TRAVAIL
ON en a fait maintes fois la remarque: l’apparition du mot «travail» est relativement récente. Cela ne signifie certes pas que la réalité désignée par ce mot le soit également, ni qu’il existât jamais de sociétés se livrant à la complète oisiveté. Il n’est pas jusqu’aux économies de cueillette, cas limite, où l’on ne puisse déjà, selon certains points de vue, commencer à parler de travail. Mais à aucun moment, là même où l’action sur la nature est la plus manifeste et la division du travail la plus élaborée, une société ne s’est aussi délibérément qu’aujourd’hui perçue comme orientée par le travail.
L’exemple de la Grèce antique, remarquablement analysé par Jean-Pierre Vernant, nous montre ce qui fit longtemps défaut pour que le travail acquît une place aussi centrale. L’artisan, a fortiori l’esclave ne pouvaient en effet se concevoir comme producteurs de valeur sociale: leur situation relevait du rapport de service, leur production n’était évaluée que sous son seul aspect de valeur d’usage , valeur immédiate, de celui auquel elle était directement destinée. Rien par conséquent, dans des rapports aussi personnalisés, n’incitait à ce que fussent comparés entre eux les divers métiers, à ce qu’une commune mesure s’en dégageât d’où pût naître l’idée de ce que Marx appellera le travail abstrait. Aussi n’est-ce pas en raison de leur rapport de travail que les artisans sont citoyens, mais par-delà et malgré cela.
Les manufactures sont à l’origine de la distinction tranchée entre travail et non-travail. Cette distinction n’est pas mineure, ni fortuit le lieu où elle s’est opérée: c’est le capitalisme industriel qui a donné naissance à la conception moderne du travail. Avec le marché et le salariat, tous les travaux effectués dans une société doivent être comparés, mis en relation les uns avec les autres; le travail n’est plus perçu seulement sous son aspect concret, comme valeur d’usage, mais – et cela, en lui donnant une commune mesure, en révèle l’unité – comme valeur d’échange . C’est désormais par son apport de travail que chacun participe à la société, conçue elle-même comme essentiellement définie par le travail.
L’application croissante du terme de travail à d’autres activités qu’à celles pour lesquelles il était à l’origine plus particulièrement réservé, à savoir à l’activité ouvrière de production, montre que ce processus n’a fait que se généraliser. Cela est dû, entre autres, à l’extension du salariat, au rapprochement entre le travail ouvrier et le travail de bureau en raison de l’évolution technique, au fait que, pour les économistes eux-mêmes, la distinction entre secteur secondaire et secteur tertiaire se révèle aujourd’hui problématique dans bien des cas.
Dans la vision prométhéenne de la société, prévalente depuis un siècle, la conception du travail comme création , liberté (n’est-il pas, selon Marx, l’activité par laquelle l’homme, en transformant la nature hors de lui, transforme aussi sa propre nature?) contraste singulièrement avec cette autre évidence: le travail est nécessité , discipline . En réalité, cet aspect de contrainte ne se réfère nullement à l’effort qu’il importerait de déployer pour domestiquer la nature. Il renvoie au mode d’organisation sociale pour y parvenir, c’est-à-dire à la division sociale et technique du travail; n’est travail que l’activité productrice d’utilité , effectuée comme une obligation par l’individu dans la place précise qui lui est assignée. C’est justement le propre de ceux qui imposent une division du travail que de toujours la présenter comme nécessité naturelle ou technique, masquant par là ce qu’elle comporte aussi de modalité de domination sociale. L’histoire de l’organisation scientifique du travail est à cet égard exemplaire. Alors que la division du travail se montre là plus consciente et volontariste qu’elle ne fut jamais, elle est construite, justifiée et présentée comme ordre rationnel s’imposant de soi. Il est remarquable à l’inverse que les procédés et utopies se préoccupant de «satisfaction» ou de «joie au travail», contraints de se tourner du côté du travail comme création, aboutissent d’abord et toujours, de quelque manière, à une mise en cause de la division du travail, quand ce ne serait que par l’élargissement des tâches (job enlargement ).
L’un des révélateurs de la place privilégiée accordée au travail, on le verra par les articles qui leur sont consacrés ci-dessous, est la naissance et la multiplication depuis un siècle de sciences particulières le concernant. Ces dernières, à l’origine branches particulières d’une discipline plus générale, ont rapidement acquis une autonomie et le statut de science fondamentale; en même temps qu’elles révélaient sur le travail un aspect qui n’avait pas été perçu auparavant, elles devaient adopter pour le faire une démarche originale par rapport à la discipline dont elles étaient issues. Ce processus, visible pour la sociologie du travail, l’est peut-être plus encore pour la psychologie et la physiologie du travail (ergonomie). Dans tous les cas, le domaine désigné se trouve dans l’imbrication du naturel et de ce que l’on pourrait appeler l’humain (le social, le psychologique, etc.), le naturel en tant qu’il est objet de transformation, l’humain en tant qu’il est pénétré de nature.
Mais cette place privilégiée accordée au travail apparaît mieux encore lorsque les points de vue et les méthodes propres à ces nouvelles disciplines servent à leur tour de modèle et sont appliqués dans des domaines autres que le travail. C’est au sein de la sociologie industrielle et initialement très liée à sa problématique qu’est née, entre autres, la sociologie des organisations. La physiologie du travail trouve son application dans le sport.
Ce qui est vrai pour les sciences l’est pour les pratiques et les institutions nées à propos du travail. Elles étendent leur champ – ainsi le droit du travail, limité originairement aux relations individuelles entre employeurs et salariés, qui s’applique de plus en plus à des groupes organisés avec l’État comme partie prenante – ou servent de modèle à des pratiques en dehors de ce domaine. C’est dans l’entreprise, où elles sont restées longtemps confinées, que sont nées les méthodes et les techniques de rationalisation que l’on voit aujourd’hui se répandre dans de nombreux secteurs de la vie sociale.
Aujourd’hui, on parle volontiers de sociétés postindustrielles. Chacun y projette ce qu’il désire ou ce qu’il craint. Pour les uns, frappés par le caractère prométhéen des sociétés industrielles, les sociétés à venir ne seraient qu’une «routinisation» des précédentes, une exploitation de l’acquis, une sorte de repos après l’immense effort accompli. Pour d’autres, elles seraient plus consciemment volontaristes que ne le furent les sociétés industrielles. Pour tous, le travail y prendra d’autres formes que celles qu’il a eues jusqu’alors. Ces sociétés iront-elles, certaines anticipations n’hésitent pas à l’envisager, jusqu’à rejeter le travail au rang des objets historiques? Effectuant leurs analyses à plus court terme à partir du présent, des auteurs indiquent ci-dessous dans quelles directions des changements s’opèrent quant à la division du travail, quant aux formes et lieu du pouvoir, et quant à certaines caractéristiques démographiques de la population active.
1. travail, aux [ travaj, o ] n. m. I ♦
1 ♦ Vx État d'une personne qui souffre, qui est tourmentée; activité pénible. « Les grands travaux que Notre-Seigneur a soufferts » (Bossuet).
2 ♦ (XIIe ) Mod. Période de l'accouchement pendant laquelle se produisent les contractions utérines aboutissant à l'expulsion du fœtus (cf. Douleurs de l'enfantement). Salle de travail d'une maternité. Femme en travail. — Fig. « La montagne en travail enfante une souris » (La Fontaine).
II ♦ (1471) Mod.
A ♦
1 ♦ Ensemble des activités humaines coordonnées en vue de produire qqch.; état, situation d'une personne qui agit en vue de produire qqch. ⇒ 1. action, activité, labeur. Le travail et le repos. « Le travail est beau et noble. Il donne une fierté et une confiance en soi que ne peut donner la richesse héréditaire » (Vigny). « Le travail est bon à l'homme. Il le distrait de sa propre vie » (France). Application, assiduité au travail. Se mettre au travail : commencer à travailler. Être au travail. — Excès de travail. Se tuer de travail. — Cabinet, table de travail. ⇒ bureau. Lieu de travail (cf. infra B). Méthode, plan de travail. — Séance de travail. Groupe de travail. ⇒ atelier, séminaire. Langues de travail utilisées dans les réunions internationales. Déjeuner, dîner de travail. — Travail manuel, physique. Rééducation par le travail manuel. ⇒ ergothérapie. Travail intellectuel. Travail créateur, personnel. Travail scolaire. ⇒ étude; 2. devoir (4o).
♢ Spécialt Activité nécessaire à l'accomplissement d'une tâche. Entreprise qui demande beaucoup de travail. Être surchargé de travail. Avoir beaucoup de travail (cf. Avoir du pain sur la planche), trop de travail, un travail fou. Rester sans travail.
2 ♦ Le travail de (qqch.) :action ou façon de travailler (I) une matière; de manier un instrument. Le travail du bois, du marbre.
3 ♦ Un travail; le travail de qqn : ensemble des activités exercées pour parvenir à un résultat (œuvre, production). ⇒ ouvrage; fam. 2. boulot. Travail imposé (⇒ besogne 2o, tâche) , forcé (⇒ corvée) . Commencer, entreprendre un travail. Accomplir, faire un travail. Il « abattait à lui seul le travail de dix journaliers » (A. Daudet). — Loc. Un travail de Romain, long et difficile, pénible. — Travail de longue haleine. Chacun vaquait à ses travaux. Travaux de l'esprit. Travail de bénédictin : travail intellectuel, long, difficile et minutieux. Un travail de fourmi, long et demandant beaucoup d'effort.
4 ♦ LES TRAVAUX. (du sens I) Vx ou littér. Entreprises difficiles et glorieuses. « Et ne suis-je blanchi dans les travaux guerriers » (P. Corneille). — Les douze travaux d'Hercule.
♢ Mod. et cour. Suite d'entreprises, d'opérations exigeant l'activité physique suivie d'une ou de plusieurs personnes et l'emploi de moyens particuliers. Les travaux des champs (⇒ agriculture, 1. culture) . — Travaux domestiques, ménagers, qu'exige la bonne tenue du ménage. Gros travaux, pénibles et n'exigeant pas une habileté particulière. — Travaux de dames, travaux d'aiguille. ⇒ ouvrage. — Travaux d'amateur, en photographie.— Imprim. Travaux de ville et labeur. — Travaux d'urbanisme. Pendant la durée des travaux, le magasin reste ouvert. Travaux d'entretien, de réfection des routes. Ralentir, travaux ! — Travaux de construction. Faire faire des travaux dans sa maison. Surveiller les travaux. Conducteurs de travaux. — (En France) Travaux d'intérêt général (TIG), qui remplacent la prison pour les petits délinquants. Travaux d'utilité collective (TUC). — GRANDS TRAVAUX : grands chantiers d'importance nationale (routes, ports, aéroports, barrages, irrigation, etc.). — Par plais. Inspecteur des travaux finis.
♢ (XVIIIe) TRAVAUX PUBLICS : travaux immobiliers d'utilité générale faits pour le compte d'une personne morale administrative. Chantier de travaux publics. Le secteur du bâtiment et des travaux publics (B. T. P.). ⇒ construction. — Les Travaux publics : l'administration, le ministère des Travaux publics (cf. Ponts et chaussées).
♢ (XVIIe) Milit. Opérations (spécialt terrassements) par lesquelles on établit les lignes, les fortifications. Travaux de défense; d'approche. Travaux de siège. — Fig. Travaux d'approche.
♢ (fin XVIIIe) Anciennt TRAVAUX FORCÉS : peine de droit commun, afflictive et infamante, qui s'exécutait dans les bagnes, puis par la transportation. Travaux forcés à perpétuité, à temps.
♢ Suite de recherches dans un domaine intellectuel. Travaux scientifiques. « Les travaux [de Max Planck] sur le rayonnement noir » (Broglie). — Travaux scolaires. Travaux pratiques. Travaux dirigés, en application d'un cours magistral.
♢ Délibérations, discussions suivies, devant aboutir à une décision. L'assemblée poursuit ses travaux. Travaux préparatoires d'une assemblée.
5 ♦ (1690) Manière dont un ouvrage, une chose faite par l'homme, ont été exécutés. ⇒ façon, 1. facture. Ce napperon « ce n'est pas du travail fin, mais c'est gentil » (Colette). Travail soigné. L'organisation de la fête était impeccable : du beau travail ! ⇒ 2. boulot. C'est du travail d'amateur, mal fait ou peu soigné (pr. et fig.). — Iron. C'est du beau travail ! Regardez-moi ce travail ! Tu vois le travail ? — (Positif) Et voilà le travail !
6 ♦ Ouvrage. « Si ce remarquable travail de peinture sur la lave eût décoré une chapelle » (Gautier). TRAVAUX D'ART (au sens I, 3o de art) :constructions de travaux publics (ponts, viaducs, etc.).
♢ Ouvrage de l'esprit (considéré comme le résultat d'une suite d'opérations intellectuelles). ⇒ étude, 1. livre, œuvre, ouvrage. Un travail consciencieux, bâclé. « Je n'avais pas le travail des Chérin [des généalogistes] sur ces titres de l'ordre de Malte » (Chateaubriand ).
B ♦ Spécialt (sens développé au XIXe) Cette activité, organisée à l'intérieur du groupe social et exercée d'une manière réglée.
1 ♦ Activité laborieuse professionnelle et rétribuée. ⇒ emploi, fonction, gagne-pain, métier, profession, spécialité; fam. 2. boulot, 2. job, pop. turbin. Avoir un travail régulier, un bon travail. Conditions de travail. Travail à mi-temps, à temps partiel, à plein temps. Travail temporaire, intérimaire. Travail précaire. Un travail facile et bien payé. ⇒ sinécure; pop. filon, planque. Travail sous-payé, surpayé. Travail qualifié. Rémunération du travail. ⇒ appointements, émoluments, gages, honoraires, rétribution, salaire, traitement. Arrêt de travail : grève momentanée, débrayage; interruption de travail pour cause de maladie. « Le travail avait cessé. Celui qui n'a que ses bras, son travail du jour pour nourrir le jour, allait chercher du travail, n'en trouvait pas » (Michelet). Être sans travail. ⇒ chômeur. « Il fallait proclamer le droit au travail. Ils ont proclamé le droit au fusil » (Hugo). À travail égal, salaire égal (revendication égalitaire de justice, notamment féministe).
♢ Exercice effectif de l'activité professionnelle. Aller au travail. Il est interdit de fumer pendant le travail. ⇒ service. Réduction du temps de travail (RTT). Heure de travail. Travail à l'heure, aux pièces. — Travail continu, exécuté sans interruption par une équipe. Travail posté. Travail par équipes, par roulement. Travail à domicile ⇒aussi télétravail . « Les employés d'une maison de commerce sont attachés par le cœur à la maison, et fort peu à leurs compagnons de travail » (Chardonne). Lieu de travail. ⇒ atelier, bureau, chantier, local, usine; fam. boîte, boutique. Être à son travail. — Vêtement de travail, utilisé dans l'exercice des activités professionnelles. « Une multitude de vêtements de travail de toute nature : blouses d'infirmière, [...] survêtements de professeurs de gymnastique, tabliers de serveuse, [...] combinaisons, blousons, vareuses » (Perec). Bleu de travail. ⇒ combinaison, cotte, salopette. Instruments de travail. — Dr. Législation, droit du travail. Code du travail. Accident du travail, survenu par le fait ou à l'occasion du travail, donnant lieu à des réparations. Inspecteur, inspection du travail. Médecine du travail. Carte de travail (des travailleurs immigrés, remplacée par la carte de séjour ou la carte de résident temporaire).— Contrat de travail, établi entre un salarié et son employeur. Centre d'aide par le travail (C. A. T.), pour les handicapés. Travail au noir. Camp de travail : lieu de détention avec travaux forcés (⇒ goulag) .
2 ♦ Écon. Activité économique des hommes (aidés ou non par les machines), organisée en vue de produire des biens et des services répondant aux besoins individuels et collectifs. ⇒ emploi. Le travail, facteur de production. Travail et capital. Le marché du travail (de l'emploi). Le prix du travail. ⇒ salaire. Analyse, mesure, organisation scientifique du travail. ⇒ taylorisme; productivité, rendement. Division du travail. Travail à la chaîne. Travail productif, improductif. — Psychologie, sociologie du travail.
3 ♦ L'ensemble des travailleurs considérés dans le groupe social (« population active »), et spécialt Les travailleurs salariés des secteurs agricole et industriel. ⇒ ouvrier, paysan, prolétariat; main-d'œuvre. Le monde du travail. Association capital-travail. Il parle « du temps prochain, où le capital sera l'esclave du travail » (Goncourt ). — Bourse du travail. Confédération générale du travail (C. G. T.). Confédération française et démocratique du travail (C. F. D. T.). — Ministère du Travail.
C ♦ Par anal. (XVIIIe)
1 ♦ Action continue, progressive (d'une cause naturelle), aboutissant à un effet que l'on peut constater; cet effet. Le travail de la fermentation. « Le travail des eaux » (Buffon). — Effet de certaines contraintes. Le travail du bois. ⇒ gauchissement. — (Abstrait) Élaboration ou modification progressive. « La magie et la sorcellerie [...] suppriment le travail du temps » (Baudelaire). Le travail de l'inconscient. Le travail de deuil. Le travail du rêve.
2 ♦ (1790) Le fait de produire un effet utile, par son activité. ⇒ fonctionnement, force. Le travail d'une machine, d'un mécanisme. — Travail musculaire : quantité de travail (au sens 3o, ci-dessous) fournie par l'ensemble des muscles d'un organisme.
3 ♦ (1829; on disait force) Phys. Produit d'une force (IV, 1o) par le déplacement de son point d'application. La notion d'énergie recouvre celles de force et de travail. Unités de travail. ⇒ 2. erg, joule, kilogrammètre; kilowattheure. Quantité de travail que peut fournir une machine par unité de temps. ⇒ puissance.
⊗ CONTR. Inaction, oisiveté, repos; loisir, vacances; chômage.
travail 2. travail [ travaj ] n. m.
• v. 1200; bas lat. trepalium, var. de tripalium « instrument de torture », du lat. class. tripalis « à trois pieux »
♦ Techn. Dispositif servant à immobiliser les chevaux, les bœufs, pour pratiquer sur eux certaines opérations. Des travails. « le colossal travail de bois où le maréchal-ferrant faisait entrer à reculons les chevaux pour les immobiliser avant qu'il les ferrât » ( Quignard).
● travail, travails nom masculin (bas latin trepalium, instrument de torture, du latin classique tres, trois, et palus, pieu) Sorte de cage dans laquelle on place les grands animaux pour les immobiliser afin de pouvoir les opérer. ● travail, travails (difficultés) nom masculin (bas latin trepalium, instrument de torture, du latin classique tres, trois, et palus, pieu) Sens et orthographe Au sens courant de « activité, effort, métier », travail a pour pluriel travaux, mais au sens technique de « appareil servant à maintenir les grands animaux domestiques pour les ferrer ou les soigner », travail fait au pluriel travails. ● travail, travails (homonymes) nom masculin (bas latin trepalium, instrument de torture, du latin classique tres, trois, et palus, pieu) travail nom masculin travaille forme conjuguée du verbe travailler travaillent forme conjuguée du verbe travailler travailles forme conjuguée du verbe travailler ● travail, travaux nom masculin (de travailler) Activité de l'homme appliquée à la production, à la création, à l'entretien de quelque chose : Travail manuel, intellectuel. Activité professionnelle régulière et rémunérée : Vivre de son travail. Exercice d'une activité professionnelle ; lieu où elle s'exerce : Le travail en usine. Ensemble des opérations que l'on doit accomplir pour élaborer quelque chose : Cette réparation demandera deux jours de travail. Toute occupation, toute activité considérée comme une charge : Les enfants, ça donne bien du travail. Ouvrage réalisé ou à réaliser, manuel, artistique, intellectuel : Il a publié un travail sur la littérature provençale. Manière dont un ouvrage ou une œuvre ont été exécutés : Le fin travail d'une miniature. Technique permettant de travailler une matière, d'utiliser un outil ou un instrument : Apprendre le travail du bois. Exercices accomplis pour acquérir la maîtrise d'une activité : Le travail d'un gymnaste aux anneaux. Activité laborieuse de l'homme considérée comme un facteur essentiel de la production et de l'activité économique : Le capital et le travail. Effet, résultat utile produit par le fonctionnement de quelque chose : Évaluer le travail d'une machine. Action continue produite par un élément ou un phénomène naturel ; modification subie par un milieu, une matière qui en est l'objet : Le gauchissement d'une poutre dû au travail du bois. Modification, évolution lente due à une cause extérieure : Laisser faire le travail du temps. Médecine Phase de l'accouchement marquée par l'association de contractions utérines douloureuses de plus en plus rapprochées et par le raccourcissement et la dilatation du col de l'utérus. Physique Quantité d'énergie reçue par un système matériel se déplaçant sous l'effet d'une force, et égale au produit scalaire de la force par le vecteur déplacement. ● travail, travaux (citations) nom masculin (de travailler) Émile Chartier, dit Alain Mortagne-au-Perche 1868-Le Vésinet 1951 La vie est un travail qu'il faut faire debout. Propos d'un Normand, tome I Gallimard Louis Auguste Blanqui Puget-Théniers 1805-Paris 1881 et Jean, dit Jean-Richard Bloch Paris 1884-Paris 1947 Le capital est du travail volé. Critique sociale François Fayolle 1774-1852 Le temps n'épargne pas ce qu'on a fait sans lui. Discours sur la littérature et les littérateurs Jean Joseph Hubert Fourastié Saint-Bénin, Nièvre, 1907-Douelle, Lot, 1990 La limite idéale vers laquelle tend la nouvelle organisation du travail est celle où le travail se bornerait à cette seule forme de l'action : l'initiative. Le Grand Espoir du XXe siècle Gallimard abbé Ferdinando Galiani Chieti 1728-Naples 1787 Toutes les méthodes agréables d'apprendre aux enfants les sciences sont fausses et absurdes, car il n'est pas question d'apprendre ni la géographie ni la géométrie, il est question de s'accoutumer au travail, c'est-à-dire à l'ennui. Lettre à Mme d'Épinay Victor Hugo Besançon 1802-Paris 1885 Le travail est la meilleure des régularités et la pire des intermittences. Tas de pierres Éditions Milieu du monde Paul Laffitte 1839-1909 L'économie politique l'a proclamé en une formule célèbre : le capital, c'est du travail accumulé. Complétez votre découverte monsieur l'économiste distingué : le capital, c'est le travail de plusieurs accumulé par un seul. Corollaire : le travail, c'est du capital qui ne s'accumule pas. Jéroboam ou la Finance sans méningite La Sirène Félicité de La Mennais Saint-Malo 1782-Paris 1854 Le travail est partout et la souffrance partout : seulement il y a des travaux stériles et des travaux féconds, des souffrances infâmes et des souffrances glorieuses. Paroles d'un croyant Louis XIV, roi de France Saint-Germain-en-Laye 1638-Versailles 1715 Le travail n'épouvante que les âmes faibles. Mémoires Marie Rouget, dite Marie Noël Auxerre 1883-Auxerre 1967 Ce n'est pas un travail vite fait que d'aimer. Chants de la merci, Préludes et exercices Stock Jules Renard Châlons, Mayenne, 1864-Paris 1910 La peur de la mort fait aimer le travail, qui est toute la vie. Journal, 10 juillet 1897 Gallimard Jules Renard Châlons, Mayenne, 1864-Paris 1910 La peur de l'ennui est la seule excuse du travail. Journal, 10 septembre 1892 Gallimard Paul Verlaine Metz 1844-Paris 1896 La vie humble aux travaux ennuyeux et faciles Est une œuvre de choix qui veut beaucoup d'amour. Sagesse, I, 8 Messein Ovide, en latin Publius Ovidius Naso Sulmona, Abruzzes, 43 avant J.-C.-Tomes, aujourd'hui Constanţa, Roumanie, 17 ou 18 après J.-C. Le travail surpassait la matière. Materiam superabat opus. Les Métamorphoses, II, 5 Sénèque, en latin Lucius Annaeus Seneca, dit Sénèque le Philosophe Cordoue vers 4 avant J.-C.-65 après J.-C. Le travail réclame l'élite des humains. Labor optimos citat. De la providence, 5 Sénèque, en latin Lucius Annaeus Seneca, dit Sénèque le Philosophe Cordoue vers 4 avant J.-C.-65 après J.-C. Le travail est l'aliment des âmes nobles. Generosos animos labor nutrit. Lettres à Lucilius, XXXI Virgile, en latin Publius Vergilius Maro Andes, aujourd'hui Pietole, près de Mantoue, 70 avant J.-C.-Brindes 19 avant J.-C. Les travaux interrompus restent en suspens. Pendent opera interrupta. L'Énéide, IV, 88 Virgile, en latin Publius Vergilius Maro Andes, aujourd'hui Pietole, près de Mantoue, 70 avant J.-C.-Brindes 19 avant J.-C. Le travail bouillonne. Fervet opus. Les Géorgiques, IV, 169 Commentaire Virgile désigne ainsi l'activité des abeilles. Cette expression caractérise toute activité fiévreuse. Virgile, en latin Publius Vergilius Maro Andes, aujourd'hui Pietole, près de Mantoue, 70 avant J.-C.-Brindes 19 avant J.-C. Un travail opiniâtre vient à bout de tout. Labor omnia vincit improbus. Les Géorgiques, I, 144-145 Jerome Klapka, dit Jerome K. Jerome Walsall 1859-Northampton 1927 J'aime le travail ; il me fascine et je peux rester assis des heures à le considérer. J'adore l'avoir sous la main, et la seule idée de m'en débarrasser me fend le cœur. I like work ; it fascinates me, I can sit and look at it for hours. I love to keep it by me ; the idea of getting rid of it nearly breaks my heart. Trois Hommes dans un bateau, XV Abraham Lincoln près de Hodgenville, Kentucky, 1809-Washington 1865 Le travail est antérieur au capital et indépendant de celui-ci. Le capital n'est que le fruit du travail et n'aurait jamais pu exister si le travail n'avait pas existé avant lui. Le travail est supérieur au capital et mérite de loin plus grande considération. Labor is prior to, and independent of, capital. Capital is only the fruit of labor, and could never have existed if labor had not first existed. Labor is the superior of capital, and deserves much the higher consideration. Message to Congress, 3 décembre 1861 ● travail, travaux (expressions) nom masculin (de travailler) De travail, utilisé pour travailler : Vêtement de travail. Travail de Romain, d'Hercule, œuvre exigeant une force extraordinaire, des efforts exceptionnels. Travail de forçat, de bagnard, de cheval, labeur pénible, épuisant. Centre d'aide par le travail (C.A.T.), institution à finalité sociale qui dispense des activités à caractère professionnel ainsi qu'un soutien médico-social et éducatif à des personnes subissant un handicap lourd qui ne leur permet pas d'être insérés dans un atelier protégé. Code du travail, codification de l'ensemble des textes législatifs et réglementaires intéressant le droit du travail. (Au code de 1910 a succédé celui de 1973.) Droit du travail, ensemble des règles juridiques applicables aux relations individuelles et collectives entre les travailleurs salariés et leurs employeurs. Travail différencié, travail temporaire, à temps partiel ou contrats de travail à durée déterminée. Travail intermittent, contrat à durée indéterminée concernant les emplois qui comportent par nature une alternance de périodes travaillées et non travaillées. Travail d'intérêt général (T.I.G.), temps de travail non rémunéré imposé à un délinquant à titre de peine de substitution à l'emprisonnement, d'obligation assortissant un sursis ou à titre de peine complémentaire. (Cette peine a été instituée en 1983.) Travail à domicile, travail fourni par un donneur d'ouvrage, effectué par le travailleur à son domicile et rémunéré forfaitairement. (Les travailleurs à domicile bénéficient de l'extension de la législation sociale, de la garantie d'un salaire minimum et des conventions collectives.) Travail de deuil, effet des processus psychiques mis en jeu à la suite de la perte d'un objet d'amour externe. Travail du rêve, transformation des matériaux du rêve (restes diurnes et pensées latentes) aboutissant au contenu manifeste du rêve. Psychologie du travail, branche de la psychologie qui étudie les comportements de l'homme au travail et le retentissement des conditions de travail sur ces comportements. Sociologie du travail, étude systématique du travail industriel, sur le plan des exécutants et sur le plan de l'organisation. ● travail, travaux (homonymes) nom masculin (de travailler) travail nom masculin travaille forme conjuguée du verbe travailler travaillent forme conjuguée du verbe travailler travailles forme conjuguée du verbe travailler ● travail, travaux (synonymes) nom masculin (de travailler) Activité de l'homme appliquée à la production, à la création...
Synonymes :
- labeur
Activité professionnelle régulière et rémunérée
Synonymes :
- emploi
- fonction
- métier
- place
- poste
Exercice d'une activité professionnelle ; lieu où elle s'exerce
Synonymes :
- boulot (populaire)
- turbin (populaire)
Contraires :
- chômage
- loisir
- repos
Ensemble des opérations que l'on doit accomplir pour élaborer quelque chose
Synonymes :
- besogne
- ouvrage
- tâche
Contraires :
- inaction
- oisiveté
Ouvrage réalisé ou à réaliser, manuel, artistique, intellectuel
Synonymes :
- oeuvre
Manière dont un ouvrage ou une œuvre ont été exécutés
Synonymes :
- façon
- facture
Effet, résultat utile produit par le fonctionnement de quelque chose
Synonymes :
- marche
Sociologie. Sociologie du travail
Synonymes :
- sociologie industrielle
travail, aux
n. m.
rI./r
d1./d Effort que l'on fait, peine que l'on prend pour faire une chose; effort long et pénible. Ces lignes sentent le travail.
d2./d MED Période de l'accouchement où se produisent les contractions utérines jusqu'à l'expulsion de l'enfant. Femme en travail.
d3./d Altération ou déformation qui se produit au sein d'une matière (sous l'action de certains agents). Le travail du bois sous l'action de l'humidité.
d4./d Activité, fonctionnement qui aboutit à un résultat utile. Le travail d'une machine.
— Le travail de l'imagination.
— SPORT Entraînement.
d5./d PHYS énergie mécanique produite par un ensemble de forces pendant un temps donné. (On parle alors de quantité de travail.)
rII./r
d1./d Ensemble des activités économiques des hommes, d'un pays, en vue de produire quelque chose d'utile pour la communauté. La division du travail.
— Bureau international du travail (B.I.T.): organisme directeur de l'Organisation internationale du travail (O.I.T.).
d2./d Ensemble de la population active. Le monde du travail.
|| Spécial. Ensemble des travailleurs salariés de l'agriculture et de l'industrie. Rapport entre le capital et le travail.
rIII/r Ensemble des activités, des efforts nécessaires pour produire quelque chose, pour obtenir un résultat déterminé.
d1./d Manière dont est façonné un objet, une matière, dont une tâche est accomplie. Un travail très soigné.
|| Ouvrage, résultat ainsi obtenu. Il nous a remis un travail parfait.
|| Iron. C'est du joli travail!
d2./d Transformation d'une matière nécessitant l'intervention de l'homme. Le travail du bois, de l'ivoire.
d3./d Activité rémunérée. Chercher du travail. Perdre son travail.
|| DR Obligation exécutée sur les ordres et sous le contrôle d'un employeur en contrepartie d'une rémunération. Code du travail.
d4./d Ouvrage que l'on fait ou qui est à faire; activité, ouvrage qui demande du temps et des efforts. Avoir beaucoup de travail.
|| Plur. (Suivi d'un qualificatif.) Travaux ménagers.
d5./d (Plur.) Entreprises, ouvrages remarquables nécessitant de grands efforts. Les travaux d'Hercule.
|| Travaux publics: ouvrages d'utilité publique (ouvrages d'art, d'équipement, etc.) exécutés pour le compte d'une personne morale administrative et entrepris aux frais de l'état ou des collectivités locales.
|| (Afr. subsah., Antilles fr., Madag.) Anc. Travail forcé: travail gratuit, ou faiblement rémunéré, imposé par l'autorité coloniale aux populations.
d6./d (Plur.) Discussions, délibérations (d'une assemblée). L'Académie a suspendu ses travaux.
d7./d (Plur.) Recherches, activités menées en vue d'obtenir un résultat précis dans le domaine intellectuel. Travaux d'un chercheur et de son équipe.
|| (Sing. et Plur.) Ouvrage, résultat de ces travaux. Lire les travaux d'un historien.
|| Travaux dirigés: à l'université, application pratique d'un cours magistral, sous le contrôle d'un enseignant. (Abrév.: T.D.)
d8./d PHYS Mode de transfert de l'énergie dont l'unité est le joule. (Lorsque, sous l'action d'une force F, un corps passe d'un point A à un point B, le travail W fourni par cette force est égal au produit de la distance AB par la projection de la force F sur AB).
I.
⇒TRAVAIL1, -AUX, subst. masc.
I. — OBSTÉTR. Ensemble des phénomènes mécaniques de l'accouchement qui permettent la dilatation du col de l'utérus et l'expulsion du fœtus. Travail d'enfantement. On la fera faire du bras [la saignée] lorsque le travail sera long; que les douleurs se succéderont avec force et sans beaucoup de succès (BAUDELOQUE, Art accouch., 1812, p. 196). À minuit les douleurs cessèrent et le travail s'interrompit. On avait d'autant plus sujet d'inquiétude que ma mère avait accouché précédemment d'un enfant mort et failli mourir (A. FRANCE, Pt Pierre, 1918, p. 6).
♦ Salle de travail. Pièce aménagée pour les accouchements dans un hôpital, une maternité. (Dict. XXe s.).
— En travail. En train d'accoucher. Vous reviendrez sachant qu'il n'y a nulle part un pauvre petit coin de terre où votre femme en travail puisse enfanter son premier né (LAMMENNAIS, Paroles croyant, 1834, p. 121). Au fig., vx ou littér. Dans les périodes douloureuses qui accompagnent une création, une mutation. L'entrelacs de données intérieures sentimentales qui sont en travail (DU BOS, Journal, 1927, p. 269).
II. A. — [L'accent est mis sur l'activité]
1. Activité humaine exigeant un effort soutenu, qui vise à la modification des éléments naturels, à la création et/ou à la production de nouvelles choses, de nouvelles idées. Travail créateur, intellectuel, manuel, qualifié, scientifique, spécialisé, technique; travail des mains, de la pensée, de la réflexion; se mettre au travail; se plonger dans le travail; travail individuel, en commun, en équipe, en groupe; travail à la machine, à la main; travail agricole, industriel. Le travail améliore nos facultés morales ou intellectuelles; le hasard les donne, et souvent il les développe (SENANCOUR, Obermann, t. 2, 1840, p. 2):
• 1. C'est la formule célèbre d'Économie Politique et Philosophie: « Toute la prétendue histoire du monde n'est rien d'autre que la production de l'homme par le travail humain. » Et Marx a bien reconnu que telle était déjà la position hégélienne (...) puisqu'il a félicité Hegel d'avoir découvert dans le travail l'acte par lequel l'homme se produit lui-même.
LACROIX, Marxisme, existent., personn., 1949, p. 32.
— [Pour encourager ou enjoindre qqn ou soi-même à entamer une tâche] Au travail! Le pèlerin (...) courut à la commune. On y visa ses papiers, et bientôt il en sortit muni d'une autorisation signée, parafée par M. le Maire. En avant! au travail, houp! (CLADEL, Ompdrailles, 1879, p. 115).
— De travail
♦ [En parlant d'inanimés] Qui concerne le travail, utilisé pour le travail. Cabinet, document, gants, salle, table, vêtements de travail; capacité, habitude, méthode, puissance de travail. Son pays, d'où il n'avait rapporté qu'un ardent désir de réussir, une faculté de travail exceptionnelle (G. LEROUX, Parfum, 1908, p. 5).
Langue de travail. Langue utilisée pour la communication dans les réunions professionnelles ou scientifiques internationales. En 1900, beaucoup d'auteurs étrangers (...) faisaient suivre leur publication dans la langue nationale d'un résumé en une des trois langues de travail (FURON ds R. gén. sc., t. 63, 1956, p. 32).
♦ [En parlant de pers.] Qui fait le travail. Les études de sociologie industrielle, par exemple, montrent bien la multiplicité des appartenances qui sollicitent l'individu: membre d'une équipe de travail, il est aussi lié à sa famille, affilié à un syndicat ou à un parti, parfois à une église (Traité sociol., 1968, p. 393).
♦ Groupe de travail. Groupe restreint de personnes chargé par une collectivité d'étudier une question particulière, de soumettre des propositions dont elle débattra par la suite. Le groupe de travail qui s'est occupé de l'ameublement au sein de la commission des industries de transformation (Industr. fr. bois, 1955, p. 6).
— Travail de + subst.
♦ [Le compl. désigne une matière] Action de modifier une matière, de la rendre utilisable. Travail des métaux, du bois, du sol. Ah! ce paysan voué au travail de la terre, qui porte si courageusement le poids du jour (GAMBETTA, 1871 ds Fondateurs 3e Républ., p. 237). On trouve de nombreux produits de l'industrie de l'homme néolithique. Le travail de la pierre s'est perfectionné (BOULE, Conf. géol., 1907, p. 209).
♦ [Le compl. désigne un outil] Technique d'utilisation de cet outil. Je pensai que le goût du travail de l'aiguille l'emportait, dans l'esprit d'une fille (RESTIF DE LA BRET., M. Nicolas, 1796, p. 87).
— P. anal. Activité utile des animaux domestiques. Le preneur profite seul des laitages, du fumier et du travail des animaux donnés à cheptel (Code civil, 1804, art. 1811, p. 328).
♦ Bête de travail. Animal domestique élevé pour l'utilité de sa force. Les bêtes de travail ont été recrutées parmi les chevaux et les bœufs, accessoirement parmi les ânes et les mulets (WOLKOWITSCH, Élev., 1966, p. 22).
2. Effort, exercice physique ou intellectuel, réalisé en vue de l'acquisition, de l'apprentissage ou de la réussite de quelque chose. Travail scolaire. Le travail des hanches développe les muscles d'attache de la cuisse au bassin (Arts et litt., 1935, p. 44-7). On a créé des symboles, il existe des machines qui dispensent de l'attention, qui dispensent du travail patient et difficile de l'esprit (VALÉRY, Variété III, 1936, p. 225).
3. Activités ou ensemble d'activités utiles qu'il est nécessaire d'accomplir. Cette heure passée paisiblement avec Dieu en me promenant me fera grand bien (...). Puis mon travail pastoral, paisible: chaque chose l'une après l'autre (DUPANLOUP, Journal, 1857, p. 191). Ce sont ces demoiselles (...) incapables de s'assurer la santé, la gaieté, de se servir elles-mêmes, de participer au travail commun de la cuisine et du nettoyage (FRAPIÉ, Maternelle, 1904, p. 201).
♦ Travail social. Par « travail social » nous entendons d'abord toute action organisée qui vise à réduire une inadaptation quelconque ou qui est (explicitement ou implicitement) préventive de l'inadaptation d'un individu ou d'un groupe (Esprit, avr.-mai 1972, p. 547 ds FOULQ. Sc. soc. 1978).
4. Activité contraignante qui occupe. Je suis comme le temps, sombre et sans soleil. Maintenant que je n'ai plus de travail suivi, je ne sais que devenir. Je rêvasse et je patauge (FLAUB., Corresp., 1862, p. 32).
5. Besogne, tâche. Se tuer, se crever au travail; être accablé, débordé, écrasé, submergé de travail; abattre du travail. Le flot d'une population dense a pu atteindre ses extrêmes limites sur les flancs de l'Apennin, des Alpes méridionales et des Cévennes. Ces hauteurs, elle les délaisse aujourd'hui, rebutée par le travail minutieux et pénible qu'exigent les terrassements en gradins (VIDAL DE LA BL., Princ. géogr. hum., 1921, p. 88).
♦ Avoir du travail par-dessus la tête. Avoir beaucoup de tâches à accomplir. À deux reprises depuis trois heures, il s'était entendu rabrouer sévèrement et il n'osait pas importuner de nouveau des gens qui avaient du travail par-dessus la tête (EXBRAYAT, On se reverra petite, 1964, p. 42).
B. — [L'accent est mis sur le résultat du travail]
1. Ouvrage réalisé par l'activité humaine de modification des éléments naturels ou de production de nouveaux biens. Beau, bon, grand travail; travail personnel, collectif, d'équipe; travail utile. C'était mon fabricant de la Salpêtrière, il apportait le travail de quinze jours, et à son air timide on voyait qu'il tremblait d'être refusé (JANIN, Âne mort, 1829, p. 171). J'attends avec impatience parfois le travail commandé qui ne vient pas vite (VALÉRY, Corresp. [avec Gide], 1895, p. 253).
— En partic., dans le domaine intellectuel. Travail analytique, synthétique; travail de comparaison, de compilation, d'élaboration, d'érudition, d'interprétation, de recherche. Personne n'a entrevu que ma volonté était de faire un travail purement philologique, que je crois d'un vif intérêt historique et social (ZOLA, Assommoir, 1877, préf., p. 373). Le curé aurait voulu que Jean Péloueyre se remît au travail d'histoire locale, entrepris avec passion mais depuis une année interrompu (MAURIAC, Baiser Lépreux, 1922, p. 179).
♦ Dans le domaine scol. Travail à la maison. Devoirs à la maison. Juger le temps réellement disponible pour le travail à la maison ou pour trouver l'explication des difficultés rencontrées à certains moments de la vie scolaire (Encyclop. éduc., 1960, p. 133).
2. Qualité de cet ouvrage; manière dont il a été réalisé. Travail bâclé, régulier, sérieux, soigné, suivi; travail d'amateur, de bénédictin. Une paire de pendants d'oreilles tout en or, d'un travail absolument artistique (MALLARMÉ, Dern. mode, 1874, p. 713):
• 2. On comprend que des gens comme Lanson et Brunot méprisent le travail du Dictionnaire de l'Académie, et le but de ce très vain travail, et les méthodes, ou le manque total de méthode, de ces amateurs et de ces ignorants.
LARBAUD, Journal, 1935, p. 339.
♦ C'est du) beau travail! Le travail! (pop.) [En bonne ou en mauvaise part suivant la situation] Sacrée andouille! Pas fichu seulement de fabriquer une verte selon les principes! En voilà un beau travail! Oui, c'est du joli! c'est du propre! (COURTELINE, Train 8 h. 47, 1888, p. 45). Du beau travail! Faux-marbre sur les murs, faux-chêne sur le comptoir. Les vieux de l'hôtel n'en revenaient pas (DABIT, Hôtel Nord, 1929, p. 130).
C. — [L'accent est mis sur l'exécution et les conditions du travail]
1. Activité, ensemble d'activités coordonnées, d'une ou de plusieurs personnes, en vue de la réalisation de quelque chose. Il est possible, par un travail d'analyse, de discerner des correspondances entre les rassemblements humains et les conditions physiques (VIDAL DE LA BL., Princ. géogr. hum., 1921, p. 10). Le salut de la galère qui porte vos espoirs réclame un dur travail. Vous l'accomplirez avec fierté parce que vous travaillerez à votre délivrance (AYMÉ, Vogue, 1944, p. 130). Travaux d'approche. Travail préparatoire. V. ce mot I C 1 ex. 2.
♦ Travail de longue haleine. Travail dont l'exécution demande du temps. Fénelon en a été témoin en Espagne, où il a décrit ce travail de longue haleine, avec entr'aide, emploi de salariés, parfois de bulldozer (MEYNIER, Paysages agraires, 1958, p. 94).
♦ Travail de bœuf, de cheval, de bagnard, de forçat, d'Hercule, de nègre, de Romain, de titan. Travail dont l'exécution exige beaucoup d'énergie et de temps. Au prix d'un travail de titan qui a pris plus de quinze ans et coûté la vie à un grand nombre de Chinois et de Pakistanais, la route a été taillée dans une montagne en perpétuel mouvement (Le Monde loisirs, 17 mai 1986, p. 12, col. 1).
♦ Travail de fourmi. Travail généralement long, dont l'exécution demande de la minutie et de la persévérance. Il est évident que la vie et ce qu'il en tire l'intéressent bien plus que ce travail de fourmi qu'est l'élaboration d'une œuvre. Il a trop de générosité pour cette vocation d'égoïste et d'avare (J. DUTOURD, Pluche, 1967, p. 263).
♦ Travail de force. Travail dont l'exécution exige une grande énergie physique. L'extraction demandait un travail de force, tandis que l'appareillage (assemblage des pierres dans la construction) requérait une minutie dont nous n'avons plus idée (LAMBERTIE, Industr. pierre et marbre, 1962, p. 61).
♦ Au plur. Travaux d'aiguille, de dame. Travaux de couture, de tricot ou de crochet. Joséphine pensa alors à ces longues veillées si monotones, consacrées à des lectures et à des travaux d'aiguille (KARR, Sous tilleuls, 1832, p. 205).
2. Dans le domaine intellectuel
a) Souvent au plur. Recherche, ensemble de recherches dans un domaine particulier. Ensemble des travaux de; grâce aux travaux de; attendre, connaître, citer les travaux de qqn; poursuivre des travaux. Je m'étonne qu'un homme illustre, comme vous, par des travaux si considérables perde ses loisirs à une littérature si légère! (FLAUB., Corresp., 1863, p. 76). Un des avantages des atlas linguistiques, c'est de fournir des matériaux pour des travaux de dialectologie (SAUSS. 1916, p. 277).
— En partic.
♦ Dans le domaine universitaire. Travaux dirigés (T.D. V. dirigé B. Travaux pratiques (T.P.). V. pratique2 A 1.
♦ Dans le domaine littér. Ensemble d'activités intellectuelles qui se rapportent à la production d'une œuvre; cette œuvre. S'il est pauvre [l'homme de lettres], qu'il sache combiner avec ses travaux littéraires l'exercice d'une profession qui subvienne à ses besoins (L. BLANC, Organ. trav., 1845, p. 190). Deux poètes (...) voulurent bien penser que je m'intéressais au sort de leurs beaux travaux poétiques: ils ont vu qu'ils ne s'étaient pas trompés (CHATEAUBR., Mém., t. 3, 1848, p. 210).
b) Délibérations, (textes issus des) discussions d'une assemblée, d'une commission. Travail législatif, parlementaire. Songez-y bien, si les travaux de la Convention nationale sont manqués, vous n'avez plus à attendre qu'anarchie, misère et désolation (MARAT, Pamphlets, Aux amis de la Patrie, 1792, p. 309). La journée du mercredi et les matinées des autres jours sont consacrées aux travaux des commissions (LIDDERDALE, Parlement fr., 1954, p. 121).
3. Dans le domaine manuel. Opération, suite d'opérations nécessitant du matériel technique, du temps et l'activité physique d'une ou de plusieurs personnes. Travaux d'assainissement, d'assèchement, de construction, de défense, de défrichement, d'entretien, d'irrigation, de réfection, de réparation, d'urbanisme; conducteur de travaux; achèvement des travaux; entreprendre, faire, financer des travaux; accélérer, faire avancer, pousser, surveiller les travaux; inspecteur des travaux finis (p. plaisant.). Bonne occasion de se renseigner sur les travaux du canal (VOGÜÉ, Morts, 1899, p. 288). Le mauvais entretien des fossés qui compromet les travaux de drainage (Forêt fr., 1955, p. 8).
♦ [Dans l'agric.] Travaux agricoles, champêtres, de la campagne. Chez les Havasupaï les femmes prennent part aux travaux des champs et à l'occasion plantent pour leur propre compte (LOWIE, Anthropol. cult., trad. par E. Métraux, 1936, p. 290).
♦ [Dans le bât.] Travaux de ravalement, de terrassement. Pendant les travaux de restauration, on avait dû consolider l'édifice avec des poutrelles en fer (DUHAMEL, Suzanne, 1941, p. 26).
♦ [Dans la constr. d'ouvrages d'art] Travaux maritimes, portuaires, souterrains. Les ciments pour travaux à la mer ne sont pas à proprement parler des ciments « spéciaux » (CLÉRET DE LANGAVANT, Ciments et bétons, 1953, p. 140).
♦ Expr. Ralentir! travaux!
♦ Grands travaux. Chantiers d'intérêt public ayant trait aux transports, à la production d'énergie, à l'aménagement des villes et des campagnes. On supposait que la ville, qui avait entrepris de grands travaux dans les quartiers excentriques, aurait besoin de ces terrains (BECQUE, Corbeaux, 1882, II, 9, p. 135).
♦ Travaux publics
ARM., vieilli. Peine correctionnelle du code de justice militaire consistant en un travail forcé dans des chantiers civils ou militaires, actuellement supprimée. Il avait été condamné par le conseil de guerre à cinq ans de travaux publics pour avoir volé la caisse de sa compagnie (G. LEROUX, Parfum, 1908, p. 58).
[Avec ou sans majuscule] Chantiers d'utilité générale mis en œuvre pour le compte d'une personne morale publique; p. méton., le ministère des Travaux publics (T.P.). École des Travaux publics d'État (T.P.E.); entrepreneur de travaux publics. À côté de ces divers fonctionnaires, se trouvent ceux à qui sont confiés des pouvoirs spéciaux: pour les travaux publics, les ingénieurs en chef, ingénieurs ordinaires, conducteurs (VIVIEN, Ét. admin., t. 1, 1859, p. 73). Un banquier. Il a des intérêts dans les entreprises de travaux publics. Un vrai républicain (ARAGON, Beaux quart., 1936, p. 203).
♦ DR. PÉNAL. Travaux forcés. Peine de droit commun, temporaire ou perpétuelle, effectuée au bagne de Guyane, abolie en 1936. Le nommé Chavard a été condamné à cinq ans de travaux forcés et à la marque, pour avoir volé, avec effraction, escalade nocturne et à main armée, cinq choux et un lapin blanc (SUE, Atar-Gull, 1831, p. 11). Travail d'intérêt général. Peine de substitution à l'emprisonnement dans certaines conditions. Michel expurgera sa peine en consacrant quarante heures de sa vie à effectuer un travail d'intérêt général (« TIG » pour les initiés) dans le musée de la Résistance et de la Déportation situé dans la citadelle de la vieille ville [à Besançon] (L'Événement du jeudi, 13 déc. 1984, p. 42, col. 2).
♦ Travaux d'utilité collective (T.U.C.). ,,Activité ouverte à tout jeune sans emploi de 16 à 21 ans, susceptible de contribuer à l'amélioration de la vie sociale, organisée par une collectivité territoriale, une association (..) et rémunérée par l'État`` (GDEL). Imaginés il y a tout juste un an, les TUC (travaux d'utilité collective) marchent bien, trop bien peut-être (Le Monde, 24 août 1985, p. 13).
♦ Gros travaux. V. gros1 III A.
♦ Travaux domestiques, ménagers. Ensemble des travaux nécessaires à l'entretien du ménage et du linge. Sa mère occupée aux travaux domestiques (CENDRARS, Bourlinguer, 1948, p. 213). Les travaux ménagers pour une femme sont parfois astreignants. Bien souvent, à l'époque actuelle, ils deviennent un fardeau (MATHIOT, Éduc. mén., 1957, p. 23).
♦ IMPR. Travaux de ville. Le nom de travaux de ville ou « bilboquets » s'applique aux impressions — en dehors des labeurs et journaux — ayant un caractère d'utilité passagère (É. LECLERC, Nouv. manuel typogr., 1897, p. 347).
D. — 1. Activité humaine laborieuse exercée en échange d'un bien, d'un service ou plus généralement en échange d'argent, dans le but de subvenir à ses besoins. Synon. pop. boulot2, turbin. Maintenant, il était lancé, les mots venaient tout seuls. Par moments, il s'écoutait avec surprise, comme si un étranger avait parlé en lui (...). Il disait leur misère à tous, le travail dur, la vie de brute, la femme et les petits criant la faim à la maison (ZOLA, Germinal, 1885, p. 1320). J'attendrais, je chercherais ailleurs; je vivrais provisoirement du travail de ma mère (DUHAMEL, Confess. min., 1920, p. 155).
SYNT. Travail à domicile, en usine, de bureau; travail indépendant; travail de jour, de nuit; travail à temps complet, à plein temps, à mi-temps, à temps partiel; travail journalier, mécanique, régulier; camarade, compagnon, collègue de travail; travail par équipe, par poste (v. poste2); travail posté (v. poster2), continu; poste, horaire, journée de travail; instrument, outil, vêtement de travail; conditions de travail; durée, organisation, produit du travail; avoir, chercher, trouver du travail; donner, fournir, distribuer du travail; vivre de son travail; division du travail; bourreau de travail (v. bourreau2).
♦ Travail à façon. Travail rémunéré, exécuté pour autrui qui fournit la matière première. Le producteur (...) peut, (...) par des contrats de travail à façon, transformer les minerais (Traité EURATOM, 1957, p. 342).
♦ Travail à la chaîne. Travail parcellisé qui ne demande qu'un nombre limité de gestes et d'opérations. La mutilation de la personnalité entraînée par le travail à la chaîne de nature automatique et parcellaire (Jeux et sports, 1967, p. 176).
♦ Travail aux pièces, à la tâche. Travail rémunéré en fonction de la tâche accomplie et non en fonction du temps passé à l'effectuer. V. pièce I B 2 ex. de Sorel.
♦ Travail pénitentiaire. Travail rétribué auquel sont soumis les détenus de droit commun. Le travail pénitentiaire ne doit pas être considéré comme une peine additionnée mais comme un moyen de faciliter la réadaptation des détenus (R. pénitentiaires et de dr. pénal, mars 1956, p. 168).
♦ Organisation scientifique du travail. Taylorisme. Quoi qu'il en soit, l'O.S.T. (Organisation scientifique du travail) (...) ne devait pas mourir avec son inventeur, tout au contraire (Sociol., 1970, p. 510).
♦ ÉCON. POL. Cette activité considérée comme le facteur essentiel de la création des richesses. Sur le produit du travail ouvrier et paysan, elle [la classe capitaliste et propriétaire] prélève tous les ans et indéfiniment une part notable (...). Ainsi, dans la société d'aujourd'hui, le travail des prolétaires ne leur appartient pas tout entier (JAURÈS, Ét. soc., 1901, p. 126). En éliminant le travail « vivant » pour faire des économies de salaires, les capitalistes tarissent la source de la valeur ajoutée. C'est la « matière première » même de leur profit qu'ils détruisent. Car c'est sur l'homme que l'on gagne de l'argent. Pas sur la machine (Le Nouvel Observateur, 12 janv. 1976, p. 44, col. 3). Force de travail. Marché du travail.
Moyens de travail. Ensemble de ce qui est nécessaire pour accomplir une activité productive. Seul le socialisme, en absorbant toutes les classes dans la propriété commune des moyens de travail, résoudra cet antagonisme [des classes] (JAURÈS, 1904 ds Doc. hist. contemp., p. 64).
2. Activité humaine laborieuse rétribuée, exercée au sein d'une entreprise et régie par des lois, par des codes. Code, droit, législation du travail; droit au travail; durée, liberté du travail; inspection, médecine du travail; aménagement, limitation du temps de travail. Dès le milieu du XIXe siècle, en France et en Grande-Bretagne, on avait interdit ou limité le travail des enfants trop jeunes, celui des femmes pendant la nuit (LESOURD, GÉRARD, Hist. écon., 1966, p. 441). Convention collective du travail; accident, conflit, inspecteur, médecin du travail; carte de travail; fête du travail.
♦ Arrêt de travail. Interruption de travail pour cause de grève ou de maladie; p. méton., formulaire de mise en congé pour cause de maladie. L'introduction de l'automation dans les processus continus de production rend les arrêts de travail techniquement catastrophiques (Univers écon. et soc., 1960, p. 44-12). Les arrêts de travail prescrits à l'occasion d'une cure thermale ne donnent pas lieu à indemnité journalière (Réforme Sécur. Soc., 1968, p. 46). Certificat de travail. Document délivré par l'employeur à un salarié à l'expiration du contrat de travail ou en cas de rupture de ce contrat. Procure lui un état civil de Rocroi (...), carte enregistrée, acte de naissance, certificat de travail (VAILLAND, Drôle de jeu, 1945, p. 8). Cessation de travail. Grève. Une loi de juillet 1963 (...) soumet toute cessation de travail à un préavis de cinq jours (BELORGEY, Gouvern. et admin. Fr., 1967, p. 235). Contrat de travail. Convention entre employeur et employé qui règle les modalités du travail salarié. La grève ne constitue plus en France (...) une rupture du contrat de travail. Sauf faute lourde du salarié, le contrat est seulement suspendu (REYNAUD, Syndic. en Fr., 1963, p. 139). Travail intérimaire, temporaire. Travail à durée limitée exercé dans une entreprise par un travailleur. On a répertorié, dans une ville de l'Ouest atlantique, jusqu'à 70 « points de vente » de travail temporaire (L'Express, 23 févr. 1976, p. 57, col. 2). S'en tenir, dans toute la mesure du possible, à des embauches de caractère provisoire: travail intérimaire ou, plus simplement, contrats de travail à durée déterminée (L'Express, 27 nov. 1981, p. 101, col. 2). Travail noir. V. noir I B 2. Travail au noir. V. noir II B 2.
3. P. méton.
a) Lieu où s'exerce cette activité. Synon. atelier, bureau, chantier, usine. Aller, être au travail; sortir du travail. À 9 heures précises j'ai quitté le travail pour me rendre chez Mme la baronne Micou (DELÉCLUZE, Journal, 1827, p. 434). C'était tout simplement comme s'il eût oublié quelque chose, et qu'il fût revenu du travail, un peu vite, pour réparer l'oubli qu'il avait fait (GENEVOIX, Raboliot, 1925, p. 338).
b) Temps pendant lequel s'exerce cette activité. Il y a, après le travail, un besoin de dépense, de grosse et niaise plaisanterie (GONCOURT, Journal, 1861, p. 898). Ce même homme et cette même femme se sont connus un jour, et l'homme a souri sans doute à la femme: il lui a, sans doute, après le travail, apporté des fleurs (SAINT-EXUP., Terre hommes, 1939, p. 259).
c) Ensemble des personnes qui exercent cette activité. Confédération française démocratique du travail (C.F.D.T.); Confédération générale du travail (C.G.T.); Organisation internationale du travail (O.I.T.); monde du travail:
• 3. L'entreprise, a-t-on dit, résulte de la collaboration du capital et du travail. Formule incomplète, parce que si par capital on entend capitalistes et par travail travailleurs, ceux-ci et ceux-là sont tellement hétérogènes qu'une collaboration entre eux est impuissante à résoudre les problèmes les plus élémentaires.
WILBOIS, Comment fonct. entr., 1941, p. 7.
♦ Bourse du travail. V. bourse2.
4. En partic. Activité professionnelle. Le travail pour une femme est si difficile à trouver et rapporte si peu de chose (BECQUE, Corbeaux, 1882, III, 8, p. 189). Le cœur d'un employé de métro n'est pas rempli par les billets qu'il perfore. Sa vraie vie commence là où son travail finit (MAURIAC, Journal 2, 1937, p. 158).
♦ En compos. Sans-travail.
5. Activité de production, imposée et obligatoire, généralement pénible. Camp de travail. Une nation à qui ne sont offertes, comme solution et comme espérance, que le travail forcé pour le compte de l'ennemi (DE GAULLE, Mém. guerre, 1954, p. 632). Service du travail obligatoire (S.T.O.).
III. A. — 1. a) Action continue, progressive, de quelque chose (élément ou phénomène naturel) qui aboutit à une modification observable. Travail d'érosion. Tous les monuments de la nature portent l'empreinte d'un grand travail des eaux agissant par déchirements, secousses, etc. (MAINE DE BIRAN, Journal, 1816, p. 158). En d'autres pays c'était déjà le renouveau, le travail ardent de la sève, la poussée des bourgeons et bientôt des feuilles (HÉMON, M. Chapdelaine, 1916, p. 44).
b) Modification interne que subit un élément, une matière. Les trépidations de la route, les manœuvres et même le travail du bois provoquaient des dislocations qui dégénéraient en avaries plus importantes (BAILLEUL, Matér. roulant ch. de fer, 1951, p. 97).
2. Action progressive, continue de quelque chose sur quelqu'un. Travail de l'amour, de la haine. Le travail efficace de la philosophie révolutionnaire n'est possible que par une liaison (...) du philosophe et de la classe qui porte la révolution (NIZAN, Chiens garde, 1932, p. 238). Comme c'est étrange que l'amour le plus fervent ne puisse se défendre contre le travail du temps! (MARTIN DU G., Thib., Épil., 1940, p. 880).
— PSYCHANAL. Travail du deuil. ,,Processus décrit par la psychanalyse et qui permet de se détacher de l'objet perdu en choisissant de rompre le lien`` (PEL. Psych. 1976). Travail du rêve. ,,Ensemble des opérations qui transforment les matériaux du rêve en un produit: le rêve manifeste. La déformation et l'effet de ce travail`` (Méd. Biol. t. 3 1972).
3. Action continue, volontaire d'une personne ou d'un groupe de personnes qui vise à une transformation sociale, à un changement politique. Travail politique, social, révolutionnaire. Il y a dix fois plus d'hommes qui comprennent qu'ils feront chez nous du travail utile contre le fascisme, que nous ne pouvons en organiser (MALRAUX, Espoir, 1937, p. 562).
B. — Action de produire un effet utile; résultat de cette action. Travail cérébral, musculaire; travail du cœur, du foie, des organes. J'ai connu quelques personnes qui, ne fermant presque pas l'œil depuis plusieurs années, étaient par conséquent dans l'impossibilité de se soustraire entièrement (...) au travail de la mémoire et de l'imagination (CABANIS, Rapp. phys. et mor., t. 1, 1808, p. 165). Peu à peu un travail cicatriciel s'établit qui rétracte les lésions en bourrelets ou en plaques fibreuses (CALMETTE, Infection bacill. et tubercul., 1920, p. 181).
C. — MÉCAN., PHYS. ,,Produit de l'intensité d'une force par la projection du déplacement de son point d'application sur la direction de la force`` (DEW. Technol. 1973). Unité de travail; travail d'une machine; travail produit par un moteur. V. puissance B ex. de Champly.
Prononc. et Orth.:[], plur. [-o]. Att. ds Ac. dep. 1694. Étymol. et Hist. A. 1. 1130-40 traval d'enfant « douleurs de l'accouchement » (WACE, Vie de Ste Marguerite, éd. E. A. Francis, 645); 2. ca 1140 « tourment » (GAIMAR, L'Estoire des Engleis, éd. A. Bell, 16); 3. fin XIIe s. « fatigue, peine supportée » (Moniage Guillaume, éd. W. Cloetta, II, 5205). B. 1. a) Ca 1130 « peine que l'on se donne, efforts » (Lois de Guillaume, éd. J. E. Matzke, 28); 1209 (GUIOT DE PROVINS, Bible, éd. J. Orr, 2305); b) mil. XIIIe s. « peine que l'on se donne dans l'exercice d'un métier artisanal » [associé à painne] (G. FAGNIEZ, Doc. rel. à l'hist. de l'industr. et du comm. en France, t. 1, p. 204 ds GEMMINGEN Arbeit, p. 104); 2e moit. XIIIe s. (Dit des Fevres ds Jongleurs et trouvères, éd. A. Jubinal, 129 ds T.-L.: De lor labor, de lor travail Vivent les fevres lëaument); 2. a) 1362-63 désigne le résultat de l'activité accomplie (DEHAISNES, Doc. [...] concernant l'hist. de l'art dans la Flandre, t. 1, p. 445 ds GEMMINGEN Arbeit, p. 107); b) 1676 « qualité de l'exécution d'un ouvrage » (FÉLIBIEN, p. 760); 3. 1600 « activité professionnelle quotidienne nécessaire à la subsistance » (doc. ds H. HAUSER, La Liberté du comm. et la liberté du travail sous Henri IV, p. 289 ds GEMMINGEN Arbeit, p. 109). C. Au plur. 1. 1611 désigne des actions difficiles, périlleuses, qui sont un titre de gloire pour leur auteur (J. BERTAUT, Œuvres poét., p. 20); 2. 1616 « ensemble des recherches effectuées dans un domaine intellectuel donné » (A. D'AUBIGNÉ, Les Tragiques ds Œuvres, éd. E. Réaume et de Caussade, t. 4, p. 150: je veux [...] Me livrer aux travaux de la pesante histoire); 3. 1721 « activités propres à un domaine technique déterminé » (MONTESQUIEU, Lettres persanes, p. 99: travaux des mines);1741 travaux domestiques (A.-C. CAYLUS, Féeries nouvelles, p. 571); 4. 1727 travaux publics (A.-M. DE RAMSAY, Les Voyages de Cyrus, p. 92); 5. 1768 travail forcé (VOLTAIRE, L'Homme aux quarante écus, p. 72: Il faut effrayer le crime, oui sans doute; mais le travail forcé et la honte durable l'intimident plus que la potence); 1795 travaux forcés (Code pénal, tit. I, art. 6 d'apr. BRUNOT t. 9, p. 1042, note 3). D. 1. 1769 « modification interne que subit une matière, une substance » (LEMIERRE, La Peinture, p. 221: C'est elle [la nature] qui [...] Nuance au vaste sein de la terre en travail Le jaspe, le porphyre); 2. 1783 « action progressive exercée par un élément, un phénomène naturel » (BUFFON, Hist. nat., Minéraux, t. 1, p. 152); 3. 1829 mécan. (G. CORIOLIS, Traité de la mécanique des corps solides..., Avertissement à la 1ère éd., p. IX ds QUEM. DDL t. 41: je désigne par le nom de travail la quantité qu'on appelle assez communément puissance mécanique, quantité d'action ou effet dynamique). Déverbal de travailler. Jusqu'au déb. du XVIe s. travail est souvent associé à peine (v. GEMMINGEN Arbeit, pp. 104-105) car le sens dominant est « fatigue, peine » qui peut avoir pour contrepartie une rétribution. Le sens de « activité professionnelle » devient très rare au XVIe s. pour revenir en force au XVIIe s. sous l'infl. de travailler. FEW t. 13, 2, p. 298, 290a; GEMMINGEN Arbeit, pp. 103-109. Fréq. abs. littér.:22 597. Fréq. rel. littér.:XIXe s.: a) 27 946, b) 31 865; XXe s.: a) 33 587, b) 34 983. Bbg. BALDINGER (K.). Vers une sém. mod. Paris, 1984, pp. 232-236; Vom Affektwort zum Normalwort. Mél. Wartburg (W. von) 1958, pp. 59-93. — DARM. Vie 1932, p. 49, 193. — DUB. Pol. 1962, p. 431. — FURUKAWA (N.). Le Nombre gramm. en fr. contemp. Tokyo, 1977, pp. 60-70. — GOHIN 1903, p. 291. — GOUG. Mots. t. 1. 1962, pp. 201-203. — KRUPP (M.). Wortfeld « Arbeit ». In: Europäische Schlüsselwörter. München, 1964, t. 2, pp. 258-286. — LEW. 1968, p. 74. — OSTRÁ (R.). Le Champ conceptuel du travail dans les lang. rom. Ét. rom. de Brno. 1967 t. 3, pp. 7-84; Struct. du signe ling. et chang. sém. Beitr. rom. Philol. 1972, t. 11, n° 1, pp. 118-131. —QUEM. DDLt. 9, 21, 24, 25, 26, 30, 32, 33, 41. — SPITZER (L.). Fr. travail. Rom. R. 1944, t. 34, pp. 374-379. — TOURNIER (M.). Un Vocab. ouvrier en 1848... Thèse, St-Cloud, 1975, pp. 92-100, 104-105, 136-140. — VARDAR Soc. pol. 1973 [1970], p. 312.
II.
⇒TRAVAIL2, -AILS, subst. masc.
TECHNOL. Appareil utilisé pour immobiliser les gros animaux domestiques quand ils doivent subir certaines opérations (ferrage, pansage, etc.). Je n'ai jamais entendu parler même des vestiges de travails, de ces machines de charpente où l'on suspendait les animaux difficiles (LA VARENDE, Normandie en fl., 1950, p. 169).
Prononc. et Orth.:[]. Att. ds Ac. dep. 1694 (1740: ,,n'a point de pluriel``; dep. 1762 ,,fait travails au pluriel``, sauf 1935 qui n'indique pas le plur.). Étymol. et Hist. Ca 1200 (Elie de Saint-Gille, 1920 ds T.-L.). Du lat. médiév. trepalium « instrument de torture » (dep. 573, Concile d'Auxerre ds BLAISE Latin. Med. Aev.; cf. DU CANGE), prob. calque du gr. byz. , comp. de - « trois » et « pieu » (H. et R. KAHANE ds R. Ling. rom. t. 26, pp. 138-139; KAHANE Byzanz, 439 (); FEW t. 13, 2, pp. 291b-292a).
1. travail, aux [tʀavaj, o] n. m.
ÉTYM. XIIe; de travailler.
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1 Vx. (Seul sens courant du XIIe au XVIe; vieilli au XVIIe). État d'une personne qui souffre, qui est tourmentée; activité pénible. || Les grands travaux que Notre-Seigneur a soufferts (Bossuet, Catéchisme des Fêtes, 41). — Se mettre en travail (Mme de Sévigné), en peine, dans l'inquiétude. || Amasser du bien avec de grands travaux… (→ Dépouiller, cit. 21, Molière).
1 Lui qu'Apollon jamais n'a fait parler à faux,
Me promit par ces vers la fin de mes travaux (…)
Corneille, Horace, I, 2.
♦ (1160). Fatigue. — « Le travail du chemin », « de la mer » (Voiture), du voyage. — (→ Courage, cit. 1). || « Après bien du travail, le coche arrive (cit. 6) au haut ».
2 Les voyages ont leurs travaux comme leurs plaisirs; mais les fatigues qui se trouvent dans cet exercice (…) accroissent ordinairement l'envie de voyager.
J.-F. Regnard, Voyage en Laponie, p. 77.
2 (V. 1155). Spécialt. Mod. Période de l'accouchement pendant laquelle se produisent les contractions utérines aboutissant à l'expulsion du fœtus (cour. : douleurs de l'enfantement). ⇒ Accouchement. || Femme en travail. ⇒ Gésine. ☑ Loc. métaphorique. « La montagne en travail enfante (cit. 6) une souris ». Fig. || En travail : dans les souffrances. — Méd. || Salle de travail, d'accouchement (→ Gésine, cit. 2).
♦ (Animaux) :
3 Toutes deux commençaient à être inquiètes, ça ne marchait guère, bien que le travail, du côté des os, parût fini. Le passage y était, pourquoi le veau ne sortait-il pas ?
Zola, la Terre, III, V.
♦ Fig. || En travail : dans une période difficile, une crise de mutation profonde.
4 Tandis que, anxieusement, le pays fixe les yeux sur le « sauveur », lui, depuis un mois, sonde, jusqu'au tréfonds, l'âme de ce pays qui, depuis dix ans, en douloureux travail, a pensé y succomber.
Madelin, Hist. du Consulat et de l'Empire, De Brumaire à Marengo, III.
3 Travaux, n. m. pl. Littér. Fatigues, activités pénibles qui apportent de la gloire, et, par ext., (avec infl. du sens mod. II), entreprises dangereuses, difficiles et glorieuses. || Les glorieux travaux d'un héros. ⇒ Fait. || Nobles travaux (→ Approfondir, cit. 3). || « Blanchi (cit. 12) dans les travaux guerriers (…) ». || Pour reconnaître tant de travaux, le roi l'avait fait chevalier de ses ordres (cit. 40). || Les travaux de Mars (→ Fracas, cit. 6) : les exploits militaires. || Les travaux d'Hercule (→ Fleur, cit. 10). — Rare. Au sing. || Le treizième travail d'Hercule (Gautier, Mlle de Maupin, Préface p. 32). — REM. Au sing., un travail d'Hercule serait compris au sens II.
5 Faut-il combattre encor mille et mille rivaux,
Aux deux bouts de la terre étendre mes travaux (…)
Corneille, le Cid, V, 7.
6 Il invoque à la fin le dieu dont les travaux
Sont si célèbres dans le monde.
La Fontaine, Fables, VI, 18.
7 Peuple, ce siècle a vu tes travaux surhumains
Il t'a vu repétrir l'Europe dans tes mains.
Hugo, l'Année terrible, Mai, I.
———
II (XVe, Charles d'Orléans, Ballade, 73; « activité pénible » ou « travail intellectuel », dans la langue classique).
1 Ensemble des activités humaines coordonnées en vue de produire ou de contribuer à produire ce qui est utile ou jugé tel; état, situation d'un homme qui agit avec suite en vue d'obtenir un tel résulat. ⇒ Action, activité, labeur, œuvre (vx), ouvrage.
8 On appelle travail l'exercice de l'activité humaine qui est dirigé vers une fin médiate (…) Cueillir un fruit pour le manger ne s'appelle pas travailler; mais cueillir des fruits pour les mettre en réserve, pour les céder en échange de quelque autre avantage, etc., est travailler (…) une excursion est un exercice de l'activité qui n'est pas travail chez le touriste, parce qu'il y cherche seulement une satisfaction directe; elle est un travail pour le guide (…) Il se mêle souvent à la notion du travail une idée de contrainte.
9 Le Travail est la rançon que la Nature exige de nous, la monnaie dont nous La payons, car Elle ne nous donne rien (…) Le travail seul situe raisonnablement l'individu dans la collectivité, le fait participer à la communion universelle, donne la vie au mot Solidarité; car c'est par le travail que l'homme prend conscience de l'interdépendance des hommes.
Francis Jourdain, Né en 76, p. 12.
♦ Travail et repos, et loisir (→ Réglementer, cit.), oisiveté, plaisir. || « Le travail est un trésor » (→ Argent, cit. 30). || Aimer le travail. || Amour (→ Honorer, cit. 13), goût du travail (→ Exempter, cit. 8; guérir, cit. 32). || Trouver joie au travail (→ Condition, cit. 24). || Application, assiduité au travail (→ 1. Contrecœur, cit. 1). || Paresseux qui déteste, fuit le travail. || Le travail est une contrainte.
♦ Au travail. || Se mettre au travail : commencer à travailler (→ Librairie, cit. 2). || Être, demeurer au travail. || Exhortation au travail (→ Ascèse, cit. 5). — Le travail humain modifie la nature. || Travail et société (→ ci-dessous, B.). || La matière première et le travail. || Acquisition d'une technique par le travail. || Les fruits (→ Ardeur, cit. 45), les produits du travail. — Sans travail, le talent n'est qu'un feu (1. Feu, cit. 56) d'artifice. — Excès de travail. || Se crever, se tuer de travail (→ Embarras, cit. 4). — Temps de travail, pendant lequel on travaille. || Le fruit (1. Fruit, cit. 38) d'un an de travail. || L'inspiration est… la sœur du travail journalier (→ Contraire, cit. 15).
10 Le travail du corps délivre des peines de l'esprit, et c'est ce qui rend les pauvres heureux.
La Rochefoucauld, Maximes, 535.
11 (…) le travail éloigne de nous trois grands maux, l'ennui, le vice et le besoin.
Voltaire, Candide, XXX.
12 La tempérance et le travail sont les deux vrais médecins de l'homme : le travail aiguise son appétit, et la tempérance l'empêche d'en abuser.
Rousseau, Émile, I.
13 Quand le matin à Dieu chante son hymne auguste,
Le travail, saint tribut dû par l'homme mortel,
Est la strophe sacrée au pied du sombre autel (…)
Hugo, les Contemplations, III, XX.
14 Le travail est beau et noble. Il donne une fierté et une confiance en soi que ne peut donner la richesse héréditaire.
A. de Vigny, Journal d'un poète (1837), p. 120.
15 Le travail est bon à l'homme. Il le distrait de sa propre vie, il le détourne de la vue effrayante de lui-même; il l'empêche de regarder cet autre qui est lui et qui lui rend la solitude horrible.
France, l'Anneau d'améthyste, I, Œ., t. XII, p. 6.
16 (…) le travail utile est par lui-même un plaisir; par lui-même, et non par les avantages qu'on en retirera.
Alain, Propos, 6 nov. 1911, Travaux.
16.1 Dans toute l'Antiquité indo-européenne, la hiérarchie des castes (prêtres, guerriers, agriculteurs ou éleveurs) avait laissé le travail à une place subalterne. Platon nourrissait même pour lui une sorte de mépris aristocratique, et Aristote déclarait : « La cité organisée appartient à ceux qui ne travaillent pas nécessairement pour vivre ».
Raymond Abellio, les Militants, p. 58.
♦ ☑ Loc. (… de travail). Un bourreau (cit. 6) de travail. — ☑ Rare. C'est un foudre (1. Foudre, cit. 20) de travail.
♦ Cabinet (cit. 6 et 7) de travail (→ Flamber, cit. 2). || Lieu (→ Bibliothèque, cit. 7), salle de travail (⇒ Étude). || Table (cit. 12) de travail, ne se dit que d'un travail intellectuel (⇒ Bureau). — Instrument, outil de travail. — Méthode (→ Discipliné, cit. 13), plan de travail (⇒ Canevas, 3. plan, programme). — Séance de travail (→ Piocher, cit. 3). || Langues de travail, utilisées dans les séances de travail d'une réunion ou d'une organisation internationale. || Groupe de travail. ⇒ Atelier, séminaire.
♦ Travail manuel, physique. ⇒ Bras, main. → Facilité, cit. 2. || Rééducation par le travail manuel. ⇒ Ergothérapie. || Ouvrier aux mains durcies par le travail (→ Dimanche, cit. 4). — Travail cérébral (cit. 2), intellectuel (cit. 4), de l'esprit (→ Dévouer, cit. 11). || Travail créateur, personnel (→ Organiser, cit. 8). — Travail scolaire. ⇒ Étude (études). → Éloigner, cit. 6. || Bulletin de travail. || Notes (cit. 32) de travail et de conduite. — Le travail de recherche scientifique (→ Équipe, cit. 3). || Le lent travail de la critique (→ Érudition, cit. 7).
17 (…) il y a dans le travail manuel un fond de facilité enivrante (dit Jallez). L'animal que nous sommes aime mieux ça. La seule fatigue qu'il redoute réellement est celle de la tête. L'ardeur qu'ont beaucoup de nos camarades à se jeter dans les travaux de pure érudition vient de là : c'est tout près du travail manuel.
J. Romains, les Hommes de bonne volonté, t. II, XV, p. 175.
♦ (Qualifié). Manière dont le travail est accompli. || Quatre ou cinq mois d'un travail assidu (→ Direction, cit. 1). || « Le travail constant est la loi de l'art » (cit. 43). || Travail continu, forcené (cit. 4), obstiné, opiniâtre, soutenu; interrompu, à bâtons (cit. 17) rompus. — Travail individuel (→ Apte, cit. 4), collectif.
18 Mélanie garde le silence. Elle travaille. Jamais de repos. Qu'espère-t-elle de tant de labeur ? Son travail est sobre. Elle épargne ses gestes; elle les prépare avec force puis lentement les utilise. Ils accomplissent leur tâche jusqu'à sa perfection. Rien ne lasse ce zèle contenu.
H. Bosco, Hyacinthe, p. 242.
♦ (Déb. XVe). Activité nécessaire à l'accomplissement d'une tâche. || Entreprise qui demande beaucoup de travail. || Avoir beaucoup de travail (cf. Du pain sur la planche), trop de travail. || Être débordé, surchargé de travail (cf. Ne pas savoir où donner de la tête). ⇒ Occupé, surmené. || Il y avait un bon mois de travail (→ Parqueter, cit. 2).
♦ (1668). Activité utile que l'on impose aux animaux. || Bêtes, bœufs de travail (→ Indistinctement, cit. 2).
2 (1866). || Le travail de (qqch.) : action ou façon de travailler (I.) une matière; de manier un instrument. || Le travail de la pâte (cit. 11), en peinture. || Le travail du bois, du marbre, en sculpture. — Le travail du pinceau, du ciseau : la peinture, la sculpture, en tant que technique (→ Heureusement, cit. 3).
♦ Exercice de celui qui travaille (II., A., 3.). || Le travail d'un acrobate. || Travail sans filet.
3 (Déb. XVe). || Un travail, des travaux; le travail de qqn. Ensemble des activités manuelles ou intellectuelles exercées pour parvenir à un résultat déterminé (œuvre, ouvrage, production), considéré le plus souvent comme une nécessité ou un devoir. ⇒ Ouvrage, boulot (fam.). → Imitation, cit. 10. || Un travail imposé (⇒ Besogne, tâche), forcé (⇒ Corvée). Spécialt. Anciennt. || Travail forcé, imposé par le gouvernement à une population, dans une colonie. || Travail qui permet d'obtenir une aptitude, un talent (⇒ Exercice, gymnastique, fig.; entraînement). || Travail qui met en œuvre une matière première (⇒ Façon). — S'appliquer, s'atteler, se mettre à un travail : commencer, entreprendre (→ Muser, cit. 1) un travail. ⇒ Entreprise. || Mettre un travail en chantier. || Accomplir, exécuter, faire un travail. || Bâcler, cochonner, saboter, sabrer, saloper, torcher, torchonner un travail. || Fignoler, soigner un travail. || Casser (fam.), gêner le travail (de qqn). || Accomplir un travail avec facilité. || Réussir un travail. || Aider qqn dans, à un travail (⇒ Aide). || Mettre, atteler qqn à un travail. || Il abattait (cit. 5) à lui seul le travail de dix journaliers. || Cesser, interrompre, suspendre un travail. || Poursuivre inlassablement un travail. — Achever un travail (→ Changement, cit. 5). || Changer (cit. 39) de travail. — Travail aisé, facile. || Travail ardu, difficile, interminable; de Sisyphe, de Pénélope (⇒ Toile). — ☑ Loc. Un travail de Romain, long et dur. ☑ Travail de longue haleine. — Labeurs d'intelligence et travaux corporels (→ Énergie, cit. 1). ⇒ Opération. || Petits travaux manuels. ⇒ Bricole, bricoler. || Se livrer à un travail (→ Donner, cit. 87). || Chacun vaquait à ses travaux (→ Lapicide, cit.). || Travaux de l'esprit et effort (cit. 6) intellectuel. || Travail de recherche. ⇒ Recherche (A., 3.). || Travail intellectuel difficile, pénible. ⇒ Cassement (de tête), casse-tête. — ☑ Travail de bénédictin : travail intellectuel long, difficile et minutieux. || Travaux préparatoires (→ Manière, cit. 27).
19 (…) il ne se révélait dans ce logis la présence d'aucun travail; pas un métier, pas un rouet, pas un outil.
Hugo, les Misérables, III, VIII, VI.
20 (…) réussissant à faire en quatre heures le travail que ne fournissaient pas en deux jours mes anciens condisciples, j'étais libre plus de la moitié du jour.
R. Radiguet, le Diable au corps, p. 12.
20.1 On pouvait, par exemple, trouver dans un laboratoire (encore en 1929) d'admirables documents récoltés année par année sur les mêmes écoliers et fournissant un tableau longitudinal très riche de leurs performances selon tous les tests connus, sans que les auteurs de ce travail de bénédictin sachent ce qu'ils allaient en tirer (…)
J. Piaget, Épistémologie des sciences de l'homme, p. 144.
♦ Spécialt. || Travaux scolaires. || Travaux pratiques (T. P.). || Travaux dirigés : application d'un cours magistral (abrév. cour. : T. D. [tede]). || Séance de travaux dirigés. || Assistant chargé des T. D.
♦ (1751). Spécialt. (Souvent au plur.). a Suite d'entreprises, d'opérations exigeant l'activité physique suivie d'une ou de plusieurs personnes (travail professionnel, organisé ou non) et l'emploi de moyens particuliers (technique). || Les travaux de la campagne, des champs (⇒ Agriculture, culture). || Travaux agricoles (→ Esprit, cit. 37), aratoires (⇒ Façon, spécialt), rustiques (→ Exaction, cit. 2). || Les grands travaux annuels que la terre impose aux paysans (→ Plein, cit. 62). — Allus. littér. || Les Travaux et les Jours, poème didactique d'Hésiode.
♦ Travaux domestiques, ménagers, qu'exige la bonne tenue du ménage (→ Friser, cit. 8; 1. Que, cit. 29). || Les travaux les plus pénibles du ménage (cit. 3). || Gros travaux, pénibles et n'exigeant pas une habileté particulière. — Vieilli. || Travaux de dames : couture, broderie, etc.
21 Un joli mot d'une vieille femme de mes amies, à qui sa bru disait qu'elle aimait à lire, à faire de la musique, mais détestait les travaux de femme, la tapisserie, la broderie, etc., etc. : Ma chère, c'est que vous avez été toujours heureuse, que vous n'avez pas eu de chagrins (…) Oui, bien souvent ces travaux sont une occupation mécanique, derrière laquelle on s'enfonce dans ses regrets !
Ed. et J. de Goncourt, Journal, 30 déc. 1878, t. VI, p. 42.
♦ Travaux d'assainissement, d'irrigation (cit. 1). || Travaux d'urbanisme. || Travaux de réparation, d'entretien (→ Habitat, cit. 5; régie, cit. 1). || Estimation, état des travaux à exécuter. ⇒ Devis. || Travaux à forfait. || Pendant la durée des travaux, le magasin reste ouvert. ⇒ Réparation. — Travaux d'entretien, de réfection des routes. || Attention ! ralentir, travaux !, panneau routier signalant des travaux. — Travaux de construction. || Commencer les travaux (→ Cri, cit. 17). || Travaux immobiliers (voir ci-dessous travaux publics). || Faire faire des travaux dans sa maison. || Surveiller les travaux. || Conducteur de travaux.
♦ (En France). || Travaux d'utilité collective. ⇒ TUC. — Travaux d'intérêt général (TIG) : travaux qui remplacent la prison pour les délinquants mineurs.
♦ Grands travaux (→ Riz, cit. 1). Spécialt. Travaux publics d'importance nationale (grands chantiers) dans le domaine des transports (routes et autoroutes; ouvrages d'art : ponts, viaducs, tunnels, etc.; travaux maritimes : ports, canaux, phares; aéroports), dans celui de la production d'énergie (barrages, centrales, etc.), ou de l'aménagement des terres (asséchements, drainages, irrigation, etc.). — Financer des travaux. || Concéder un travail, des travaux à un entrepreneur. || Surveiller des travaux. || Conducteur (I., 5.) de travaux. — ☑ Par plais. Inspecteur des travaux finis : paresseux, qui se contente de regarder les autres travailler.
22 Ce fut (Narbonne) la seconde colonie romaine hors de l'Italie (la première avait été envoyée à Carthage). Jointe à la mer par de prodigieux travaux, elle eut, à l'imitation de la métropole, son capitole, son sénat, ses thermes, son amphithéâtre. Ce fut la Rome gauloise et la rivale de Marseille.
Michelet, Hist. de France, I, I.
♦ (Avant 1781). || Travaux publics. Anciennt. Travaux d'utilité générale (→ Criminel, cit. 9). — Mod. « Travaux immobiliers faits pour le compte d'une personne morale administrative en vue d'un but d'utilité générale » (Dalloz, Petit dict. de droit). || Travaux publics faisant l'objet d'une déclaration d'utilité publique. || Exécution (régie, concession, entreprise ou marché), financement (emprunts, subventions, offres de concours) des travaux publics. || Chantier de travaux publics. || Ouvrier des travaux publics. ⇒ Cantonnier.
23 Le travail public doit avoir pour objet la construction, la destruction ou l'aménagement d'un immeuble (…) Sont considérés comme travaux publics (…) l'installation de pylônes électriques, les travaux d'exhumation (…) la pose de canalisation (…) l'abattage, l'exploitation et l'élagage d'arbres.
Dalloz, Petit dict. de droit, Travaux publics.
♦ Par ext. || Les Travaux publics : l'administration, le ministère (→ Patauger, cit. 4) des Travaux publics. ⇒ aussi Pont (Ponts et Chaussées). — École des Travaux publics. Ellipt. || Être reçu aux Travaux publics.
♦ (1669). Milit. et cour. Opérations par lesquelles on établit les lignes, les fortifications. Spécialt. Terrassements faits pour créer des défenses, des fortifications. || Travaux de défense; d'approche, de contre-approche. || Travaux de siège. ⇒ Cheminement, sape. — ☑ Par métaphore. Travaux d'approche (supra cit. 14). → Épistolier, cit. 3. || Les travaux souterrains d'un ambitieux (→ Pluie, cit. 8).
24 Le Roi, pour ne point accabler ses troupes de trop de travail, n'attaqua d'abord que la ville seule (…) la tranchée fut ouverte la nuit du vingt-neuvième au trentième mai (…) Dès cette nuit on avança le travail jusqu'à quatre-vingts toises près du glacis; on travailla en même temps avec tant de diligence aux batteries (…) que les unes et les autres se trouvèrent bientôt en état de tirer (…) La nuit suivante, le travail qu'on avait fait fut perfectionné.
Racine, le Siège de Namur.
b (V. 1790; « travail auquel on ne peut se soustraire », fin XVIIIe). Anciennt. || Travaux forcés : peine de droit commun, afflictive (cit. 2) et infamante, qui s'exécutait dans les bagnes (⇒ Bagne, forçat, force, cit. 47), puis par la transportation. || Travaux forcés à perpétuité, à temps. || La contrefaçon (cit. 1) est punie des travaux forcés (→ aussi Exposition, cit. 1). Ellipt (vx). || Vingt ans de travaux (→ Grâce, cit. 43, Balzac).
c (Fin XVIe). Suite de recherches dans un domaine intellectuel, scientifique. || Travaux scientifiques (→ Ignorant, cit. 10). || Les travaux des astronomes (cit. 1), des académiciens (→ Institut, cit. 4). || Les travaux de Gauss (→ Parallèle, cit. 2), de Planck (→ Noir, cit. 6). — Travaux de commande, d'un musicien. → Officiel, cit. 2.
d (1872). Délibérations, discussions suivies d'une assemblée, d'une réunion, devant aboutir à une décision (→ Justice, cit. 41). || L'assemblée poursuit ses travaux. ⇒ Délibérer. || Rapports, exposés de motifs résultant des travaux préparatoires (en commission).
4 (1690). Manière dont un ouvrage, une chose créée par l'homme, a été exécuté. ⇒ 1. Facture, façon, forme. || Un beau travail, un travail fin (→ 2. Gentil, cit. 8), délicat, soigné. || Une belle arme d'un travail fort recherché (→ Artistement, cit. 1). ☑ Un travail de fée. — ☑ Et voilà le travail !, se dit pour présenter un résultat dont on est fier. ☑ C'est du travail d'amateur, du travail mal fait ou peu soigné (propre et fig.). — Spécialt (gravure). || Taille du burin, de la morsure de l'eau-forte. — Iron. || C'est du beau travail. || Regardez-moi ce travail ! ⇒ Bricolage.
♦ Fam. || Quel travail ! || Ce travail ! ☑ Vous voyez le travail ! se dit par ext. et iron. d'une action, d'une situation complexe, embrouillée, périlleuse.
24.1 Tu vois ça, les quatre taxis à la file, tu parles d'une virée, je te le dis, c'est à qui doublerait l'autre ! Ah ce travail ! Aile contre aile ! Qu'est-ce qu'on se faisait comme tours de cochon !
Robert Merle, Week-end à Zuydcoote, p. 21.
5 (1636). Surtout au plur. Ouvrage, résultat d'un « travail » ou de « travaux ». || Ce remarquable travail de peinture (→ Routine, cit. 6). || Travaux d'art (→ Édifice, cit. 5). || Un magnifique travail d'ébénisterie. — Travaux de dames, travaux d'aiguille. ⇒ Ouvrage. — Travaux d'amateur, en photographie. — Imprim. || Travaux de ville (opposé à labeur).
25 (…) Mignon, en face de ce monument magistral, se rappelait de grands travaux. Près de Marseille, on lui avait montré un aqueduc dont les arches de pierre enjambaient un abîme, œuvre cyclopéenne qui coûtait des millions et dix années de luttes. À Cherbourg, il avait vu le nouveau port, un chantier immense, des centaines d'hommes suant au soleil, des machines comblant la mer de quartiers de roche (…)
Zola, Nana, XIII.
25.1 (…) par voie d'annonces, elle informait le public qu'elle achetait des dents qu'à défaut d'autre terme je peux seulement qualifier de dents d'occasion; celles-ci contenaient des travaux en or ou en platine et ma mère les revendait avec profit.
R. Gary, la Promesse de l'aube, p. 129.
♦ Ouvrage de l'esprit, considéré comme le résultat d'une suite d'opérations intellectuelles faites avec méthode. ⇒ Écrit, étude, livre, œuvre, ouvrage. || Les travaux de l'esprit. || Un travail consciencieux, médiocre. || Le travail de X…, du professeur Y (→ Généalogiste, cit. 2). || Un travail sur l'agoraphobie (→ Phobie, cit. 1). || Les travaux de Pasteur (→ Souffle, cit. 14). || Diviser son travail en… (→ Histoire, cit. 35).
B Spécialt (valeur développée au XIXe). Cette activité, organisée à l'intérieur du groupe social et exercée d'une manière réglée.
1 (1803). Activité laborieuse professionnelle et rétribuée. || Le travail de qqn. || Son travail, un travail, du travail. ⇒ Emploi, état (supra cit. 89), fonction, gagne-pain, industrie (vx), métier, occupation, profession, service, spécialité; fam. boulot, job, turbin. || Avoir un travail régulier, bien payé, un bon travail. || Travail à mi-temps, à temps partiel, à plein temps. || Travail facile et bien payé (⇒ Sinécure; fam. filon, planque); travail pénible, assujettissant (⇒ Harnais, collier [de misère], joug). || Travail parcellisé, monotone et répétitif, automatique. || Cadences de travail. || Gagner sa vie par un dur travail (→ À la sueur de son front). || Cesser le travail. || Chercher un travail, du travail. || Être sans travail. ⇒ Chômeur, sans-travail. || Détourner qqn d'un travail (⇒ Débaucher), quitter son travail. || Engager qqn pour un travail. ⇒ Embauchage, embaucher.
♦ Morte-saison, où il n'y a pas de travail. || Le droit au travail (→ Atelier, cit. 8), la liberté (cit. 12) de travail, du travail (→ 3. Droit, cit. 9). || La classe qui vit du travail de ses bras (→ Filtrer, cit. 9). — Apprentissage d'un travail. ⇒ Apprenti. || Les gains (→ Sucer, cit. 2), les revenus (cit. 1 et 2) du travail.
26 aimez le travail, nous dit la morale : c'est un conseil ironique et ridicule. Qu'elle donne du travail à ceux qui en demandent, et qu'elle sache le rendre aimable; car il est odieux en civilisation par l'insuffisance du salaire, l'inquiétude d'en manquer, l'injustice des maîtres, la tristesse des ateliers, la longue durée et l'uniformité des fonctions.
Charles Fourier, Livret d'annonce du nouveau monde industriel, p. 23, in Textes choisis, p. 140.
27 Le travail avait cessé. Celui qui n'a que ses bras, son travail du jour pour nourrir le jour, allait chercher du travail, n'en trouvait pas, mendiait, ne recevait pas, volait (…)
Michelet, Hist. de la Révolution franç., I, II.
28 Il fallait proclamer le droit au travail. Ils ont proclamé le droit au fusil.
Hugo, l'Année terrible, cité par J. Dubois, Voc. politique et social, p. 431.
♦ Exercice effectif de l'activité professionnelle. || Partir au travail (→ Percolateur, cit. 2). || Il est interdit de fumer pendant le travail. ⇒ Service (II., 1.). || Heure de travail. || Travail payé à l'heure; aux pièces. || Journée (cit. 7), semaine de travail. ⇒ Journée, semaine. || Interruption du travail le dimanche, les jours fériés, pour les vacances (⇒ Congé; chômer). || Travail des jours ouvrables. || Travail intense des périodes de presse. || Cessation concertée du travail. ⇒ Grève. || Arrêt de travail : grève momentanée, débrayage. || Observer un arrêt de travail d'une heure. — Interruption de travail pour cause de maladie. || Obtenir un arrêt de travail de 10 jours (syn. : congé de maladie). — Par ext. || Arrêt de travail : formulaire mettant qqn en congé de maladie. — Travail temporaire. ⇒ Intérim. || Entreprise de travail temporaire. — Travail nocturne (→ Roulement, cit. 6), de nuit, soumis à une législation particulière. — Travail continu, exécuté sans interruption au cours d'une journée par une équipe; et aussi : travail des entreprises qui fonctionnent au cours de l'année sans autre interruption que les jours fériés. || Travail discontinu. — Travail en usine, en atelier. — (1909). || Travail à domicile, exécuté en chambre. — Travail de bureau. — Camarades, compagnons de travail. ⇒ Collègue. || Équipe de travail (→ Maison, cit. 31). || Lieu de travail. ⇒ Atelier, bureau, chantier, local, usine; et fam. boîte, boutique. → aussi Sur le tas. || Atteindre le lieu de son travail (→ Pouillerie, cit.). — Aller à son travail, au travail, à son lieu de travail. — Temps de travail. || Réduction du temps de travail, spécialt., dans la perspective de la semaine de 35 heures, en France. ⇒ R. T. T. — Vêtement de travail, utilisé dans l'exercice des activités professionnelles (spécialt, en parlant de travail manuel). || Bleu de travail. ⇒ Bleu, combinaison, cotte, salopette. || Instruments de travail.
28.1 La lune est une petite ville
Les étoiles sont des gens
Qui s'en vont au travail.
Maurice Carême, Poème de gosses, 1933.
♦ Conditions de travail, du travail (→ Arbitrage, cit. 4). || Accident du travail : « accident survenu par le fait ou à l'occasion du travail à toute personne salariée ou travaillant (…) pour un ou plusieurs employeurs ou chefs d'entreprise » (Loi 30 oct. 1946), donnant lieu à des réparations, sous forme de prestations en nature (soins, traitements, réadaptation) ou pécuniaires (indemnités, rentes), garanties par la loi. ⇒ Sécurité (cit. 4 : sécurité sociale). || Inspecteur, inspection du travail. || Médecine du travail. ⇒ Maladie (professionnelle). — Contrat de travail (→ Main-d'œuvre, cit. 2) : convention par laquelle une personne s'engage à exercer pendant un certain temps, et moyennant salaire, son activité professionnelle au profit et sous la direction d'une autre personne (l'employeur). ⇒ Louage (cit. 6). — Convention collective de travail : accord relatif aux conditions de travail, conclu entre employeurs et salariés (syndicats, groupements), et qui détermine les conditions d'application du contrat de travail. — Législation, code du travail. || Droit du travail. — Travail autorisé, légal. || Travail noir, au noir, exercé dans des conditions illégales, non déclaré. || Travail clandestin. — Carte de travail : en France, Document délivré par l'administration, qui permet à un étranger d'obtenir un travail salarié. — Conflits du travail. ⇒ Boycott, grève, gréviste; syndicat, syndicalisme; social.
29 Il existe (…) une médecine du travail dont le but n'est pas seulement de détecter les maladies professionnelles strictes et de les éviter mais plus encore par une sélection de donner à chacun une tâche adaptée à ses forces et de régler les conditions du travail (…) pour diminuer la fatigue.
Paul Chauchard, la Fatigue, p. 101.
29.1 (…) comme ils gagnent très peu, ils font du travail noir pendant leur journée de repos.
S. de Beauvoir, Tout compte fait, p. 304.
♦ Fam. Lieu où l'on travaille. || Il quitte son travail à 5 heures. || Où est ton travail ?
2 (1803). || Le travail. Activité économique des hommes (aidés ou non par les machines), productrice d'utilité sociale. ⇒ Emploi (écon.). || Nature, travail et capital dans la production. || Le capital, considéré comme du travail accumulé. || Coût, prix du travail, de la main-d'œuvre (⇒ Salaire). || Rendement du travail (⇒ Productivité). || Analyse, mesure, étude du travail (étude des mouvements, chronométrages, etc.). ⇒ Taylorisme. || Organisation du travail, selon les sociétés (⇒ Esclavage, servage; compagnonnage, corporation, syndicat). || Division du travail. || Travail et progrès technique. ⇒ Machinisme. || Travail à la chaîne. || Travail artisanal, d'artisan. ⇒ Artisan (cit. 7; → Robot, cit. 2). || Travail à la main, à la machine. — Travail qualifié, spécialisé; non qualifié.
30 La richesse minérale est si grande dans ce département de la Haute-Marne, qu'elle a amené la division du travail. Il y a des gens qui nettoient le minerai, et le vendent aux fondeurs.
Stendhal, Mémoires d'un touriste, t. I, p. 73.
31 Il a fallu en venir aux siècles du progrès et de l'intelligence pour que se manifestât, avec une brutalité croissante, le mépris du travail entraînant le mépris du travailleur. Du jour où l'on a réduit le travail à être seulement défini par la capacité de production et par le rendement, on en a fait une matière amorphe, sans aucun rapport avec l'être humain. Le travailleur ne s'intéresse pas autrement à son travail que le marchand à l'objet qu'il vend. Nous sommes à l'antipode d'une conception spirituelle de l'effort.
Daniel-Rops, Ce qui meurt…, p. 170.
32 Le monde s'éclaira d'un jour neuf au moment où je vis dans le travail la source et comme la substance des valeurs.
S. de Beauvoir, la Force de l'âge, p. 56.
3 (1877). L'ensemble des travailleurs considérés dans le groupe social (« population active »), et, spécialt, les travailleurs salariés des secteurs agricole et industriel. ⇒ Main-d'œuvre; ouvrier, paysan, prolétariat. || Le monde du travail. || Le travail, considéré comme une classe sociale. || Association capital-travail. — Bourse du travail (→ Secrétaire, cit. 1). || Confédération générale du Travail (C. G. T.). || Confédération française démocratique du travail (C. F. D. T.). || Organisation internationale du Travail (O. I. T.). — Ministère du Travail, dont l'administration centrale comprend les directions du travail, de la main-d'œuvre et de la Sécurité sociale.
33 (…) il parle de la population qui a augmenté d'un quart, pendant que le capital quadruplait; du temps prochain, où le capital sera l'esclave du travail (…)
Ed. et J. de Goncourt, Journal, 25 août 1880, t. VI, p. 89.
34 (…) le flot s'épuisait, les groupes s'espaçaient, le travail était rentré; et, dans les flamboiement du gaz, après la journée finie, montait la sourde revanche des paresses et des noces qui s'éveillaient.
Zola, l'Assommoir, t. II, XII, p. 234.
C (1783).
1 Action continue, progressive (d'une cause naturelle), aboutissant à un effet constatable (modification des conditions extérieures; élaboration…); cet effet. || Le travail de la fermentation. || Le travail des eaux (Buffon, in Littré), de l'érosion (cit. 2). — Effet de certaines contraintes. || Le travail du bois. ⇒ Gauchissement.
♦ (Abstrait). Évolution; élaboration ou modification progressive. || Travail latent, secret (⇒ Gestation), intérieur (→ Subir, cit. 4). || Le travail du temps.
♦ Psychan. || Le travail du rêve : « ensemble des opérations qui transforment les matériaux du rêve (stimuli corporels, restes diurnes, pensées du rêve) en un produit : le rêve manifeste » (Laplanche et Pontalis). — Travail du deuil.
2 (1790). Le fait de produire un effet utile, par son activité. ⇒ Fonctionnement, force. || Le travail d'une machine, d'un mécanisme. — Centres qui commandent le travail des organes (→ Ganglion, cit. 1). || Travail musculaire : quantité de travail (au sens 3, ci-dessous) fournie par l'ensemble des muscles d'un organisme, qui s'ajoute au métabolisme basal et au fonctionnement organique pour définir la dépense énergétique totale (→ Calorie, cit. 1). ⇒ Synergie. || Travaux musculaires estimés en calories dépensées par heure. || Travail du cœur, du rein…
35 On peut connaître (…) à combien de livres en poids répondent les efforts de l'homme qui récite un discours, d'un musicien qui joue d'un instrument. On pourrait même évaluer ce qu'il y a de mécanique dans le travail du philosophe qui réfléchit, de l'homme de lettres qui écrit, du musicien qui compose. Les effets, considérés comme purement moraux, ont quelque chose de physique et de matériel qui permet, sous ce rapport, de les comparer avec ceux que fait l'homme de peine.
Lavoisier et Séguin, Mémoire de 1790, in Encycl. Pl., Hist. de la science, p. 900.
♦ Effet produit. || Le travail fait par les machines (cit. 13).
3 (1829; Carnot n'emploie le mot qu'au sens 2, dans les Principes de mécanique; on disait force). Produit d'une force par le déplacement de son point d'application estimé suivant la direction de la force. || La notion d'énergie recouvre celles de force et de travail. || Unités de travail. ⇒ 2. Erg, joule, kilogrammètre, kilojoule. || Le travail d'une force dont le point d'application est immobile (ou se déplace perpendiculairement à la force) est nul. || Quantité de travail que peut fournir une machine par unité de temps. ⇒ Puissance (infra cit. 12). || Unité pratique de travail. ⇒ Kilowattheure. || Rapport du travail produit (par une machine) à la quantité de chaleur fournie (⇒ Rendement, cit. 1). || Dispositifs destinés à produire du travail. ⇒ Machine, moteur.
36 (…) les raisonnements de Carnot sous leur forme primitive ne paraissent pas toujours satisfaisants d'après nos vues actuelles, car Carnot ignorait encore la possibilité de transformer la chaleur en travail ou inversement; autrement dit l'idée d'équivalence entre la chaleur et le travail lui faisait encore défaut.
L. de Broglie, Physique et Microphysique, p. 264.
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CONTR. Inaction, oisiveté, repos; amusement, désœuvrement, divertissement, loisir; paresse; campos, vacance; chômage.
DÉR. Travailliste.
COMP. Surtravail, télétravail.
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2. travail, ails [tʀavaj] n. m.
ÉTYM. V. 1210; du bas lat. trepalium, var. de tripalium « instrument de torture », du lat. class. tripalis « à trois pieux ».
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♦ Techn. Dispositif servant à immobiliser les grands animaux (chevaux, bœufs) pour pratiquer sur eux certaines opérations.
0 À propos de chevaux, il paraît qu'ils sont fort méchants en Flandre, ou les Flamands fort prudents; car on ne les ferre, dans tous les villages où j'ai passé, que dans un travail des plus solides non en chêne, mais en granit.
Hugo, Belgique, V.
Encyclopédie Universelle. 2012.