satisfait, aite [ satisfɛ, ɛt ] adj.
1 ♦ Qui a ce qu'il veut. ⇒ content. Se déclarer, s'estimer satisfait, très satisfait. ⇒ comblé. « Ceux-là seuls qui se rapprochent de la brute sont contents et satisfaits » (Maupassant). Un air satisfait. Par antiphr. Vous voilà satisfait, vous êtes bien avancé ! (cf. Vous l'avez voulu).
2 ♦ SATISFAIT DE. Être satisfait d'un élève, d'un employé. Nous en sommes très satisfaits. Être satisfait d'un objet, d'un achat (cf. En avoir pour son argent). Absolt Satisfait ou remboursé. Être satisfait de son sort. « J'ai été très satisfait de ma soirée » (Flaubert). — « Satisfaite de vivre » (Zola).
3 ♦ (Choses) Qui est assouvi, réalisé. Besoins, désirs satisfaits.
⊗ CONTR. Fâché. Insatisfait, mécontent. Inassouvi.
satisfait, aite
adj. Dont les désirs sont comblés; content. être satisfait de son sort.
|| Assouvi. Passion satisfaite.
⇒SATISFAIT, -AITE, part. passé, adj. et subst.
I. — Part. passé de satisfaire.
II. — Adjectif
A. — [En parlant d'une pers.]
1. Vieilli ou littér. Qui a reçu réparation d'une offense, d'un affront. Si votre adversaire ne se déclare pas satisfait, votre duel doit continuer (CAMUS, Possédés, 1959, 2e part., 10e tabl., p. 1026).
— [En parlant de Dieu] Seigneur, Seigneur! Parlez, êtes-vous satisfait? (LECONTE DE LISLE, Poèmes trag., 1886, p. 319).
2. a) Qui est comblé dans ses aspirations, dans ses désirs. S'estimer, se montrer, se trouver satisfait; être complètement, parfaitement, très satisfait. L'homme satisfait n'écrit pas (GREEN, Journal, 1948, p. 192).
— [En parlant d'un besoin naturel] Et il était d'une gaieté de gros homme, sa barbe jaune en coup de vent, les joues rouges d'avoir trop mangé, heureux et satisfait dans tous ses appétits (ZOLA, Pot-Bouille, 1882, p. 179).
♦ En partic., dans le domaine de l'amour, de la sexualité. De cette May satisfaite, assouvie, sans doute se détachera-t-il ou plutôt, c'est elle qui, comme un mirage d'adolescence et de pureté, se dissipe (MAURIAC, Chair et sang, 1920, p. 201):
• 1. ... un empereur qui avait cinquante filles pucelles, il les épousa toutes la même nuit, si bien que le lendemain matin elles se trouvèrent toutes femmes bien satisfaites et instruites.
FRANCE, Contes Tournebroche, Gab olivier, 1908, p. 9.
b) Qui est comblé dans son désir de logique, de beauté, d'intelligence. Je suis satisfait de cette ébauche, mais comment conserver, en ajoutant des détails, cette impression d'ensemble qui résulte des masses très simples? (DELACROIX, Journal, 1847, p. 196).
3. [P. antiphr., le compliment faisant figure de reproche] Vous voilà satisfait. Tu m'as réveillé, tu peux être satisfait. [L'attitude] peut du moins être utile à l'espion et au coquin que tu es. Sois donc satisfait. Je ne m'abaisserai pas à répondre à ton ignoble question (CAMUS, Possédés, 12e tabl., 1959, p. 1053.
4. [P. méton.]
a) Qui est comblé, qui a reçu satisfaction. L'œil est partout satisfait et caressé; c'est de la mélodie plutôt encore que de l'harmonie [le portrait de Mme de Pompadour par La Tour] (SAINTE-BEUVE, Caus. lundi, t. 2, 1850, p. 508). Mes pieds étaient guéris, mes cheveux coupés, mon estomac satisfait (ABOUT, Roi mont., 1857, p. 285). Et ce n'est pas parce que le ventre exige le pain du voisin, le mange, et dort content, que la raison doit être satisfaite (ALAIN, Propos, 1909, p. 70).
b) Qui manifeste de la satisfaction.
— [En parlant d'un moyen d'expr.] Air, sourire, visage satisfait. Il accrocha son chapeau au télégraphe et jeta autour de lui un regard satisfait (MUSSET ds Le Temps, 1831, p. 70). Le jardin, en les voyant [Albine et Serge], avait eu comme (...) un murmure satisfait (ZOLA, Faute Abbé Mouret, 1875, p. 1403).
— [En parlant de ce qui physiquement laisse supposer un état de satisfaction, de satiété] Rubens les sentait [les instincts] en lui-même, et la poésie de la grosse vie plantureuse, de la chair satisfaite et dévergondée, de la joie brutale et gigantesquement épanouie, venait s'étaler dans les sensualités abandonnées (...) qu'il prodiguait (TAINE, Philos. art, t. 1, 1865, p. 32). Il est des laideurs satisfaites, étalées, agressives, qui sont plus exécrables que des vices (LOTI, Vertige mond., 1917, p. 116).
— Péj. Qui manifeste de l'orgueil, de la suffisance. Avoir un air satisfait. Il a une fatuité satisfaite qui fait qu'il dit du bien des autres sur leurs formes, des auteurs sur leur style, de chacun sur sa partie extérieure, comme l'intérieur et le fond des choses ne valant pas la peine d'être jugé (CONSTANT, Journaux, 1805, p. 205).
5. Satisfait de. Qui a obtenu satisfaction de quelqu'un, de quelque chose; qui est content, ravi.
♦ Satisfait de qqn. Il n'a été satisfait que d'une élève (ALAIN-FOURNIER, Corresp. [avec Rivière], 1910, p. 204).
♦ Satisfait de qqc. Satisfait d'un achat. Marchons-nous bien? Êtes-vous satisfait de votre navire, John? (VERNE, Enf. cap. Grant, t. 1, 1868, p. 46). Avides et durs, jamais satisfaits de rien, avec on ne sait quoi d'intraitable (BERNANOS, Journal curé camp., 1936, p. 1214).
♦ Satisfait de + inf. Emma fut intérieurement satisfaite de se sentir arrivée du premier coup à ce rare idéal des existences pâles, où ne parviennent jamais les cœurs médiocres (FLAUB., Mme Bovary, t. 1, 1857, p. 43).
♦ Absol. Jamais satisfait, oui, mais jamais dégoûté (PÉLADAN, Vice supr., 1884, p. 77). C'était une agréable camarade, toujours gaie, toujours satisfaite (MAUROIS, Climats, 1928, p. 45):
• 2. — Êtes-vous heureuse, Renée? demanda soudain Gilbert. — Moi?... Mais oui. Pourquoi? — Ma question n'a guère de sens. Je voulais dire: êtes-vous satisfaite? Non, pas satisfaite; — contente de vous? Ce n'est pas encore cela. N'avez-vous rien à vous reprocher? Ne regrettez-vous rien? Ne désirez-vous rien?
ARLAND, Ordre, 1929, p. 236.
♦ Satisfait ou remboursé (v. rembourser B).
— Péj. Qui témoigne d'une satisfaction excessive à l'égard de soi-même. Il avait une façon nette et paradoxale d'exprimer ses opinions qui fermait la bouche aux imbéciles satisfaits et aux mécontents sans savoir pourquoi (MAUPASS., Contes et nouv., t. 1, Dimanches bourg. Paris, t. 1, 1880, p. 326).
♦ Être satisfait de soi-même. Être plein de soi, plein d'autosatisfaction. Cependant la reine cheminait sur un chameau, fort satisfaite d'elle-même (BARRÈS, Cahiers, t. 14, 1922, p. 12):
• 3. Il disait les uns après les autres tous les gens qu'il avait rencontrés, les villages où il avait été, les ordonnances qu'il avait écrites, et satisfait de lui-même, il mangeait le reste du miroton, épluchait son fromage, croquait une pomme, vidait sa carafe, puis s'allait mettre au lit, se couchait sur le dos et ronflait.
FLAUB., Mme Bovary, t. 1, 1857, p. 47.
B. — [En parlant d'une chose]
1. Qui est réalisé. Synon. comblé, assouvi. Tout besoin satisfait est un plaisir (MAINE DE BIRAN, Journal, 1814, p. 20). Satisfait, le désir mourait: cessait-elle d'être l'inconnu, Proust cessait d'être altéré de connaître, il cessait d'aimer (G. BATAILLE, Exp. int., 1943, p. 211).
2. Qui a reçu satisfaction. Caprice, impatience, vengeance satisfait(e). Tout est dit. Maintenant, vos volontés seront scrupuleusement satisfaites, mais aux dépens de votre vie (BALZAC, Peau chagr., 1831, p. 40). Les honorables adversaires (...) ont échangé leur feu. Personne, heureusement, n'a été blessé. Les témoins sont intervenus et ont déclaré l'honneur satisfait (VEUILLOT, Odeurs de Paris, 1866, p. 117).
III. — Subst. Personne dont les désirs ont été comblés. Synon. nanti. Et quel était le profit net de la révolution accomplie? Que (...) des milliers d'hommes gémissaient dans les carrières de Juda (...) pour procurer à quelques satisfaits des habitations commodes (RENAN, Hist. peuple Isr., t. 2, 1889, p. 171). Il y a chez nous, comme autrefois, des avares et des prodigues, (...) des satisfaits et des mécontents (FRANCE, Pierre bl., 1905, p. 295).
— Péj. Personne qui manifeste une satisfaction excessive et injustifiée. Ce soi-disant César, ce boucher, ce marchand de vins obèse [dans le Siècle d'Auguste, par Gérome] (...) pourrait (...) aspirer au rôle de directeur du journal des Ventrus et des satisfaits (BAUDEL., Curios. esthét., 1859, p. 246). Voilà ce que j'avais à dire en quittant ce monde de satisfaits (LAFORGUE, Moral. légend., 1887, p. 270).
Encyclopédie Universelle. 2012.