enfiévrer [ ɑ̃fjevre ] v. tr. <conjug. : 6>
• 1588; de en- et fièvre
1 ♦ Vx Rendre fiévreux.
2 ♦ (1775) Mod. et fig. Animer d'une sorte de fièvre, d'une vive ardeur. ⇒ agiter, exalter, surexciter. « Une liberté maladroite qui enfièvre tout un peuple » (Camus). Pronom. « Des camarades, qui s'enfièvrent pour la politique » (G. Lecomte). ⇒ se passionner.
♢ Par ext. Lecture, photo qui enfièvre l'imagination. P. p. adj. Une atmosphère enfiévrée.
⊗ CONTR. Apaiser.
● enfiévrer verbe transitif Donner la fièvre à quelqu'un, le rendre fiévreux : Le rhume l'a enfiévré. Surexciter quelqu'un, l'enflammer ; exalter : Enfiévrer les passions. ● enfiévrer (difficultés) verbe transitif Conjugaison Attention à l'accent, tantôt grave, tantôt aigu : j'enfièvre, nous enfiévrons, j'enfiévrais, il enfiévrera. ● enfiévrer (synonymes) verbe transitif Surexciter quelqu'un, l'enflammer ; exalter
Synonymes :
- exalter
- exciter
Contraires :
- apaiser
- calmer
enfiévrer
v. tr.
d1./d Donner la fièvre à.
d2./d Fig. Exciter, susciter l'ardeur de. Une agitation qui enfiévrait les esprits. Syn. passionner, exalter.
|| v. Pron. Il s'est enfiévré à cette idée.
⇒ENFIÉVRER, verbe trans.
A.— Emploi trans.
1. Rare. Rendre fiévreux. Mon vaccin prend férocement et m'enfièvre (GIDE, Journal, 1914, p. 476).
2. Au fig., usuel.
a) [Le compl. d'obj. désigne une pers., un groupe de pers.] Mettre dans un état d'agitation fébrile, d'intense excitation psychique. Synon. agiter, enflammer, exciter. La haute beauté, la douceur, les souvenirs qu'évoquait Donna Marie l'enfiévraient [Antoine] sensuellement (NOAILLES, Domination, 1905, p. 240). Si les conseils et l'exemple d'une sœur intransigeante doivent un jour l'enfiévrer, la conduire à des outrances fâcheuses, on peut être sûr que cette âme, foncièrement sainte, reprendra bientôt son équilibre (BREMOND, Hist. sent. relig., t. 4, 1920, p. 212) :
• 1. Quelquefois (...) je parlais avec éloquence à mon père de la chose que je voulais acheter; sans m'en douter, je l'enfiévrais (je lui donnais un peu de ma passion) et alors (...) il me donnait tout ce qu'il fallait.
STENDHAL, Vie de Henry Brulard, t. 1, 1836, p. 231.
b) [Le compl. désigne une partie du corps] Mettre dans un état semblable à l'état fébrile. Le sommeil du palais, le calme de la nuit, le silence de la place enfiévraient son pouls, agitaient son esprit, rendant sa rêverie prolixe et son imagination osseuse (PÉLADAN, Vice supr., 1884, p. 8).
c) [Le compl. d'obj. désigne un sentiment, une sensation] Rendre fébrile, plus fébrile. Ils goûtaient alors une joie aiguë, qu'enfiévrait le sentiment que cette trève durerait peu (ARLAND, Ordre, 1929, p. 385).
B.— Emploi pronom.
1. [Le suj. désigne une pers., un groupe de pers.] Se mettre dans un état d'excitation, d'agitation, d'exaltation. Synon. s'exalter, s'exciter, se passionner. L'Allemand, lui, s'irritait et s'enfiévrait, rageait de perdre ainsi sans comprendre pourquoi (VAN DER MEERSCH, Invas. 14, 1935, p. 173). L'Occident, dans ses grandes créations, ne se borne pas à retracer sa vie quotidienne. Il se propose sans arrêt de grandes images qui l'enfièvrent et se jette à leur poursuite (CAMUS, Homme rév., 1951, p. 320).
— [Avec un compl. prép. de indiquant la cause] Ceux-là sont des enfants qui, s'enfiévrant de l'œuvre déjà accomplie, croient qu'il leur suffirait maintenant d'un décret, d'un « fiat lux » prolétarien pour faire surgir d'emblée le monde socialiste (JAURÈS, Ét. soc., 1901, p. 148).
2. [Le suj. désigne une sensation, un sentiment] Devenir fébrile, plus fébrile :
• 2. En s'affirmant, ils [les sentiments collectifs] s'exaltent, s'enfièvrent, atteignent un degré de violence qui se traduit par la violence correspondante des gestes qui les expriment.
DURKHEIM, Les Formes élémentaires de la vie relig., 1912, p. 582.
3. [Le suj. désigne une activité hum.] Devenir plus actif, plus hâtif. Les préparatifs de défense s'enfiévraient d'heure en heure (ZOLA, Débâcle, 1892, p. 569).
Rem. On rencontre ds la docum. qq. attest. du part. prés. enfiévrant, ante, employé comme adj. Comme elle était jolie, enfiévrante! Ses désirs (...) se réveillaient devant cette enfant singulière, si fraîche, irritante et inexplicable (MAUPASS., Contes et nouv., t. 2, Yvette, 1884, p. 506).
Prononc. et Orth. :[], (j')enfièvre []. PASSY 1914 admet [] (sur fièvre) et [] qui résulte de l'harmonis. vocalique. Ds Ac. 1932. Conjug. Change [e] fermé du rad. en [] ouvert devant syllabe muette sauf au fut. et au cond. j'enfiévrerai(s). Étymol. et Hist. 1588 « rendre fiévreux » (MONTAIGNE, Essais, éd. A. Thibaudet, livre 3, chap. 12, p. 1176). Dér. de fièvre; préf. en-; dés. -er. Fréq. abs. littér. :107. Bbg. QUEM. 2e s. t. 1 1970.
enfiévrer [ɑ̃fjevʀe] v. tr. [CONJUG. céder.]
ÉTYM. 1588; de en-, fièvre, et suff. verbal.
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1 Vx. Rendre fiévreux. || Enfiévrer le pouls, la tête.
2 (1775). Fig. Mod. Animer (qqn) d'une sorte de fièvre, d'une vive ardeur. ⇒ Agiter, animer, exciter, surexciter. || La présence de cette inconnue l'enfiévrait. ⇒ Troubler. || La passion l'enfièvre. ⇒ Brûler, enflammer, exalter. — L'allégresse enfiévrait la foule.
1 (…) il exhale un tel feu qu'il m'a presque enfiévré de sa passion (…)
Beaumarchais, le Barbier de Séville, II, 4.
2 On eût dit les cris espagnols autour d'une danseuse qu'il s'agit d'enfiévrer.
M. Barrès, Leurs figures, p. 262.
3 (…) une sorte d'excitation hagarde, une liberté maladroite qui enfièvre tout un peuple.
Camus, la Peste, p. 138.
♦ Par ext. || Enfiévrer l'âme, l'imagination de qqn.
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s'enfiévrer v. pron.
♦ Fig. ⇒ Enthousiasmer (s'), passionner (se).
3.1 Il serait facile de noter les petits ridicules de Barrès. Aucun auteur de mon âge ne m'exaspère à ce point, ou ne me fait si souvent sourire. Remarquez d'abord la manie qu'il a de s'enfiévrer à tout propos.
J. Renard, Journal, 27 avr. 1894.
4 Dans la cour et les couloirs de l'École de Droit, sur les travées des amphithéâtres, je me lie avec des camarades qui, au milieu des luttes parlementaires d'alors, s'enfièvrent pour la politique, brûlent de s'y mêler et, en attendant, se plaisent à des simulacres qui leur en donnent l'illusion.
Georges Lecomte, Ma traversée, p. 160.
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enfiévré, ée p. p. adj.
1 Vx. Qui a de la fièvre. ⇒ Fiévreux. — Qui marque la fièvre. || Une voix enfiévrée.
2 Qui est dans un état d'exaltation, d'excitation. || Des gens enfiévrés; une foule enfiévrée. || Enfiévré d'héroïsme, de passion. — Qui dénote l'exaltation. || Une voix enfiévrée (de, par la passion). Spécialt. Passionné. || Une étreinte enfiévrée.
4.1 Guillaume, lui, sentait renaître son soupçon, cette inquiétude d'avoir vu Marie enfiévrée et changée par un sentiment nouveau, ignoré d'elle-même.
Zola, Paris, t. II, p. 139.
3 Empreint d'exaltation. ⇒ Fébrile.
5 Sous la profusion des images, l'heureuse vivacité du coloris, la musique enfiévrée du rythme lyrique ou la mollesse de l'élégie, c'est là son thème essentiel (…)
Émile Henriot, Portraits de femmes, p. 450.
4 Qui est le siège d'une activité fiévreuse, fébrile. || Une époque enfiévrée. || « Ce chantier enfiévré de travail » (Zola).
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CONTR. Apaiser, calmer. (Du p. p.) Calme.
DÉR. Enfièvrement.
Encyclopédie Universelle. 2012.