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exaltation

exaltation [ ɛgzaltasjɔ̃ ] n. f.
XIIIe; lat. ecclés. exaltatio, du supin de exaltare exalter
1Relig. Exaltation (élévation) de la sainte Croix : fête de l'Église commémorant l'élévation de la sainte Croix à Jérusalem.
2(1651) Littér. Action de glorifier, de célébrer hautement (les mérites de). glorification, louange. « l'exaltation du nom et de la grandeur de Dieu » (Pascal). L'exaltation du nationalisme.
3Anc. chim. activation. Mod. Méd. Exaltation de virulence d'une bactérie.
4(déb. XVI e) Littér. Fait de devenir très intense, très actif. Exaltation des forces, de l'énergie, de l'imagination, d'une passion ( déchaînement) . « Ce délire dura deux années entières, pendant lesquelles les facultés de mon âme arrivèrent au plus haut point d'exaltation » (Chateaubriand).
5Cour. Grande excitation de l'esprit. agitation, animation, ardeur, délire, effervescence, emballement, emportement, enivrement, enthousiasme, littér. éréthisme, excitation, extase, exultation, 1. feu, fièvre, griserie, ivresse, ravissement, surexcitation, transport, véhémence. État d'exaltation. Exaltation intellectuelle, mystique. Il en parlait avec exaltation. « L'exaltation naturelle d'une âme poétique, exaspérée par l'excitation artistique » (Maupassant).
Psychiatr. État délirant qui donne au malade une impression de grande puissance, d'euphorie intense.
⊗ CONTR. Abaissement, avilissement, 2. critique. Abattement, apathie, 1. calme, dépression, impassibilité, indifférence, sang-froid.

exaltation nom féminin (bas latin exaltatio, -onis, action d'élever) Action de porter quelque chose à un plus haut degré de mérite, de gloire : L'exaltation du travail. Littéraire. Élévation d'un sentiment à un haut degré : L'exaltation du sentiment religieux. État de surexcitation psychologique habituellement associé à l'euphorie : État d'exaltation d'un malade mental. Accroissement que subit le pouvoir pathogène d'un germe après un ou plusieurs passages chez l'animal ou chez l'homme. ● exaltation (expressions) nom féminin (bas latin exaltatio, -onis, action d'élever) Exaltation de la sainte Croix, fête de l'Église célébrée le 14 septembre, en l'honneur de la croix de Jésus-Christ. (Attestée dès le IVe s., cette fête prit un grand éclat après la reconquête de la croix de Jérusalem sur les Perses en 628.) ● exaltation (synonymes) nom féminin (bas latin exaltatio, -onis, action d'élever) Action de porter quelque chose à un plus haut degré de...
Synonymes :
- apothéose
- glorification
- sublimation
État de surexcitation psychologique habituellement associé à l'euphorie
Synonymes :
- délire
- emballement
- enivrement
- excitation
- extase
- exultation
- fièvre
- griserie
- ivresse
- transport
- vertige
Accroissement que subit le pouvoir pathogène d'un germe après un...
Contraires :
- atténuation

exaltation
n. f.
d1./d Litt. Action d'exalter, de glorifier. Exaltation des mérites de qqn.
d2./d Vive excitation de l'esprit. Parler avec exaltation.

⇒EXALTATION, subst. fém.
Action d'exalter; résultat de cette action.
I.— [L'action reste extérieure à l'obj.]
A.— Domaine spatial, rare. Action de porter vers le haut (dans l'espace) quelque chose, d'élever très haut; résultat de cette action :
1. Au départ, la verticale est donnée par la colonne; l'inclinaison débute avec la figure allégorique dont les bras levés disent le désespoir (...) les nuées étirées, le groupe des mères terrifiées rejoignent presque l'horizontale, sur laquelle s'allonge la figure renversée. Ainsi une double translation opérée dans le même sens s'achève, la première par une exaltation finale, l'autre par une chute évocatrice de la mort.
HUYGHE, Dialog. avec visible, 1955, p. 217.
B.— Au fig., domaine moral, en gén.
1. [Avec un compl. déterminatif désignant une pers.] Action de porter quelqu'un à un rang très haut (dans la hiérarchie des valeurs sociales ou individuelles), de l'élever au faîte des honneurs publics ou au summum de l'estime personnelle; résultat de cette action. Un caractère saillant de la Cour romaine à cette époque [de Du Bellay] était l'exaltation soudaine de quelques-uns qui n'étaient rien la veille, et leur chute profonde le lendemain (SAINTE-BEUVE, Nouv. lundis, t. 8, 1863-69, p. 339). Un petit livre de critique, — ô de critique! d'exaltation plutôt, — à propos de quelques poètes méconnus (VERLAINE, Œuvres compl., t. 4, Poètes maud., 1884, p. 86). Avoir travaillé au bonheur de l'humanité, à la confusion des puissants, à l'exaltation des faibles et des déshérités (BLOCH, Dest. S., 1931, p. 287).
2. [Avec un compl. déterminatif désignant une chose abstr.] Action de donner beaucoup d'importance, de valeur à quelque chose, de lui accorder de l'admiration, des éloges; résultat de cette action. L'exaltation de la dureté et le mépris de l'amour humain (pitié, charité, bienveillance). Ici encore, les clercs modernes (...) ont proclamé la noblesse morale de la dureté et l'ignominie de la charité (BENDA, Trah. clercs, 1927, p. 173). À une exaltation messianique de la paysannerie et à une critique fort vive du mode de développement soviétique (Tiers monde, 1956, p. 377).
C.— Domaine matériel et moral, RELIG. CHRÉT.
1. [Le compl. déterminatif désigne un inanimé concr.]
a) Rare. Synon. usuel élévation. Au moment de l'exaltation [dans une parodie de messe], l'obi, élevant entre ses mains l'hostie consacrée (HUGO, Bug-Jargal, 1826, p. 124).
b) Exaltation de la Sainte Croix. ,,Nom donné depuis le VIe s. à une fête en l'honneur de la Croix, le 14 septembre, jour anniversaire de la dédicace en 335 de la basilique constantinienne du Saint-Sépulcre à Jérusalem. Le nom semble dû au fait que la cérémonie la plus marquante de la fête consistait en l'ostension de la vraie Croix`` (Foi t. 1, 1968). L'Exaltation de la Sainte-Croix tombant un jour de grand-messe, l'abbé Mouret avait voulu célébrer cette fête religieuse avec un éclat particulier (...). Exalter la Croix, la planter devant lui, au-dessus de toutes choses, dans une gloire, comme le but unique de sa vie, lui donnait la force de souffrir et de lutter (ZOLA, Faute Abbé Mouret, 1875, p. 1448) :
2. ... il se répétait l'histoire de cette Exaltation de la Croix, qu'il avait lue, le matin, dans les Légendes du Moyen âge. (...) sur le ravisseur du gibet sacré, sur l'étonnant Khosroës qui, au septième siècle, envahit le territoire de la Syrie, prit d'assaut Jérusalem (...) et, triomphalement, ramena, dans son royaume de Perse, le bois de la vraie croix...
HUYSMANS, Oblat, t. 1, 1903, p. 39.
Rem. Cette fête commémore également ,,la manifestation d'Héraclius empereur d'Orient rapportant la croix du Christ au Calvaire`` (LEP. 1948).
2. [Le compl. déterminatif désigne une pers.]
a) [Le compl. déterminatif désigne un dignitaire ecclésiastique] Élévation au trône pontifical ou à une dignité importante. Ses ambassades [de Pie II] auprès des cours, son exaltation au pontificat (STENDHAL, Hist. peint. Ital., t. 2, 1817, p. 404). L'exaltation désirée de Votre Sainteté à la chaire de saint-Pierre (...) Votre Béatitude élevée au souverain pontificat (CHATEAUBR., Mém., t. 3, 1848, p. 570). Ces flabella qu'on porte à Rome lors de l'exaltation des papes (DU CAMP, Nil, 1854, p. 141).
b) Rare. Exaltation des reliques. Action de les proposer à la vénération publique des fidèles. Synon. ostension. Comment la chère sainte Élisabeth fut canonisée par le pape Grégoire; et de la grande joie et vénération des fidèles d'Allemagne lors de l'exaltation de ses reliques à Marbourg (MONTALEMBERT, Ste Élisabeth, 1836, p. 297).
II.— [L'action affecte l'obj. dans ses caractères propres]
A.— Domaine matériel, sensible
1. En gén. Action de porter quelque chose à un très haut degré d'intensité, de développer, de mettre en valeur fortement ses qualités essentielles; résultat de cette action. Un gris bleuâtre recevra une exaltation de bleu bien sensible de son voisinage avec l'orangé (CHEVREUL, Contraste simult. coul., 1839, p. 37). Le style d'un maître n'est jamais (...) que la mise en évidence, l'exaltation de certains caractères de la nature, à quoi correspond fatalement l'élimination plus ou moins consciente et systématique de certains autres (A. MICHEL, Peint. fr. XIXe s., 1928, p. 224) :
3. ... ne vous semble-t-il pas que nos actes ordinaires (...) nos gestes et nos mouvements accidentels soient comme des matériaux grossiers (...), tandis que cette exaltation et cette vibration de la vie [chez la danseuse], tandis que cette suprématie de la tension, et ce ravissement dans le plus agile que l'on puisse obtenir de soi-même, ont les vertus et les puissances de la flamme...
VALÉRY, Eupalinos, 1923, p. 39.
2. Spécialement
a) ASTROL. Amplification de l'influence supposée d'un astre lorsqu'il entre dans tel signe du zodiaque. Le bélier que les Perses, dans leur cosmogonie, appellent l'« Agneau » (...). C'était le signe de l'exaltation du Soleil dans le système des astrologues (...). C'était donc le retour du Soleil à l'agneau céleste, qui tous les ans régénérait la Nature (DUPUIS, Orig. cultes, 1796, p. 341). Le Lion à l'ascendant, l'exaltation des signes favorables, l'affliction des funestes lui promettaient [à Édouard VI] une carrière royale longue et fortunée (ARNOUX, Seigneur, 1955, p. 122).
b) BIOL., PHYSIOL., Action d'augmenter l'activité d'un (système d') organe(s), d'une fonction, d'intensifier les propriétés d'une substance, la virulence d'un microbe, etc.; résultat de cette action. Dans tous ces cas, l'exaltation de la bile est proportionnelle à la violence du mal; celle de l'humeur séminale, et l'éréthisme des organes de la génération, sont aussi portés au dernier terme (CABANIS, Rapp. physique mor., t. 1, 1808, p. 467). Les peines trop vives exagèrent le jeu du grand sympathique. Cette exaltation de la sensibilité entretient dans une constante irritation la muqueuse de l'estomac (BALZAC, Lys, 1836, p. 240). Le « vase clos » dont l'influence sur l'exaltation de la virulence microbienne est bien connue (BRUMPT, Parasitol., 1910, p. 357).
c) PHYS. ,,Phénomène présenté par une molécule dont la réfractivité moléculaire est supérieure à celle que prévoit la règle d'additivité`` (DUVAL 1959). On se sert des exaltations spécifiques obtenues en multipliant l'exaltation moléculaire (J. Phys. et Radium, Chim. phys., 1934, p. 23).
B.— Domaine moral, en gén.
1. [À propos d'une pers.]
a) Domaine éthique, relig. Action d'inspirer à quelqu'un des sentiments élevés, nobles, de le porter à un très haut degré d'émotion spirituelle; résultat de cette action. Exaltation mystique, religieuse. Il y a des moments dans les tragédies historiques où l'exaltation de l'âme amène naturellement une poésie plus élevée (STAËL, Allemagne, t. 2, 1810, p. 306). Que notre aspiration s'appelle prière ou exaltation d'esprit, il est certain que l'âme se retrempe dans les élans religieux (SAND, Hist. vie, t. 3, 1855, p. 354). Disposition religieuse des nouveaux mystiques (...) nul acte où l'on ne sente comme un enivrement et une exaltation salutaire, ainsi qu'au souffle de l'infini passant sur l'âme (BLONDEL, Action, 1893, p. 317) :
4. Il faut être inspiré pour se sentir en communauté avec la grande nature; il faut l'être plus encore pour éprouver qu'on vit de Dieu et en Dieu. Je connais pourtant cet état d'exaltation émue. Cette joie ne m'a point été refusée; mais je ne puis l'évoquer à volonté, et dans ce moment par exemple cette extase m'est étrangère.
AMIEL, Journal, 1866, p. 119.
En partic., péj., vx. Orgueil exagéré, répréhensible. Nos poètes sont dans un état continu d'exaltation personnelle et vaine, d'infatuation qu'ils ne peuvent dissimuler : je dis d'eux qu'ils ont le « priapisme » de l'amour-propre (SAINTE-BEUVE, Poisons, 1844, p. 129).
b) Domaine affectif, intellectuel, etc. Action d'inspirer à quelqu'un des idées, des impressions, des sentiments très vifs, de le porter à un très haut degré d'émotion sentimentale, d'activité mentale, d'enthousiasme créateur — résultat de cette action; (moins fréq.) tendance naturelle à éprouver des impressions, des sentiments d'une intensité peu commune, tempérament passionné, facilement porté aux extrêmes. Grande, tendre exaltation; degré, moment d'exaltation; être au comble de l'exaltation, en proie à une exaltation croissante. Daudet arrive à un état d'exaltation d'esprit, de griserie (...) dans cet emballement pour ces livres de vérité (GONCOURT, Journal, 1892, p. 245). J'ai de l'humeur, des caprices, de l'exaltation; j'aime rire, pleurer, faire claquer les boutons des fuchsias (NOAILLES, Visage émerv., 1904, p. 11) :
5. Toute la vie intérieure de Guérin est composée de ces hauts et de ces bas, dont le rythme nous a frappés (...) chez tous ceux qui, joignant au goût des plaisirs de l'imagination un excessif besoin d'introspection, sont pour eux-mêmes les plus redoutables ennemis. De l'exaltation à l'abattement complet, de l'infinie dilatation de soi à un atroce resserrement, ils sont impuissants à changer le mouvement qui les emporte. Guérin le savait, qui résumait la vie en « une alternative d'élans et de défaillances, d'emportements d'imagination et de prostrations d'âme, de rêves fous à force d'ardeur et de refroidissements désolants ».
BÉGUIN, Âme romant., 1939, p. 346.
6. Si l'exaltation ne manquait point à Geneviève, qui, pour un rien, se portait tout à coup à la pointe extrême de son cœur et y flambait, elle ignorait encore les bienfaits de l'amplitude, qui compense l'élan et équilibre l'âme. Car l'exaltation nous emporte au-dessus de nous-mêmes, comme un jaillissement vers la hauteur, tandis que l'amplitude, contrairement à l'apparence, ne s'acquiert que par le recueillement et une lente concentration.
BOSCO, Mas Théot., 1945, p. 72.
En partic. Expansion de la joie d'être, du plaisir d'admirer, etc., provoquée par le spectacle de la nature. Depuis un mois que nous voyagions ensemble, mon mari, par son indifférence calme, paralysait mes enthousiasmes, éteignait mes exaltations (MAUPASS., Contes et nouv., t. 1, Clair lune, 1882, p. 806). À mesure que ces hommes se rapprochaient de l'océan, grandissait en eux l'exaltation d'une certaine allégresse. Il n'était pas rare qu'ils chantassent (PSICHARI, Voy. centur., 1914, p. 133) :
7. [Je] partis au hasard dans la forêt. Un magnifique silence dont je commençai seulement à jouir enveloppait tout; j'en tirai une sorte d'exaltation et d'ardeur à vivre qui me réconcilièrent en quelques instants avec moi-même.
ABELLIO, Pacifiques, 1946, p. 106.
PSYCHOPATHOL. Surexcitation morbide de l'activité psychique, pouvant aller jusqu'au délire. Exaltation folle, nerveuse. Martin ne donnait pendant tout ce temps aucun signe d'aliénation ni d'exaltation d'esprit; il était calme et vaquait à ses travaux ordinaires sans aucun dérangement (MAINE DE BIRAN, Journal, 1817, p. 37). Le cyclothyme représente un type normal, exagération des tendances communes à tous les hommes, mais à un degré de plus il s'agit d'un type prémorbide, le cycloïde. L'humeur devient de plus en plus cyclique et atteint des paroxysmes d'exaltation (DELAY, Psychol. méd., 1953, p. 146). Cf. aussi anxiété ex. 12 :
8. ... l'émotivité est aussi à la source de diverses aberrations religieuses. Toutes les exaltations s'y nourrissent, depuis les délires hystériques collectifs, rituels dans quelques sectes, jusqu'aux fièvres malsaines de certaines piétés. Elle tend à subjectiviser le sentiment religieux au point de le réduire à un échauffement du cœur, qui se complaît dans la jouissance sensible, dans la transe...
MOUNIER, Traité caract., 1946, p. 740.
2. P. ext. [À propos du comportement humain] Manière d'être qui exprime des sentiments extrêmes, excessifs. Certains jours, elle bavardait avec une abondance fébrile; à ces exaltations succédaient tout à coup des torpeurs où elle restait sans parler, sans bouger (FLAUB., Mme Bovary, t. 1, 1857, p. 76). Monsieur s'animait étrangement. Et sur sa personne robuste, fortement musclée, je reconnaissais les signes les plus évidents de l'exaltation amoureuse. Il s'embrasait... le désir flambait dans ses prunelles (MIRBEAU, Journal femme ch., 1900, p. 84). Elle n'avait jamais vu à Jean cet air d'exaltation farouche, de trouble, de violence (DANIEL-ROPS, Mort, 1934, p. 194).
En partic., domaine de l'expr. artistique. Caractère de ce qui traduit, par sa très grande force d'expression, par ses audaces, ses outrances formelles, un tempérament passionné, facilement porté aux extrêmes. Jean Rusbrock l'admirable (...) dont la prose offrait un incompréhensible mais attirant amalgame d'exaltations ténébreuses, d'effusions caressantes, de transports âpres (HUYSMANS, À rebours, 1884, p. 207). Le ciel, les plantes (...) les draperies et les chairs participent [dans l'œuvre de Delacroix] à une sorte de fiévreuse exaltation et d'ardente mélancolie (HOURTICQ, Hist. art, Fr., 1914, p. 336). J'ai toujours conçu l'exaltation, avec cette part de fuite inévitable qu'elle comporte, comme le tremplin du mieux vivre (...) le modèle alors en était l'exaltation de la musique de Franck, de cette musique que j'appelais la musique même du courage (DU BOS, Journal, 1928, p. 158).
3. P. métaph. ou au fig. [À propos de choses concr., de phénomènes sensibles] Caractère de ce qui semble animé par des sentiments très vifs. La mélancolie des soirs et l'exaltation des matins (MILOSZ, Amour. initiation, 1910, p. 220). Même quand elles [les cloches] se taisaient dans les hauteurs des tours, le petit garçon (...) ne se trompait pas sur ce silence, sur tout ce qu'il recelait pour le lendemain matin d'exaltation sonore et de domination furibonde (MALÈGUE, Augustin, t. 1, 1933, p. 12). La voiture prit enfin ses grandes allures dans une apparente exaltation, joyeuse de grimper des pentes (LA VARENDE, Manants du roi, 1938, p. 192) :
9. Un mouvement général de la terre et des arbres soulevait les couleurs et les formes et donnait à tout le paysage une exaltation, une véhémence soulignées par le battement de flammes d'argent de peupliers dans le vent...
GIONO, Angelo, 1958, p. 56.
Prononc. et Orth. :[] ou [e-]. Cf. é-1. Ds Ac. 1694-1932. Étymol. et Hist. a) Ca 1265 sens propre « action d'élever (quelque chose) » exaltation de Sainte Croix fête de l'Église, le 14 septembre (Statuts d'Hôtels-Dieu, 133 d'apr. Bambeck ds Mél. Gamillscheg, p. 55); b) 1407 « action d'élever, d'exalter » (Ord., XII, 226 ds GDF. Compl.); mil. XVIIIe s. fig. « élévation d'un sentiment à un haut degré d'intensité » (VOLT., L'H. aux 40 écus, Nouveaux systèmes ds LITTRÉ). Empr. au lat. chrét. exaltatio « action d'élever, de dresser » (notamment de la croix, le vendredi saint, en la présentant aux fidèles; cf. exaltatio crucis), de là « glorification ». Fréq. abs. littér. :1 495. Fréq. rel. littér. :XIXe s. : a) 1 644, b) 1 436; XXe s. : a) 2 184, b) 2 871. Bbg. CLAYTON (A. J.). Exaltation et imagination chez Alban de Bricoule... Rom. R. 1975, t. 66, pp. 100-112. — GOHIN 1903, p. 324.

exaltation [ɛgzaltɑsjɔ̃] n. f.
ÉTYM. XIIIe; en parlant de la Sainte-Croix; lat. ecclés. exaltatio, du supin de exaltare. → Exalter.
1 Relig. Action d'élever très haut.REM. Ne s'emploie plus au propre, que dans l'expression Exaltation de la Sainte Croix, fête de l'Église commémorant l'élévation de la Sainte Croix à Jérusalem.
1 Chateaubriand a employé exalter au sens propre de hausser, exhausser (…) Cela n'est pas à recommander; et la locution toute spéciale d'exaltation de la croix ne suffit pas pour autoriser Chateaubriand, parce que le mot est tout crûment traduit du latin.
Littré, Dict., Suppl., art. Exalter.
Fig. || L'exaltation d'un pape, son élévation au trône pontifical. || L'exaltation des faibles et des déshérités (Jean-Richard Bloch, in T. L. F.).
2 À l'entendre, il (le duc de Blacas) fait tout, il peut tout (…) il a dans sa poche les clefs des conclaves; les trois derniers papes lui doivent leur exaltation (…)
Chateaubriand, Mémoires d'outre-tombe, t. VI, p. 79.
2 (1651). Littér. Action de glorifier, de célébrer hautement (les mérites de). Glorification, louange. || L'exaltation des vertus (→ Dérision, cit. 3). || L'exaltation d'un grand personnage par un thuriféraire, d'un saint par son hagiographe.
3 Si nous envisageons cet événement (la mort de M. Pascal père) … comme une suite (…) utile au bien de l'Église et à l'exaltation du nom et de la grandeur de Dieu (…)
Pascal, Lettre à Périer, 17 oct. 1651.
3 Anc. chim. Accroissement d'activité d'une substance rendue plus subtile, plus pure. Activation, sublimation. || L'exaltation des sels.Mod. Méd. || Exaltation de virulence d'une bactérie (par oppos. à atténuation).
4 (Déb. XVIe). Littér. Le fait de devenir très intense, très actif. || L'exaltation des forces, de l'énergie combative (→ Combativité, cit. 1). || Exaltation de la sensibilité physique et morale. || Exaltation de l'imagination ( Déchaînement). || Exaltation d'une passion. Embrasement. || Exaltation de sentiments inférieurs ( Sublimation). || Exaltation des sentiments religieux.
4 La manière de vivre des Chartreux suppose, dans les hommes qui sont capables de la mener, ou un esprit extrêmement borné, ou la plus noble et la plus continuelle exaltation des sentiments religieux.
Mme de Staël, Corinne, X, I.
5 Ce délire dura deux années entières, pendant lesquelles les facultés de mon âme arrivèrent au plus haut point d'exaltation.
Chateaubriand, Mémoires d'outre-tombe, t. I, p. 126.
5.1 (…) mon amour était moins l'amour que le désir d'une exaltation de ma personnalité.
Montherlant, Pitié pour les femmes, p. 29.
5 Absolt, cour. Grande excitation de l'esprit, causée par un agent physique, chimique ou par une vive impression.(Psychiatrie). État délirant qui donne au malade une impression de grande puissance, d'euphorie intense. Agitation, animation, ardeur, chaleur, délire, effervescence, égarement, emballement, emportement, enivrement, enthousiasme, éréthisme, excitation, extase, exultation, feu, fièvre, griserie, ivresse, passion, ravissement, surexcitation, transport, véhémence. || État d'exaltation. || Exaltation intellectuelle, mystique. || Exaltation nerveuse. || Exaltation passagère. || Parler avec exaltation. || Dans l'exaltation du débat, du jeu. || Alternatives (cit. 2) d'exaltation et d'abattement, de mélancolie (→ 1. Bas, cit. 52). || Degré (cit. 29) d'exaltation. || Son exaltation ne cesse de croître (cit. 14). || Calmer l'exaltation de qqn ( Dégriser). || Revenir de son exaltation.
6 (…) disposition bizarre qui (…) donne à l'égoïsme même le ton de l'exaltation, et au dévouement un caractère de personnalité.
Rémusat, Mélanges (article de 1819 sur Werther).
7 La sensibilité est mobile, l'exaltation peu durable (…)
Michelet, Hist. de la Révolution franç., t. II, p. 105.
8 D'autre part, en même temps que la terreur et le découragement, on vit naître l'exaltation nerveuse. Quand les hommes sont trop malheureux, ils deviennent excitables, comme les malades et les prisonniers; leur sensibilité s'accroît et acquiert une délicatesse féminine.
Taine, Philosophie de l'art, t. I, p. 79.
9 L'exaltation naturelle d'une âme poétique, exaspérée par l'excitation artistique, pousse ces êtres d'élite à concevoir une sorte d'amour nuageux éperdument tendre, extatique, jamais rassasié (…)
Maupassant, la Vie errante, p. 160.
10 J'avais moi-même à l'âme cette sorte de fièvre, cette exaltation qui nous saisit devant certains spectacles inattendus.
Maupassant, Au soleil, p. 250.
11 (…) nous sommes un peuple enthousiaste; nous ne conquérons que dans l'exaltation (…)
Louis Madelin, Hist. du Consulat et de l'Empire, De Brumaire à Marengo, V, p. 69.
12 Elle poursuivait simplement son récit; et une merveilleuse exaltation intérieure la transfigurait.
Martin du Gard, les Thibault, t. IX, p. 44.
CONTR. Abaissement, avilissement, blâme, censure, critique. — Affadissement, affaissement, assoupissement, attiédissement. — Abattement, apathie, calme, dépression, flegme, impassibilité, indifférence, sang-froid.

Encyclopédie Universelle. 2012.