INTERPRÉTATION
Le terme d’interprétation semble être devenu plus complexe et plus problématique depuis qu’il est entré dans le champ d’une réflexion philosophique et épistémologique sur les sciences de l’homme. Celles-ci, en retour, ne manquent pas de rechercher dans son usage commun des significations qui en renforcent la valeur. Un tel phénomène attaché à l’usage de ce terme n’est donc pas simplement le fait d’une évolution linguistique: il prend le sens d’un événement, corrélatif à la fois d’une transformation du contexte social, politique et religieux de l’homme occidental et de la naissance ainsi que du développement des sciences de l’homme (linguistique, mythologie, ethnologie, psychanalyse, etc.). C’est dire que la référence systématique au terme d’interprétation ne peut se satisfaire d’un examen univoque de la notion qu’il recouvre.
Ce que la notion d’interprétation met historiquement en jeu, c’est la légitimité scientifique d’une pensée qui, cessant d’interroger les causes des phénomènes de la nature, vise à se donner les conditions de son objectivité dans le déchiffrement des signes que l’homme vient, dans la culture, à produire ou à exprimer. L’art d’interpréter, désigné sous le terme d’herméneutique, est donc originairement commandé par la reconnaissance d’un sens caché sous le sens apparent que prennent la parole du dieu, la manifestation d’un signe, l’expression humaine d’un geste ou d’un mot. Parler d’interprétation, c’est alors présupposer qu’une lecture ne suffit pas pour que le sens soit compris et que, précisément, le sens doit être double pour laisser une telle lecture insatisfaite. L’intuition élémentaire qui fonde communément la pratique de l’interprétation donne donc droit, corrélativement, à un mode d’existence du symbolique par rapport au réel.
1. De l’herméneutique d’Aristote aux sciences humaines
La voix et le geste
C’est au Peri hermèneias d’Aristote qu’il convient de se référer pour recueillir le sens liminaire de l’interprétation. Selon ce traité, «est interprétation tout son émis par la voix et doté de signification – toute phônè semantikè , toute vox significativa » (P. Ricœur). L’interprétation est donc acte de signification, production de sens. Elle se constitue dans le moment de la profération, précisément à l’instant même où les choses viennent à désignation. C’est pourquoi Aristote accorde une fonction différentielle au nom et au verbe. «Le nom est un son vocal possédant une signification conventionnelle sans référence au temps et dont aucune partie ne présente de signification quand elle est prise isolément.» Quant au verbe, il «est ce qui ajoute à sa propre signification celle du temps: aucune de ses parties ne signifie rien prise séparément et il indique toujours quelque chose d’affirmé de quelque autre chose». Suivant rigoureusement la pensée d’Aristote, Ricœur a donc raison de formuler ainsi la définition de l’interprétation: «Dire quelque chose de quelque chose, c’est, au sens complet et fort du mot, interpréter.»
Il serait abusif de vouloir tirer du Peri hermèneias une conception de l’interprétation qui convienne à la problématique moderne des sciences humaines. Cependant, ces indications préliminaires entraînent plusieurs remarques.
Notons d’abord que c’est en fonction d’un certain intellectualisme de l’interprétation qu’on fait parfois de celle-ci un procédé de décodage, un art de la traduction ou de la transcription. Aristote rappelle qu’il y va d’un interpréter dès que le sens se trouve présent à la voix (phônè semantikè ) et engage alors un nouveau rapport de l’homme aux choses («dire quelque chose de quelque chose»). On pourrait reconnaître là – dans l’avènement d’une sémantique – à la fois l’intervention de l’historicité humaine et la condition de constitution d’une communauté du sens (cf. la distinction héraclitéenne entre l’idios kosmos , le monde à soi, et le koinos kosmos , le monde commun). Dès lors, poser le problème de l’interprétation n’est plus possible si on ne pose pas en même temps la double question du rapport du sens à l’histoire et de la communication humaine.
On gagnerait, de même, à lire le Peri hermèneias en se référant le plus possible aux usages qu’on fait du terme d’interprétation à propos du musicien, du chanteur, de l’acteur ou du chorégraphe. Bien qu’on associe souvent ici la notion d’interprétation à celle de transposition personnelle d’une œuvre littéraire ou musicale, l’essentiel reste, dans tous les cas, de faire en sorte que – corporellement et instrumentalement – le chanteur, l’acteur, le chorégraphe travaillent à la production du sens dans la voix, le geste, l’attitude... Le poète Antonin Artaud a maintes fois dénoncé l’erreur d’une conception occidentale de l’interprétation au théâtre qui s’inspire d’une psychologie de l’expression. Voix et geste sont tissés dans la même matière corporelle; et le sens n’est pas derrière eux (comme constitué d’avance sous forme de thème: l’amour, la haine, la joie, la peine), mais il est toujours en instance, et comme en projet. L’interprétation n’est pas un langage second; elle est inhérente à la modalité corporelle de l’être dont elle ne parvient jamais à épuiser le sens.
Enfin, cette signification corporelle de l’interprétation conduit déjà à éviter la simplification qui consiste à figurer sur un mode substantiel et univoque les rapports des signes au sens et de l’interprétation aux signes. Une telle conception suppose que le sens est établi derrière les signes chargés de le rendre manifeste et que l’interprétation est une appréhension et une restitution de ce sens au moyen des signes. Or la conception aristotélicienne de l’herméneutique semble exclure une telle simplification. Car, si le problème est bien celui de la production du sens à travers un dire , on s’aperçoit que ce dire – qu’il soit de la voix ou du geste – est littéralement un interpréter , dont les mots (noms et verbes) constituent intrinsèquement la condition d’énonciation. Ainsi se trouve posée la question de savoir si l’interprétation porte sur des signes ou si, plutôt, tout signe n’est pas déjà l’énoncé d’une interprétation. Dans ce cas, on peut déjà se demander si interpréter n’est pas toujours interpréter une interprétation.
Texte et tradition
Cependant, comme l’indique Ricœur, l’herméneutique aristotélicienne, du fait qu’elle ne pose pas le problème des significations multivoques, est insuffisante à rendre compte des origines d’une problématique moderne de l’interprétation. Sans négliger les questions posées à partir du Peri hermèneias , il faut se tourner vers les conceptions religieuses de l’interprétation. Celles-ci ne proviennent pas d’une source unique et il n’est pas possible ici de retracer en détail les influences multiples qui ont joué sur l’exégèse biblique jusqu’à notre époque. On relèvera quelques aspects utiles à la mise au point de cette notion d’interprétation.
Dans la religion égyptienne, la pratique rituelle n’obéit pas au respect scrupuleux de la lettre et les textes – dont la fonction magique a été souvent soulignée – sont inséparables d’une lecture qui est elle-même «essentiellement un élément de la célébration du rite, au déroulement duquel elle contribue et qu’en tout cas elle explique et commente» (S. Morenz). D’autre part, il arrive souvent que le secret soit requis. Quant au caractère magique de la littérature funéraire propre à la religion égyptienne, il est renforcé «quand les textes destinés à éterniser l’existence du roi sont usurpés par de simples particuliers et que par conséquent la simple dentité du mot et de la réalité est remplacée par l’appropriation d’une réalité étrangère ou la création d’une réalité non existante par la parole». Ainsi, l’interprétation se conçoit à deux niveaux: elle est inséparable de la lecture qui fait partie de la pratique rituelle; elle est, sur un mode magique, productrice de significations ayant le pouvoir de faire exister, grâce à la parole, des réalités.
Dans d’autres religions, la référence au texte prend une valeur différente et la notion d’interprétation une autre portée. Ainsi en est-il, par exemple, dans la tradition mystique juive, du rôle de la littérature kabbalistique: dans le Zohar (diffusé en Espagne à partir de 1280), il est dit que «le sens littéral de l’Écriture, c’est l’enveloppe, et malheur à celui qui prend cette enveloppe pour l’Écriture même!». Le sens de l’interprétation se définit tout à la fois en fonction de la Loi et de l’interdit de la transgresser, de même que dans le rapport à une marque inscrite sur le corps. On sait, en effet, quelle importance prend, dans le judaïsme, l’étude de la Loi: l’interprétation ne peut y être conçue comme un exercice second, mais fait partie de l’étude elle-même. Elle se définit donc à partir de l’existence d’un texte dont la lecture est accès au sens caché.
Il conviendrait de faire une place ici aux différents aspects que revêt la transmission de l’interprétation. C’est avec la Réforme luthérienne, notamment, que s’est explicité dans le christianisme moderne le problème de la traduction d’un texte sacré et de sa transmission sans l’intermédiaire d’une hiérarchie ecclésiale. L’entreprise de Luther met catégoriquement en cause le principe d’une parole hiérarchique impliquant la connaissance de la Révélation et ordonnant la soumission des fidèles à une Vérité qu’ils ne peuvent en aucun cas acquérir directement. L’Église catholique romaine met en garde ses fidèles contre toute interprétation individuelle des Écritures, et inversement fonde l’obéissance dans la foi en la Parole dont la transmission passe par elle seule. On assiste ici à un glissement possible du sens de l’interprétation, à laquelle on imputera notamment le préjugé psychologique moderne de subjectivisme, comme si, hors de la tradition, elle ne pouvait qu’encourager le doute et l’erreur et favoriser les fanatismes. En d’autres termes, la notion d’interprétation, au-delà du sens que la religion lui confère, engage des déterminations d’ordre moral, social et politique liées elles-mêmes à une opposition fondamentale entre la Parole inhérente à l’autorité d’un savoir et à un pouvoir et, d’autre part, les interprétations qui relèvent d’un individualisme des esprits. La pensée traditionaliste (Joseph de Maistre, Louis de Bonald, Auguste Comte) peut y voir le danger, propre aux temps modernes, d’une démesure de l’esprit critique qui menace l’ordre établi. Désormais se trouve posé, au niveau moral et politique, le problème des conditions d’objectivité et d’universalité de l’interprétation. Si l’on assiste à un démantèlement de l’esprit dogmatique et si la Parole détenue par celui qui sait ne peut plus assurer l’ordre fondé sur le respect d’un enseignement, comment conférer une légitimité morale et scientifique à l’interprétation? Il est vrai que les méfiances attachées, dans ce contexte, à l’interprétation se comprennent en fonction d’un idéalisme de la vérité qui, de Platon à Kant, condamne ou critique tout à la fois l’erreur et le mensonge. La notion d’interprétation, dans l’acception que lui reconnaîtront les sciences de l’homme, ne peut répondre à des conditions de légitimité scientifique si on l’apprécie selon les critères d’une épistémologie des connaissances rationnelles. En un mot, la révolution épistémologique appelée par les sciences de l’homme exige que la notion d’interprétation ne soit plus dépendante d’une problématique de la vérité et de l’erreur. C’est précisément avec la psychanalyse que se fera jour une théorie pratique de l’illusion (rapport du manifeste au caché, simulation et dissimulation, masquage, etc.).
Il importe enfin de noter que la philologie fonde, indépendamment de toute référence religieuse, son exercice de déchiffrement des textes sur un art de l’interprétation. Cette pratique a pris d’abord une valeur particulière dans l’usage qu’en a fait Nietzsche et elle constitue, sous ce rapport, une orientation non seulement originale, mais aussi de grande importance pour les sciences de l’homme (cf. Jean Granier, Le Problème de la vérité dans la philosophie de Nietzsche , et Michel Foucault, «Nietzsche, Freud et Marx et l’interprétation»).
L’interprétation dans les sciences de l’homme
Indépendamment de la philologie (cf. la théorie herméneutique d’August Böckh dans son Encyclopédie et sa Méthodologie ), les sciences historiques ont joué un rôle notable dans la mise au point et le développement de la notion d’interprétation. J. G. Droysen (1808-1884) distinguait dans la méthode historique trois moments: l’heuristique, la critique et l’interprétation. Mais c’est à Wilhelm Dilthey (1833-1911) que revient le mérite d’avoir engagé la méthode interprétative sur une critique préalable de la «raison historique» et d’avoir nettement distingué sciences de la nature et sciences de l’esprit. S’opposant à l’explication causale, qui vise à rendre compte d’un enchaînement logique des faits, l’interprétation concerne moins les raisons que le sens. C’est pourquoi la notion d’interprétation suppose une révision du statut de la compréhension dès lors que celle-ci s’exerce non plus sur les phénomènes de la nature ou sur les théorèmes de la géométrie, mais sur l’homme, son histoire, ses institutions. Avec Dilthey en histoire ou Max Weber en sociologie comme avec Karl Jaspers en psychologie ou K. Goldstein en biologie, cette notion entre dans une problématique de la compréhension de l’homme par l’homme.
L’insistance avec laquelle les philosophies existentielles et la phénoménologie donnent au comprendre la portée d’un acte fondateur de toute connaissance de l’homme impose qu’on en détermine exactement les significations. Comprendre s’entend aussi bien d’un raisonnement de la géométrie que d’un événement ou d’un comportement. Il faut cependant distinguer, dans cet acte, ce qui relève d’une intelligence des raisons ou des causes et ce qui concerne un sens. Or la compréhension d’un sens (ou d’une valeur) relève d’une saisie (préhension) qui accueille et qui rassemble. La compréhension consiste donc, comme dit Eduard Spranger, à «saisir comme ayant un sens des relations spirituelles qui ont une valeur objective». Bien qu’une telle définition n’aille pas sans difficulté (elle risque notamment d’infléchir la notion dans le sens d’un spiritualisme subjectiviste), elle fait reposer l’objectivité de la compréhension sur une perception (ou expérience) des expressions, désignées ici sous le terme de relations spirituelles.
L’unification du sens dans la compréhension ne peut participer d’aucun systématisme d’un savoir a priori. Le comprendre , en tant qu’il s’instaure entre un homme et un autre homme, laisse tout d’abord s’informer le sens dans une expérience et refuse de l’immobiliser ou de l’objectiver. Il convient ici de reconnaître à la phénoménologie husserlienne le mérite d’avoir souligné l’importance d’un acte qui consiste à «revenir aux choses mêmes» ou encore à «se laisser guider par la nature des choses» et qui, dans la perception, bien loin d’accueillir l’objet en son exhaustivité immédiate, se trouve dans l’impossibilité d’en épuiser les profils. Lorsqu’il ne s’agit plus d’un objet mais de l’homme, ce qui est perçu peut d’autant moins se constituer dans une représentation immédiate. La compréhension, qui ainsi se détache difficilement de la perception de l’Autre, consiste à saisir l’expression du sujet, non pas sur un mode isolé, mais dans le sens . On s’aperçoit alors que la compréhension appelle, pour être exactement située dans sa portée épistémologique au sein des sciences de l’homme, une analyse rigoureuse des conditions de l’intersubjectivité. Les Méditations cartésiennes de Husserl opèrent précisément le renversement nécessaire pour définir une objectivité de la compréhension sur la base des fondements de l’intersubjectivité. Les sciences de l’homme ont eu raison de souligner, sous des formes différentes, que cette notion de compréhension était solidaire de celle de rencontre ou de relation . La mise en rapport du sens avec la présence distingue les sciences d’archives ou de documents de celles qui ont conscience du fait que toute compréhension de l’homme par l’homme est déjà acte de changement. C’est précisément ce problème qu’on retrouve dans l’interprétation en psychanalyse.
2. L’interprétation en psychanalyse
Que ce soit pour en contester l’importance ou pour reconnaître la nécessité de s’y référer, les sciences de l’homme n’ont pas manqué, à des degrés divers, de s’intéresser à ce qui, dans la psychanalyse, semble lui conférer sa spécificité méthodologique, à savoir l’interprétation.
Données historiques
Freud fait intervenir pour la première fois le terme d’interprétation dans la Traumdeutung (1900, traduit en français d’abord sous le titre de Science des rêves , puis d’Interprétation des rêves ). Il s’attache déjà à distinguer la notion d’interprétation en psychanalyse du sens qui lui est reconnu dans l’Antiquité à propos des songes. Pour lui, l’interprétation est un travail qui a pour correspondant le travail du rêve et qui, comme celui-ci, est d’abord le fait du rêveur. Il consiste à laisser le patient fragmenter son rêve et «associer» librement à partir de chaque élément. Ainsi l’interprétation n’est-elle point conçue, à l’origine, comme un acte d’intervention externe relevant du seul analyste, mais bien comme l’acte de signification effectué par le patient dans la découverte d’un rapport entre le sens manifeste et le sens caché (toujours problématique) de ce qu’il dit. Bien qu’ainsi le rêve se trouve historiquement privilégié, les autres productions de l’inconscient – restes diurnes, fantasmes, lapsus, actes manqués, symptômes – peuvent de même être définies comme des interprétations que le sujet livre à l’analyse dans le cours de la cure. Précisément, il convient ici de distinguer, dans le champ de la psychanalyse, deux régimes de l’interprétation. D’une part, celle-ci peut se développer hors des conditions concrètes d’une cure; c’est le cas, par exemple, des interprétations psychanalytiques portant sur des œuvres littéraires ou artistiques, sur des phénomènes sociologiques, etc.; l’interprétation fonctionne alors comme une technique conceptuellement armée par la psychanalyse, mais engagée dans un mode de lecture et de critique qui vise à expliciter les déterminations inconscientes sous-jacentes – personnelles ou collectives – d’une œuvre ou d’un phénomène. D’autre part, l’interprétation intervient dans une relation au patient, à l’intérieur de la cure; dans ce cas, elle relève d’un art qui obéit à des règles et possède ses moments d’incidence propres. Intégrée à la dynamique de la cure, elle se présente comme l’argument de la praxis analytique, la forme majeure de l’action thérapeutique.
Depuis 1930 environ, de nombreuses contributions ont été apportées à ce problème. Comme le fait remarquer Didier Anzieu, on «avait fini par imposer l’idée erronée d’une division du travail dans la cure: le patient produit le matériel et le psychanalyste l’interprète». Cette division du travail est à l’origine (elle en est par ailleurs la conséquence) d’une rationalisation poussée à la limite de la technique d’interprétation. La question qui désormais se pose est celle de savoir si, lorsqu’il interprète, le psychanalyste procède à partir d’un savoir élaboré, de nature pratique et rationnelle, ou si, dans ce qu’il dit, il laisse parler son inconscient. Des psychanalystes américains tels que Kris, Hartmann et Loewenstein défendent la conception selon laquelle les interprétations émanent d’une partie du moi exempte de tout conflit et, par conséquent, pouvant faire prévaloir une rationalité propre soustraite à tout élément pulsionnel. Une partie de l’école américaine en est venue ainsi, autour de 1930-1940, à conférer à la technique d’interprétation une rationalité telle qu’elle n’a pas manqué d’enfermer finalement le problème dans un formalisme dont certains aspects sont, pour une part, contemporains des essais de formalisation logico-mathématique de la psychanalyse.
Dans une perspective différente, Ludwig Binswanger a cherché à rapporter l’interprétation psychanalytique – définie par lui en termes de mantique , au sens où cette notion comporterait à la fois une dimension heuristique et une dimension herméneutique – à des actes de compréhension dont certains sont d’ordre rationnel (selon lui, le psychanalyste serait orienté par une saisie scientifique et systématique du cas) et d’autres d’ordre psychologique inconscient (comment le psychanalyste entend-il ce qui, dans les mots du patient, est production subite, fantasme, coq-à-l’âne...?). L’interprétation serait donc un acte de dévoilement du sens inconscient dans un va-et-vient permanent entre une compréhension systématique-rationnelle de l’économie et de la dynamique du patient et la compréhension psychologique spécifique des singularités de l’inconscient.
Le regain de faveur dont bénéficie aujourd’hui la notion d’interprétation dans la littérature psychanalytique procède d’une conception tout à fait différente, à laquelle les travaux de Jacques Lacan ont donné des bases plus justes. En tant qu’elle concerne essentiellement l’inconscient, l’interprétation place dans un certain rapport l’écoute et la parole et assigne le sens à résider dans ce rapport. Lacan a eu raison de rappeler maintes fois la logique de l’inconscient, dont l’interprétation participe, et la nécessité pour le psychanalyste d’articuler sa parole au dire littéral du patient ou, en quelque sorte, d’engager son écoute au ras d’une énonciation. Dans ces conditions, on peut se demander s’il n’est pas arbitraire d’extraire l’interprétation de la pratique psychanalytique, alors qu’elle est présente à toute l’écoute et n’intervient pas seulement sous la forme d’une communication au patient du sens de ses productions inconscientes.
L’emploi du mot chez les psychanalystes
Le rapport entre interprétation et signification s’éclaire par l’étymologie germanique: Freud utilise le terme Deutung (interprétation) qui a même origine que le mot Bedeutung (signification), lesquels dérivent tous deux du mot deutsch , dont le sens premier correspond à l’usage de la langue par le peuple. Si bien que le deuten (interpréter, donner un sens, désigner) est tout d’abord l’acte consistant à rendre allemand un mot n’existant qu’en latin. Par extension, la Deutung consiste à rendre plus clair et plus explicite le sens d’un mot par le fait même de l’introduire ou de le transposer dans une autre langue. D’ailleurs, la signification relève bien d’une véritable mise en acte du sens (Sinn ): à la différence de ce qui se passe en astrologie, l’interprétation n’a rien ici d’une lecture statique des signes. Elle est mise en œuvre du sens, elle donne à celui-ci un fonctionnement.
Si on évite de tirer du terme lui-même une conception de l’échange (dont la pensée s’impose cependant lorsqu’il est question de pratique psychanalytique), on peut relever les acceptions différentes que prend la notion d’interprétation en psychopathologie. Déjà, pour raconter son rêve, le sujet fait subir à ses représentations et à ses souvenirs une élaboration (dite secondaire) qui constitue une première interprétation (mise en ordre du matériel onirique, recherche d’une cohérence, abandon de certains éléments qui ne «peuvent» entrer dans le récit). Dans la superstition, on retrouve, de même, un travail inconscient d’interprétation qui consiste à accorder une valeur singulière (bénéfique ou maléfique), individuelle ou commune, à des signes produits par la convergence de certains événements ou de certains phénomènes. Enfin, dans la paranoïa, les détails des expressions d’autrui prennent valeur de signes auxquels le sujet attache la plus grande importance, persuadé qu’ils le concernent en propre: les paranoïaques, dit Freud, «attribuent la plus grande signification aux petits détails que nous négligeons d’ordinaire dans le comportement d’autrui, ils interprètent à fond (ausdeuten ) et ils en tirent des conclusions de grande portée». On s’aperçoit ainsi que tout élargissement psychopathologique de la notion d’interprétation engage aussitôt d’autres notions, notamment celle de projection .
Cependant, l’utilisation que fait Freud du terme d’interprétation pour désigner l’art ou la technique du psychanalyste ne se videra jamais complètement de toute ambiguïté. C’est ainsi qu’il a toujours pris soin de noter, tant à propos de l’interprétation que de la construction, l’analogie entre l’art du psychanalyste et le processus inconscient du malade. Dans ces conditions, il conviendrait de revenir sur le problème de la rationalité de l’interprétation psychanalytique: un nouvel argument serait alors donné en faveur d’une conception qui reconnaît la dimension pulsionnelle inconsciente de l’interprétation dans la pratique analytique.
Comprendre et interpréter
C’est dans la relation, parue en 1909, de l’analyse d’un petit garçon de cinq ans (le «petit Hans») que Freud, loin de fixer une doctrine de l’interprétation, énonce, sinon les règles de celle-ci, du moins sa situation, son sens et sa portée dans la cure. On en peut tirer un certain nombre d’observations.
La présentation à la conscience et l’effet de ressemblance
L’art d’interpréter consiste, pour l’analyste, à dévoiler à la conscience du patient son complexe inconscient tel qu’il se laisse indiquer et comprendre à partir des éléments (rêves, fantasmes, souvenirs) fournis par le sujet. En ce sens, l’interprétation se distingue déjà d’un acte de compréhension: elle est inséparable d’une communication verbale entre l’analyste et le patient et se définit comme présentation à la conscience . Cette précision laisse entendre d’abord que le patient ne se trouvera pas nécessairement en mesure d’accepter ce qui, par la médiation des paroles de l’analyste, fait retour à lui-même. La notion de résistance est corrélative de toute présentation à la conscience d’un complexe inconscient: le patient refuse alors de se reconnaître dans le dit de l’analyste et pense que celui-ci ne le comprend pas. L’analyste parle le langage d’une vérité de l’inconscient et, pour ne point être méconnue par le patient, celle-ci n’en est pas moins difficile à accepter. Déceler le sens d’un complexe inconscient et le communiquer à la conscience du patient relève d’un acte de rétablissement par lequel il s’agit de redresser, de remettre en perspective. C’est donc aussi un acte de rassemblement du sens dans une parole. On voit ainsi selon quelles déterminations défensives le sujet peut refuser de se reconnaître dans ce que l’analyste lui restitue: c’est en ce sens qu’il faut entendre la critique si souvent formulée à l’encontre de la psychanalyse et visant le caractère prétendument «construit», «artificiel» ou «simplifié» des interprétations.
Il est vrai, comme le pense Freud, qu’en dépit de ses résistances le patient n’est pas sans attendre quelque chose qui précisément appartient à sa propre recherche inconsciente. D’où l’effet de ressemblance ou de similitude qui crée, dans l’écoute du patient, la condition d’une mise en rapport du sens à lui-même. Cet «effet», qui peut se définir comme un retour sur les traces d’un chemin, est, pourrait-on dire encore, de l’ordre d’un reflet dans le miroir ou d’un écho; c’est l’interprétation qui crée cet effet de ressemblance et c’est à elle que revient le pouvoir d’introduire l’étrange dans le familier, et ainsi d’engendrer le malaise (l’analyste est lui-même étranger par le pouvoir de sa technique de laisser, chez le patient, venir dans ses mots familiers l’étrangeté du sens). L’interprétation concerne donc la désignation du sens caché abandonné au désir refoulé. La mise en acte du sens caché est à la fois construction et déconstruction: c’est ainsi, du moins, qu’il faut entendre cette mise en rapport, par l’interprétation, du manifeste et du caché. Dans le moment où le sens familier se défait, l’effet de sens est produit par les paroles de l’analyste et ces paroles ordonnent autrement les éléments présents dans ce que le patient avait dit.
Acheminement du sens, temps et stylistique de la présence
Le sens inconscient n’apparaît pas directement: il chemine à travers les résistances jusqu’à la conscience. C’est dire que l’interprétation se distingue à la fois d’un acte de suggestion et d’une explication. Le premier, comme l’a noté Binswanger, participe non d’un «comprendre», mais d’un «prendre à» ou d’un «prendre par» (prendre au mot, prendre par le sentiment). Il assigne donc le sujet à résider tout entier dans une de ses expressions. Or l’interprétation ne suggère pas; elle annonce qu’il y a sens quelque part dans ce que le sujet énonce et que lui seul finira par trouver. De même, à confondre l’interprétation avec l’explication, quand il est question de l’inconscient, on enchaînerait le patient à ses raisons; on l’enfermerait dans la cohérence logique de ses résistances et, au lieu de lui redonner accès à une histoire, on ne ferait que lui représenter sa vie en un système de causalité qui l’aliénerait une seconde fois. Ainsi qu’en témoignent les psychologies du comportement et les caractérologies, l’explication rationnelle construit un nouveau mythe ou substitue au mythe personnel un modèle logique de représentation de soi conformément à une norme scientifique d’adaptation. Par conséquent, affirmer que le sens ne peut que s’acheminer, c’est reconnaître qu’il n’est jamais préfabriqué et qu’il est, au contraire, toujours à côté, en deçà ou au-delà de l’expression qui le manifeste. Si l’interprétation a pour fonction de restituer au patient le sens inconscient, elle tire essentiellement son pouvoir de ce qu’elle fait jouer cet effet de ressemblance et désigne le sens par ce qui s’en écarte.
Lier l’interprétation au cheminement du sens revient encore à souligner le rapport de l’interprétation au temps . D’une part, le moment où l’analyste interprète n’est pas immédiatement consécutif à celui où il a compris: une différence s’introduit qui garantit l’interprétation contre la compulsion «sauvage» à communiquer au patient, sur un mode systématique, le sens devenu objet de savoir pour l’analyste, à le lui «jeter brusquement à la tête». C’est pourquoi le savoir de l’analyste ne peut être acquis ni dans les livres ni à l’Université: la part pulsionnelle de l’interprétation ne s’entend que sur le fond d’une formation analytique personnelle. D’autre part, l’acheminement du sens jusqu’à la conscience du patient implique, pourrait-on dire, un retard nécessaire qui garantit que le sens «travaille»: ce dernier met en œuvre chez le patient tout un matériel inconscient, qui viendra au jour, à un moment ou à un autre, dans l’analyse. Le pouvoir de l’interprétation consiste donc bien à laisser le sens s’acheminer selon une temporalité propre à la dynamique de la cure et à la perméabilité du sujet.
Cette fonction temporelle de l’interprétation se rattache non seulement à une sémantique du sens, mais aussi à une stylistique de la présence. Parmi les travaux qui ont traité de l’interprétation, certains (Victor N. Smirnoff) ont justement souligné la part qui revenait à la présence de l’analyste, à sa voix, à ses intonations, à la matière corporelle de son silence et de sa parole, c’est-à-dire à son style. Ce style est éminemment perceptible par le patient et c’est même de la réalité concrète de la présence de l’analyste que celui-là tire souvent une abondante matière de productions fantasmatiques. C’est pourquoi l’analyse ne s’inscrit pas entièrement dans le champ verbalisé d’un langage, pas plus que l’interprétation n’obéit exclusivement à des règles techniques formellement appliquées. La voix, le rythme de la parole, le rapport de celle-ci au silence qui la soutient, enfin les moments où l’analyste interprète appartiennent à une stylistique de l’interprétation dans la cure et se laissent décrire en termes de distance (éloignement, proximité, rapprochement, ouverture, fermeture), dans une problématique existentielle de la communication. Freud n’a pas ignoré cette «saisie subconsciente d’éléments infra-cliniques» (V. N. Smirnoff). «La détermination plus subtile, écrit-il dans la Psychopathologie de la vie quotidienne , [qui préside] à l’expression, parlée ou écrite, de la pensée, mériterait qu’on lui prêtât une attention soigneuse. On croit généralement être libre de choisir les mots dont nous affublons nos pensées, ou les images dont nous les travestissons. Mais une observation plus attentive montre que d’autres considérations décident de ce choix, et que la forme de la pensée laisse transparaître un sens plus profond et souvent non intentionnel.» On pourrait rapprocher ces points de vue de ceux qui ont été largement exprimés par Max Scheler et surtout, en psychiatrie, par Binswanger. Pour ce dernier, l’approche clinique ne peut se limiter à une compréhension et une interprétation sémantiques: l’exemple des rêves prouve qu’il faut réengager toute approche sémantique dans une description de l’esquisse existentielle qui n’est autre que la détermination stylistique de la présence. C’est pourquoi Binswanger introduit – à la suite de Heidegger – la notion de direction de signification (Bedeutungsrichtung ) qui est, précisément, ce qui conduit le sens ou qui le laisse s’acheminer (soit, par exemple, la verticalité de la chute, l’ascensionnalité du vol dans des contenus oniriques dont le sens peut être interprété comme sexuel).
L’élaboration de l’interprétation
En insistant sur le retard entre le moment de la compréhension et celui de l’interprétation, on a implicitement distingué la compréhension psychanalytique de toute autre compréhension. De même que le patient «met du temps» à élaborer en lui le sens inconscient de ce qu’il dit, de même, ce que l’analyste comprend, bien qu’écouté dans le hic et nunc de la parole du patient, ne peut en aucun cas donner lieu à une interprétation systématique. Certes, l’analyste intervient au sujet de ce qu’exprime le patient au moment où quelque chose se dit qui peut être interprété, mais il ne faut pas méconnaître le travail inconscient d’élaboration de l’interprétation dont l’attention flottante est, pourrait-on dire, à la fois la forme extérieure et la disposition subjective. L’interprétation donnée par l’analyste engage, au niveau de la parole, le rapport singulier du comprendre et de l’interpréter: la parole de l’interprétation a le pouvoir de «guérir», comme dit Freud, si précisément elle fait exister, au cœur des mots, l’inconscient et si elle a implicitement le sens de sa mesure et de sa portée. Car, pour aider le patient à découvrir son complexe inconscient «là même où il est ancré», la parole de l’interprétation se refuse à être énoncée hors de l’écoute que l’analyste lui-même en a, ce qui représente, comme dit V. N. Smirnoff, le corollaire nécessaire du savoir entendre: «Strict corollaire du savoir entendre, s’écouter parler n’est pas aussi aisé qu’on le dit.» Dans ces conditions, l’interprétation psychanalytique comporte à tout instant une totale sensibilité à ce qui se passe dans la cure, et notamment à ce qu’on peut appeler l’évolution du transfert. Freud rappelait que la psychanalyse était analyse des résistances et analyse du transfert: c’est bien ainsi que se dessine la place de l’interprétation, qui a partie liée au discours du patient (associatif et interprétatif) et qui n’est opérante que parce qu’elle n’est pas seulement révélation du sens à la conscience, mais surtout analyse toujours en œuvre des résistances du sujet.
L’objet de l’interprétation
On en vient alors à se poser une dernière question: qu’est-ce qui est interprété? La réponse n’est sans doute pas facile si l’on veut désigner des contenus précis, par exemple les productions de l’inconscient: rêves, fantasmes, lapsus. En fait, on s’aperçoit bien vite que la définition de l’interprétation en psychanalyse ne peut se satisfaire de la référence exclusive au symbole. Il faut ici reconnaître la spécificité de la cure analytique dans ce qu’elle engage sous le rapport du désir et de la frustration, et, par là, au regard de la réalité. «Il subsiste un art de l’interprétation, écrit G. Favez. Il peut s’inspirer délibérément [...] et efficacement, de cette attention prêtée à la frustration dans le destin des hommes [...] Il faut sauvegarder l’objet de l’interprétation psychanalytique. Ainsi parler du désir sans parler de la frustration, sans parler du refus de la frustration n’a pas de sens. Le manque est ici majeur dans le développement de la cure [...] La situation est suffisamment frustrante, il ne faut rien y ajouter, ni effaroucher, ni déconcerter à plaisir. L’interprétation s’imposera d’elle-même quand le désir sera reconnu comme refus de la frustration. À ce moment, le patient peut reconnaître que l’analyste pense comme lui et, le plus fréquemment, ce sera celui-ci qui devra reconnaître que le patient pense comme lui.»
Selon cette perspective, on pourrait poser à nouveau la question de la nature de l’interprétation psychanalytique par rapport aux modalités différentes de l’interprétation dans d’autres sciences de l’homme. Le psychanalyste est-il traducteur ou herméneute? Ou n’est-il ni l’un ni l’autre? Pour André Green, qui a tenté d’y répondre en s’inspirant de l’enseignement de Lacan, «il ne veille pas tant à déterrer le passé qu’à faire émerger le sens nouveau, la retrouvaille de la vérité». Son interprétation inscrite dans un rapport au désir opère comme le signifiant dont le sujet se sert, lui aussi et lui déjà, pour interpréter.
interprétation [ ɛ̃tɛrpretasjɔ̃ ] n. f.
• interpretacion 1160; lat. interpretatio
1 ♦ Action d'expliquer, de donner une signification claire (à une chose obscure); son résultat. ⇒ explication. Interprétation d'un texte. ⇒ commentaire, exégèse, glose; herméneutique. Interprétation mystique, allégorique, symbolique d'un texte. ⇒ lecture. « Les textes ont besoin de l'interprétation du goût » (Renan). Interprétation des lois par la Cour de cassation. Interprétation d'une clause d'un contrat. Spécialt Interprétation des rêves, des songes, des signes. ⇒ -mancie.
2 ♦ Action de donner une signification (aux faits, actes ou paroles de qqn). Interprétation arbitraire, tendancieuse. Erreur d'interprétation. Les diverses interprétations d'un même fait (⇒ version) ; d'une même déclaration. Énoncé pouvant recevoir plusieurs interprétations (⇒ ambigu, amphibologique, équivoque) . Interprétation des faits sociaux, politiques. « nous tentons d'imposer au monde extérieur notre interprétation particulière » (A. Gide)(cf. Grille de lecture). Donner une interprétation personnelle d'un fait.
♢ (1909) Psychiatr. Délire d'interprétation : raisonnement qui tire de faits vrais des inductions et déductions erronées, liées aux tendances du malade.
3 ♦ (1874) Manière de jouer (une œuvre dramatique, musicale). ⇒ exécution. « une actrice qui donnerait de ce rôle une interprétation très différente » (A. Gide). Une interprétation magistrale. Prix de la meilleure interprétation masculine (de cinéma).
4 ♦ Action d'interpréter (2o) oralement un énoncé oral; son résultat. Interprétation simultanée. ⇒ traduction.
5 ♦ Inform. Exécution, à l'aide d'un interpréteur, d'un programme écrit dans un langage évolué.
● interprétation nom féminin (latin interpretatio, -onis, explication) Action d'interpréter, d'expliquer un texte, de lui donner un sens ; énoncé donnant cette explication. Action d'attribuer un sens symbolique ou allégorique à quelque chose : L'interprétation d'un songe. Action ou manière d'interpréter un fait ou un comportement ; signification qu'on lui donne : Quelle interprétation donnez-vous à cette volte-face ? Action ou manière d'exprimer, de jouer une pièce, un rôle, de représenter une œuvre : Le texte est beau, mais l'interprétation est médiocre. Acte par lequel un exécutant, un groupe d'exécutants, ou leur chef, rend sensible au public ce qui n'existe qu'à l'état virtuel dans la partition écrite. Informatique Analyse et exécution immédiate d'un programme, instruction par instruction, sans passer par une phase de compilation. Psychanalyse Intervention du psychanalyste qui consiste à restituer à l'analysant, dans une dimension symbolique, le sens latent du matériel qu'il fournit au cours des séances et, par là même, à le mettre en présence de son désir inconscient. ● interprétation (expressions) nom féminin (latin interpretatio, -onis, explication) Gravure d'interprétation, synonyme de gravure de reproduction ou de estampe de reproduction. Interprétation photographique, traduction sur des photographies, à l'aide de signes conventionnels, de renseignements découverts par la reconnaissance aérienne. Délire d'interprétation, forme de délire chronique systématisé reposant sur une multiplicité d'interprétations délirantes, le plus souvent à thème de persécution. ● interprétation (synonymes) nom féminin (latin interpretatio, -onis, explication) Action d'interpréter, d'expliquer un texte, de lui donner un sens ;...
Synonymes :
- exégèse
Action ou manière d'interpréter un fait ou un comportement ; signification...
Synonymes :
- sens
- version
Action ou manière d'exprimer, de jouer une pièce, un rôle...
Synonymes :
- exécution
- jeu
interprétation
n. f.
d1./d Action d'interpréter; explication. Interprétation d'un songe.
d2./d Action de donner un sens à une chose; son résultat. Interprétations opposées d'un événement.
d3./d Façon dont est jouée une oeuvre dramatique ou musicale.
d4./d (Québec) Centre d'interprétation, où l'on initie le public à des phénomènes naturels ou culturels au moyen d'observations, de visites guidées, etc.
⇒INTERPRÉTATION, subst. fém.
I. A. — Vieilli. [Correspond à interpréter I] Action de traduire un texte d'une langue dans une autre; résultat de cette action. L'interprétation en français d'un texte latin (LITTRÉ; dict. XIXe et XXe s.).
B. — Fait de traduire les paroles d'un orateur ou le dialogue de deux ou plusieurs personnes. L'interprète perd toute distance à l'égard des mots prononcés par l'orateur, il a l'impression de mal entendre, et l'interprétation se fait de plus en plus transposition littérale inintelligible (D. SELESKOVITCH, L'Interprète dans les conf. internat., Paris, 1968, p. 62).
II. — P. ext. [Correspond à interpréter II]
A. — [Correspond à interpréter II A]
1. Action d'expliquer, de chercher à rendre compréhensible ce qui est dense, compliqué ou ambigu; résultat de cette action. Synon. commentaire, déchiffrage, élucidation. Interprétation d'un passage difficile; commettre une erreur d'interprétation. À force de penser à l'interprétation des Écritures et de croire qu'il en avait le don spécial, Du Guet s'était fait des illusions (SAINTE-BEUVE, Port-Royal, t. 5, 1859, p. 410). Tel de ces contresens nous livre la poésie même de Virgile plus sûrement que ne l'eût fait l'interprétation orthodoxe du texte (BREMOND, Poés. pure, 1926, p. 18) :
• 1. ... des divergences peuvent se manifester entre les interprétations poétiques d'un poème, entre les impressions et les significations ou plutôt entre les résonances que provoquent [sic], chez l'un ou chez l'autre, l'action de l'ouvrage.
VALÉRY, Variété V, 1944, p. 310.
2. Spécialement
a) ART. MILIT. Interprétation photographique. Report sur calque des renseignements fournis par des photographies aériennes, en vue de leur exploitation militaire (d'apr. Lar. Lang. fr.); lecture critique d'une photographie :
• 2. L'heure de la prise du cliché et l'orientation de la photo ont une très grande importance car l'interprétation de ce que l'on voit sur une photo d'une région inaccessible est basée sur l'étude, non seulement de la forme et de l'aspect des objets, mais en majeure partie de leur relief et de l'ombre qu'ils projettent sur le sol environnant.
A. THOUVENOT, La restitution des photographies aériennes, Paris, Chiron, 1924, p. 10.
b) DR. PUBL. Interprétation d'un décret, d'une loi. Fait de dégager le sens exact d'un texte qui serait peu clair, d'en déterminer la portée, c'est-à-dire le champ d'application temporel, spatial et juridique ainsi que l'éventuelle supériorité vis-à-vis d'autres normes (d'apr. Jur. 1974) :
• 3. ... il n'est pas toujours facile de distinguer la part réservée au pouvoir législatif et celle qui revient au pouvoir judiciaire dans l'interprétation des lois...
COURNOT, Fond. connaiss., 1851, p. 414.
c) LING. ,,Attribution d'un sens à une structure profonde (interprétation sémantique) ou attribution de traits phonologiques et phonétiques à une structure de surface (interprétation phonétique)`` (Ling. 1972).
B. — [Correspond à interpréter II B]
1. Action de donner un sens personnel, parmi d'autres possibles, à un acte, à un fait, dont l'explication n'apparaît pas de manière évidente; résultat de cette action. Synon. analyse, compréhension. Il faudrait que vous les lui ayez dites [ces paroles] déjà la veille ou l'avant-veille (...) afin de bien s'assurer (...) qu'il n'y a pas d'autre interprétation possible (BUTOR, Modif., 1957, p. 203). Des raisons moins incontestables qui tiennent aux positions théoriques de Malinowski, à son interprétation du fonctionnalisme (Traité sociol., 1968, p. 453) :
• 4. ... la mécanique et l'astronomie nous permettent, grâce à l'observation et à l'interprétation des phénomènes terrestres et célestes, d'accéder à une conception de plus en plus précise du temps...
DANJON, Cosmogr., 1948, p. 20.
SYNT. Interprétation d'un événement, d'un résultat; interprétation arbitraire, clairvoyante, cohérente, difficile, minutieuse, rationnelle; interprétation philosophique, religieuse de l'univers; interprétation marxiste de l'histoire; donner son interprétation personnelle; hésiter devant deux interprétations possibles; méconnaître les faiblesses, les finesses de l'interprétation; donner lieu, prêter à des interprétations multiples.
— En partic. Action de donner un sens allégorique, symbolique, mystique à quelque chose; résultat de cette action. Interprétation d'un songe, d'un oracle. L'interprétation des rêves joue dans la psychanalyse un rôle important (FREUD, Introd. psychanal., trad. par S. Jankélévitch, 1923, p. 488).
2. En partic. Action de déformer la réalité de quelque chose, de donner un sens le plus souvent défavorable à quelque chose; résultat de cette action. Le lendemain mercredi, grande chicane de sa part (...) tout cela sur le ton le plus agressif, et tout cela de pure interprétation (LÉAUTAUD, Journal littér., 3, 1917, p. 250) :
• 5. ... je vous demande instamment de faire en sorte que la situation ne soit pas compliquée de votre côté par des gestes qui donneraient lieu à interprétation chez les Syriens et ailleurs dans le monde.
DE GAULLE, Mém. guerre, 1959, p. 513.
— PSYCH. Attribution d'une signification déformée ou erronée à un fait réel, à un événement, à un comportement. Par contre, les idées délirantes sont plus cohérentes, plus nettes, entretenues par des hallucinations et des interprétations (CODET, Psych., 1926, p. 49).
♦ Délire d'interprétation. ,,Système délirant rigoureux, fondé sur des interprétations qui s'étendent en réseau et englobent progressivement toute la réalité que le sujet déchiffre en fonction de son délire (persécution, jalousie, grandeur)`` (PEL. Psych. 1976). Psychoses dérivées [de la paranoïa] : délire d'interprétation, délire de persécution et « folie des grandeurs », délire de revendication (MOUNIER, Traité caract., 1946, p. 32).
III. — [Correspond à interpréter III]
A. — THÉÂTRE, CIN., MUS. Action de jouer un rôle ou un morceau de musique en traduisant de manière personnelle la pensée, les intentions d'un auteur ou d'un musicien; résultat de cette action. Assister à une brillante interprétation d'Hamlet; entendre une excellente interprétation d'une fugue. Je souhaite en effet entre les deux une différence, presque une opposition de tempo radicale : toute la distance qui sépare la lenteur et l'interprétation d'un adagio de Bach du jaillissement, du bondissement schumannien (DU BOS, Journal, 1928, p. 14) :
• 6. Il n'empêche que cette lumière inaccoutumée dans laquelle la nouvelle distribution du Théâtre-Français nous montre Alceste, ne laisse pas d'être fort excitante pour l'esprit malgré les faiblesses certaines de l'interprétation.
MAURIAC, Journal 2, 1937, p. 170.
— [P. méton. du compl. déterminatif] Le Misanthrope n'était pas la pièce triste, dramatique qu'il voulait jouer (car Molière, au témoignage des contemporains, en donnait une interprétation comique et y faisait rire) (PROUST, Temps retr., 1922, p. 981). Debussy semble établir [avec ses Études pour le piano] (...) la somme des procédés techniques dont l'intelligence est nécessaire pour l'interprétation pianistique de sa musique (CORTOT, Mus. fr. piano, 1930, p. 49).
B. — BEAUX-ARTS. Action de reproduire (un modèle ou la nature) de manière personnelle, selon sa propre vision des choses. La grâce le plus souvent facile des disciples de Vinci, leurs compositions trop lourdement chargées sont fréquemment de mauvaises interprétations ou copies du Maître (GILLES DE LA TOURETTE, L. de Vinci, 1932, p. 142). La juste définition de l'art se trouvera donc entre la traduction littérale et la paraphrase éloquente, et nous dirons : l'art est l'interprétation de la nature (Ch. BLANC, Gramm. arts dessin, 1876, p. 10).
Prononc. et Orth. : [], [--]. Ac. 1694, 1718 interpretation, ensuite -pré-. Étymol. et Hist. 1. a) ca 1165 « indication de l'avenir par un songe » Par signe e par visions E par interpretacïons (BENOÎT DE STE-MAURE, Troie, 15286 ds T.-L.); 1160-74 « présage, explication (tirée d'un songe) » (WACE, Rou, éd. A. J. Holden, II, 278 : quant Rou oï du songe l'interpretation); b) 1440-75 « action d'interpréter un acte, un comportement... de lui donner un sens » ici donner interpretation à qqn de ses fautes « les lui faire connaître, les lui faire comprendre » (G. CHASTELLAIN, Chron., éd. K. de Lettenhove, III, 245); 1580 (MONTAIGNE, Essais, éd. A. Thibaudet, I, XXXI, p. 242); c) 1487 « action d'interpréter un texte dont le sens n'est pas évident » (Vocab. Lat.-fr., Genève, Loys Garbin); d) 1662 « action de prendre en bonne ou mauvaise part des paroles, une attitude » (LA ROCHEFOUCAULD, Mémoires, II ds Œuvres, éd. Gilbert et Gourdault, t. 2, p. 68); e) 1853 « façon dont une œuvre dramatique ou musicale est rendue » (DELACROIX, Journal, p. 99 : [le tableau] reste tel que l'artiste a voulu qu'il fût, tandis qu'il n'en est pas de même d'un ouvrage livré à l'interprétation, comme les ouvrages de théâtre); 2. 1326 « traduction d'un texte d'une langue à une autre » (Vie st Grégoire, 323 ds Romania t. 8, p. 519). Empr. au lat. class. interpretatio « explication; traduction » formé sur le supin interpretatum de interpretari, v. interpréter. Fréq. abs. littér. : 1 227. Fréq. rel. littér. : XIXe s. : a) 887, b) 1 024; XXe s. : a) 1 258, b) 3 156.
interprétation [ɛ̃tɛʀpʀetɑsjɔ̃] n. f.
ÉTYM. 1160, interpretacion « révélation »; du lat. interpretatio, de interpretatum, supin de interpretari. → Interpréter.
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1 a (1487). Action d'expliquer, de donner une signification claire (à un signe, un ensemble signifiant obscur); résultat de cette action. ⇒ Explication. || L'interprétation d'un texte par un commentateur, un critique. ⇒ Commentaire, exégèse, glose, métaphrase, paraphrase; herméneutique (→ Copte, cit. 1). || Donner, faire l'interprétation d'un passage difficile. ⇒ Interpréter. || Interprétation judicieuse, fondée; erronée, fausse (⇒ Contresens, sens [faux]). || Être d'avis différent, varier sur l'interprétation à donner à un texte. || Le message linguistique guide l'interprétation de l'image publicitaire (→ Ancrage, cit. 3). — Interprétation spiritualiste, mystique, anagogique, allégorique d'un texte (⇒ Spiritualisation). || La cabale, interprétation allégorique de la Bible. || S'attacher aux interprétations symboliques plus qu'à la lettre d'un texte. — Document historique d'interprétation difficile. || Interprétation des lois par la Cour de cassation. || Interprétation des conventions d'après la commune intention des parties. || Interprétation d'une clause de contrat, d'un traité (→ Incorporation, cit. 2).
1 (…) l'interprétation mystique que les rabbins mêmes donnent à l'Écriture.
Pascal, Pensées, X, 642.
2 (…) je ne me suis permis cette interprétation des premiers versets de la Genèse que dans la vue d'opérer un grand bien : ce serait de concilier à jamais la science de la nature avec celle de la théologie.
Buffon, Époques de la nature, Introd.
3 Les textes ont besoin de l'interprétation du goût : il faut les solliciter doucement jusqu'à ce qu'ils arrivent à se rapprocher et à former un ensemble où toutes les données soient heureusement fondues.
Renan, Vie de Jésus, Préface.
3.1 Mais comme il est dans la nature humaine de donner une explication à toute chose, voici comment Passepartout, soudainement illuminé, interpréta la présence permanente de Fix, et, vraiment, son interprétation était fort plausible. En effet, suivant lui, Fix n'était et ne pouvait être qu'un agent lancé sur les traces de Mr. Fogg par ses collègues (…)
J. Verne, le Tour du monde en 80 jours, p. 135.
4 Sans doute, des divergences peuvent se manifester entre les interprétations poétiques d'un poème, entre les impressions et les significations ou plutôt entre les résonances que provoque, chez l'un ou chez l'autre, l'action de l'ouvrage.
Valéry, Variété V, p. 310. 310.
♦ Interprétation d'un symbole. || Interprétation des songes, des augures, des signes. ⇒ suff. -mancie.
5 Il m'a causé aussi de l'interprétation des songes (…) à l'entendre, celui qui, pendant son sommeil, voit des cloches en branle est menacé d'un accident (…)
Huysmans, Là-bas, p. 71.
b (1573; archaïque au XIXe et déb. XXe; repris mil. XXe). Activité d'interprète; action de traduire oralement (→ Interpréter, 2., b) un énoncé oral. || Interprétation consécutive, simultanée. || Dans cette conférence, l'interprétation était assurée par des bénévoles. — Énoncés oraux donnant dans une langue différente l'équivalent d'énoncés produits dans une langue source.
2 Action de proposer, de donner une signification (aux faits, gestes, paroles de qqn); signification ainsi proposée. || L'interprétation de son acte, de son geste, de sa réaction est difficile. || L'interprétation que X donne de ce fait n'est pas la mienne. || Interprétation arbitraire (cit. 4), détournée, biaise (cit. 14), tendancieuse, frauduleuse (cit. 2). || Mauvaise, fausse interprétation. ⇒ Malentendu, mésinterprétation. || Erreur d'interprétation. || Les diverses interprétations d'un même fait (⇒ Version); d'une même phrase (→ Équivoque, cit. 4; impopulaire, cit. 2). || Mot, phrase à double sens, pouvant recevoir plusieurs interprétations. ⇒ Amphibolique, amphibologique, équivoque. || Être sujet à, susceptible de diverses interprétations. || Il ne faut pas donner à ce qu'il a dit une interprétation trop étroite, trop stricte (→ Prendre au pied de la lettre, au sérieux, sérieusement). || Donner une mauvaise interprétation, une interprétation malveillante à tout (→ Avoir l'esprit mal tourné).
6 Quelle liberté s'est-elle donnée qui pût, je ne dis pas mériter une censure, mais souffrir une mauvaise interprétation ?
Fléchier, Oraison funèbre de Marie-Thérèse.
7 La manière dont le monde des apparences s'impose à nous et dont nous tentons d'imposer au monde extérieur notre interprétation particulière, fait le drame de notre vie.
Gide, les Faux-monnayeurs, II, V.
8 « Ils parlent tous de Daniel comme d'une énigme », songeait Antoine, en traversant la place. « Et chacun me donne son interprétation personnelle… Et, bien probablement, il n'y a pas d'énigme du tout ! »
Martin du Gard, les Thibault, t. IX, p. 79.
♦ Didact. Le fait d'interpréter (des éléments observés) dans un ensemble de connaissances. || L'interprétation des phénomènes sociaux (→ Individualisme, cit. 10). || Les interprétations de la nature par la physique. || Les interprétations de la physique moderne (→ Indéterminisme, cit. 1; indéterministe, cit. 2). — L'Interprétation des rêves (titre d'un ouvrage de Freud, die Traumdeutung).
♦ Techn. || Interprétation photographique : indication des éléments pertinents d'une photographie aérienne.
3 Psychol. a Fait de conférer une valeur cognitive, perceptive (à un stimulus). || L'interprétation perceptive de la sensation. → Hallucination, cit. 1.
b (1909). || Délire d'interprétation : raisonnement qui tire des inductions et déductions erronées de faits vrais, selon les tendances du malade (délire de persécution, etc.). || Malade qui a un délire d'interprétation. ⇒ Interprétant, interprétatif. || Interprétations délirantes exogènes (fondées sur des perceptions sensorielles), endogènes (qui s'appuient sur des sensations corporelles). || Les hallucinations et les interprétations.
♦ Spécialt, psychan. « Dégagement, par l'investigation analytique, du sens latent dans le dire et les conduites d'un sujet » (Laplanche et Pontalis).
4 Inform. Analyse et exécution point par point d'un programme sans réalisation en langage machine d'un programme objet (compilation). → Interpréteur.
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II
1 (1874, in Littré, Suppl.). Manière de jouer (une œuvre dramatique, musicale). ⇒ Exécution. || Interprétation traditionnelle, classique, nouvelle. || Cette sonate est d'une interprétation difficile. || Difficultés d'interprétation. || L'interprétation d'une pièce de théâtre par les acteurs. || L'interprétation d'un rôle, d'un personnage.
9 (…) si magistrale que vous puisse paraître une actrice qui donnerait de ce rôle une interprétation très différente, ce serait une erreur d'en conclure : voici donc comme il faut le jouer. Bien au contraire, ce serait une raison pour ne pas recommencer.
Gide, Attendu que…, p. 197.
10 Certains gestes saccadés qui lui échappèrent apparurent aux plus avisés comme un effet de stylisation qui ajoutait encore à l'interprétation du chanteur.
Camus, la Peste, p. 218.
♦ Absolt. (Spectacles). Manière dont une pièce, un film… est interprété. || La mise en scène vaut mieux que l'interprétation. — Par métonymie. L'ensemble des interprètes. || L'interprétation tout entière doit être félicitée.
2 Manière dont un thème, un sujet est traité par un auteur. Par anal. (en parlant d'un peintre, d'un écrivain…). || Interprétation originale d'un thème rebattu. || « Une belle gravure (cit. 3) est plus qu'une copie; c'est une interprétation » (Gautier). || Cette traduction est une véritable interprétation personnelle. ⇒ Adaptation.
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COMP. Photo-interprétation.
Encyclopédie Universelle. 2012.