Akademik

enorgueillir

enorgueillir [ ɑ̃nɔrgɶjir ] v. tr. <conjug. : 2>
• 1160 ; de en- et orgueil
Rendre orgueilleux, flatter (qqn) dans sa vanité. Succès qui enorgueillit.
Pronom. S'ENORGUEILLIR DE : devenir orgueilleux, tirer vanité de (qqch.). ⇒ se glorifier, se prévaloir. S'enorgueillir de ses diplômes. S'enorgueillir d'avoir réussi. « C'est une faiblesse habituelle à l'homme qui trouve quelque chose de s'en enorgueillir » (Gautier).
⊗ CONTR. Humilier.

enorgueillir verbe transitif Rendre quelqu'un orgueilleux, le flatter dans sa vanité : Ses succès l'ont enorgueilli.

enorgueillir
v. tr. Rendre orgueilleux. Tous ces succès l'enorgueillissent.
|| v. Pron. S'enorgueillir de: tirer orgueil de.

⇒ENORGUEILLIR, verbe trans.
A.— Emploi trans., rare
1. [Le suj. désigne un inanimé concr. ou abstr. qui apporte un sentiment d'orgueil, une satisfaction d'amour-propre; le compl. désigne une pers. ou un groupe humain] Rendre orgueilleux, flatter la vanité de. Les succès l'enorgueillissent (Ac.). Ces compliments enorgueillissent Poil de Carotte (RENARD, Poil Carotte, 1894, p. 2). Bras et jambes de seize ans, minces, mais d'une forme pleine d'où le muscle sec, n'avait pas encore émergé et qui pouvaient enorgueillir une jeune fille autant qu'un jeune homme (COLETTE, Blé en herbe, 1923, p. 39). Trois vins rouges, qu'a certainement connus Ronsard, enorgueillissent justement la Touraine et les confins de l'Anjou (L. DAUDET, Rech. beau, 1932, p. 216) :
1. ... cette bouche, cette croupe, ces seins se rebellent à l'idée de pouvoir appeler autre chose que la caresse sommaire de la paume, des lèvres, les mots bouleversés par un émoi charnel. Et ce qui enorgueillirait la plupart des femmes, Irène le ressent comme une humiliation; ...
GRACQ, Un Beau ténébreux, 1945, p. 28.
Emploi abs. Il est trop pauvre, maintenant, pour rêver à des sacrifices qui enorgueillissent (CHARDONNE, Chant Bienh., 1927, p. 47).
2. Seulement au passif, littér. [Le compl. désigne une chose] Rehausser, valoriser par (quelque chose). [Lettre d'Antoine à la comtesse :] Hier, je suis resté plusieurs heures dans la villa que vous habitez en automne... J'ai vu les grandes salles graves où des échos sommeillent (...) votre salon obscur, tout enorgueilli et parfumé des soies, des reliures, des faïences de la vieille Italie (NOAILLES, Domination, 1905, p. 187). Album enorgueilli de quelque rare plante, Mon esprit a gardé le souvenir en fleur (TOULET, Vers inéd., 1920, p. 32).
B.— Emploi pronom. à valeur subjective
1. Sans compl. prép. [Le suj. désigne une pers.] Se montrer orgueilleux, fier. Ils ont admiré la sagesse prééminente naturelle du premier ange et se sont enorgueillis (Théol. cath. t. 4, 1, 1920, p. 391). Lorsque le savant, dans son laboratoire, amène à l'existence un peuple d'animalcules, il doit garder de s'enorgueillir outre mesure et se souvenir qu'il n'est que l'exécuteur intelligent des conceptions du sublime maître (J. ROSTAND, Genèse vie, 1943, p. 95).
2. S'enorgueillir de. [Le suj. désigne une pers., un groupe humain, plus rarement un attribut moral de la pers.; le compl. désigne un inanimé concr. ou abstr. ou plus rarement un animé qui apporte un sentiment d'orgueil, une satisfaction d'amour-propre] Tirer orgueil, vanité de.
a) S'enorgueillir de + subst. S'enorgueillir d'un succès, des honneurs; s'enorgueillir d'un vêtement. L'Angleterre a sçu échapper à cette hydre de l'Aristocratie, qui se nourrit de la substance des peuples, et s'enorgueillit de leurs humiliations (ROBESP., Discours, Contre le Veto royal, t. 6, 1789, p. 95). Sancerre s'enorgueillissait alors d'une femme supérieure long-temps incomprise, mais qui, vers 1836, jouissait d'une assez jolie renommée départementale (BALZAC, Muse départ., 1844, p. 56). S'enorgueillir d'un art local (BARRÈS, Homme libre, 1889, p. 107). Je m'enorgueillissais de la confiance qu'on avait en moi (GUITRY, Veilleur, 1911, III, p. 21) :
2. ... il [un praticien] montrait le visage fier et hébété de ces possesseurs séniles que leur maîtresse humilie dans le privé de la chambre et qui s'enorgueillissent d'elle devant le public...
ARNOUX, Le Rossignol napolitain, 1937, p. 35.
Rare. [Le suj. désigne un inanimé concr. ou abstr.] Être valorisé, rehaussé par (quelque chose). Aujourd'hui, mes soirs s'enorgueillissent rien que de solitude et que de chasteté (LÉAUTAUD, Essai sentimental, 1896, p. 18). Le château de Dampierre s'enorgueillit d'un tableau d'Ingres (BARRÈS, Cahiers, t. 13, 1920-22, p. 61).
b) S'enorgueillir de + inf. Il s'enorgueillissait de l'avoir à son bras (MOSELLY, Terres lorr., 1907, p. 24). C'est ainsi qu'il [un auteur] connut un jour ce poète bucolique que le Béarn s'enorgueillit d'avoir donné à la France (TOULET, J. fille verte, 1918, p. 30). Je terminai ma méditation en m'enorgueillissant d'avoir buté sur un événement solide et d'avoir réussi à le surmonter (BEAUVOIR, Mém. j. fille, 1958, p. 317) :
3. Il est entendu que la majorité des hommes, et des femmes aussi bien, ressentent vivement l'avantage d'une position qui permet de persécuter son prochain et qu'ils s'enorgueillissent facilement d'exercer quelque autorité sur leur entourage.
AYMÉ, Le Confort intellectuel, 1949, p. 149.
Rem. 1. On rencontre ds la docum. une attest. de la constr. s'enorgueillir de ce que + verbe à l'ind. S'enorgueillir de ce qu'on attribuait une valeur uniforme à ses affirmations dans le domaine entier de l'expérience (BERGSON, Évol. créatr., 1907, p. 199). 2. La docum. atteste a) Enorgueillissant, ante. part. prés. en emploi adj. Il m'en a dit mille choses aimables et enorgueillissantes (FLAUB., Corresp., 1843, p. 32). b) Enorgueillissement, subst. masc. Le fait de s'enorgueillir; son résultat (v. délire ex. 1). Il est d'usage de justifier l'existence des Lettres par des considérations éthiques ou sociales. L'amusement des uns, l'enorgueillissement des autres sont pudiquement et pieusement tus ou voilés (VALÉRY, Entr. [avec F. Lefèvre], 1926, p. 114).
Prononc. et Orth. :[], (je m')enorgueillis []. Pour la prononc. [-] de l'initiale cf. enamourer et enivrer. Cette prononc. est signalée ds FÉR. Crit. t. 2 1787 (qui propose la graph. ennorgueillir pour éviter l'altération de la nasale), ds NOD. 1844, BESCH. 1845 (qui constate qu'elle relève d'un usage gén.) et ds LITTRÉ. DUPRÉ 1972, p. 839, met aussi en garde contre la prononc. []. Pour la 3e syll. écrite -ueil- pour figurer la prononc. [-œj-] cf. cueillir. Le verbe est admis ds Ac. 1694-1932. Étymol. et Hist. 1re moitié XIIe pronom. « devenir orgueilleux » (Ps. cambr., éd. F. Michel, IX, 39). Dér. de orgueil, préf. en-, dés. -ir moins fréq. en a. fr. que orgoillier (bien attesté depuis le XIIe s., cf. T.-L.) et orgoillir (XIIe ibid.). Fréq. abs. littér. :259. Fréq. rel. littér. : XIXe s. : a) 562, b) 206; XXe s. : a) 451, b) 237.

enorgueillir [ɑ̃nɔʀgœjiʀ] v. tr.
ÉTYM. V. 1160; de en-, orgueil, et suff. verbal.
(1538). Rendre orgueilleux, flatter (qqn) dans sa vanité. || Sa fortune, son succès, sa réussite l'enorgueillit. Éblouir, gonfler (→ Déesse, cit. 8).
1 Immolez, dis-je, Sire, au bien de tout l'État
Tout ce qu'enorgueillit un si grand attentat.
Corneille, le Cid, II, 8.
2 M. Formey, qui ne veut pas enorgueillir ses semblables, nous donne modestement la mesure de sa cervelle pour celle de l'entendement humain.
Rousseau, Émile, I.
3 De là des sympathies nombreuses et qui l'enorgueillissaient fort.
Courteline, Messieurs les ronds-de-cuir, 5e tableau, III, p. 195.
——————
s'enorgueillir v. pron.
(V. 1160). Devenir orgueilleux. Enfler (s'), gonfler (se), glorifier (se). → Christianisme, cit. 4. || S'enorgueillir de qqch. Prévaloir (se). || S'enorgueillir d'avoir réussi, d'exercer son autorité. || Il s'en enorgueillit sans en parler, sans se vanter. || S'enorgueillir de sa culture, de ses diplômes, s'en enorgueillir.Absolt. || Il ne faut pas s'enorgueillir exagérément.
4 (…) cette hydre de l'Aristocratie qui se nourrit de la substance des peuples, et s'enorgueillit de leurs humiliations.
Robespierre, Discours, « Contre le Veto royal », t. 6, p. 95, in T. L. F.
5 Ce bonheur, je l'ai, moi qui vous parle; j'en suis fier, et cependant je ne le dois qu'au hasard : mais c'est une faiblesse habituelle à l'homme qui trouve quelque chose de s'en enorgueillir, comme si ce n'était pas l'effet de quelque rencontre fortuite plutôt que de son habileté et de ses combinaisons (…)
Th. Gautier, les Grotesques, p. 41.
6 (…) sur cette haute Moulouya que les plus grands sultans du Maroc n'ont jamais réellement occupée, bien qu'ils se soient toujours enorgueillis dans leurs actes officiels du titre de princes moulouyens.
Jérôme et Jean Tharaud, Marrakech, p. 71.
——————
enorgueilli, ie p. p. adj.
Rendu orgueilleux.
7 Les Espagnols (…) enorgueillis de la prise de Norden.
Racine, les Campagnes de Louis XIV.
8 En somme, notre mépris de l'argent proclamé haut et fort, nous serions grandement enorgueillis si le premier numéro nous rapportait dix sous.
J. Renard, Journal, 6 nov. 1889.
CONTR. Humilier, mortifier. — Abaisser, rabattre, rabaisser (l'orgueil).

Encyclopédie Universelle. 2012.