usage [ yzaʒ ] n. m. I ♦
1 ♦ (1190) Le fait d'appliquer, de faire agir (un objet, une matière), pour obtenir un effet, que cet objet, cette matière subsiste (⇒ utilisation), disparaisse (⇒ consommation) ou se modifie en se dégradant (⇒ 2. usure). ⇒aussi application; dépense, emploi, service. Connaître, ignorer l'usage d'un outil, d'un instrument. Des livres « brochés, tout écornés par l'usage » (Lacretelle). « Un usage immodéré de l'alcool et du gibier » (P. Benoit). ⇒ abus. Le bon, le mauvais usage des richesses. Condamné pour usage de faux. « Les dons des livres, comme ceux des dieux, sont funestes ou salutaires, selon l'usage qu'on en fait » (Caillois).
♢ Didact. Emploi (d'un procédé, d'une technique) par un groupe social. ⇒ utilisation. L'usage de la roue; de la boussole.
♢ (Compl. abstrait) « L'usage des nombres en arithmétique, en géométrie » (Voltaire). « Prière pour le bon usage des maladies », de Pascal. L'usage de la force.
2 ♦ Mise en activité effective (d'une faculté). ⇒ activité, exercice, fonctionnement. « On ne doit pas juger du mérite d'un homme par ses grandes qualités, mais par l'usage qu'il en sait faire » (La Rochefoucauld). — L'usage des sens : le fait de sentir, de percevoir. — « L'usage de la parole, comme celui de la main, a aidé beaucoup au développement du cerveau » (Carrel). « ne parlant déjà plus qu'avec difficulté, perdant l'usage de sa langue, depuis qu'il cessait de s'en servir » (Zola).
3 ♦ Loc. FAIRE USAGE DE : se servir de. ⇒ user (de), utiliser; employer. Faire usage de faux noms. Faire mauvais usage de qqch. ⇒ mésuser.
♢ À L'USAGE : lorsqu'on s'en sert, lorsqu'on l'utilise. « on s'aperçoit, à l'usage, que le nouveau régime crée de nouveaux abus » (Martin du Gard).
♢ D'usage (vx), en usage : qui est habituellement employé. Dispositifs encore, toujours en usage.
♢ Fam. Faire de l'usage : pouvoir être utilisé longtemps sans se détériorer. ⇒ durer.
4 ♦ (XVIIe) Le fait de pouvoir produire un effet particulier et voulu. ⇒ fonction, utilité; service. « un bizarre objet perdu dont nul ne peut dire l'usage » (Aragon). « Un canif américain composé de dix à douze lames qui servent à divers usages » (Lautréamont).
♢ HORS D'USAGE : qui ne peut plus être utilisé, fonctionner.
♢ À USAGE : destiné à être utilisé (de telle ou telle façon). Médicament à usage externe, interne. « À cinquante mètres, ils avaient fait édifier un vaste bâtiment à usage de collège » (Romains).
5 ♦ À L'USAGE (DE) : destiné à être utilisé (par). ⇒ pour. Des livres à l'usage des écoles. — Réserver qqch. à son usage personnel, pour soi. « Mieux est de façonner le mal à notre usage, et même à notre commodité » (Colette).
♢ Littér. AVOIR L'USAGE DE : pouvoir se servir de. Je n'en ai pas l'usage.
6 ♦ Le fait d'employer les éléments du langage, de les réaliser dans le discours; manière dont ils sont employés (opposé à mention). ⇒ emploi. « Le “après”, dont je fais un usage impropre et abusif » (A. Gide). Mot en usage. ⇒ usité .
♢ Mise en œuvre de l'ensemble des éléments du langage par la parole; expression verbale de la pensée dans un milieu et un temps donnés. L'usage oral, écrit, courant, populaire. « L'usage contemporain est le premier et principal objet d'un dictionnaire » (Littré). « Il n'existe pas de limites précises entre l'usage littéraire des mots et leur usage commun » (Caillois). — Le bon usage. (XVIIe) Vx Le bel usage.
♢ Absolt L'usage : l'utilisation effective ( spécialt correcte) d'une langue, à une époque donnée. « Donner des règles pour écrire, comme s'il y avait d'autres règles pour cela que l'usage » (France). — Orthographe d'usage.
II ♦ (v. 1170)
1 ♦ Pratique que l'ancienneté ou la fréquence rend normale, dans une société. ⇒ coutume, habitude, 1. mode, mœurs, us. C'est un usage ancien; bien établi, reçu. Usages qui se perdent. « cette coutume est constituée par un ensemble d'usages » (Tharaud). « il faut partout se conformer aux usages des peuples » (Gautier). Les usages d'une famille, de la bonne société (⇒ manière) . — Absolt Les usages : les comportements considérés comme les meilleurs, ou les seuls normaux dans une société. Conforme aux usages. ⇒ classique, correct, 1. courant, normal. Oublier les usages. Contraire aux usages. ⇒ inconvenant, incorrect; bizarre, excentrique.
♢ Habitude particulière (dans un groupe). « C'est un usage que les professeurs récemment nommés débutent par une première leçon de généralités » (Renan). — Dr. Règle de droit établie par une pratique ancienne. ⇒ coutume. Usages locaux, professionnels.
2 ♦ L'USAGE : ensemble des pratiques sociales. ⇒ coutume, habitude. Loc. C'est l'usage, l'usage reçu... : c'est ce qu'il convient de faire, de dire. « Les coutumes les plus absurdes, les étiquettes les plus ridicules, sont, en France et ailleurs, sous la protection de ce mot : C'est l'usage » (Chamfort). — Consacré par l'usage. « Tout ce qui est contre l'usage est contre nature » (Valéry). — D'USAGE : conforme à l'usage; habituel, normal. La formule d'usage. Comme il est d'usage. Il est d'usage d'offrir un cadeau. « Il me reste à vous présenter les observations d'usage, ajouta le notaire » (Zola).
3 ♦ Vx Pratique particulière. ⇒ habitude. « Son usage était de le laisser aller à sa fantaisie » (Diderot).
4 ♦ (XVe) Vx ou littér. Pratique habituelle (d'une activité); fréquentation habituelle (d'un milieu). Accoutumance, familiarité due à un usage suivi. « J'ai vu combien l'usage du grand monde donne d'aisance » (Beaumarchais).
5 ♦ (XVIIe) Mod. Les bonnes manières que donne l'expérience de la bonne société; respect des meilleurs usages. ⇒ civilité, éducation, politesse. « Je n'osai me risquer à prendre part au festin, dans la crainte de manquer d'usage » (Nerval).
III ♦ (1255 « usufruit ») Dr. Droit réel qui permet à son titulaire (⇒ usager) de se servir d'une chose appartenant à autrui (⇒aussi usufruit). Avoir l'usage d'un bien. ⇒ jouir. Propriété et usage.
⊗ CONTR. Désuétude, non-usage.
● usage nom masculin (de us) Fait de se servir de quelque chose : L'usage de la micro-informatique s'est largement répandu. Perdre l'usage de la parole. Fait d'employer quelque chose pour sa consommation, pour ses besoins personnels, etc. : Interdire l'usage du tabac. Destination, fonction de quelque chose, emploi qu'on peut en faire : Un couteau à divers usages. Des locaux à usage commercial. Pratique habituellement observée dans un groupe, dans une société ; coutume : Aller contre l'usage établi. Littéraire. Civilité, politesse : Manquer d'usage. Histoire Règle juridique fondée sur une pratique ancienne. Linguistique Ensemble des règles et des interdits, en matière grammaticale, phonétique et lexicale, qui caractérisent la langue utilisée par le plus grand nombre de locuteurs à un moment donné et dans un milieu social donné. ● usage (citations) nom masculin (de us) Jean Dutourd Paris 1920 Académie française, 1978 Tout usage finit par se changer en abus. Le Fond et la forme Gallimard Jean de La Fontaine Château-Thierry 1621-Paris 1695 Jean Lapin allégua la coutume et l'usage […]. Fables, le Chat, la Belette et le Petit Lapin ● usage (expressions) nom masculin (de us) À l'usage, par l'expérience qu'on a de l'emploi de quelque chose. À l'usage de quelqu'un, d'un groupe, à son intention ; destiné à : Des informations à l'usage des écoles. Avoir l'usage de quelque chose, pouvoir l'utiliser : Ils ont l'usage du jardin contigu. D'usage, d'un emploi habituel : Formules d'usage. Faire de l'usage, durer longtemps, être résistant. Faire usage de quelque chose, l'utiliser, l'employer. Hors d'usage, dont on ne peut plus se servir ; détérioré, usé. Droit d'usage, ou usage, droit réel, incessible et insaisissable, de se servir d'une chose appartenant à autrui et d'en prélever la portion de fruits nécessaire à ses besoins et à ceux de sa famille. Prêt à usage, synonyme de commodat. Usage de faux, utilisation, avec une intention de nuire, d'une pièce fausse ou falsifiée pouvant éventuellement causer un préjudice. Bon usage, ensemble des prescriptions langagières constituant un modèle socioculturel. (Il peut être emprunté à la pratique des couches dirigeantes [Vaugelas] ou à l'autorité de certains écrivains [Grévisse].) Dictionnaire d'usage, dictionnaire unilingue dont la nomenclature correspond au lexique commun à tous les groupes sociaux de la communauté linguistique à laquelle il est destiné. ● usage (synonymes) nom masculin (de us) Fait de se servir de quelque chose
Synonymes :
- emploi
Destination, fonction de quelque chose, emploi qu'on peut en faire
Synonymes :
- rôle
- service
Pratique habituellement observée dans un groupe, dans une société ; coutume
Synonymes :
- coutume
- rite
Littéraire. Civilité, politesse
Synonymes :
- éducation
- tact
- urbanité
Droit. Prêt à usage
Synonymes :
- commodat
usage
n. m.
rI./r
d1./d Fait d'utiliser, de se servir de (un objet, un procédé, une faculté). L'usage de cet outil, de ce produit remonte à telle époque. Faire bon usage de son pouvoir.
— C'est un tissu qui vous fera de l'usage, que vous garderez longtemps. Syn. emploi, utilisation.
d2./d Possibilité d'utiliser. Perdre l'usage de l'ouïe.
|| Loc. Hors d'usage: qui ne fonctionne plus, usé au point de ne plus être utilisable.
d3./d à l'usage de: destiné spécialement à. Projecteur à l'usage des chirurgiens.
d4./d Mise en oeuvre effective de la langue dans le discours. Faire un usage fréquent d'une expression. L'usage écrit, oral.
|| (S. comp.) L'usage: la manière dont, à une époque et dans un milieu social donnés, se réalisent dans le discours les structures d'une langue. Grammaire et usage.
— Le bon usage: l'usage considéré comme correct par référence à une norme socioculturelle donnée. (V. Grevisse.)
rII./r Habitude traditionnelle, coutume. Ne pas connaître les usages d'un pays étranger.
|| Les usages: l'ensemble des façons d'agir, de se conduire, considérées comme correctes dans une société. Contraire aux usages.
|| L'usage: ce qui se fait habituellement, la coutume. Il est d'usage de... Politesses d'usage.
rIII/r DR Droit qui permet de se servir d'une chose sans en être le propriétaire. Usages forestiers.
⇒USAGE, subst. masc.
A. — 1. Pratique, manière d'agir ancienne et fréquente, ne comportant pas d'impératif moral, qui est habituellement et normalement observée par les membres d'une société déterminée, d'un groupe social donné. Synon. coutume, habitude, tradition, us. Usage confirmé, consacré, établi, respectable, solennel. Je remarque en passant que cet usage d'une place et d'un siège particuliers pour la maîtresse de la maison est déjà fort ancien; le bon ton, la politesse même lui font une loi de ne l'offrir à aucune autre femme, quels que soient son rang et sa qualité (JOUY, Hermite, t. 4, 1813, p. 315). Pendant six mois, il me fut interdit de parler au mess. Usage excellent: nous apprenions ainsi à connaître l'humilité de notre condition et le respect dû à nos anciens (MAUROIS, Sil. Bramble, 1918, p. 142).
— DR. ,,Règle de droit établie par une pratique ancienne et constante`` (CAP. 1936). Les parties sont libres d'écarter d'un commun accord l'application des usages aussi bien de fait que de droit (RÉAU-ROND. 1951).
♦ Usages commerciaux. Règles pratiquées ordinairement dans les négociations commerciales ou par support à ces négociations (d'apr. BARR. 1974). Usages locaux. Règles établies, dans certains lieux, pour l'exécution des conventions et qui, sans avoir été déterminées par la loi, sont adoptées par tout le monde (d'apr. BARR. 1974).
2. a) L'usage. L'ensemble des règles et des pratiques qui régissent les rapports sociaux et qui sont les plus couramment observées. Il aimait et respectait sa mère. Il l'aimait plus encore par devoir que par inclination et son respect tenait plus de l'usage que du sentiment (A. FRANCE, Révolte anges, 1914, p. 317).
♦ L'usage du monde. L'ensemble des pratiquessociales qui ont cours dans la bonne société. Toutes deux sont pétillantes d'esprit; mais l'esprit de madame de Vertpré est complété par l'usage du monde, qui manque à Pauline (DUMAS père, Mari Veuve, 1832, 2, p. 246). Avoir l'usage du monde. Martial avait trop l'usage du monde, trop de finesse et de calcul pour s'exposer à rompre avec une femme si bien en cour (BALZAC, Paix mén., 1830, p. 337).
♦ C'est l'usage. C'est ce qui est conforme aux pratiques sociales; c'est ce qu'il convient de dire, ou de faire. Théodore (...) portait un habit bleu, « comme si l'on ne pouvait pas trouver un habit noir, puisque c'est l'usage, que diable! » (FLAUB., Mme Bovary, t. 2, 1857, p. 196). L'excessive froideur que lui témoigna Jeanne (...) l'avertit qu'il avait commis une maladresse. Pour la réparer, il s'empressa, comme c'est l'usage, d'en commettre une seconde (FEUILLET, Paris., 1881, pp. 99-100).
♦ D'usage. Conforme aux conventions, habituel, normal. Cérémonie, compliment, formalités, observations, plaisanteries d'usage. [Bénédict] ne lui adressait plus une seule de ces politesses d'usage qui rappellent à chaque instant les conventions (SAND, Valentine, 1832, p. 123). Il ne savait pas s'il devait dire Monsieur ou Docteur ou employer quelque autre formule d'usage et de respect (ARNOUX, Rêv. policier amat., 1945, p. 112).
b) Habitude, pratique établie, propre à un groupe, à un individu. Voués par choix à un régime austère, ils placèrent la gourmandise parmi les péchés capitaux (...) et attaquèrent surtout l'usage de manger sur des lits, usage qui leur parut le résultat d'une mollesse coupable (BRILLAT-SAV., Physiol. goût, 1825, p. 271). Selon l'usage de. Je dormais donc, selon mon usage, Sur un banc du jardin d'ombrages entouré (DUMAS père, Hamlet, 1848, I, 2, p. 185). Criant fort, exprès, de leurs grasses voix paysannes en se donnant des claques sur l'épaule, selon l'usage des bouviers et des maquignons (BERNANOS, Joie, 1929, p. 684).
c) Pratique habituelle d'une activité; habitude de pratiquer une activité. L'usage exclusif d'écrire en latin sur les sciences, sur la philosophie, sur la jurisprudence (...) céda peu à peu la place à celui d'employer la langue usuelle de chaque pays (CONDORCET, Esq. tabl. hist., 1794, p. 138). Le hasard (...) avait placé dans un emploi éminent un homme ayant l'usage d'écrire (CHATEAUBR., Congrès Vérone, t. 1, 1838, p. 360).
3. a) Les usages. Les habitudes, les comportements qu'il convient de respecter, qui ne doivent pas être transgressés. Se conformer aux usages; connaître, oublier les usages. Il avait une façon d'enlever son chapeau et de laisser retomber le bras, qui semblait dire: « Ce n'est pas particulièrement pour vous que je me découvre; c'est parce que je tiens aux usages de la politesse » (MARTIN DU G., Thib., Cah. gr., 1922, p. 628). Obligé d'habiter cette ville (...) j'ai tout fait pour me conformer aux usages de la province (J. BOUSQUET, Trad. du sil., 1936, p. 148).
b) Ensemble des bonnes manières qui caractérisent le savoir-vivre; ensemble des règles de civilité, de bienséance observées dans une société policée. Un grand écrivain sans usage s'entrave dans sa gloire comme dans un sabre (MAURIAC, Journal 2, 1937, p. 183).
— Avoir de l'usage. Être bien élevé. Tous les enfants élevés par leurs mères ont de l'usage et du savoir-vivre, deux acquisitions qui suppléent à l'esprit naturel (BALZAC, Mém. jeunes mariées, 1842, p. 357).
B. — 1. a) Fait de se servir de quelque chose, d'appliquer un procédé, une technique, de faire agir un objet, une matière selon leur nature, leur fonction propre afin d'obtenir un effet qui permette de satisfaire un besoin. Synon. emploi, utilisation. Par suite des usages auxquels on destine les métaux étamés, on exige du recouvrement des qualités de fini que l'on ne demande pas aux autres dépôts (GASNIER, Dépôts métall., 1927, p. 53):
• 1. Il ne devait pas être (...) facile de manger proprement quand on mangeait couché (...) on se servait des doigts, ou tout au plus du couteau, pour porter les morceaux à la bouche, car l'usage des fourchettes est moderne; on n'en a point trouvé dans les ruines d'Herculanum...
BRILLAT-SAV., Physiol. goût, 1825, p. 270.
— [Le compl. du nom désigne qqc. de gén., d'abstr.] Il est sans doute un moyen d'échapper à la confusion. C'est — négligeant l'usage vulgaire de l'argument, et l'appel qu'il fait à toute sorte d'opinions vagues — d'en revenir à notre terreur (PAULHAN, Fleurs Tarbes, 1941, p. 90). Le civilisé a (...) fait un usage croissant de l'abstraction (HUYGHE, Dialog. avec visible, 1955, p. 29). Rare. [Le compl. du nom désigne qqn] [Philippe IV] lui accorda [à Velasquez] l'usage gratuit du médecin et du chirurgien de la cour (GAUTIER, Guide Louvre, 1872, p. 263).
— DR. COMM. Droit d'usage. Droit réel permettant à une personne de se servir de la chose d'autrui et d'en percevoir la portion de fruits nécessaire à ses besoins et à ceux de sa famille (d'apr. CAP. 1936). Son droit d'usage ou d'habitation est réglé par les conditions les plus variables, qui créent les rapports de propriété les plus complexes et les plus instables (JAURÈS, Ét. soc., 1901, p. 166).
— En partic. Fait d'utiliser quelque chose pour sa consommation, pour ses besoins. Synon. consommation. Usage du beurre, du café, de la viande; usage de la cocaïne, de la drogue, du haschisch, de stupéfiants. Vous avez peut-être, madame, les artères du cerveau en tuyau de pipe. La Dame: Ciel! En tuyau de pipe! L'usage du tabac, docteur, y serait-il pour quelque chose? Je prise un peu (ROMAINS, Knock, 1923, II, 5, p. 13):
• 2. ... je crois m'apercevoir que le changement qui s'est fait en moi a été beaucoup avancé par l'usage journalier du thé et du vin. Je pense que (...) les buveurs d'eau conservent bien plus long-temps la délicatesse des sensations, et en quelque sorte, leur permière candeur. L'usage des stimulans vieillit nos organes.
SENANCOUR, Obermann, t. 2, 1840, p. 92.
b) Fait de se servir d'un organe, d'un membre; fait de mettre en action, en activité une fonction physique ou intellectuelle. Avoir, perdre, reprendre, retrouver l'usage de l'esprit, du libre arbitre, de la raison, de ses facultés, des jambes, des yeux. Une conscience bourrelée et l'effroi involontaire inspiré par un crime à ceux qui le commettent lui avaient ôté l'usage de la réflexion (BALZAC, Gobseck, 1830, p. 435). Le climat de l'Angleterre (...) a renouvelé toutes mes blessures au point de me priver entièrement de l'usage d'un bras (VIGNY, Serv. et grand. milit., 1835, p. 147).
♦ L'usage des sens. Le fait d'avoir des sensations olfactives, gustatives, visuelles. J'avais perdu en un moment l'usage de mes sens, toutes mes facultés, la possession de moi-même, la raison, à cause d'une femme (A. FRANCE, Vie fleur, 1922, p. 527). Je reprends difficilement l'usage de mes sens. Mes yeux me pèsent (...). Quelque part, très loin de moi, les choses de la vie s'agitent (J. BOUSQUET, Trad. du sil., 1936, p. 63).
2. Utilisation, emploi de quelque chose; possibilité de se servir de quelque chose. L'usage des baïonnettes est une atrocité (ROBESP., Discours, Subsist., t. 9, 1792, p. 111). Il fourrait, après usage, sa serviette dans la ceinture de son pantalon (BARBUSSE, Feu, 1916, p. 146).
— Faire usage de qqc. Utiliser, employer. Synon. se servir de. Faire usage de la force, de son (bon) droit, de son autorité; faire usage de fausses pièces, de faux noms; faire usage de faux. (Il s'assied et ouvre le livre) Il n'en avait pas fait grand usage, ce me semble (...) Les feuilles sont collées les unes aux autres (DUMAS père, Margot, 1845, III, 8e tabl., 7, p. 116). Les gendarmes avaient dû faire usage de leurs armes (CAMUS, Peste, 1947, p. 1308).
♦ Faire bon, mauvais usage de qqc. Se servir de quelque chose de manière efficace, conforme ou non; utiliser, employer quelque chose à de bonnes fins ou à des fins condamnables. Les dangers de la systématisation ont été souvent mis en lumière (...) C'est un risque inhérent au système (...) que d'en faire mauvais usage, c'est-à-dire de ne pas tenir compte de tous les faits ou de les violenter pour faire entrer de force dans la construction ceux qui ne s'y plieraient pas volontiers (LACROIX, Marxisme, existent., personn., 1949, p. 57).
— Mettre en usage. Se servir de quelque chose, mettre en action un procédé, quelque chose afin d'obtenir un résultat déterminé. Synon. employer, mettre en œuvre, utiliser. Mettre tout en usage pour. La jeune coquette avait beau s'éventer gracieusement, sourire à des jeunes gens qui la saluaient et mettre en usage les ruses dont se sert une femme pour cacher son émotion, la douairière (...) savait lire dans son cœur et dans sa pensée (BALZAC, Paix mén., 1830, p. 332).
— À l'usage. Lors de l'utilisation, de l'emploi (de quelque chose). Je verrais vite, à l'usage, qu'elle s'essouffle, ainsi que mon corps, beaucoup plus vite (GIDE, Journal, 1944, p. 260).
— Faire beaucoup d'usage, faire de l'usage. Pouvoir être utilisé longtemps. Synon. durer. Chaussures, vêtements qui font de l'usage. P. plaisant. [À propos de qqn] L'insolent trépas de mon père avait désobligé les Schweitzer (...) Pour n'avoir su ni le prévoir ni le prévenir, ma mère fut réputée coupable: elle avait pris, à l'étourdie, un mari qui n'avait pas fait d'usage (SARTRE, Mots, 1964, p. 9).
— En usage, d'usage. Habituellement employé, couramment utilisé. Être encore en usage; sorti d'usage, de l'usage. Il existe encore un code de la morale et un répertoire des valeurs morales, restés en usage dans la bourgeoisie même (AYMÉ, Confort, 1949, p. 62).
— Hors d'usage. [En parlant de qqc.] Qui ne peut plus être utilisé du fait de sa vétusté; qui ne peut plus produire l'effet attendu; qui ne fonctionne plus. Synon. désuet, obsolète, usé. Machine, pièce, ustensile hors d'usage. Des berlines hors d'usage traînaient (ZOLA, Germinal, 1885, p. 1239). P. plaisant. [À propos de qqn] Se sentir hors d'usage pour cette grande action qui va s'engager; d'intelligence non tant diminuée peut-être qu'alentie (GIDE, Journal, 1943, p. 225).
— À usage + adj., à usage de + subst. Destiné à être utilisé de façon précise, spécifique. Médicament à usage interne, externe; locaux à usage commercial, à usage d'habitation. L'agencement [de l'école maternelle] apparaît impropre à l'usage domestique, à la vie ordinaire: dans l'air, dans l'odeur, la couleur (...) il y a une incrustation de discipline (FRAPIÉ, Maternelle, 1904, p. 40). Lorsque j'aperçois sur un flacon pharmaceutique la mention « poison » ou « réservé à l'usage externe » (...) je songe (...) à notre première tentative d'assassinat (BAZIN, Vipère, 1948, p. 185).
— Avoir l'usage de qqn/qqc. Avoir la possibilité, le loisir d'utiliser quelque chose, de disposer de quelque chose; bénéficier des services de quelqu'un. Il m'est resté l'usage de la chambrière (COLETTE, Képi, 1943, p. 196). Ils avaient l'usage de la cuisine (...) et ils pouvaient s'y tenir toute la journée (TRIOLET, Prem. accroc, 1945, p. 210).
— À, pour l'usage de. Destiné à être utilisé par une personne ou par une catégorie de personnes; qui est fait spécifiquement à l'intention d'une personne ou d'une catégorie de personnes. La soie était exclusivement réservée aux princes et aux personnages de la plus haute distinction; le camelot et la bure étaient à l'usage de la bourgeoisie et du peuple (JOUY, Hermite, t. 4, 1813, p. 257). Et comme Gabriel et Gridoux s'esclaffaient, elle ajouta pour leur usage et agrément: — C'en est encore une que j'ai trouvée dans les Mémoires du général Vermot (QUENEAU, Zazie, 1959, p. 231).
C. — Dans le domaine du lang.
1. Fait de réaliser dans le discours, par la parole les éléments du langage. Faire usage d'une expression, d'une locution, d'un mot; expression, mot sorti(e) de l'usage, hors d'usage. Le mot aujourd'hui en usage est assez récent [charcutier], et récent aussi le verbe charcuter, qui n'a pu être fait qu'à un moment où ses éléments n'avaient plus de sens direct (GOURMONT, Esthét. lang. fr., 1899, p. 145).
2. (Mise en œuvre de l')ensemble des règles qui caractérisent la langue effectivement pratiquée par la majorité des usagers d'une communauté linguistique, correspondant à un groupe social donné et à un moment déterminé. Usage écrit, oral; usage ancien, contemporain; usage courant, familier, littéraire, populaire, soutenu.
♦ Le bon usage. Ensemble des prescriptions constituant un modèle socioculturel. Homme d'honneur, parole d'honneur, affaire d'honneur, ce sont là des locutions à demi-mortes et dont on ne voit pas facilement par quoi la langue de l'usage actuel les remplace. J'entends: la langue de l'usage actuel vrai, car il faut avouer que ce que nous nommons entre nous le bon usage, n'est guère, hélas, qu'une conception de notre Académie (VALÉRY, Variété IV, 1938, p. 170).
♦ Orthographe d'usage. V. orthographe A 2.
♦ Vx. Le bel usage. Usage qui présente les qualités esthétiques à la mode. Souvent (...) je me suis servi du mot propre. Rien ne choque davantage le bel usage du dix-neuvième siècle (STENDHAL, Prom. ds Rome, t. 1, 1829, p. 40).
♦ L'usage. L'utilisation effective du langage. L'usage est le maître de la langue. L'Académie a le Dictionnaire de l'usage qui comprend les termes et acceptions légitimes qui ont cours et vogue depuis deux siècles et de nos jours (SAINTE-BEUVE, Nouv. lundis, t. 5, 1863, p. 245).
Prononc. et Orth.:[]. Att. ds Ac. dep. 1694. Étymol. et Hist. A. 1. a) 1155 « pratique généralement reçue, coutume » (WACE, Brut, éd. I. Arnold, 6385); b) 1261 usaiges de Borgoingne (Charte ds Hist. génér. et part. de Bourg., II, XXVI, éd. 1739 ds GDF.); c) 1601 (CHARRON, Sagesse, p. 523: selon l'usage du monde); d) 1654 l'usage de la Cour (GUEZ DE BALZAC, Dissertations chrét. et mor., p. 302); 2. a) 1re moit. XIIIe s. « manière d'être (d'une personne) » (Audefroid le Bastard, éd. A. Cullmann, XIII, 9); b) 1360 (Arch. Nord, B 10285 fol. 4: Se femme et se fille avoient usage de prendre pain et farine au fil Hanciniaul). B. 1. a) Fin XIIe s. « emploi de quelque chose, fait de se servir de quelque chose » (Sermons St Bernard, éd. W. Foerster, 60, 38); b) 1547 « fonction particulière » (J. MARTIN, Arch. Vitruve, p. 6 v°: il faut accomoder le bastiment a l'usage); 2. 1370 avoir usage de raison (ORESME, Ethiques, éd. A. D. Menut, p. 183); 3. 1538 hors d'usage (EST., s.v. aboleo); 4. a) 1370 (ORESME, op. cit., p. 146: en latin « mos » c'est coutume et « moralis » c'est moral; mais en françois ces mos « meur » et « moral » ne sont pas en usage commun); b) 1549 (DU BELLAY, Deffence et illustration, éd. H. Chamard, p. 35: commun usaige de parler; p. 143: le moderé usaige de telz vocables); c) 1579 (H. ESTIENNE, Precellence, éd. E. Huguet, p. 190: appliquer une particule latine à divers usages; p. 168: [vocables] qui toutefois ne sont en usage qu'en certains endroits de la France [...] l'usage des dialectes); d) 1652 (GUEZ DE BALZAC, Socrate Chrestien, p. 247: le bon usage ne l'a point receû [le mot sectaire]). C. 1. a) Ca 1245 usages « impôts, redevances » (PHILIPPE MOUSKET, Chron., éd. Reiffenberg, 2530); b) 1338 « usufruit » (26 av., Arch. Montjeu ds GDF.); 2. 1316-28 droit d'usage (Ovide Moralisé, éd. C. de Boer, t. 2, p. 325). Dér. du lat. usus (v. us); suff. -age; cf. lat. médiév. usagium (XIIe s. ds LATHAM) et usaticus (Xe s., ibid.). Fréq. abs. littér.:7 079. Fréq. rel. littér.:XIXe s.: a) 16 559, b) 7 660; XXe s.: a) 6 523, b) 7 947. Bbg. KLINKENBERG (J.-M.). Les Niveaux de lang. et le filtre du « bon usage ». Fr. mod. 1982, t. 50, pp. 52-61.
usage [yzaʒ] n. m.
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1 (1190). a Le fait d'appliquer, de faire agir (un objet, une matière), pour obtenir un effet qui satisfasse un besoin, que cet objet, cette matière subsiste (⇒ Utilisation), disparaisse (⇒ Consommation) ou se modifie (⇒ Usure). ⇒ aussi Application; dépense, emploi, service. || La possession fonde, permet l'usage. — L'usage d'un outil, d'un instrument (cit. 1). || L'usage de qqch. par qqn. || Choses qui résistent à un usage prolongé (→ Consomptible, cit.). || Livres écornés (cit. 3) par l'usage. — L'usage de la poudre de riz (→ Maquillage, cit. 1), d'un parfum (cit. 13). || L'usage des masques (1. Masque, cit. 1). — Un usage abusif, immodéré (cit. 5), intempérant (cit. 1), excessif (d'un produit, d'un aliment, d'un remède…). ⇒ Abus, excès. || Le bon, le mauvais usage des richesses (cit. 3). || L'usage de faux (cit. 56).
1 Ma lampe, ce n'est pas seulement cette ampoule électrique, cet abat-jour, ce support de fer forgé : c'est une certaine puissance d'éclairer ce bureau (…) elle est animée, colorée, définie par l'usage que j'en fais; elle est cet usage et n'existe que par là.
Sartre, l'Être et le Néant, p. 680.
♦ Didact. Emploi (d'un procédé, d'une technique par un groupe social). ⇒ Utilisation. || L'usage de la roue; de la boussole (→ 1. Manœuvre, cit. 1). || Avant l'usage de l'artillerie (→ Fortification, cit. 1).
♦ (Avec un compl. abstrait). || L'usage que nous faisons d'une notion (→ Néant, cit. 1). || L'usage que l'analyse mathématique fait de l'algèbre (→ Inconnu, cit. 7.1). || L'usage des nombres (cit. 1). — L'usage d'une facilité, d'une possibilité, le fait d'en profiter. || Le bon, le mauvais usage de… || Prière pour le bon usage des maladies, de Pascal. — L'usage de la force. — Rare (avec l'article indéfini). || Un usage désordonné de parties lyriques, orchestrales (→ Opéra, cit. 3). ⇒ Utilisation. — Compl. n. de personne :
2 Que le commerce des belles nous les rend bientôt moins nécessaires; au lieu que l'usage des médecins finit par nous les rendre indispensables.
Beaumarchais, le Barbier de Séville, « Lettre sur la critique ».
b Mise en activité effective (d'une faculté, d'une fonction physique ou mentale). ⇒ Activité, exercice, fonctionnement. || L'usage de l'esprit (→ Égarer, cit. 17), de la raison (→ Héros, cit. 9). || Le bon usage des facultés (→ Positif, cit. 2). || L'usage des qualités (→ Mérite, cit. 8), des dons… || L'usage du libre arbitre (→ Humilité, cit. 2). — L'usage de la bonté divine, son exercice (→ Infini, cit. 4). — L'usage des sens (cit. 16) : le fait de sentir, de percevoir. || Perdre, reprendre, retrouver l'usage des sens (→ Proférer, cit. 1). || L'usage des yeux (chez l'enfant). → Retard, cit. 4. || Le défaut d'usage (d'un organe, cit. 8). — L'usage de la parole (→ Langage, cit. 3).
3 (…) ces jours-là, il se soulageait de ce qu'il renfonçait en lui, il en disait, il en disait, à étourdir son compagnon, ne parlant déjà plus qu'avec difficulté, perdant l'usage de sa langue, depuis qu'il cessait de s'en servir.
Zola, la Terre, V, II.
c ☑ (XVIIe). Sens concret ou abstrait. Faire usage de : se servir de… ⇒ User (de), utiliser; consommer, employer, servir (se servir de…). || Faire usage d'une pièce fausse, de faux noms (→ Escroquer, cit. 4). || Faire usage de tous les moyens à sa disposition. || Faire mauvais usage de qqch. ⇒ Mésuser. — ☑ Vx. Mettre en usage : se servir effectivement de…, faire agir, faire fonctionner en vue d'un certain résultat. ⇒ Utiliser. || Mettre son pouvoir en usage (⇒ Exercer). || Mise en usage (⇒ Exercice). — ☑ À l'usage : lorsqu'on s'en sert, lorsqu'on l'utilise (→ Rattacher, cit.). || À l'usage, ce procédé s'est révélé excellent, mal adapté. — D'usage (vx), en usage : qui est encore employé. || Dispositifs (cit. 3) encore en usage.
4 Vous voyez (…) les adroites complaisances qu'il m'a fallu mettre en usage pour m'introduire à son service (…)
Molière, l'Avare, I, 1.
5 On se monte le coup, on se hâte de détruire, de remplacer; et on s'aperçoit, à l'usage, que le nouveau régime crée de nouveaux abus (…)
Martin du Gard, les Thibault, t. V, p. 224.
♦ ☑ Absolt, fam. Faire de l'usage : pouvoir être utilisé longtemps sans se détériorer. ⇒ Durer.
2 (XVIIe). Le fait de pouvoir produire un effet particulier et voulu. ⇒ Fonction, utilité; service. || Toutes les poches (1. Poche, cit. 4) ont un usage précis. || Détourner un objet de son usage (→ Pervertir, cit. 5). || Ne pas connaître l'usage d'un outil (→ Figure, cit. 3). || Objet approprié ou non à un usage. ⇒ Commode, incommode. || Servir à divers usages (→ Lame, cit. 4).
6 Tu m'as trouvé comme un caillou que l'on ramasse sur la plage
Comme un bizarre objet perdu dont nul ne peut dire l'usage.
Aragon, le Roman inachevé, p. 174.
♦ Vx. ⇒ Destination, fonction. || L'usage de la rate (2. Rate, cit. 1) est de…
♦ ☑ (1538). Hors d'usage : qui ne peut plus être mis en œuvre, fonctionner, produire son effet (→ Mutilation, cit. 2; réticule, cit.). — Valeur d'usage (→ Pire, cit. 11, par métaphore) : valeur, quant à l'usage qu'on peut en faire.
♦ À usage (de) : destiné à être utilisé (de telle ou telle façon). || Médicament à usage externe, interne. || Employer « à des usages presque domestiques ce qui est destiné pour les pharmaceutiques » (cit. 1). || Locaux à usage d'habitation (cit. 4). || Il gardait (cit. 70), à cet usage, un canif. || Véhicule à usage général (dans l'armée). ⇒ Jeep.
7 À cinquante mètres, ils avaient fait édifier un vaste bâtiment à usage de collège.
J. Romains, les Hommes de bonne volonté, t. V, IX, p. 74.
3 Littér. Le fait de pouvoir se servir (d'une chose). ⇒ Disposition. || Avoir l'usage d'une chose : savoir l'utiliser; en avoir la pratique, ou encore, avoir l'occasion de s'en servir. ⇒ Connaître (I., 2. : s'y connaître).
♦ (1928, Martin du Gard). Cour. || À l'usage de… : destiné à être utilisé par… ⇒ Pour. || Des livres à l'usage des pensionnats (cit.), à l'usage du Dauphin (cf. Ad usum Delphini). || Une vertu… qui n'est pas à mon usage (→ Pardon, cit. 2). — Réserver à son usage personnel, pour soi (→ Rez-de-chaussée, cit. 2).
8 Ce monde, ouvrage de ses mains (de Dieu),
N'est point bâti pour son usage,
Car il l'a fait pour les humains.
Théophile de Viau, À M. de Boquiguant.
9 Les fabricants ont arrangé
Pour notre usage, les objets
Usuels — Les objets aimés (…)
Léon-Paul Fargue, Poèmes, « Chanson ».
10 Que le mal nous façonne, il faut bien l'accepter. Mieux est de façonner le mal à notre usage, et même à notre commodité.
Colette, l'Étoile Vesper, p. 10.
4 a Le fait d'employer les éléments du langage, de les réaliser dans le discours, par la parole; manière dont ils sont employés. ⇒ Emploi. — (Avec le verbe faire). || Faire usage d'un mot (→ Dictionnaire, cit. 4, Voltaire), d'une expression, d'une locution, d'un tour… || Faire un usage impropre et abusif (cit. 1) de… || « L'Académie ne prétend pas régler l'usage de chaque mot, elle indique l'usage qu'on en fait » (Académie). — En usage. || Mot, tour en usage à une époque donnée, dans un milieu donné. ⇒ Usité; usuel. || Remettre en usage les antiques vocables (→ Langue, cit. 32). — (Avec de…). || Être sorti de l'usage, hors d'usage. || Mot hors d'usage (→ Insomniaque, cit. 1). ⇒ Désuet, obsolète, vieux.
11 De tous vocables, quels qu'ils soient, en usage ou hors d'usage (…)
Ronsard, Œuvres en prose, L'art poétique, Pl., t. II, p. 1011.
b Mise en œuvre de l'ensemble des éléments du langage par la parole; expression verbale de la pensée dans un milieu et un temps donnés (par oppos. aux possibilités abstraites, définies comme la langue, et aux instances sociales théoriques, normes, règles…). || L'usage oral (→ Patois, cit. 2), écrit; l'usage contemporain (→ Archaïsme, cit. 1), ancien; courant (→ Ponctuation, cit. 1), populaire (cit. 4); littéraire, soutenu. || « L'usage contemporain est le premier et principal objet d'un dictionnaire » (cit. 6, Littré). || Le Bon Usage (celui des bons écrivains), titre de la grammaire française de Maurice Grevisse. — Vx. || Le bel usage, celui qui est considéré comme esthétiquement satisfaisant (→ 1. Jargon, cit. 5).
12 Si l'on considère l'ensemble et la connexion de ces éléments, on reconnaît qu'ils donnent précisément l'idée d'un dictionnaire qui, usant de la part d'histoire inhérente à toute langue, montre quels sont les fondements et les conditions de l'usage présent, et par là permet de le juger, de le rectifier, de l'assurer.
Littré, Dict., Préface, p. V.
13 Du moment que l'on considère une langue comme vivante, l'usage ancien de cette langue peut servir à en expliquer l'usage moderne : il ne peut servir à le justifier ou à l'entraver.
c Absolt. || L'usage : l'utilisation effective (spécialt, normale, correcte) du langage (dans une langue, à une époque donnée, par tous les hommes qui la parlent). || L'usage a été appelé « le père des langues » (Bossuet), « le tyran des langues vivantes » (Caillères), « le maître absolu des langues » (d'Olivet). || L'« empire despotique » de l'usage (La Bruyère, XIV, 73). || L'usage, seule règle pour écrire (→ Cuistre, cit. 3). || Un dictionnaire (cit. 8) de l'usage. || Extension que l'usage donne à un mot (→ Hiérarchie, cit. 5).
14 L'usage n'est pas aussi peu fondé en raison qu'ils le prétendent; il s'établit d'après ce qu'on sent, et le sentiment est bien plus sûr que les règles des grammairiens (…)
♦ Orthographe d'usage.
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II (V. 1170).
1 Pratique que l'ancienneté ou la fréquence rend normale, courante, dans une société donnée. ⇒ Coutume, habitude, mode, mœurs, us. || Un usage ancien, immémorial (→ Eunuque, cit. 3); bien établi, reçu. || Le deuil (cit. 8) n'est ni un usage ni une loi, c'est une institution. || Un code d'usages consacrés (→ Police, cit. 13). || Confirmer un usage. || Cet usage n'a plus cours. || Usages qui se perdent. || Les usages sont bouleversés (→ Exister, cit. 10). || « Je viens, selon l'usage antique et solennel » (cit. 1, Racine). || Suivant l'usage du pays… || Les usages d'une famille (→ Manquer, cit. 40), des régiments (cit. 2), de la cour (→ Fait, cit. 41), de la bonne société (⇒ Manière). — Absolt. || Les usages : les habitudes, les comportements considérés comme les meilleurs, ou les seuls normaux dans une société. || Conforme aux usages. ⇒ Classique, correct, courant, normal. || Oublier les usages (→ Prison, cit. 5). || Contraire aux usages. ⇒ Inconvenant, incorrect; bizarre, excentrique. || Hostile aux usages. ⇒ Anticonformiste, non-conformiste.
15 Mais il faut partout se conformer aux usages des peuples : ôter son bonnet sous la porte Spasskoï et ses bottes au seuil de la Solimanieh ou de Sainte-Sophie.
Th. Gautier, Voyage en Russie, XVII.
16 Mais cette coutume est constituée par un ensemble d'usages, d'une complexité si grande, d'un formalisme si étroit, d'une application si difficile dans son menu détail, qu'au lieu d'être un principe d'ordre, elle devient une source de désordre.
Jérôme et Jean Tharaud, Marrakech…, II.
♦ Habitude particulière (dans un groupe). — L'usage du bain (cit. 3). — C'est un usage que…, avec le subj. (→ Amphithéâtre, cit. 4), c'est l'usage de…, suivi de l'inf. (→ Bouillon, cit. 8; 1. dire, cit. 38). || Être dans l'usage de… (→ Inceste, cit. 3). — L'usage selon lequel…, en vertu duquel (→ Religionnaire, cit.). — S'autoriser d'un usage (⇒ Précédent).
♦ Dr. Règle de droit établie par une pratique ancienne. ⇒ Coutume. || Usages locaux, professionnels, commerciaux. || Constatation d'un usage. ⇒ Parère. — Absolt. || L'usage :
17 — (…) ledit Figaro (plaidant) pour lui-même, si la cour le permet, contre le vœu de l'usage et la jurisprudence du siège.
— L'usage, maître Double-Main, est souvent un abus.
Beaumarchais, le Mariage de Figaro, III, 15.
2 (V. 1170). || L'usage : l'ensemble des pratiques sociales. ⇒ Coutume (cit. 7), habitude. || Nos idées (cit. 60) morales sont la suite de l'usage. || Suivre l'usage et les coutumes (cit. 2) reçues. || L'usage, les choses reçues (→ Extraordinaire, cit. 17). || C'est l'usage, l'usage reçu… (→ Maternité, cit. 1; outrer, cit. 3) : c'est ce qu'il convient de faire, de dire. || Cela fait partie de l'usage. — Consacré par l'usage. || Contre l'usage (→ 1. Nu, cit. 3). ⇒ Indu, insolite; anormal, bizarre. || Cérémonies réglées par l'usage. ⇒ Cérémonial, étiquette, forme (II., 3.). — Vx. || L'usage de qqn, d'un groupe, ses coutumes, ses mœurs. || « Chacun appelle barbarie (cit. 1) ce qui n'est pas de son usage » (Montaigne). — Spécialt. || L'usage du monde, de la bonne société. ⇒ Bienséance; civilité, convenance. || Bienséances d'usage (→ Individualité, cit. 5).
18 Les coutumes les plus absurdes, les étiquettes les plus ridicules, sont, en France et ailleurs, sous la protection de ce mot : C'est l'usage. C'est précisément ce même mot que répondent les Hottentots, quand les Européens leur demandent pourquoi ils (…) dévorent la vermine dont ils sont couverts.
Chamfort, Maximes, « Sur l'homme et la société », LXX.
♦ … d'usage : conforme à l'usage; habituel, normal; convenable. || Les compliments, la formule d'usage. || Comme il est d'usage (→ Pause, cit. 2). — Par plais. || Il est d'usage de vivre longtemps à l'Académie (→ Longévité, cit. 2).
19 — Il me reste à vous présenter les observations d'usage, ajouta le notaire.
Zola, la Terre, I, II.
3 Vx (appliqué à une habitude intellectuelle, morale et non pas sociale). || Principes éloignés de l'usage commun, dont on ne se sert pas habituellement (→ Esprit, cit. 125, Pascal). — Vieilli. Pratique particulière. ⇒ Habitude. || Son usage était de… (→ Presser, cit. 9). || Contre votre usage (→ Propre, cit. 25). — Coutume, façon d'agir (dans une activité professionnelle, technique). || Si l'on conserve l'usage de forer (cit. 1) les canons.
4 (XVe). Vx ou littér. Pratique habituelle (d'une activité). || Accoutumance, familiarité due à un usage suivi. || Habitudes (cit. 5) acquises par un long usage (→ aussi Apprentissage, cit. 16). || « Et puis est revenu, plein d'usage et raison… » (→ Âge, cit. 2). ⇒ Connaissance, sagesse. — L'usage de la vie (→ Écouler, cit. 11; expérience, cit. 39) : les enseignements qu'on en retire. ⇒ Fréquentation. || Usage des sacrements.
♦ L'usage de… : la fréquentation habituelle (d'un milieu). || L'usage du grand monde (→ Paraître, cit. 17). || « Mais ceux qui de la cour ont le plus long usage » (→ Composer, cit. 12).
5 (XVIIe). Mod. Les bonnes manières que donne l'expérience de la bonne société; le respect des meilleurs usages (aux sens II., 1. et 2.). ⇒ Civilité, éducation, politesse. || Avoir de l'esprit, de l'usage du monde (→ Engouer, cit. 4), et, absolt, de l'usage (→ 1. Boire, cit. 21).
20 (…) l'usage du monde est à la délicatesse d'âme à peu près ce que la science est à l'esprit.
Stendhal, Armance, XXV.
21 Je n'osai me risquer à prendre part au festin, dans la crainte de manquer d'usage.
Nerval, Voyage en Orient, Femmes du Caire, I, II.
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III Dr. (« Usufruit », 1255). Droit réel qui permet à son titulaire (⇒ Usager) de se servir d'une chose appartenant à autrui (⇒ aussi Usufruit). Cf. Code civil, art. 625-31. || Avoir l'usage d'un bien. ⇒ Jouir (dr.). || Propriété et usage. || Usage des fruits d'un fonds : droit d'en prendre « autant qu'il (…) en faut pour ses besoins et ceux de la famille » (Code civil). — Usages forestiers : droit par lequel certaines personnes peuvent prendre certains produits dans une forêt. ⇒ Affouage, glandage, pâturage. || Usage d'une culture intercalaire (partage). || Droit d'usage aux morts-bois, feuilles sèches… (soutrage). — Prêt à usage (⇒ Commodat).
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CONTR. Désuétude, non-usage.
DÉR. et COMP. Usagé, usager. Mésusage, non-usage.
Encyclopédie Universelle. 2012.