enamourer (s') [ ɑ̃namure; enamure ] ou énamourer (s') [ enamure ] v. pron. <conjug. : 1> ♦ Vieilli ou plaisant S'éprendre. « Toutes les donzelles qui ont la fantaisie de s'enamourer de moi » (Gautier). — P. p. adj. Amoureux, langoureux. D'un air enamouré.
v. Pron. Litt. Tomber amoureux. Elle s'est enamourée de lui.
— Pp. adj. Un air enamouré, amoureux.
⇒ENAMOURER, (ENAMOURER, ÉNAMOURER)verbe trans.
A.— [Le suj. désigne une pers.] Énamourer qqn. Inspirer de l'amour, des sentiments très tendres (à quelqu'un). Parfois sous de riants habits de cavaliers, Égrenant sur leurs pas de folles épigrammes, Elles courent les champs, enamourent les femmes (BANVILLE, Cariat., 1842, p. 35). Amertume Douce de vous savoir d'un autre énamourée (VERLAINE, Œuvres compl., t. 3, Dédicaces, 1890, p. 157).
Rem. Énamourer signifie parfois (avec un sujet désignant une chose) « donner l'apparence de l'amour, faire paraître amoureux ». Cette absence de toute pensée énamoure ses yeux (PÉLADAN, Vice supr., 1884, p. 2).
— Emploi pronom.
♦ Emploi pronom. réfl. Devenir amoureux, éprouver de la tendresse pour quelqu'un. Je ne dors pas, j'ai la fièvre, je suis comme un homme qui commence à s'énamourer, mais de qui serais-je amoureux (SAND, Jacques, 1834, p. 212). Les humains savent tant de jeux l'amour la mourre (...) Seigneur faites Seigneur qu'un jour je m'énamoure J'attends celle qui me tendra ses doigts menus (APOLL., Alcools, 1913, p. 100).
♦ Emploi pronom. réciproque. Un séraphin, une fée, qui s'étaient enamourés naguère l'un de l'autre (BERTRAND, Gaspard, 1841, p. 206).
♦ Emploi pronom. passif [L'agent désigne une pers. ou un aspect de son comportement] S'énamourer de. Être pris d'amour pour. J'aimai même le peintre et le sculpteur, dont je voyais les œuvres et dont je n'avais pas vu les traits. Je m'enamourai d'un son de voix, d'une chevelure, d'un vêtement (SAND, Lélia, 1833, p. 203). Il n'avait jamais eu ce que ses camarades nommaient une bonne amie. Une fois, il s'était énamouré, pendant huit jours, d'une femme, mais elle était si malhonnête (HUYSMANS, Sœurs Vatard, 1879, p. 70) :
• Dois-je la charité d'amour à toutes les pécores et donzelles qui ont la fantaisie de s'enamourer de moi? Je suis trop bon. Je me laisse aller à ces yeux de carpe pâmée, à ces pleurnicheries, à ces soupirs, à ces jérémiades, et je finis par être embéguiné, tout en maugréant de ma débonnaireté et couardise.
GAUTIER, Le Capitaine Fracasse, 1863, p. 186.
B.— [Le suj. désigne une chose] Énamourer qqn. Inspirer un goût très vif, susciter un grand attrait intellectuel, artistique, etc. Le propriétaire, (...) s'animant sur les tableaux, (...) violant ou ratant la pensée du peintre, s'éprenant parfois à faux, émettant de grands principes et enamouré du ragoût et de la tartouillade, (...) aimant tout, embrassant tout, dans un goût ardent (GONCOURT, Journal, 1859, p. 601).
— Emploi pronom. passif [L'agent désigne une chose] S'énamourer de. Être pris d'un goût très vif, d'une grande admiration pour. Tu t'enamoures des mœurs arabes (FLAUB., Corresp., 1860, p. 406). Il [Stéphane] s'énamourait des éveils d'aube (...) la poésie des heures matinales lui gonflait le cœur (ESTAUNIÉ, Simple, 1891, p. 169). [Que] (...) Zola et Mallarmé aient été pris et se fussent tant enamourés de son art, ce peut être pour lui [Manet] un grand sujet d'orgueil (VALÉRY, Pièces sur art, 1931, p. 206).
Rem. On rencontre ds la docum. a) Énamourant, ante, adj., rare. Qui énamoure. En fixant sur mes yeux tes yeux énamourants (COPPÉE, Pour Couronne, 1895, I, 5, p. 194). b) Énamourement, subst. masc., rare. Action d'énamourer, de s'énamourer; résultat de cette action. C'était à William qu'allaient (...) les satisfactions de l'artiste [la Faustin] dans la réussite d'un couplet, jaillissant de l'énamourement de tout son être (E. DE GONCOURT, Faustin, 1882, p. 206). Et les lâchages et les énamourements neufs dans les choses de pur intellect... moi, combien d'années j'ai été tout à Montaigne! (GONCOURT, Journal, 1890, p. 1262).
Prononc. et Orth. :[(s)], (je m')enamoure [] ou [(s)], (je m')énamoure []. 1re transcr. ds BESCH. 1845, LITTRÉ, DG, PASSY 1914, BARBEAU-RODHE 1930. 2e transcr. en plus de la 1re ds Pt ROB., WARN. 1968 et Lar. Lang. fr. L'orth. énamourer est celle de Ac. 1878 et 1932. Cf. en-. Étymol. et Hist. 1. ca 1230 « rendre amoureux » (Gaidon, 253 ds T.-L.); 2. 1280 pronom. « tomber amoureux » (G. D'AMIENS, Escanor, 64, 77, ibid.). Dér. de amour; préf. en-; dés. -er. Fréq. abs. littér. Enamourer : 7. Énamourer : 7.
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♦ Vieilli ou par plais. S'éprendre. || Elle s'est énamourée d'un acteur de cinéma.
1 Un séraphin, une fée, qui s'étaient enamourés naguère l'un de l'autre au chevet d'une jeune mourante (…)
Aloysius Bertrand, Gaspard de la nuit, « L'ange et la fée ».
2 Dois-je la charité d'amour à toutes les pécores et donzelles qui ont la fantaisie de s'enamourer de moi ?
Th. Gautier, le Capitaine Fracasse, t. I, VIII, p. 253.
2.1 Les humains savent tant de jeux l'amour la mourre (…)
Seigneur faites Seigneur qu'un jour je m'enamoure.
Apollinaire, Alcools, p. 93.
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énamouré, ée p. p. adj.
♦ Amoureux. || Des jeunes lycéens énamourés. — Langoureux. || D'un air énamouré. || Regards énamourés.
3 (…) le long crépuscule tiède de mai qui la retenait à sa fenêtre, seule, songeuse et enamourée !
Loti, Pêcheur d'Islande, I, IV, p. 39.
4 (…) à retrouver une façon de vivre qui me rappelait des temps très anciens, où j'avais aimé danser, engouffrer tous les films, mais dans la main d'un compagnon énamouré (…)
F. Giroud, Si je mens, p. 250.
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DÉR. Énamourement.
Encyclopédie Universelle. 2012.