. Depuis toujours, de père en fils, on a remué la terre d'ici et soigné le vignoble (HAMP, Champagne, 1909, p. 122). Si le caractère artisanal a disparu, le règne de la grande industrie ne s'est pas instauré dans le cuir. La plupart des usines sont des entreprises de famille transmises de père en fils où chaque génération apporte sa contribution au progrès scientifique et à la prospérité commerciale de l'affaire (BÉRARD, GOBILLIARD, Cuirs et peaux, 1947, p. 10).
Père et mère
Ses père et mère. ,,Locution usitée et blâmée à tort par quelques grammairiens pour désigner collectivement le père et la mère de quelqu'un`` (LITTRÉ). Tes père et mère honoreras (commandement de Dieu). V. honorer ex. 3. Cet enfant a perdu ses père et mère (Ac. 1878, 1935). Cet autre-là, on ne l'appelait que Raboliot : à tel point qu'on avait oublié le nom de ses père et mère, qui était Fouques (GENEVOIX, Raboliot, 1925, p. 25).
Comme père et mère. Comme des grandes personnes. [Avec simple valeur d'intensif] Grand comme père et mère. ,,Tout à fait grand, ayant la taille d'un homme`` (Lar. 19e-20e). Cécile, te voilà dégommée. Sais-tu qu'on a découvert un petit gosse de trois ans qui compose de la musique et joue comme père et mère? (DUHAMEL, Terre promise, 1934, p. 11). Une petite fille qui, la veille encore, mangeait son lieu séché, buvait l'eau du ciel, aussi bien que père et mère (QUEFFÉLEC, Recteur, 1944, p. 119).
(Il faut) avoir tué père et mère. S'être rendu coupable, être capable des pires actions. — Comment peut-on trouver des hommes pour accomplir un pareil métier? — On a donc raison de dire qu'il faut avoir tué père et mère pour faire partie de la Police (MACÉ, Joli monde, 1887, p. 52). Les Courvoisier se faisaient de l'intelligence une idée moins favorable et, pour peu qu'on ne fût pas de leur monde, être intelligent n'était pas loin de signifier « avoir probablement assassiné père et mère » (PROUST, Guermantes 2, 1921, p. 442).
Montrer à son père à faire des enfants. En remontrer à plus fort que soi. Mais lui, lui... qu'est-ce qu'il est? Un têtard, un rien du tout!... R'garde-moi c't'air, comment qu'ça marche! Ça voudrait peut-êt'e apprendre à son père à faire un enfant! (BENJAMIN, Gaspard, 1915, p. 158).
Être le fils de son père. V. fils I A 1 b.
Tel père, tel fils. V. fils ibid.
À père avare, fils prodigue. Le fils prend souvent le contrepied des attitudes de son père. [P. réf. à ce proverbe] Les deux Dumas ont renversé la théorie de l'économie. C'est le père qui fut le prodigue, et le fils qui fut l'avare (RENARD, Journal, 1890, p. 62).
♦ [Pour noter le rapport de parenté dans les relations soc. ou dans la conversation]
[Pour s'adresser à son père ou parler de lui] Père, mon père. Synon. fam. et plus usuel dans la lang. mod. papa. J'ai pitié de toi, père, de ta grande souffrance passée!... Je veux te la faire oublier! (LENORMAND, Simoun, 1921, 9e tabl., p. 103). Il y a que notre père est parti, depuis quatre jours. — Parti? Père est en voyage? (DUHAMEL, Combat ombres, 1939, p. 153).
[À la campagne, comme appellation utilisée par les enfants parlant de leur père ou par la mère parlant de leur père aux enfants] Le père. Elle toucha le bras de la mère, qui s'éveilla : — Estelle? Hein? Ah... oui. Ah mon Dieu! Elle se levait, passait ses pantoufles, suppliait : — Pas de bruit... Le père, n'éveille pas le père... Elle suivit sa fille dans les ténèbres (VAN DER MEERSCH, Invas. 14, 1935, p. 24).
Région. (Canada). [Comme appellation dont une femme se sert en s'adressant à son mari ou en parlant de lui] Son père. Elle pencha la tête et hasarda timidement : — Son père, as-tu pensé à la dépense? — Oui, sa mère, c'est tout arrangé (ROY, Bonheur occas., 1945, p. 210).
[Dans les formules de politesse] Monsieur votre père. Je viens, mon cher Monsieur, d'apprendre ces nouvelles macabres. Je voudrais en signe de sympathie serrer la main à Monsieur votre père (PROUST, Guermantes 2, 1921 p. 336).
[Précédé du nom de famille, pour distinguer le père de ses fils] M. Untel père ou le père. Même dans Lyon, M. Léniot père était une notabilité, et Joanny, comme fils unique, avait sa part de cette renommée (LARBAUD, F. Marquez, 1911, p. 201). Les drames romantiques de Dumas père poursuivent pendant ce temps — et jusqu'à nos jours — leur carrière hasardeuse (Arts et litt., 1935, p. 76-04). V. aussi fils I A 1 a.
[Dans un nom comm.] Un tel père et fils. Le journal que, deux ans auparavant, les Séchard père et fils avaient vendu vingt-deux mille francs, rapportait alors dix-huit mille francs par an (BALZAC, Illus. perdues, 1843, p. 556).
DR. ,,Ascendant mâle au premier degré`` (CAP. 1936).
) Père de famille. Homme marié ou veuf ayant des enfants qu'il élève; chef de famille. Les allocations aux familles reconnues nécessiteuses sont accordées d'abord aux familles des jeunes gens appelés qui sont mariés et pères de famille (J.O., Loi rel. recrut. arm., 1928, art. 24, p. 3813). Les jeunes filles peuvent être admises dans les cours complémentaires de garçons lorsque, le Conseil municipal ayant présenté une demande dans ce sens à l'administration, le Conseil départemental a donné un avis favorable. Toutefois, les pères de famille, en personnes responsables, doivent présenter au directeur une demande d'admission écrite (Encyclop. éduc., 1960, p. 107).
Rem. Dans les textes ayant trait aux instit. romaines la loc. apparaît avec le sens de « paterfamilias ». Si le père de famille, à Rome, jouit d'un pouvoir absolu, ce n'est pas parce qu'il est le plus ancien, ou le plus sage ou le plus expérimenté, mais c'est que, par suite des circonstances où s'est trouvée la famille romaine, il a incarné le vieux communisme familial (DURKHEIM, Divis. trav., 1893, p. 173).
Locutions
(User de qqc., administrer qqc.) en bon père de famille. Avec soin, vigilance et économie. L'emprunteur est tenu de veiller, en bon père de famille, à la garde et à la conservation de la chose prêtée (Code civil, 1804, art. 1880, p. 341). Le propriétaire a trouvé plus simple ensuite de louer meublé (...). Je serai peut-être en principe un peu moins libre, car j'ai promis de jouir des lieux « en bon père de famille », ce qui pour un célibataire, tout en paraissant cocasse, revêt un sens très précis. Je n'ai pas l'intention de faire défiler chez moi des « créatures ». Mais d'avoir dû prendre un engagement pareil m'agace un peu (ROMAINS, Hommes bonne vol., 1939, p. 47).
Placements, valeurs de père de famille. Placements, valeurs qui ne comportent pas de risque, qui sont d'un rapport modeste mais sûr. Ils ont voulu faire un placement de père de famille analogue à la rente, et peu leur chaut la gestion du réseau (CHARDON, Trav. publ., 1904, p. 251).
) Père légitime. Père d'un enfant né d'un mariage légitime. (Dict. XIXe et XXe s.). V. infra ex. 3.
) Père naturel. Père d'un enfant né hors mariage. Bouvard montra les lignes suivantes : étude de Me Tardivel notaire (...). « Monsieur, je vous prie de vous rendre en mon étude, pour y prendre connaissance du testament de votre père naturel, M. François-Denys-Bartholomée Bouvard » (FLAUB., Bouvard, t. 1, 1880, p. 12). La famille naturelle n'est pas juridiquement une véritable famille. Elle est simplement une série de liens existant, d'une part entre l'enfant et la mère naturelle, d'autre part entre l'enfant et son père naturel. C'est une famille incomplète puisqu'elle se fonde exclusivement sur un lien du sang (RÉAU-ROND. 1951, p. 611, s.v. famille).
) (Né, enfant) de père inconnu. Qui n'a pas été reconnu par le père réel. Il se vante volontiers de ne pas appartenir aux gens d'ici, d'être né à Boulogne par hasard d'une maman bretonne et d'un père inconnu (BERNANOS, Mouchette, 1937, p. 1276).
) Père seul. ,,Celui qui, ordinairement par suite de la mort de sa femme ou d'un divorce, devrait, au foyer et auprès des enfants, assumer des fonctions qui sont du ressort de la mère`` (FOULQ. Sc. soc. 1978).
) Père célibataire (p. anal. avec mère célibataire). Père célibataire, 35 a., ing., cherche charmante célibataire, éventuellement mère (Le Nouvel Observateur, 2 févr. 1981, p. 74, col. 2).
) Père au foyer. « La première fois que j'ai dû changer les couches de ma fille, » avoue-t-il, « ça m'a fait quelque chose. » C'est un père d'un type nouveau qui parle, un père au foyer : maman travaille, papa reste à la maison. Une révolution encore limitée. Mais sait-on jamais? (Le Point, 29 nov. 1976, p. 119).
b) P. anal.
) Dans la lang. cour.
Le mâle (considéré par rapport à l'animal qu'il a engendré). Le père de ce cheval est normand (Ac. 1835-1935). Va! va! crie la mère. Alors excité, le père s'envole, fait un cercle, sans bruit, vers Mistigris et revient à l'arbre. Mistigris effrayé ne bouge pas et, malgré ses prunelles qui ne veulent pas, il voit l'oiseau! (FRAPIÉ, Maternelle, 1904, p. 136).
Plante dont sont issues d'autres plantes. L'arbre et la plante ont tout intérêt à ce que leur progéniture ne pousse point trop près d'eux, parce qu'ils seraient étouffés par elle, — ou si vous préférez : la progéniture d'un arbre a tout intérêt à ne point pousser trop près de l'arbre père, parce qu'elle serait étouffée par lui (GIDE, Feuillets, 1925, p. 809). Les fleurs châtrées, on les féconde. On prélève, sur le cep considéré comme père, la grappe de fleurs la plus opulente aussi, et on vient la secouer au-dessus de la vigne amputée, dont le temps de réceptivité est arrivé (PESQUIDOUX, Livre raison, 1925, p. 86).
Au fig., région. [Antéposé ou en empl. attribut et déterminant un nom de plante (au masc.) dont il exprime la grosseur] Ce concombre-là, c'est un père (Canada 1930). Un peu plus haut, sous un père sapin d'où se découvrait tout le pays, Gaspard fit faire la pause à l'enfant (POURRAT, Gaspard, 1931, p. 181).
) BIOL. Parent mâle (de tout organisme sexué). Maintenant il faudrait savoir si la fécondation ne fait qu'imprimer à l'œuf un mouvement nutritif déterminé et si le développement sans fécondation serait possible dans des cas déterminés. Mais comment alors expliquer l'influence du père sur le produit de la fécondation; car le père transmet ses qualités caractéristiques comme la mère (Cl. BERNARD, Princ. méd. exp., 1878, p. 284). Cette expérience de l'androgenèse hybride est du plus haut intérêt théorique; car elle peut nous éclairer sur le rôle respectif du cytoplasme et des chromosomes. Le produit, qui tiendra son cytoplasme de la mère et ses gènes du père, ne montrera aucune influence du cytoplasme maternel sur les caractères spécifiques (CUÉNOT, J. ROSTAND, Introd. génét., 1936, p. 51).
c) P. ext.
) Celui qui est à l'origine d'une longue suite de descendants, d'une race, d'une nation ou d'un ensemble de nations. Les Israélites revendiquent souvent comme pères, c'est-à-dire comme fondateurs de leur nation, Abraham (...), Jacob (...), Isaac (...), et même David (Bible 1912). Comme la maison d'Abraham... il y avait des milliers et des milliers d'années, le Seigneur, désireux de visiter le patriarche, de bénir ses tentes errantes, et de lui révéler la naissance d'un fils, père futur d'un peuple immense (PESQUIDOUX, Livre raison, 1928, p. 169).
Notre premier père. Adam. On raconte que notre premier père a vécu plus de mille ans. Gageons qu'avant sa mort il a bien dû finir par désigner, entre tant d'enfants, ceux qui laboureraient la terre et ceux aussi, en bien plus petit nombre, qui la défendraient contre les voleurs. Ainsi sont nés les gentilshommes (BERNANOS, Dialog. Carm., 1948, 3e tabl., 6, p. 1622).
Au plur. Nos premiers pères. Nos premiers parents, Adam et Ève. Qu'il devait être autre, le dais nuptial de nos premiers pères, d'Adam et Ève! Toute cette voûte flambait neuf! Les étoiles étaient toutes jeunes. L'azur ressemblait à des yeux bleus de quinze ans (GONCOURT, Journal, 1862, p. 1095).
Celui qui est le fondateur d'une famille spirituelle. Le père des croyants, le père des fidèles :Abraham. Il [Bossuet] s'arrête sur Abraham et sur cette alliance mystique de l'Éternel avec le patriarche, père et tige de tous les croyants (SAINTE-BEUVE, Nouv. lundis, t. 9, 1864, p. 225).
) Au pluriel. Ancêtres, aïeux; les générations antérieures, plus ou moins éloignées dans le temps, suivant une filiation directe ou non. Du temps de nos pères. C'est un homme aimable, ce que nos pères appelaient l'honnête homme (PROUST, Guermantes 2, 1921, p. 418). Chacune de nos patries défend la terre des pères et le bien des pères en employant des moyens qui nous sont dictés par la technique et par l'industrie du XXe siècle (PERROUX, Écon. XXe s., 1964, p. 190) :
2. Il est plaisant que la noblesse ait accaparé ce mot [pères] à son profit, comme si l'artisan et le paysan n'avaient pas une lignée de pères derrière eux, comme si on ne pouvait porter le titre sacré de père à moins d'avoir un blason, comme si enfin les pères légitimes se trouvaient moins rares dans une classe que dans l'autre.
SAND, Hist. vie, t. 1, 1855, p. 23.
2. [Dans l'ordre mystique]
a) THÉOL. CHRÉT. Le Père. Dieu ,,de qui toute paternité au ciel et sur la terre, tire son nom`` (Saint Paul, Épître aux Éph., 3, 15).
) [Vis à vis du Fils] Première personne de la Sainte Trinité (v. dieu 1re section I B 2 a en partic.). Dieu le Père, Dieu Père, le Fils du Père égal au Père, consubstantialité du Père et du Fils. C'est lui [Jésus-Christ] qui nous a fait connaître et aimer le Père, qui nous a révélé son amour. Il l'a nommé le Père Céleste. En lui, Dieu est venu à nous. En lui, le Fils, le Verbe s'est incarné; il s'est nommé le Sauveur, le Fils de l'homme. Par lui, le Saint-Esprit nous a été donné; il l'a nommé le Consolateur (DUPANLOUP, Journal, 1863, p. 241). Le Père communique au Fils l'existence en même temps qu'il lui communique sa nature, et cependant le Fils est Dieu. Car le Fils, à l'inverse de la créature qui est tirée du néant, est engendré de la substance du Père (Théol. cath. t. 4, 1 1920, p. 1236) :
3. Voici l'Épiphanie, voici l'Épiphanie! À genoux, Clarice! Car le voici, Lui, Lui Père dans les cieux sans fin, Fils sur la terre bornée, Esprit de Vérité, amour du Père au Fils, amour du Fils au Père, amour de l'Amour!
MILOSZ, Amour. init., 1910, p. 89.
Au nom du Père, du Fils et du Saint-Esprit. V. fils I A 1 c .
) [Vis à vis des créatures] Dieu créateur et souverain maître, associant le chrétien à la filiation divine par l'intermédiaire du Fils. Notre Père. Lorsque nous prions, nous prions Notre Père, parce qu'il est vrai que nous sommes les enfants du même Père... Ô joie, ô grandeur infinie!... Dieu tout-puissant, Dieu saint, Dieu juste, — mais il est aussi le Père, il est Notre Père, il est le Père qui nous aime, qui a confiance en nous, qui nous veut libres et joyeux (PSICHARI, Voy. centur., 1914, p. 227). Jésus a apporté au monde la certitude que Dieu était vraiment père pour les hommes, et que les hommes pouvaient devenir réellement ses fils. Par conséquent, de même que, dans l'ordre de la nature, les mots père et fils signifient l'amour le plus fort et le plus intime avec réciprocité de devoirs et d'obligations, ainsi dans le royaume de Dieu que Jésus venait fonder sur terre, il devait exister entre Dieu et l'humanité des relations d'amour paternel et filial et les membres de ce royaume avaient la puissance de devenir fils de Dieu (Théol. cath. t. 4, 1 1920p. 1017) :
4. Il me semble pourtant que la Pentecôte est une fête inconnue, la fête de ceux que tourmente le désir d'adorer en esprit et en vérité, et qui sont restés sur leur faim, et qui savent que ce vocable « Dieu » qui s'applique aussi bien à Jupiter qu'à Osiris et qu'au « Bon Dieu » de M. le curé, n'est pas le vrai nom de leur amour. Son nom est Amour simplement, ou Père, et c'est sa fête aujourd'hui.
MAURIAC, Nouv. Bloc-Notes, 1961, p. 341.
(Un, le) Notre Père. Prière enseignée par Jésus comme la prière par excellence (v. Matth. VI, 9-13). Synon. pater, oraison dominicale. D'un autre ton, impersonnel, presque hâtif, il ajoutait : — « Vous direz un Notre Père pour votre pénitence. » (MARTIN DU G., In memor., 1921, p. 567). — Combien de temps? Une heure ou deux minutes. — Sais pas. Le temps d'un Pater. — D'un Pater? Tâche de t'exprimer en français. — Il veut dire d'un Notre Père (BERNANOS, Crime, 1935, p. 778).
b) [Dans le lang. biblique] Le père du mensonge, le père du mal. Le diable, le démon. Au sens mystique, le diable est le serpent de la genèse; il règne sur la terre. L'iniquité le presse sur la terre (...). Il a été menteur dès le commencement et père du mensonge. Il est le prince de l'air, où il habite, car il n'habite pas dans le ciel (Théol. cath. t. 4, 1 1920p. 366). M. Godeau ne savait à quels abîmes pouvaient aboutir encore ces chemins hérissés d'arbres inconnus où son esprit s'aventurait conduit par le père du mal (JOUHANDEAU, M. Godeau, 1926, p. 261).
c) [Dans les relig. antiques et les myth. ou p. réf. à elles; gén. suivi d'un compl.] Dieu créateur; source, principe de la création, de la vie ou de certains éléments de la vie. Ce Dieu [de Platon] est le père du monde (COUSIN, Hist. philos. mod., t. 2, 1846, p. 110). Chez lui c'était donc un culte du divin soleil, le père de notre monde, le créateur et le régulateur, qui, après avoir tiré les êtres du limon, les a réchauffés, les a fait se développer et s'épandre; les a nourris des fruits de la terre (ZOLA, Travail, t. 2, 1901, p. 298). V. aussi dieu ex. 32 :
5. La sainte eau du Nil, conservée dans la cruche sacrée, était aussi à la fête d'Isis le plus vivant symbole du père des vivants et des morts. Isis ne pouvait être honorée sans Osiris. — Le fidèle croyait même à la présence réelle d'Osiris dans l'eau du Nil...
NERVAL, Filles feu, Isis, 1854, p. 652.
Le père des eaux. Le Nil. Hôpi-Mou, le Père des eaux, recouvre régulièrement de sa vase féconde tes domaines (GAUTIER, Rom. momie, 1858, p. 202). Une eau nauséabonde — c'était pourtant de l'eau du Nil, le Père des eaux — qui gargouillait dans les tuyaux (CENDRARS, Bourlinguer, 1948, p. 198).
P. métaph. Tout s'éclaire, s'illumine. La face rayonnante du père des saisons paraît enfin, comme du fond d'une vaste fournaise, entre deux promontoirs embrâsés (DUSAULX, Voy. Barège, t. 1, 1796, p. 338). Les sons nombreux des syllabes antiques, Où règnent tour à tour le père des chansons, Phoebus, et le grand Pan, le seigneur des moissons (BAUDEL., Fl. du Mal, 1857, p. 22).
3. P. anal. ou au fig.
a) [Désigne une pers.]
) Celui qui fait naître à tel type de vie morale, intellectuelle ou spirituelle; celui qui est le fondateur d'une lignée, dans un certain genre de vie ou d'activité. J'ai dit que M. Vinet était éloquent : écoutons-le sur Rotrou, sur ce poëte généreux que Corneille, modeste cette fois, appelait son père en matière de théâtre (SAINTE-BEUVE, Nouv. lundis, t. 7, 1864, p. 214). On pense au premier inventeur, père des artistes, qui tâcha de donner à des choses durables la forme de ce qu'il voyait et l'âme de ce qu'il ressentait (BARBUSSE, Feu, 1916, p. 48) :
6. Pour moi, le mot patron veut toujours dire modèle et surtout père, c'est-à-dire celui qui protège et même celui qui engendre.
DUHAMEL, Maîtres, 1937, p. 32.
Père spirituel. Celui qui assure la formation, le développement spirituel (d'une personne ou d'un ensemble de personnes). Il viendra peut-être un temps où l'on trouvera que c'étoit pour-tant une grande idée, une magnifique institution que celle de ce père spirituel, placé au milieu des peuples, pour unir ensemble les diverses parties de la chrétienté. Quel beau rôle que celui d'un pape vraiment animé de l'esprit apostolique! (CHATEAUBR., Génie, t. 2, 1803, p. 537). Un pronostic (...) vient de la personne même de ses fondateurs [de Port-Royal], de ses parents spirituels, Eudes de Sully et Mathilde de Garlande. Il appartient aux pères spirituels, comme aux pères selon la chair, de léguer par leurs vertus une longue bénédiction à leurs enfants (SAINTE-BEUVE, Port-Royal, t. 1, 1840, p. 43).
En partic. Directeur de conscience, confesseur. Enfin, Monsieur le curé, je vous le demande : êtes-vous, oui ou non, le père spirituel de ma fille? Et si vous l'êtes, n'est-ce pas votre devoir d'intervenir? (MAURIAC, Asmodée, 1938, IV, 6, p. 155).
) Celui qui est le créateur d'une œuvre, l'auteur d'une découverte, l'inventeur ou l'inspirateur d'une doctrine, d'un système, d'une technique, etc. Avec une grâce tout à fait aristocratique, le père de Candide s'avança vers l'auteur des Confessions (COPPÉE, Bonne souffr., 1898, p. 123). C'est à un ingénieur français, Charles Tellier (1828-1913), justement surnommé le « père du froid », que nous devons l'emploi du froid artificiel pour la conservation des aliments (BRUNERIE, Industr. alim., 1949, p. 92) :
7. Dans le même temps, une étonnante production philosophique et musicale naît du sein de l'Allemagne. Ceux qui seront les pères profonds de la pensée du siècle XIXe, Kant, Fichte, Hegel, et ceux qui seront les pères sublimes de la musique, vivent et travaillent non loin de Goethe.
VALÉRY, Variété IV, 1938, p. 103.
b) [Désigne une chose] Ce dont est issu quelque chose; cause, source, principe. Des gens dont la vie tout entière s'emploie à des choses louables, et de qui l'existence est fondée sur le travail, père des bonnes mœurs, la foi dans les contrats, la confiance publique, l'observation des lois (COURIER, Pamphlets pol., Au réd. « Censeur », 1820, p. 31). Parfois on est las de l'art et de la littérature, dégoûté des chefs-d'œuvre, car les chefs-d'œuvre sont les pères des rengaines et des livres méprisables (LEMAITRE, Contemp., 1885, p. 333). Tel fut ce fameux calendrier égyptien, issu du calendrier chaldéen, père du calendrier romain de Jules César, et qui contient déjà la charpente astronomique de notre propre calendrier, moins la semaine (CHAUVE-BERTRAND, Question calendrier, 1920, p. 38).
TECHNOL. ,,Empreinte négative d'un disque original, obtenue par galvanoplastie`` (PIR. 1964). Le flan, ainsi argenté, est plongé dans un bain électrolytique qui dépose à sa surface une mince feuille de cuivre. On la décolle prudemment et c'est ce qu'on appelle : le père, qui est en relief. On pourrait se servir du père comme de moule pour presser les disques, mais on ne s'arrête pas à ce stade. Le « père » est considéré comme l'original du disque et c'est lui qu'on garde dans les archives des maisons d'édition. À partir du « père », on tire, toujours par galvanoplastie, une nouvelle épreuve, en creux, cette fois : la mère, en nickel à la surface (Disque Fr., 1963, p. 8).
B.— P. anal. Celui qui joue le rôle d'un père ou un rôle comparable à celui d'un père; celui qui a le comportement, les attributions, les responsabilités d'un père. Être un père pour qqn. [Un bon soldat] a (...) éprouvé qu'en gardant toujours la politesse, on se fait écouter du colonel qui est le père de ses hommes, qui les comprend, et qui est juste (ALAIN, Propos, 1921, p. 329). L'ambassadeur, comme autrefois, reste « le père de la colonie », qui, « rassemblée autour de lui à l'occasion du nouvel an (ou de la fête nationale), le prie de transmettre ses vœux » au ministre et au chef de l'État (CHAZELLE, Diplom., 1962, p. 42). V. aussi maître I A 3 ex. de Mounier et colonel A.
1. Spécialement
a) DROIT
Père adoptif. Celui qui est uni à un enfant par les liens de l'adoption. Au XVIe siècle, elle [la parenté adoptive] ne donnait plus droit à la succession ab intestat du père adoptif. Notre code a rétabli ce droit; mais la parenté à laquelle donne lieu l'adoption ne s'étend pas au delà de l'adoptant et de l'adopté (DURKHEIM, Divis. trav., 1893, p. 186). V. aussi adoptif ex. 4.
Père légal. Celui qui est reconnu par la loi comme le père d'un enfant, qu'il soit ou non le père réel. Les femmes-peintres de la Rotonde qui devaient épouser un baron balte pour assurer un père légal à leur enfant (GIRAUDOUX, Siegfried et Lim., 1922, p. 26). La qualité officielle de « père » des enfants est établie par un rituel. Après entente, l'un des maris célèbre ce rituel et devient le père légal de tous les enfants de la femme jusqu'au jour où un autre homme accomplira la même cérémonie (LOWIE, Anthropol. cult., trad. par E. Métraux, 1936, p. 270).
Père putatif. Celui qui est réputé légalement le père d'un enfant qu'il n'a pas engendré. Lorsque, de Trézène où j'avais vécu jusqu'alors, je dus rejoindre mon père putatif en Athènes, je ne voulus point écouter les conseils, pour sages qu'ils fussent, de m'embarquer (GIDE, Thésée, 1946, p. 1418).
b) Père nourricier
Vx. ,,Mari de la nourrice d'un enfant`` (Ac. 1798-1878).
♦ Celui qui élève un enfant, subvient à ses besoins. Et le voyage de Pâques, chaque année. Quels soins de l'enfant Jésus le long du chemin. Puis, lorsqu'il eut grandi, quel soin ne prit-il pas de Marie et de son père nourricier? (DUPANLOUP, Journal, 1855, p. 179). Je voudrais savoir chez qui elle est, pour l'aller voir de temps en temps, qu'elle sache que son bon père nourricier est là, qu'il veille sur elle (HUGO, Misér., t. 1, 1862, p. 504).
Au fig. V. nourricier I B.
c) THÉÂTRE. Père noble. Rôle du père dans la tragédie et la haute comédie. Jouer les pères nobles. Sans jouer une fois la comédie, le pauvre homme avait glissé des jeunes premiers, aux grands premiers rôles, puis aux financiers, puis aux pères nobles, puis aux ganaches (A. DAUDET, Fromont jeune, 1874, p. 24). Voici quels étaient les emplois pour la tragédie : pères nobles, premiers rôles, jeunes premiers, deuxièmes rôles, rois, troisièmes rôles, grands confidents, confidents, utilités, accessoires (Arts et litt., 1936, p. 64-11).
P. anal. Personnage grandiloquent et solennel. L'agressivité latente que suscite le professeur traditionnel, père noble et lointain (ANTOINE, PASSERON, Réforme Univ., 1966, p. 212).
d) CIRQUE. Père d'élève. ,,Professeur qui initie un enfant à la voltige, l'équilibrisme, l'art du funambule, etc.`` (RIV.-CAR. 1969). Un saut de cette espèce, s'il est manqué, peut être mortel. Les banquistes d'antan s'y entraînaient dès leur plus jeune âge et très progressivement sous la direction de leurs parents, de leurs aînés, ou de leur « père d'élève » (terme de métier par lequel on désigne un artiste qui enseigne le métier à un plus jeune) (Hist. spect., 1965, p. 1531).
e) [Dans le lang. du compagnonnage] Hôte qui loge et nourrit des compagnons. [Cet arrêt du Parlement du 7 septembre 1778 sur les associations ouvrières] enjoint à tous ceux qui logent au mois ou à la nuit et sont connus sous le nom de Pères ou de Mères de déclarer les noms de leurs locataires (MARTIN SAINT-LÉON, Compagn., 1901, p. 47).
f) PSYCHANAL. Quand on songe au nom de « père » que les psychanalysés donnent sérieusement ou ironiquement à leur analyste, il semble bien que le tabou de l'inceste a inspiré quelque peu la codification du transfert (CHOISY, Psychanal., 1950, p. 188).
2. [Comme qualification élogieuse ou comme surnom honorifique accordé à celui qui agit pour le bien d'une communauté, d'un groupe social, qui a encouragé tel ou tel type d'activité] François Ier a été surnommé le Père des lettres (Ac. 1835-1935). N'est-il pas vrai que si Charles-Quint et Philippe II avaient pu, par un moyen quelconque, forcer l'Espagne à travailler, ils eussent été pour elle de vrais dieux tutélaires, des pères de la patrie? (PROUDHON, Syst. contrad. écon., t. 2, 1846, p. 55). La France brillante et heureuse qui pleura le « père du peuple » [Louis XII] oublia de se dire ce qu'elle doit se dire toujours : « Souviens-toi que tu peux être envahie. » (BAINVILLE, Hist. Fr., t. 1, 1924, p. 142). V. peuple B 2 b :
8. Les curateurs populaires doivent remplir le rôle dont chacun prend le masque, celui de pères du peuple. Or quel est le devoir d'un père? C'est de procurer à ses enfants l'entretien, l'éducation, la dotation, jusqu'à ce qu'ils puissent d'eux-mêmes se soutenir. Par analogie, les pères collectifs ou curateurs populaires doivent procurer à la classe pauvre, qui ne peut ni tenir ménage ni se soutenir par elle-même, une ferme d'asile dans les campagnes, un ménage d'asile dans les villes.
FOURIER, Nouv. monde industr., 1830, p. 61.
Spécialement
HIST. ROMAINE. Père de la patrie. Titre honorifique décerné sous la République à des citoyens, à la suite de services éminents rendus à l'État, et porté ensuite par Auguste et de nombreux empereurs (d'apr. PELL. 1972).
♦ [En Russie et en U.R.S.S.] L'autorité et l'âge ont été autrefois inséparables, et l'on en trouve la preuve dans le langage [russe] (...) aujourd'hui même, un paysan sexagénaire, en parlant à son seigneur âgé de vingt ans, le traitera de petit père (MÉRIMÉE, Ét. litt. russe, t. 2, 1870, p. 218).
En partic. Le Petit Père. Le chef suprême de l'État (notamment Staline). Il me répondit qu'il allait se faire traîner bien tranquillement dans tous les quartiers de la ville pour montrer aux Moscovites qu'on n'intimide pas facilement un gouverneur nommé selon la loi par le Petit Père (G. LEROUX, Roul. tsar, 1912, p. 16). Staline arpentait la pièce sans mot dire, comme s'il avait complètement oublié la présence d'Abakoumov (...). Quand Abakoumov le vit passer devant lui de profil, il constata que les épaules du Patron commençaient à se voûter, ce qui le faisait paraître moins grand, petit même. Et Abakoumov se dit en lui-même (...) que le Petit Père ne vivrait pas dix ans de plus, qu'il allait mourir. Pour Abakoumov, le plus tôt serait le mieux (SOLJENITSYNE, Le Premier cercle, trad. par H.-G. Kybarthi, 1975, p. 114).
II.— [Comme titre de respect ou comme appellation fam.]
A.— [Comme titre de respect]
1. HIST. ROMAINE. Les Pères conscrits ou, absol., les Pères. Les sénateurs romains. Eudore s'incline devant Auguste et César (...), il parle en ces mots : « Auguste, César, pères conscrits, peuple romain, au nom de ces hommes victimes d'une haine injuste, moi, Eudore, fils de Lasthénès, natif de Mégalopolis en Arcadie, et chrétien, salut! (...) » (CHATEAUBR., Martyrs, t. 3, 1810, p. 18). Ma photographie (...) où je suis représenté le menton bien rasé (...) « l'air d'un père conscrit sur sa chaise curule! » comme disait notre doyen, M. Chalmette (A. DAUDET, Nabab, 1877, p. 56).
P. plaisant. ou péj. Sénateurs ou notables d'un pays, d'une ville. Rabaut de Saint-Étienne, faux patriote, l'un des coopérateurs des plus funestes décrets des pères conscrits constituants (MARAT, Pamphlets, Aux amis de la Patrie, 1792, p. 310). Les pères conscrits du conseil général ont émis un vœu de pure galanterie (FEUILLET, Pte ctesse, 1856, p. 4).
P. métaph. [L'Italie] a autour d'elle ses poëtes (...) ses philosophes (...) tous ces pères conscrits de l'intelligence universelle (HUGO, Actes et par., 2, 1875, p. 50).
2. RELIG. [P. réf. à l'idée de fécondité et d'autorité spirituelles, parfois aussi d'ancienneté]
a) HIST. ECCL.
) Les Pères de l'Église ou, absol., les Pères. Théologiens des premiers siècles (du Ier au VIe), pour la plupart canonisés, remarquables par la valeur de leur doctrine et la sainteté de leur vie, et reconnus par l'Église comme des témoins d'une autorité exceptionnelle. Les Pères de l'Église grecque, de l'Église latine; les Pères orientaux ou pères syriaques. L'Écriture et les Pères demeurent ensevelis dans leur poussière. La fable, la spéculation audacieuse, s'insinuent jusque dans la chaire sacrée (OZANAM, Philos. Dante, 1838, p. 114). Une doctrine traditionnelle, esquissée jadis par Origène, plaçant dans l'invocation de la Trinité la puissance purificatrice du baptême, accentuée par les Pères grecs et latins du IVe siècle, notamment Basile et Grégoire de Nazianze (Théol. cath. t. 14, 1 1939, p. 522).
P. anal. Écrivain chrétien ou considéré comme tel, d'une autorité reconnue ou d'un grand renom. À l'apparition de ce livre [le Génie du Christianisme], on était si ignorant en France de tout ce qui constitue la religion catholique, ou même chrétienne, on avait tellement oublié ce que sont ses dogmes, sa discipline, et ses pratiques, que, loin de s'apercevoir de la teinte d'hérésie qui couvre tout cet ouvrage, on vit dans son auteur un nouveau père de l'Église, un confesseur de la foi, un véritable chrétien (DELÉCLUZE, Journal, 1827, p. 370). Bossuet, dans la sphère supérieure de l'épiscopat, demeurait l'oracle, le docteur, un Père moderne de l'Église, le grand orateur qui intervenait aux heures funèbres et majestueuses (SAINTE-BEUVE, Caus. lundi, t. 10, 1854, p. 209).
) Les Pères du désert. Anciens anachorètes d'Égypte, de Syrie, de Palestine (considérés comme des maîtres de vie spirituelle). Dès notre plus jeune âge, nous avons été bronzés, trempés dans les eaux du Styx et rendus tous aussi incapables de subir les séductions de l'amour que les plus rigides parmi les pères du désert. Le diable qui tenta saint Antoine perdrait avec nous son latin, son grec et même son hébreu (GOBINEAU, Pléiades, 1874, p. 81).
b) [Pour désigner certains membres du clergé]
) Les Pères du concile. ,,Membres de droit d'un concile œcuménique; évêques, supérieurs d'Ordres religieux`` (Foi t. 1 1968). [Le duc de Bourgogne] avait, le 26 août précédent, envoyé de nouveaux ambassadeurs aux pères du concile de Constance (BARANTE, Hist. ducs Bourg., t. 4, 1821-24, p. 148). Les termes de force, vertu choisis par les Pères de Trente s'entendent tout naturellement d'une réalité physique; la causalité morale serait mieux désignée par les mots :valeur, dignité, excellence, que le concile a cependant écartés (Théol. cath. t. 14, 1 1939, p. 619).
) [Appellation donnée à certains prêtres, princ. dans le clergé régulier] Pères dominicains, pères jésuites; les pères de la Trappe. J'étais alors en quatrième chez les petits. Nous avions pour régents deux hommes auxquels nous donnions par tradition le nom de Pères, quoiqu'ils fussent séculiers. De mon temps, il n'existait plus à Vendôme que trois véritables oratoriens auxquels ce titre appartînt légitimement (BALZAC, L. Lambert, 1832, p. 33). Quand le Père supérieur proclamait les notes et les places, Édouard, s'il se jugeait mal loti, trépignait, en proie à la rage. Les autres classes entendaient ses hurlements. Il fallait que deux jésuites le prissent aux bras et aux jambes, l'emmenassent au dehors (ADAM, Enf. Aust., 1902, p. 183).
[Suivi d'un nom propre] Le père, le révérend père Untel (en abr. P. au sing., PP. au plur., R.P. Révérend père). Le Père Lathuile suinta lentement. On le sentit venir avant de le voir; et on le vit peu à peu (...). Son costume était celui d'un moine, mais de quel ordre? On hésitait à le dire. Dominicain? Franciscain? Oratorien? (ROMAINS, Copains, 1913, p. 221). Vers 1635, les savants français prirent l'habitude de se réunir à titre privé comme l'avaient fait les créateurs de l'Académie française; leur animateur était le Père Mersenne et les réunions se tenaient souvent chez lui au couvent des Minimes de la place Royale (Encyclop. éduc., 1960, p. 244).
[Comme appellatif] Père, Mon père, Révérend père. Mon Père, dit-il [à un barnabite], si vous ne jugez pas cette occupation indigne du sacré caractère dont vous êtes revêtu, aidez-moi, je vous prie, à fabriquer des pantins (A. FRANCE, Dieux ont soif, 1912, p. 180).
♦ [À l'époque mod., pour s'adresser à un membre du clergé séculier] Quant à « Mon père » ou plus familièrement « Père », il a tendance à se généraliser depuis quelques années pour le clergé séculier; certains jeunes évêques lui manifestent leur préférence (Le Monde ds COLIN 1971).
♦ [En s'adressant à son confesseur, prêtre régulier ou séculier] — Mon père, aidez-moi. Voici bien longtemps que je ne me suis confessé (...). Il [le prêtre] soupire et dit : — C'est bien. Répétez avec moi : « Mon père, bénissez-moi parce que j'ai péché. » (DUHAMEL, Journal Salav., 1927, p. 155).
Père abbé. Supérieur d'un monastère, d'une communauté. Il a eu l'idée de se faire bénédictin, mais le Révérendissime Père Abbé de l'abbaye de Sainte-Madeleine-des-Sables le juge incapable, en raison de son âge, de s'adapter à l'austère discipline de ce couvent (BILLY, Introïbo, 1939, p. 222). V. aussi abbé ex. 9.
Pères blancs. Prêtres séculiers d'une congrégation missionnaire fondée en 1868 par le cardinal Lavigerie pour évangéliser l'Afrique. Enveloppé dans son immense burnous blanc, coiffé de la chéchia droite des spahis, avec, au cou, un grand chapelet à gros grains alternés, noirs et blancs, terminé par une croix de même, il réalisait le type parfait des Pères blancs du cardinal Lavigerie (BENOIT, Atlant., 1919, p. 62).
Père procureur.
Père temporel. [Dans les ordres mendiants] Séculier qui reçoit les aumônes. Un tel était le père temporel des capucins de cette ville (Ac. 1798-1935).
) [Pour désigner le pape] Le Saint-Père, notre Saint-Père, notre très Saint-Père, le Père des fidèles. Il était député de l'Université de Paris qui reconnaissait le pape du Concile, Félix, pour le vrai père des fidèles (A. FRANCE, J. d'Arc, t. 2, 1908, p. 440). Le Saint-Père m'offre le chapeau rouge. Dieu veut que je l'accepte et je l'accepte (SALACROU, Terre ronde, 1938, II, 2, p. 193).
) P. anal. [Chez les saint-simoniens] Les pères. Ceux qui ont les plus hauts grades. Je devais croire que les gros bonnets du saint-simonisme, ceux qu'on nommait les pères, seraient flattés d'ouvrir leurs rangs à un homme aussi littéraire que je l'étais. J'avais compté, monsieur, sans l'économie politique et la philosophie transcendante (REYBAUD, J. Paturot, 1842, p. 11).
Le Père. Chef suprême, grand prêtre de la religion saint-simonienne. Cette harmonie se réalisera, non par la théocratie, non par la suppression des individus, non par ce père-roi des saint-simoniens qui réglait la croyance comme tout le reste, mais par l'aspiration commune et libre, comme cela a lieu pour les élus dans le ciel (RENAN, Avenir sc., 1890, p. 409).
B.— [Comme appellation fam.]
1. [Suivi d'un nom propre]
a) [Pour désigner un homme d'âge mûr et de condition modeste] Il aperçut (...) son garde champêtre, le père Hochedur, debout et surveillant d'un air sévère un couple de bourgeois mûrs (MAUPASS., Contes et nouv., t. 1, Bois, 1886, p. 553). Je savais très bien qui on appelait « père untel » dans ma famille : les jardiniers, les facteurs, le père de la bonne, bref les vieux pauvres (SARTRE, Mots, 1964, p. 63) :
9. Énumérons maintenant nos serfs. D'abord le père [it. ds le texte] Perrault. (Le titre de père, en Craonnais, est obligatoirement accolé au nom des hommes, même célibataires, qui ont dépassé la quarantaine et n'ont pas droit, de naissance, à s'entendre appeler « monsieur » (...)).
H. BAZIN, Vipère, 1948, p. 43.
[En appellatif] C'est tout à fait une bonne petite femme de ménage; elle fera la satisfaction de vos vieux jours, père Christel. — Dieu le veuille, monsieur Kobus, Dieu le veuille, pour son bonheur et pour le nôtre! (ERCKM.-CHATR., Ami Fritz, 1864, p. 54).
b) [Pour désigner familièrement ou avec une désinvolture affectée un homme jouissant d'une certaine considération, de quelque notoriété, voire d'une grande célébrité] Le père Bugeaud. L'inauguration d'une statue du petit père Combes devait avoir lieu à Pons (L. DAUDET, Brév. journ., 1936, p. 61). Le commandant (...) fit rassembler tout le monde en cercle autour de lui, et, le képi rejeté en arrière (...), se réclama fougueusement du nom du « père de Gaulle » (AMBRIÈRE, Gdes vac., 1946, p. 374) :
10. La sottise du père Hugo me fait assez de peine sans qu'on l'insulte dans son génie. Quand nos maîtres s'avilissent, il faut faire comme les enfants de Noé, voiler leur turpitude. Gardons au moins le respect de ce qui fut grand. N'ajoutons pas à nos ruines.
FLAUB., Corresp., 1871, p. 244.
c) Locutions
Père Fouettard. Père Noël. V. noël A 2.
(Un) père Duchesne. [P. réf. aux pamphlets révolutionnaires, notamment ceux d'Hébert, et au personnage pop. ayant donné son nom à ces pamphlets] Braillard démagogue et vulgaire. Regarde les batailles qui se livrent sur le dos de Beethoven. Les uns font de lui un Jacobin, les autres un calotin, ceux-là un père Duchesne, ceux-ci un valet de prince (ROLLAND, J.-Chr., Amies, 1910, p. 1097).
Argot
Arg. des voleurs. Coup du père François. Type d'agression où l'un des attaquants serre une courroie autour du cou de la victime et la maintient sur son dos tandis que son complice la fouille. Faire le coup du père François, p. ell., la faire au père François. D'étranges jeunes garçons, mal venus, aux gestes imprévus et rapides, simulaient entre eux des attaques de savate, des gestes d'étrangleurs et le coup du père François (BARRÈS, Sang, 1893, p. 113).
Arg. milit. Le père Cent. Le centième jour avant la libération. Casser la gueule au père Cent. ,,L'arroser par des libations`` (RIV.-CAR. 1969). V. cent I C ex. de Dorgelès.
[Dans l'arg. de Saint-Cyr] Père Système. Celui qui est incorporé le premier, c'est-à-dire celui qui a le numéro matricule le plus bas d'une promotion. Le premier élève qui fut immatriculé à Saint-Cyr et que nous pouvons à juste titre dénommer le Doyen des Pères Systèmes, ou encore le Père Système général ([SAINT-CYR], Centenaire St-Cyr, 1908, p. 9).
2. [Constr. avec un adj. ou un groupe nom. à valeur caractérisante]
a) Locutions
Pop. Un gros père. Gros homme à l'allure bonasse et placide; enfant robuste et dodu. Synon. bonhomme, pépère. Pierrot se joignit à un groupe de commentateurs parmi lesquels il reconnut quelques philosophes. Un gros père disait à un petit vieux : — C'est une véritable catastrophe! (QUENEAU, Pierrot, 1942, p. 136).
♦ [Comme appellatif avec une nuance de condescendance ou d'affection] (Mon) petit père, (mon) gros père. Mon gros père, que penses-tu de ce Brésilien? (BALZAC, Cous. Bette, 1846, p. 188). Oh! mais, tu m'as pas regardée, mon petit père!... je suis habituée à ce qu'on ait des égards avec les femmes!... (FEYDEAU, Dame Maxim's, 1914, I, 6, p. 10).
Père tranquille. Homme qui aime la tranquillité, ne se fait pas de soucis. Il (...) met sur les dents hommes et bêtes. Je crois même qu'à trop bien surveiller et dépister l'ennemi, il a dérangé les plans de nos généraux, deux pères tranquilles qui n'aiment pas se lever matin (A. DAUDET, Pte paroisse, 1895, p. 177).
Père douillet (vieilli). ,,Homme qui se plaint dès qu'il n'a pas toutes ses aises`` (Ac. 1835, 1878).
Loc. adv. En père peinard, pénard. Tranquillement; sans s'en faire, sans se presser. On les attend [les Allemands] en pères peinards, avec le sourire (GENEVOIX, Nuits de guerre, 1917, p. 74). [Un bateau] naviguait en Pèr' Pénard Sur la grand-mare des canards Et s'appelait Les Copains d'abord Les Copains d'abord (BRASSENS, Les Copains d'abord ds A. BONNAFÉ, G. Brassens, 1963, p. 174).
Père aux écus. Homme riche, souvent avare. Eh oui, vous êtes le père aux écus. M. Rabourdin, l'ancien drapier de la place du Marché (...) diantre! il a dû se retirer avec dix mille francs de rentes (ZOLA, Hérit. Rabourdin, 1874, I, 1, p. 138).
Père la joie. ,,Rieur, homme qui excite les autres à la gaieté`` (Ac. 1798-1935).
Père la pudeur, père(-)la(-)vertu. Homme pudibond, volontiers moralisateur. Le père la Pudeur appartient généralement à l'une des nombreuses sectes protestantes où l'on s'effarouche du mot et où l'on se délecte en secret de la chose. C'est un fâcheux hypocrite et grotesque, un empêcheur de danser en rond (FRANCE 1907). Il me déplaît de jouer les pères-la-vertu et je m'en garderai. Mais je pose la question : en quoi l'histoire du sexe de cette dame [du Repos du guerrier] intéresse-t-elle spécialement la nouvelle vague? (MAURIAC, Nouv. Bloc-Notes, 1961, p. 154).
b) [Dans des surnoms] L'auteur [Malherbe] me plaît tant, avec son surnom de Père Luxure; sa vérole dont il était si fier; les mots-massues dont il assommait les petites affectations d'enthousiasme de ses disciples (LARBAUD, Barnabooth, 1913, p. 141). La Chambre debout fit une longue ovation au Père la Victoire [Clemenceau]... Il était bien beau, ce vieil homme transfiguré (BARRÈS, Cahiers, t. 12, 1919, p. 207).
Prononc. et Orth. :[]. Homon. pair, paire, pers, formes de perdre. Ac. 1694 et 1718 : pere; dep. 1740 : père. Étymol. et Hist. I. 1. Fin Xe s. paire « Dieu en tant que Créateur et première personne de la Trinité » (Passion, éd. D'Arco Silvio Avalle, 514 : devant lo paire gloriae); ca 1100 perre « pour s'adresser à Dieu » Deu! perre (Roland, éd. J. Bédier, 2337); 2. début XIIIe s. « celui qui est à l'origine d'une longue suite de descendants » (MAURICE DE SULLY, Homélies, éd. C. A. Robson, n° 17, p. 121 : Adam nostre premier pere); 1535 nos pères « nos ancêtres » (R. OLIVETAN, Bible, Gen. 31, 3); 3. 1er quart XIIIe s. « protecteur, défenseur d'une collectivité » (RECLUS DE MOLLIENS, Charité, 110, 2-3 ds T.-L.); 4. 1519 « celui qui est considéré comme l'initiateur, le créateur, le fondateur de quelque chose » le Père du mensonge (d'apr. FEW t. 6, 1, p. 736a); 1679 le père de la philosophie morale (Boss., Hist., I, 8 ds LITTRÉ); 5. av. 1696 « ce qui est la source, le principe de quelque chose » (LA BRUYÈRE, Les Caractères, De l'Homme, 13 ds Œuvres, éd. G. Servois, t. III, p. 17). II. 1. Ca 1050 « celui qui a engendré plusieurs enfants » (Alexis, éd. Chr. Storey, 9 : Puis ad escole li bons pedre le mist); d'où a) ca 1150 pere et mere (WACE, St Nicolas, éd. E. Ronsjö, 922); b) 1260 de pere a fils (ETIENNE BOILEAU, Métiers, éd. Lespinasse et Bonnardot, titre XLVIII, XXII, p. 91); 1678 de pere en fils (LA FONTAINE, Fables, VII, XVI, 27 ds Œuvres, éd. H. Regnier, II, 187); c) 1283 dr. « ascendant mâle au premier degré » (PHILIPPE DE BEAUMANOIR, Coutumes Beauvaisis, éd. A. Salmon, XVI, 565); d) 1380 peres de maignie « père de famille » (ROQUES t. 2, 8857); ca 1470 pere-famille (G. CHASTELLAIN, Chron., éd. Kervyn de Lettenhove, V, 74); 1487 père de famille (L. GARBIN, Vocabulaire lat. fr.); e) 1505 pere naturel & legitime (Les coustumes ... de la ville de Bourges, Rubriche premiere, article premier ds Nouv. Coutumier génér., éd. Bourdot de Richebourg, III, 905); 2. ca 1120 « celui qui agit en père à l'égard d'un autre » (St Brendan, éd. E. G. R. Waters, 146); 3. ca 1180 « animal par rapport à celui qui l'a engendré » (MARIE DE FRANCE, Fables, 32, 10 ds T.-L.); 1550 en parlant d'un poulain (Journal du Sieur de Gouberville, 24, 5, 55 ds POPPE 1936, p. 143); 4. 1776 père noble (Journal de théâtre, numéro 7, juillet, p. 442). III 1. 1160-74 « titre donné aux membres d'une congrégation » (WACE, Rou, éd. A. J. Holden, III, 705); 1690 père temporel (RICH.); 2. a) ca 1350 « titre donné à des dignitaires de l'Église » le saint pere « le Pape » (GILLES LE MUISIT, Poésies, I, 324 ds T.-L.); 1690 pères d'un concile (FUR.); b) 1614 « écrivains ecclésiastiques dont on veut honorer la prééminence » (Homélie des simonies ds J. P. CAMUS, Homélies des États généraux, Droz, 1970, p. 227, § 100); 2. 1635 « nom donné à un vieillard » (MONET); en partic. 1764 suivi d'un nom propre, sert à désigner un homme d'un certain âge, avec une nuance de bonhomie ou de condescendance donnez, donnez, père Leroux (SEDAINE, Rose et Colas, p. 171); 3. 1669 père de la patrie (RACINE, Britannicus, acte I, sc. I, 47 ds Œuvres, éd. P. Mesnard, II, 258); 4. 1824 fam. mon petit père (BALZAC, Annette, t. 1, p. 39); 1825 gros père (Mme DE GENLIS, Mém., t. II, p. 60 ds POUGENS ds LITTRÉ). Du lat. class. pater « celui qui engendre; fondateur; vieillard », également comme épithète de vénération « divin, auguste », d'où en lat. chrét. a servi à désigner le dieu créateur, et, d'une manière honorifique, les évêques, les pères de l'Église faisant autorité dans les Conciles, les moines (v. BLAISE Lat. chrét.); l'expr. pere-famille (supra II 1 d) est directement calquée sur le lat. pater familias. Fréq. abs. littér. :43 672. Fréq. rel. littér. : XIXe s. : a) 70 280; b) 65 524; XXe s. : a) 66 594, b) 50 596. Bbg. BRÜCH 1913, p. 182. — CAROFIGLIO (V.). Pour une sém. de père et de patrie chez Rousseau et Marat. Mots. 1982, n° 5, pp. 51-66. — COHEN 1946, p. 67. — DAUZAT (A.). Notes étymol. Fr. mod. 1940, t. 8, p. 354. — DUBOIS (J.), IRIGARAY (L.). Les Struct. ling. de la parenté. Cah. Lexicol. 1966, t. 8, p. 50, pp. 52-54. — FRANCKEL (J.-J.). Un Papa, c'est un monsieur qui a des enfants avec la maman. B.U.L.A.G. 1982, n° 9, pp. 5-14. — GAK (V. G.). On the problem of general semantic laws. Linguistics. La Haye, 1976, n° 182, p. 50. — HAGNAUER (R.). L'Expr. écrite et orale. Paris, 1972, p. 264. — HANTRAIS (L.). Le Vocab. de Georges Brassens. 1. Paris, 1976, p. 105. — HASSELROT 1957, p. 295. — KUZNECON (A.M.). On the typology of the semantic field of kinship terms. Linguistics. La Haye, 1974, n° 125, p. 8. — QUEM. DDL t. 18. — SPENCE (N. C. W.), MERK (G.). Encore l'évolution de père, mère et frère. R. Ling. rom. 1984, t. 48, pp. 323-339. — THOMAS (A.). Nouv. Essais, 1904, p. 144.

père [pɛʀ] n. m.
ÉTYM. XIIe; pedre, fin XIe; paire, v. 980; lat. pater, -tris (accusatif patrem) « père; fondateur ».
———
I
1 (V. 1150). Homme qui a engendré, qui a donné naissance à un ou plusieurs enfants. || Devenir père : donner la vie, le jour à un enfant. || La satisfaction d'être père (→ 2. Enceinte, cit. 1). || Futur père : homme dont la femme, la compagne attend un enfant qu'ils ont conçu. || Homme stérile qui ne peut être père. || Il n'est pas le père de ses enfants, il n'est pas leur père naturel (→ ci-dessous, 7.; père putatif, légal).
1 (…) Allons donc, et que les Cieux prospères
Nous donnent des enfants dont nous soyons les pères.
Molière, l'Étourdi, V, 11.
2 Maintenant, s'il y a des pères parmi vous, des pères qui ont pour bonheur de se promener le dimanche en tenant dans leur bonne main robuste la petite main de leur enfant, que chacun de ces pères se figure que cet enfant-là est le sien.
Hugo, les Misérables, V, I, IV.
Un père, le père de quelqu'un. Auteur (des jours), géniteur (vx); et fam. dab, daron, paternel (3.), vieux. || Le père et ses enfants, sa descendance, sa géniture (cit.), sa lignée (cit. 1). Filiation, génération. || Le père et la mère ( Parent, I., 1.). || Le père, la mère et leurs enfants. Famille (cit. 15, 19, 21, 22 et 25). || Père et fils, et fille. Fils (cit. 2, 4 et 5), fille (cit. 6).Relations du père et des enfants (→ Maître, cit. 12; mollesse, cit. 5; morgue, cit. 1). || Autorité (cit. 2 et 16), affection du père. Paternel. || Les devoirs de père (→ Dispenser, cit. 9). || Attachement (cit. 18) d'une fille à son père. || Sentiment des pères pour leurs enfants. || Père affectueux, aimant, compréhensif. || Bon (cit. 45), tendre père.Absolt. || Avoir des qualités de père. || Traiter quelqu'un en père, comme un père ( Paternellement; → Familiarité, cit. 11).Père dur, intolérant, sévère. || Despotisme (cit. 7), tyrannie d'un père (→ Libérer, cit. 3). || L'imprudente (cit. 4) contrainte des pères.Mauvais père, père indigne (cit. 17). Parâtre (2.).Obéir (cit. 1 et 5) à son père. || « Honore ton père et ta mère » (→ Commandement, cit. 7). || Opposition entre père et fils (→ Opposer, cit. 18). || Juger (cit. 9) son père. || Fils qui manque de respect à son père (→ Dénaturer, cit. 10; irrévérence, cit. 2). || Ingratitude (cit. 2) des enfants envers leur père. || Maudire (cit. 1) son père et sa mère. || Meurtre du père. Parricide (au fig., → ci-dessous supra cit. 12).Allus. bibl. || « L'homme quittera son père et sa mère » (→ Attacher, cit. 54). || « Je suis venu mettre la division (cit. 7) entre l'homme et son père ». — ☑ Prov. On ne peut contenter (cit. 3) tout le monde et son père.Tel père, tel fils.À père avare, fils prodigue (→ Dépensier, cit. 1).Allus. littér. || « En cet affront, mon père est l'offensé… » (cit. 27, Corneille). || « Mon père, ce héros au sourire si doux » (→ Hussard, cit. 3, Hugo).
3 Un père en punissant, Madame, est toujours père (…)
Racine, Phèdre, III, 3.
4 Fidèle enfin, au sang qu'ont versé dans ma veine
Mon père vieux soldat, ma mère vendéenne !
Hugo, Feuilles d'automne, I.
5 — Mon père ! — Oui, ton père ! Ah ! je suis un vrai père (…) Que deviendrez-vous donc quand je ne serai plus là ! Les pères devraient vivre autant que leurs enfants (…) Je voudrais prendre vos peines, souffrir pour vous.
Balzac, le Père Goriot, Pl., t. II, p. 1043.
6 (…) Il n'est guère d'homme qui ne possède des enfants ignorés, ces enfants dits de père inconnu, qu'il a faits, comme cet arbre reproduit, presque inconsciemment.
Maupassant, Contes de la Bécasse, « Un fils ».
7 Mon père était tout pour moi, un maître, un roi, un dieu, — un ami, un grand ami.
Bernanos, Journal d'un curé de campagne, p. 152.
Père et mère (de quelqu'un) : les parents. || « Tes père et mère honoreras… » (→ Enfant, cit. 22, Code civil). || « Nos père et mère disparus » (Henriot, Diable à l'hôtel, VI).
8 Ah ! ces grands chevaux de filles qui courent les chemins seules (…) mènent leur voiture, fument du gros tabac et engueulent père et mère (…)
Colette, la Naissance du jour, p. 127.
Loc. Comme père et mère : comme le feraient les parents. Par plais. || Il le soigne comme père et maire (Balzac, → Papelarder, cit.).
Tradition transmise de père en fils (→ Armature, cit. 4). || Magistrats (cit. 5) de père en fils (→ Là, cit. 51).
(Noms donnés au père, en parlant de lui). || Mon père, votre père. || Le roi mon père (→ Appeler, cit. 15). || Monsieur votre père (→ Malgracieux, cit. 2). || Comment va Monsieur votre père ? Par plais. || Monsieur mon père m'a encore engueulé. || Père (mon, notre père) n'était qu'un bourgeois (cit. 6). || Le père : mon père, notre père (se dit à la campagne).Pour distinguer le père de ses fils. || Monsieur Daru le père (→ Imputer, cit. 20). || Alexandre Dumas père. || Monsieur Léniot père (→ Notabilité, cit. 2). || Un tel père et fils (dans un nom commercial).
(Appellatif). || Bonjour, père ! Papa (cit. 1). || Père, mon (cit. 18) père.
9 — Dis donc, père, (elle appelait son mari « père » dans la maison, et quelquefois « Monsieur Roland » devant les étrangers […])
Maupassant, Pierre et Jean, I.
Dr. et cour. Ascendant mâle au premier degré. Famille (I., 2.); parent (I., 2.); parenté (1.). || Le père du père ou de la mère ( Grand-père), de la femme ( Beau-père). || Parents du côté du père, par le père. Agnat, consanguin. || Garçons issus du même père. Frère (cit. 1). || Qualité de père. Paternité. || Droits du père (et de la mère). Paternel (puissance paternelle). → Administrateur, cit. 1; aliment, cit. 3; contribuer, cit. 4; enfant, cit. 22; jouissance, cit. 8; maison, cit. 15 (Code civil). || Consentement des père et mère (→ Dissentiment, cit. 3).Transmission des biens du père aux enfants. Patrimoine (1.); héritage (→ 2. Avoir, cit. 3; héritier, cit. 19 et 21).
10 (…) le fait connu est l'état de mariage dans lequel a vécu la mère de l'enfant, le fait inconnu est la paternité. Qui est le père de son enfant ? La loi présume que c'est le mari. Elle y est autorisée parce que les enfants qui naissent pendant le mariage ont d'ordinaire pour père le mari de leur mère. Sans doute la mère a pu être une épouse infidèle, mais la loi doit prendre comme règle le fait ordinaire (…) De là cette règle : « L'enfant conçu pendant le mariage a pour père le mari » (→ Désavouer, cit. 4), ou suivant la forme latine : « Pater is est quem nuptiæ demonstrant ».
M. Planiol, Traité élémentaire de droit civil, t. I, §1411.
Dr. || Père naturel (cit. 9). || Père légal. → ci-dessous 7.
Rôle, autorité, puissance du père dans les différents types de famille; dans la famille (cit. 5) romaine, antique (→ Foyer, cit. 5)… Patriarcal (3.); patriarcat (2.). Cf. le lat. pater familias (où pater ne veut pas dire « géniteur », mais « chef ». Cf. Giffard, Précis de droit romain, §337).
11 Dans le père est le pouvoir, c'est-à-dire la volonté et l'action de produire et de conserver, ou de développer l'intelligence de l'enfant (…) Le père agit pour la conservation, comme pour la production, par le moyen ou le ministère de la mère (…)
De Bonald, Démonstration… du principe de la sociologie, in Bouglé et Raffault.
Psychol. || Importance du père dans le développement psychologique de l'enfant. || Image du père. Imago (II.). || Fixation au père. || Haine du père. || Rivalité sexuelle avec le père. || Le meurtre (symbolique) du père (depuis Freud, Totem et Tabou, 1912). || Le nom du père, correspondant à la fonction symbolique de la paternité (Lacan).
12 Chez le garçon, le complexe d'Œdipe positif consiste dans le fait que, intensifiant son amour pour sa mère, il ressent un conflit entre son amour pour son père (basé sur son identification au père) et sa haine contre le père (basée sur les privilèges paternels qui lui sont refusés).
Daniel Lagache, la Psychanalyse, p. 30.
2 Père de famille : homme marié ou veuf qui a un, ou (plus souvent) plusieurs enfants qu'il élève. Chef (II., 4., chef de famille). → 3. Droit, cit. 18. || Les droits, les devoirs (cit. 22), les responsabilités du père de famille.Loc. Dr. En bon père de famille : d'une manière sage, prudente et scrupuleuse (→ 1. Garde, cit. 4). || Le tuteur doit administrer les biens du mineur en bon père de famille.Fig. et cour. || Placements, valeurs de père de famille : valeurs sûres qui garantissent un profit régulier, mesuré (→ Épargnant, cit. 2).
13 (…) les hommes mariés, les pères de famille, ces grands aventuriers du monde moderne.
Ch. Péguy, Victor-Marie, comte Hugo, p. 221.
13.1 La maison était bourgeoisement habitée, et ils occupaient les lieux en bons pères de famille, selon la lettre et l'esprit de leurs baux.
M. Aymé, Maison basse, p. 19.
3 (1555). Biol. Le parent mâle (d'un être vivant sexué). → Fœtus, cit. 2; gamète, cit. 2; hérédité, cit. 12. || Le père de ce poulain était un pur-sang du nom de… (→ Éducation, cit. 17).
4 (Au plur.). Littér. Ascendant direct. Ancêtre (cit. 7 et 10), ascendant. || Nos pères. Aïeul (→ Aimer, cit. 75; aussi, cit. 30; existence, cit. 14; gagneur, cit. 1; naïf, cit. 4). || Faire comme faisaient nos pères (→ Innover, cit. 3). || L'expérience (cit. 32) de leurs pères. || L'héritage (cit. 5) de ses pères. || Brûler ce qu'adoraient ses pères (→ Inconstance, cit. 3).Allus. bibl. « Les pères ont mangé des raisins verts… » (→ Dent, cit. 13).
14 Mes chers enfants, dit-il, je vais où sont nos pères.
Adieu (…)
La Fontaine, Fables, IV, 18.
15 Nos pères sur ce point étaient gens bien sensés,
Qui disaient qu'une femme en sait toujours assez.
Molière, les Femmes savantes, II, 7 (→ Capacité, cit. 6).
La terre des Pères. Patrie (→ Nationalisme, cit. 1). || Dieu de mes Pères (→ Offenser, cit. 19).
5 Par métaphore. Celui que l'on considère comme un créateur, un protecteur. || Le Père éternel, le Père céleste (des hommes) : Dieu (→ Messe, cit. 1). || « Âme de l'Univers, Dieu, père, créateur » (cit. 2). || Notre Père qui êtes aux cieux. Pater.Nommer (cit. 3) un roi Père du peuple. || Cicéron fut appelé Père de la patrie.Par plais. || Le petit père des peuples : Staline.
16 Père adoptif de ceux qu'en sa noire colère
Du paradis terrestre a chassés Dieu le Père,
Ô Satan, prends pitié de ma longue misère !
Baudelaire, les Fleurs du mal, Révolte, « Les litanies de Satan ».
Le Père du régiment : le colonel.En valeur d'adjectif :
16.1 Rigolage s'est précipité (…) pour m'embrasser, me taper dans le dos, très père-du-régiment (…)
Geneviève Dormann, le Chemin des Dames, p. 147.
Relig. La première personne de la Sainte Trinité. Dieu (cit. 37). || Au nom du Père, du Fils et du Saint-Esprit : formule qui accompagne le signe de la croix (→ Antéchrist, cit. 2; consacrer, cit. 2). || Consubstantialité (cit.) du Père et du Fils (→ Effusion, cit. 5). || Jésus et son Père (→ Détresse, cit. 1). || Le Verbe et son Père (→ Effigie, cit. 3). || Le Verbe, image du Père (→ Laisser, cit. 39). || « Père, pardonnez-leur… » (→ Calvaire, cit. 1). || La maison (cit. 23) de mon Père. || La Maison du Père : le paradis (→ Garçon, cit. 6).
Appos. || Dieu le Père.Fam. Il se prend pour Dieu le Père.
6 Fig. (1679). Le père de (qqch.). Créateur, fondateur, inventeur. || Eschyle, père de la tragédie. || Proudhon, le père de l'anarchisme (cit. 1) moderne.L'auteur est le père de ses écrits (→ Écrire, cit. 43).Relig. || Le père des miséricordes, des lumières : Dieu. || Le père du mensonge, du mal (Chateaubriand) : le démon.
Littér. et vx. (Choses). Origine, source.L'emploi plus courant de Mère (fig.), dans ce sens. → Défaut, cit. 2. || Le père du jour : le soleil.
17 Le travail est souvent le père du plaisir (…)
Voltaire, Poésies, « Disc. sur l'homme », IV.
18 Rome sur qui se fonde
La gloire d'un pays deux fois père des arts.
Nicolas Gilbert, Ode à Monsieur, Sur son Voyage en Piémont (7e strophe).
L'ancêtre, le premier. || Le « Journal (cit. 7) des savants » est le père de tous les ouvrages de ce genre.
7 (Fin XIIe). Celui qui se comporte comme un père, à l'égard d'un ou de plusieurs enfants; celui qui est considéré comme un père (par l'enfant ou par la société).Dr. || Père légal (dans le cas où ce n'est pas le père naturel). || Père putatif. || Père adoptif. Adoption.Mon grand-père (cit.) fut mon véritable père. || Père nourricier. || Il lui servit de père, il fut un second père pour lui. || S'intéresser à quelqu'un comme un second père (→ Notaire, cit. 2).
19 Madame, dites-moi seulement que j'espère,
Je vous rends votre fils, et je lui sers de père (…)
Racine, Andromaque, I, 4.
20 Suivez-moi, fils d'Ulysse; je serai votre père, jusqu'à ce que vous ayez retrouvé celui qui vous a donné la vie.
Fénelon, Télémaque, IV.
Relig. || Père spirituel. Directeur (de conscience). → Ecclésiastique, cit. 5; guide, cit. 6.
21 Mazarin n'avait pas de génie. Mais il fut pour Louis XIV le grand initiateur, — son guide et, dans une certaine mesure, son père spirituel.
Louis Bertrand, Louis XIV, II, II.
Mon père : nom que les pénitents donnent à leurs confesseurs.
22 Quand vint son tour, il devina dans l'ombre le prêtre qui priait, la tête dans ses mains. — Mon père, dit-il, je ne suis pas catholique, mais je voudrais me confesser à vous.
A. Maurois, les Silences du colonel Bramble, IX.
8 (1820). Théâtre. || Père noble. Noble (cit. 10 et supra).
9 (Réemprunté au lat. pater). Antiq. rom. || Les pères conscrits (1.), les pères. Sénateur.
10 (V. 1155; lat. chrét. pater). Titre que l'on donne à certains hommes, en marque de respect, de vénération (spécialt dans le lang. de la religion).
Titre donné aux membres des congrégations et des ordres religieux ( Moine, religieux). || Père abbé : religieux assurant la direction d'un couvent, d'une communauté.REM. Cette expression constitue un pléonasme, le sens originaire d'abbé étant « père ». Abbé (cit. 1).Les pères de l'Oratoire (→ Divin, cit. 6), les pères jésuites. || Les Pères Blancs. || La rue des Saints-Pères, à Paris. || Les pères (→ Antiphonaire, cit. 1), les bons pères (→ Autodafé, cit. 1) : les religieux.(Suivi du nom du religieux). || Le père Malebranche (→ Chaînon, cit. 2), le père Bourdaloue (→ Désordre, cit. 24). || Le père La Chaise a donné son nom à un grand cimetière parisien.
23 — Quelle idée aussi de mener cet enfant chez les Pères… Comme si c'était un pensionnat pour lui, dans sa position…
Alphonse Daudet, Jack, I, I.
(Appellatif). || Mon père, mon révérend père (→ Large, cit. 21).
Le Saint-Père, notre saint père le pape. Pape.Appellatif. || Oui, Très-Saint Père.
Hist. relig. || Les Pères de l'Église : les docteurs de l'Église (du Ier au VIe s.), dont la doctrine en matière de foi, de morale, a été reçue et approuvée (→ Édifiant, cit. 2; paganisme, cit. 1). || Les Pères apostoliques. || Les Pères alexandrins, carthaginois, romains. || Les Pères de l'Église d'Occident, d'Orient. || Les maximes des Pères (→ 3. Droit, cit. 63). || Étude des textes des Pères. Patristique, patrologie.REM. Certains auteurs étendent la dénomination de Père de l'Église aux grands philosophes scolastiques du moyen âge (jusqu'aux XIIIe-XIVe s.).
Les Pères du désert : les anachorètes des premiers siècles chrétiens.
Les Pères du concile : les évêques qui y sont présents.
tableau Principaux noms de religieux.
11 (1636). Suivi d'un nom propre. Homme d'un certain âge, de condition modeste (avec des nuances allant de la sympathie à la condescendance). || Le Père Goriot, roman de Balzac. || Le père Ubu (Jarry). || Le père Rouault (→ Maître, cit. 95). || Le petit père Untel. — ☑ Loc. Le coup (infra cit. 20) du père François.(Avec une nuance d'admiration pour un chef, un grand homme). || La casquette du père Bugeaud. || Le père Hugo.(Dans un surnom). || Le père la Pudeur. || Le père la Pensée (→ Nuire, cit. 11). || Le père la Victoire (Clemenceau).
24 Peut-être l'insouciante générosité que mit à se laisser attraper le père Goriot, qui vers cette époque, était respectueusement nommé monsieur Goriot, le fit-elle considérer comme un imbécile (…)
Balzac, le Père Goriot, Pl., t. II, p. 861 (cf. aussi ibid., p. 866).
25 (…) toute cette bavure qui vient de Voltaire et dont le père Hugo lui-même n'est pas exempt.
Flaubert, Correspondance, 382, 14 avr. 1853.
26 Il me déplaît de jouer les pères-la-vertu et je m'en garderai. Mais je pose la question : en quoi l'histoire du sexe de cette dame intéresse-t-elle spécialement la nouvelle vague ?
F. Mauriac, le Nouveau Bloc-notes 1958-1960, p. 154.
Le Père Fouettard. || Le Père Noël.
Loc. (1825). Un gros père : un homme, un enfant placide, bonhomme, et qui a de l'embonpoint. Pépère (→ Caleter, cit. 1).Fam. || Alors, mon petit père, comment ça va ?Un père tranquille : un homme paisible, ennemi des complications. Pantouflard. || Se conduire en père tranquille.
Petit père (calque du russe), terme affectueux.
27 Et que d'aimables interpellations suivant la circonstance !
« Allez, mes colombes ! répétait l'iemschik (cocher). Allez, gentilles hirondelles ! Volez, mes petits pigeons ! Hardi, mon cousin de gauche ! Pousse, mon petit père de droite ! »
J. Verne, Michel Strogoff, p. 126.
12 Franç. d'Afrique. Homme âgé et respectable.
———
II Techn. Modèle en relief sur lequel on fabrique un moule en creux.REM. Dans l'industrie du disque, cette première copie est dénommée matrice.
CONTR. Fils, fille. — Enfant.
DÉR. et COMP. Pérot. Pépère. Beau-père, grand-père (et arrière-grand-père), Saint-Père.
HOM. Pair, paire, pers; formes du v. perdre.

Encyclopédie Universelle. 2012.