mollesse [ mɔlɛs ] n. f.
• molece 1190; de mol, mou
A ♦ (Abstrait) Caractère de ce qui est mou, sans énergie.
1 ♦ Paresse physique, intellectuelle; manque de volonté. ⇒ apathie, indolence, langueur, nonchalance, paresse, somnolence. La mollesse d'un élève paresseux. Résister avec mollesse, mollement. « s'il était venu, ce n'était que par lâcheté, par mollesse » (Green).
2 ♦ Vieilli Manière de vivre facile, délicate et voluptueuse. ⇒ sybaritisme. « J'aime le luxe et même la mollesse » (Voltaire).
3 ♦ Spécialt Manque de vigueur, de force dans une œuvre, dans le style.
B ♦ (XVIe) (Concret) Caractère de ce qui est mou (1o). La mollesse d'un coussin, d'un matelas.
C ♦ Par anal.
1 ♦ Caractère d'une forme souple, douce, imprécise. La mollesse des contours. ⇒ moelleux.
2 ♦ Caractère d'un climat mou.
⊗ CONTR. Dureté, fermeté. Activité, allant, dynamisme, entrain, vivacité; ardeur, énergie, force. Ascétisme.
● mollesse nom féminin (ancien français mol, mou) État, nature de ce qui est mou : La mollesse d'un coussin. Douceur énervante de la température : La mollesse du climat. Lenteur dans l'allure de quelque chose : Fleuve qui coule avec mollesse. Manque de vigueur, d'énergie, de volonté ; défaut de fermeté dans la manière d'agir, dans l'exécution de quelque chose : Agir avec mollesse. Mollesse d'un dessin. Manque d'énergie, de fermeté dans l'expression du visage : Mollesse des traits. ● mollesse (citations) nom féminin (ancien français mol, mou) Nicolas Boileau, dit Boileau-Despréaux Paris 1636-Paris 1711 La Mollesse, oppressée, Dans sa bouche à ce mot sent sa langue glacée, Et, lasse de parler, succombant sous l'effort, Soupire, étend les bras, ferme l'œil et s'endort. Le Lutrin ● mollesse (synonymes) nom féminin (ancien français mol, mou) État, nature de ce qui est mou
Synonymes :
- élasticité
- moelleux
Contraires :
- dureté
Douceur énervante de la température
Synonymes :
- tiédeur
Contraires :
- caractère
- fermeté
- poigne (familier)
- ressort
Manque de vigueur, d'énergie, de volonté ; défaut de fermeté dans...
Synonymes :
- apathie
- atonie
- paresse
- torpeur
Contraires :
- activité
- allant
- énergie
- entrain
- fermeté
- fougue
- pétulance
- vitalité
- vivacité
mollesse
n. f.
d1./d Caractère de ce qui est mou, moelleux. La mollesse d'un matelas. Ant. dureté.
d2./d Manque d'énergie dans le caractère, la conduite.
— Excès d'indulgence. La mollesse d'un père. Syn. indolence, faiblesse. Ant. fermeté, résolution.
d3./d Manque de vigueur, de force dans l'expression. La mollesse des traits d'un visage. Syn. atonie.
d4./d Délicatesse d'une vie facile.
⇒MOLLESSE, subst. fém.
A. — Caractère d'une chose molle, d'un corps mou.
1. Caractère de ce qui est doux au toucher et qui s'enfonce ou cède à la pression. Sa main, d'une mollesse si humide au simple toucher, avait quelquefois des pressions brutales (FLAUB., 1re Éduc. sent., 1845, p.179). Il chercha tous les coins de mollesse et de fraîcheur de ce lit si bon (BENJAMIN, Gaspard, 1915, p.87):
• 1. Et quand, la pluie passée, les branches seules ruisselèrent, alors chacun ôtant ses souliers, ses sandales, palpa de ses pieds nus cette terre mouillée dont la mollesse était voluptueuse.
GIDE, Nourr. terr., 1897, p.233.
— BEAUX-ARTS (peint., sculpt.). Représentation des chairs dans leur élasticité, leur souplesse. En Besnard revit Boucher. Comparez (...) cette sensualité rose et or, cette mollesse riante où se décèle une nervosité souple, un jeu secret des muscles, (...) tout cela c'est Boucher, c'est Fragonard (MAUCLAIR, De Watteau à Whistler, 1905, p.42).
2. P. anal.
a) Caractère d'une forme dont les traits sont adoucis par des lignes arrondies et sans tranchant. Madame Laprat-Teulet était une petite personne blême, qu'on croyait toujours voir à travers une gaze, tant ses traits avaient de mollesse (A. FRANCE, Orme, 1897, p.200). Le visage, comme le corps, tend à la mollesse et à la rotondité des formes (MOUNIER, Traité caract., 1946, p.218).
b) BEAUX-ARTS, LITT., vieilli. Douceur, fluidité du style, de l'expression, du trait. Mollesse du pinceau. Ces vers, qui d'ailleurs ne manquent ni d'abandon, ni de mollesse, ne se trouvent point dans l'auteur anglois (CHATEAUBR., Génie, t.1, 1803, p.389). Ses descriptions [de Rousseau] sont moins pompeuses que celles de Buffon, mais elles ont plus de charme. Il y a plus de grâce, de douceur, de mollesse dans son style (CHÊNEDOLLÉ, Journal, 1815, p.74).
B. — Au fig. Caractère d'une personne molle. Synon. atonie.
1. Langueur, apathie physique ou intellectuelle. Salammbô était envahie par une mollesse où elle perdait toute conscience d'elle-même (FLAUB., Salammbô, t.2, 1863, p.44):
• 2. Elle entra, demanda une bouteille de liqueur douce, un hot-dog et, aussitôt assise seule dans une cabine, alluma une cigarette. Presque à la première bouffée, une sensation de mollesse la gagna.
BLOY, Bonheur occas., 1945, p.312.
— Caractère d'un geste, d'un mouvement dont la lenteur ou la souplesse traduisent cette apathie. Tout doucement elle cherchait à se dégager de son bras, mais avec tant de mollesse que Stephen n'avait pas grand-peine à la retenir (KARR, Sous tilleuls, 1832, p.184). Les arbres se balançaient avec mollesse (GOBINEAU, Nouv. asiat., 1876, p.164):
• 3. Anne qui se mélange au drap pâle et délaisse
Des cheveux endormis sur ses yeux mal ouverts
Mire ses bras lointains tournés avec mollesse
Sur la peau sans couleur du ventre découvert.
VALÉRY, Alb. vers anc., 1900, p.89.
— P. anal., ÉCON. Baisse de l'activité économique. Mollesse du commerce, des affaires. La lourdeur des impôts sur le revenu, une forte poussée de l'épargne étaient, selon les spécialistes, les principales explications de cette «mollesse de la consommation» (L'Express, 21 sept. 1970)
2. Absence de volonté, de détermination. La mollesse, l'incurie de certains chefs (LAS CASES, Mémor. Ste-Hélène, t.2, 1823, p.313). Il s'était acoquiné aux Charmettes, par mollesse et pour sa commodité (GUÉHENNO, Jean-Jacques, 1948, p.221):
• 4. D'une mollesse d'enfant, incapable d'une résolution, il avait adopté ce modus vivendi qui consiste à se laisser aller au petit bonheur de l'existence et à s'en remettre au bon Dieu du soin de trancher les questions dès l'instant qu'elles se présentent avec quelque nuance d'embarras.
COURTELINE, Ronds-de-cuir, 1893, 2e tabl., 2, p.72.
— BEAUX-ARTS, LITT. Manque de fermeté, de vigueur dans l'expression d'une oeuvre littéraire, musicale ou plastique. [Joe Smith] possède la faculté extraordinaire de jouer ses solos avec une douceur délicieuse sans jamais tomber dans la mollesse (PANASSIÉ, Jazz hot, 1934, p.107).
♦P. méton. Dans la scène du pavillon, il y a des mollesses, des longueurs. Ça n'est pas assez intense (FLAUB., Corresp., 1859, p.308).
3. Laxisme, excès d'indulgence. Tous accusaient Barca de s'être conduit avec mollesse. Il aurait dû, après sa victoire, anéantir les mercenaires (FLAUB., Salammbô, t.2, 1833, p.14).
4. Sybaritisme, mode de vie facile et voluptueux. Mme de Lambert savait qu'à la date où elle écrivait, le danger pour cette jeunesse guerrière était bien plutôt dans le trop de dissolution et de mollesse (SAINTE-BEUVE, Caus. lundi, t.4, 1851, p.221):
• 5. Que Pascal haïsse tout ce qui pourrait le séparer de Jésus-Christ, et en particulier les satisfactions des sens, la mollesse, ce qui s'appelle aujourd'hui le confort, cela est commun à tous les saints, comme aussi l'amour de la maladie et de la pauvreté...
MAURIAC, Pascal et sa soeur, 1931, p.232.
Prononc. et Orth.:[]. Att. ds Ac. dep. 1694. Étymol. et Hist. 1. a) Ca 1200 molece «manque de vigueur, de fermeté morale» (Moralités sur Job, 306, 22 ds T.-L.); b) XVe s. molicie «moeurs relâchées, vie voluptueuse» (Chron. et hist. saint. et prof., Ars. 3515, f° 153 r° et f° 157 r° ds GDF.); c) début du XVIe s. molice «confort» (FOSSETIER, Cron. Marg., ms. Brux., I, f° 181 v°, ibid.); d) 1551 au plur. mollicies «faits qui manifestent un relâchement moral» (D. SAUVAGE, Trad. de Léon Hebrieu, 34 d'apr. VAGANAY ds HUG.); e) av. 1570 mollice «souplesse d'expression, caractère peu rigide (d'une langue)» (BONIVARD, Adv. et dev. des leng., éd. 1849 ds GDF.); f) 1652 «manque de vigueur et de fermeté dans l'expression» (GUEZ DE BALZAC, Socrate chrét. disc., 7 ds LITTRÉ); g) 1764 «douceur, délicatesse, nuance dans l'expression» (VOLTAIRE, Commentaires Corneille, Rem. Pertharite, II, 5, ibid.); h) 1767 mollesse de pinceau (DIDEROT, Salon de 1767, Œuvres, t.XIV, p.371 d'apr. POUGENS, ibid.); 2. 1er quart XIIIe s. moleche «manque de consistance, de fermeté (d'un corps, ici la chair)» (RECLUS DE MOLLIENS, Charité, 221, 5 ds T.-L.); 3. ca 1260 molesce «faiblesse de caractère» (Ménestrel de Reims, 7, ibid.). Dér. de mou, mol, molle (suff. -esse1), les formes molicie, molice, mollicie, molice étant directement adaptées du lat. mollitia «mollesse». Le retard relatif des premières attest. du mot accrédite l'hyp. d'une dérivation plutôt qu'une évolution anc. à partir de mollitia (FEW t.6, 3, p.51b). Fréq. abs. littér.:545. Fréq. rel. littér.:XIXe s.: a) 1001, b) 976; XXe s.: a) 791, b)463.
mollesse [mɔlɛs] n. f.
ÉTYM. XIVe; molece, v. 1190; dér. de mol, mou, et -esse.
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1 (Déb. XIIIe). Caractère de ce qui est mou. || Mollesse d'un coussin, d'un lit. || Un fauteuil (cit. 1) dont la mollesse invite au repos. ⇒ Moelleux (subst.). || Duvet d'une mollesse extrême (→ Fourrure, cit. 1). || Mollesse des chairs, des tissus, des muscles. || Mollesse d'un fruit blet. — Absence de rigidité, de tenue. || Mollesse d'une tige, d'une étoffe.
1 (…) les bras, pâmés et morts, ont une flexibilité, une mollesse d'écharpe dénouée; on dirait que les mains peuvent à peine soulever et faire babiller les castagnettes (…)
Th. Gautier, Voyage en Espagne, p. 217.
2 (1845). Caractère d'une forme souple, douce, arrondie, parfois imprécise. || Mollesse des contours, des formes.
3 Caractère d'un climat mou. || La mollesse de ce climat est débilitante.
4 Douce lenteur. || La mollesse de la Loire et l'impétuosité du Rhône (→ Fleuve, cit. 6). || Se balancer avec mollesse.
1 (1764). Vieilli. (Arts, littér.). Grâce nonchalante de la langue, du style, de la pensée. || La mollesse de l'élégie (→ Enfiévrer, cit. 5). || Mollesse d'une phrase (→ Enrouler, cit. 4; italien, cit. 1).
2 Mod. (Péj.). Manque de vigueur, de fermeté dans le style ou l'exécution d'une œuvre plastique ou musicale. || Mollesse et imprécision du style. || Mollesse de la touche, du pinceau. || Ce chef d'orchestre conduit avec mollesse. || Il y a de la mollesse dans cette chorégraphie.
2 Que prétend la faiblesse étudiée de ce langage forcé, cette violente expression qui met les lecteurs à la torture, pour ne produire que de la mollesse et de l'afféterie ?
3 Cela est d'une négligence, d'une mollesse de pinceau, d'une paresse de tête qui fait pitié (…)
Diderot, Salon de 1767.
3 (1690, Furetière). Paresse, engourdissement physique et intellectuel. ⇒ Abattement, affaiblissement, apathie, atonie, cagnardise, indolence, langueur, nonchalance, paresse, somnolence. || La mollesse d'un élève paresseux. || Mollesse geignarde (cit.). || Envahie par une mollesse où elle perdait conscience (cit. 3) d'elle-même.
♦ (V. 1190). Manque de volonté, de caractère, de fermeté. ⇒ Abandon, faiblesse, laisser-aller. || Lâcheté (cit. 4) et mollesse. || Solution de facilité adoptée par mollesse. || Faiblesse, indécision, mollesse et incurie des gouvernements (cit. 35). || Résister, refuser avec mollesse, mollement, d'un air peu convaincu.
4 (…) s'il était venu ce n'était que par lâcheté, par mollesse et pour s'épargner à lui-même les regrets d'avoir négligé une occasion qui lui était offerte (…)
J. Green, Léviathan, VI.
♦ Spécialt. Manque de sévérité morale. || Mollesse et indulgence pour soi (→ Confirmer, cit. 7). || Mollesse d'un père envers son fils, douceur excessive.
5 Il faut avec vigueur ranger les jeunes gens,
Et nous faisons contre eux à leur être indulgents (…)
Est-ce que vous voulez qu'un père ait la mollesse
De ne savoir pas faire obéir la jeunesse ?
Molière, l'École des femmes, V, 7.
4 (Fin XIIe). Vx ou littér. Manière de vivre facile, délicate et voluptueuse. || Mollesse des sybarites. ⇒ Sybaritisme (→ Bannir, cit. 8). || Vivre dans la mollesse. || « J'aime (cit. 47) le luxe et même la mollesse… » (Voltaire). || « Flottant (cit. 15) entre la mollesse et la vertu » (Rousseau). ⇒ Volupté. || Son cœur nage dans la mollesse (→ Endormir, cit. 14). || La destinée m'arracha à la mollesse (→ Filer, cit. 4). || Élever un enfant dans la mollesse, avec trop de délicatesse (→ Endurcir, cit. 2).
6 Que les dieux me fassent périr plutôt que de souffrir que la mollesse et la volupté s'emparent de mon cœur !
Fénelon, Télémaque, I.
7 Tu crois que les arts amollissent les peuples et par là sont cause de la chute des empires. Tu parles de la ruine de celui des anciens Perses, qui fut l'effet de leur mollesse (…)
Montesquieu, Lettres persanes, CVII.
8 (…) vous n'êtes ni assez riches pour vous laisser énerver par la mollesse et perdre dans de vaines délices le goût du vrai bonheur (…)
Rousseau, De l'inégalité parmi les hommes.
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CONTR. Dureté, fermeté, rigidité. — Vigueur. — Activité, agilité, allant, dynamisme, endurance, entrain, vivacité. — Acharnement, ardeur, décision, détermination, empressement, énergie, force, impétuosité, opiniâtreté, rudesse. — Sévérité. — Ascétisme.
Encyclopédie Universelle. 2012.