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troubler

troubler [ truble ] v. tr. <conjug. : 1>
• 1080; lat. pop. °turbulare (class. turbare), de °turbulus 1. trouble
A
1Modifier en altérant la clarté, la transparence. « Troubler l'eau d'un ruisseau en la faisant bouillonner à l'aide d'une grosse branche d'arbre » (Balzac). Un ciel bleu que rien ne troublait. obscurcir. Pronom. Les ondes de l'Elbe « se troublent facilement par l'orage » (Mme de Staël).
Rendre moins net. « l'émotion lui troublait la vue » (Green). brouiller.
2Littér. Modifier en touchant à l'ordre, à l'équilibre; rendre agité, confus. bouleverser, déranger, perturber. « L'intempérie des éléments qui troublent perpétuellement ce bas monde » (Sainte-Beuve). Cour. Troubler la paix des ménages. Troubler l'ordre public.
3Empêcher (un état calme, paisible) de se continuer. Troubler le silence. Troubler le sommeil de qqn. Troubler le repos, la tranquillité. « Rien ne trouble sa fin, c'est le soir d'un beau jour » (La Fontaine). « Rien ne troublait la monotone tranquillité de notre vie » (Lamartine).
4Interrompre ou gêner le cours normal de (qqch.). dérégler, désorganiser. « Mais quelqu'un troubla la fête » (La Fontaine) ( trouble-fête) . La cérémonie a été troublée par des manifestants. Troubler les plans, les projets de qqn. contrarier, contrecarrer, 1. entraver. Troubler la digestion.
B(Sens moral)
1Priver de lucidité. égarer. « le vin trouble les facultés mentales, tandis que l'opium y introduit l'ordre suprême » (Baudelaire). « Sa tendresse pour moi allait jusqu'à troubler sa raison » (France). « sa vanité, qui était forte, troubla son jugement, qui était faible » (France).
2Troubler qqn, susciter chez lui un état émotif, une activité psychique anormale ou pénible qui compromet le contrôle de soi. ⇒ agiter, bouleverser, inquiéter; fam. chambouler, tournebouler. Rien ne trouble le sage. atteindre, 1. toucher. « il avait le visage tranquille et volontaire de ceux qui ne permettent pas à la vie de les troubler » (Green).
Déconcerter en créant une impression d'insécurité. confondre, déboussoler, décontenancer, démonter, désarçonner, désorienter, déstabiliser, ébranler, impressionner. Examinateur sévère qui trouble les candidats. Pronom. Il fallait « avoir toujours l'esprit présent, être toujours de sang-froid, ne jamais me troubler » (Rousseau). s'affoler, paniquer (cf. Perdre les pédales).
Rendre perplexe. embarrasser, gêner. Il y a un détail qui me trouble. intriguer, tracasser, fam. turlupiner; troublant. « Ta remarque me trouble » (Romains).
3 Mettre dans le trouble en suscitant une émotion amoureuse, le désir. émouvoir. « Le charme de sa personne lui troublait le cœur plus que les sens » (Flaubert).
⊗ CONTR. Clarifier, purifier. Maintenir, rétablir. Calmer; apaiser, tranquilliser.

troubler verbe transitif (latin populaire turbulare, agiter) Altérer la limpidité, la transparence de quelque chose : Troubler l'eau en remuant la vase. Altérer la qualité, l'acuité d'une fonction, d'une faculté : L'alcool trouble la raison. Déranger le cours d'un état, d'une activité, les perturber : Troubler l'ordre public. Créer chez quelqu'un un état d'interrogation, de vague inquiétude : Cette histoire me trouble un peu. Faire perdre à quelqu'un le fil de ses idées, l'intimider : Vous le troublez avec vos questions abruptes. Éveiller le désir, la sensualité de quelqu'un : Son charme le troublait profondément.troubler (citations) verbe transitif (latin populaire turbulare, agiter) René Char L'Isle-sur-la-Sorgue, Vaucluse, 1907-Paris 1988 Ce qui vient au monde pour ne rien troubler ne mérite ni égards ni patience. Fureur et mystère Gallimard Épictète Hiérapolis, Phrygie, vers 50-Nicopolis, Épire, vers 130 après J.-C. Ce qui trouble les hommes, ce ne sont pas les choses, mais les jugements relatifs aux choses. Manuel, V (traduction J. Pépin) troubler (synonymes) verbe transitif (latin populaire turbulare, agiter) Altérer la limpidité, la transparence de quelque chose
Synonymes :
- brouiller
Contraires :
- clarifier
- filtrer
- purifier
Altérer la qualité, l'acuité d'une fonction, d'une faculté
Synonymes :
- embrumer
- obscurcir
Déranger le cours d'un état, d'une activité, les perturber
Synonymes :
- déranger
- perturber
Contraires :
- discipliner
- pacifier
- tenir
Créer chez quelqu'un un état d'interrogation, de vague inquiétude
Synonymes :
- agiter
- ébranler
- émouvoir
- frapper
- remuer
- retourner
- secouer
Contraires :
- rasséréner
- rassurer
- tranquilliser
Faire perdre à quelqu'un le fil de ses idées, l'intimider
Synonymes :
- affoler
- déconcerter
- démonter
- dérouter
- désarçonner
- désorienter
- embarrasser
- impressionner
- intriguer
Éveiller le désir, la sensualité de quelqu'un
Synonymes :
- ensorceler
- envoûter
Contraires :
- indifférer

troubler
v.
rI./r v. tr.
d1./d Rendre moins limpide, moins transparent. L'orage a troublé l'eau du marigot.
d2./d Rendre trouble (1, sens 2). Le brouillard troublait l'horizon.
d3./d Interrompre, perturber le déroulement, le bon fonctionnement de. Troubler le sommeil. Troubler une réunion.
d4./d Gêner; susciter le doute, l'inquiétude chez (qqn). Cette question l'a troublé.
d5./d émouvoir, faire naître un certain émoi, un désir chez (qqn). Adolescent troublé par une jeune fille, par une lecture.
rII./r v. Pron.
d1./d (Réfl.) Devenir trouble (1, sens 1 et 2).
d2./d être ému, perdre le contrôle de soi, de ses facultés. Le candidat s'est troublé.

⇒TROUBLER, verbe trans.
I. — [Le compl. désigne un milieu physique]
A. — [Le compl. désigne un liquide]
1. Rendre trouble, altérer la limpidité, la transparence. Troubler l'eau d'un étang; troubler une solution. Lorsque la solution devient trop alcaline (...) il se produit une boue d'un jaune verdâtre qui trouble le bain [de nickelage] (FONTAINE, Électrolyse, 1885, p. 63). À cette faculté de changer constamment de couleur (...) le poulpe joint celle de pouvoir troubler l'eau autour de lui lorsqu'il est attaqué par un ennemi (COUPIN, Animaux de nos pays, 1909, p. 429). Empl. pronom. Ce vin est sujet à se troubler (Ac. 1935). Quoiqu'elles [les eaux de l'océan] paraissent limpides sur ses rivages, elles se troublent, dans les grandes tempêtes (BERN. DE ST-P., Harm. nat., 1814, p. 232). Tous [les ballons] sont placés côte à côte dans un lieu où l'air est calme. Après un ou deux jours, les ballons non bouillis se troublent, mais les ballons bouillis restent limpides (J. ROSTAND, Genèse vie, 1943, p. 112).
2. Agiter, créer un mouvement qui perturbe. Un bassin immense!... Et quelle eau!... Une eau noire, dormante, si parfaitement plane que nulle ride, nulle bulle d'air, n'en troublait la surface (BACHELARD, Poét. espace, 1957, p. 39).
B. — [Le compl. désigne un corps transparent] Altérer la transparence par des salissures. Il cessa également de l'emmener au théâtre (...) ses sauts sur la banquette (...) sa manière de troubler la lorgnette en la tripotant (...) l'horripilèrent (HUYSMANS, Sœurs Vatard, 1879, p. 216). Empl. pronom., littér. L'orchestre est las, les valses meurent, Les flambeaux pâles ont décru, Les miroirs se troublent et pleurent; Les ténèbres seules demeurent, Tous les couples ont disparu (SULLY PRUDH., Solitudes, 1869, p. 16).
C. — [Le compl. désigne l'œil] Modifier la couleur, l'éclat. Il hésita une seconde, ses lèvres s'agitaient, une lueur jaune troublait ses yeux.Et, je veux que tu me dises, qu'est-ce qu'il t'a fait? (ZOLA, Bête hum., 1890, p. 20). Son reflet [d'un buvard de cuir], frappant le visage d'Alice, troublait le gris verdissant de ses yeux (COLETTE, Duo, 1934, p. 8). Empl. pronom. Elle ne montrait son inquiétude que par (...) ses yeux ridés qui se troublaient, quand elle avait fini de lui sourire (R. BAZIN, Blé, 1907, p. 50).
D. — [Le compl. désigne un élément naturel, climatique]
1. Altérer la clarté, la luminosité. Troubler l'atmosphère. Le jour tombait peu à peu. Le crépuscule déjà troublait les lointains (GIONO, Chant monde, 1934, p. 205). Empl. pronom., vieilli. Devenir gris,nuageux. Le temps, le ciel se trouble. (Dict. XIXe et XXe s.).
2. Agiter, créer du mouvement. Quelques souffles espacés de vent troublaient seuls l'atmosphère. Ils gagnaient d'arbre en arbre en secouant les feuilles (PESQUIDOUX, Chez nous, 1923, p. 108).
E. — [Le compl. désigne une couleur] La modifier, la rendre moins nette. [Le blanc d'argent] se plie mal à certains mélanges et trouble certaines couleurs (MOREAU-VAUTHIER, Peint., 1913, p. 185).
II. — [Corresp. à trouble2 II] Apporter le trouble.
A. — [Le compl. désigne un milieu ou un état social]
1. Susciter des troubles, de l'agitation; altérer l'ordre, dans un groupe organisé. Troubler un État, l'Europe. J'ai été précipité (...) du haut de ma petite fortune. Les événements financiers qui troublent la place de Paris et la mèneront on ne sait où m'ont contraint de m'arrêter (BALZAC, Corresp., 1828, p. 336). Cette guerre religieuse troublait et divisait le pays en faisant renaître le délit d'opinion et en créant une catégorie de suspects (BAINVILLE, Hist. fr., t. 2, 1924, p. 249). Part. passé en empl. adj. Qui est marqué par des troubles. Un gouvernement provisoire fait procéder à l'élection au suffrage universel d'une Assemblée Constituante qui, au milieu d'une période troublée (crise des ateliers nationaux, journées de juin) élabore la Constitution du 4 novembre 1848 (VEDEL, Dr. constit., 1949, p. 80).
En partic. Perturber les rapports qui existent entre les membres d'une même famille. Troubler (la paix d')un ménage. Si l'on me donne injustement le tort d'avoir brouillé un jeune ménage, de troubler l'union d'une famille, et de prendre à la fois le père et le gendre, je mériterai ma réputation en les tracassant à ma façon! (BALZAC, Cous. Bette, 1847, p. 242).
2. Perturber, compromettre l'état stable, ordonné, d'un groupe social. Troubler l'ordre établi, public, social; troubler la paix sociale, la paix du monde. Le nombre des mendiants augmentait de semaine en semaine (...). Le commissaire de police vint demander poliment s'il n'était pas possible de faire cesser, sur la voie publique, ces rassemblements qui troublaient l'ordre du quartier (DRUON, Gdes fam., t. 2, 1948, p. 215).
3. Déranger, interrompre le déroulement normal d'une activité sociale. Troubler un entretien, une conversation, une assemblée, une conférence, une fête, une représentation théâtrale, des festivités. Aucune circulation profane ou mercantile ne devant troubler les cérémonies religieuses, la ville restait interdite, durant ces heures pieuses, aux diligences, aux voitures maraîchères (ADAM, Enf. Aust., 1902, p. 326). Le maire (...) réussit à dire:Nous n'avancerons à rien, si vous troublez la réunion par des discussions locales (HAMP, Champagne, 1909, p. 127).
B. — [Le compl. désigne un état ambiant]
1. Altérer le calme, l'équilibre, l'harmonie. Troubler la sérénité, la majesté d'un lieu; troubler l'ordre de la nature. De pimpantes villas, entre leurs haies taillées (...) témoignent que rien encore n'est venu troubler la quiétude de ce coin encore immunisé, au centre de l'Europe en feu (MARTIN DU G., Thib., Été 14, 1936, p. 707). Ses yeux s'ouvrirent enfin sur les espaces de la nuit. Aucun souffle, aucun bruit, sinon, parfois, le crépitement étouffé des pierres que le froid réduisait en sable, ne venait troubler la solitude et le silence qui entouraient Janine (CAMUS, Exil et Roy., 1957, p. 1572).
2. Faire cesser un état stable. Les plus beaux jours d'été sont parfois brusquement troublés par un effroyable orage (MAUPASS., Dr H. Gloss, 1893, p. 136). Écoutant malgré elle le son de ses pas qui troublait le silence des rues désertes, Florentine fuyait sa terreur (ROY, Bonheur occas., 1945, p. 321).
III. — [Le compl. désigne une pers., ses facultés]
A. — [Sur le plan physiol.]
1. Déranger une fonction, perturber le fonctionnement normal d'un organe. Écrit une longue note médicale: comment, la tête et la matrice activant les nerfs, ceux-ci troublent la digestion (MICHELET, Journal, 1849, p. 3). Tout de suite, Boutan s'occupa de l'enfant, qui allait beaucoup mieux des jambes; mais l'estomac restait troublé, la moindre infraction au régime amenait des complications fâcheuses (ZOLA, Fécondité, 1899, p. 290).
— [Le compl. désigne la vue] Perturber, diminuer l'acuité. Bien des fois mon pied faillit glisser, le vertige troublait ma vue, et j'allais être précipité malgré ma sourde résistance (SAINTE-BEUVE, Volupté, t. 1, 1834, p. 174). La fatigue d'une nuit d'insomnie, me troublait le regard (CAMUS, Étranger, 1942, p. 1134). Empl. pronom. Synon. se brouiller. Elle ne déjeuna pas: la migraine la faisait trop souffrir (...). Sa vue se troublait; les objets s'éloignaient d'elle; il lui semblait glisser vers un trou (ARLAND, Ordre, 1929, p. 312).
2. Déranger, perturber le fonctionnement normal des facultés mentales. Troubler la cervelle, la tête; troubler l'attention, la mémoire, la pensée, le jugement. Je lui offris du champagne, et j'en bus, ce qui me troubla les idées (MAUPASS., Contes et nouv., t. 1, Divorce, 1888, p. 1100). Le fait de l'avoir trouvée, elle, chez cet homme de mon sang qui me haïssait, suffisait à troubler ma raison (BOSCO, Mas Théot., 1945, p. 94). Empl. pronom. Ce devoir qui s'accomplissait si cruellement était donc arbitraire. (...) Ma raison se troublait et s'égarait devant une pareille situation (LAMART., Nouv. Confid., 1851, p. 219). Elle perdait la mémoire, brouillait les époques (...). Son esprit se troublait (A. FRANCE, Pt Pierre, 1918, p. 192).
— [Le compl. désigne le sommeil] Perturber,interrompre. Cauchemar qui trouble le sommeil. Quelques jours plus tard, comme je dormais, ma mère vint m'appeler au milieu de la nuit. (...)Pardonne-moi de venir troubler ton sommeil, me dit-elle (PROUST, Guermantes 2, 1921, p. 335). Je me sens responsable, un peu, de l'argent que vous avez perdu (...). Je ne sais pas si c'est ça qu'on appelle des remords, mais ça commence à me troubler le sommeil (GIDE, Faux-monn., 1925, p. 963).
B. — [Sur le plan intellectuel, moral ou affectif]
1. Rendre perplexe, embarrasser. Synon. inquiéter. Ce détail, cette affaire, cette histoire, cette remarque me trouble. L'abbé ne répondit pas tout de suite. La question était de celles qui pouvaient le troubler. Ne se l'était-il pas, malgré lui, posée bien des fois à lui-même? Lui non plus n'imaginait pas facilement le Christ mêlé à la conduite de cette affaire-là [la guerre] (ROMAINS, Hommes bonne vol., 1938, p. 266). Empl. pronom. Les finesses de l'Astrée en arrivent à de singulières perversions du sens moral, et personne sans doute ne se troublait de voir l'amoureux sympathique, pour obtenir celle qu'il aime, livrer en pâture sa jeune sœur à un vieillard libidineux (BRASILLACH, Corneille, 1938, p. 123).
2. a) Faire naître un état émotif qui altère, perturbe le calme intérieur d'une personne. Regard, lettre, spectacle, souvenir qui trouble; troubler l'âme, le cœur. Je ne veux noter ici que l'émotion de retrouver vivant ce livre de Barbusse [L'Enfer] que je croyais mort, et qui, adolescent, m'avait troublé et même bouleversé (MAURIAC, Nouv. Bloc-Notes, 1958, p. 77):
La première fois que j'entendis cette cantate [32 de Bach], vers 1926, elle me troubla si profondément que j'entrevis la nécessité de changer ma vie entière, mais il fallait que je reste dans le monde. Impossible de dire le rôle que Bach aura joué dans ma vie; c'est lui surtout qui m'a réconcilié à l'idée de mourir.
GREEN, Journal, 1953, p. 204.
Empl. pronom. [Le Père Eudes] a le droit et le devoir de lui parler comme à une chrétienne qui va mourir. Elle n'est pas femme à se troubler pour si peu (BREMOND, Hist. sent. relig., t. 3, 1921, p. 597).
En partic.
♦ Faire naître une émotion amoureuse, un désir charnel. Synon. séduire. Troubler le cœur, les sens. Ta mère... comme elle était belle! (...) La nudité de son cou, de ses bras et de ses mains me troublait (MAURIAC, Nœud vip., 1932, p. 42). Absol. Il sortait de la beauté de cette femme quelque chose d'attractif qui faisait venir à elle; (...) toute sa personne troublait; de suite on se sentait disposé à l'adorer (FLAUB., 1re Éduc. sent., 1845, p. 101).
Troubler la conscience de qqn. Y faire naître des inquiétudes morales ou religieuses. Qui de nous peut se croire sans tache? (...) - Si vous avez... dans votre passé... de ces... ces fautes qui troublent notre conscience... ne semblent pas... mériter de pardon (...) le pouvoir m'est donné de vous en absoudre (BERNANOS, M. Ouine, 1943, p. 1520).
Part. passé en empl. adj. Le Père Nicolle, à peine paru, il n'en avait pas fallu davantage pour qu'il enlevât tout un troupeau de consciences troublées, ou seulement capricieuses, peut-être zélées, à des guides peu soucieux qu'on les supplantât (TOULET, J. fille verte, 1918, p. 81).
b) Faire naître en quelqu'un un état émotif, violent qui lui fait perdre ses moyens, son assurance. Synon. démonter, désarçonner, impressionner, intimider. Ce matin-là, tout semblait fait pour le troubler et lui faire perdre la maîtrise de son langage. (...) son désir de liquider l'affaire à tout prix et au plus vite (...) lui faisait trembler les doigts (DUHAMEL, Passion J. Pasquier, 1945, p. 168). On l'avait confronté avec ledit Thévenin seulement pour l'éprouver, vérifier qu'on pouvait le troubler, l'embarrasser, qu'il perdait tout sang-froid (GUÉHENNO, Jean-Jacques, 1952, p. 260). Empl. pronom. Se troubler facilement. L'orateur lui-même se troubla, commit un lapsus, se reprit, et son intonation hésita, se désunit (ARNOUX, Algorithme, 1948, p. 49).
3. Perturber, interrompre le déroulement harmonieux d'un état psychique. Troubler la sérénité, la rêverie, le bonheur de qqn; troubler la paix de l'âme, de la conscience. Nous ne pouvons cependant tolérer ces folies, dit Madame Gérard. Tu affectes envers nous une conduite inouïe. Tu veux nous inquiéter à plaisir, troubler notre tranquillité. Tu n'es sensible à aucune de nos bontés pour toi (DURANTY, Malh. H. Gérard, 1860, p. 175). Le jeune homme que je savais qu'elle aimait (...) la trompe (...) et vit avec une autre femme...Pourquoi ne m'as-tu pas parlé plus tôt?lui ai-je demandé.Je craignais de troubler ta joie (GIDE, École femmes, 1929, p. 1271).
4. Déranger quelqu'un dans ses occupations, interrompre le cours de ses activités. Synon. gêner, incommoder, perturber. Je comprends ton sentiment, Laurent; mais il ne faut jamais venir ici me troubler dans mon travail, sauf, bien entendu, pour la lettre du Havre (DUHAMEL, Notaire Havre, 1933, p. 141). Le murmure d'une conversation dans la pièce voisine finit par le troubler et il releva la tête avec impatience. Peut-être en se bouchant les oreilles retrouverait-il le silence (GREEN, Moïra, 1950, p. 52).
C. — DR. CIVIL. Inquiéter une personne dans l'exercice d'un droit. Il a été troublé dans la possession de cette terre, dans la jouissance de sa propriété (Ac. 1835-1935). Si, au contraire, le locataire ou le fermier ont été troublés dans leur jouissance par suite d'une action concernant la propriété du fonds, ils ont droit à une diminution proportionnée sur le prix du bail à loyer ou à ferme, pourvu que le trouble et l'empêchement aient été dénoncés au propriétaire (Code civil, 1804, art. 1726, p. 315).
Prononc. et Orth.:[], (il) trouble []. Att. ds Ac. dep. 1694. Étymol. et Hist. A. 1. Ca 1100 « rendre trouble (en parlant des yeux) » (Roland, éd. J. Bédier, 1991); 1119 « obscurcir le ciel » (PHILIPPE DE THAON, Comput, 1896 ds T.-L.); ca 1180 « altérer la clarté, la transparence de l'eau » (MARIE DE FRANCE, Fables, éd. K. Warnke, 2, 11); 2. ca 1155 « faire de l'opposition en provoquant de l'agitation » (WACE, Brut, éd. I. Arnold, 2335); 1160-74 trobler la paiz (ID., Rou, éd. A. J. Holden, III, 5099); 1230 « causer des brouilles dans une famille, un groupe » (Gaidon, 299 ds T.-L.); 1866 troubler l'ordre (public) (VEUILLOT, Odeurs de Paris, p. 179); 3. XIIIe s. troubler la joie (de qqn) (Isopet de Lyon, 3426 ds T.- L.); 1671 troubler le sommeil (BOILEAU, Lutrin, IV ds LITTRÉ); 4. 1160-74 « interrompre ou gêner le cours normal de quelque chose » (WACE, Rou, III, 7309); 1641 « interrompre une personne qui parle » (CORNEILLE, Cinna, V, 1); 5. 1409 « inquiéter une personne dans l'exercice d'un droit » (Grands jours de Troyes, A. N. X1a, 9187-88, f° 159 v° ds GDF. Compl.). B. 1. 1174-76 « priver de lucidité, rendre confus l'esprit, le jugement » (GUERNES DE PONT-SAINTE-MAXENCE, St Thomas, éd. E. Walberg, 2632); 2. 1530 « déranger quelqu'un, le distraire de ses activités » (PALSGR., p. 763); 3. 1549 « faire perdre son assurance à quelqu'un » (EST.); 4. 1667 « mettre dans le trouble en suscitant une émotion amoureuse » (RACINE, Andromaque, I, 1); 1852 troubler les sens (GAUTIER, Émaux, p. 34); 5. 1668 « rendre perplexe » (MOLIÈRE, Tartuffe, V, 1). C. Verbe pronom. 1. ca 1220 « devenir trouble (en parlant de l'eau) » (Lai Ombre, 898 ds T.-L.); 2. XIVe s. « éprouver un trouble, une émotion » (La pénitence d'Adam, Ms. cap. 10 ds DU CANGE, s.v. parturitio); 1669 « être décontenancé, perdre son sang-froid » (RACINE, Britannicus, II, 3). Mot issu après métathèse du r, du lat. pop. turbulare « troubler », dér. de turbulus « trouble, troublé » (v. trouble1). Fréq. abs. littér.:3 613. Fréq. rel. littér.:XIXe s.: a) 5 720, b) 5 445; XXe s.: a) 5 725, b) 4 122.
DÉR. Troubleur, subst. masc. Celui qui trouble, perturbe, dérange. Synon. perturbateur. Le Sergent: Cet homme m'est suspect. Amis, emmenez-le. Jacquemin: Que l'on m'emmène! et où cela? Le Sergent: Où l'on mène les coureurs de nuit et les troubleurs de sommeil (DUMAS père, Tour St-Jacques, 1856, II, 3e tabl., 15, p. 245). []. 1res attest. 1261 trobleurs de la paix « qui fomentent des désordres civils » (Serment des bourg. et de l'Univers. de Paris, doc. histor., II, 68 ds GDF. Compl.), 1671 « importun » (POMEY); de troubler, suff. -eur2.
BBG. — SCHUCHARDT (H.). Rom. Etymologien. II. Sitzungsberichte der Philosophisch-Historischen Classe der Kaiserlichen Akademie der Wissenschaften. 1899, n. 3, p. 177, 181. - THOMAS (A.). Nouv. Essai 1904, p. 338.

troubler [tʀuble] v. tr.
ÉTYM. 1080, la Chanson de Roland; du lat. pop. turbulare (lat. class. turbare), de turbulus (→ 1. Trouble); var. tourbler, et, par métathèse, troubler, trobler, en anc. franç., « mêler, mélanger » et, fig., « ennuyer, mécontenter ».
A
1 Modifier (un milieu) en altérant la clarté, la transparence; rendre moins pur. || Troubler l'eau, un liquide (→ Aucun, cit. 13; reprendre, cit. 17), une solution. || Troubler un liquide en agitant ( Bouiller, brouiller, rabouiller [cit.]), en mêlant. || « Qui te rend si hardi de troubler mon breuvage ? » (cit. 1). || Une eau odorante troublée d'un parfum laiteux (→ Jouir, cit. 7).Troubler l'air, l'azur, le bleu du ciel : en altérer la pureté Obscurcir.
Rendre moins clair, moins net. || Troubler la vue de qqn. Aveugler.
1 Le regard trop avide sautait des mots, des lignes; même avec le secours de son face-à-main elle put à peine comprendre ce qu'elle avait sous les yeux, tant l'émotion lui troublait la vue.
J. Green, Léviathan, II, II.
2 Littér. Altérer ou supprimer l'équilibre, l'ordre, la pureté de (qqch.); rendre agité, confus. Bouleverser (1.), déranger, perturber. a Vx. || Troubler la nature, l'ordre de la nature. Pervertir (2.). Poét. || Troubler l'air, l'onde… || « L'intempérie (cit. 2) des éléments qui trouble ce bas monde ». || La colère, la peur trouble ses traits. Décomposer.
2 L'alcyon, quand l'océan gronde,
Craint que les vents ne troublent l'onde
Où se berce son doux sommeil (…)
Hugo, Odes et Ballades, I, I.
Par ext., vx. || Troubler un pays : y porter l'agitation, y fomenter des troubles. Subvertir. || Troubler l'Europe, le monde.Troubler une famille, un groupe : y causer des brouilles, une agitation. Exciter (→ Prison, cit. 11).
3 De fait, il n'est pas homme à troubler un État.
Molière, l'Étourdi, IV, 1.
4 En ce calme trompeur, j'arrivai dans la Grèce;
Et je trouvai d'abord des princes rassemblés,
Qu'un péril assez grand semblait avoir troublés.
Racine, Andromaque, I, 1.
b Mod. || Troubler le calme, l'ordre (→ Scandaliser, cit. 4), la paix des ménages (cit. 11). Cour. || Troubler l'ordre public (→ Inquiéter, cit. 4), l'ordre de la société (→ Dérision, cit. 2). || Troubler les bonnes mœurs. Offenser, offusquer.
c (Abstrait). || Troubler la paix de l'âme (cit. 52). || Une égalité (cit. 14) d'âme que rien ne peut troubler. Imperturbable.
5 Content de vous adorer en silence, je jouissais au moins de mon amour; et ce sentiment pur, que ne troublait point alors l'image de votre douleur, suffisait à ma félicité (…)
Laclos, les Liaisons dangereuses, XXIV.
3 Empêcher (un état calme, paisible) de se continuer. || Troubler le silence (→ Essence, cit. 21; jet, cit. 6; mystérieux, cit. 3; nature, cit. 64). Rompre. || Troubler le sommeil de qqn, le rendre agité ou l'interrompre (→ Susurrement, cit. 3). || Troubler le repos, la tranquillité de qqn (→ Bouleverser, cit. 6; dévorer, cit. 41). || « Rien ne trouble sa fin, c'est le soir d'un beau jour » (→ Approcher, cit. 40). || Troubler une vie calme, le bonheur, la joie de qqn ( Corrompre, détruire, empoisonner, gâter).
6 Rien ne troublait la monotone tranquillité de notre vie.
Lamartine, Graziella, III, XIV.
7 Affranchis-nous du temps, du nombre et de l'espace,
Et rends-nous le repos que la vie a troublé !
Leconte de Lisle, Poèmes antiques, « Dies iræ ».
8 La paix rustique n'y était guère troublée que des bruissements naturels (…)
Ch. Maurras, Anthinéa, II, III.
9 Dans l'âme tranquille de cette femme, jamais un désir, jamais une inquiétude ne venait troubler la sérénité des heures laborieuses.
J. Green, Léviathan, I, IV.
4 Interrompre ou gêner le cours normal, le développement, le fonctionnement de (qqch.). Dérégler, désorganiser, embrouiller. || Troubler les plans, les projets de qqn. Contrecarrer (→ vx Venir à la traverse).Troubler la digestion. || Les soucis troublèrent sa santé naturellement bonne (→ Assombrir, cit. 2). Assiéger.Troubler un entretien, une réunion. Déranger, interrompre, rompre (vx); → Madame, cit. 4, Racine. || « Mais quelqu'un troubla la fête » (cit. 15). Trouble-fête.Troubler la rêverie (→ Écouter, cit. 5), la méditation de qqn.
10 J'oublie en sa faveur un discours qui m'outrage.
Je n'en ai point troublé le cours injurieux.
Racine, Bérénice, I, 4.
Vx. Interrompre, déranger (qqn). Spécialt. Interrompre (une personne qui parle). Cf. Corneille, Cinna, V, 1.
11 — (…) on ne vient point ainsi se jeter au travers d'une comédie, et troubler un acteur qui parle — (…) la véritable comédie qui se fait ici, c'est celle que vous jouez; et si je vous trouble, c'est de quoi je me soucie peu.
Molière, la Comtesse d'Escarbagnas, 8.
Dr. || Troubler l'exercice d'un droit. 2. Trouble (A., 2.).
1 Priver de lucidité; empêcher les fonctions mentales de s'exercer normalement. || Troubler le cerveau (→ Désordre, cit. 17), la cervelle (cit. 2), l'esprit, la raison (→ Jusque, cit. 10), la tête… || Le chagrin lui avait troublé l'esprit. Déranger, détraquer, égarer. || « Des visions troublaient mes sens épouvantés » (cit. 12).Par métaphore du sens concret. || « À moins (cit. 32) d'une vapeur qui vous trouble l'esprit ».Exciter et rendre confus. Affoler, émouvoir (→ Panique, cit. 1). || Troubler l'imagination ( Enfiévrer), le jugement.
12 Mais la grande différence gît surtout en ceci, que le vin trouble les facultés mentales, tandis que l'opium y introduit l'ordre suprême et l'harmonie.
Baudelaire, les Paradis artificiels, « Un mangeur d'opium », III.
13 Mais sa vanité, qui était forte, troubla son jugement, qui était faible.
France, l'Anneau d'améthyste, I, Œ., t. XII, p. 13.
14 Tout cela, le soleil, l'odeur de cuir et de crottin de la voiture, celle du vernis et celle de l'encens, la fatigue d'une nuit d'insomnie, me troublait le regard et les idées.
Camus, l'Étranger, I, I.
2 (Mil. XVIIe). || Troubler qqn : susciter chez qqn un état émotif plus ou moins violent, une activité psychique anormale ou pénible qui altère, qui gêne le cours normal des pensées ou l'activité contrôlée (présence d'esprit, sang-froid…). Affoler, agiter, bouleverser, remuer (→ Enfermer, cit. 21). || Les passions qui troublent l'homme. || Les réactions de l'adversaire l'ont troublé. Désorienter, inquiéter. || Rien ne trouble le sage. Atteindre, toucher.Troubler une personne timide. Effaroucher, émouvoir; effarer.
Vx. Tourmenter; angoisser. Affliger, alarmer, contrarier. || Ce souvenir m'a troublé toute ma vie (→ Contrister, cit. 1). || Récit, spectacle pénible qui trouble ( Impressionner). Passif et p. p. → cit. 15. — Troubler l'âme (cit. 63), le cœur de qqn.
15 Troublé de cette fatale vue, transporté d'une juste colère, il descend en robe de chambre dans l'appartement de Léonor, tenant son épée d'une main et une bougie de l'autre.
A. R. Lesage, le Diable boiteux, IV.
16 (…) rien n'est plus à craindre que les mouvements désordonnés qui troublent les cœurs.
France, Thaïs, I, p. 16.
17 (…) certaine révélation singulière qui l'a troublée au point que, l'angoisse seule survivant à sa cause (…)
Bernanos, Sous le soleil de Satan, I, III.
18 Ce vieillard était la sérénité même (…) il avait le visage tranquille et volontaire de ceux qui ne permettent pas à la vie de les troubler et qui tiennent à leur bonne humeur comme un avare à son trésor.
J. Green, Adrienne Mesurat, I, II.
Spécialt. Déconcerter en créant une impression d'insécurité. Démonter, désarçonner, impressionner. || Examinateur sévère qui trouble les candidats ( Ahurir, bousculer; → ci-dessous Se troubler). || Rien ne le trouble. Imperturbable.
19 Cette gêne extrême et l'inaptitude que je me sens me trouble, me déconcerte, et je serais bien plus à mon aise devant un Monarque d'Asie que devant un bambin qu'il faut faire babiller.
Rousseau, Rêveries…, « IXe promenade ».
3 (1530, Palsgrave). Vieilli. Déranger ou distraire dans son activité intellectuelle. Déranger, gêner, incommoder.
4 (Mil. XVIIe). Sujet n. de chose. Rendre perplexe; susciter un embarras intellectuel ou moral dans (l'esprit), chez (qqn). Embarrasser, inquiéter (→ Rosière, cit. 3). || Toutes les questions terribles qui troublent l'esprit humain (→ Âprement, cit. 2). || Il y a un détail qui me trouble. Troublant.Une foi que ne trouble aucun soupçon de doute (→ Piété, cit. 4).
20 Cette cassette-là me trouble entièrement (…)
Molière, Tartuffe, V, 1.
21 Oh ! je n'aime pas beaucoup m'en tirer par des jongleries de ce genre (…) Ta remarque me trouble.
J. Romains, les Hommes de bonne volonté, t. III, II, p. 44.
5 (Mil. XVIIe, Racine). Mettre dans le trouble en suscitant une émotion amoureuse. Émouvoir, enivrer, ensorceler, fasciner, séduire. || Troubler le cœur et les sens (→ Enivrement, cit. 3). || « Je défiais ses yeux de me troubler jamais » (→ Rabaisser, cit. 6). || Ce charmant visage qui me troublait si profondément (→ Apercevoir, cit. 22). Susciter le désir charnel chez (qqn). → Fugitif, cit. 9. || Aucune révélation charnelle ne les troubla (→ Réseau, cit. 9).
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se troubler v. pron.
1 (1690, Furetière). Devenir trouble. || Liquide qui se trouble. Vx. || Le temps s'est troublé. Déranger (se).
22 (…) le Danube se divise en plusieurs branches; les ondes de l'Elbe et de la Sprée se troublent facilement par l'orage; le Rhin seul est presque inaltérable.
Mme de Staël, De l'Allemagne, I, I.
2 (V. 1770, Rousseau). Littér. || Avoir la vue qui se trouble, devient moins nette. Brouiller (se). Perdre sa lucidité, s'égarer, s'enfiévrer. || Cerveau, esprit, imagination qui se trouble. || Sa mémoire se trouble.
3 (XIVe). Éprouver un trouble, une émotion. Émouvoir (s'). || « L'ai-je vu se troubler et me plaindre un moment ? » (→ Étudier, cit. 29).
(1669, Racine). Perdre son sang-froid, ne plus savoir que faire ou que dire, sous l'effet d'une émotion, de la confusion. Contenance (perdre); → Champ, cit. 9; changer, cit. 53; fautif, cit. 2. || Élève qui se trouble, balbutie, change de couleur, rougit. Barboter, embarbouiller (s'). || Il continua sans se troubler le moins du monde.
4 Vieilli. Devenir moins ferme (→ Faiblir, cit. 4).Devenir perplexe, embarrassé (par un problème intellectuel, moral…). || « À quoi bon se troubler des choses éphémères » (cit. 8).
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troublé, ée p. p. adj.
1 (Av. 1613, M. Régnier). Rendu trouble, louche (1. Louche). Altéré, brouillé. || Eau troublée (→ Rivage, cit. 5). || Un ciel non troublé (→ Anémique, cit. 2).Œil troublé (→ Blême, cit. 1; mordre, cit. 14), vue troublée.
2 (Fin XIVe). Bouleversé, rendu confus (→ Sens dessus dessous). || Ordre troublé.Par ext. || Période troublée de l'histoire d'un pays, agitée par des troubles (2. Trouble, A., 1.; → Migration, cit. 1). || Temps troublés. Tourmenté.Assemblée, réunion troublée, agitée (→ Houleux, orageux).
3 Interrompu ou gêné. || Sommeil, repos troublé.(1770). Dr. || Possession troublée. 2. Trouble, A., 2.
4 (1538, Estienne). Qui ne jouit plus de sa lucidité normale. Confus, détraqué, effaré, égaré, envers (à l'). || Cerveau, esprit troublé ( Hébété). || La tête tellement troublée (→ Régisseur, cit. 2).Imagination troublée. || « Leur mémoire troublée » (Racine, les Plaideurs, vers 667).
5 (Personnes). Qui est dans un état d'émotion pénible ou gênant. Ému, éperdu; inquiet.Candidat troublé, qui perd tous ses moyens, ne sait plus ce qu'il fait. Ahuri, effarouché.Dérangé, distrait.Perplexe, embarrassé.Spécialt. || Se sentir troublé, séduit (→ Peindre, cit. 34).
CONTR. Clarifier, éclaircir, filtrer, purifier. — Calmer, pacifier. — Accorder, arranger, coordonner, disposer (en ordre). — Ordonner, ranger. — Apaiser, calmer, rasséréner, rassurer, tranquilliser; aise (mettre à l'aise).(Du p. p.) Clair, limpide, pur, transparent. — Calme, paisible, tranquille. — Lucide; équilibré. — Calme, impassible, imperturbable, serein.
DÉR. Troublant, 2. trouble, troubleur.
COMP. Trouble-fête.

Encyclopédie Universelle. 2012.