raide [ rɛd ] adj.
• v. 1190; roide [ rwad ] v. 1160, usité jusqu'au XIXe; fém. de roit;XIVe aux deux genres; lat. rigidus
I ♦
1 ♦ Qui ne se laisse pas plier, manque de souplesse. ⇒ rigide. Un tissu raide. — Cheveux raides, plats et lisses (opposé à bouclé, frisé, ondulé).
♢ Difficile à mouvoir, engourdi. « Recru de fatigue, les jambes raides » (Bernanos). — Avoir une jambe raide : ne pas pouvoir plier le genou, boiter.
♢ (1859 ; c.-à-d. « raide mort ») Fam. Ivre. — Sous l'effet d'une drogue. Être complètement raide. — (1880) Sans argent. ⇒ désargenté, fauché. Raide comme un passe-lacet.
2 ♦ (Personnes) Qui se tient droit et ferme sans plier. Il est, il se tient raide comme un piquet, comme un manche à balai. Raide comme la justice. Danseur qui est trop raide dans ses mouvements.
3 ♦ Tendu au maximum. Être sur la corde raide.
4 ♦ Très incliné par rapport à l'horizontale et difficile à parcourir. ⇒ abrupt, escarpé . « La pente était devenue si raide que je me cramponnais pour ne pas glisser » (Bosco). « Un escalier très raide » (Zola).
5 ♦ Fam. Fort en alcool. Une eau-de-vie raide.
II ♦ (Abstrait)
1 ♦ Littér. Qui manque d'abandon, de spontanéité. ⇒ compassé, gourmé, guindé.
2 ♦ Vieilli Qui se refuse aux concessions, aux compromissions. ⇒ inflexible, rigide. « Une morale souple est infiniment plus astreignante qu'une morale raide » (Péguy).
3 ♦ Fam. Dur à accepter, à croire. ⇒ 1. fort. Ça, c'est raide ! « Dévoué ! Assidu ! [...] Elle est un peu raide ! [...] Un employé qui ne vient jamais ! » (Courteline).
♢ Licencieux, osé, qui choque la décence. « une jeune femme d'allures faciles, avec laquelle il échangeait des propos assez raides » (Léautaud).
III ♦ Adv.
1 ♦ Violemment, sèchement. ⇒ 1. fort. « La poudre blanche claque raide, autrement sec et gai que la poudre noire » (Genevoix). Renvoyer la balle raide. — En pente raide. Un sentier qui grimpe raide.
2 ♦ Par un coup soudain, brusquement. Il l'a étendu raide mort. Tombées raides mortes. — Fam. Complètement, fortement. Être raide défoncé.
⊗ CONTR. Élastique, flexible, 1. mou, souple. Courbé.
⊗ HOM. Raid.
● raide adjectif (ancien français roide, féminin de roit, du latin rigidus) Qui est sans souplesse, sans mollesse, assez dur : Des cheveux raides. Qui manque de souplesse, d'aisance, de naturel, dans son maintien ou ses mouvements : Officier qui se tient raide dans son uniforme. Qui présente une forte déclivité, qui est dur à monter : Versant en pente raide. Familier. Se dit d'une boisson alcoolique très forte et âpre au goût. Littéraire. Qui se montre inflexible sur les principes, qui se refuse aux compromissions. Familier. Inhabituel, plus ou moins étonnant, et qu'on a peine à admettre : Le procédé est plutôt raide. Familier. Se dit d'un propos scabreux, qui choque la bienséance : En dire de raides. Populaire. Ivre, soûl. ● raide (difficultés) adjectif (ancien français roide, féminin de roit, du latin rigidus) Accord Employé comme épithète ou comme attribut, raide prend un s au pluriel : des pentes raides ; les deux dernières volées de l'escalier sont trop raides. - En emploi adverbial, raide est invariable (dans la montagne, les chemins montent raide), sauf dans l'expression raide mort : elles sont tombées raides mortes. ● raide (expressions) adjectif (ancien français roide, féminin de roit, du latin rigidus) Avoir une jambe raide, ne pas pouvoir plier l'articulation du genou. Familier. Raide comme la justice, très guindé. Populaire. Raide comme un passe-lacet, totalement démuni d'argent. ● raide (homonymes) adjectif (ancien français roide, féminin de roit, du latin rigidus) raid nom masculin ● raide (synonymes) adjectif (ancien français roide, féminin de roit, du latin rigidus) Qui est sans souplesse, sans mollesse, assez dur
Synonymes :
- rigide
Contraires :
- flexible
- mou
- pliable
- souple
Qui manque de souplesse, d'aisance, de naturel, dans son maintien...
Synonymes :
- compassé
- droit
- guindé
Contraires :
- avachi
- flasque
Qui présente une forte déclivité, qui est dur à monter
Synonymes :
- à pic
- abrupt
- ardu
- montant
- montueux
Contraires :
- plan
- plat
Familier. Se dit d'une boisson alcoolique très forte et âpre au...
Contraires :
- doux
- moelleux
Littéraire. Qui se montre inflexible sur les principes, qui se refuse...
Synonymes :
- austère
- sévère
- strict
Contraires :
- coulant (familier)
- élastique (familier)
- large
- libéral
- relâché
- tolérant
Familier. Inhabituel, plus ou moins étonnant, et qu'on a peine à...
Synonymes :
- abusif
- exagéré
- fort (familier)
Familier. Se dit d'un propos scabreux, qui choque la bienséance
Synonymes :
- cru
- grivois
- hardi
- libre
- osé
● raide
adverbe
De façon abrupte, selon une forte pente : Côte qui monte raide.
De façon rapide, soudaine : Tomber raide mort.
Vieux. De façon violente, sèchement.
● raide
nom masculin
Dystrophie musculaire ou myopathie observée sur les agneaux, due à une carence en sélénium ou en vitamine E.
● raide (homonymes)
adverbe
raid
nom masculin
raide ou, vx ou litt, roide
adj. et adv.
rI./r adj.
d1./d Tendu; dépourvu d'élasticité, de souplesse. Cette amarre n'est pas assez raide.
|| Corde raide: corde très tendue sur laquelle évoluent les funambules.
— Fig. être, danser sur la corde raide: être dans une situation dangereuse, difficile.
d2./d Qui ne se plie pas, qui reste droit ou plat. Des cheveux raides.
|| (Personnes; corps ou parties du corps.) Se tenir raide comme un piquet. Des membres raides.
d3./d Qui manque de grâce, de souplesse. Démarche, gestes raides.
— Fig. Style raide.
d4./d Qui manque de souplesse (de caractère). Attitude, caractère raide. Syn. dur, rigide.
d5./d Abrupt. Pente raide. Ant. doux.
rII./r adv.
d1./d En pente raide. Escalier qui monte raide.
d2./d Subitement. Tomber raide mort. Tomber raide.
⇒RAIDE, ROIDE, adj. et adv.
I. — Adjectif
A. — 1. Qui ne se laisse pas plier, qui est difficile à plier. Synon. rigide. Raide comme un bâton, comme une barre de fer, comme une jambe de bois. Pivoines aux feuilles raides et vertes (ALAIN-FOURNIER, Corresp. [avec Rivière], 1914, p. 388). Il y a aussi les autres coiffures à l'aspect sacerdotal, en forme de tiares, et surmontées d'aigrettes de fleurs raides (ARTAUD, Théâtre et son double, 1938, p. 71):
• 1. Nous avons suivi aussi des avenues droites et mornes; partout il faisait froid. Brogan touchait ses oreilles avec inquiétude: « Elles sont déjà toutes raides, elles vont se casser en deux ».
BEAUVOIR, Mandarins, 1954, p. 304.
a) En partic.
) Qui manque de souplesse. Raide d'apprêt, d'empois; étoffe raide. Il réclame avec ostentation une nappe et des serviettes: on en trouve, je ne sais où, toutes neuves, encore raides d'amidon (T'SERSTEVENS, Itinér. esp., 1963, p. 301).
) [En parlant d'un membre ou d'une partie du corps]
— Engourdi. Synon. ankylosé, contracté. Les nerfs, les tendons, raides au début, s'assouplissaient, et, la première heure passée, ils se mettaient à grogner (PEISSON, Parti Liverpool, 1932, p. 74). Toutes les jointures sont percluses, tous les muscles roides et douloureux (DUHAMEL, Combat ombres, 1939, p. 258).
— Dont l'articulation est bloquée à la suite d'un traumatisme ou d'une affection. Le vrai général, celui qui incarnait le mythe, était grand, mince, élégant, sous son képi abondamment brodé. Il marchait en lançant sa jambe raide devant lui avec un déhanchement souple et superbe (DRUON, Gdes fam., t. 1, 1948, p. 160).
) [En parlant d'une pers., de son comportement, de sa manière d'être] Qui a un maintien rigide, une posture droite et figée; qui manque d'aisance. Attitude raide; mouvements raides; se tenir raide comme un piquet; se tenir raide sur sa selle. Il demeurait debout devant elle sans se soucier de Grange ni des bûcherons, aussi roide que s'il venait d'être changé en pierre (POURRAT, Gaspard, 1922, p. 213):
• 2. Elle restait raide devant l'établi, trop haut pour elle, les coudes en l'air, poussant son fer avec des gestes cassés de marionnette.
ZOLA, Assommoir, 1877, p. 504.
b) [En parlant de poils, de cheveux]. Qui ne frisent pas. Ce petit homme aux traits anguleux et secs, la moustache raide en herse sur la bouche (THARAUD, Dingley, 1906, p. 13):
• 3. Une braise rougit sa prunelle énergique;
Et, redressant ses poils roides comme des clous,
Il évoque, en hurlant, l'âme des anciens loups
Qui dorment dans la lune éclatante et magique.
LECONTE DE LISLE, Poèmes trag., 1886, p. 69.
♦ Cheveux raides. Synon. de cheveux plats. Les Mongoloïdes se distinguent par leurs cheveux raides et grossiers (LOWIE, Anthropol. cult., trad. par E. Métraux, 1936, p. 13).
2. Qui est fortement tendu. V. corde II D 4.
3. Qui est très incliné. De là est née l'idée d'opposer en France les toits du Midi à pentes faibles et couverts de tuiles courbes aux toits du nord à solides charpentes, à pentes raides et couverts soit de chaumes, soit de lauzes, soit de petites tuiles plates, soit d'ardoises (BRUNHES, Géogr. hum., 1942, p. 308).
— Dont la déclivité est très accusée, dont la pente est difficile à monter ou à descendre. Synon. abrupt, escarpé. Chemin, sentier raide. Une femme monta devant moi un escalier noir et raide (CHATEAUBR., Mém., t. 1, 1848, p. 148). C'est cette voie militaire, aux lacets roides, qui jadis desservait le fort de Pierre-Châtel (DANIEL-ROPS, Mort, 1934, p. 436).
4. Vieilli. Qui a un mouvement rapide et violent. Le cours de cette rivière est raide (Ac. 1835, 1878).
5. Arg. ou pop.
a) Complètement ivre, ivre mort. Être raide (comme la justice) (ESN. 1966).
b) Démuni d'argent. Être raide comme un passe-lacet. Après avoir fait l'Amérique, avoir eu des Rolls (...) et compte en banque, Georges les Moustaches se retrouvait raide à soixante piges. C'était duraille, sans retraite des vieux! (LE BRETON 1960).
c) Vieilli. Se faire porter raide. Se faire porter malade. Synon. pop. se faire porter pâle. Vous avez du toupet « de vous faire porter « raides » pour des petits machins de rien du tout » (ESN. Poilu 1919).
6. Fam. [En parlant d'une boisson alcoolique] Qui est à la fois très fort et très râpeux. Madame! Madame! Mettez un quart dans deux verres, aussi donc! Inutile de dire un quart de quoi: c'est d'eau-de-vie très raide qu'il s'agit (LOTI, Mon frère Yves, 1883, p. 359). Ricarda devait être dans une de ses périodes « actives »: il accepta de boire. Notre alcool est raide, l'air vif le brûle bien (ABELLIO, Pacifiques, 1946, p. 208).
— Empl. subst. masc. sing., p. méton. Eau-de-vie. (Ds LARCH. 1859).
B. — 1. Littéraire
a) [En parlant d'une pers.] Qui se refuse aux compromissions, fait preuve d'intransigeance. Synon. inflexible, rigide, rigoureux. Homme, caractère raide. L'obstination étroite des esprits raides, ou (...) l'obtusion des esprits faux (MOUNIER, Traité caract., 1946, p. 641).
b) [En parlant d'une chose] Qui est rigoureux, rigide. Morale raide; principes raides. Le scrupule, l'intégrité, la vertu roide et domestique d'aïeules et de bisaïeules (BERNANOS, Dialog. ombres, 1928, p. 52).
2. a) [En parlant d'une pers.] Qui affecte un maintien grave, compassé, sévère. Une vieille dame sévère et roide (ROY, Bonheur occas., 1945, p. 322). Ils descendirent l'escalier, Ritchie très raide, l'air gourmé (SARTRE, Mort ds âme, 1949, p. 29).
♦ Raide comme la justice. V. justice D.
b) [En parlant d'une chose] Qui est affecté, manque de naturel, de spontanéité. Synon. austère, empesé, guindé. Air, attitude, maintien, style raide. Qui pourrait croire que le premier thème de l'« allegro appassionato » était né, vingt ans avant, sous la forme d'un « andante » raide et gourmé! (ROLLAND, Beethoven, t. 2, 1937, p. 468).
3. Familier
a) Qui est difficile à admettre, à accepter. Synon. dur, fort. Vous niez un fait qui est de notoriété publique, c'est un peu raide (Ac. 1935). Vous jetez gaillardement un seau d'eau dans le feu, et têtue, loin d'avouer votre maladresse, vous vous en prenez aux autres, à moi-même. Je la trouve raide, ma parole! (RENARD, Poil Carotte, 1894, p. 91). Avouez que c'est roide, un prélat voulant imposer de force un confesseur (HUYSMANS, Oblat, t. 1, 1903, p. 312).
b) Vieilli. Qui est inconvenant, qui choque la bienséance par son caractère osé, licencieux. Histoire, plaisanterie raide. Les vieilles farces et les chansons raides de l'École des Beaux-Arts (ZOLA, Pot-Bouille, 1882, p. 164).
II. — Adverbe
A. — 1. Vieilli. Avec force et rapidité. Pour bien jouer à la paume, au tennis, il faut jouer bas et raide (Ac. 1935). Et pourquoi cette ténacité méchante, cette dureté de caillou lancé roide? (GENEVOIX, Raboliot, 1925, p. 221).
— Fam. Raide comme balle. Sans hésiter, sans ménagement. Rouletabille (...) me dirait mon fait, raide comme balle (G. LEROUX, Parfum, 1908, p. 56). Il est avec le ministre! Que je répondais raide comme balle (CÉLINE, Mort à crédit, 1936, p. 479).
2. Tout d'un coup, brutalement. Être tué raide. Il tomba raide mort sur le sol, tandis que son cheval affolé s'emportait (MAUPASS., Contes et nouv., t. 2, Loup, 1882, p. 1244).
Rem. Les 2 élém. dans raide mort sont var.: Tous les deux roides morts! (MÉRIMÉE, Colomba, 1840, p. 140). On voit toujours des gens avaler le contenu d'une fiole ou mordre le chaton d'une bague, et tomber raides morts (DUMAS père, Monte-Cristo, t. 1, 1846, p. 760).
3. De façon abrupte. Un chemin, une côte, un escalier qui monte raide. La route ignore, autant que faire se peut, virages et lacets; elle grimpe raide à flanc de coteau (P. ROUSSEAU, Hist. transp., 1961, p. 51).
4. Au fig.
a) Rudement. Mais si roide qu'on lui parlât, mon carrosse ne bougeait pas d'un sabot (CAMUS, Dév. croix, 1953, 1re journée, p. 528).
b) Fam. Avec une grande énergie, une grande intensité. Je tombe de fatigue. Je t'assure que j'ai travaillé raide depuis trois jours (FLAUB., Corresp., 1859, p. 301).
B. — PÊCHE. Tenir raide une ligne. Maintenir une ligne assez tendue pour qu'elle ne coule pas sur le fond. Tenir raide un poisson. Tenir un poisson pris à la ligne sans lui rendre de fil. (Ds Lar. encyclop., Lar. Lang. fr.).
Prononc. et Orth.:[], vieilli []. Raide est une forme anc. issue de bonne heure de l'anc. fr. roide et que l'on retrouve à l'époque mod. (v. G. STRAKA ds Trav. Ling. Litt. Strasbourg t. 19 n ° 1 1981, p. 186) où elle l'emporte sur roide considéré comme vx ou littér. Ac. 1694: roide; 1718, 1740: roide ,,on prononce raide``; 1762: roide; 1798: roide ,,en conversation, l'on prononce Rède; dans le discours Rède ou Roède``; 1835: roide ,,en conversation et quelquefois dans le discours soutenu, on prononce Rède``; 1878: raide ,,on écrivait et on prononçait anciennement Roide``; mais 1935: raide ,,quelques-uns écrivent encore et même prononcent Roide``; LITTRÉ: roide ou raide ,,La prononciation rè-d' a presque entièrement fait disparaître la prononciation roi-d'``; Lar. Lang. fr.: raide et vx roide; ROB. 1985: raide ou vx ou littér. roide. Homon. raid. Étymol. et Hist. A. Adj. 1. ca 1140 masc. reit « qui ne ploie pas, ferme, solide » (Pélerinage Charlemagne, 604 ds T.-L.); 1155 fém. redde (WACE, Brut, éd. I. Arnold, 9297); 2. a) ca 1165 « qui n'a plus la souplesse de la vie » (Troie, 13361 ds T.-L.); b) 1859 « ivre » (LARCH., p. 81); 1915 se faire porter raide (SAIN. Tranchées, p. 113); 3. a) ca 1170 « qui n'est pas souple, qui est rendu rigide » orfrois roides (CHRÉTIEN DE TROYES, Erec, éd. M. Roques, 6610); b) 1461-67 « tendu au maximum » tenir la bride royde (J. DE BUEIL, Jouvencel, éd. L. Lecestre, t. 1, p. 70); 1848 marcher sur [...] la corde raide (FLAUB., Champs et grèves, p. 248); 1881 au fig. la corde raide du paradoxe (ZOLA, Doc. littér., Gautier, p. 113); 4. 1176-81 « impétueux, animé d'un mouvement rapide et fort » [par confusion avec l'a. fr. rade, v. rapide étymol.] (CHRÉTIEN DE TROYES, Chevalier Lion, éd. M. Roques, 3085); 1551 « qui va en ligne droite » roide vol (RONSARD, Tombeau de Marguerite de Valois ds Œuvres compl., éd. P. Laumonier, t. 3, p. 73); 5. a) ca 1180 « qui refuse le compromis, sans concession, inflexible » (MARIE DE FRANCE, Fables, 46, 54 ds T.-L.); b) 1759 « qui manque de spontanéité, d'expression, d'abandon » (DIDEROT, Lettres à S. Volland, p. 72); 6. ca 1125 « qui se tient très droit » (GAUTIER DE COINCI, Mir. Vierge, éd. V. Fr. Koenig, I Mir 43436, t. 3, p. 207); 7. 1re moit. XIIIe s. « très pentu, abrupt » (1re Continuation Perceval, ms. E, éd. Roach et Ivy, II, 141, 4843); 8. a) fin XIIIe s. (d'une boisson) « fort, dur, sec, difficile à avaler » (Du sot chevalier, 195 ds Rec. gén. des fabliaux des XIIIe et XIVe s., éd. A. de Montaiglon et G. Raynaud, t. 1, p. 226); b) 1848 « difficile à admettre, choquant, osé » (SAND, Corresp., t. 3, p. 44); c) 1856 « difficile à admettre, dur » (LABICHE, Un M. qui a brûlé une dame, 7, p. 419); 9. 1584 « brusque, violent » (RONSARD, Bocage royal ds Œuvres compl., éd. P. Laumonier, t. 8, p. 88, 5); 10. 1880 « privé de la latitude que donne l'argent, désargenté » (GRISON ds LARCH. Nouv. Suppl. 1889, p. 202). B. Adv. 1. a) ca 1245 « violemment, brusquement » (PHILIPPE MOUSKET, Chron., éd. de Reiffenberg, 22659); fin XIVe s. tué tout roit (E. DESCHAMPS, Ballades, MXXXV, Œuvres, éd. de Queux de St-Hilaire, t. 5, p. 312); 1580 tomber roide mort (MONTAIGNE, Essais, I, XVIII, éd. P. Villey, t. 1, p. 75); b) 1636 « sans dévier, avec force, impétuosité » (MONET); 2. 1888 « de façon osée, choquante » (A. DAUDET, Immortel, p. 183). C. Subst. 1. 1758 « ce qui manque d'expression, de vie, de spontanéité » (DIDEROT, De la Poés. dram., p. 268); 2. 1859 « eau-de-vie » (LARCH., p. 81); 3. 1888 « caractère osé, audace pornographique » (A. DAUDET, op. cit., p. 150). Du lat. rigidus « raide, rigide, dur, sévère » avec généralisation de la forme fém. roide, devenue raide, qui a supplanté le masc. a. fr. reit, roit.
STAT. Fréq. abs. littér. Raide: 1 362. Roide: 542. Fréq. rel. littér. Raide: XIXe s.: a) 538, b) 1 952; XXe s.: a) 2 940, b) 2 518. Roide: XIXe s.: a) 787, b) 1 659; XXe s.: a) 523, b) 429.
DÉR. Raidement, roidement, adv. D'une manière raide. Répliquer raidement. Il a salué aussi raidement que faire se peut (VERCEL, Cap. Conan, 1934, p. 193). Voilà, dit Justin roidement, un propos que j'ai déjà, me semble-t-il, entendu tenir autrefois à ton frère Joseph (DUHAMEL, Cécile, 1938, p. 157). — [], vieilli []. LITTRÉ: roi-, rai-; Lar. Lang. fr.: rai-; ROB. 1985: rai- ,,vx, plus rare que pour l'adj.: roidement``. Supra prononc. — 1re attest. ca 1170 reddement (Rois, éd. E. R. Curtius, I, II, 25, p. 7); de raide, suff. -(e)ment2.
BBG. — DARM. Vie 1932, pp. 141-142.
1. raide [ʀɛd] adj.
ÉTYM. V. 1190; roide, v. 1160; forme fém. de l'adj. reit, roit (au fém. reide, roide, raide), fin XIe-déb. XIIe; du lat. rigidus, de rigere « être dur et, fig., insensible ». → Rigide. REM. Les graphies sont hésitantes avant la période classique, où l'on écrit roide, roidement, roideur, roidir. Raide devient usuel aux XVIIIe-XIXe s., mais roide subsiste, encore de nos jours, surtout en tant que survivance graphique : la prononciation [ʀwad] semble inconnue en français central. — La survivance de roide n'affecte que les usages anciens (notamment I., 1., 2. et 4.; II., 1. et 2.). Dans l'usage écrit, notamment littéraire, roide, en tant que forme marquée, peut avoir une valeur intensive, stylistique.
❖
———
1 Qui ne se laisse pas plier, qui manque de souplesse. ⇒ Rigide. — REM. À la différence de rigide, mot du langage technique ou savant, raide appartient uniquement au vocabulaire courant. || Caractère de ce qui est raide. ⇒ Raideur. || Devenir raide. ⇒ Raidir (se). || Faire cesser d'être raide. ⇒ Déraidir. || Avoir les jambes raides. ⇒ Ankylosé, engourdi (→ Fatigue, cit. 10).
1 Elle (ma vieille robe de chambre) moulait tous les plis de mon corps sans le gêner; j'étais pittoresque et beau. L'autre, raide, empesée, me mannequine.
Diderot, Regrets sur ma vieille robe de chambre.
♦ Sous la forme roide. → 1. Livre, cit. 7. || Des manchettes roides d'empois (cit.; → aussi Calotte, cit. 3).
♦ Cheveux raides, qui ne frisent pas, qui sont difficiles à coiffer. ⇒ aussi Hérissé (→ Indéterminable, cit. 2; permanent, cit. 6). — Poils raides (→ Friser, cit. 8; fuser, cit. 7).
♦ Qui suggère l'idée de rigidité, de sécheresse, par des lignes droites, des angles vifs; qui manque de moelleux. || Un beau coupé (cit. 3) aux longues lignes raides. — (Bx-arts). || Contours, draperies raides.
2 Parmi ces lignes, il y avait des dessins raides, rêches et secs, tracés comme à l'équerre, qui se repliaient avec des angles pointus, comme le coude d'une femme maigre. Il y en avait d'onduleux, qui se tortillaient comme des fumées de cigares.
R. Rolland, Jean-Christophe, Foire sur la place, I, p. 688.
2 (V. 1220; personnes). Qui se tient droit et ferme sans se plier, sans se courber. ⇒ 1. Droit (I., A., 1.), 1. ferme (I., 2.). ☑ Être raide comme un échalas, comme un mannequin, comme un pieu (→ Galvanisme, cit. 1), comme un piquet (1. Piquet, cit. 3). — La tête raide sur son grand col (→ Gourmer, cit. 4).
3 Deux longues jambes raides tendues de chaque côté d'un âne minuscule, des cheveux verticaux sortant comme un blaireau d'un bandage arrivèrent sur le ciel : le second pilote, Langlois.
Malraux, l'Espoir, III, III.
♦ Sous la forme roide. || Le cou roide. → Calumet, cit. 3.
3 Qui est tendu au maximum. || Câble, corde raide. — ☑ Fig. Être sur la corde raide. ⇒ Corde (I., A., 1.).
4 (V. 1175). Vx. Qui se déplace avec un mouvement rapide, violent, selon une trajectoire tendue. — REM. Cet emploi ancien est attesté sous la forme roide.
5 (XIIIe). Qui est très incliné par rapport au plan horizontal, qui est difficile à gravir ou à descendre. ⇒ Abrupt. || Pente raide (→ Bâton, cit. 7; couler, cit. 21; établissement, cit. 8). || Chemin raide. ⇒ Ardu (1.), difficile, escarpé. || Petit sentier raide. ⇒ Raidillon. || Escalier raide (→ Logement, cit. 6). — Sous la forme roide :
4 Les rues fort roides (de Saint-Pierre-Port) sont montées et descendues au galop par les excellents attelages anglo-normands.
Hugo, l'Archipel de la Manche, VIII.
4.1 — Tiens, il y a longtemps qu'on ne vous a vu ! Où diable étiez-vous donc ? parti en voyage, en Italie ? Poncif, hein, l'Italie ? pas si raide qu'on dit ? N'importe ! apportez-moi vos esquisses, un de ces jours.
Flaubert, l'Éducation sentimentale, II, I.
———
II (Abstrait).
1 (XVIIIe). Littér. Qui manque de grâce, d'abandon, de spontanéité. || Air, attitude, maintien raide ⇒ Affecté, austère, compassé, empesé, empoté, engoncé, gourmé, grave, guindé. || Un style raide et compassé.
♦ Sous la forme roide. || Pièce de théâtre dans le genre roide, rude, tendu et emphatique (cit. 2). || Barcelone a un air un peu guindé (cit. 15) et un peu roide.
5 (…) un homme roide et sévère, habillé de noir de la tête aux pieds, me retint par le bras avec un mélange de politesse et d'autorité. Je le saluai; il me répondit d'une faible inclinaison de tête, et reprit sa pose inflexible en cillant un œil solennel (…)
Charles Nodier, Contes, « La fée aux miettes », Conclusion.
2 (Fin XIIe). Vieilli. Qui se refuse aux concessions, aux compromissions, aux ménagements. ⇒ Inflexible, rigide, rigoureux. || « Ces âmes vigoureuses et raides de l'antiquité » (Fontenelle). || Il est raide comme une barre de fer. → Barre (supra cit. 2). — Sa manière de commander était raide, cassante. ⇒ Autoritaire, brusque. — Une morale souple et une morale raide (→ Astreignant, cit.). ☑ Fam. Raide comme la justice. — Sous la forme roide. → cit. 7.
6 (…) c'est fausser la couleur des faits que d'appliquer une théorie raide et inflexible à l'homme des différentes époques. Ce qui est universel, ce sont les grandes divisions et les grands besoins de la nature (…)
Renan, l'Avenir de la science, Œ. compl., t. III, p. 868.
7 (…) dans l'église la plus roide en discipline, il y a peut-être plus de place pour la foi des démocrates que dans le moi le plus libre.
André Suarès, Trois hommes, « Ibsen », VII.
3 (Mil. XIXe). Fam. a Dur à supporter, à accepter, à croire. ⇒ Fort (supra cit. 32). || « C'est possible; mais comme dit l'autre, c'est raide » (→ Intact, cit. 4). — Ellipt. ☑ Elle est raide, celle-là ! ☑ Je la trouve raide (→ 1. Plante, cit. 1). — Spécialt. ⇒ Licencieux. || Il y a dans ce roman des passages assez raides. || Plaisanterie, histoire raide.
8 — Dévoué ! Assidu !… Qui donc ? C'est pour Lahrier que vous dites ça ? — Dame ! — Ah bien, elle est un peu raide !… Un employé qui ne vient jamais !
Courteline, Messieurs les ronds-de-cuir, 4e tableau, III.
9 (…) une jeune femme d'allures faciles, avec laquelle il échangeait des propos assez raides.
Paul Léautaud, le Théâtre de M. Boissard, IV.
9.1 Elle est raide, celle-là ! Vous accusez Maurice d'avoir tué Briguar ! (…)
♦ N. f. pl. ☑ En faire des raides (des actions, des tours, des fredaines). || Il en a fait des raides.
9.2 C'est vrai que le père n'est pas fâché. En rentrant, il dit à Claudius, sévèrement : Alors, t'en fais des raides, paraît ben, sacré trousse-filles !
G. Chevallier, Clochemerle, p. 88.
b (En parlant d'une boisson). Qui est à la fois riche en alcool, sec et âpre au goût. || Une eau-de-vie très raide. — N. m. || Du raide : une boisson d'un degré élevé en alcool (→ Cheveu, cit. 30.1).
4 (1880). Fam. Qui est sans argent. ☑ Loc. Raide comme un passe-lacet (⇒ Passe-lacet).
5 Fam. (Peut-être, comme le sens suivant, par allusion à une personne raide morte, allongée sans mouvement). Complètement ivre. || Il supporte mal l'alcool, deux apéritifs et il est raide.
6 ☑ Argot milit. Soldat qui se fait porter raide (→ Se faire porter malade).
———
III Adv.
1 (1559; roit, XIIIe). Brusquement, vivement, violemment, sèchement. || Frapper raide. || Renvoyer la balle raide. || Des cartouches à pleine charge dont la poudre (cit. 15) claque raide.
♦ Selon un angle aigu, sous une forte inclinaison. || Escalier, sentier qui grimpe raide (→ ci-dessus, I., 5.).
♦ ☑ Fam. Pisser raide, droit.
♦ ☑ Fig. Parler raide, brutalement, durement. ⇒ Raidement. ☑ Fam. Raide comme balle : sans hésitation, ni ménagement.
2 Fam. et vieilli. Dur.
10 (…) je vais me mettre à piocher (travailler) raide et j'espère en un mois avoir fini mon examen (…)
Flaubert, Correspondance, 68, 12 nov. 1842.
3 ☑ (XVe). Tuer quelqu'un raide, l'étendre raide mort : le tuer tout d'un coup. || « Raide mort étendu sur la place il le couche » (→ Archer, cit. 2, La Fontaine). || Tomber raide mort (→ Peur, cit. 1). REM. Dans la locution raide mort, raide s'accorde comme un adjectif. Elles sont tombées raides mortes. — Sous la forme roide :
11 Emma poussa un cri et tomba roide par terre, à la renverse.
Flaubert, Mme Bovary, II, XIII.
❖
CONTR. Élastique, flasque, flexible, moelleux, mou, onduleux, souple. — Frisé. — Bossu, courbé. — Enjoué.
DÉR. 2. Raide, raidement, raideur, raidillon, raidir.
HOM. Raid, 2. raide.
————————
2. raide [ʀɛd] n. m.
ÉTYM. 1926; « faux rouleau de pièces d'or », 1840; de 1. raide.
❖
♦ Argot. Billet, somme de dix francs. ⇒ Sac. || « J'avais un peu plus de deux cents raides sur moi » (A. Simonin, Touchez pas au grisbi, p. 188). — Syn. et dér. : raidillard [ʀedijaʀ] n. m.
0 Passer bécif (vite) à la banque faire virer deux cents raidillards au compte de Max, lequel a toute sa fraîche (argent) dans un coffiot (coffre) mais en briques de jonc (or) d'un kilo.
Albert Simonin, Hotu soit qui mal y pense, p. 228.
❖
HOM. Raid, 1. raide.
Encyclopédie Universelle. 2012.