frotter [ frɔte ] v. <conjug. : 1>
• XIIe; a. fr. freter, devenu froter par substit. du suff.; lat. pop. °frictare, fréquent. de fricare
I ♦ V. tr.
1 ♦ Exercer sur (qqch.) une pression accompagnée de mouvement (⇒ friction, frottement), soit en imposant un mouvement à un corps en contact avec un autre (frotter son doigt contre, sur une table), soit en imposant à un corps la pression d'un autre corps en mouvement (frotter une table du doigt). Frotter fort (⇒ appuyer) , doucement (⇒ effleurer, frôler) . Frotter une allumette (contre le frottoir). ⇒ gratter.
2 ♦ Spécialt Rendre plus propre, plus luisant, en frottant. ⇒ astiquer, briquer, fourbir, lustrer, nettoyer. Frotter le linge. Frotter les cuivres (pour les faire reluire), le parquet. Frotter le poil d'un cheval (⇒ bouchonner, étriller) . — Frotter pour enlever un dépôt (⇒ décaper, gratter, racler) , pour polir (⇒ polir, poncer, roder) . — Frotter ses semelles sur un paillasson.
3 ♦ Frotter qqn pour le laver, le sécher; pour le réchauffer (⇒ frictionner) . Se frotter le nez. — Spécialt Frotter ses yeux, se frotter les yeux (en se réveillant).— Se frotter les mains, en signe de contentement. ⇒ se réjouir. « Il se frottait les mains [...] ; il ne pouvait dissimuler sa joie » (Hugo). — Chat qui se frotte le museau.
4 ♦ FROTTER... DE... : enduire par frottement, par friction. Frotter d'huile, de graisse... ⇒ graisser, huiler, oindre; passer (à). Pain frotté d'ail (⇒ frottée) . — Fig. et vieilli Être frotté de... : avoir une légère teinture, un vernis (de science). « étant un peu frotté de théologie » (France).
♢ Absolt, peint. Appliquer un frottis sur. P. p. subst. Un frotté : toile recouverte d'un frottis; dessin au crayon usé par le frottement.
5 ♦ Vieilli Donner des coups à (qqn). ⇒ battre, étriller, frapper; frottée. Loc. Frotter les oreilles (à qqn), morigéner, punir.
6 ♦ Fig. et littér. Mettre en contact; faire entrer en relations. « frotter et limer notre cervelle contre celle d'autrui » (Montaigne).
II ♦ SE FROTTER v. pron.
1 ♦ Frotter son corps (⇒ friction). Se frotter au gant de crin. « Le chat siamois bondit silencieusement et se frotta contre l'un des pieds nus » (Aragon).
2 ♦ SE FROTTER DE... : s'enduire. Se frotter d'huile solaire. Fig. Vieilli Se frotter de latin, de grec, en prendre une connaissance superficielle. ⇒ apprendre, se teinter.
3 ♦ Se frotter à qqn : (vx) avoir des relations avec qqn (⇒ frayer [avec], fréquenter) ; (mod.) attaquer qqn (⇒ défier, provoquer) . Il vaut mieux ne pas se frotter à ces gens-là; ne vous y frottez pas. PROV. Qui s'y frotte s'y pique. — Par ext. Il a eu tort de s'y frotter, de courir le risque.
4 ♦ Fam. Se frotter sur qqn, profiter d'une occasion de contacts érotiques. ⇒ frotti-frotta.
III ♦ V. intr. Exercer, produire un frottement en se mouvant au contact de qqch. Roue qui frotte contre le trottoir. Pièces d'un mécanisme qui frottent. ⇒ gripper.
⊗ CONTR. Glisser.
● frotter verbe transitif (peut-être ancien français freter, du bas latin frictare) Passer, en appuyant, un objet sur un autre objet ou une surface, d'un mouvement sec et unique ou d'un mouvement répété : Frotter deux cailloux l'un contre l'autre. Passer quelque chose sur quelque chose dans un mouvement répété et en exerçant une pression pour nettoyer, astiquer, faire briller : Frotter une tache avec du savon. Passer, d'un mouvement répété et appuyé, la main sur une partie du corps ou frictionner : Frotte-lui le dos pour le réchauffer. Enduire quelque chose d'un produit par frottement, par friction : Frotter les croûtons d'ail. Couvrir un tableau d'un frottis. ● frotter (citations) verbe transitif (peut-être ancien français freter, du bas latin frictare) Anonyme L'âne frotte l'âne. Asinus asinum fricat. Anthologie palatine Commentaire Se dit de deux personnes qui s'encensent mutuellement. ● frotter (expressions) verbe transitif (peut-être ancien français freter, du bas latin frictare) Familier. Frotter la manche, en Belgique, flatter quelqu'un pour en recevoir une faveur. ● frotter (synonymes) verbe transitif (peut-être ancien français freter, du bas latin frictare) Passer, en appuyant, un objet sur un autre objet ou...
Synonymes :
- racler
Passer quelque chose sur quelque chose dans un mouvement répété et en...
Synonymes :
- astiquer
- briquer
- cirer
- fourbir
- lustrer
- polir
- récurer
Passer, d'un mouvement répété et appuyé, la main sur une...
Synonymes :
- masser
● frotter
verbe transitif indirect
Toucher quelque chose dans son mouvement : Une roue qui frotte contre le garde-boue.
● frotter
verbe intransitif
Produire un frottement, un bruit de frottement : Il y a quelque chose qui frotte à l'arrière de la voiture.
frotter
v.
rI./r v. tr.
d1./d Presser, appuyer sur (un corps) tout en faisant un mouvement (spécial. pour nettoyer, pour faire briller). Frotter un meuble avec un chiffon.
d2./d (Belgique) Fig. et péj. Frotter la manche (à qqn): V. manche (2).
rII./r v. intr. Produire une friction, une résistance (en parlant d'un corps en mouvement). La roue frotte contre le garde-boue. Ant. glisser.
rIII/r v. Pron.
d1./d Frotter son corps. Se frotter vigoureusement au gant de crin.
|| (Faux Pron.) Se frotter les mains, les frotter l'une contre l'autre; fig. se réjouir, se féliciter (de qqch).
d2./d Se frotter à: avoir commerce avec. Se frotter à la bonne société.
d3./d Se frotter à qqn, l'attaquer.
|| Prov. Qui s'y frotte s'y pique.
⇒FROTTER, verbe.
A.— Emploi trans.
1. Passer un corps sur un autre en appuyant. Frotter qqc. à, contre, sur qqc. Elle frotte ses mains contre ses jambes (CLAUDEL, Violaine, 1892, IV, p. 541) :
• 1. — Eh bien! dit Rocambole, rallume ta bougie. Zampa tira des allumettes de sa poche, en frotta une sur le mur et l'approcha du flambeau éteint.
PONSON DU TERR., Rocambole, t. 5, 1859, p. 310.
— En partic. Mettre deux corps en contact par un mouvement différent, souvent inverse. Il frotta deux cailloux, en arracha des étincelles, qu'il approcha du gril placé à gauche de la proue (MAURRAS, Chemin paradis, 1894, p. 127).
2. Soumettre un corps au contact d'un autre qui est en mouvement. Aladin frotte sa lampe, et se procure ainsi toutes sortes de biens (ALAIN, Propos, 1931, p. 999). Je polirai patiemment cette chair fine, je la frotterai, je la raclerai, je l'userai jusqu'à l'os (SARTRE, Mouches, 1943, III, 1, p. 86) :
• 2. LE PRÉSIDENT. — Florence est née le 8 janvier. À minuit. On a dû la frotter toute la nuit pour qu'elle vive. Elle était toute noire.
JÉRÔME. — On l'a bien frottée. Il n'en reste vraiment rien.
GIRAUDOUX, Cantique des Cantiques, 1938, 2, p. 32.
♦ Gén. en emploi abs., arg. Fréquenter l'autre sexe, avoir des rapports intimes avec quelqu'un. À quinze piges la môme Nénette frottait déjà depuis longtemps (SIMONIN, Simonin ill., 1957, p. 141). ,,Transformer en jeu lascif les contacts que ménage la danse, de cavalier à cavalière`` (SIMONIN, Pt Simonin ill. par l'ex., Paris, Gallimard, 1968).
— Loc. fig.
♦ Se frotter les mains. Jubiler, se réjouir. Hé! Hé! dit le roi. Il se frottait les mains, il riait de ce rire intérieur qui fait rayonner le visage (HUGO, N.-D. Paris, 1832, p. 500).
♦ Se frotter le museau.
♦ Se frotter les yeux. Être ébahi, marquer un vif étonnement. Frotte-toi les yeux, comme je me les frotte, et demande-toi où nous serions si chaque royaliste intelligent, dans chaque localité, eût tenu ma conduite rationnelle, réservée, sans adulation comme sans faiblesse (LAMART., Corresp., 1832, p. 252).
♦ Frotter les oreilles, les côtes à qqn. L'admonester sévèrement, le châtier. Je vais lui frotter les oreilles, à ton mari, dit M. Blampignon; c'est un galopin qui, si l'on n'y prend garde, te mettra sur la paille (FRANCE, Île ping., 1908, p. 375).
3. P. ext.
a) Nettoyer, rendre plus propre en frottant.
— [Le compl. d'obj. dir. désigne une chose] Frotter du linge, frotter le parquet. Les servantes en sabots blancs, en bonnets volants, en caracos d'indienne, qui fourbissaient les escaliers et frottaient les carreaux (DU CAMP, Hollande, 1859, p. 15). Ils astiquent déjà leur mousqueton, et je te crache, et je te frotte (AUDIBERTI, Quoat, 1946, 1er tabl., p. 21) :
• 3. Elle [Gervaise] venait d'étaler une chemise sur la planche étroite de la batterie, mangée et blanchie par l'usure de l'eau; elle la frottait de savon, la retournait, la frottait de l'autre côté.
ZOLA, Assommoir, 1877, p. 388.
♦ P. ell. Frotter un appartement. ,,Frotter le parquet d'un appartement`` (DG).
— [Le compl. d'obj. dir. désigne une (partie d'une) pers.] Puis elle frotta ses flancs et elle tendait la peau pour aller au fond des plis de graisse. Elle y passait le torchon, au bout de son doigt, comme dans des rainures. Elle frotta ses cuisses rousses (GIONO, Gd troupeau, 1931, p. 49).
b) Enduire par frottement.
— [Le compl. d'obj. dir. désigne une chose] Kolb assis sur un ais frottait son pain avec une gousse d'ail (BALZAC, Illus. perdues, 1843, p. 568). Ils [les Carthaginois] frottèrent le bord des boucliers avec de l'huile pour faciliter le glissement des flèches (FLAUB., Salammbô, t. 2, 1863, p. 148).
♦ Spéc., PEINT. Enduire la toile d'une légère couche de peinture presque transparente. Pour retoucher la Vénus qui était trop jaune, frotté les ombres surtout et presque toutes les parties avec laque jaune et laque rouge (DELACROIX, Journal, 1851, p. 431).
— [Le compl. d'obj. dir. désigne une pers. ou une partie d'une pers.] Le divin vieillard trempe un peu de coton dans une huile consacrée; il en frotte les tempes d'Atala (CHATEAUBR., Génie, t. 2, 1803, p. 256) :
• 4. Fils de Werther et arrière-neveux de Faublas (...), nous nous rendons amoureux du premier joli petit nez qui passe, surtout s'il est frotté de poudre de riz.
ARÈNE, J. des Figues, 1870, p. 104.
c) Vx, pop. Donner des coups à quelqu'un, lui administrer une sévère correction. Depuis le dernier match de « la crosse » où son équipe [de Sam], — la rouge — avait frotté les gars de Salmon Arm (GENEVOIX, Match à Vancouver, 1942, p. 193) :
• 5. Si vous aviez franchement secondé la France, très probablement l'Autriche n'eût pas tiré l'épée; si elle eût voulu la guerre, unis à vous, nous l'aurions frottée d'importance.
MÉRIMÉE, Lettres E. Ellice, 1870, p. 451.
B.— Emploi pronom.
1. [Le suj. désigne un animé hum.] Se frotter avec, de qqc.
a) Se laver, s'essuyer. Avant de changer le petit, Mouchette se frotte les joues avec le chiffon de grosse toile (BERNANOS, Mouchette, 1937, p. 1300).
b) Se frictionner, oindre son corps. Quelques milliers d'hommes braves et fiers, (...) qui causent d'affaires publiques, passent leur journée aux gymnases, (...) se lavent, se frottent d'huile (TAINE, Voy. Ital., t. 1, 1866, p. 60). Ayrton se déshabilla et se frotta de graisse, de manière à moins souffrir de la température de l'eau, qui était encore froide (VERNE, Île myst., 1874, p. 429).
— Au fig.
♦ Se frotter à qqc. Avoir des relations, des contacts avec quelque chose. Il avait reçu quelque instruction, s'était frotté aux idées nouvelles (SANDEAU, Mlle de La Seiglière, 1848, p. 9).
♦ Se frotter de qqc. Se teinter superficiellement de quelque chose. Ceux qui sont devenus savants en se frottant de sociologie belge (SOREL, Réflex. violence, 1908, p. 66).
♦ Se frotter à, avec qqn. Fréquenter assidûment quelqu'un (pour s'imprégner de sa pensée, de sa culture, pour bénéficier de son expérience ou de ses faveurs) :
• 6. Il [M. Toutin-Laroche] s'était fait l'inséparable du baron Gouraud; il se frottait à lui, avec l'idée vague que cela lui porterait bonheur.
ZOLA, Curée, 1872, p. 395.
2. [Le suj. désigne un animé ou un inanimé] Se frotter à, contre qqn ou qqc.
a) [Le suj. désigne une chose] Passer contre quelque chose ou quelqu'un dans un contact plus ou moins appuyé. À l'endroit où le fleuve avait pu se frotter contre les arbres durs (GIONO, Chant monde, 1934, p. 235).
b) [Le suj. désigne un animé] Passer son corps ou une partie de son corps contre quelque chose ou quelqu'un. Elle caressa la chatte, qui vint aussitôt se frotter contre sa jupe, la queue en l'air (ZOLA, Joie de vivre, 1884, p. 814).
— P. ext.
♦ Se frotter à qqn, à qqc. S'attaquer à quelqu'un de dangereux, se mêler d'une affaire qui comporte des risques. Il vaut mieux ne pas s'y frotter. Elle lui avait répondu d'un œil si colère et avec un sourire tellement froid, que la bonne femme ne s'y frotta plus (FLAUB., Mme Bovary, t. 1, 1857, p. 75).
Proverbe (et devise de la Lorraine dont le chardon est l'emblême). Devise de René II :Non inultus premor. « Qui s'y frotte s'y pique ou Je me revanche. » (BARRÈS, Cahiers, t. 8, 1910, p. 220).
♦ Arg. Se caresser, avoir des rapports intimes. Et maintenant, si vous voulez vous frotter, vous deux, frottez, moi je m'en fous, je suis en bois d'arbre (GIONO, Baumugnes, 1929, p. 121).
C.— Emploi intrans. Produire un frottement. Une des cages d'extraction frottait au passage, sur une longueur de plus de cinq mètres (ZOLA, Germinal, 1885, p. 1526). Ses épaules, en glissant, frottent contre le mur (POURRAT, Gaspard, 1931, p. 297).
REM. 1. Frottable, adj. Que l'on peut frotter. Le parquet, le pas de porte et toute matière frottable (ARNOUX, Écoute, 1923, p. 55). 2. Frotterie, subst. fém., impr. Opération consistant à ébarber les caractères typographiques après leur fonte. Un coup de pointe donné maladroitement à la lettre sur le côté de la frotterie (MAIRE, Manuel biblioth., 1896, p. 277). Voici le sens de la frotterie, la force de corps, le cran de fonderie (Civilis. écr., 1939, p. 6-16). 3. Frotte-allumettes, subst. masc. Instrument sur lequel on frotte une allumette pour l'enflammer (v. allume-feu). 4. Frotte-nombril, subst. masc., fam. et trivial. Action de se frotter à une autre personne « nombril contre nombril ». Connaissez-vous le jeu de frotte-nombril? (GONCOURT, Journal, 1884, p. 365). 5. Frotte-parquet, subst. masc., p. plais. Danseur. Les danseurs de bals blancs « godelureaux » et « frotte-parquets » s'essaient au large salut horizontal, dit « salut en bataille » imité de Boni (MORAND, 1900, 1931, p. 21).
Prononc. et Orth. :[], (il) frotte []. Enq. : // (il) frotte. Ds Ac. 1694-1932. Étymol. et Hist. 1. a) Ca 1121-34 « passer à plusieurs reprises et en appuyant un corps sur un autre » (PH. DE THAON, Bestiaire, 778 ds T.-L. : E ses cornes froter); b) ca 1175 « exercer un frottement pour nettoyer quelqu'un, frictionner » ici pronom. (B. DE STE-MAURE, Ducs Normandie, éd. C. Fahlin, 3556 : [s'i ert...] Lavez e frotez e baigniez); 1604 « id. (en parlant d'une chose) » (MONTCHRETIEN, R. d'Ecosse, p. 102 ds IGLF); c) 1205-50 « enduire, imprégner par frottement » (Renart, éd. Martin, br. XIII, 1019); d) ca 1275 « heurter, rencontrer quelque chose » (ADENET LE ROI, Beuve de Commercy, éd. A. Henry, 3038); [1213 s'entrefroter en parlant d'écus (Faits des Romains, éd. Flûtre et de Vogel, p. 531, ligne 21)]; d'où 2. XIIIe s. « battre quelqu'un » (d'apr. FEW t. 3, p. 787 a); cf. 1456-67 (Cent Nouvelles Nouvelles, éd. F. P. Sweetser, XXXVIII, 68). Orig. incertaine; on admet gén. une orig. commune pour les types en -oi- (froitier), -e- (frétiller) et -o- (qui existent aussi en Italie), qu'on ramène à un lat. (fréq. de fricare « frotter, polir, étriller ») attesté tardivement (VIIe s. Hisperica famina ds FEW t. 3, p. 787 a). Fréq. abs. littér. :1 194. Fréq. rel. littér. :XIXe s. : a) 837, b) 2 214; XXe s. : a) 2 346, b) 1 765.
DÉR. Frot(t)ailler, (Frotailler, Frottailler)verbe trans. Synon. péj. de frotter. Assez farfouillé, frottaillé (ARNOUX, Zulma, 1960, p. 165). Arg. (Se) frot(t)ailler. Du monde mal approprié et qui se liche et se pelote et se frottaille l'épiderme des uns contre les autres (GONCOURT, Journal, 1893, p. 399). À frotailler des caraques, des putes de bonne aventure (ARNOUX, Rhône, 1944, p. 360). Rem. On relève ds la docum. frot(t)aillement, (frotaillement, frottaillement)subst. masc. Action de (se) frottailler. Et vos roucoulements, vos frottaillements, vos blancs de l'œil renversés (ARNOUX, Solde, 1958, p. 55). — []. Aucune transcr. ds les dict. Cf. -aille. — 1re attest. 1893 fam. ici pronom. (GONCOURT, loc. cit.); du rad. de frotter, suff. -ailler. — Fréq. abs. littér. : 1.
BBG. — CHAUTARD (É). La Vie étrange de l'arg. Paris, 1931, p. 376.
frotter [fʀɔte] v.
ÉTYM. V. 1120-1130, froter; frotter, XVIe; a remplacé par substitution de suffixe l'anc. franç. freter, d'un lat. pop. frictare, fréquentatif de fricare; selon Guiraud, d'un dérivé de fraudere « trompeur », d'où « endommager ».
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I V. tr.
1 Exercer sur (qqch.) une pression accompagnée de mouvement (⇒ Friction, frottement), soit en imposant un mouvement à un corps en contact avec un autre, lui-même immobile ou animé d'un mouvement différent (frotter son doigt contre une table, sur une table); soit en imposant à un corps la pression d'un autre corps en mouvement (frotter une table avec son doigt, du doigt). || Frotter une chose et une autre, contre une autre, à une autre; frotter deux choses. || Frotter une chose avec, de… qqch. || Frotter qqch. fort, ferme, énergiquement. ⇒ Appuyer. || Frotter doucement, légèrement. ⇒ Effleurer, frôler. || User; broyer, écraser en frottant. || Frotter du cuir pour l'assouplir (⇒ Corroyer, fouler). || Effacer en frottant le papier avec une gomme (⇒ Gommer). || Frotter deux silex pour produire du feu (cit. 2). ⇒ Battre (le briquet). || Frotter une allumette (contre le frottoir). ⇒ Allumer, gratter (→ Fourgonner, cit. 4). || Frotter deux diamants l'un contre l'autre. ⇒ Égriser. || Frotter le pavé de ses pieds, frotter ses pieds contre le pavé (→ Cygne, cit. 3).
1 Si on frotte des corps durs et secs les uns contre les autres, ils s'échauffent et s'enflamment.
2 Rendre qqch. plus propre, plus luisant en frottant. ⇒ Astiquer (cit. 2), briquer, essuyer, fourbir, lustrer, nettoyer, polir, torcher. || Frotter du linge. || Frotter les cuivres (pour les faire reluire), frotter les carreaux, le plancher, le parquet (→ Dent, cit. 25; épousseter, cit. 1). || Frotter des chaussures. || Frotter à la toile émeri, au papier de verre, à la paille de fer. || Frotter avec une brosse (⇒ Brosser). || Frotter la robe, le poil d'un cheval (⇒ Bouchonner, étriller). — Frotter une substance, une surface pour enlever un dépôt (⇒ 1. Décaper, gratter, limer, racler, râper), pour polir (⇒ Polir, poncer, roder). || Frotter des verres. ⇒ Rincer. || Frotter qqch. avec un tampon. ⇒ Tamponner. || Frotter ses semelles sur un paillasson, un gratte-pieds. — Se frotter les pieds sur le tapis.
2 Elle ne reste pas un instant les bras croisés, et, quand nous n'avons pas d'ouvrage, elle nettoie et frotte nos pauvres meubles qu'elle rend clairs comme des miroirs.
G. Sand, la Mare au diable, V.
3 Le dimanche matin, elle se consacrait à un nettoyage minutieux, faisait briller des cuivres, frottait le bois où se réveillaient des reflets (…)
J. Chardonne, les Destinées sentimentales, p. 194.
♦ ☑ Fam. Frotter le parquet : danser (d'où frotte-parquet, n. m., « danseur » [vx]).
♦ ☑ Loc. fig. Régional (Belgique). Frotter la manche : flatter, flagorner pour obtenir des faveurs (→ Passer la brosse à reluire). ⇒ Frotte-manche.
♦ Absolt. Frotter le sol, le plancher. || Elle passe ses journées à frotter. || Et que je te frotte, et que je te rince…
4 (…) la vieille Rose (…) fit venir sa petite nièce Palmyre, pour laver la maison (…) la misérable, sur les genoux, trempée d'eau, s'épuisait à frotter (…)
Zola, la Terre, III, II.
3 (1273). Frotter (1.) [la peau, le corps, une partie du corps de qqn]. || Frotter qqn pour le laver. || Frotter le visage d'un enfant avec un gant de toilette. ⇒ Débarbouiller, laver. || Elle lui frotta la tête pour sécher les cheveux. || Frotter qqn pour réchauffer, activer la circulation, ranimer. ⇒ Frictionner, masser. || Frotter la peau avec un gant de crin. || On frottait autrefois les membres perclus avec des orties. ⇒ Ortier. || Elle lui frotta les mains dans les siennes (→ Échauffer, cit. 2).
♦ REM. Lorsqu'on exerce cette action sur soi-même la personne peut être exprimée soit par le pronom personnel, soit par le possessif (→ Laver). || Se frotter le bout du nez ou frotter le bout de son nez (→ Barboter, cit. 2). || Frotter ses mains, se frotter les mains avec du savon. || Se frotter les dents. || Se frotter les ongles, pour les polir. || Après les jeux, les athlètes grecs se frottaient les membres avec un strigile pour en détacher la sueur et la poussière. ⇒ Gratter, racler. — Récipr. Se frotter l'un l'autre. || Ils se frottaient le dos deux à deux (→ Baille, cit. 1).
5 (Une femme) qui me dorlotera et me viendra frotter lorsque je serai las (…)
Molière, le Mariage forcé, 1.
6 (…) relevant sa chemise dans le dos, elle se frotta l'échine sur le grain dur des draps.
Huysmans, Là-bas, XIX.
7 — Vous n'aimez pas Pâris, Hélène. Vous aimez les hommes !
— Je ne les déteste pas. C'est agréable de les frotter contre soi comme de grands savons.
Giraudoux, la Guerre de Troie n'aura pas lieu, I, 8.
8 Tout en se frottant les dents avec un petit morceau de bois pour les rendre blanches et plus brillantes que la lune (…)
P. Mac Orlan, la Bandera, XIV.
♦ Fam. || Frotter son museau (contre celui de qqn en l'embrassant). Récipr. || Se frotter le museau.
9 Et les voilà, unies dans le même amour pour Yves, et pleurant ensemble. — Allons, les femmes ! crie le conducteur, quand vous aurez fini de frotter vos museaux ?
Loti, Mon frère Yves, LXV.
♦ Fam. Avoir des attouchements érotiques avec qqn. ⇒ Peloter, tripoter.
♦ Argot (absolt). Avoir des relations érotiques, sexuelles.
♦ Spécialt, loc. (faux pron.). || Se frotter les paupières (avec les mains). || Frotter ses yeux, se frotter les yeux pour mieux voir (en se réveillant…), pour sécher ses larmes. ☑ Fig. Se frotter les yeux (d'étonnement), être très surpris. ⇒ Douter; → Ne pas en croire ses yeux.
10 Villeroy arriva à Marly, où tout le monde se frotta les yeux en le voyant, et ne se pouvait persuader que ce fût lui.
11 (…) vous ouvrez les oreilles, vous vous frottez les yeux, ne sachant qui vous trompe de la veille ou du sommeil.
Chateaubriand, Mémoires d'outre-tombe, t. VI, p. 297.
12 Tu ne veux donc pas m'emmener ! s'écria le petit en commençant à frotter ses yeux pour montrer qu'il avait dessein de pleurer.
G. Sand, la Mare au diable, VI.
13 Angelo se frotta longuement les yeux avec ses poings. Il revint s'asseoir à sa place. Il avait dû violemment se débattre dans son sommeil.
J. Giono, le Hussard sur le toit, p. 132.
♦ ☑ Se frotter les mains, en signe de contentement. Fig. || Il s'en frotte les mains. ⇒ Réjouir (se), satisfait (être satisfait).
14 Il (Louis XI) se frottait les mains, il riait de ce rire intérieur qui fait rayonner le visage; il ne pouvait dissimuler sa joie, quoiqu'il essayât par instants de se composer.
Hugo, Notre-Dame de Paris, X, V.
15 (…) tout à coup, avec une énergie diabolique, il frotta vigoureusement l'une contre l'autre ses mains sèches, d'où semblaient jaillir des étincelles (…)
Martin du Gard, les Thibault, t. II, p. 18.
♦ Frotter les oreilles, les côtes, etc. (→ ci-dessous, 5.).
16 (…) après avoir frotté ses pattes l'une contre l'autre, et les avoir frottées contre ses lèvres, il (le lapin) alla chercher la poule (…)
Réaumur, les Amours d'une poule et d'un lapin.
17 (La chèvre) vient de mettre sa tête contre le ventre de la femme. Elle frotte ses flancs contre le flanc d'Arsule.
J. Giono, Regain, p. 143-144.
♦ Faux pron. || Le chat se frotte le museau (→ Exubérance, cit. 3). || Mouche qui se frotte les pattes.
4 (XIIIe). || Frotter… de… : enduire par frottement, par friction. || Frotter qqch., qqn d'huile de graisse, de pommade. ⇒ Enduire, graisser, huiler, oindre, passer (à); → Épreindre, cit. 2; exciter, cit. 17. || Frotter qqch. de cire, de cirage, d'encaustique. — (Sans compl. second). || Frotter le parquet, un meuble. ⇒ Cirer, encaustiquer.
18 (…) il le frotta par tout le corps d'un certain onguent qu'il sait faire (…)
Molière, le Médecin malgré lui, I, 4.
19 Lengaigne (le barbier) avait déjà frotté son client de savon, et le tenait par le nez, lorsque Lequeu, le maître d'école, poussa la porte.
Zola, la Terre, I, IV.
♦ Frotter d'ail une tranche de pain.
♦ Au p. p. || Pain frotté d'ail, frotté à l'ail (⇒ Chapon).
20 Il y eut des beignets, de la confiture d'airelles, du lait de chèvre chaud, avec des poils, une rôtie de pain frottée d'ail (…)
J. Giono, Jean le Bleu, p. 128.
20.1 « Des croûtons de pain vieux frottés d'oignon ou d'ail, arrosés d'une goutte d'huile d'olive bien fruitée, voilà dont je ne me lasserais pas », pense-t-il.
Pieyre de Mandiargues, la Marge, p. 151.
♦ (1839, Balzac). Fig. et vieilli. || Être frotté de… : avoir une légère teinture, un vernis (de connaissance, de science). || Ignorant frotté de grec et de latin.
21 (…) une bêtise impertinente, frottée d'esprit comme le pain d'un manœuvre est frotté d'ail.
Balzac, Splendeurs et Misères des courtisanes, Pl., t.V, p. 660.
22 (…) le moindre démon de l'enfer eût dit moins de sottises, étant un peu frotté de théologie et certes moins ignorant qu'un encyclopédiste.
France, Les dieux ont soif, XIX.
23 Au siècle précédent, ils avaient été frottés de jansénisme frondeur (…)
R. Rolland, Jean-Christophe, Antoinette, p. 832.
♦ (1845, Bescherelle). Peint. Appliquer un frottis sur. || Frotter les ombres. — Au p. p. || « Un fond à peine frotté » (Littré). — Par comparaison :
24 (…) il se plut à inspecter de près ces arbres. Ils érigeaient des troncs énormes, frottés d'orpin roux, gouachés d'argent gris par des mousses (…)
Huysmans, En route, p. 234.
5 (XIIIe). Vieilli. Donner des coups à qqn. ⇒ Battre, frapper, étriller, maltraiter, rosser; frottée (→ Filer, cit. 12). || Il va se faire frotter d'importance (→ Bois, cit. 26). || Frotter le dos, la tête de qqn, lui frotter le dos. — ☑ (1669, Molière). Loc. mod. Frotter les oreilles (à qqn), le morigéner, le punir. || Je vais te frotter les oreilles, petit garnement !
25 (…) je saurai vous frotter les oreilles.
Molière, Tartuffe, I, 1.
26 Un autre dit : « Nous avons été joliment téméraires : nous n'étions que sept mille hommes, nous en avons attaqué vingt-six (mille); aussi faut voir comme nous avons été frottés »
Mme de Sévigné, 433, 21 août 1675.
6 Fig. et littér. Mettre en contact suivi; faire entrer en relations. || « … frotter et limer notre cervelle contre celle d'autrui » (Montaigne, → Commerce, cit. 10).
27 On n'a pas toujours besoin de frotter sa sensibilité à une autre (…)
A. Maurois, Climats, III, II.
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II V. intr. (1865, Littré). Exercer, produire un frottement en se mouvant au contact de qqch. || Roue qui frotte contre un trottoir. || Pièces d'un mécanisme qui frottent. ⇒ Gripper.
28 De tous côtés on se cogne, on frotte, on est empoigné par l'étroitesse du passage, on est arrêté, coincé.
H. Barbusse, le Feu, XXI.
➪ tableau Verbes exprimant une idée de mouvement.
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se frotter v. pron.
1 (1865, Littré). Réfl. Frotter son corps. ⇒ Friction. || Se frotter au gant de crin. || Se frotter à un mur, contre un mur. || Bœuf, vache qui se frotte contre une clôture. || Chat qui se frotte en ronronnant contre les jambes de quelqu'un.
29 Et comme Jean se décidait à entrer dans la cuisine, elle le prit par la taille, se frottant à lui d'un air de rire, sans s'inquiéter d'être vue (…)
Zola, la Terre, I, I.
30 Le chat siamois bondit silencieusement et se frotta contre l'un des pieds nus.
Aragon, les Beaux Quartiers, II, XXXIII.
♦ Spécialt (absolt). || Se frotter : avoir des contacts érotiques avec quelqu'un.
31 Frottez-vous de pommade, mangez et dormez.
Voltaire, Candide, VII.
♦ Fig. || Se frotter de latin, de grec. En prendre une connaissance superficielle. ⇒ Apprendre, teinter (se). → ci-dessus, Être frotté de…
3 (Av. 1613). Vx. || Se frotter à qqn : avoir commerce, communication avec qqn. ⇒ Frayer (avec), fréquenter (→ Circonstance, cit. 2). || Se frotter à la haute société. || « Il est bon de se frotter aux savants » (Littré).
32 (…) vous vous êtes encore perfectionné en vous frottant à M. de Nevers.
Mme de Sévigné, 1320, 15 mai 1691.
♦ (XVe). Mod. Spécialt. (dans quelques expressions, surtout négatives). || Se frotter à qqn, l'attaquer. ⇒ Attaquer, défier, provoquer. || Il vaut mieux ne pas se frotter à ces gens-là. || Il vaut mieux ne pas s'y frotter; ne vous y frottez pas. ☑ Prov. Qui s'y frotte s'y pique. — Par ext. Affronter (un danger, un risque). ⇒ Entreprendre, risquer. || Il a eu tort de s'y frotter, de courir le risque.
33 (Il) choisissait ses types et n'eût eu garde de perdre son temps à se frotter aux Parigots, lesquels, nés malins (…) avaient vite éventé la mèche et deviné le dessous des cartes.
Courteline, le Train de 8 h 47, I, II.
♦ Se frotter à qqch., avoir des relations suivies avec. || Se frotter aux idées nouvelles, aux mathématiques. || « J'avais envie depuis longtemps de me frotter à l'industrie, ajoute-t-il Le hasard a bien fait les choses » (le Point, no 578, 17-23 oct. 1983, p. 107)
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frotté, ée p. p. adj.
1 Concret. || Parties frottantes et parties frottées (d'un mécanisme). — Mus. || Instruments à cordes frottées, mises en vibration par frottement (archet, etc.). — Pain frotté d'ail → ci-dessus, cit. 20, 20.1 et supra. — Arts. || Fonds frottés; toile, ébauche frottée (→ ci-dessus, supra cit. 24)
♦ N. m. || Un frotté : toile recouverte d'un frottis. Dessin au crayon usé par le frottement.
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CONTR. Glisser.
DÉR. Frottable, frottage, frottailler, frottant, frotte, frottée, frottement, frotteur, frotti-frotta, frottin, frottis, frottoir, frotton, frotture.
COMP. Frotte-manche.
Encyclopédie Universelle. 2012.