horreur [ ɔrɶr ] n. f.
• 1160; lat. horror
I ♦ Sens subjectif
1 ♦ Impression violente causée par la vue ou la pensée d'une chose affreuse ou repoussante. ⇒ effroi, épouvante, peur, répulsion. Frémir d'horreur. Être frappé, saisi, glacé, muet, pâle d'horreur. Frisson, cri d'horreur. « Il tomba. Un hurlement d'horreur s'éleva de la foule » (Flaubert). — FAIRE HORREUR (À). ⇒ répugner; dégoûter, écœurer. Action, chose, idée, personne qui fait horreur (⇒ horrible ) . — Cette vue la remplissait d'horreur. Objet d'horreur.
♢ Littér. Sentiment de crainte, mêlée d'admiration, de respect devant l'inconnu ou le sublime. Horreur sacrée. « Sainte horreur » (Racine).
2 ♦ Sentiment violemment défavorable qu'une chose inspire. ⇒ abomination, aversion, dégoût, détestation, exécration, haine, répugnance. L'horreur d'agir. L'horreur du risque. L'horreur de l'eau, de la lumière... ⇒ phobie. — Avoir horreur de la guerre. ⇒ abhorrer, abominer, détester, exécrer, haïr. « l'homme a horreur de la solitude » (Balzac). Loc. prov. La nature a horreur du vide. — (Sens affaibli) Elle a horreur de ce prénom, elle ne l'aime pas, il lui déplaît. Il a horreur de se lever tôt. — Avoir, prendre (qqn ou qqch.) en horreur. ⇒ grippe, haine. — Vieilli Être en horreur (à). ⇒ odieux. Ces lépreux, « en horreur à tous les hommes » (Chateaubriand).
II ♦ Sens objectif
1 ♦ Caractère de ce qui inspire ou peut inspirer de l'effroi, de la répulsion (⇒ effroyable, horrible). C'est la misère dans toute son horreur. L'horreur d'un supplice. ⇒ cruauté. Vision d'horreur. Film d'horreur. ⇒ grand-guignolesque. « toute l'horreur d'un combat ténébreux » (Racine). « C'était pendant l'horreur d'une profonde nuit » (Racine). L'horreur d'un crime, d'un acte, d'une conduite. ⇒ abjection, atrocité, infamie, noirceur .
2 ♦ La chose qui inspire ou devrait inspirer un sentiment d'horreur. ⇒ crime, monstruosité. — Fam. Par exagér. Personne ou chose dont l'aspect (laid, sale, ou simplement désagréable) provoque la répulsion, le dégoût. Comment a-t-il pu épouser une telle horreur ? ⇒ laideron, mocheté. « elle rapportait de tout [...] des armures et des ombrelles, des horreurs dorées du Japon » (Céline). — Fam. Exclamation marquant le dégoût, la répulsion. Quelle horreur ! C'est l'horreur ! Absolt Horreur !
3 ♦ Au plur. Aspects horribles d'une chose; choses horribles. ⇒ atrocité. Les horreurs de la guerre.
♢ Objets horribles. C'est le musée des horreurs (par plais. un ensemble de choses affreuses).
♢ Sentiments criminels, actes infâmes, cruels, sanglants. « Toutes les horreurs que les romanciers croient inventer sont toujours au-dessous de la vérité » (Balzac).
4 ♦ Au plur. Imputations outrageantes. « Ils racontaient sur mon compte des horreurs à n'en plus finir » (Céline). — Propos obscènes. ⇒ cochonnerie, grossièreté, obscénité.
⊗ CONTR. Admiration, amour. — Beauté, 2. charme.
● horreur nom féminin (latin horror, -oris, de horrere, frissonner) Très vive impression, physique ou psychique, éprouvée par quelqu'un à la vue ou à l'idée d'une chose affreuse, repoussante : Un spectacle qui remplit d'horreur. Sentiment violent de dégoût, d'aversion, de forte réprobation : La violence ne m'inspire que de l'horreur. Littéraire. Caractère de ce qui provoque une impression d'effroi, de répulsion, ou de ce qui suscite l'indignation, une très forte réprobation : Une scène de carnage d'une horreur insoutenable. Chose qui inspire la répulsion ou le dégoût : Ce journal est une horreur. Familier. Personne ou objet d'une grande laideur : Il a épousé une véritable horreur. ● horreur (citations) nom féminin (latin horror, -oris, de horrere, frissonner) Charles Baudelaire Paris 1821-Paris 1867 Les charmes de l'horreur n'enivrent que les forts. Les Fleurs du Mal, Danse macabre Jacques Bénigne Bossuet Dijon 1627-Paris 1704 […] Il faut aller jusqu'à l'horreur quand on se connaît. Lettre au maréchal de Bellefonds Louis Ferdinand Destouches, dit Louis-Ferdinand Céline Courbevoie 1894-Meudon 1961 On est puceau de l'horreur comme on l'est de la volupté. Voyage au bout de la nuit Gallimard Donatien Alphonse François, comte de Sade, dit le marquis de Sade Paris 1740-Charenton 1814 Il n'y a pas d'horreur qui n'ait été divinisée, pas une vertu qui n'ait été flétrie. La Philosophie dans le boudoir William Shakespeare Stratford on Avon, Warwickshire, 1564-Stratford on Avon, Warwickshire, 1616 Je suis rassasié d'horreurs. I have supped full with horrors. Macbeth, V, 5, Macbeth William Shakespeare Stratford on Avon, Warwickshire, 1564-Stratford on Avon, Warwickshire, 1616 Horreur ! horreur ! horreur ! O horror ! horror ! horror ! Macbeth, II, 3, Macduff ● horreur (difficultés) nom féminin (latin horror, -oris, de horrere, frissonner) Construction On dit : avoir, éprouver de l'horreur pour qqn, pour qqch ; avoir qqn, qqch en horreur ; avoir horreur de qqn, de qqch. ● horreur (expressions) nom féminin (latin horror, -oris, de horrere, frissonner) Avoir horreur, avoir en horreur, détester, exécrer quelqu'un ou quelque chose, ne pas ou ne plus pouvoir les supporter : J'ai horreur qu'on me dérange. Faire horreur, inspirer de l'effroi, de la répugnance, de l'aversion. Film d'horreur, film destiné à faire naître chez le spectateur un effroi intense. Prendre en horreur, se mettre à détester quelqu'un ou quelque chose, à ne plus pouvoir les supporter. Quelle horreur !, Horreur !, exclamations marquant un sentiment très vif de répulsion, dégoût, réprobation, indignation, etc. ● horreur (synonymes) nom féminin (latin horror, -oris, de horrere, frissonner) Très vive impression, physique ou psychique, éprouvée par quelqu'un à...
Synonymes :
- épouvante
- frayeur
- panique
- peur
- terreur
Sentiment violent de dégoÛt, d'aversion, de forte réprobation
Synonymes :
- exécration
- haine
- répugnance
- répulsion
Littéraire. Caractère de ce qui provoque une impression d'effroi, de répulsion...
Synonymes :
- hideur
Chose qui inspire la répulsion ou le dégoÛt
Synonymes :
- atrocité
- infamie
- monstruosité
Familier. Personne ou objet d'une grande laideur
Synonymes :
- laideron
- monstre
horreur
n. f.
d1./d Réaction d'effroi, de répulsion provoquée par qqch d'affreux. être saisi d'horreur. Des atrocités qui font horreur.
|| Par exag. Sentiment d'aversion, de répugnance. Avoir horreur de perdre. Avoir horreur du lait.
d2./d Caractère de ce qui inspire une telle réaction. Envisager la situation dans toute son horreur.
d3./d (Souvent Plur.) Ce qui inspire l'épouvante, le dégoût. Les horreurs de la guerre.
— Dire, écrire des horreurs, des choses infâmes, obscènes.
|| Par exag. Fam. Personne, chose très laide. C'est une horreur!
⇒HORREUR, subst. fém.
I. — [Impression ressentie par une pers.]
A. — 1. Violent saisissement d'effroi accompagné d'un recul physique ou mental, devant une chose hideuse, affreuse. Synon. effroi (v. ce mot A), épouvante (v. ce mot A), panique, peur, terreur. Mes os craquent d'horreur, toute ma chair frissonne comme un tremble au grand vent (GAUTIER, Comédie mort, 1838, p. 16). La pensée du grand trou noir le mouillait d'une sueur froide et dressait ses cheveux d'horreur (ZOLA, Joie de vivre, 1884, p. 1056) :
• 1. Plus près de nous, plus familier, le mot même de terreur est bien loin de livrer tout son contenu. Horreur dit tout, et ne dit rien; mais ici la physiologie est assez éloquente; je sens en moi une défense comme du hérisson...
ALAIN, Propos, 1930, p. 962.
SYNT. Horreur indicible, inexprimable, instinctive, insurmontable, grandissante, infinie, panique, muette; angoissante, secrète, silencieuse, soudaine, véritable, vive horreur; accent, cris, exclamations, frisson, geste, mouvements, regards, signes, souffle, spasme d'horreur; degré, espèce, sorte d'horreur; image, impression, sentiment, scène, spectacle, vision d'horreur; horreur et angoisse, crainte, désolation, épouvante, malédiction, stupéfaction, stupeur, surprise, terreur; être abruti, béant, fixe, fou, frappé, ivre, muet, (r)empli, plein, blême, pâle, glacé, cloué, paralysé, pétrifié, saisi, stupéfait d'horreur; être étreint, gagné, pénétré par l'horreur; crier, se récrier, se dresser, s'écarter, reculer, frémir, frissonner, hurler, tomber, trembler, tressaillir, défaillir, s'évanouir d'horreur; causer, inspirer, éprouver de l'horreur; considérer, imaginer, regarder, voir qqc. avec horreur.
— Loc., vieilli. Faire horreur à qqn (infra B). Produire chez quelqu'un un saisissement d'effroi, de répulsion. Synon. horrifier (v. ce mot A). Actes, personnes, spectacles qui font horreur. Isaac bas avec dégoût : Cet homme fait horreur! (LAMART., T. Louverture, 1850, III, 4, p. 1328). P. métaph. ou au fig. Tes pas lourds font horreur aux grands bois chevelus, Et, lasse de te voir, la terre ne veut plus Cacher au fond du lac pâle ou de la caverne Ta moisson de corps morts (BANVILLE, Exilés, 1874, p. 31).
Emploi pronom. À chaque fois que l'humanité acquiert une plus haute révélation d'elle-même, elle se fait horreur (PROUDHON, Confess. révol., 1849, p. 193).
— Loc., vx et littér. Devenir, être en horreur à qqn (infra B). Inspirer de la répulsion mêlée d'effroi à quelqu'un. Aussitôt (...) je devins en horreur à toute la population. Le curé prêcha contre moi (BALZAC, Méd. camp., 1833, p. 25).
2. Littér. [Avec un adj. caractérisant; correspond à horrible A 1 littér.] Profond saisissement de crainte mêlée d'admiration respectueuse devant le sublime, le mystérieux. Une divine, pieuse, religieuse, secrète horreur. Le vaste océan (...) formait un ensemble qui saisissait d'une sainte horreur (LAS CASES, Mémor. Ste-Hélène, t. 2, 1823, p. 525). Il en revenait toujours à une certaine horreur de Jean Valjean. Horreur sacrée peut-être, car (...) il sentait un quid divinum dans cet homme (HUGO, Misér., t. 2, 1862, p. 680).
B. — 1. Violent sentiment d'aversion morale, de dégoût. Synon. exécration, répulsion. J'appris qu'un Sarrazin pouvoit être regardé sans horreur (COTTIN, Mathilde, t. 1, 1805, p. 331). Le désespoir, la politique et la rage durent le peindre dans tous les pays, comme un objet d'horreur et d'effroi (LAS CASES, Mémor. Ste-Hélène, t. 1, 1823, p. 115).
SYNT. Horreur et cruauté, dédain, dégoût, honte, indignation, mépris, pitié; semer l'horreur; expressions, murmures d'horreur; fuir, repousser qqn ou qqc. avec horreur; se détourner, s'écarter avec horreur de qqn ou de qqc.
— Expr. verb. Avoir, concevoir, professer de l'horreur pour qqn (ou qqc.). Synon. abhorrer, exécrer. Je consens (...) du fond de mon cœur (...) que vous n'ayez que de la haine, du mépris, de l'horreur pour la malheureuse Clémentine (CHATEAUBR., Génie, t. 1, 1803, p. 383). Mon horreur physique pour cette sorte de papiers (...). Leur aspect seul me déséquilibre, me désespère (BLOY, Journal, 1903, p. 191). Avoir (l')horreur de qqc. ou de qqn, avoir qqc. ou qqn en horreur. Éprouver un sentiment de forte aversion devant quelque chose ou quelqu'un. Il [Dieu] hait souverainement le désordre; il l'a en horreur, comme l'homme a horreur de sa destruction (LAMENNAIS, Indifférence, t. 1, 1817-23, p. 380). J'ai toujours eu horreur de toi, toujours peur de toi (DRIEU LA ROCH., Rêv. bourg., 1939, p. 288). Prendre en horreur qqn ou qqc. Synon. prendre en aversion. Eugénie revint pour cet enterrement et prit en horreur l'Indienne qui était la cause de cette mort (BARRÈS, Cahiers, t. 3, 1903, p. 75). Faire horreur à (qqn) (supra A 1). Provoquer chez quelqu'un une nette aversion. Combien je me déteste, combien je me fais horreur et dégoût dans mon passé (GONCOURT, Mme Gervaisais, 1869, p. 277). Je n'aime pas mon mari. Je pense même qu'il me fait horreur (DUHAMEL, Cécile, 1938, p. 241).
2. P. ext. et p. hyperb. Synon. antipathie (vx), répugnance. L' horreur allait jusqu'à me faire faire des grimaces et me donner en spectacle (STENDHAL, Souv. égotisme, 1832, p. 66). Le peintre ici (...) professe une horreur profonde pour tout accent banal et lourd (LHOTE, Peint. d'abord, 1942, p. 159).
— Expr. verb. Avoir horreur de qqc., avoir en horreur qqc.; avoir en horreur le tabac; avoir horreur de devoir se lever tôt. Synon. détester (v. ce mot B), exécrer (v. ce mot B). De tous les genres celui que j'ai le plus en horreur est le genre grisette (FLAUB., Corresp., 1839, p. 43). Je crois qu'ils ont horreur des campements, redoutant les poux qui s'y trouvent (GIDE, Retour Tchad, 1928, p. 913). Nous avons vécu très intelligemment tous les deux, Éliane, avec la même horreur du drame. Ce n'est pas qu'il nous faisait peur, mais il nous paraissait de mauvais goût (ANOUILH, Répét., 1950, V, p. 115). Prendre en horreur qqn ou qqc. Synon. Prendre en grippe. Elle prit en horreur toute activité (GONCOURT, Ch. Demailly, 1860, p. 313). Vieilli. Être en horreur à qqn (ou qqc.). Être odieux, détestable pour (quelqu'un ou quelque chose). Elle étudiera votre caractère (...); et cette étude, en horreur à l'amour, se découvrira par les mille petits pièges (BALZAC, Physiol. mar., 1826, p. 107). La doctrine du perfectionnement par la souffrance était une cruauté barbare, en horreur au beau ciel de l'Italie (A. FRANCE, Lys rouge, 1894, p. 133). Faire horreur à qqn (supra A 1 et B 1). Synon. dégoûter, écœurer, répugner; anton. enchanter, plaire (à). La différence entre ce que portaient les trois quarts des femmes et qui lui faisait horreur et une jolie chose qui le ravissait (PROUST, J. filles en fleurs, 1918, p. 900).
Rem. À l'horreur, loc. adv., région. (Suisse). Horriblement mal. Cette nouvelle robe lui va à l'horreur (PIERREH. 1926).
3. En partic. Horreur de + subst. (indiquant l'objet de ce sentiment d'aversion)
a) PHYS., vx. (La nature a) horreur du vide. Antipathie (v. ce mot I) autrefois prêtée à la nature et grâce à laquelle s'expliquaient tous les problèmes relatifs à la pesanteur de l'air (d'apr. Ac. Compl. 1842, BESCH. 1845). [P. allus. à cette théorie] La conscience a horreur du vide (VALÉRY, Tel quel II, 1943, p. 224).
b) Dans le domaine de la médecine. Synon. phobie. L'horreur de l'eau, des espaces clos, vides, de la foule, de la lumière. Malgré l'horreur qu'elle avait pour l'humidité du soir (STENDHAL, Lamiel, 1842, p. 92).
II. — [Caractère de ce qui est susceptible d'inspirer cette impression, de ce qui est horrible (v. ce mot A)]
A. — L'horreur de + subst. (désignant une chose ou l'acte d'une pers.)
1. Caractère de ce qui cause un profond saisissement d'effroi mêlé de recul.
a) [Supra I A 1] Synon. atrocité, cruauté; anton. attrait, charme. L'horreur d'un cachot, d'une prison; l'horreur d'un supplice, des combats. Les rayons qu'il lance (...) pour nous accoutumer à son absence et nous épargner l'horreur d'une nuit subite (DUPUIS, Orig. cultes, 1796, p. 99). Arrivé à Jérusalem, j'y ai trouvé la peste dans toute son horreur (LAMART., Corresp., 1832, p. 318).
b) Littér. [Avec un adj. caractérisant; supra I A 2] Caractère de ce qui provoque un saisissement de crainte mêlée d'admiration respectueuse. Les Germains adoroient la secrète horreur des forêts (CHATEAUBR., Ét. disc. hist., t. 3, 1831, p. 139). Leur ombre nous couvrit de cette sainte horreur D'un temple où du Très-haut habite la terreur (LAMART., Chute, 1838, p. 813). L'Hydre antique au souffle meurtrier Dans la livide horreur des brumes et des fanges (LECONTE DE LISLE, Poèmes ant., 1874, p. 244).
2. Caractère de ce qui suscite l'aversion morale, de ce qui est infâme ou horrible (v. ce mot A 2). Synon. abjection, infamie, noirceur. L'horreur de son acte, de sa conduite, de son crime. Il est sans cesse bourreau et assassin. Là est l'horreur de son métier (VIGNY, Journal poète, 1851, p. 1287) :
• 2. Se représente-t-on l'horreur de ces deux ou trois cents voitures hideuses lancées comme des boulets et triturant (...) les mêmes lambeaux sanglants! Il y a des consolations. Une de ces voitures a pris feu et le chauffeur a été heureusement carbonisé.
BLOY, Journal, 1903, p. 172.
— P. ext. et p. hyperb., fam. (supra I B 2). Elle eût conservé dans son cœur la sainte horreur du despotisme! (STAËL, Consid. Révol. fr., t. 2, 1817, p. 182). Elle était mariée, bien entendu, car j'ai une sainte horreur des filles (MAUPASS., Contes et nouv., t. 2, Misti, 1884, p. 908).
B. — P. méton., au sing. ou au plur.
1. La personne ou la chose même qui inspire un sentiment d'horreur, de répulsion, d'indignation. Synon. monstruosité. Nulle réponse de cette Chambre des Horreurs (VERLAINE, Corresp., t. 3, 1887, p. 196). Gilberte n'a jamais aimé son mari. C'est une petite horreur. Elle a aimé la situation, le nom (PROUST, Temps retr., 1922, p. 1027).
— Emploi avec valeur d'adj., fam. Horreur de + subst. Les femmes seulement me regardent comme « une horreur d'homme » (FLAUB., Corresp., 1856, p. 135) :
• 3. L'abbé Guibourg officiait, consacrait l'hostie, (...) la mêlait à ce sang obscurci de cendre; c'était là la matière du Sacrement.
— Quelle horreur de prêtre! s'écria la femme de Carhaix, indignée.
HUYSMANS, Là-bas, t. 1, 1891, p. 100.
— Horreur! horreur vivante! [Expressions traduisant l'effroi mêlé de dégoût, de répulsion scandalisés] C'est une horreur!... — C'est une infamie!... Et une foule d'autres exclamations partirent (...) de tous côtés (BALZAC, Annette, t. 1, 1824, p. 171). C'est ta mort! horreur! malédiction! sauve-toi! (HUGO, N.-D. Paris, 1832, p. 543). Horreur! plus, plus qu'horreur! spectacle détestable, lamentable, effroyable, pitoyable! (CLAUDEL, Tête d'Or, 1890, 3e part., p. 146).
2. Fam. et souvent p. hyperb. [Correspond à horrible B 1] Être animé ou chose dont l'aspect (généralement laid ou sale) provoque la répulsion, le dégoût. Synon. laideron, mocheté (pop.), monstre. Cette personne est une véritable horreur. Pour la viande, poisson salé et autres horreurs dont il nous empoisonnait régulièrement (LAS CASES, Mémor. Ste-Hélène, t. 2, 1823, p. 522). Le chien continuait de gronder. — Il est affreux, ma chère. Où as-tu pêché cette horreur? (ZOLA, Joie de vivre, 1884, p. 1049) :
• 4. Elle rapportait de tout (...) des cabochons, des ciboires, des empaillés, des armures et des ombrelles, des horreurs dorées du Japon (...) et des fourbis qui n'ont plus de noms...
CÉLINE, Mort à crédit, 1936, p. 60.
— Musée des horreurs
♦ Fam. Collection, amas d'objets affreux. Nous retrouvons Troost et son talent minutieux mais gâté, dans une salle latérale qui pourrait s'appeler musée des horreurs (VERLAINE, Œuvres compl., t. 5, Quinze jours en Holl., 1893, p. 269).
♦ Arg. Figures antipathiques (d'apr. CAR. Argot 1977).
C. — Au plur.
1. Les horreurs de + subst. Les aspects horribles (v. ce mot A 1), effrayants, horrifiants, tragiques présentés ou représentés par quelque chose. Synon. affres (v. ce mot B), atrocités (v. ce mot B), épouvantes (v. ce mot B 2). Les horreurs de la guerre, de l'enfer, de la maladie, de la mort. Mathilde demeure indifférente aux charmes de cette nature, comme elle l'a été aux horreurs de celle du désert (COTTIN, Mathilde, t. 1, 1805, p. 311). Neiges et pluies changées en ruisseaux, horreurs de l'hiver devenues les grâces du printemps (HUGO, Rhin, 1842, p. 186) :
• 5. Mais les vieux, qui se rappelaient les horreurs de l'invasion, le bétail enlevé et les fermes pillées, le pullulement des Saxons et des Bavarois, secouaient tristement la tête et souhaitaient tout haut qu'on ne revît jamais de pareilles horreurs.
MOSELLY, Terres lorr., 1907, p. 137.
2. Actes infâmes, criminels propres à provoquer la répulsion. Synon. abominations (v. ce mot II). Commettre, faire des horreurs. Vous osez vous enrichir du fruit de ces horreurs... Vous n'avez aucune honte (CHÉNIER, Amérique, 1794, p. 100). Je n'ai pas été un grand guerrier, n'ai eu part à aucun exploit et n'ai pas même été témoin de rares horreurs (GUÉHENNO, Journal homme 40 ans, 1934, p. 159) :
• 6. ... de son passé de forfaits et d'horreurs, Londres a gardé une ambiance qui donne le frisson; est-ce cette nuit soudaine et opaque du brouillard qui appelle le meurtre en promettant l'impunité, ou ces légendes de malfaiteurs insaisissables...
MORAND, Londres, 1933, p. 94.
3. Propos déshonorants, outrageants répandus sur le compte de quelqu'un. Synon. calomnies, infamies, médisances. Colporter, débiter, dire, raconter, répandre des horreurs contre/sur qqn. Les bêtises qu'entend dire un tableau de musée, mais les horreurs qu'entend peut-être un cadavre (RENARD, Journal, 1902, p. 748). J'ai raconté du mal de vous, des horreurs. Vous devriez me battre (BERNANOS, Journal curé camp., 1936, p. 1200) :
• 7. — Un ramas de faussetés, de commérages, tous les mensonges que nos ennemis ont lancés autrefois contre nous, enragés par notre triomphe!... (...) Sur nous tous, (...) tant d'horreurs!
ZOLA, Dr Pascal, 1893, p. 21.
4. Propos ou actes libertins, indécents. Synon. cochonneries (pop.), grossièretés, obscénités. Dire, faire des horreurs; ouvrage plein d'horreurs. On s'était fichu d'elle pendant le souper, on avait dit des horreurs pour montrer qu'on la méprisait. Un tas de salopes qui ne lui allaient pas à la cheville! (ZOLA, Nana, 1880, p. 1187). Leurs cérémonies se continuaient par des débordements, des horreurs, des lubricités, qui ne vaudraient rien à être retracés (POURRAT, Gaspard, 1922, p. 77).
Prononc. et Orth. : []. [] affectif. Att. ds Ac. dep. 1694. Étymol. et Hist. 1. Ca 1175 « sentiment d'effroi, de répulsion, de crainte » (BENOÎT DE STE-MAURE, Ducs Normandie, éd. C. Fahlin, 14558); 2. 1547 « frisson » (M. SCÈVE, Saulsaye, p. 4 ds HUG.); 3. 1565 « ce qui inspire l'effroi, la crainte » ici masc. (R. BELLEAU, La Bergerie, le journ., I, 188, ibid.). Empr. au lat. horror « hérissement, frissonnement; frisson d'effroi; frisson religieux ». Fréq. abs. littér. : 6 518. Fréq. rel. littér. : XIXe s. : a) 9 284, b) 8 391; XXe s. : a) 9 951, b) 9 316. Bbg. QUEM. DDL t. 19.
horreur [ɔʀœʀ] n. f.
ÉTYM. V. 1175, au sens I, 2; lat. horror, horroris « frisson d'effroi, hérissement »; puis « horreur sacrée », de horrere « se hérisser; trembler ».
REM. L'usage abusif et hyperbolique du mot horreur dans toutes ses acceptions, a été répandu du XVIIe s. au début du XIXe s., particulièrement dans la langue du théâtre.
1 Le carnage et l'horreur, termes vagues et usés qu'il faut éviter. Aujourd'hui tous nos mauvais versificateurs emploient le carnage et l'horreur à la fin d'un vers (…) pour rimer.
Voltaire, Remarques sur Sertorius, V, 6.
2 Depuis mon retour à Paris, en 1801 (…) j'avais été choquée du ton de la conversation : rien n'y était naturel, et l'exagération avait mis à la mode les expressions les plus outrées. On éprouvait l'horreur ou l'enthousiasme pour les choses les plus futiles et les plus simples (…)
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I Sens subjectif.
2 Impression violente causée par la vue ou la pensée d'une chose affreuse (souvent accompagnée par un frémissement, un frisson, un mouvement de recul). ⇒ Effroi (cit. 4), épouvante (cit. 4), peur, répulsion. || L'horreur fait dresser les cheveux (cit. 30) sur la tête, glace le sang dans les veines. || Cheveux hérissés (cit. 5) d'horreur. || Pupilles dilatées (cit. 7) par l'horreur. || Horreur qui saisit qqn à la vue d'un spectacle affreux, répugnant. ⇒ Saisissement.
♦ Rester immobile, plein d'horreur, fasciné devant un hideux reptile (→ Hanter, cit. 11). || Frémir (cit. 14) d'horreur (→ Aspect, cit. 6). || Être béant (→ Grand, cit. 29), frappé, glacé (cit. 29), muet, pâle d'horreur. || Cri d'horreur (→ Frisson, cit. 12). || Avec horreur (→ Entrailles, cit. 2), avec une secrète horreur (→ Désert, cit. 11). || Sans horreur (→ Enfer, cit. 10).
3 Vous eussiez vu leurs yeux s'enflammer de fureur,
Et dans un même instant, par un effet contraire,
Leur front pâlir d'horreur et rougir de colère.
Corneille, Cinna, I, 3.
4 J'entends même les cris des barbares soldats,
Et d'horreur j'en frissonne.
Racine, Athalie, IV, 6.
5 Ceux qui vantent encore 1793 et qui en admirent les crimes ne comprendront-ils jamais combien l'horreur dont on est saisi pour ces crimes est un obstacle à l'établissement de la liberté ?
Chateaubriand, Mémoires d'outre-tombe, t. IV, p. 135.
6 Il tomba sur le dos, les bras en croix. Un hurlement d'horreur s'éleva de la foule.
Flaubert, l'Éducation sentimentale, III, V.
7 Et elle se faisait caressante, l'attirant, levant ses lèvres pour qu'il les baisât. Mais, tombé près d'elle, il la repoussa, dans un mouvement d'horreur.
Zola, la Bête humaine, I.
♦ ☑ Faire horreur (à…). ⇒ Répugner; dégoûter, écœurer. || La viande saignante lui fait horreur. || Ton geste me fait horreur (→ Désavouer, cit. 7). || Action, chose, idée, personne qui fait horreur (⇒ Horrible).
8 (…) car la vue même des drogues faisait horreur à mon père.
Montaigne, Essais, II, XXXVII.
9 (…) il (Saint-Aubin mort) n'était point du tout changé, il ne me fit nulle horreur (…)
Mme de Sévigné, Lettres, 1090, 19 nov. 1688.
10 (…) votre conduite avec nous fait horreur ou pitié.
Beaumarchais, le Mariage de Figaro, Préface.
11 Tout ce qui est bas et plat dans le genre bourgeois me rappelle Grenoble, tout ce qui me rappelle Gr(enoble) me fait horreur, non, horreur est trop noble, mal au cœur.
Stendhal, Vie de Henry Brulard, 9.
12 (…) je distinguais les œufs gluants de grenouilles qui me faisaient horreur : horreur est le mot propre, je frissonne en y pensant.
Stendhal, Vie de Henry Brulard, 12.
13 Ah ! pour nous, malheureuses vieilles femelles, l'âge est passé de plaire, même aux innocents; et nous faisons horreur aux petits enfants que nous voulons aimer !
Baudelaire, le Spleen de Paris, II.
14 Dans les yeux de l'enfant elle avait lu la vérité que son miroir ne savait plus lui dire : elle faisait horreur; elle demandait à une petite fille de l'embrasser et cette petite fille devenait pâle et reculait devant elle.
J. Green, Léviathan, II, VII.
♦ Donner de l'horreur (→ Guerre, cit. 3). || Crime, meurtre qui inspire de l'horreur (→ Culpabilité, cit. 3; forteresse, cit. 2). || Produire, causer une horreur profonde (→ Émouvoir, cit. 14; hideux, cit. 1). || Cette vue la remplissait d'horreur. || Objet d'horreur (→ Blême, cit. 1).
15 Malgré la juste horreur que son crime me donne (…)
Racine, Andromaque, IV, 3.
16 Quelle horreur jetez-vous dans mon cœur étonné !
Voltaire, Marianne, I, 4.
17 Un acteur prête d'autant plus de force à un personnage tragique qu'il se garde de l'exagérer. S'il est mesuré, l'horreur qu'il suscite sera démesurée.
Camus, le Mythe de Sisyphe, p. 177.
♦ Littér. (Qualifié par un adj.). À l'exclusion de toute idée de dégoût. Sentiment de crainte, mêlée d'admiration, de respect devant la grandeur de Dieu, les mystères de la nature ou de la religion, l'inconnu ou le sublime. ⇒ Terreur. || Horreur sacrée. || Frémir d'une sainte horreur (→ Enthousiasme, cit. 5).
18 Le ciel brille d'éclairs, s'entrouvre, et parmi nous
Jette une sainte horreur qui nous rassure tous.
Racine, Iphigénie, V, 6.
3 (V. 1225). Sentiment violemment défavorable qu'une chose inspire. ⇒ Abomination, aversion, dégoût, détestation, exécration, haine (cit. 34), répugnance. || L'horreur de (suivi du nom de la chose qui inspire ce sentiment). || L'horreur de l'anormal (cit. 3), du banal (cit. 4), du vague (→ Contenu, cit. 1), de la brusquerie (→ Arrondir, cit. 5), de la promiscuité (→ Authentique, cit. 18). || L'horreur d'agir (→ Cérébral, cit. 2). || L'horreur du risque (→ Hasard, cit. 23). || Inspirer au peuple l'horreur du crime (→ Effigie, cit. 6). || Faire horreur à qqn de qqch. (→ Existence, cit. 16). — L'horreur de l'eau, de la lumière… ⇒ -phobie (hydrophobie, etc.).
19 La secrète horreur, l'horreur occidentale du reptile ressuscite en moi, si je me penche longtemps sur elles (les couleuvres)…
Colette, la Paix chez les bêtes, p. 161.
20 Et l'instinct de conservation, l'horreur du risque, l'emportent sur l'amour.
A. Maurois, Études littéraires, Mauriac, II.
♦ L'horreur de qqn pour qqch. || L'horreur de l'homme pour la réalité. → Échappatoire, cit. 4. — Avoir, concevoir de l'horreur pour qqn, pour qqch. || Avoir l'horreur de… ⇒ Abhorrer, abominer, détester, exécrer, haïr. || Les pacifistes ont l'horreur de la guerre (cit. 7). || Avoir une horreur, une sainte horreur de… — Plus cour. (sans déterminant). || Avoir horreur de… || Avoir horreur du péché (→ Chair, cit. 63). — (Sens affaibli). || J'ai horreur de ce temps (→ Bruine, cit. 1). || Elle a horreur de ce prénom. ⇒ Déplaire (cit. 5). || Avoir horreur des principes (→ Éclairer, cit. 28), des servitudes (→ Élévation, cit. 6). || Il a horreur des chipotages (cit.), de la pose (→ 1. Faire, cit. 79). || Mon estomac a horreur du graillon (cit. 3). || J'ai horreur de ça. — Avoir horreur de se lever tôt, de changer ses habitudes. — ☑ Loc. prov. (Phys. anc.). La nature a horreur du vide.
21 J'ai une horreur trop invincible pour ces sortes d'abaissements (…)
Molière, la Princesse d'Élide, II, 1.
22 (…) l'homme a horreur de la solitude. Et de toutes les solitudes, la solitude morale est celle qui l'épouvante le plus.
Balzac, Illusions perdues, Pl., t. IV, p. 1032.
23 Il avait horreur de la vie. Il ne sortait de chez lui qu'à l'heure où la vie cessait, et rentrait quand le petit jour attirait vers la ville les pêcheurs et les maraîchers.
Pierre Louÿs, Aphrodite, I, III.
24 Elle eut horreur de cette malade qui n'avait rien de mieux à faire que d'épier les autres; et elle eut horreur d'elle-même, de cette passion qui la dévorait et qu'elle cachait comme une maladie.
J. Green, Adrienne Mesurat, I, VIII.
25 (Le chien Macaire) avait horreur d'être promené au bout d'une laisse par un domestique (…)
J. Romains, les Hommes de bonne volonté, t. IV, VIII, p. 84.
♦ ☑ En horreur. || Avoir (qqn ou qqch.) en horreur (→ Écraser, cit. 10). || Prendre (qqn ou qqch.) en horreur. ⇒ Grippe, haine (→ Crime, cit. 4; hideur, cit. 2).
26 (…) ils ont en horreur les lumières (…)
Baudelaire, Amœnitates Belgicæ, VI.
27 (…) ta marquise est une femme à la mode, et j'ai précisément ces sortes de femmes en horreur.
Balzac, l'Interdiction, Pl., t. III, p. 14.
♦ Vx. || Être en horreur à qqn. ⇒ Odieux (→ Agréer, cit. 7). || Les pensées mauvaises sont en horreur à Dieu (→ Bienveillant, cit. 1).
28 David m'est en horreur (…)
Racine, Athalie, II, 7.
29 (…) ces lépreux qui, renoncés de leurs proches, languissaient aux carrefours des cités, en horreur à tous les hommes.
Chateaubriand, le Génie du christianisme, IV, VI, II.
♦ Vx. || Être l'horreur de qqn, un objet d'horreur. → La bête noire. Ellipt. || L'horreur de toute la terre (→ Front, cit. 23).
30 (…) une si grande déférence pour des gens qui devraient être l'horreur de tout le monde (…)
Molière, Tartuffe, IIe placet.
———
II Sens objectif. — REM. Comme le sens subjectif archaïque (« horripilation »), le sens objectif (« chose hérissée ») du mot latin a été repris, puis employé, dans un usage très littéraire.
30.1 Horreur était entré dans l'ensemble des termes qui symbolisent le sentiment de crainte, de peur, quand on le rechargea de la valeur qu'« horror » avait en latin, soit celle d'un « hérissement » physique. Cela se passait au XVIIe siècle. Mais « horreur », en ce sens, a survécu. Verlaine en témoigne :
Quelques buissons d'épines épars, et quelques houx
Dressant l'horreur de leur feuillage à droite, à gauche (…)
(Poèmes saturniens, IV, Effet de nuit)
texte dont l'intelligence précise n'est accessible qu'à des lettrés.
R.-L. Wagner, les Vocabulaires français, p. 35.
1 (V. 1170). Caractère de ce qui inspire ou peut inspirer de l'effroi, de la répulsion (⇒ Effroyable, horrible). || L'horreur d'une prison, d'un cachot, d'un égout (cit. 2). || L'horreur d'un accident (cit. 12). || C'est la misère dans toute son horreur. || L'horreur d'un supplice. ⇒ Cruauté. || Vision d'horreur. || L'horreur de la guerre (cit. 41), des ténèbres (→ Épouvante, cit. 6). || L'horreur dans l'art (→ Expressionnisme, cit. 2). || Degrés, nuances de l'horreur (→ Échelonner, cit. 3). || Atteindre les sommets de l'horreur. || Horreur dantesque (cit. 3). — ☑ Dans toute son horreur : avec tous ses aspects horribles et (par exagér.) désagréables (cit. 31).
31 L'hiver est ici (aux Rochers) dans toute son horreur : je suis dans les jardins, ou au coin de mon feu.
Mme de Sévigné, Lettres, 221, 22 nov. 1671.
32 (…) toute l'horreur d'un combat ténébreux (…)
Racine, Mithridate, II, 3.
33 C'était pendant l'horreur d'une profonde nuit.
Racine, Athalie, II, 5.
34 J'ai peur du sommeil comme on a peur d'un grand trou,
Tout plein de vague horreur (…)
Baudelaire, Nouvelles Fleurs du mal, VIII.
35 Elle murmura : C'était pendant l'horreur d'une profonde nuit. Jamais elle n'avait réfléchi au sens de ces mots et, maintenant que sa mémoire les lui restituait après des années d'oubli, ils lui semblèrent empreints d'une beauté forte et terrible, et elle eut peur. Il y a en effet quelque chose de calme, et de rassurant dans les premières heures d'obscurité, mais à mesure que la nuit avance et que tous les bruits de la terre se taisent, l'ombre et le silence prennent vite un caractère différent. Une espèce d'immobilité surnaturelle pèse sur tout et il n'est pas de mot plus éloquent que celui d'horreur pour décrire les moments qui précèdent la venue de l'aube.
J. Green, Adrienne Mesurat, I, IV.
36 (…) nos montagnes sont charmantes dans leur excès d'horreur; je souhaite tous les jours un peintre pour bien représenter l'étendue de toutes ces épouvantables beautés (…)
Mme de Sévigné, Lettres, 1403, 3 févr. 1695.
♦ Spécialt. Caractère de ce qui inspire un sentiment de crainte religieuse (→ ci-dessus, I., 2., spécialt). || La forêt (cit. 4) et son horreur sacrée, sa religieuse horreur (→ Gothique, cit. 8).
36.1 (…) eussé-je été avec mon père, je ne me serais pas crue plus en sûreté. Les ombres de la nuit commençaient à répandre dans la forêt, cette sorte d'horreur religieuse qui fait naître à-la-fois la crainte dans les âmes timides, le projet du crime dans les cœurs féroces.
Sade, Justine…, t. I, p. 62-63.
37 Le voilà donc connu ce secret plein d'horreur !
Voltaire, Zaïre, IV, 5.
38 (…) il n'y a que le délire de la passion qui puisse me voiler l'horreur de ma situation présente (…)
Rousseau, Julie ou la Nouvelle Héloïse, I, Lettre XXXV.
39 L'horreur de la loi fait la majesté du juge.
Hugo, l'Homme qui rit, II, IV, VIII.
♦ (Au sens moral d'une action). ⇒ Abjection, atrocité, infamie, noirceur. || L'horreur d'un crime. || L'horreur de sa conduite dépasse l'imagination.
40 (…) je lui ai fait voir (à Monsieur de Marseille) l'horreur de son procédé pour moi (…)
Mme de Sévigné, Lettres, 313, 1673.
41 Pour diminuer l'horreur de l'athéisme on charge trop l'idolâtrie.
Montesquieu, l'Esprit des lois, XXIV, II.
2 (XVIIIe; d'une personne, 1587). || Une, des horreurs. La chose qui inspire ou devrait inspirer un sentiment d'horreur. ⇒ Crime, monstruosité. || Ce qu'il a fait est une horreur. || Quelle horreur d'avoir emprisonné (cit. 1) cet homme !
42 La lettre de M. de Grignan m'a fait frémir, moi, ma chère enfant, qui ne puis pas souffrir la vue ni l'imagination d'un précipice; quelle horreur de passer par-dessus, et d'être toujours à deux doigts de la mort affreuse !
Mme de Sévigné, Lettres, 1147, 9 mars 1689.
43 Quelle horreur qu'un jugement secret, une condamnation sans motifs !
Voltaire, Lettre à d'Argental, 2149, 5 juil. 1762.
44 Il se trame ici quelque horreur.
Beaumarchais, la Mère coupable, I, 2.
♦ Fam. (par exagér.). Chose, personne repoussante par sa laideur, sa saleté, ou, simplement très désagréable, très gênante. || Jolie, elle ? Une horreur ! ⇒ Laid. || Mais c'est une véritable horreur, ce tableau ! || Une horreur de vieux matou pelé. || Quelle horreur que ces gosses braillards ! — Appellatif plais. || Petite horreur !
45 Couvant des yeux l'enfant que Dieu fait rayonner,
Cherchant le plus doux nom qu'elle puisse donner
À sa joie, à son ange en fleur, à sa chimère :
— Te voilà réveillée, horreur ! lui dit sa mère.
Hugo, l'Art d'être grand-père, II.
46 Je suis abominablement gêné. Pas un livre, pas un cabaret à portée de moi, pas un incident dans la rue. Quelle horreur que cette campagne française.
Rimbaud, Correspondance, À E. Delahaye, XXI, 1873.
♦ Fam. Exclamation marquant le dégoût, la répulsion. || Fi, l'horreur ! (vx). || Quelle horreur ! — Absolt. || Horreur !
47 Et il ébaucha un geste qui scandalisa toutes ces dames. Fi ! l'horreur !
Zola, Une page d'amour, I, II.
48 — (…) La vieille Lili vient de s'abattre de tout son poids sur le cadet Ceste, qui a dix-sept ans et des sentiments pieux… — La vieille Lili ? quelle horreur ! (…) j'ai mal au cœur !
Colette, Chéri, p. 61.
♦ ☑ Fam. C'est l'horreur : c'est très désagréable. → C'est l'angoisse, c'est la merde. — Exclam. || Ah, là, là ! l'horreur !
3 (Déb. XVIIe, les horreurs de la mort, d'Aubigné). Au plur. Aspects horribles d'une chose; choses horribles. || Être en proie aux horreurs de la misère (Académie). || Les horreurs de l'enfer. ⇒ Affres (cit. 1). || Les horreurs de la guerre. ⇒ Atrocité (→ Élévation, cit. 5). || « Les horreurs de la guerre », suite de gravures de Goya.
49 Moi, nourri dans la guerre aux horreurs du carnage (…)
Racine, Athalie, II, 5.
49.1 Alors Omphale me demanda s'il n'était pas vrai que de tous, Clément fût celui dont j'eusse le plus à me plaindre. — Hélas ! répondis-je, au milieu d'une foule d'horreurs et de saletés qui tantôt dégoûtent et tantôt révoltent, il est bien difficile que je prononce sur le plus odieux de ces scélérats (…)
Sade, Justine…, t. I, p. 203.
♦ Absolt (choses concrètes). Objets horribles. ☑ C'est le musée des horreurs, un ensemble de choses affreuses.
50 (…) la chiourme, le carcan, la veste rouge, la chaîne au pied (…) le cachot, le lit de camp, toutes ces horreurs connues !
Hugo, les Misérables, I, VII, III.
51 (…) il y a longtemps que nos codes militaires, avec leur appareil de mort, ne se devraient plus voir que dans les musées des horreurs, près des clefs de la Bastille et des tenailles de l'Inquisition.
France, le Mannequin d'osier, Œ., t. XI, p. 364.
♦ (1665). Sentiments criminels, actes infâmes, cruels, sanglants. ⇒ Atrocité. || Commettre des horreurs. || La vie de ce tyran n'est qu'un tissu d'horreurs (Académie). || Spectacles d'horreurs et de crimes (→ Bilieux, cit. 2; courber, cit. 31). || « Toutes les horreurs dont une âme est capable » (cit. 2). || Les horreurs dont les hommes se sont rendus coupables dans la dernière guerre (→ Excitation, cit. 11).
52 Tu vas ouïr le comble des horreurs.
Racine, Phèdre, I, 3.
53 Je ne puis vous dire tout ce que j'ai vu, car j'ai vu des crimes contre lesquels la justice est impuissante. Enfin, toutes les horreurs que les romanciers croient inventer sont toujours au-dessous de la vérité.
Balzac, le Colonel Chabert, Pl., t. II, p. 1147.
54 (…) les horreurs de 93 étaient stigmatisées en termes brûlants (…)
Zola, la Terre, I, V.
♦ (Contexte érotique). Acte que la morale réprouve (perversion, etc.).
4 (XVIIe). Spécialt. Au plur. Imputations outrageantes sur le compte de qqn. || Débiter des horreurs sur qqn. || Écrire un tissu d'horreurs sur le compte de qqn (→ Mégère, cit. 2). || Faire croire des horreurs (→ Calomnie, cit. 5).
55 Vous n'imaginez pas quel tissu d'horreurs l'infernale mégère lui a écrit sur mon compte.
Laclos, les Liaisons dangereuses, Lettre XLIV.
56 Ils racontaient sur mon compte des horreurs à n'en plus finir et des mensonges à s'en faire sauter l'imagination.
Céline, Voyage au bout de la nuit, p. 304.
♦ (1866). Propos obscènes. ⇒ Grossièreté, obscénité (→ ci-dessus, infra cit. 54). || Dire, chanter, écrire des horreurs.
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Encyclopédie Universelle. 2012.