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en-

en- Élément, du lat. in- et im-, de in « dans », servant, avec le radical substantif qu'il précède, à la formation de verbes composés (var. em- devant b, m, p) : emboîter, emmancher, emprisonner, enterrer.

en- ou em-
(devant p, b, m). élément, du lat. in- et im-, de in, "dans", servant à la formation de verbes dérivés, avec le radical substantif qu'il précède (ex. enterrer, emprisonner, encadrer).

I.
⇒EN-1, EM-1, préf.
En compos. avec un subst., un adj. qualificatif ou un verbe pour former des parasynthétiques essentiellement verbaux, en- issu du préf. lat. in- dont les sens sont les mêmes que ceux de la prép. de même forme, évoque l'entrée dans les limites d'un espace déterminé, l'acquisition d'un état, d'une qualité nouvelle ou la création d'un nouvel espace.
A.— [La base est un subst.]
1. Le préf. évoque l'entrée dans un espace déterminé.
a) [Le composé est un verbe, le plus fréq. en -er, ou son part. passé employé comme adj. ]Cf. embarquer, embouteiller, emprisonner, engouffrer, etc. :
embucquer, verbe trans. « Mettre en bec ». Je ne vous donne pas mon argent pour embucquer de sucre ce jeune drôle (BALZAC, E. Grandet, 1834, p. 109)
enclocher, verbe trans. « Mettre sous cloche ». Le médecin qui préside a une fille asthmatique, très jolie vraiment, mais on ne nous encloche pas ensemble (MÉRIMÉE, Lettres Panizzi, 1870, p. 373)
encorseter, verbe trans. « Enfermer comme dans un corset ». Le philosophe du high-life (...) était encorseté dans un habit très serré sur les hanches (MAUPASS., Notre cœur, 1890, p. 311)
enforester (s'), verbe pronom. « Entrer en forêt ». Un jour ayant quitté son frère d'armes Tinténiac s'enforesta (CHATEAUBR., Mém., t. 1, 1848, p. 113)
enfourgonner (s'), verbe pronom. « Entrer dans un fourgon ». La harde fourbue et aveugle qui allait s'enfourgonner [à la gare saint-Lazare] (ARNOUX, Paris, 1939, p. 151)
enredingoter, verbe trans. « Mettre dans une redingote ». L'Homme se hâta, long, timide enredingoté jusqu'aux genoux (MAUPASS., Contes et nouv., t. 1, Bête à Maît'Belh., 1885, p. 195)
ensépulturer, verbe trans. « Mettre en sépulture ». Les filles de roi se faisaient ensépulturer dans des coffres faits à mon image (FLAUB. Tentation, 1849, p. 456)
entaverner (s'), verbe pronom. « S'enfermer dans des tavernes ». Vive la joie! je m'entavernerai, je me battrai (HUGO, N.-D. Paris, 1832, p. 317)
envestonner, verbe trans. « Revêtir d'un veston ». Les gargotiers, qui avaient envestonné de toile, pour impressionner les passants, jusqu'à leurs laveurs de vaisselle (MAUPASS., Mt-Oriol, 1887, p. 31)
enwagonner (s'), verbe pronom. « Entrer dans un wagon ». Coïncidence, c'est à pareille date que l'an dernier, je m'enwagonnais pour la Hollande (VERLAINE, Corresp., t. 3, 1869-96, p. 293)
Le verbe ou son part. passé employé comme adj. exprime la création d'un nouvel espace et le fait d'y pénétrer. Cf. emballer, empaqueter, encadrer, enchâsser... :
embalustrer, verbe trans. « Entourer de balustres ». Sur les longues pelouses embalustrées de marbre blanc, décorées de vases et de statues (A. DAUDET, Pte paroisse, 1895, p. 296)
embarricader, verbe trans. « Mettre sous, derrière une barricade ». Tout entouré et tout embarricadé de papiers (GONCOURT, Journal, 1871, p. 796)
embordurer, verbe trans. « Entourer d'une bordure ». Dans les ouvrages en petit, qu'on veut embordurer (PERNÉTY, Dict. portatif de peint., sculpt. et grav., 1757, p. XXXV)
Rem. Dans qq. verbes, en- exprime l'idée d'une superposition. La superposition est l'un des sens du préf. lat. in- : enchevaler « monter à cheval »; endosser « mettre sur le dos ».
b) [Le composé est un subst.]
Un subst. masc. en -age, en -ement pour exprimer
♦ une action ou le résultat de cette action. Cf. emballage, embouteillage, encaissement, encellulement...
♦ le résultat d'une action (le verbe correspondant n'est pas attesté). Cf. empelotonnage, embranchement, emplacement... :
emplombage. Ces cathodes [de plomb] que l'on fond, d'où emplombage (GUILLET, Métall. gén., 1923, p. 419)
encuivrage. Des traces d'encuivrage (ALVIN, Artill., Matér., 1908, p. 196)
Un subst. fém. en -ure pour exprimer le résultat d'une action ou un ensemble de caractères définis. Cf. enflure, enfonçure...
♦ Le verbe correspondant n'est pas attesté. Cf. embrasure, emplanture, empointure, encablure, encolure, empaumure...
c) [Le composé est un adj. (ou un part. passé employé comme adj.) : ]couvert de, enveloppé de (le verbe correspondant n'est pas attesté) :
embarbé. « Pourvu d'une barbe ». Comme je ne suis pas ton bichon embarbé (MALLARMÉ, Poésies, 1898, p. 30)
emmoustaché. « Doté d'une moustache ». Il était tout emmoustaché d'herbes sales (GIONO, Regain, 1930, p. 229)
empomponné. « Orné de pompons ». Des mulets empomponnés de laine rouge et bleue (GENEVOIX, Routes avent., 1958, p. 130)
encailloté. « Souillé par du sang caillé ». Je ne suis plus inquiet pour ma mémoire enfumée, encaillotée de sang (VALLÈS, J. Vingtras, Insurgé, 1885, p. 375)
encaoutchouté. « Couvert de caoutchouc ». Jamais je n'avais caressé l'Albertine encaoutchoutée des jours de pluie (PROUST, Fugit., 1922, p. 117)
encuirassé. « Couvert d'une cuirasse ». Deux jeunes Bretonnes de dix-huit ans, fraîches et gentilles, encuirassées dans leur étroit gilet de drap (MAUPASS., Contes et nouv., t. 2, Fils, 1882, p. 320).
enfeuillé. « Couvert de feuilles » [Promenades équestres] dans le grand silence enfeuillé de Fausses-Reposes et de Vélizy (D'ESPARBÈS, Demi-soldes, 1899, p. 293)
enramé. « Orné de ramées ». La tête enramée — avec du laurier (A. DAUDET, Port Tarascon, 1890, p. 256)
2. Le préf. traduit l'entrée dans un état, l'acquisition d'une forme ou d'une qualité nouvelle.
a) Le composé exprime l'acquisition d'un aspect, d'une forme nouvelle.
Le composé est un verbe ou un part. passé employé comme adj. :
embaluchonner, verbe trans. « Faire un baluchon ». À nous trois, nous embaluchonnons la jeune fille dans mon manteau (SUE, Myst. Paris, t. 3, 1842, p. 26)
embouler (s'), verbe pronom. « Prendre la forme d'une boule ». Une patte aux petits doigts emboulés se crispe dans la terre (GIONO, Colline, 1929, p. 51)
embuissonner, verbe trans. « Couvrir de buissons ». La vigne monte à cette palissade et l'embuissonne (GONCOURT, Journal, 1854, p. 145)
emmascarader, verbe trans. « Déguiser comme pour une mascarade ». Il passa ainsi emmascaradé devant toute la paroisse (POURRAT, Gaspard, 1925, p. 230)
emmigrainer, verbe trans. « Donner la migraine ». Je suis encore non pas précisément malade, mais las et emmigrainé (MÉRIMÉE, Lettres Mme de La Rochejacquelein, 1870, p. 154)
empeinturlurer, verbe trans. « Barbouiller de peinture ». Est-ce que je finirai par m'empeinturlurer l'esprit? (RENARD, Journal, 1889, p. 37)
empeloter (s'), verbe pronom. « Prendre la forme d'une pelote ». C'est un beau fil de laine qui s'empelote autour du fuseau (PÉGUY, Porche Myst., 1911, p. 242)
encorbeller, verbe trans. « Donner la forme d'un encorbellement ». L'étambot, curieusement encorbellé, nous dominait en plein (CENDRARS, Bourlinguer, 1948, p. 231)
enfaîter, verbe trans. « Donner la forme d'un faîte ». Je vous apporte une assiette enfaîtée (GUÈVREMONT, Survenant, 1945, p. 122)
enliasser, verbe trans. « Mettre en liasses » (cf. J. HUMBERT, Nouv. gloss. genev., 1852, p. 180)
ensaliver, verbe trans. « Enduire de salive ». Elle bloque complètement la cellule, mastiquant et ensalivant la glaise qu'elle apporte (GIDE, Retour Tchad, 1928, p. 954)
enverminer (s'), verbe pronom. « S'infester de vermine ». On a laissé se galvauder, s'enverminer ce gentil peuple (GENEVOIX, Routes avent., 1958 p. 157)
[Le composé est un subst.]
embuissonnement, subst. masc. « Fait de prendre la forme d'un buisson; amas de buissons ». La légèreté, la souplesse, l'embuissonnement de l'arbuste (GONCOURT, Journal, 1887, p. 722)
encorbeillement, subst. masc. « Objet ayant la forme d'une corbeille ». Il tient bras dessus bras dessous [le danseur] une forte paysanne à profil de Cérès coiffée à la sauvage d'un encorbeillement de fleurettes et de feuilles (LORRAIN, Sens et souv., 1895, p. 297)
enfaîtage, subst. masc. « Action d'enfaîter (cf. supra); ce qui en résulte ». C'était [une étable] un haut vaisseau de maison avec un enfaîtage de poutres en bréchet d'oiseau (GIONO, Chant monde, 1934, p. 275)
enrouillement, subst. masc. « Fait de rouiller, la rouille ». L'enrouillement et la corrosion de l'acier et des fontes (J. phys. et Radium, 1927, p. 478)
b) Au fig. Le composé exprime l'acquisition d'une qualité, d'un état :
empistoliser, verbe trans. « Pourvoir de pistoles ». En attendant que de nouvelles démarches eussent bien à l'effet d'encore m'empistoliser, pour oser ce néologisme (VERLAINE, Œuvres compl., t. 4, Mes pris., 1893, p. 395)
endollarder, verbe trans. « Pourvoir de dollars ». Toujours à plat ventre devant les locataires endollardés (MALRAUX, Espoir, 1937, p. 479)
enfieller, verbe trans. « Couvrir de fiel ». L'atmosphère enfiellée par tant d'haleines haineuses (VOGÜÉ, Morts, 1899, p. 211)
En part. [En parlant de pers. dans des verbes qui sont, pour la plupart, des créations, voire des fantaisies d'aut.] Cf. enamourer, enjalouser... :
emmarmotter (s'), verbe pronom. « Sommeiller, hiberner ». La ville emmarmottée dormait sous ce brouillard de septembre (POURRAT, Gaspard, 1931, p. 248)
empianoter, verbe trans. « Imposer à quelqu'un la pratique du piano ». Au lieu de les encapuchonner, on les empianote (MÉRIMÉE, Portr. hist. et littér., 1870, p. 143)
encapricer (s'), verbe pronom. S'encapricer de qqn de qqc. « S'enticher de quelqu'un de quelque chose ». La personne dont je m'encaprice sera, oui ou non, de celles qui nous font conjuguer le verbe « j'ai aimé » avec les variantes :« J'ai reçu un coup de pistolet... » (BOURGET, Physiol. am. mod., 1890, p. 297)
encauchemarder, verbe trans. « Rendre pareil à un cauchemar ». Et pendant ce temps notre vie avec notre maîtresse continue, notre vie distraite (...) encauchemardée par des êtres qui sont sans rapports réels avec nous, pleine d'oublis, de lacunes, d'anxiétés vaines, notre vie pareille à un songe (PROUST, Prisonn., 1922, p. 147)
endéificoquer, verbe trans., péj. « Rendre passionné de tout ce qui concerne Dieu ». Dans la tête de tous vos Jacobins qui veulent nous envertueuser et nous endéificoquer (FRANCE, Dieux ont soif, 1912, p. 130)
engrandeuiller (s'), verbe pronom. « Se mettre en grand deuil ». Et l'automne s'engrandeuille au bois de Boulogne (LAFORGUE, Complaintes, 1885, p. 182)
enreligioser (s'), verbe pronom. « S'enticher de religion ». Depuis que tu t'es enreligiosé (BALZAC, Annette, t. 3, 1824, p. 98).
envertuoser (s'), verbe pronom. « Avoir le culte de la vertu » (cf. FRANCE, loc. cit.)
[Le subst. de base désigne un groupe d'animés, une classe soc., une race, et forme avec le préf. un verbe signifiant que l'on adopte l'aspect ou le mode de vie, de pensée de ce groupe, de cette classe] Cf. s'embourgeoiser.
Familier :
embellemerder, verbe trans. « (Se) pourvoir d'une belle-mère emmerdante ». Moi! les embellemerder, jamais! (ESTAUNIÉ, Bonne Dame, 1891, p. 49). Embellemerder (s') [populaire] v. pr. Avoir une belle-mère (DELESALLE, Dict. arg.-fr. et fr.-arg., 1896, p. 101)
embestialiser, verbe trans. « Rendre pareil à des animaux ». La chaleur (...) ce lourd siroco (...) embrasent le sang, affolent la chair, embestialisent (MAUPASS., Contes et nouv., t. 1, Marroca, 1882, p. 786)
embocher, verbe trans. « Rendre allemand (boche) ». Les Hambourgeois ne sont pas des Prussiens., ils ne sont pas embochés pour un sou (CENDRARS, Bourlinguer, 1948, p. 281)
embrigander, verbe trans. « Rendre brigand ». Pitié de moi! Me voilà embrigandé! (CAMUS, Dév. croix, 1953, 3e journée, p. 576)
emmuscadiner (s'), verbe pronom. « Se parer, se pommader... comme un Muscadin» (LITTRÉ)
empaganiser (s'), verbe pronom. « Donner le caractère païen » (LITTRÉ)
empopulacer (s'), verbe pronom. « Prendre les mœurs de la populace ». Et le fait est parfois que je m'empopulace D'une étrange façon (POMMIER, Crâneries, 1842, p. 50)
encrapuler (s'), verbe pronom. « Devenir crapule ». Les jeunes de maintenant, tous des fainéants! disait la mère Dumoussot (...) ils font du trafic, ils s'encrapulent (FALLET, Banl. sud-est, 1947, p. 213)
enducailler (s'), verbe pronom. « S'encanailler (au contact des ducs) ». Il disait qu'il allait s'enducailler, comme d'autres auraient dit s'encanailler (SAINTE-BEUVE, Nouv. lundis, t. 7, 1863-69, p. 371)
engauloiser (s'), verbe trans. « Teinter de gauloiserie ». Il sied que la Postérité sache de quelle interprétation géniale l'auteur de Mauprat avait engauloisé la principale partie de la susdite proposition (VERLAINE, Œuvres compl., t. 5, Vingt-sept biogr. (A. Silvestre), 1896, p. 317)
[Le subst. en compos. désigne un nom propre (de pers., de lieu)] Le verbe composé exprime l'entrée dans une manière, l'adoption d'une manière d'être ou d'agir conforme à cette personne, à ce lieu ou à ce qu'ils représentent.
Fam., noms de pers.
embaragliouler (s'), verbe pronom. « Prendre la forme de pensée du comte J. de Baraglioul ». Votre pedigree, depuis lors, me paraît s'être un peu bien embaraglioulé! (GIDE, Caves, 1914, p. 859)
embondieuser, verbe trans. « Engluer de bondieuseries ». Ah, diable! il va chercher à m'embondieuser (L. DAUDET, Bacchantes, 1931, p. 165)
empriaper, verbe trans. « Exciter, aguicher ». Les yeux empriapés par une petite fille de douze ans (GONCOURT, Journal, 1856, p. 291)
encambronner, verbe trans. « Ennuyer beaucoup » (cf. FUSTIER, Suppl. dict. Delvau, 1889, p. 532)
enquinauder, verbe trans. « Rendre quinaud, enjôler » (LITTRÉ).
Noms de lieux :
emparadiser, verbe trans. « Donner des joies comparables à celles du paradis ». Elle faisait les honneurs de façon à vous emparadiser dans chacune de ses questions (MALLARMÉ, Corresp., 1862, p. 59)
encamarguer, verbe trans. « Donner la tournure, les mœurs des Camarguais.» Le receveur de l'enregistrement encamargué (ARNOUX, Rhône, 1944, p. 365)
enversailler, verbe trans. « Rendre semblable à la noblesse, à la grandeur du palais de Versailles ». Une de ces grandeurs mortes, tristes à faire pleurer, et qui vous enversaillent l'âme (GONCOURT, Journal, 1865, p. 208)
B.— La base est un adj. qualificatif : le verbe ou le part. passé en emploi adj. composé avec -en exprime l'acquisition d'une qualité, d'une vertu. Faire devenir + adj. Cf. embellir, embrunir, endurcir, enrichir... :
emmaigrir, verbe trans. « Rendre maigre, devenir maigre » (LITTRÉ)
empafer, verbe trans., fam. « Enivrer, rendre paf ». Et d'abord, glapissait le renaudeur, faudrait pas essayer de m'empafer (ARNOUX, Paris, 1939, p. 176)
enaigrir, verbe trans. « Rendre plus aigre, plus cuisant » (LITTRÉ).
encalminer, verbe trans. « Jouir d'un calme plat ». C'est à bord d'un voilier encalminé (VAILLAND, Drôle de jeu, 1945, p. 156)
encuistrer (s'), verbe pronom. « Devenir cuistre ». Pendant cinquante ans, nos compatriotes, Sorbonne en tête, s'encuistrèrent de la plus déplaisante — et plaisante façon (L. DAUDET, Stup. XIXe s., 1922, p. 205)
enforcir, verbe trans. « Rendre fort ». L'air trop rarement renouvelé, chargé d'azote et de vapeurs méphitiques, ne nous laisse ni croître ni enforcir (KARR, Sous tilleuls, 1832, p. 75)
enjalouser, verbe trans. « Rendre jaloux » (LITTRÉ)
enlourdir (s'), verbe trans. « Rendre lourd, alourdir ». Un homme que l'âge « enlourdissait », visiblement (A. DAUDET, Tartarin Alpes, 1885, p. 33)
enniaiser, verbe trans. « Rendre niais ». Le marié avait un air moitié amoureux, moitié victime, qui rapetisse et enniaise la chose (BARB. D'AUREV., Memor. 2, 1838, p. 252)
enrougir, verbe trans. « Faire devenir rouge, rougir ». Une mine tout enrougie d'aise (SAND, Maîtres sonneurs, 1853, p. 316)
C.— [Le mot de base est un verbe.]
1. Le verbe composé ou le part. passé en emploi adj. exprime le commencement d'une action :
endormir, verbe trans. « Faire dormir quelqu'un »
endormir (s'), verbe pronom. « Commencer à dormir »
Rem. Dans ce cas, c'est toujours l'idée « d'entrer dans quelque chose » qui apparaît, mais au figuré.
2. Le verbe composé est le doublet d'un verbe simple; employé souvent au fig., sa valeur est perfective cf. embrouiller, empresser, endurcir, enlacer :
encharger, verbe trans. « Charger ». C'étaient des bêtes que ma mère avait élevées, et qu'elle m'avait bien enchargée de soigner pour le mieux (SAND, Jeanne, 1844, p. 139)
emmourir (s'), verbe pronom. « Mourir ». Laissez-la doncque s'emmourir tout à sa guise, not' bounn' vielle (MARTIN DU G., Gonfle, 1928, II, 5, p. 1205)
empartir (s'), verbe pronom. « Partir ». Avant que de m'empartir (DRUON, Louve Fr., 1959, p. 332)
enrosser, verbe trans. « Accabler en dupant ». Je t'ai rapporté plus que les chevaux dont tu enrosses les amis (GYP, M. Fred, 1891, p. 191)
Rem. Ces doublets sont aussi, dans une lang. poét., les vestiges de formes verbales dans lesquelles les part. passés étaient préfixés par -en. Enfondu. Mais non moins enfondue aux dons du Saint-Esprit (PÉGUY, Ève, 1913, p. 942). Encommencé. Laisser à tout jamais la tâche encommencée (ID., J. d'Arc, 1913, p. 678). Enrougi (cf. SAND, Maîtres sonneurs, 1853, p. 316). Le préf. en- serait donc ici l'indice d'un état atteint ou de l'acquisition complète d'une qualité.
D.— P. plaisant.
1. [La base est un syntagme nom. ou prép. auquel on adjoint un suff. verbal :]
enbondieuser, verbe trans. (Cf. supra)
enbonnetdecotonner, verbe trans. (Cf. DELVAU, Dict. de la lang. verte, 1889, p. 128)
encalifourchonner, verbe trans. « Monter à califourchon ». J'encalifourchonnai un âne pacifique (DU CAMP, Nil, 1854, p. 289)
encolimaçonner, verbe pronom. « S'enrouler comme un escalier en colimaçon ». Rembrandt est le philosophe à barbe blanche qui s'encolimaçonne en son réduit (BERTRAND, Gaspard, 1841, p. 63)
2. [La base est une formation expressive (souvent pop.) ou une onomatopée. ]Cf. s'emberlificoter :
emberlinguer, verbe trans. « Cf. embringuer ». Je n'ai qu'un regret, je me trouve emberlingué de trop de philosophie (GONCOURT, Journal, 1893, p. 439)
embistrouiller, verbe trans. « Ennuyer ». Ils étaient si entassés (...) embistrouillés dans les chaises, raccrochés sur les monticules (...) qu'on pouvait plus rien entrer prendre (CÉLINE, Mort à crédit, 1936, p. 531)
emburlucoquer, verbe trans. « Enfermer, prendre ». Ej' vas lui emburlucoquer el' musiau dans c'te toile à sac (MARTIN DU G., Gonfle, 1928 III, 1, p. 1221)
encharibotter, verbe trans. « Émouvoir ». Monsieur, vous avez l'air tout encharibotté! (HUGO, Roi s'amuse, 1832, p. 361)
enquiquiner, verbe trans. « Ennuyer ». Les ministres, je m'en sers quand j'en ai besoin. Et puis, je les enquiquine (DUHAMEL, Passion J. Pasquier, 1945, p. 93)
Rem. Concurrence avec d'autres affixes. 1. Concurrence a-/ en-. La comparaison entre les textes anc. et mod. permet de remarquer qu'une grande quantité de mots préfixés par en-ont disparu ou ont perdu leur préf. ,,Lorsqu'il y a alternance formelle entre un verbe simple et un verbe préfixé, on peut dire qu'actuellement seule l'alternance a/ø est pertinente : grandir (intrans.), agrandir (trans.). L'alternance en/ø n'existe pratiquement plus; en conséquence les verbes en en- sont aussi bien transitifs, qu'intransitifs : « embellir un édifice »/« elle embellit ». Cette double valeur est elle-même peu fréquente, les autres verbes en en-n'ont qu'une valeur : enrichir (transitif)`` (POTTIER, Systématique des éléments de relation, Paris, C. Klincksieck, 1962, p. 325). La répartition entre les deux préf. est finalement imprécise d'autant plus qu'ils ont souvent une même valeur : appauvrir « rendre plus pauvre », enrichir « rendre plus riche ». Toutefois le préf. en- met l'accent sur une idée d'intériorité et par là, d'abondance de la substance désignée par le rad. alors que a- ne fait qu'en signaler la présence (cf. a-). 2. Le préf. é- qui peut marquer le changement d'état : échauffer « rendre chaud », éclairer « rendre clair », égayer « rendre gai », épurer « rendre pur ».
Morphologie.
A.— Var. morphol. N devient m devant les consonnes m, b, p. Emmailloter, emballer, empailler.
Rem. Toutefois, lorsque le verbe est formé sur un syntagme dont on distingue aisément les composants, le n se maintient. S'enbohémer (DELVAU, Dict. de la lang. verte, 1889, p. 128). S'enbonnetcotonner (FRANCE 1907). S'enbondieuser (cf. supra).
B.— Combinaisons avec d'autres préf.
1. Avec ré-. Le verbe ainsi formé indique que l'action est faite à nouveau. Embarquer, débarquer, réembarquer.
2. Avec dé(s)-. Le verbe ainsi formé indique que l'action est faite en sens inverse, annihilant l'effet de l'action précédente. Embarquer, débarquer, désembarquer.
Étymologie.
A.— Lat. En- remonte au préf. lat. in-, lui-même issu de la préposition in : dans, sur, en parlant de l'espace et du temps, que l'on considère les choses en état de mouvement vers un but, d'où un sens moral de « pour, en vue de » ou de repos (d'apr. ERN.-MEILLET 1959, p. 312).
Le préf. a formé très tôt de nombreux verbes :
incingere > enceindre (XIII)
incantare > enchanter (XII)
ingencrare > engendrer (XI)
inflammare > enflammer (XII)
De même on suppose en lat. vulg. :
imbiberare > embrever (XIII)
inclavare > enclaver (XII)
infodire (class. infodere) > enfouir (XI)
ingrassiare, incrassiare > engraisser (XI)
B.— A. fr. En a. fr., une forme participale avec en- peut correspondre à un verbe simple trans. ou à un verbe préfixé par a-. « Une certaine affinité entre en- (dont la visée finale inclut les limites, d'où l'impression de transmutation) et le morphème dynamique résultatif (-i, -é, -u) a fait que certains verbes (...) avaient en ancien français un participe passé en en- » (B. POTTIER, Systématique des éléments de relation, 1962, p. 260) : archier, enarchié; affaiblir, enfaibli; amonceler, emmoncelé; seller, ensellé. Cf. également rougir, enrougi; fondre, enfondu; commencer, encommencé. Toutefois la tendance de la langue veut qu'un paradigme verbal se constitue d'après la forme génératrice, que celle-ci soit simple ou composée. Rougi se modèlera donc sur rougir, atapi sur atapir, amoncelé sur amonceler.
Prononc. et Orth. 1. En- + voyelle. Doit normalement conserver le son nasal; ex. : enamourer [], enivrer [], enorgueillir []. Mais, sous l'infl. de mots du type énergie, énigme, énoncer, ils sont parfois orthographiés énivrer, énamourer, énorgueillir [], [], []. MART. Comment prononce 1913, p. 133, considère ces prononc. et ces graph. comme de véritables barbarismes, auxquels il demande de résister le plus possible. LITTRÉ constate l'incohérence de Ac. qui écrit énamourer mais enivrer. Pour éviter les ambiguïtés, FÉR. Crit. t. 2 1787 propose d'écrire ennivrer, ennorgueillir, le redoublement de n préservant la nasale. Car, comme le souligne BUBEN 1935, § 96, c'est sous l'infl. de l'écriture (effet Buben) que la prononc. s'altère. L'orth. de ennui [] ne prête pas à confusion. Autrefois la prononc. [] était cour. à côté de []. (Jusqu'au XVIIIe s.) on entend encore cette prononc. dans le Midi. Elle suppose l'existence de l'orth. annui [] dénasalisée au profit de la voyelle a. Il y avait en effet identité de prononc. entre les graph. en- et an- (= []). Dès le XIIIe s., il y avait confusion entre ces 2 graph. chez les copistes de Chrestien de Troyes et l'on note encore au XVIIIe s. : Les avantures de Télémaque. Aujourd'hui on écrit de même sans (), dans (de ), etc. (cf. BOURC.-BOURC. 1967, § 61, II). A partir du XVIe s. commence le phénomène de dénasalisation. La tendance est à donner à la voyelle dénasalisée le timbre correspondant à la voyelle choisie pour écrire l'initiale. Ainsi, selon que l'on écrivait an(n)ui ou en(n)ui, l'on obtient [] ou []. Le 2e segment nasal peut disparaître dans la graph. La présence de la nasale dans l'initiale mod. du mot s'explique p. anal. avec des mots du type enfermer dans lesquels en- se trouve devant une consonne autre que n et ne nécessitant pas le redoublement pour conserver la nasalité de la voyelle précédente. Dans un mot comme ennemi, il n'y a pas eu rétablissement de la nasale; on a écrit ennemi ou annemi pour figurer la prononc. []. La dénasalisation aboutit à [] dans le cas de la graph. ennemi, à [] dans le cas de la graph. annemi écrite aussi anemi. La prononc. [] et sa graph. an(n)emi n'ont pas prévalu et elles sont considérées comme tout à fait arch.; on les rencontre encore dans qq. provinces. La graph. ennemi et sa prononc. [] ou, p. harmonis. vocalique, [enmi] sont la graph. et la prononc. actuelles. FÉR. Crit. t. 2 1787 propose d'écrire énemi pour éviter (ce serait utile aux étrangers) la nasalisation. 2. En- + h. a) En- + h lat. En- ne risque pas de perdre sa nasalité car h, bien que purement graph., empêche cependant la décomposition du préf. et il y a liaison; ex. : enherber []. b) En- + h germ. Ici non plus il n'y a pas de perte de nasalité grâce à h, mais celui-ci, qui fut jadis aspiré (cf. ds FÉR. 1768, FÉR. Crit. t. 2, 1787, GATTEL 1841, BESCH. 1845, LITTRÉ et DG), provoque une pause rythmique qui empêche encore la liaison, bien que les dict. récents ne transcrivent plus l'aspiration de h. 3. En- + consonne. Le segment dental [n], placé devant les consonnes labiales
, , [p], a subi, à l'époque où il se prononçait encore, l'infl. labialisante de ces consonnes et s'est transformé en labiale correspondante
d'où la graph. actuelle qui n'aurait plus sa raison d'être; ex. : emmener, embaucher, emporter.
[b]BBG. — DARM. 1877, p. 137. — WAGNER (R.-L.). Rem. sur la valeur des préverbes a- et en- en a. fr. In : [Mél. Gamillscheg (E.)] Tübingen, 1952, pp. 51-65.
II.
⇒EN-2, EM-2, élément formateur.
A.— [En constr. avec un verbe de mouvement] En- du latin inde, représente le point de départ du mouvement exprimé par le verbe.
1. [Non lié] (cf. rem. 1 finale de en2).
2. [Lié] (cf. emmener, emporter, encourir, s'enfuir, enlever, s'ensuivre, s'envoler).
Rem. 1. En a. fr., le pronom en se construisait avec de nombreux verbes de mouvement sous la forme disjointe (cf. L. FOULET, Petite syntaxe de l'anc. fr., Paris, Champion, 1968, p. 437) : s'en aller, s'en fuir, en mener, en porter, s'en retourner, s'en suivre, en lever... 2. Jusqu'au XVIIe, le pronom en pouvait être séparé du verbe simple : ils s'en sont fuis (BOSSUET, Excus. 2 ds LITTRÉ); la justice et la paix au ciel s'en sont volées (RÉGNIER, Ép. I, ibid.). Ac. 1694 cite encore les loc. verbales s'en aller, s'en retourner et s'en venir. Le fr. mod. n'utilise plus que s'en aller et s'en retourner. Les autres loc. ont disparu ou se sont soudées.
B.— En- est un simple outil grammatical; il donne au verbe simple un sens, une constr. différente et sa valeur est (quasi) perfective.
1. Emplois pers. :
finir qqc.,/en finir avec qqc., qqn. Ces longues phrases de paresseux pressé d'en finir (GREEN, Journal, 1949, p. 279).
imposer qqc./en imposer à qqn. La directrice des classes supérieures, Mademoiselle Lejeune, une grande femme sèche et vive à la parole facile m'en imposait; mais je me moquais avec Zaza et quelques camarades des ridicules de nos autres professeurs (BEAUVOIR, Mém. j. fille, 1958, p. 124).
pouvoir qqc./n'en plus pouvoir, n'en pouvoir mais. Je n'en puis plus (GIDE, Journal, 1942, p. 123). On gifle un inconnu qui n'en peut mais (DURRY, Nerval, 1956, p. 49).
vouloir qqc./en vouloir à qqn. Il m'en veut, et c'est justice, pensais-je. Pourquoi suis-je venue, puisque je ne peux pas rester? Il m'en veut, et sa rancune va nous séparer à jamais (BEAUVOIR, Mandarins, 1954, p. 322).
user qqc./en user avec qqn. De faire comme s'ils n'étaient pas là, et d'en user librement avec eux (CAMUS, Exil et Roy., 1957, p. 1635).
prendre qqc., qqn/s'en prendre à qqc., à qqn. Fuir l'approche de son ravisseur qui veut s'en prendre à sa vertu? (CENDRARS, Bourlinguer, 1948, p. 324). Ils criaient très fort pour de petites choses, et souvent s'en prenaient à ma sœur et à moi (BEAUVOIR, Mém. j. fille, 1958, p. 100).
2. Emplois impers.
il en est de. Comme il en est du lait qui bout, ou de l'enfant qui pousse un cri (SAINT-EXUP., Citad., 1944, p. 956).
c'en est fait de. C'en est fait de ma matinée (GIDE, Journal,1948, p. 316).
il s'en faut de peu que. Bernal. — Votre père est un saint, ou peu s'en faut. Toutefois, je commence à comprendre que les saints devaient être un peu agaçants pour leur entourage (MONTHERL., Maître Sant., 1947, II, 3, p. 636). Il s'en faut d'un souffle que cette intuition ne s'annihile dans le silence (JANKÉL., Je-ne-sais-quoi, 1957, p. 17). Il s'en fallut de peu que je ne renonçasse à la littérature (SARTRE, Mots, 1964, p. 179).
il en va. Il en allait tout autrement (CAMUS, Peste, 1947, p. 1461).
Rem. Les loc. sont caractérisées par une productivité nulle et par un antécédent, censé représenté en-, qui est vide de sens.
Prononc. Cf. en-1, em-1.

en- ou em- [devant b, m, p]
Élément, du lat. in- et im-, de in « dans », servant, avec le radical substantif qu'il précède, essentiellement à la formation de verbes composés (ex. : emboîter, emmancher, emprisonner, enterrer) pour marquer l'aspect inchoatif, l'entrée dans un état, l'acquisition d'une qualité. Ces composés sont en général « parasynthétiques », et formés sur un substantif, avec le préfixe em-, en- et un suffixe verbal (du 1er ou du 2e groupe : -er, -ir).

Encyclopédie Universelle. 2012.