nue [ ny ] n. f.
• XIIe; lat. pop. °nuba, class. nubes
1 ♦ Vx ou littér. Nuages. ⇒ nuée. « Le soleil dissipe la nue » (La Fontaine). — Par ext. Le ciel, l'espace nuageux ou non. « Sa prière étant faite, il entend dans la nue une voix » (La Fontaine).
2 ♦ Mod. Loc. Porter, élever, mettre aux nues : admirer, louer avec enthousiasme. — Tomber des nues : être extrêmement surpris, décontenancé par un événement inopiné (cf. Tomber de la lune, de haut). « Je tombais des nues, j'étais ébahi, je ne savais que dire » (Rousseau) .
⊗ HOM. Nu.
● nue nom féminin (latin populaire nuba, du latin classique nubes, nuage) Littéraire. Nuages. ● nue (homonymes) nom féminin (latin populaire nuba, du latin classique nubes, nuage) nu adjectif nu nom masculin nu nom masculin invariable ● nue (synonymes) nom féminin (latin populaire nuba, du latin classique nubes, nuage) Littéraire. Nuages.
Synonymes :
- ciel
- cieux
- nuée
● nu, nue
adjectif
(latin nudus)
Qui est sans aucun vêtement : Se baigner tout nu. Aller les jambes nues.
Comme épithète après tête, mains, pieds, indique que quelqu'un est sans chapeau, sans gants, sans chaussures. (Avant le nom d'une partie du corps et relié à lui par un trait d'union, nu reste invariable : Aller nu-tête, nu-pieds. Après le nom, et non relié par un trait d'union, nu varie comme un autre adjectif)
Qui est dépourvu de poils, de cheveux : Avoir le crâne nu.
Qui n'est pas enveloppé, revêtu d'un isolant : Un fil électrique nu.
Se dit des organes végétaux dépourvus des enveloppes qui les entourent habituellement.
Qui est presque sans meubles, qui est sans ornements : Les murs nus d'une cellule.
Qui est dépourvu de végétation, dépouillé de feuilles : Une plaine nue.
● nu, nue (citations)
adjectif
(latin nudus)
Henri Frédéric Amiel
Genève 1821-Genève 1881
La femme nue est belle une fois sur vingt, et trois ans sur soixante et dix. C'est-à-dire qu'il y a quatre cent soixante-dix à parier contre un qu'en photographiant une femme sans voile on fait une indécence, sans arriver à un effet esthétique.
Journal intime, 28 juillet 1866
Claude Joseph Dorat
Paris 1734-Paris 1780
L'Amour est nu mais il n'est pas crotté.
Contes et nouvelles
Michel Leiris
Paris 1901-Saint-Hilaire, Essonne, 1990
Vient un jour où il n'y a plus de magie à être nu.
Fibrilles
Gallimard
Alfred de Musset
Paris 1810-Paris 1857
Nu comme un plat d'argent, — nu comme un mur d'église,
Nu comme le discours d'un académicien.
Premières Poésies, Namouna
● nu, nue (difficultés)
adjectif
(latin nudus)
Orthographe
Nu reste invariable devant les noms jambes, pieds et tête employés sans article ; il se joint à eux par un trait d'union pour former les expressions toutes faites nu-jambes, nu-pieds, nu-tête : se promener nu-jambes, marcher nu-pieds, sortir nu-tête. En revanche, on écrit : se promener les jambes nues, marcher les pieds nus, sortir la tête nue.
● nu, nue (expressions)
adjectif
(latin nudus)
À demi-nu, à moitié nu, presque sans vêtements, insuffisamment couvert.
Épée nue, hors du fourreau.
Grain nu, grain de céréale qui se sépare des glumelles lors du battage. (Lorsque les glumelles restent adhérentes, le grain est dit vêtu.)
Graine nue, graine des gymnospermes qui n'est pas entièrement incluse dans un fruit clos.
Nu comme un ver, entièrement nu.
Style nu, dépouillé, sans apprêts.
La vérité toute nue, pure et simple.
● nu, nue (homonymes)
adjectif
(latin nudus)
nu
nom masculin
nu
nom masculin invariable
nue
nom féminin
● nu, nue (synonymes)
adjectif
(latin nudus)
Qui est sans aucun vêtement
Synonymes :
- à poil (populaire)
- dénudé
- dévêtu
- en costume d'Adam(ou d'Eve)
Contraires :
- couvert
- habillé
- vêtu
Qui est dépourvu de poils, de cheveux
Synonymes :
- chauve
- glabre
- imberbe
Contraires :
- barbu
- chevelu
- poilu
- velu
Qui n'est pas enveloppé, revêtu d'un isolant
Contraires :
- garni
- isolé
- protégé
Qui est presque sans meubles, qui est sans ornements
Synonymes :
- austère
- monacal
- simple
- sobre
Contraires :
- décoré
- historié
- orné
- ornementé
Qui est dépourvu de végétation, dépouillé de feuilles
Synonymes :
- aride
- défeuillé
- pelé
- stérile
Contraires :
- feuillu
- herbu
- touffu
nu, nue
adj. et n. m.
rI./r adj.
d1./d Qui n'est couvert d'aucun vêtement. être tout nu. Avoir la tête nue. être nu-tête, nu-jambes, nu-pieds: avoir la tête, les jambes, les pieds nus.
d2./d Sans enveloppe, sans revêtement, sans ornement. épée nue. Chambre nue, dépourvue de meubles, d'ornements. Terrain nu, sans végétation ni construction. Arbre nu, dépouillé de son feuillage.
|| (Madag.) (En parlant d'un produit alimentaire.) Qui est vendu sans emballage. Yaourt nu. (V. logé.)
— Prix nu: prix du produit vendu sans emballage.
|| à l'oeil nu: sans instrument d'optique.
d3./d Fig. Simple, sans fioritures. Un style nu. Voilà la vérité toute nue, sans en rien cacher.
rII./r n. m.
d1./d Corps ou partie du corps dénudé(e); sa représentation dans l'art. Le nu et le drapé. Nu artistique.
d2./d CONSTR Nu du mur: surface unie de parement par rapport à laquelle on mesure les retraits et les saillies.
rIII/r Loc. adv. à nu: à découvert. Enlever l'écorce pour mettre le bois à nu.
|| Fig. Montrer, mettre son coeur à nu: ne rien cacher de ses états d'âme, de ses sentiments.
————————
nue
n. f. Litt. Nuages.
|| Loc. fig. Porter aux nues: louer exagérément.
— Tomber des nues: éprouver une grande surprise.
⇒NUE, subst. fém.
A. —Gén. au sing., vieilli, poét. ou littér.
1. Synon. de nuage.
a) Nuage, généralement élevé dans le ciel; ensemble des nuages. Nue sombre, petite, sereine; déchirer, traverser la (les) nue(s). Songes d'été, assoupis dès l'aube sur les nues diaphanes, désirs ailés, soupirs qui valent l'univers (QUINET, Ahasvérus, 1833, 3e journée, p.216). Là-bas, sous la nue qui traînait en franges, couleur de ces bourres au tronc de sapins, un pâle éclairage faisait les monts du Forez blancs comme après quelque neige (POURRAT, Gaspard, 1922, p.133):
• 1. Aussi, pendant les soirs d'hiver, la nuit venue,
Surtout quand du croissant une ouateuse nue
Emmaillotte la corne en un flot de vapeur,
Personne, —non pas même Eisenbach le ministre, —
N'ose passer devant ce repaire sinistre
Sans trembler et blêmir de peur.
GAUTIER, Albertus, 1833, p.127.
b) P. anal. [Gén. suivi d'un compl. de nom] V. nuage B 2. Une nue d'odeur, de senteur. La première voiture automobile n'est pas loin, roulant sur sa petite nue de poussière vers une plage (COLETTE, Naiss. jour, 1928, p.10). Sa compagne ravissante [du matou] étale (...) son ventre où point, dans une nue de poil bleuâtre, une seule tétine rose (COLETTE, Naiss. jour, 1928, p.22).
c) Au fig. V. nuage C 2. Tout à coup, entre le soleil et la vie, passe je ne sais quelle nue d'une froideur mortelle. L'angoisse générale naît (VALÉRY, Variété IV, 1938, p.69).
2. P. méton. Le ciel, l'atmosphère, nuageuse ou non. Fendre la (les) nue(s). Il lui venait maintenant [à Figure], à les voir [les étoiles] traverser la nue d'une soudaine lueur, un sentiment pénible (CARCO, Équipe, 1919, p.195):
• 2. Un soldat jeune, bouche ouverte, tête nue,
Et la nuque baignant dans le frais cresson bleu,
Dort; il est étendu dans l'herbe, sous la nue,
Pâle dans son lit vert où la lumière pleut.
RIMBAUD, Poés., 1871, p.76.
B. —Au plur., dans qq. loc. verb. fig.
1. Vieilli
a) Aller aux nues. Avoir droit aux honneurs les plus grands. Si tous les rôles étaient tenus comme celui de Florentin, la pièce irait aux nues (A. FRANCE, Hist. comique, 1903, 74).
b) Monter, sauter aux nues. Être dans une vive colère, dans un état excessif d'excitation ou d'indignation. (Dict. XIXe et XXes.).
2. Moderne
a) Être, se perdre dans les nues. Synon. être dans la lune, dans les nuages (v. nuage C 1). Votre grande âme est un peu trop dans les nues, vous oubliez le grand mot de notre siècle, l'argent (STENDHAL, Mém. touriste, t.2, 1838, p.226).
b) Tomber des nues
— [Le suj. désigne une pers.] Manifester une grande surprise à propos d'un événement inattendu. Je tombe des nues; je ne connais rien au caractère des hommes (STENDHAL, Chartreuse, 1938, p.131):
• 3. CATHERINE: Ah! son entreprise est très-bien déguisée... Autrement j'aurais déjà coupé court à ses petites manoeuvres. OCTAVIE: Je tombe des nues. CATHERINE: Tombez-en, mais à l'avenir ne lui prêtez plus la main...
AUGIER, Lions, 1870, VI, p.164.
— [Le suj. désigne un inanimé] Survenir à l'improviste, contre toute attente. Synon. tomber du ciel. Quoi! si demain vous étiez riche et heureuse, si une immense fortune vous tombait des nues, vous aimeriez encore le jeune homme pauvre qui vous aurait plu durant vos jours de détresse? (BALZAC, Goriot, 1835, p.177). Il s'étonnait de cette notoriété soudaine qui lui tombait des nues (ROLLAND, J.-Chr., Amies, 1910, p.1091).
c) Élever, porter aux nues; mettre qqn ou qqc. aux nues. Lui attribuer des mérites excessifs, le surestimer. Le public de province (...) adopte peu la passion du roi des Français, le juste-milieu: il vous met aux nues ou vous plonge dans la fange (BALZAC, Muse départ., 1844, p.94). Les jeunes grammairiens qui l'entourent portent aux nues sa simplicité savante, sa phrase aussi rouée qu'une ingénue de théâtre, les détours de sa dialectique, l'immensité de son savoir (BERNANOS, Soleil Satan, 1926, p.280).
— Emploi pronom. S'élever au sommet de la gloire. Un danseur qui, en Italie, s'était élevé jusqu'aux nues, vient débuter à Paris, (BERLIOZ, Grotesques, 1859, p.40).
Prononc. et Orth.:[ny]. Homon. nu. Att. ds Ac. dep.1694. Étymol. et Hist. 1. a) Début du XIIes. «nuage» (St Brendan, éd. I. Short et Br. Merrilees, 214); b) ) 1176-84 Dieu qui est desour la nue «Dieu est au-dessus de la nue» (GAUTIER D'ARRAS, Eracle, éd. G. Raynaud de Lage, 2070); ) ca 1220 sous la nüe «sous le ciel, en ce monde» (Amadas et Ydoine, 1742 ds T.-L.); 2. a) ) 1538 mettre quelqu'un jusques aux nues «louer avec excès» (EST. d'apr. FEW t.7, p.218b); 1759 mettre aux nues «id.» (VOLTAIRE, Lettre à Mme du Deffant, 5 janv. ds LITTRÉ); ) 1739 porter aux nues «id.» (MARIVAUX, Les Sincères, p.472); b) tomber des nues ) 1647 «arriver à l'improviste» (CORNEILLE, Heraclius, II, 1); ) 1666-67 «être extrêmement surpris» (LA FONTAINE, Contes, II, 8 ds OEuvres, éd. H. Régnier, t. 4, p.353). D'un lat. pop. nuba, altération du lat. class. nubes «nuage; essaim; multitude; obscurité, voile (fig.)» qui survit dans l'a. prov. niu «nuage» (1re moitié du XIIIe s. ds RAYN. t.4, p.307; ca 1300 ds LÉVY Prov.) et le port. nuvem «id.». Nue a été remplacé, dans l'usage commun, par nuage et ne subsiste que dans qq. loc. verb. Fréq. abs. littér.:731. Fréq. rel. littér.:XIXe s.: a) 897, b) 1182; XXe s.: a) 1293, b) 927. Bbg. QUEM. DDL t. 13, 20.
nue [ny] n. f.
ÉTYM. XIIe; du lat. pop. nuba, lat. class. nubes.
❖
♦ Vieux, littéraire (ou en locutions figées). → Nuage, nuée.
1 Vx ou littér. Nuage ou ensemble des nuages qui se trouvent dans le ciel. — REM. Ce qui distingue la nue du nuage et de la nuée, outre les critères d'usage, « c'est son élévation » (Lafaye). || Nues opaques (→ Bout, cit. 46). || Une blanche nue (→ Émeraude, cit. 4). || Le vent attire les nues (→ Cagoule, cit. 1). || La lividité (cit.) de la nue. || Foudre (1. Foudre cit. 6) qui crève (cit. 28), perce la nue, les nues.
1 Le soleil dissipe la nue.
La Fontaine, Fables, VI, 3.
2 (…) il (l'astre solitaire) reposait sur des groupes de nues qui ressemblaient à la cime de hautes montagnes couronnées de neige. Ces nues, ployant et déployant leurs voiles, se déroulaient en zones diaphanes de satin blanc, se dispersaient en légers flocons d'écume, ou formaient dans les cieux des bancs d'une ouate éblouissante (…)
Chateaubriand, le Génie du christianisme, I, V, XII.
3 (…) le succès allait, non aux frises, il n'y en avait pas, mais aux nues, il y en avait. (Même ces nues, vu l'absence de plafond, pleuvaient quelquefois sur le chef-d'œuvre d'Ursus).
Hugo, l'Homme qui rit, II, III, III.
4 (…) je vois que la nue offusque tout le couchant. Faite de grands cumulus amalgamés, elle présente cet aspect volumineux et chaotique qu'arrange parfois le soir, alors qu'un éclairage bas, comme un feu voilé de rampe, porte les ombres sur le champ nébuleux et accuse à rebours les reliefs.
Claudel, Connaissance de l'Est, p. 154.
♦ Par ext. Le ciel, l'espace nuageux ou non. || Aigle (cit. 2) qui fend les nues. || Les sept couleurs du prisme dans la nue (→ Écharpe, cit. 9; magicien, cit. 8).
5 Sa prière étant faite, il entend dans la nue
Une voix (…)
La Fontaine, Fables, VI, 18.
2 ☑ (XVIIe-XVIIIe). Dans des locutions. Porter, élever (cit. 30), mettre aux nues, jusqu'aux nues et (vx) par-dessus les nues, dans les nues : admirer, louer avec enthousiasme. ⇒ Louange (→ Apologiste, cit. 4). — ☑ Cette pièce a été, est allée aux nues (⇒ Ciel, fig.).
6 (…) il dit qu'hier (…) il s'était trouvé dans une compagnie de grande conséquence, où votre mérite, votre sagesse, votre beauté, avaient été élevés jusqu'au-dessus des nues (…)
Mme de Sévigné, 280, 27 mai 1672.
♦ ☑ (1664). Vx. Sauter, monter aux nues, bondir dans les nues : être dans un violent transport (de colère, etc.), une grande exaltation — ☑ Être dans les nues (cf. Au septième ciel).
7 Son âme était dans les nues, et cependant il ne pouvait sortir du silence le plus humiliant.
Stendhal, le Rouge et le Noir, I, VII.
8 Nous ne vous attendions point, je vous assure, et vous êtes tombés des nues pour nous (…)
J.-F. Regnard, le Retour imprévu, 11.
b Mod. || Avoir l'air de tomber des nues. || Tomber des nues : être extrêmement surpris, ébaubi (cit. 1), décontenancé par un événement inopiné, qu'on n'attendait pas. ⇒ Lune (tomber de la lune).
9 Je tombais des nues, j'étais ébahi, je ne savais que dire, je ne trouvais pas un mot.
Rousseau, les Confessions, IX.
♦ ☑ Se perdre dans les nues : devenir obscur, nébuleux, perdre de vue le sujet qu'on traite en s'élevant à des considérations abstraites.
10 Si vous dépassez d'une ligne les conceptions vulgaires, mille imbéciles s'écrient : « Vous vous perdez dans les nues ! »
Chateaubriand, Mémoires d'outre-tombe, t. V, p. 142.
❖
DÉR. Nuaison, nuage, nué, nuée, 1. nuer.
HOM. 1. Nu, 2. nu.
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1. nu, nue [ny] adj. et n. m.
ÉTYM. 1080, Chanson de Roland; du lat. nudus.
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I Adj. (En général placé après le nom, sauf dans nue propriété).
1 Qui n'est couvert d'aucun vêtement. || L'Homme nu (titre d'un volume des Mythologiques de C. Levi-Strauss). || Femme nue (→ Chair, cit. 19). || Adam (cit. 1, Bible) et sa femme étaient alors tous les deux nus. || Nu du haut (cit. 74, Molière) jusqu'en bas. || Un homme vraiment nu (→ Mariage, cit. 28, Molière). || Complètement nu, tout nu (→ Bois, cit. 42; fouler, cit. 2). ☑ Loc. Être nu comme la main, comme un petit saint Jean-Baptiste (→ ci-dessous, cit. 10, Balzac), nu comme un ver, nu comme en sortant du ventre de sa mère : entièrement nu (→ Être en tenue d'Adam, dans le costume d'Adam, dans le plus simple appareil, in naturalibus, dans l'état de nature; fam. à poil). || Aller tout nu (→ Enfant, cit. 25). || Doctrine qui conseille de vivre nu. ⇒ Nudisme. || Les adamiens vivaient nus. || Mettre qqn nu. ⇒ Dénuder, dépouiller, déshabiller. — Nu jusqu'à la ceinture (cit. 5). || Demi-nu (→ Fuselé, cit. 3). || À demi nu (→ Grelotter, cit. 4). || À moitié nu.
1 Alors Job se leva, déchira son manteau et se rasa la tête; puis, se jetant par terre, il se prosterna, et dit : Je suis sorti nu du sein de ma mère, et nu je retournerai dans le sein de la terre.
Bible (Segond), Job, I, 20.
1.1 (…) que Thérèse se mette à l'instant aussi nue que le jour qu'elle est venue au monde, et qu'elle se prête ainsi tour à tour aux différentes positions qu'il nous plaira d'exiger, pendant que la Dubois apaisera nos ardeurs, fera brûler l'encens sur les autels dont cette créature nous refuse l'entrée.
Sade, Justine…, t. I, p. 40.
2 Hassan était donc nu, — mais nu comme la main (…)
A. de Musset, Namouna, I, II (→ Académicien, cit. 3).
3 Nous savons bien qu'on ne se dévoile que pour quelque effet. Un grand saint le savait qui se dévêtit sur la place. Tout ce qui est contre l'usage est contre nature, implique l'effort, la conscience de l'effort, l'intention, et donc l'artifice. Une femme qui se met nue, c'est comme si elle entrait en scène.
Valéry, Variété II, p. 105.
♦ La vérité, Vénus sont représentées nues (sortant d'un puits, de l'onde).
REM. Tout nu, très courant, joue le rôle d'adjectif composé et souvent d'atténuatif.
♦ (En parlant d'une partie du corps). || Bras (cit. 1) nus (→ Amphore, cit. 2; buste, cit. 1). || Pied nu (→ Empire, cit. 17). || Sein, torse nu. || Épaule (cit. 9), jambe nue (→ Gracilité, cit. 3).
REM. Nu reste invariable s'il est suivi d'un nom sans article et relié par un trait d'union : nu-jambes, nu-pieds, nu-tête (→ Hommage, cit. 3; huron, cit. 1). || Un va-nu-pieds. ⇒ Va-nu-pieds. Il s'accorde quand il est placé après le nom. || Pieds nus, tête nue (→ Figure, cit. 10).
♦ ☑ Les mains nues : sans gants (cit. 2). || Lutter, boxer à main nue (→ aussi ci-dessous, 2.). Par anal. Dépourvu de cheveux, de poils. || Crâne nu (→ Barbe, cit. 11). || Visage nu. ⇒ Glabre.
4 (Il) s'achemina en habit de laine, nu-pieds par la boue et les cailloux.
Michelet, Hist. de France, IV, V.
5 Les communes, qui sont le peuple, mandées à la barre des lords, s'y présentent humblement, tête nue, devant les pairs couverts.
Hugo, l'Homme qui rit, I, III.
6 J'arrive, et je vous trouve en veste, comme un page,
Dehors, bras nus, nu-tête,
Hugo, la Légende des siècles, « Bivar », X.
7 Je croyais que les prophètes allaient nu-pieds.
M. Barrès, la Colline inspirée, IX.
♦ ☑ Loc. fam. Aller le cul nu, tout nu. → Le derrière au vent.
♦ Par exagér. Peu vêtu. || Femmes nues vêtues seulement d'un maillot (cit. 4) rose et d'une jupe de gaze. ☑ Loc. fam. Nu en chemise : ne portant qu'une chemise.
8 J'ai des souvenirs charmants d'après-midi (…) sous la petite avenue de peupliers, nu en caleçon, avec l'odeur des filets et du goudron (…) la vue des voiles (…) je ne sais quoi qui m'attendrit.
♦ Littér. || Nu ou tout nu. Qui est mal vêtu, en haillons. || Vêtir ceux qui sont nus. || Aller tout nu. || Soldats manquant (cit. 3) de tout, nus, sans souliers.
9 J'ai été nu, et vous m'avez revêtu; j'ai été malade, et vous m'avez visité; j'ai été en prison, et vous êtes venu me voir.
Bible (Sacy), Évangile selon saint Matthieu, XXV, 36.
♦ Par métaphore. Qui est sans fortune, sans argent, dénué de tout. || « Des commis (cit. 2)… qui jadis sont venus, nus, de leurs provinces ». — Par ext. Qui est sans protection, isolé, désarmé. || L'homme, abandonné nu et faible aux forces de la nature (→ Culturel, cit. 1).
10 S'ils gagnent cinquante mille francs et qu'ils en mangent soixante, en vingt ans on voit la fin de sa fortune, on se trouve nus comme de petits saint Jean (…)
Balzac, César Birotteau, Pl., t. V, p. 337.
2 Qui est dépourvu de son accompagnement, de son complément habituel. || Épée (cit. 8) nue. || Sabre nu (→ Heiduque, cit. 1), hors du fourreau. — Titre nu : charge achetée ou vendue sans la clientèle qui y est jointe.
11 Le poignard nu de Mayral réfléchissait toujours les rayons de la lune, qui, à ce moment, tombaient d'aplomb sur le lit.
Stendhal, Romans et nouvelles, « Le philtre ».
♦ Spécialt. Qui n'est pas aidé, armé d'un instrument, qui agit directement. ☑ À l'œil nu. ⇒ Œil.
3 (1607). Qui est dépourvu d'ornement, de parure. — Spécialt. Dépourvu de végétation. ⇒ Pelé. || Grève (→ Aigre, cit. 7), plaine (→ Âme, cit. 82), roche (→ Aveuglant, cit. 2), terre nue (→ 1. Limon, cit. 2). || Pays nu (⇒ Désert). || Aussi (cit. 31) loin que la vue allait, tout était nu. — Dépourvu de feuilles. || Les arbres sont nus en hiver (→ Bourgeon, cit. 2). — Dépourvu d'ornement, de saillie, d'accident; lisse (→ Long, cit. 10). || Le roc était par places brut et nu (→ Caverne, cit. 2). || Mur nu (→ Crucifix, cit. 3; 1. frise, cit. 1). || Bâtiments (→ Marquise, cit. 2), meubles (cit. 3) nus. — Qui est dépourvu, peu garni de meubles. || Pièce nue, sans meubles. || Ça fait un peu nu, sans l'armoire. || Une cellule de chartreux, pauvre et nue. ⇒ Austère.
12 Rien n'est si triste que l'aspect d'une campagne nue et pelée, qui n'étale aux yeux que des pierres, du limon et des sables.
Rousseau, Rêveries…, VIIe promenade.
13 Les terres végétales, que le gramen retenait sur les pentes, coulent en bas avec les eaux. Le rocher reste nu; gercé, exfolié par le chaud, par le froid, miné par la fonte des neiges, il est emporté par les avalanches.
Michelet, Hist. de France, III.
14 Que je m'ennuie entre ces murs tout nus
Et peints de couleurs pâles
Apollinaire, Alcools, p. 153.
♦ (Qualifiant l'expression, le style, etc.). Sans apprêt, sans déguisement, sans fard (→ Jeu, cit. 37). || Le style de Napoléon est simple et nu (→ Marquer, cit. 46). || L'expression nue de mes opinions (→ Enrichissement, cit. 2). || Le mot le plus nu mis en bonne (cit. 23) place. || « Une morale nue apporte de l'ennui » (→ Fable, cit. 12, La Fontaine). || C'est la vérité (toute) nue. ⇒ Pure.
4 Se dit des parties du corps d'un animal qui ne sont pas recouvertes de poils, de plumes ou d'écailles (→ Freux, cit. 1; marabout, cit. 6). — Mollusques nus, dépourvus de coquille.
♦ Bot. Dépourvu des appendices qui l'accompagnent normalement dans les autres végétaux. || Réceptacle nu. || Amande, graine, fleur nue.
5 (1765). Dr. civ. || Nue propriété (Littré, Planiol, etc.) ou nue-propriété (Académie, Capitant, Dalloz, etc.) : « Expression doctrinale moderne (inconnue du Code civil), par laquelle on désigne communément l'ensemble de ceux des attributs du droit de propriété qui appartiennent au propriétaire d'un bien sur lequel une autre personne jouit d'un droit d'usufruit, d'usage ou d'habitation, pendant le temps que persiste ce démembrement de la propriété » (Capitant). ⇒ Usufruit (→ Inaliénable, cit. 3). || Des nues-propriétés (Académie). — Nu propriétaire ou nu-propriétaire. || Une nue propriétaire ou une nue-propriétaire. || Des nus propriétaires ou des nus-propriétaires.
REM. Avec ou sans trait d'union, nu s'accorde avec le substantif. L'usage n'a pas suivi certains grammairiens qui voudraient faire nu invariable avec le trait d'union.
15 Mon père, par mon conseil, ne donnera que la nue propriété de cet héritage à ses petits-enfants, se dit-elle en traversant le pont, j'en aurai l'usufruit; je ne veux pas que ma fille et un gendre me chassent de chez eux : ils seront chez moi.
Balzac, le Député d'Arcis, Pl., t. VII, p. 695.
15.1 Vous avez revendu La Belle Angerie meublée, précisa le notaire. Le nu-propriétaire est désormais chez lui.
Hervé Bazin, Cri de la chouette, p. 287.
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II ☑ Loc. adv. À nu. a (1174). Vieilli. Sans être vêtu. || Combattre à nu (→ Jeu, cit. 27). — Se mettre à nu (→ Ceindre, cit. 2) : se mettre nu.
16 Il n'y a qu'un moment, la jeune Taïtienne s'abandonnait aux transports, aux embrassements du jeune Taïtien; attendait avec impatience que sa mère (autorisée par l'âge nubile) relevât son voile, et mit sa gorge à nu.
Diderot, Suppl. au voyage de Bougainville, II.
⇒ Dénuder, dévoiler. || Mettre à nu les plaies de la société (→ Dénier, cit. 6), son âme, son cœur. || Mon cœur mis à nu, titre d'un carnet intime de Baudelaire. || Mettre à nu un fil électrique, une surface métallique. — Montrer son cœur à nu. || Laisser voir qqch. à nu (→ Authentique, cit. 16). || Se montrer à nu (→ Fasciner, cit. 7).
17 Mon ami, car vous serez toujours mon ami, gardez-vous de recommencer de pareilles confidences qui mettent à nu votre désenchantement, qui découragent l'amour et forcent une femme à douter d'elle-même.
Balzac, le Lys dans la vallée, Pl., t. VIII, p. 1030.
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III (1669, Molière, la Gloire du Val-de-Grâce, d'abord t. d'arts). Nom masculin.
1 Corps humain ou partie du corps humain dépouillée de tout vêtement (→ Écorché, cit. 11). || Carnation d'un nu.
♦ Genre qui consiste à dessiner, à peindre, à sculpter le corps humain nu. — Dessin, peinture, sculpture qui représente le corps humain nu. ⇒ Académie, nudité. || Ce peintre excelle dans le nu. || Le nu peut être chaste (Académie). || De beaux nus. || Les nus de la Grèce (→ Gothique, cit. 14). || Le nu antique (→ Luxure, cit. 4). — « Partie des figures que les draperies recouvrent, mais sans empêcher de voir les formes » (Académie). || « … les belles draperies… Dont l'ornement aux yeux doit conserver le nu » (→ Caresser, cit. 12, Molière; harmonieux, cit. 10).
17.1 J'adoucis les expressions, vous le comprenez, Madame, j'affaiblirai de même les tableaux; hélas ! l'obscénité de leur teinte est telle que votre pudeur souffrirait de leur nu pour le moins autant que ma timidité.
Sade, Justine…, t. I, p. 40.
18 Ce que fut l'amour aux conteurs et aux poètes, le Nu le fut aux artistes de la forme; et, comme aux premiers, l'amour offrait une diversité infinie de manières d'exercer leurs talents, depuis la représentation la plus libre des êtres et des actes jusqu'à l'analyse la plus abstraite des sentiments et des pensées; ainsi, depuis le corps idéal jusqu'aux nudités les plus réelles, les peintres, dans le Nu, trouvèrent le prétexte par excellence.
Valéry, Degas, Danse, Dessin, p. 77.
2 Image d'une personne nue. || Album de nus photographiques. || Un nu d'un petit maître italien. || Nus pornographiques.
3 Le nu : la nudité. || « Le nu est chaste lorsqu'il est beau ».
B (1676). || Nu (d'un mur) : parement uni, sans creux ni saillie, d'un mur. || Les plâtriers dressent à la règle le plâtre frais des nus.
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COMP. et DÉR. (Du même rad.) Dénuder (et dér.). — Dénuer (et dér.). — Nudisme, nudiste, nudité, nûment ou nuement. — Nu-pied, va-nu-pieds.
HOM. 2. Nu, nue; formes du v. 1. nuer.
Encyclopédie Universelle. 2012.