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ruine

ruine [ rɥin ] n. f.
• 1180; lat. ruina, de ruere « tomber, s'écrouler »
IUne, des ruines.
1(Plus cour. au plur.) Débris d'un édifice dégradé par l'âge ou détruit. décombres, éboulement, vestige. Les ruines d'une ville, après la guerre. Un champ de ruines. « Trente mille habitants de tout âge, et de tout sexe sont écrasés sous des ruines » (Voltaire ). Ruines romaines. Fouilles dans les ruines des villes antiques. « Elle aimait les ruines des vieux châteaux, les temples écroulés aux colonnes festonnées de lierre » (Nerval). « Au milieu de cette étendue sauvage, une haute ruine s'élevait; un château carré, flanqué de tours » (Maupassant). Hubert Robert, peintre de ruines (parfois appelé ruiniste n. ). — Par exagér. Édifice délabré. Retaper une ruine.
Fig. « Le sentiment humanitaire commence à naître sur les ruines des patries » (Flaubert).
2(1835) Personne dégradée par l'âge, la maladie, les chagrins. débris, loque. « C'était une sorte de ruine humaine » ( Balzac). épave. Ce n'est plus qu'une ruine. Une pauvre ruine.
IILa ruine (de)...
1(1262) Grave dégradation (d'un édifice) allant jusqu'à l'écroulement partiel ou total; état de ce qui se dégrade, s'écroule. délabrement, destruction, détérioration, effondrement. « Le propriétaire d'un bâtiment est responsable du dommage causé par sa ruine » ( CODE NAPOLÉON , art. 1386). Cour. EN RUINE. Tomber en ruine. crouler, s'écrouler, s'effondrer. « Il tombait en ruine; à chaque saison, des plâtras qui se détachaient de ses flancs lui faisaient des plaies hideuses » (Hugo). Château en ruine. — MENACER RUINE : risquer de tomber en ruine.
2(v. 1300) Destruction, perte. La société précipite sa propre ruine. chute, décadence, déliquescence, dissolution. Aller à la ruine. dépérir, péricliter. « Elle a cru que ma perte entraînait sa ruine » (Racine). C'est la ruine de ses espérances. anéantissement, faillite, 1. fin. La ruine de sa réputation, de sa santé.
Par ext. Cause de destruction.
3Perte des biens, de la fortune. banqueroute, culbute, débâcle, faillite, naufrage. Nous courons vers la ruine. Être au bord de la ruine. Être acculé à la ruine. « Lorsque à la ruine de mes parents il m'a fallu me séparer de ces choses » (A. Daudet). Par ext. Une ruine : une cause de ruine, une source de dépenses ( ruineux) . Cette propriété à entretenir, c'est une ruine, un gouffre.
⊗ CONTR. Essor, fortune.

ruine nom féminin (latin ruina, de ruere, faire tomber) Processus de dégradation, d'écroulement d'une construction, pouvant aboutir à sa destruction complète ; état d'un bâtiment qui se délabre, s'écroule (seulement dans en ruine) : Un château qui tombe en ruine. Édifice détruit, délabré, écroulé : Ils ont acheté une ruine à la campagne pour la retaper. Désagrégation, destruction progressive de quelque chose, qui aboutit à sa disparition, à sa perte : La ruine d'un État. État de quelqu'un, d'un groupe qui a perdu tous ses biens, tout son avoir : Un joueur qui court à la ruine. Cause de l'anéantissement, de la perte, de la disparition de quelque chose : Ce scandale a été la ruine de son avenir. Familier. Personne usée physiquement ou intellectuellement : Une artiste âgée qui n'est plus qu'une ruine.ruine (citations) nom féminin (latin ruina, de ruere, faire tomber) Honoré de Balzac Tours 1799-Paris 1850 Un pouvoir impunément bravé touche à sa ruine. La Peau de chagrin Paul Claudel Villeneuve-sur-Fère, Aisne, 1868-Paris 1955 La nature n'est qu'une immense ruine. Journal Gallimard Pierre Jean Jouve Arras 1887-Paris 1976 La fleur est le regard riant de la ruine. La Vierge de Paris Mercure de Franceruine (difficultés) nom féminin (latin ruina, de ruere, faire tomber) Orthographe Être en ruine, tomber en ruine s'écrivent avec ruine au singulier. Remarque Le pluriel est fréquent de nos jours. Néanmoins, en ruine est considéré comme plus correct. Menacer ruine : ruine est toujours au singulier. ● ruine (expressions) nom féminin (latin ruina, de ruere, faire tomber) Menacer ruine, être près de s'effondrer, de crouler. ● ruine (synonymes) nom féminin (latin ruina, de ruere, faire tomber) Processus de dégradation, d'écroulement d'une construction, pouvant aboutir à sa...
Synonymes :
- délabrement
- démantèlement
- démolition
- effondrement
Désagrégation, destruction progressive de quelque chose, qui aboutit à sa disparition...
Synonymes :
- chute
- décadence
- déliquescence
- écroulement
- renversement
État de quelqu'un, d'un groupe qui a perdu tous ses...
Synonymes :
- banqueroute
- déconfiture (familier)
- déroute
- faillite
Cause de l'anéantissement, de la perte, de la disparition de...
Synonymes :
- débâcle
- fin
- naufrage
- perte
Familier. Personne usée physiquement ou intellectuellement
Synonymes :
- débris
- épave
- larve
- loque
- résidu

ruine
n. f.
d1./d (Surtout au Plur.) Débris d'une ville, d'un édifice détruits. Les ruines de Carthage.
d2./d Dégradation, écroulement d'un édifice. Bâtiment qui menace ruine, qui tombe en ruine.
d3./d Fig. Effondrement, destruction. La ruine d'un état.
être la ruine de: être la cause même de la destruction, de la perte de. Cette faute sera la ruine de son crédit.
d4./d Perte des biens, de la fortune. Ruine d'un banquier, d'une entreprise.
d5./d Personne dans un état de grande dégradation physique ou morale. Cet homme n'est plus qu'une ruine.

⇒RUINE, subst. fém.
I. A. — 1. Effondrement partiel ou total d'une construction ou d'un ensemble d'édifices à la suite d'une dégradation naturelle, d'une destruction volontaire ou accidentelle. Synon. destruction. Ruine d'un château, d'une maison, d'une tour, d'une ville; achever, causer, entraîner, provoquer la ruine d'un édifice. Après la ruine du premier [temple de Balbek] par un tremblement de terre, on construisit le second sur le même modèle (LAMART., Voy. Orient, t. 2, 1835, p. 171). Où il y avait ruine, on releva les débris; où il y avait ébranlement, on consolida l'assise (PESQUIDOUX, Livre raison, 1928, p. 235).
Loc. Battre en ruine (vx). V. battre I A 1 c. Menacer ruine. V. menacer II D.
2. P. ext. Destruction partielle ou totale d'une chose. Jeter, semer la ruine. On ne saurait s'empêcher de présager, sur ce théâtre si fécond en ruines [le cirque de Barège], de nouvelles et subites catastrophes (DUSAULX, Voy. Barège, t. 1, 1796, p. 195). La mort est inscrite dans les hommes, la ruine est inscrite dans les choses (SARTRE, Sursis, 1945, p. 22).
En partic. Dévastation d'un lieu, de ses richesses par l'homme ou par une force naturelle. Ruine d'une contrée; ruine de la végétation, d'une récolte. [Mouret] ne reconnaissait plus le jardin. Les buis avaient disparu (...). Quelle faux avait passé là, rasant tout (...)? Un sourd grondement montait en lui, en face de cette ruine (ZOLA, Conquête Plassans, 1874, p. 1192). Sans doute la pression des populations n'a pas été telle en France que le déboisement ait entraîné la ruine d'importantes régions (Forêt fr., 1955, p. 4).
3. P. anal.
a) Vieilli. Mort d'une personne. Synon. destruction (voir ce mot A 3 b). Bossuet (...) penchait vers sa ruine qu'il avait annoncée avec une simplicité si magnifique (CHATEAUBR., Rancé, 1844, p. 278).
b) Dégradation physique accentuée d'une personne, de son état de santé ou d'une partie de son corps. Synon. déchéance, décrépitude, délabrement, destruction (voir ce mot A 2). Ruine de la santé; ruine du corps. J'assiste à la dissolution d'un ami qui s'en va d'une syphilis mal connue et la ruine de cet individu (...) est assez glaçante (VALÉRY, Corresp. [avec Gide], 1893, p. 188). Toussaint (...) ne paraissait avoir ses cinquante ans que lorsqu'on s'arrêtait à la ruine de sa face ronde et cuite, crevassée, mangée par le travail (ZOLA, Paris, t. 1, 1897, p. 185).
B. — Au fig.
1. Altération profonde, désagrégation (d'une chose abstraite) aboutissant à sa disparition; p. ext., destruction soudaine et complète de quelque chose. Synon. anéantissement, décadence, écroulement, effondrement.
a) [Le compl. désigne une structure, un système] Ruine de la famille, de la société; ruine d'un état, d'un gouvernement, d'un système; ruine d'une doctrine, d'une institution, d'une théorie. Les invasions barbares, la ruine de la civilisation antique (P. LAVEDAN, Urban. 1926, p. 124).
b) [Le compl. désigne une idée, un sentiment, une valeur] Ruine d'une croyance, d'une espérance, d'une illusion, d'une passion, d'une réputation. Cette ruine totale et de mes efforts et de mon bonheur m'abattit enfin sous la sensation sans pareille d'un néant complet (FROMENTIN, Dominique, 1863, p. 145). [Les philosophes] détournent leurs regards de vierges du monde où se consomme réellement la ruine de la liberté (NIZAN, Chiens garde, 1932, p. 114).
2. a) Ruine (morale) de qqn. Déchéance morale de quelqu'un. Synon. destruction (v. ce mot B 3), perte (voir ce mot I B). La lutte éternelle du bien contre le mal, la ruine des méchants, l'apothéose des justes (VIOLLET-LE-DUC, Archit., 1872, p. 230). Alors le coq chanta. L'homma baissa la tête et (...) s'assit sur une marche en face du spectre blanc de sa ruine (COCTEAU, Appogiatures, 1953, p. 16).
Courir à sa ruine. V. courir I B a.
b) Perte des biens, de la fortune; effondrement financier d'une ou de plusieurs personnes physiques ou morales. Synon. naufrage. Ruine d'un industriel, d'une société; travailler à sa ruine; être au bord de la ruine; être menacé d'une ruine totale. Pour ce vénérable émigré, ni l'exil, ni la ruine, ni la destruction de ses proches (...) ne l'avertissaient de la révolution (CHATEAUBR., Mém., t. 1, 1848, p. 497). Un fléau terrible, la grêle, accéléra leur ruine (PESQUIDOUX, Livre raison, 1928, p. 178).
II. — P. méton.
A. — 1. Au sing. ou au plur.
a) ) Construction ou ensemble d'édifices partiellement ou totalement écroulés. Une immense et admirable ruine profilant sur le ciel des tours, des murs écroulés, toute une bizarre architecture de citadelle morte (MAUPASS., Contes et nouv., t. 2, Chats, 1886, p. 1062). Des maisons écroulées ou (...) en démolition, de ces ruines (...), montrant dans une coupe verticale les papiers peints et les vestiges d'une vie privée (TRIOLET, Prem. accroc, 1945, p. 176).
SYNT. Ruine mélancolique, pittoresque, romantique, sinistre; ruines abandonnées; ruines antiques, féodales, gothiques, romaines; belles, vieilles ruines; ruines de guerre; champ, océan de ruines; découvrir une ruine; être enseveli sous les ruines; relever des ruines, visiter des ruines.
Locutions
Vieilli. Pierre de ruines. Pierre ruiniforme (v. ce mot B). (Dict. XIXe s.).
HIST., LITT. Sentiment des ruines. Mélancolie que les ruines ou leur représentation inspiraient aux romantiques. (Ds Lar. Lang. fr.).
Loc. adj. En ruine(s). (À demi) effondré. Mur en ruine. Sur les barricades en ruine, il restait des omnibus, des tuyaux de gaz, des roues de charrettes (FLAUB., Éduc. sent., t. 2, 1869, p. 169). Le récit est conduit vers les restes d'Herculanum (...), vers des édifices en ruines (DURRY, Nerval, 1956, p. 71).
Loc. verb. Tomber en ruine(s). Se trouver dans un état de complet délabrement, s'écrouler. La chapelle n'existait plus; les tourelles s'étaient éboulées; la façade tombait en ruine (SANDEAU, Mlle de La Seiglière, 1848, p. 34). Dans la pratique la commune se désintéressera de l'église, l'édifice tombera en ruines (BARRÈS, Cahiers, t. 5, 1906, p. 49). P. anal., vieilli. [Le suj. désigne un vêtement] Tomber en loques. Pas d'argent, et, par conséquent, pas de quoi renouveler ses vêtements qui tombaient en ruines (KOCK, Ficheclaque, 1867, p. 205).
P. exagér. Maison vétuste et délabrée. Retaper une ruine. Elle habitait (...) une ruine au sommet d'un mont absolument désert sur la côte de Corse (MAUPASS., Contes et nouv., Ermite, 1886, p. 1052). Nos amis ont acheté une ruine en Provence; ils l'ont fait réparer et c'est maintenant une charmante maison de campagne (DUB.).
P. méton., BEAUX-ARTS
DÉCOR. Ruine (factice, postiche). Construction en forme d'édifice effondré destinée à orner un parc ou un jardin à l'anglaise. Ç'a été, il y a quelques années, la mode d'orner les jardins anglais de ruines postiches (BESCH. 1845-46). Il a orné son jardin de ruines fort pittoresques (Ac. 1835-1935).
GRAV., PEINT. Représentation d'édifices en ruines ou de paysages comportant de tels édifices. Peintre de ruines. Les ruines de ce peintre sont fort estimées (Ac. 1835, 1878). L'artiste [Hubert Robert] qui a inventé la ruine spirituelle, le crayonneur agréable (E. DE GONCOURT, Mais. artiste, t. 1, 1881, p. 142).
) P. ext., surtout au plur. Important dégât matériel résultant d'une cause violente (catastrophe naturelle, guerre etc.). Synon. destruction, dévastation, ravage. Ruines d'un cataclysme, d'un tremblement de terre; constater l'ampleur des ruines; mesurer l'étendue des ruines. C'était la destruction, tout ce que la guerre peut faire d'abominables ruines, quand elle passe, dévastatrice, en furieux ouragan (ZOLA, Débâcle, 1892, p. 415):
Quand la masse [d'une avalanche] emportée sur les pentes, suivie et précédée des ruines qu'elle entraîne, vient à fondre dans les vallons, c'en est fait: vous y chercheriez en vain les moindres vestiges des habitans et de leurs troupeaux.
DUSAULX, Voy. Barège, t. 1, 1796, p. 107.
Au fig. [Le suj. désigne une ville, un pays] Renaître, se relever de ses ruines. Revivre après un cataclysme, un désastre. Synon. renaître de ses cendres. Sion se relevoit de ses ruines (COTTIN, Mathilde, t. 2, 1805, p. 342). Une France qui renaît de ses ruines (L. FEBVRE, Conq. du Midi par la lang. fr., [1924] ds Combats, 1953, p. 179).
) Au fig., surtout au plur. Destruction d'ordre moral ou social. Synon. destruction, ravage. C'était dans notre foyer que les ruines causées par Silbermann étaient le plus sensibles. Là, tous mes dieux étaient renversés. Les idées en honneur, (...) notre conception du beau, tout avait perdu son prestige (LACRETELLE, Silbermann, 1922, p. 170).
b) Ruine (humaine). Personne physiquement et parfois intellectuellement dégradée par l'âge ou la maladie. Synon. débris (voir ce mot B 1 c), décrépit, délabré (voir ce mot II B 1). Pauvre, vieille ruine; devenir une véritable ruine; ce n'est plus qu'une ruine. J'ai vu Raymond hier. (...) Quelle ruine! Maigre, voûté, il a les mains recouvertes d'écorce, les dents noires, les yeux éteints. Il est vieux (RENARD, Journal, 1896, p. 336). Je songe à Renoir, ruine humaine, ossifié, déjeté par le rhumatisme, ne pouvant ni se lever ni se coucher et faisant naître (...) les roses, les anémones, de son pinceau attaché au poignet (FAURE, Espr. formes, 1927, p. 128).
2. Au plur. Ruines de qqc. Vestiges d'une chose en partie détruite. Synon. restes.
a) [Le compl. désigne une construction ou un ensemble d'édifices] Ruines d'une forteresse, d'un temple, d'un village; ruines de Thèbes, de Troie; ruines du Colisée. Ces ruines de villes englouties que l'on voit, dit-on, à peu de profondeur sous les vagues (LAMART., Voy. Orient, t. 2, 1835, p. 24). C'est un monstre, dit Anne. Il travaillerait au milieu des ruines d'Hiroshima (BEAUVOIR, Mandarins, 1954, p. 222).
b) P. ext. [Le compl. désigne une chose concr.] Les Arabes ne touchent pas à ces ruines de bâtiments naufragés (LAMART., Voy. Orient, t. 2, 1835, p. 57).
c) Au fig. [Le compl. désigne une chose abstr.] Sur les ruines de l'institution impériale et des partis d'empire, il [le parti socialiste] se dressera avec sa force pleine d'élan (JAURÈS, Ét. soc., 1901, p. 55).
B. — Au sing.
1. Cause de l'effondrement de quelque chose, de la perte de quelqu'un. Sa famille, dont plusieurs membres (...) me regardent comme la ruine de leurs prétentions ou l'obstacle à leur rapacité (FIÉVÉE, Dot Suzette, 1798, p. 192). Cet homme [Rubens], d'où sortiront pendant deux siècles tous les peintres, est cependant la ruine des théories et des écoles (FAURE, Hist. art, 1921, p. 25).
2. Cause de ruine (v. supra I B 2 b); p. ext., source de dépenses excessives ou source de pertes. Les premiers métiers furent brisés par les ouvriers lyonnais sous prétexte que la substitution du travail mécanique au travail à la main serait une ruine pour les habitants de la contrée (D'ALLEMAGNE, Hist. jouets, 1902, p. 226). La maladie d'Alexis avait été une véritable ruine (...). Il y avait la clinique, la salle d'opération, les pansements, les médicaments (TRIOLET, Prem. accroc, 1945, p. 208).
REM. 1. Ruine(-)de(-)Rome, (Ruine de Rome, Ruine-de-Rome)subst. fém., bot. Synon. usuel de cymbalaire. Entre autres espèces vivaces qui prospèrent facilement dans les rocailles, il y a (...) Linaria cymbalaria balaria (« Ruine-de-Rome ») (La Gde encyclop., Paris, Larousse, t. 44, 1975, p. 9298). 2. Ruiniste, subst., beaux-arts. Peintre, dessinateur de ruines. [Corresp. à supra II A 1 a ] Rome et les ruines antiques d'Italie sont le thème dominant [des gravures de Piranèse] (...) thème qui pouvait sembler épuisé par deux siècles de topographes et de « ruinistes » (J. LARAN, Les Estampes, Paris, P.U.F., 1948, pp. 72-73).
Prononc. et Orth.:[]. Att. ds Ac. dep. 1694. Étymol. et Hist. A. 1. 1155 « dévastation, destruction, ravage commis sur une chose » (WACE, Brut, 13631 ds T.-L.); 2. a) ca 1213 « restes d'un édifice écroulé » (Faits des Romains, éd. L. F. Flutre et K. Sneyders de Vogel, p. 614, 19: Erbe, arbre et buisson qui estoient levé es ruines et es fontures dou mur); 1765 (Encyclop. t. 14, p. 433b note ,,ruine ne se dit que des palais, des tombeaux somptueux..., en parlant d'une maison particulière... on diroit bâtimens ruinés``); id. peint. « représentation d'édifices ruinés; tableau représentant ces ruines » (ibid.); b) en parlant d'une personne ) 1833 femme en ruine (HUGO, Borgia, III, 1, p. 143); ) id. une sorte de ruine (BALZAC, Méd. camp., p. 95); 3. 1262 « écroulement, chute (d'un objet matériel) » (JEAN LE MARCHAND, Miracles N.-D. de Chartres, 20 ds T.-L.: Tretout torna a descepline Ou par arson ou par rüine); 2e moit. XIIIe s. (St Brendan en prose, 79, 10, ibid.); ca 1350 rüynes d'edefisses (GILLES LI MUISIS, Poésies, II, 4, ibid.); 1549 tomber en ruine (EST.). B. 1. Fig. Ca 1175 « chute, déchéance, perte » (BENOÎT DE STE-MAURE, Chron. ducs de Normandie, 25880 ds T.-L.: la grant rüine Des angres qui des ceus chäirent); ca 1245 metre a rüine e a perdicïum (St Auban, 338, ibid.); 2. 1671, 1er nov. « ce qui cause une dépense excessive » (SÉVIGNÉ, Lettres, éd. E. Gérard-Gailly, t. 1, p. 412: Ce régiment est une distinction agréable; mais n'est-ce point aussi une ruine?); 3. 1680 « perte des biens, de la fortune » (RICH.); 4. 1690 « ce qui est cause de dépérissement de destruction » (FUR.: La rupture entre les Couronnes est la ruine du commerce). Empr. au lat. ruina « chute, écroulement; effondrement de bâtiment, ruine; (fig.) écroulement, effondrement; catastrophe, désastre, destruction ». Fréq. abs. littér.:4 725. Fréq. rel. littér.:XIXe s.: a) 10 171, b) 6 922; XXe s.: a) 5 873, b) 4 173. Bbg. DUB. Dér. 1962, p. 46 (s.v. ruiniste). — QUEM. DDL t. 20 (s.v. tomber en ruine).

ruine [ʀɥin] n. f.
ÉTYM. 1180, sens II; lat. ruina, de ruere « tomber, s'écrouler ».
———
I
1 (XIIIe). Grave dégradation d'un édifice allant jusqu'à l'écroulement partiel ou total; son résultat. Délabrement, destruction, détérioration, vétusté. || Ruine totale (→ Autodafé, cit. 3). || Machines (cit. 24) de guerre qui sèment la ruine. Désolation, dévastation. — ☑ (1622, in D. D. L.). En ruine. || Tomber en ruine. Crouler, effondrer (cit. 13). → 1. Flanquer, cit. 2; inhabité, cit. 2. || Colonne, château en ruine. Dévasté. — ☑ (1611). Vx. Battre en ruine : battre en brèche. || Nul symptôme de ruine (→ Désert, adj., cit. 9). — ☑ Bâtiment qui menace ruine, de tomber en ruine.
1 Les batteries (…) continuaient (…) à battre en ruine la branche du demi-bastion (…)
Racine, le siège de Namur.
2 Peu d'étrangers visitaient cet édifice, aucun passant ne le regardait. Il tombait en ruine; à chaque saison, des plâtras qui se détachaient de ses flancs lui faisaient des plaies hideuses.
Hugo, les Misérables, IV, VI, II.
2 (V. 1300). Destruction, perte. || La ruine de qqn, de qqch., sa ruine. || L'établissement (cit. 2) ou la ruine des États. Renversement (→ Mollesse, cit. 7). || La société précipite sa propre ruine. Chute, décadence, déliquescence, dissolution (→ Enfoncer, cit. 28). || Consommer (cit. 2) sa ruine. Tombeau (creuser son). || Aller à la ruine. Péricliter, périr. || Être enveloppé (cit. 28) dans la ruine de qqn (→ Prophétique, cit. 4). || « Elle a cru que ma perte entraînait (cit. 24) sa ruine » (Racine). || Emploierons- (cit. 1) nous l'intelligence à notre ruine ?À ma ruine (vx), pour (cit. 47) ma ruine. Malheur (→ Hydre, cit. 4). || La ruine de ses espérances. Anéantissement, faillite, mort. || La ruine de sa réputation, de son crédit, de sa santé ( Dépérissement; → Naufrage, cit. 7).La ruine de… : ce qui cause la destruction, la fin de (qqch.). || La satisfaction du désir est la ruine de l'illusion (cit. 33).
3 (…) science sans conscience n'est que ruine de l'âme.
Rabelais, Pantagruel, VIII.
4 En quelques jours, s'accumulèrent toutes les ruines : perte d'un être cher, perte de toute fortune, de toute situation, de l'estime publique, abandon des amis. Écroulement total. Rien ne resta debout de ce qui les faisait vivre.
R. Rolland, Jean-Christophe, Antoinette, p. 856.
3 (1636). Perte des biens, de la fortune (de qqn, d'une collectivité…). Banqueroute, culbute, débâcle, dégringolade, déroute, effondrement, naufrage (→ Encourager, cit. 12; entraîner, cit. 21; millionnaire, cit. 1; râteau, cit. 2). || La misère et la ruine générales. Pauvreté (→ Captif, cit. 2). || Être au bord de la ruine. Aboi(s); abîme, gouffre. || De sa ruine, il a pu sauver quelques débris, quelques épaves.(1559). Par ext. Cause de ruine. Ruineux. || Cette propriété à entretenir, c'est une ruine.
5 Il m'ose menacer de mes propres bienfaits,
Et veut, à ma ruine, user des avantages
Dont le viennent d'armer mes bontés trop peu sages,
Me chasser de mes biens, où je l'ai transféré (…)
Molière, Tartuffe, V, 3.
6 Aussi, ma mémoire reconnaissante a-t-elle gardé du jardin, de la fabrique et des platanes un impérissable souvenir, et lorsque à la ruine de mes parents il m'a fallu me séparer de ces choses, je les ai positivement regrettées comme des êtres.
Alphonse Daudet, le Petit Chose, I, I.
7 Mais ils trouvaient, ces cousins riches, que c'était une véritable folie, que ce serait assurer sa ruine plus complète, qu'il fallait vendre, régulariser, en finir (…) Et elle vendit.
Loti, Matelot, XV.
4 (XVIIe). Vx (langue class.). || Ruine d'eau : chute d'eau abondante.
———
II
1 (1180). Généralt au plur. Débris d'un édifice ancien dégradé ou écroulé; ensemble d'édifices écroulés, dégradés. Décombres, démolition, éboulement, reste, vestige.Monceau de ruines et de cendres (cit. 8). || La guerre (cit. 24) et les ruines (→ Gravat, cit.). || Ruines d'un bâtiment (→ Crypte, cit. 1; dévastation, cit. 3; écrouler, cit. 10; forteresse, cit. 1) d'une ville (→ Amateur, cit. 3; muraille, cit. 8; récipient, cit. 2). || Ruines gallo-romaines (cit.). || Fouilles (cit. 3) dans les ruines des villes antiques (→ Exhumer, cit. 3). || Poésie, mélancolie des ruines. || Le thème, le sentiment des ruines (→ Harmonie, cit. 34). || Les Ruines, ouvrage de Volney (1791).Spécialt. || Ruines représentées par les peintres, ruines artificielles disposées dans les jardins (→ Paysagiste, cit.; et 2. poétique, cit. 4, Diderot). || Peintre de ruines. Ruiniste.(Au sing.). Édifice écroulé, dégradé. || Une ruine (→ Hacher, cit. 7; lamentation, cit. 4).
8 Sacrés coteaux, et vous saintes ruines,
Qui le seul nom de Rome retenez (…)
Du Bellay, les Antiquités de Rome, I, VII.
9 (…) ils sentent la terre trembler sous leurs pas (…) les maisons s'écroulent, les toits sont renversés sur les fondements, et les fondements se dispersent; trente mille habitants de tout âge et de tout sexe sont écrasés sous des ruines.
Voltaire, Candide, V.
10 Ô les belles, les sublimes ruines ! Quelle fermeté, et en même temps quelle légèreté, sûreté, facilité de pinceau ! (…) Les idées que les ruines réveillent en moi sont grandes. Tout s'anéantit, tout périt, tout passe. Il n'y a que le monde qui reste. Il n'y a que le temps qui dure (…) les objets qui m'entourent m'annoncent une fin et me résignent à celle qui m'attend.
Diderot, Hubert Robert, Salon de 1767.
11 Tous les hommes ont un secret attrait pour les ruines. Ce sentiment tient à la fragilité de notre nature, à une conformité secrète entre ces monuments détruits et la rapidité de notre existence. Il s'y joint, en outre, une idée qui consolide notre petitesse, en voyant que des peuples entiers, des hommes quelquefois si fameux, n'ont pu vivre cependant au delà du peu de jours assignés à notre obscurité (…) Il y a deux sortes de ruines : l'une, ouvrage du temps; l'autre, ouvrage des hommes (…) Les destructions des hommes sont d'ailleurs plus violentes et plus complètes que celles des âges : les seconds minent, les premiers renversent.
Chateaubriand, le Génie du christianisme, III, III.
11.1 (…) une ruine, qui acquiert quelque chose de plus frappant par les parties qui manquent.
E. Delacroix, Journal, 20 avr. 1853, t. II, p. 164.
12 Et, au milieu de cette étendue sauvage, une haute ruine s'élevait; un château carré, flanqué de tours (…)
Maupassant, Au soleil, En Bretagne.
13 Que de ruines déjà, dans notre quartier, où, ce matin, je me promène ! Maisons éventrées, effondrements informes, écroulements (…)
Gide, Journal, 13 mars 1943.
Par ext. Dégât, désastre, ravage(s).Pays qui se relève (cit. 31) de ses ruines, qui répare tous les dommages causés par la guerre ou une calamité quelconque. || Carthage sortit de ses ruines (→ Métropole, cit. 2).
Par métaphore, fig. Ce qui reste (de ce qui a été détruit, qui s'est dégradé). || Despotisme (cit. 4) qui s'établit sur les ruines de la République. || L'individualisme (cit. 2) tend à croître sur les ruines des institutions. || Peut-on bâtir sur ces ruines ? (→ Inévitable, cit. 4, Bossuet). || Les ruines de son entreprise (→ Apoplexie, cit. 3; et aussi poing, cit. 10).
14 (…) Ses soins ne purent faire
Qu'elle échappât au temps, cet insigne larron.
Les ruines d'une maison
Se peuvent réparer : que n'est cet avantage
Pour les ruines du visage !
La Fontaine, Fables, VII, 5.
15 La France a été constituée du jour que les provinces sont mortes, et le sentiment humanitaire commence à naître sur les ruines des patries.
Flaubert, Correspondance, 422, 27 août 1853.
2 (1833, Balzac). Personne qui, du fait de l'âge, des chagrins,… a perdu la plus grande partie de ses forces, de sa beauté, de ses facultés. || Les moines n'étaient plus que des ruines de religieux (→ Introduire, cit. 10). || Cette admirable ruine (→ Majesté, cit. 19). || Un vieux mendigot (cit.), une ruine humaine. Épave. || Une pauvre ruine.
16 Genestas aperçut alors un pauvre vieillard (…) Ses jambes semblaient déjetées. Son dos, voûté par les habitudes du travail, le forçait à marcher tout ployé; aussi, pour conserver son équilibre, s'appuyait-il sur un long bâton (…) C'était une sorte de ruine humaine à laquelle ne manquait aucun des caractères qui rendent les ruines si touchantes.
Balzac, le Médecin de campagne, Pl., t. VIII, p. 393.
CONTR. Essor, fortune, gain, prospérité.
DÉR. 1. Ruiner, ruiniste.
COMP. Ruine-de-Rome, ruiniforme.

Encyclopédie Universelle. 2012.