affaire [ afɛr ] n. f. I ♦
1 ♦ Ce que qqn a à faire, ce qui l'occupe ou le concerne. C'est mon affaire, et non la vôtre. Occupez-vous de vos affaires (cf. fam. De vos oignons). « Il aimait à se mêler des affaires d'autrui » (Romains). Loc. Toute(s) affaire(s) cessante(s). J'en fais mon affaire : je me charge de faire aboutir cette affaire, de la résoudre.
♢ Ce qui intéresse particulièrement qqn, lui convient. J'ai là votre affaire, vous en serez satisfait. Loc. Être à son affaire : faire ce que l'on aime et que l'on sait faire. Faire son affaire à qqn, le châtier, le vaincre; pop. le tuer. Je lui ferai son affaire (cf. Régler son compte à qqn). Faire l'affaire : convenir. Cela doit faire l'affaire. Cet horaire ne fait pas mon affaire, ne m'arrange pas.
2 ♦ Affaire de..., affaire où (qqch.) est en jeu. ⇒ question. Une affaire d'honneur, de conscience, de cœur, de gros sous. C'est (une) affaire de goût, qui ne relève que du goût de chacun. — Absolt L'affaire : la chose en question. « Le temps ne fait rien à l'affaire » (Molière). C'est une autre affaire : c'est un problème tout différent, où d'autres facteurs interviennent (cf. C'est une autre histoire, une autre paire de manches). C'est une affaire entendue.
3 ♦ Ce qui occupe de façon embarrassante. ⇒ difficulté, ennui. C'est toute une affaire, ce n'est pas une mince affaire : c'est très difficile et compliqué. ⇒fam. binz . En faire toute une affaire (cf. fam. En faire tout un plat, un fromage). C'est l'affaire d'une seconde : cela peut s'arranger très vite. La belle affaire ! exclamation ironique par laquelle on dénie de l'importance à ce qui vient d'être dit (cf. Et après, qu'importe). Une fâcheuse, une sale affaire : un embêtement, un gros ennui.
♢ Danger. Se tirer d'affaire : se sortir d'une situation pénible, difficile ou dangereuse. Être hors d'affaire.
4 ♦ Ensemble de faits créant une situation compliquée, où diverses personnes, divers intérêts sont aux prises. C'est une affaire délicate, épineuse. Une affaire d'État. Je ne veux pas intervenir dans cette affaire. Il faut tirer cette affaire au clair. On a voulu étouffer l'affaire. ⇒ scandale. Quelle affaire ! ⇒ histoire.
♢ Spécialt Scandale social, politique venant à la connaissance du public. Une affaire de fausses factures. « Secoués par une “affaire” de délit d'initié » (L'Express, 1989). « Beaucoup trop d'“affaires” accumulées, ces dernières années, beaucoup trop de coupables couverts ou miraculeusement dédouanés » (Pennac).
♢ Événement, crime posant une énigme policière. L'affaire de la rue X.
5 ♦ Procès, objet d'un débat judiciaire. Saisir le tribunal d'une affaire. Instruire, juger, plaider une affaire civile, correctionnelle. ⇒ cause. L'affaire Dreyfus.
♢ Querelle entraînant un duel. Les témoins ont essayé d'arranger l'affaire.
6 ♦ Combat, conflit militaire ou diplomatique. « Et maintenant buvons, car l'affaire était chaude » (Hugo). L'affaire d'Algérie.
7 ♦ Marché conclu ou à conclure avec qqn. « L'affaire qu'on me propose est mauvaise » (Maurois). Vous avez fait une bonne affaire, une affaire en or, et absolt une affaire. Cette occasion est une affaire, un achat avantageux. L'affaire du siècle. L'affaire est dans le sac. Faire affaire avec qqn. ⇒ traiter. « Ils se tapèrent dans la main pour indiquer que l'affaire était faite » (Maupassant).
8 ♦ Entreprise commerciale ou industrielle. Être à la tête d'une grosse affaire. Lancer, gérer une affaire. Il est intéressé dans l'affaire.
♢ Plur. LES AFFAIRES : les activités économiques (notamment dans leurs conséquences commerciales et financières). ⇒fam. business. Les affaires sont calmes, reprennent. Il est dans les affaires. Homme (⇒ businessman) , femme d'affaires. Il est dur en affaires. Repas d'affaires. Voyage d'affaires (par oppos. à d'agrément). Loc. prov. « Les affaires sont les affaires » (Mirbeau) :il ne faut pas en affaires s'embarrasser de sentiments, de scrupules. Lettre d'affaires. Agents, cabinets d'affaires, qui se chargent de conseiller les placements ou de gérer les biens de leurs clients. — Chiffre d'affaires.
9 ♦ AVOIR AFFAIRE. Vx Avoir affaire de, besoin de. « Qu'un lion d'un rat eût affaire » (La Fontaine). « Qu'ai-je affaire d'aller me tuer pour des gens ? » (Montesquieu). — Mod. Avoir affaire à qqn : se trouver en rapport avec qqn. J'ai déjà eu affaire à lui. Avoir affaire à forte partie. « J'ai affaire en vous à un galant homme » (Loti). Vous aurez affaire à moi ! formule de menace (cf. Vous aurez de mes nouvelles).
II ♦ Au plur.
1 ♦ Ensemble des occupations et activités d'intérêt public. Les affaires publiques. « Les affaires d'un État sont d'une étendue que l'esprit d'un homme n'embrasse point » (France). Ministère des Affaires étrangères. Chargé d'affaires. S'occuper des affaires communales. Expédier les affaires courantes.
2 ♦ Situation matérielle d'un particulier. Mettre de l'ordre dans ses affaires.
♢ Fam. État dans le développement d'une intrigue, d'une aventure amoureuse. Où en sont tes affaires ? Cela fera avancer mes affaires.
4 ♦ Objets ou effets personnels. Ranger ses affaires. « il considérait avidement toutes ces affaires de femmes » (Flaubert). Fouiller dans les affaires de qqn.
● affaire nom féminin (de à et faire) Ce qui est à faire, ce dont quelqu'un doit s'occuper : C'est une affaire qui peut attendre. Ce qui concerne quelqu'un : Il fait ce qu'il veut, c'est son affaire. Domaine qui relève de quelqu'un, qui lui convient parfaitement : La mécanique, c'est son affaire. Ce qui relève de quelque chose ; question, problème : Une affaire d'honneur, de cœur. Source de préoccupations, de difficultés ; situation dangereuse, périlleuse : Cette erreur, ce n'est pas une affaire. Situation plus ou moins complexe qui fait l'objet d'un examen, d'une enquête ou d'une certaine publicité : Affaire policière, politique. Situation délictueuse, dont le règlement est confié à la justice ; litige, procès : Instruire une affaire. Entreprise commerciale ou industrielle : Diriger une affaire. Transaction commerciale, marché, spéculation : Négocier, conclure une affaire. Transaction commerciale avantageuse : À ce prix-là, c'est une affaire. Engagement militaire, combat localisé. Populaire. Coup, vol, hold-up, etc. : Être sur une affaire. ● affaire (citations) nom féminin (de à et faire) Theodor Fontane Neuruppin, Brandebourg, 1819-Berlin 1898 Notre affaire ce n'est pas la joie de vivre, ce n'est même pas l'amour, l'amour véritable, notre affaire c'est le devoir. Et c'est là quelque chose de spécifiquement prussien. Was uns obliegt, ist nicht die Lust des Lebens, auch nicht einmal die Liebe, die wirkliche, sondern lediglich die Pflicht. Es ist dies außerdem auch etwas speziell Preußisches. Der Stechlin ● affaire (difficultés) nom féminin (de à et faire) Orthographe 1. Toutes affaires cessantes (= sans délai), s'écrit de préférence au pluriel : je dois lui parler, toutes affaires cessantes. 2. Avec ou sans majuscule, selon le sens. Les Affaires étrangères, les Affaires maritimes, avec un A majuscule, parce qu'il s'agit d'une administration centrale ; mais les affaires municipales, les affaires de l'État, sans majuscule, affaires désignant simplement ici ce qui fait l'objet d'une gestion publique. L'affaire Dreyfus (sans majuscule) mais, pour la désigner absolument : l'Affaire (avec un grand A). 3. Avoir affaire / avoir à faire, en un mot ou en deux mots. Bien distinguer ces deux expressions. Avoir affaire à = trouver devant soi. Tu auras affaire à moi (formule de menace) ; il a eu affaire au directeur (= c'est le directeur qu'il a rencontré) ; nous avons affaire à un cas rare (= nous nous trouvons en présence d'un cas rare). Avoir à faire(qqch) / avoir à faire = être dans l'obligation de faire qqch ; devoir s'acquitter de plusieurs obligations : j'ai à faire une course, j'ai une course à faire ; j'ai beaucoup à faire, j'ai fort à faire et, absolument, j'ai à faire (= je suis occupé). ● affaire (expressions) nom féminin (de à et faire) Avoir affaire à quelqu'un, devoir s'adresser à lui, ou, familièrement, risquer des représailles de sa part. Avoir affaire avec quelqu'un, être en rapport avec lui pour traiter quelque question. Familier. La belle affaire !, qu'importe !, qu'est-ce que cela fait ! Ce n'est pas une petite, une mince affaire, c'est toute une affaire, c'est une chose difficile, compliquée. C'est l'affaire d'un instant, d'une seconde, etc., cela peut être réglé rapidement, facilement. C'est une affaire entendue, une affaire faite, c'est une chose sûre. C'est une autre affaire, cela change tout. En faire son affaire, s'en charger personnellement. Être à son affaire, faire une chose à laquelle on prend un vif intérêt ou qui relève directement de sa compétence. Être hors d'affaire, être sorti d'une situation difficile. Faire affaire (avec quelqu'un), conclure une transaction (avec lui). Faire l'affaire, en parlant de quelqu'un, convenir à un emploi, à une fonction ; en parlant de quelque chose, correspondre à ce qui est recherché. Faire l'affaire de quelqu'un, être utile, profitable à quelqu'un, l'arranger. Populaire. Faire, régler son affaire à quelqu'un, le tuer. Ne rien faire à l'affaire, n'y jouer aucun rôle, n'y rien changer. Sortir, tirer quelqu'un d'affaire, le sortir d'une situation difficile ou dangereuse. ● affaire (synonymes) nom féminin (de à et faire) Ce qui est à faire, ce dont quelqu'un doit s'occuper
Synonymes :
- activité
- devoir
- travail
Ce qui concerne quelqu'un
Synonymes :
- histoire
- préoccupation
- souci
Ce qui relève de quelque chose ; question, problème
Synonymes :
- problème
- question
Source de préoccupations, de difficultés ; situation dangereuse, périlleuse
Synonymes :
- difficulté
- embarras
- ennui
- histoire (familier)
- souci
Situation plus ou moins complexe qui fait l'objet d'un examen...
Synonymes :
- démêlé
- scandale
Situation délictueuse, dont le règlement est confié à la justice ;...
Synonymes :
- litige
- procès
Engagement militaire, combat localisé.
Synonymes :
- attaque
- bataille
- combat
affaire
n. f.
rI./r
d1./d Ce qui concerne l'intérêt personnel de qqn. C'est mon affaire: cela ne concerne que moi. J'en fais mon affaire: je m'en charge. Cela ferait bien mon affaire: cela me conviendrait.
|| (Plur.) Objets personnels, vêtements. Il ne retrouve jamais ses affaires.
|| (Québec) Fam. Une affaire: un truc, un machin. Une affaire en bois.
— (Acadie) Une petite affaire: un petit peu. Prendre une petite affaire de sucre dans son café.
d2./d Ensemble de circonstances où des intérêts divers sont en jeu, s'opposent, s'affrontent. être mêlé à une affaire de pots-de-vin.
d3./d Ensemble de difficultés avec lesquelles une personne est aux prises; tracas, ennui. Il s'est attiré une vilaine affaire.
— Fam. Ce n'est pas une affaire!: cela n'est pas bien grave.
|| Tirer qqn d'affaire, lui épargner une difficulté, le sauver d'un danger.
d4./d Ensemble de faits dont la justice a à connaître. Plaider une affaire. Affaire criminelle.
|| Délit ou crime sur lequel la police est chargée d'enquêter. "L'Affaire Saint-Fiacre" (titre d'un roman de Simenon).
d5./d Conflit.
|| Conflit international, militaire ou diplomatique. L'affaire de Suez.
|| Combat, engagement de troupes. L'affaire fut chaude.
rII./r
d1./d Affaire de..., qui concerne... Affaire d'honneur, où l'honneur est en jeu (spécial., par euph.: duel).
— Affaire de coeur: intrigue galante, amourette.
|| C'est une affaire de goût: cela dépend du goût de chacun.
— C'est une affaire d'habitude: il ne s'agit que de s'exercer, de s'accoutumer.
d2./d Avoir affaire à quelqu'un, lui parler, traiter ou négocier avec lui.
|| Vous aurez affaire à moi! (avertissement menaçant).
|| (Québec) Avoir affaire à (quelque part): avoir besoin d'aller à. Elle a affaire à la banque ce matin.
d3./d (Belgique) Pop. être en affaire: être affairé.
d4./d (Antilles fr.) Pop. être en affaires avec (qqn): être fâché avec (qqn), en vouloir à (qqn).
— (à propos d'un enfant.) être en affaires: avoir des occupations qui ne sont pas de son âge.
rIII/r Entreprise industrielle ou commerciale. L'affaire a été reprise par une société étrangère.
rIV./r
d1./d Transaction, marché. Voilà une affaire conclue! Il a fait une affaire, une bonne affaire, une transaction avantageuse.
|| (Plur.) Opérations financières, commerciales; spéculations. Cette maison fait beaucoup d'affaires. Chiffre d'affaires. Homme, femme d'affaires. Les affaires sont les affaires: quand il s'agit d'intérêt, les autres considérations n'ont pas à intervenir.
|| (Québec) être d'affaires: être habile en affaires, savoir s'y prendre.
d2./d (Plur.) Intérêts pécuniaires d'une personne. Mettre de l'ordre dans ses affaires.
rV./r (Plur.) Tout ce qui concerne l'administration et le gouvernement des choses publiques. Les affaires de l'état.
⇒AFFAIRE, subst. fém.
I.— Action en projet ou en cours, à laquelle une ou plusieurs personnes (agents) sont directement ou indirectement intéressées.
A.— L'action est un projet ou se trouve à son stade initial.
1. Avec une idée d'obligation, de responsabilité : ce que l'on a à faire.
[L'agent est exprimé]
a) [Par le suj. du verbe] J'ai affaire :
• 1. ... « Il le faut, monsieur. Je vais rejoindre mon mari à Paris; nos places sont retenues pour mardi prochain. — Je suis mortifié que votre départ soit aussi prompt! J'ai affaire où vous allez; je vous aurais accompagnée. »
N.-E. RESTIF DE LA BRETONNE, Monsieur Nicolas, 1796, p. 111.
• 2. Aussitôt madame Servigné s'écria : « Mais, ma nièce, nous irons tous! ... »
— Non pas moi, dit Charles avec un embarras visible, car j'ai précisément affaire à cette heure-ci.
H. DE BALZAC, Annette et le criminel, t. 1, 1824, p. 138.
b) [Par un adj. poss.] C'est votre affaire :
• 3. Toutes les choses qui sont aisées à bien dire ont été parfaitement dites; le reste est notre affaire ou notre tâche :tâche pénible!
J. JOUBERT, Pensées, t. 1, 1824, p. 433.
• 4. ... la politique! C'était son affaire, après tout.
E. DABIT, L'Hôtel du Nord, 1929, p. 194.
Rem. On trouve au XIXe s. dans la lang. fam. c'est affaire à + pron. pers. :
• 5. Ce Godefroid était un malin compère, il les savait toutes, monsieur. Ah! c'était affaire à lui pour découvrir un voleur.
F. VIDOCQ, Mémoires de Vidocq, Chef de la Police de sûreté jusqu'en 1827, t. 4, 1828-1829, p. 17.
— [Avec un compl. prép. (de) marquant l'obj. de l'obligation ou de la responsabilité] Je fais mon affaire de qqc. ou qqn :
• 6. — Votre mari? ... Oh! Lui, j'en fais mon affaire!
G. FEYDEAU, La Dame de chez Maxim's, 1914, I, 10, p. 17.
c) [Par un compl.] :
• 7. L'art n'a point pour objet de vaincre les passions, ce qui est l'affaire de la morale, mais bien de les ordonner, par un besoin profond de notre esprit de conquête qui constitue précisément une passion.
É. FAURE, L'Esprit des formes, 1927, p. 277.
[L'agent est exprimé]
a) [Par le suj. et un adj. poss.] Il est à son affaire :
• 8. Aussi le comte avait-il toujours fort ménagé ses sujets. Pour ne les point mécontenter, il ne s'était pas jeté dans les guerres qui l'environnaient; mais il était très-adonné à ses plaisirs, et en faisait sa seule affaire.
P. DE BARANTE, Hist. des ducs de Bourgogne, t. 1, 1824, p. 153.
— Loc. Être à son affaire :
• 9. PETYPON. — Évidemment, parce qu'alors ce ne serait plus un duel; cela reviendrait à une opération chirurgicale : tu serais à ton affaire! ...
G. FEYDEAU, La Dame de chez Maxim's, 1914, III, 6, pp. 60-61.
• 10. Il semblait n'être pas à son affaire tant qu'il n'avait pas trouvé un prétexte pour rire, et tout lui était prétexte; ...
H. DE MONTHERLANT, Les Jeunes filles, 1936, p. 994.
b) [Par le poss. seul] :
• 11. [BEAUCHÊNE. —] Les blondes, pourtant, ne sont guère mon affaire. Mais, celle-ci, je suis curieux de la voir au lit.
É. ZOLA, Fécondité, 1899, p. 64.
c) [Par le suj. seul] Avoir affaire à qqn/qqc :
• 12. Il avait avec lui deux hommes et se mit à l'œuvre sans beaucoup de précautions, croyant n'avoir affaire qu'à des femmes. Mais il se trompait. Le frère de Carmen, don Juan, était arrivé le soir.
A. DE GOBINEAU, Les Pléiades, 1874, p. 219.
• 13. Mais par un scrupule (dont je ne me fais pas gloire) je cherche à ne leur rien demander. Aussi ai-je affaire continuellement à ces petites taquineries de la médiocrité qui sont énervantes. Il faut que nous soyons riches.
J. RIVIÈRE, ALAIN-FOURNIER, Correspondance, lettre de J. R. à A.-F., nov. 1906, p. 309.
• 14. Il vaut mieux avoir affaire au bon Dieu qu'à ses saints.
Ch. PÉGUY, Le Porche du mystère de la 2e vertu, 1911, p. 202.
• 15. C'était le capitaine de Hauteclocque. Il arrivait de France, par l'Espagne, la tête bandée sur une blessure qu'il avait reçue en Champagne et passablement fatigué. Il vint se présenter à moi qui, voyant à qui j'avais affaire, réglai sa destination sur-le-champ.
Ch. DE GAULLE, Mémoires de guerre, L'Appel, 1954, p. 93.
Rem. Ce dernier tour est facilement péj.
3. Avec l'accent sur le temps nécessaire pour accomplir une action. C'est l'affaire d'une seconde :
• 16. En considérant monsieur de Lœwenstein, je ne pouvais concevoir qu'il allait acquérir sur moi un empire, en quelque sorte absolu; que ce ne serait plus de mon père, de ma mère, dont la domination est si douce, que je dépendrais; que tout cela serait l'affaire d'une minute, qu'il n'y aurait qu'un mot à prononcer, et que ce mot ferait le destin de ma vie.
G. DE SÉNAC DE MEILHAN, L'Émigré, 1797, p. 1563.
Rem. Dans cette constr., l'agent peut être exprimé par un compl. prép. (pour).
B.— [L'agent est exprimé (adj. poss., suj. de la prop.) ou implicite] L'action est en cours.
1. Lang. commune, légèrement fam. Il a pris l'affaire en main, etc. :
• 17. Je crois vous avoir guérie pour toujours du désir de vous immiscer dans les affaires de votre mari, n'est-ce pas?
L. GOZLAN, Le Notaire de Chantilly, 1836, p. 42.
• 18. — Mais, reprit Amélie, diplomate ou forçat, l'abbé Carlos te désignera quelqu'un pour te tirer d'affaire.
H. DE BALZAC, Splendeurs et misères des courtisanes, 1848, p. 394.
• 19. — C'est pour cela, dit Rocambole, que vous avez été léger en vous mettant une nouvelle affaire sur les bras.
P.-A. PONSON DU TERRAIL, Rocambole, t. 2, Le Club des valets de cœur, 1859, p. 502.
• 20. Il ne faut pourtant pas croire que c'était facile de venir à bout de mon idée en 89, non! Et ce matin même, vers sept heures, au moment où Marguerite passait devant la forge avec son grand panier, pour aller vendre ses brochures, Valentin me rappela lui-même que ce n'était pas une petite affaire.
ERCKMANN-CHATRIAN, Histoire d'un paysan, t. 1, 1870, p. 157.
• 21. — Les sections de l'Institut, voilà leur patrie, leur foyer, leur drapeau. La France ne compte pas, mais ce fut une grande question de savoir si M. Séaille ou Séailles serait ou ne serait pas de l'Académie des sciences morales. Ça c'était une affaire, et une affaire d'État.
Ch. PÉGUY, L'Argent, 1913, p. 1211.
• 22. Et je la nomme ici une hérésie spirituelle et volontiers je la nommerais simplement une hérésie intellectuelle. Pour ne pas me faire d'affaire. Et pour fuir à mon tour les responsabilités.
Ch. PÉGUY, L'Argent, 1913 p. 1289.
• 23. ... eh monsieur si c'est une affaire que vous me cherchez ayez donc l'obligeance de prendre mon livret militaire dans ma poche gauche.
G. APOLLINAIRE, Les Mamelles de Tirésias, 1918, I, 5, p. 891.
• 24. J'avais envie d'y dire : « c'est Mathieu Bomier, çui-là, et y connaît son affaire. »
J. GIONO, Le Grand troupeau, 1931, p. 102.
• 25. — Dudule vous dira que quand je prends une affaire en main, on peut être tranquille.
S. DE BEAUVOIR, Les Mandarins, 1954, p. 288.
Rem. 1. Des adj. ou d'autres déterminants peuvent mettre en relief l'importance (ou l'insignifiance) d'une affaire : c'est toute une affaire; ce n'est pas une affaire; c'est une grosse, une petite affaire, une affaire d'État. Ou encore sa complexité (ou sa simplicité) : c'est une affaire délicate, compliquée, complexe, embrouillée, très simple, difficile, facile. 2. Avec des expr. comme être tiré + compl. sans art., il apparaît une idée de danger : il est tiré d'affaire (ex. 18).
2. Fréq. au plur. Action ou ensemble d'actions ayant une certaine publicité ou notoriété. (Le sens se particularise suivant le domaine ou le cont.).
— COMM. INDUSTR. Toute activité d'achat, d'échange, de vente, ... :
• 26. Nous avons maintenant un marché par semaine, il s'y conclut des affaires assez considérables en bestiaux et en blé.
H. DE BALZAC, Le Médecin de campagne, 1833, p. 52.
• 27. Ce lendemain était un dimanche, jour où il n'y avait ni Bourse ni affaire; les deux époux passèrent alors la journée ensemble, se mettant plus avant au cœur l'un de l'autre qu'ils n'y avaient jamais été...
H. DE BALZAC, Ferragus, 1833, p. 77.
• 28. — Allons, mon cher, on ne refuse pas comme cela... et ce que je t'offre! Je te dis, c'est une grosse affaire :il y a deux cent vrais mille francs derrière... Je te ferai un traité d'un an, si tu veux... une position, songe donc! ...
E. et J. DE GONCOURT, Charles Demailly, 1860, p. 109.
• 29. Au point de vue purement industriel, il est logique, dans l'appréciation des bénéfices, de tenir compte de ce que les commerçants appellent le chiffre d'affaires et de traduire en argent l'importance du trafic; ...
BRICKA, Cours du chemin de fer, 1894, p. 481.
• 30. ... l'emploi du pigeon comme pigeon-messager tomba en désuétude dans les deux derniers siècles; il ne fut repris qu'au commencement de ce siècle et cela au service des hommes d'affaires.
A. LEDIEU, E. CADIAT, Le Nouveau matériel naval, t. 2, 1899, p. 445.
• 31. Les affaires, étant les affaires, sont traitées fort pratiquement.
Ch. MAURRAS, Kiel et Tanger, 1914, p. 101.
• 32. — Il est retraité?
— Oui, maintenant il est retiré des affaires.
— Comment, des affaires?
P. DRIEU LA ROCHELLE, Rêveuse bourgeoisie, 1939, p. 12.
• 33. Je crois qu'elle nous méprisait un peu, mon père et moi, pour notre parti pris d'amusements, de futilités, comme elle méprisait tout excès. Seuls nous réunissaient des dîners d'affaires — elle s'occupait de couture et mon père de publicité —, le souvenir de ma mère et mes efforts, car, si elle m'intimidait, je l'admirais beaucoup.
F. SAGAN, Bonjour tristesse, 1956, p. 19.
— JUST. Procès. Le juge va instruire l'affaire; l'affaire Dreyfus :
• 34. Cette pièce fut aussitôt transmise aux amis du dehors, qui la firent imprimer. Les religieuses signèrent de plus une procuration en règle qui fut mise aux mains d'un procureur pour agir en leur nom. Le procès, sur l'appel comme d'abus, fut près de s'entamer au Parlement; mais un arrêt du Conseil, comme on devait s'y attendre, évoqua l'affaire et coupa court aux procédures.
Ch.-A. SAINTE-BEUVE, Port-Royal, t. 4, 1859, p. 112.
• 35. ... l'agression a eu lieu tout près d'un bec de gaz. On interroge le gendarme qui a aidé à instruire l'affaire; on interroge d'autres témoins : l'un place le bec de gaz à cinq mètres; l'autre à vingt-cinq. Un dernier va jusqu'à soutenir qu'il n'y a pas de bec de gaz du tout à cette partie de la rue.
A. GIDE, Souvenirs de la Cour d'assises, 1913, p. 645.
— ART. MILIT., vx. Engagement au front, combat :
• 36. Entre la Moskowa et Moscou, Murat engagea une affaire devant Mojaïsk. On entra dans la ville : on y trouva dix mille morts et mourants; on jeta les morts par les fenêtres pour loger les vivants.
F.-R. DE CHATEAUBRIAND, Mémoires d'Outre-Tombe, t. 2, 1848, p. 433.
• 37. ... il se fit jour, après avoir laissé défiler la masse de traînards et de blessés au pied de la côte que nous gardions. C'est la dernière affaire du bataillon avant le siège.
ERCKMANN-CHATRIAN, Histoire d'un paysan, t. 2, 1870, p. 104.
— POLITOL. Scandale. L'affaire du collier. Questions du ressort d'un gouvernement, d'un département ministériel, de l'administration publique,... Les affaires étrangères :
• 38. Que dit M. Cottu de la marche des affaires publiques? Il me semble qu'elles s'embrouillent terriblement.
F.-R. DE LAMENNAIS, Lettres inédites... à la baronne Cottu, 1827, p. 183.
• 39. M. le duc de Rauzan, nommé directeur des affaires politiques, pour tenir lieu d'un de ces sous-secrétaires d'État qui devraient exister dans les départements ministériels, seconda mes travaux et montra ce jugement rassis, qualité essentielle du diplomate.
F.-R. DE CHATEAUBRIAND, Mémoires d'Outre-Tombe, t. 3, 1848, p. 233.
• 40. S'il avait tenu un emploi dans une administration privée, on s'en serait tout de suite aperçu; mais il est beaucoup plus difficile de reconnaître la démence ou le délire dans l'administration des affaires de l'État. À ce moment, les employés du Gouvernement formaient des associations et des fédérations, au milieu d'une effervescence dont s'effrayaient le Parlement et l'opinion; ...
A. FRANCE, L'Île des pingouins, 1908, p. 370.
• 41. Quant à nos alliés, à Djibouti comme en Syrie, ils ont, au moins localement, des arrière-pensées et désirent toutes les combinaisons qui les introduiraient dans les affaires françaises.
Ch. DE GAULLE, Mémoires de guerre, L'Appel, 1954, p. 465.
3. [Sans idée de publicité]
a) Affaire (d'honneur). Duel :
• 42. Il [M. de Charlus] n'avait jamais eu d'affaire sans se croire aussitôt valeureux, et identifié à l'illustre connétable de Guermantes, alors que pour tout autre ce même acte d'aller sur le terrain lui paraissait de la dernière insignifiance.
M. PROUST, À la recherche du temps perdu, Sodome et Gomorrhe, 1922, p. 1070.
b) Dans le lang. de l'amour. Relations intimes :
• 43. « Eh quoi! lui dit-elle, ne savez-vous pas que je suis en affaire avec M? — Belle raison, dit-il! Ne m'avez-vous pas laissé mes droits quand vous aviez L, S, N, B, T? — Oh! quelle différence! était-ce de l'amour que j'avais pour eux! Rien, pures fantaisies; mais avec M c'est un sentiment : ...
CHAMFORT, Caractères et anecdotes, 1794, p. 150.
c) Arg. (Dans l'arg. des malfaiteurs.) Vol. L'affaire peut être majeure (considérable), exbrouffée (manquée), chouette (bien faite) [J.-J. CLÉMENS, Écrits composés au bagne de Rochefort, t. 2, 1876, p. 441], filée (coup prémédité) [Dict. complet de l'argot, 1844, p. 24], mûre [L. LARCHEY, Dict. historique d'argot, 1878, p. 4], affaire d'Espagne (vol par correspondance) [BRUANT 1901, p. 446], affaire à la manque [NOUGUIER, Notes manuscrites interfoliées au dict. de Delesalle, 10 janv. 1900, p. 4]. On peut faire ou nourrir une affaire :
• 44. [Elle] me demanda si j'avais quelque affaire en vue (un projet de vol).
F. VIDOCQ, Mémoires de Vidocq, chef de la Police de sûreté jusqu'en 1827, t. 2, 1828-1829, p. 381.
4. Au fig. [En fonction d'attribut du suj., avec ou sans art. indéf., avec un compl. prép. (de) sans art. indiquant une valeur ou une catégorie] Ce qui est dans un rapport de dépendance causale par rapport à cette valeur (a) ou de classification par rapport à cette catégorie (b); ce qui regarde, ce qui relève de, ce qui intéresse. C'est une affaire : a) de goût, d'honneur, d'argent, d'intérêt, de temps; b) d'amour, de galanterie, de courtoisie, de plaisir :
• 45. ... mais le lecteur intelligent voit d'un seul regard que ma proposition transporterait dans les mariages la précision, la facilité, le bon sens, la bonne logique qui se rencontrent dans les affaires de bourse, et qui, par une bévue inexplicable, n'ont pas encore été introduits dans les affaires de cœur.
H. TAINE, Notes sur Paris, Vie et opinions de Monsieur Frédéric-Thomas Graindorge, 1867, p. 172.
• 46. Ce jour-là, malgré l'importance exceptionnelle de la séance, le conseil fut d'ailleurs mené aussi rondement que les autres jours. C'était devenu une affaire d'habitude; ...
É. ZOLA, L'Argent, 1891, p. 266.
• 47. Mais, alors, pourquoi tous les humains, fils d'Adam, n'ont-ils pas des vers dans les intestins? Est-ce affaire de tempérament, de climat, de régime, de genre de vie? Certaines humeurs, plus que d'autres, sont-elles propres au développement des vers? Enfin, pourquoi le créateur, dans sa bonté infinie, aurait-il délibérément, au départ, infligé ce désagrément à l'espèce humaine?
J. ROSTAND, La Genèse de la vie, 1943, p. 28.
Rem. 1. Si le temps est assimilé à une valeur, la constr. c'est une affaire de temps est en oppos. avec c'est l'affaire d'une seconde (cf. supra A 3) :
• 48. De nos jours, un voyage en Russie, en Allemagne, en Italie, en France, en Angleterre, que dis-je? Autour du globe, n'est qu'une affaire de quelques semaines, de quelques mois, de quelques années calculées à une minute près.
F.-R. DE CHATEAUBRIAND, Essai sur les Révolutions, t. 2, 1797, p. 55.
• 49. Son trépas est une affaire d'heures, au pauvre cher homme. Avant mon départ je ne manquerai pas de le lui dire, de façon à ce qu'il se prépare convenablement à faire le grand voyage et qu'il demande pardon au Seigneur d'avoir eu la main un peu lourde avec ces pauvres gens de Presnia...
G. LEROUX, Rouletabille chez le tsar, 1912, p. 47.
Rem. 2. En raison de sa constr. en attribut et de sa valeur gén. classificatrice, affaire de est, dans une certaine mesure, assimilable à une forme d'adj. à laquelle le compl. prép. donne un contenu sém.
Rem. 3. Dans une affaire de goût on sent encore l'allégorie sous-jacente : c'est au goût à décider; peut-être cet emploi est-il apparenté à l'emploi judiciaire du mot affaire.
II.— Chose abstraite ou concrète à laquelle une ou plusieurs personnes sont intéressées.
A.— Chose abstraite
1. [Avec un art. indéf.] Affirmation précédemment exprimée :
• 50. Un soir, il annonça qu'il voulait me parler d'homme à homme, les femmes se retirèrent, il me prit sur ses genoux et m'entretint gravement. J'écrirais, c'était une affaire entendue; je devais le connaître assez pour ne pas redouter qu'il contrariât mes désirs.
J.-P. SARTRE, Les Mots, 1964, p. 129.
2. [Avec un art. déf.] L'objet dont il est question dans un litige, une discussion, etc. :
• 51. Je l'ai faite en vingt-deux jours, dans l'intervalle de longs travaux de poésie. On peut n'être pas de l'avis du Misanthrope, qui pense que le temps ne fait rien à l'affaire.
N. LEMERCIER, Pinto, avertissement, 1800, p. 3.
• 52. Que j'aie copié, selon ce qu'il dit, tout le supplément sous sa dictée, ou que je lui aie déchiffré et expliqué les endroits qu'il n'avait pu lire, faute d'entendre le sens, comme le prouve cette copie même; tout cela ne fait rien à l'affaire.
P.-L. COURIER, Lettre à Monsieur Renouard, 1810, p. 258.
3. [Avec un adj. poss. ou l'art. déf. qui en tient lieu] Ce qu'une personne trouve conforme à son intérêt, ce qui répond à son besoin. Son échec fait mon affaire, cela fera l'affaire :
• 53. C'est égal, deux ou trois douzaines de chemises feraient bien mieux notre affaire.
A. DAUDET, Le Petit Chose, 1868, p. 182.
• 54. J'ai là une belle rouelle de veau, ça fait mon affaire.
M. BARRÈS, Mes cahiers, t. 3, janv.-août 1904, p. 195.
— Arch. Avoir affaire de. Avoir besoin de :
• 55. ... mais le duc de Bourbon, le duc d'Alençon et les jeunes seigneurs ne voulaient point des gens des communes, et disaient que ceux qui n'étaient point de leur avis avaient peur. « Qu'avons-nous affaire de ces gens de boutique? disaient-ils; nous sommes déjà trois fois plus nombreux que les Anglais. »
P. DE BARANTE, Hist. des ducs de Bourgogne, t. 4, 1824, p. 64.
Rem. La lang. class. employait dans le même sens c'est son affaire :
• 56. Quand un gouvernement nous prodigue de grands spectacles, et de l'héroïsme, et des créations, et des destructions sans nombre, on serait tenté de lui répondre : « le moindre grain de mil serait mieux notre affaire », et les plus éclatants prodiges, et leurs pompeuses célébrations, ne sont que des cérémonies funéraires où l'on forme des danses sur des tombeaux. [Citation incomplète, modifiée de La Fontaine, I, 20 : « Mais le moindre grain de mil/ Serait bien mieux mon affaire. »]
B. CONSTANT, De l'Esprit de conquête et de l'usurpation, 1813, p. 166.
4. Faire son affaire à quelqu'un, lui régler son affaire. Lui infliger un châtiment :
• 57. Alors, la bataille faillit s'engager. Des imprécations montaient, une voix cria qu'il fallait faire son affaire à ce cochon de paysan, qui, comme tous les autres, aurait noyé son pain, plutôt que d'en donner une bouchée au soldat.
É. ZOLA, La Débâcle, 1892, p. 158.
• 58. Il [Ragu] hurlait : — Tu oses me dire ça, bougre de saleté! ... Et le nom de l'homme, dis-moi le nom de l'homme, pour que j'aille lui régler son affaire?
É. ZOLA, Travail, 1901, p. 19.
Rem. Arg. Avoir son affaire. Être ivre :
• 59. Je propose l'absinthe... Après quoi j'avais mon affaire, là, dans le solide. (Monselet.)
LARCH. 1861.
B.— Objet concret
1. COMM. Objet correspondant à un désir. (Le vendeur au client) : j'ai votre affaire.
2. Lang. fam.; gén. au plur.
a) Objet d'un usage habituel. Je n'aime pas qu'on fouille dans mes affaires :
• 60. ... dans le placard on ne voyait plus rien de toutes les affaires de Virginie!
G. FLAUBERT, Trois contes, Un Cœur simple, 1877, p. 65.
b) Objets dont l'identité ou le nom précis n'est pas connu ou n'importe pas :
• 61. Il [le révolver] a deux crans de sûreté, six coups, une baguette, un tas d'affaires.
COLETTE, Claudine s'en va, 1903, p. 300.
Rem. Affaires est dans ce dernier cas un synon. noble de mots comme truc, machin, etc.
3. Par euphémisme. Pour désigner des états passagers que la pudeur empêche de désigner par le mot propre :
a) [En parlant d'une femme] Règles :
• 62. [Margot] : — ... Sabordas m'a examinée sur ma demande, parce que l'époque de mes affaires était dépassée depuis deux mois et demi. Il n'y a plus de doute. Je suis chipée.
L. DAUDET, Phryné, 1937, p. 21.
b) Besoins naturels :
• 63. ... des processions de bêtes... s'en allaient à leurs affaires.
É. ZOLA, La Faute de l'abbé Mouret, 1875, p. 1469.
c) Arg., pop. État de grossesse :
• 64. Elle [une fille] marchait avec peine, poussant devant elle un ventre énorme de femme enceinte... [M. GOURD] — ... on ne s'introduit pas chez les gens, avec une affaire pareille cachée sous la peau.
É. ZOLA, Pot-Bouille, 1882, p. 254.
• 65. ... il fallait que les maîtres lui fissent un enfant [à une bonne]... La voix étranglée, elle répétait, entre deux crises :
— Salauds! ... S'il est permis de vous coller une pareille affaire!
É. ZOLA, Pot-Bouille, 1882 p. 369.
Prononc. ET ORTH. :[]. GREV. 1964, § 916-917 fait la rem. suiv. : ,,Dans ces trois expressions [avoir affaire à; - avec; - de] l'usage est d'écrire affaire, en un mot, mais cette orthographe se fonde sur des habitudes prises plutôt que sur des raisons de sens. L'Office de la Langue française (cf. Figaro, 5 févr. 1938) acceptait avoir à faire à aussi bien que avoir affaire à. Pour Littré écrire avoir à faire de « ne peut être considéré comme une faute; car à faire ici convient mieux que affaire ». En fait, pour les trois expressions, il n'est pas rare de rencontrer l'orthographe à faire.`` Enq. :/afe2/.
Étymol. ET HIST. — 1. Ca 1150 « ce que l'on a à faire » (WACE, Conception de Notre-Dame, éd. Ashford, 61 ds KELLER, Voc. Wace, 148 b : Quant il ot bien fait son afaire, O sa gent se mist el repaire); 1160-1174 « ce que l'on fait, la situation » (ID., Rou, éd. Andresen, III, 10608, ibid. :Li reis, qui esteit a Wincestre, Oï del duc l'afaire e l'estre); 1155 « ensemble de choses, de faits concernant qqn, un groupe de personnes » (ID., Brut, éd. Arnold, 4558, ibid. :Lur covenant unt afermé E lur afaire purparlé); 1172-1174 « ensemble de faits, d'éléments liés entre eux » (G. DE PONT-STE-MAXENCE, Vie de saint Thomas, éd. Walberg, 2312 : Quant sout que cist afaires fu issi atornez, De nuit est a la curt priveement alez); d'où différents emplois spécialisés : a) 1508-09 « ce qui a pour objet les intérêts publics » (Compte de André Meliart, A. Mun. Nevers CC 84 ds GDF. Compl. :A Gilbert Pinchard, apothicaire, 7 livres tournois pour plusieurs drogues et medicines par lui fournies pour la maladie de Louis Genest, concierge de la ville, a lui advenue sur les ponts de Loire en exerçant son office aux affaires de la ville); b) 1690 « ensemble de faits créant une situation compliquée » (FUR. : Affaire. Se dit aussi des querelles, des combats, des brouilleries d'amitié. Il y a une grande affaire à la Cour); c) 1690 dr. « procès » (ID. : Affaire. Se dit particulierement des proces. Celuy qui n'entend point les affaires, ne doit point se meler de plaider); d) 1690 « entreprise commerciale ou industrielle » (ID. : On appelle Gens d'affaires, les Financiers, les Traittans et Partisans qui prennent les Fermes du Roy, ou le soin du recouvrement des impositions qu'il fait sur les peuples); e) 1694 milit. (Ac. éd. 1695 s.v. faire : Affaire... Il se dit aussi des Occasions de guerre. C'est un homme qui a bien veu des affaires); 2. 1172-1174 avoir afaire de « avoir besoin de (qqc.) » (CH. DE TROYES, Chevalier à la Charrette, éd. Fœrster, 2816 : Et tu avras ancor a feire De m'äie); 3. 1215 « objets, effets personnels » (La Vie de Saint Grégoire le Grand, éd. P. Meyer ds Romania, XII, 1883, 180, 2113 : Livres, reliques, vestimenz Ovec meintes autres afaires Qui a lui furent necessaires).
STAT. — Fréq. abs. litt. :21 678. Fréq. rel. litt. :XIXe s. : a) 34 151, b) 34 604; XXe s. : a) 31 049, b) 25 836.
BBG. — AC. CAN.-FR. 1968. — BAILLY (R.) 1969 [1946]. — BAR 1960. — BAUDHUIN 1968. — BAUDR. Chasses 1834. — BÉL. 1957. — BÉNAC 1956. — BLANCHE 1857. — BOISS.8. — BRUANT 1901. — Canada 1930. — CAP. 1936. — DAIRE 1759. — DUB. Pol. 1962, p. 88, 91, 121, 135, 187. — DUP. 1961. — DUPIN-LAB. 1846. — ESN. 1965. — ESN. Poilu 1919. — FÉR. 1768. — GIR. t. 2 Rem. 1834, pp. 3-5. — GOTTSCH. Redens. 1930, p. 328, 390, 392, 404, 438. — GRAND'COMBE (F. de). Businessman et homme d'affaires. Fr. mod. 1956, t. 24, p. 14. — HANSE 1949. — KOLD. 1902. — KUHN 1931, p. 127, 224. — LACR. 1963. — LAF. 1878. — LAF. Suppl. 1878. — LARCH. 1880. — Lar. comm. 1930. — LA RUE 1954. — LAV. Diffic. 1846. — LECNAM. Quelques questions de grammaire. L'Intermédiaire des chercheurs et des curieux. 1895, t. 32, col. 176. — LEP. 1948. — LE ROUX 1752. — MARCEL 1938. — MAT. Louis-Philippe 1951, p. 29, 231. — MICHEL 1856. — PAVOT (T.). Quelques questions de grammaire. L'Intermédiaire des chercheurs et des curieux. 1895, t. 32, col. 218. — POPE 1961, § 777. — PRÉV. 1755. — RÉAU-ROND. 1951. — ROMEUF t. 1 1956. — SAIN. Lang. par. 1920, p. 366. — SANDRY-CARR. Courses 1963. — SARDOU 1877. — THOMAS 1956. — TILANDER (G.). Notes d'étymologie française. Romania. 1926, t. 52, p. 468. — VINC. 1910.
affaire [afɛʀ] n. f.
ÉTYM. V. 1150, n. m.; l'affaire de qqn « ce qui le concerne », v. 1155; XVe, n. f.; de à, et faire.
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———
1 Ce que qqn doit faire, a à faire, ce qui l'occupe ou le concerne. ⇒ Activité, occupation. || Il s'occupe d'une affaire grave. || Vous savez que c'est une affaire importante, urgente. || Il espère que ce sera une affaire sans conséquence. || Une affaire embarrassante. || Une affaire strictement personnelle (cit. 3). — L'affaire, les affaires de qqn : celle(s) dont il s'occupe, qui le concerne(nt). || Vaquer à ses affaires.
1 Tâche de t'en tirer et fais tous tes efforts,
Car pour moi j'ai certaine affaire
Qui ne me permet pas d'arrêter en chemin.
La Fontaine, Fables, III, 5.
2 Les tiens et toi pouvez vaquer
Sans nulle crainte à vos affaires.
La Fontaine, Fables, II, 15.
3 Cliton n'a jamais eu, toute sa vie, que deux affaires qui est de dîner le matin et de souper le soir.
La Bruyère, les Caractères, XI, 122.
2 Affaire de… : affaire où (qqch.) est en jeu. ⇒ Question. || Une affaire d'intérêt, d'argent, de gros sous. || Une affaire de galanterie, de plaisir. ⇒ Histoire, intrigue. — Vx. || Affaire d'amour : aventure galante. — Absolt et vx. || Une affaire : une affaire galante (→ ci-dessous, cit. 11). — Littér. || Affaire d'honneur ou, absolt, affaire : question qui engage l'honneur. ⇒ Duel.
♦ Absolt. || L'affaire : ce dont il est question. || Le temps ne fait rien à l'affaire : le temps importe peu.
♦ Votre, son affaire; cette affaire; l'affaire : l'affaire dont il est question.
4 Sire, j'en ai trop dit, mais l'affaire vous touche.
Corneille, Horace, V, 3.
5 Croit-il être le seul qui ne soit pas content
N'ai-je en l'esprit que son affaire ?
La Fontaine, Fables, VI, 11.
6 Pour venir à notre affaire,
Mes contes, à son avis,
Sont obscurs (…)
La Fontaine, Fables, VIII, 13.
7 Si quelque affaire t'importe,
Ne la fais point par procureur.
La Fontaine, Fables, XI, 3.
8 Voyons un peu votre affaire.
Molière, le Bourgeois gentilhomme, I, 2.
9 Je ne veux point aujourd'hui d'autres affaires que de plaisir.
Molière, le Sicilien, XIX.
10 Il veut qu'on le consulte sur toutes les affaires d'esprit.
Molière, Critique de l'École des femmes, V.
11 (…) qu'aux dernières faveurs on ne pousse l'affaire
Molière, Tartuffe, IV, 5.
REM. Comme on le voit à ces exemples, la langue classique emploie également le mot, absolument ou qualifié, pour les questions d'intérêt (emploi resté moderne) et pour les questions sentimentales et galantes (ce dernier usage étant devenu archaïque).
3 (L'affaire de qqn, son affaire). Ce qui intéresse particulièrement qqn, lui convient. || J'ai là votre affaire, vous en serez satisfait. — C'est mon (ton, son, etc.) affaire, et, au plur., ce sont mes affaires : cela ne regarde que moi (toi, lui, etc.).
12 Je m'en tais, et ne veux leur causer nul ennui (aux plagiaires) :
Ce ne sont pas là mes affaires.
La Fontaine, Fables, IV, 9.
13 Les doctes entretiens ne sont pas mon affaire.
Molière, les Femmes savantes, III, 4.
14 (…) le reste ne nous regarde point, c'est l'affaire des autres.
La Bruyère, les Caractères, II, 9.
15 Je n'entre point dans la politique (…) La politique n'est pas mon affaire.
Voltaire, À Frédéric, nov. 1769.
16 (…) si papa se refuse à rembourser cet emprunt, après tout c'est son affaire (…)
G. Duhamel, Chronique des Pasquier, I, 11.
17 Mais le langage est notre affaire à tous, quel que soit notre état.
G. Duhamel, Discours aux nuages, p. 13.
♦ (Vx). || Être l'affaire de qqn : lui convenir (→ ci-dessous, III., 2., Faire l'affaire).
18 Mais le moindre grain de mil
Serait bien mieux mon affaire.
La Fontaine, Fables, I, 20.
19 (…) Ce choix plus conforme était mieux votre affaire.
Molière, le Misanthrope, I, 1.
♦ Être à son affaire : être occupé (ou pouvoir s'occuper) à qqch. qu'on aime, qui convient. || Quand il y a un civet de lièvre à accommoder, il est à son affaire !
♦ ☑ Loc. fam. Je lui ferai son affaire, je vais lui régler son affaire : je lui réserve le traitement qui lui convient (c.-à-d. : je le corrigerai; ou, je le tuerai). ⇒ Compte (régler son). — Vieilli. || Avoir son affaire.
19.1 On a fendu la tête à M. Rousserand. Il a son affaire.
Louise Michel, la Misère, t. I, p. 55 (1881).
♦ ☑ Loc. J'en fais mon affaire : je m'en occuperai moi-même.
19.2 Pour ce qui regarde sa femme, j'en fais mon affaire.
A. Galland, les Mille et une Nuits, t. III, p. 57.
♦ Fam. (dans des expressions). || L'affaire de qqn, son affaire : ce qui le concerne, ce qui lui arrive.
19.3 — Oh ! une migraine atroce ! répétait-elle à madame Désagneaux. Vous voyez, je n'ai pas encore ma pauvre tête à moi… C'est le voyage qui me donne ça. Tous les ans, je suis sûre de mon affaire.
Zola, Lourdes, p. 218.
4 Suite d'événements dont il est question. — Au plur. || Les affaires de qqn, ses affaires : ses activités, ce qui lui importe. || S'occuper, se mêler de ses propres affaires, des affaires d'autrui. (→ ci-dessous, II.).
20 Ah, morbleu ! mêlez-vous, Monsieur, de vos affaires (…)
Et ne prenez souci que de votre intérêt.
Molière, le Misanthrope, IV, 2.
21 Par nature, il aimait à se mêler des affaires d'autrui, ce qui était bien une forme d'indiscrétion.
J. Romains, les Hommes de bonne volonté, VII, p. 245.
22 Je ne te questionne pas pour m'immiscer dans tes affaires,
Martin du Gard, les Thibault, V, 7.
23 Occupez-vous de mes affaires, je m'en rapporte à vous.
Martin du Gard, les Thibault, III, 6.
♦ Spécialt. Ce qui occupe de façon embarrassante. ⇒ Problème, question. || L'affaire du salut est la plus importante pour un chrétien. — ☑ Loc. Vieilli. C'est, ce n'est pas l'affaire. ⇒ Question.
24 On mit près du but, les enjeux
Savoir quoi, ce n'est pas l'affaire
Ni de quel juge l'on convint.
La Fontaine, Fables, VI, 10.
25 Ce n'est pas là l'affaire.
Molière, l'Avare, V, 2.
♦ ☑ Loc. Cela ne change, ne fait rien à l'affaire. ☑ Le temps ne fait rien à l'affaire.
26 Voyons, Monsieur, le temps ne fait rien à l'affaire.
Molière, le Misanthrope, I, 2.
27 Tous ces raisonnements ne changent rien à l'affaire.
Molière, Tartuffe, I, 1.
♦ ☑ Loc. (avec une valeur abstraite « chose dont il est question »). C'est une affaire entendue.
27.1 J'écrirais, c'était une affaire entendue; je devais le connaître assez pour ne pas redouter qu'il contrariât mes désirs.
Sartre, les Mots, p. 129.
♦ ☑ C'est une autre affaire, une question toute différente.
28 (…) si vous le voulez (…) Mais si vous ne le vouliez pas, ce serait peut-être une autre affaire.
Molière, Dom Juan, I, 2.
♦ L'affaire, une affaire de… (et nom) : une question qui concerne, est liée à… || C'est une affaire de savoir-vivre, d'habileté, de tact : il y faut… || C'est une affaire de patience : il ne faut pas être pressé. — ☑ Loc. C'est affaire de… (Temps). || C'est l'affaire d'un moment, d'une minute, d'une seconde : ce sera réglé en un moment… (Employé pour désigner la brièveté). || C'est une affaire de quelques heures. || « Son trépas est une affaire d'heures » (G. Leroux).
♦ (Peut s'employer pour désigner une durée importante). || C'est une affaire de temps, de plusieurs années. Cf. C'est une affaire de patience, ci-dessus.
29 La foi de beaucoup d'hommes est une affaire de géographie.
Rousseau, Émile, IV.
30 Ce fut l'affaire d'une seconde; je ne me serais jamais cru tant de vigueur.
Alphonse Daudet, le Petit Chose, I, 9.
♦ (Sans article). || Affaire de…
31 La véritable grandeur n'est point affaire de dimensions absolues, c'est l'effet de proportions heureuses.
G. Duhamel, Scènes de la vie future, VII.
♦ C'est affaire (vieilli), c'est une affaire pour X, entre X et Y…
31.1 — Et pour les chevaux, demanda La Guillaumette.
— Ne vous inquiétez pas de ça; c'est affaire entre l'intendance et la Compagnie.
Courteline, le Train de 8 h 47, V, p. 57 (1888).
♦ Ce dont il est question (dans une discussion, un litige, etc.). Suite d'événements formant une unité narrative (récit, etc.). ⇒ Chose, circonstance, occasion.
32 En toute affaire, ils ne font que songer
Au moyen d'exercer leur langue.
La Fontaine, Fables, I, 19.
33 Devant son tribunal l'escarbot comparut
Fit sa plainte et conta l'affaire.
La Fontaine, Fables, II, 8.
34 L'oiseau de Jupiter enlevant un mouton
Un corbeau, témoin de l'affaire
En voulut sur l'heure autant faire.
La Fontaine, Fables, II, 16.
35 Le roi des animaux se mit un jour en tête
De giboyer. Il célébrait sa fête (…)
Pour réussir en cette affaire.
Il se servit du ministère
De l'âne à la voix de Stentor.
La Fontaine, Fables, II, 19.
36 Celui qui le premier a pu l'apercevoir (l'huître)
En sera le gobeur; l'autre le verra faire
— Si par là on juge l'affaire,
Reprit son compagnon, j'ai l'œil bon, Dieu merci.
La Fontaine, Fables, IX, 9.
37 Le trop d'expédients peut gâter une affaire.
La Fontaine, Fables, IX, 14.
38 (…) Ulysse en fit autant.
On ne s'attendait guère
De voir Ulysse en cette affaire.
La Fontaine, Fables, X, 2.
39 La vérité de l'affaire est qu'on n'y gagne rien de bon.
Molière, George Dandin, II, 1.
♦ Vx. Objet, but.
40 Comme l'affaire de la comédie est de représenter en général tous les défauts des hommes (…)
Molière, l'Impromptu de Versailles, III.
5 Ensemble de faits ou de possibilités constituant une préoccupation, un souci. ⇒ Difficulté, complication, embarras, ennui.
41 L'autre (enseignement est) qu'aux grands périls tel a pu se soustraire
Qui périt pour la moindre affaire.
La Fontaine, Fables, II, 9.
♦ (Dans quelques expr.). Ce qui peut présenter des dangers. ☑ Il s'est bien sorti d'affaire. ☑ Se tirer d'affaire. — ☑ Hors d'affaire. || Il est maintenant hors d'affaire.
42 Quand on pense sortir d'une mauvaise affaire.
On s'enfonce encore plus avant.
La Fontaine, Fables, V, 6.
43 Se tirer en Gascon d'une semblable affaire
Est le mieux : il sut donc dissimuler sa peur.
La Fontaine, Fables, VIII, 10.
44 Le médecin (…) le tira d'affaire en trois semaines.
Racine, Lettres.
45 Donnez cet argent-là à cet homme-ci, vous voilà hors d'affaire.
Molière, les Fourberies de Scapin, II, 5.
45.1 Au cours des années, sans armes, on a dû se défendre de tant de pièges, de chausse-trappes (…) On a vécu comme on a pu, chacun se tire d'affaire à sa manière; il n'y a ni bien, ni mal.
Suzanne Prou, la Terrasse des Bernardini, p. 130.
♦ (Une, des affaires). Des choses ennuyeuses, compliquées. || S'il continue, il va s'attirer des affaires. ⇒ Ennui, histoire. || Susciter des affaires à qqn, des difficultés. || Se mettre une affaire sur les bras : s'attirer des ennuis. || Une fâcheuse, malheureuse, méchante, sale affaire : un gros ennui. || Cette affaire prend une vilaine couleur, sent mauvais, tourne mal.
46 Vous vous attirerez quelque méchante affaire.
Molière, Tartuffe, I, 5.
47 Vous voilà sur les bras une fâcheuse affaire.
Molière, le Misanthrope, I, 3.
47.1 Besançon est rempli de mauvais sujets, me dit-elle, je crains pour vous, monsieur. S'il vous arrivait quelque mauvaise affaire, ayez recours à moi (…)
Stendhal, le Rouge et le Noir, XXVI, Pl., t. I, p. 391.
♦ ☑ Loc. Ce n'est pas une petite affaire, c'est toute une affaire : ce n'est pas chose facile. ☑ Ce n'est pas une affaire : ce n'est pas difficile.
48 Bien adresser (choisir) n'est pas petite affaire.
La Fontaine, Fables, I, 17.
49 S'il ne tient qu'à cela pour être votre gendre, je me ferai médecin, apothicaire même, si vous voulez. Ce n'est pas une affaire que cela.
Molière, le Malade imaginaire, III, 14.
♦ ☑ Loc. La belle affaire (que cela) ! : quelle importance ! peu importe !
50 Eh bien, oui, il y a des indigents, la belle affaire ! Ils étoffent le bonheur des opulents.
Hugo, l'Homme qui rit, II, II, 11.
6 (Mil. XVIIe). Ensemble de faits envisagés comme un tout, créant une situation compliquée, où diverses personnes, divers intérêts sont aux prises. || C'est une affaire délicate, difficile, embrouillée, épineuse, qui n'est pas claire. || N'en faites pas une affaire d'État (au fig.), une affaire très importante, très grave. || Je refuse de me charger de cette affaire. || Prendre l'affaire en main. || Se mettre une affaire compliquée sur les bras. || Un avocat a dû s'entremettre, intervenir dans cette affaire. || Il a tout fait pour arranger l'affaire. ⇒ Démêlé, différend, querelle. || Il faut tirer cette affaire au clair. || Vider une affaire. || Quelle affaire ! ⇒ Histoire.
51 Vous avez bien d'autres affaires
À démêler que les débats
Du lapin et de la belette.
La Fontaine, Fables, VIII, 4.
52 C'est une affaire entre le Ciel et moi.
Molière, Dom Juan, I, 2.
53 Voilà dans cette affaire un accommodement.
Molière, les Femmes savantes, V, 3.
♦ ☑ Étouffer une affaire dans l'œuf.
♦ Spécialt (dans le domaine politique). Événement souvent de nature juridique (→ ci-dessous, 9.), ayant des conséquences sociales, politiques. || L'affaire du collier. || L'affaire Stavisky. ⇒ Scandale. || L'affaire des piastres. || L'affaire des fuites.
53.1 Toute l'affaire des fuites tient dans deux répliques échangées hier.
F. Mauriac, Bloc-notes 1952-1957, p. 230.
53.2 Trois problèmes urgents, le Maroc (les caïds), l'affaire Finaly, l'affaire Rosenberg.
F. Mauriac, Bloc-notes 1952-1957, p. 31.
♦ Absolt. || L'Affaire : l'affaire Dreyfus.
♦ Événement, crime posant une énigme policière. || L'affaire de la rue X (→ ci-dessous, 9.).
7 Marché conclu ou à conclure avec qqn; ensemble d'opérations financières, commerciales (→ ci-dessous, II., A., 3.). ⇒ Convention, marché, spéculation, transaction. || C'est une bonne affaire, une affaire excellente, une affaire d'or, un marché avantageux. || Il a fait une mauvaise affaire. || Je vous propose une affaire, une grosse affaire. || Une petite affaire sans aucun risque. || Une affaire honnête, malhonnête. — Faire, traiter une affaire. || Conclure, régler, terminer une affaire; réussir, manquer, rater une affaire. ☑ L'affaire est dans le sac. — ☑ Loc. Faire affaire avec qqn. ⇒ Traiter.
53.3 (…) d'autres marchands ambulants, dont les petites voitures étaient chargées de statuettes et de gravures pieuses, réalisaient des affaires d'or.
Zola, Lourdes, p. 200.
53.4 Et voilà comment on rate une affaire magnifique ! Est-ce que vous n'auriez pas dû vous méfier plus tôt ? Alors, vous admettez que cette affaire tombe à l'eau ?
M. Pagnol, Topaze, II, 5.
53.5 Eh bien, il viendra quelqu'un, car vous allez traiter vous-même une affaire. Comme c'est la première, je l'ai choisie facile, et comme vous faites toujours une gueule d'enterrement, je l'ai choisie gaie.
M. Pagnol, Topaze, III, 2.
54 Toute affaire que l'on me propose est mauvaise, car si elle était bonne, on ne me la proposerait pas.
A. Maurois, Bernard Quesnay, II, 11.
Martin du Gard, les Thibault, VII, 40.
♦ Absolt. || Une affaire : une bonne affaire; un achat avantageux. || Tu as vu ces soldes : c'est une affaire !
♦ ☑ Loc. C'est une affaire faite : vous pouvez y compter.
55.1 Pardieu ! s'écria Quenu, tu coucheras chez nous, tu mangeras chez nous, et nous allons t'acheter le nécessaire. C'est une affaire entendue… Tu sais bien que nous ne te laisserons pas sur le pavé, que diable !
Zola, le Ventre de Paris, t. I, p. 90.
♦ Collectivt (au sens où l'on emploie les affaires → ci-dessous, II., A., 1.).
55.2 (…) un dimanche, jour où il n'y avait ni Bourse ni affaire (…)
Balzac, Ferragus, p. 77, in T. L. F.
8 Entreprise commerciale ou industrielle. ⇒ Entreprise, société. || Il est à la tête d'une petite, d'une grosse affaire. || Administrer, conduire, gérer, lancer une affaire. || Il est intéressé dans une affaire. || Après la mort de son père, il a pris l'affaire familiale en main. || Il s'occupe d'une grosse affaire d'importation. || Après cet échec, il s'est retiré de son affaire. || Son affaire va bien, mal, marche bien, mal.
55.3 Mais, mon cher ami, si je ne m'intéressais pas à vous, je ne vous aurais pas confié la direction d'une affaire aussi importante.
M. Pagnol, Topaze, III, 2.
9 (1690, Furetière). Procès, litige, objet d'un débat judiciaire. || Affaire contentieuse. || Affaire civile, commerciale, correctionnelle, criminelle. || Impliquer qqn dans une affaire (⇒ Accusation).
♦ Instruire, poursuivre une affaire. || Saisir le tribunal d'une affaire. || Juger une affaire. || Plaider une affaire. || Gagner, perdre une affaire. — Fam. || Son affaire est claire : son compte est bon.
56 Orante plaide depuis dix ans entiers en règlement de juges pour une affaire juste, capitale, et où il y va de toute sa fortune.
La Bruyère, les Caractères, XIV, 41.
REM. La valeur juridique est impliquée dans de nombreux emplois du mot → ci-dessus, 4. (cit. 33, 36, etc.), et 6.
10 (1694). Vieilli. Action de guerre, engagement militaire. ⇒ Action, combat. || « Murat engagea une affaire devant Mojaïsk » (Chateaubriand, Mémoires d'outre-tombe, t. II, p. 433, in T. L. F.). || L'affaire a été chaude. Par ext. Événement diplomatique qui met la paix en question. || L'affaire d'Agadir.
11 Fam. (euphémisme vieilli). Grossesse; fœtus (d'une femme enceinte) [cf. Zola, Pot-Bouille].
———
II (Seult au plur.). → aussi ci-dessus, cit. 20 à 23 : les affaires de qqn.
1 (1508). Ensemble des occupations et activités d'intérêt public. — (1777). || Les affaires étrangères [afɛʀzetʀɑ̃ʒɛʀ].
56.1 Les Affaires Étrangères sont tous les intérêts possibles qu'un Souverain, une République, ou autre Corps politique quelconque peut avoir à traiter ou à discuter avec les autres Puissances de l'Univers.
Robinet, Dict. universel, in D. D. L., II, 11 (1777).
♦ (En France). || Ministère des Affaires étrangères (remplacé par : des Relations extérieures de mai 1981 à mars 1986). (Au Québec). || Ministère des Affaires intergouvernementales.
♦ Les affaires politiques, publiques de l'État. || Les affaires françaises (dans un contexte international). — Chargé d'affaires. || Service des affaires indigènes (anciennt). || Il s'occupe depuis toujours des affaires communales. || Le cabinet se charge d'expédier les affaires courantes. || Les affaires temporelles et les affaires spirituelles.
57 Les affaires d'un État sont d'une étendue que l'esprit d'un homme n'embrasse point.
France, les Opinions de J. Coignard, p. 381.
2 Situation matérielle d'un particulier. || Les affaires privées, domestiques. || Je suis bien, mal dans mes affaires, dans une bonne, une mauvaise situation. || Mettre de l'ordre dans ses affaires. || Arranger, régler ses affaires.
57.1 J'espère, ma chère mère, que nos affaires seront en assez bon état, malgré tous les malheurs, pour que je puisse, mes travaux aidant, te continuer (…) la petite pension que je te fais actuellement.
Balzac, Lettre du 26 oct. 1848, in Correspondance, t. II, p. 337 (1876).
3 (1788). Ensemble d'affaires (I., 7.); activités économiques, notamment dans leurs conséquences financières et commerciales. ⇒ Économie, finance; business, commerce. || Le mouvement, le courant, le train des affaires. || La prospérité ou la crise, la stagnation des affaires. || Les affaires sont calmes, reprennent. — (1800). || Être dans les affaires. || Faire des affaires. || Se retirer des affaires.|| Être arrangeant, coulant, dur en affaires. || Parler, discuter affaires avec un client. || Avoir l'esprit, le génie des affaires.
♦ D'affaires. || Agences, cabinets, agent d'affaires, qui se chargent de conseiller les placements ou de gérer les biens de leurs clients. || Bureau d'affaires. || Centre d'affaires. || Homme d'affaires; femme d'affaires : homme, femme qui traite des affaires commerciales, financières, etc. || Brasseur d'affaires. || Relations d'affaires. ☑ Prov. Les affaires sont les affaires : il ne faut pas en affaires s'embarrasser de sentiments, de scrupules (titre d'une pièce de O. Mirbeau). — REM. L'expression femme d'affaires apparaît au XVIIIe s., mais avec un sens plus large qu'aujourd'hui.
57.2 Affaires : À Paris et à Versailles, il y a des femmes encore jeunes, qui ne font autre chose que de courir chez les ministres, chez les magistrats, chez tous les gens en place, dans tous les bureaux. Les gens grossiers les appellent intrigantes et courtières; mais chez les gens polis, elles sont connues sous le nom de femmes d'affaires.
Clément, Petit Dict. de la cour et de la ville, 1788, in D. D. L., II, 11.
58 Les affaires ? C'est bien simple, c'est l'argent des autres.
Dumas fils, la Question d'argent, II, 7.
58.1 Je sais bien, mon cher Florent, reprit Lisa, que vous n'êtes pas revenu pour nous réclamer ce qui vous appartient. Seulement, les affaires sont les affaires; il vaut mieux en finir tout de suite… les économies de votre oncle se montaient à quatre-vingt-cinq mille francs. J'ai donc porté à votre compte quarante-deux mille cinq cents francs. Les voici.
Zola, le Ventre de Paris, t. I, p. 87-88.
59 Comme on dit, les affaires reprirent.
J. Bainville, Hist. de France, X.
60 En ce temps-là qui n'est pas fort lointain (vers 1890), on ne disait pas encore « les affaires » avec l'accent spécial qu'on y met aujourd'hui. On disait, de façon plus modeste et plus précise, « le commerce ».
G. Duhamel, Chronique des Pasquier, I, 11.
61 L'homme d'affaires, c'est un hybride du danseur et du calculateur.
Valéry, Rhumbs, p. 29.
61.1 Oui. M. Topaze a un très joli chapeau de professeur, mais, maintenant, il lui faut un feutre d'homme d'affaires.
M. Pagnol, Topaze, II, 1.
♦ Voyage d'affaires; repas d'affaires, fait à l'occasion des affaires. ☑ Loc. Faire des affaires : réaliser des profits — Chiffre d'affaires. ⇒ Chiffre, I., 2.
♦ ☑ Loc. Être en affaires, en train de faire des affaires, dans une négociation, une discussion d'affaires.
61.2 — Enfin, te voilà !
— Chavarot… tu es venu ce matin… Excuse-moi… j'étais en affaires…
E. Labiche, les Petites Mains, II, 5.
4 Fam. État dans le développement d'une intrigue, d'une aventure amoureuse. || Où en sont les affaires ? || Cela fera avancer mes affaires. || Je ne suis pas au courant de ses affaires.
62 Les bas amusements de ces sortes d'affaires.
Molière, les Femmes savantes, I, 1.
63 C'est un admirable moyen d'avancer ses affaires, et l'on ne tarde guère à profiter du chagrin et de la colère que donnent à l'esprit d'une femme la contrainte et la servitude.
Molière, le Sicilien, VI.
B (XIXe; déjà attesté en anc. franç., 1215).
1 Objets ou effets personnels. || Cet enfant range soigneusement ses affaires. || Il a soin de ses affaires.
64 (…) il considérait avidement toutes ces affaires de femme étalées autour de lui : les jupons de basin, les fichus, les collerettes, et les pantalons à coulisse (…)
Flaubert, Mme Bovary, II, XII.
64.1 — Qu'est-ce qu'il y a dans ton paquet ? répète l'enfant au lieu de répondre, et sans détourner les yeux de la porte entrebâillée.
— Je t'ai dit déjà : des affaires.
— Quelles affaires ?
— Des affaires à moi.
A. Robbe-Grillet, Dans le labyrinthe, p. 45.
2 Objets nombreux et complexes. || Une machine compliquée avec des leviers, des manettes, un tas d'affaires. ⇒ Machin, truc.
1 Les règles. || Elle a eu ses affaires.
64.2 C'était un soldat à la con. Quand son cafard le tenait il était plus emmerdant qu'une femme qui a ses affaires. Il avait la migraine, broyait du noir, était franchement insupportable et faisait de la neurasthénie aiguë. Encore un hystérique.
B. Cendrars, la Main coupée, in Œ. compl., t. X, p. 19.
64.3 À sa mort, debout, elle bave du sang. Elle donne l'impression qu'elle a de toute part ses affaires (…)
J. Renard, Journal, 2 nov. 1901.
2 Vx. Besoins naturels. || Faire ses affaires. || Chaise d'affaires : chaise percée.
———
III Loc.
1 Avec le v. avoir. (1172, avoir affaire de… : avoir besoin…). || Avoir affaire. — ☑ Vx. Avoir affaire : avoir qqch. à faire, une occupation, un intérêt.
65 Nul animal n'avait affaire
Dans les lieux que l'ours habitait (…)
La Fontaine, Fables, III, 5.
♦ ☑ Mod. Avoir affaire à qqn : avoir à traiter, à discuter avec qqn, être en contact avec qqn. ☑ Il a eu affaire à forte partie. — ☑ Avoir affaire avec qqn : avoir à traiter quelque question avec qqn. ☑ Littér. Avoir affaire en qqn à (l'honnête homme, l'ami, etc.) : s'adresser à qqn en tant que… — Avoir affaire à qqch.
66 Et s'il avait affaire à quelque maladroit (…)
Corneille, Polyeucte, V, 1.
67 L'homme à qui nous avons affaire n'est pas des plus fins de ce monde.
Molière, l'Amour médecin, III, 3.
68 (…) j'ai affaire en vous à un galant homme.
Loti, les Désenchantées, V, 70.
68.1 — Vous êtes une grossière, dit la belle Normande. Si jamais je remets les pieds ici, par exemple !
— Allez donc, allez donc, dit la belle Lisa. On sait bien à qui on a affaire.
Zola, le Ventre de Paris, t. I, p. 116.
♦ ☑ Loc. mod. Vous aurez affaire à moi (si vous faites cela) : formule de menace, → vous aurez de mes nouvelles.
69 Et quiconque rira de lui aura affaire à moi.
Molière, Monsieur de Pourceaugnac, I, 3.
♦ Vieilli. || Avoir affaire avec (qqn).
70 Ceux avec qui ils ont affaire tous les jours (…)
Fénelon, Télémaque, XXIII.
♦ ☑ Vx. Avoir affaire de… : avoir des relations, un intérêt dans… ☑ J'ai bien affaire de cela : je n'en ai nul besoin. — Avoir affaire de… (et infinitif).
71 Quelqu'un aurait-il jamais cru
Qu'un lion d'un rat eût affaire ?
La Fontaine, Fables, II, 11.
72 La République a bien affaire
Des gens qui ne dépensent rien !
La Fontaine, Fables, VIII, 19.
73 Qu'ai-je affaire d'aller me tuer pour des gens dont (…)
Montesquieu, Lettres persanes, 11.
♦ ☑ Vieilli. N'avoir d'autre affaire que de se divertir, rien d'autre à faire.
♦ ☑ (Vx ou pop.). Avoir l'affaire de qqn, ce qui lui convient. ☑ J'ai votre affaire, ce qu'il vous faut.
74 J'ai votre affaire ici.
Molière, les Fourberies de Scapin, II, 8.
75 Qu'elle entre en danse; et,
S'il est nécessaire
Je m'offrirai de lui tenir le pied :
Vouliez (que vous le vouliez) ou non, elle aura son affaire.
La Fontaine, Contes, III, 3, « les Rémois ».
2 Avec le v. faire. ☑ Faire affaire avec qqn : se mettre d'accord avec lui. ⇒ Conclure, convenir, traiter, régler. — L'affaire va se faire. || L'affaire est faite.
76 A-t-elle consenti ? L'affaire est-elle faite ?
Molière, les Femmes savantes, II, 9.
77 Ils se tapèrent dans la main, crachèrent de côté pour indiquer que l'affaire était faite.
Maupassant, Clair de lune, Légende du Mont St Michel.
♦ ☑ C'est une affaire faite, finie : il n'y a plus à y revenir. — ☑ Iron. Votre affaire est faite : elle est manquée, vous n'avez plus rien à espérer.
REM. Lorsque le mot est au plur., il s'agit aujourd'hui du sens II., A., et notamment des affaires d'argent. Il en allait autrement dans la langue classique ou faire ses affaires (comme faire son affaire) a un sens plus large qu'aujourd'hui.
78 Le Ciel ne m'a point fait, en me donnant le jour,
Une âme compatible avec l'air de la Cour;
Je ne me trouve point les vertus nécessaires
Pour y bien réussir et faire mes affaires (…)
Molière, le Misanthrope, III, 5.
♦ ☑ Iron. Faire de belles affaires : obtenir des effets fâcheux, malheureux.
79 Vous avez fait de belles affaires avec vos beaux sentiments.
Molière, le Bourgeois gentilhomme, III, 13.
♦ ☑ Loc. mod. Faire toute une affaire, se faire toute une affaire de qqch. : s'en exagérer l'importance. ⇒ Monde (tout un), et, pop., plat (tout un).
♦ Faire son affaire de qqch. : en faire son occupation; se charger de l'affaire d'autrui comme de la sienne propre. || J'en fais mon affaire : j'en réponds.
80 L'enfance n'aime rien; celle du jeune dieu
Faisait sa principale affaire
Des doux soins d'aimer et de plaire.
La Fontaine, Fables, XI, 2.
81 Du plaisir faisons notre affaire.
Molière, la Pastorale comique, XV.
REM. Comme ci-dessus pour les cit. 78, 79, la langue classique employait aussi le plur. dans ce sens.
82 Faire ses propres affaires de tous les soucis qu'il (le maître) peut prendre.
Molière, le Sicilien, I.
♦ ☑ Faire l'affaire : convenir. || Faire l'affaire de qqn, faire son affaire.
83 C'est moi qui ferai votre affaire mieux que personne.
Molière, les Précieuses ridicules, IX.
84 (…) de la bienveillance en paroles, et de l'amitié tant qu'il vous plaira, mais de l'argent, point d'affaires.
Molière, l'Avare, II, 4.
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DÉR. Affairé, affairisme, affairiste.
Encyclopédie Universelle. 2012.