céder [ sede ] v. <conjug. : 6>
• 1377; lat. cedere « s'en aller »
I ♦ V. tr.
1 ♦ Abandonner, laisser à qqn. ⇒ concéder, donner, livrer, passer, pop. refiler, transmettre. Céder sa place, son tour à qqn. Céder un objet auquel on tient. — Loc. Céder du terrain : reculer, battre en retraite; fig. faire des concessions, un compromis. Céder le pas.
2 ♦ Dr. Transporter la propriété de (qqch.) à une autre personne. ⇒ concéder, se dessaisir, livrer, rétrocéder, transférer, vendre. Céder un magasin, un fonds, un bail, une créance (⇒ cession) . Un bien qu'on ne peut céder. ⇒ incessible. Celui qui cède (⇒ cédant) , à qui on cède (⇒ cessionnaire) qqch.
3 ♦ Fig. Vieilli Le céder à qqn : être inférieur à lui, se reconnaître au-dessous de lui. Mod. Il ne lui cède en rien : il est son égal.
II ♦ V. tr. ind. et intr. (XVIe)
1 ♦ CÉDER À : ne plus résister, se conformer à la volonté de (qqn). ⇒ acquiescer, consentir, déférer, obéir, se résigner, se soumettre. Céder à qqn, à ses prières, à ses menaces. Sa mère lui cède en tout, passe tous ses caprices. — Se laisser aller. ⇒ écouter, succomber. Céder au sommeil. Céder à la tentation. « Il cédait plus volontiers aux impulsions du cœur qu'aux remontrances de la raison » (Duhamel).
2 ♦ Absolt ⇒ capituler, faiblir, fléchir, mollir, plier, reculer, se rendre, renoncer; région. baster (cf. Lâcher pied). Céder par faiblesse, par lassitude. Il finira bien par céder. « Je refuse tout nouveau combat. Je cède, vous comprenez, je renonce. Je fais la paix » (Duhamel) . — Céder devant les menaces, l'insistance. Nous ne céderons pas sur ce point.
3 ♦ (1798) (Choses) Ne plus résister à la pression, à la force. ⇒ s'abaisser, s'affaisser, se courber, s'écrouler, s'enfoncer, rompre. La digue, la corde a cédé. Une branche qui cède sous le poids des fruits. Fléchir, plier sans céder.
4 ♦ (Abstrait) Disparaître, cesser. ⇒ 1. tomber. « Cette irritation céda bientôt pour faire place à un frémissement mystérieux » (Barrès).
⊗ CONTR. Conserver, garder. — Résister. Entêter (s'), obstiner (s'), opposer (s'), 1. repousser, révolter (se), tenir (bon).
● céder verbe transitif (latin cedere, s'en aller) Abandonner quelque chose à quelqu'un, le lui laisser, le lui donner : Je vous cède le passage. Vendre ou revendre un bien, un objet à quelqu'un et, en particulier, procéder à une cession de bail, de créance, de droit, etc. : Il me cède son fonds de commerce pour une somme dérisoire. ● céder (difficultés) verbe transitif (latin cedere, s'en aller) Conjugaison Attention à l'accent, tantôt grave, tantôt aigu : je cède, nous cédons ; il céda. ● céder (expressions) verbe transitif (latin cedere, s'en aller) Littéraire. Ne pas le céder en quelque chose, ne le céder en rien à quelqu'un, à quelque chose, être au moins son égal dans un certain domaine, l'égaler ou le surpasser : Il ne le cède en courage à personne. Céder le pas à quelqu'un, le laisser passer devant soi par déférence ; reconnaître sa supériorité. ● céder (synonymes) verbe transitif (latin cedere, s'en aller) Abandonner quelque chose à quelqu'un, le lui laisser, le lui donner
Synonymes :
- concéder
- donner
- laisser
- livrer
- passer (familier)
Contraires :
- garder
- se réserver
Vendre ou revendre un bien, un objet à quelqu'un et...
Synonymes :
- revendre
Contraires :
- acheter
- acquérir
● céder
verbe intransitif
Ne pas résister à une action, à une force et se rompre, se briser : La valise est trop lourde, la poignée risque de céder.
Ne pas résister à une argumentation, à une analyse, perdre toute valeur : Hypothèse qui cède à la première analyse rigoureuse.
Cesser, disparaître, se dissiper sous l'action, l'effet de quelque chose : La fièvre finit par céder.
Ne plus pouvoir résister à quelqu'un, à son action, être vaincu : Nos troupes ont cédé sous les assauts de l'ennemi.
Ne plus rester sur ses positions, accepter un compromis : Aucun des deux n'a voulu céder.
● céder
verbe transitif indirect
Se laisser fléchir par quelqu'un, faire ce qu'il attend : Céder aux caprices de son enfant.
En parlant d'une femme, se donner à un homme.
Ne pas résister, se laisser aller à quelque chose : Céder au sommeil.
● céder (difficultés)
verbe intransitif
Conjugaison
Attention à l'accent, tantôt grave, tantôt aigu : je cède, nous cédons ; il céda.
● céder (synonymes)
verbe intransitif
Ne pas résister à une argumentation, à une analyse, perdre...
Synonymes :
Cesser, disparaître, se dissiper sous l'action, l'effet de quelque chose
Synonymes :
- casser
- craquer
- lâcher
- ployer
- sauter
Ne plus pouvoir résister à quelqu'un, à son action, être...
Synonymes :
- plier
- renoncer
Ne plus rester sur ses positions, accepter un compromis
Synonymes :
- fléchir
- renoncer
- se résigner
● céder (difficultés)
verbe transitif indirect
Conjugaison
Attention à l'accent, tantôt grave, tantôt aigu : je cède, nous cédons ; il céda.
● céder (synonymes)
verbe transitif indirect
Se laisser fléchir par quelqu'un, faire ce qu'il attend
Synonymes :
- fléchir
- plier
Ne pas résister, se laisser aller à quelque chose
Synonymes :
céder
v.
rI./r v. tr.
d1./d Laisser, abandonner (qqch à qqn). Céder sa place.
|| Céder du terrain: reculer, fléchir; fig. faire des concessions.
|| Céder le pas (à une personne): s'effacer pour la laisser passer; fig. lui laisser la prééminence en telle ou telle occasion.
— (Choses) Perdre de l'importance au profit de.
|| Le céder à: s'avouer, être inférieur à. Il ne le cède à personne en courage.
d2./d DR Transférer un droit sur une chose à une autre personne.
— Par ext. Revendre. Céder un fonds de commerce. Syn. vendre.
rII./r v. tr. indir.
d1./d Ne pas résister, ne pas s'opposer, se soumettre à. Céder au nombre, à la raison. Elle céda à la tentation de tout lui raconter.
|| S'abandonner (à un homme, en parlant d'une femme).
⇒CÉDER, verbe.
I.— Emploi trans.
A.— Usuel. [Le suj. désigne un animé gén. hum.]
1. Céder qqc. (à qqn). Abandonner (à quelqu'un) volontairement ou non, avec ou sans contrepartie, un bien, un droit ou un avantage dont on jouit ou auquel on peut prétendre. Céder la parole (à qqn); céder le passage (à qqn); céder la/sa place, son tour; céder la victoire. Je vous ai cédé expressément la parole, mon cher ami : ainsi, c'est à vous de commencer (J. DE MAISTRE, Les Soirées de Saint-Pétersbourg, t. 1, 1821, p. 423). Bouilloux se voit apporter un gigot entier dont il ne cède rien à personne, que l'os dépouillé (COLETTE, La Maison de Claudine, 1922, p. 108) :
• 1. ... le critique littéraire n'est pas à proprement parler un journaliste (...). S'il doit céder ce poste à un confrère, il est bien rare qu'il puisse remplir une autre fonction à la rédaction.
G. et H. COSTON, L'A.B.C. du journ., 1952, p. 117.
SYNT. Céder le haut du pavé à qqn [P. réf. aux anciennes rues avec ruisseau au milieu, dont la partie haute, la plus propre, était réservée aux gens « de qualité »] Un cocher de grande maison, qui n'eût pas cédé le haut du pavé à un prince de sang, et qui coupait insolemment toutes les voitures (T. GAUTIER, Le Capitaine Fracasse, 1863, p. 334); au fig. laisser primer quelqu'un. Céder le pas à qqn. Le laisser passer devant soi; au fig. passer au second plan, se reconnaître ou être inférieur. [En parlant de choses] Céder le pas à qqc. Diminuer d'importance. La production romanesque cède le pas aux études historiques (Arts et litt. dans la société contemp., 1936, p. 8409). [Avec un obj. pronom. neutre à valeur seulement formelle] Le céder à qqn, à qqc. Lui être inférieur. La sottise de M. Déat ne le cède point à celle de M. Fauconnet (NIZAN, Les Chiens de garde, 1932, p. 192). Le céder à qqn en qqc. Il ne le cède à personne en courage (Ac. 1932). Ne le céder en rien à qqn, à qqc. Être son égal. Cette sauce [à la française] a une physionomie qui lui est particulière, et elle ne le cède en rien aux autres sauces pour servir le poisson (Les Gdes heures de la cuis. fr., Carême, 1833, p. 134). Céder le/du terrain à qqn. Battre en retraite, reculer. Ses troupes progressent lentement, puis, violemment contre-attaquées, elles doivent céder le terrain conquis (FOCH, Mémoires, t. 1, 1929, p. 156); au fig. régresser, faire des concessions.
— Emploi pronom. passif. De telles choses ne se cèdent pas facilement (Ac. 1932).
— En partic., DR. Procéder à une cession (de bail, de créance, etc.). Céder un bien, un droit (à qqn). Le droit d'habitation ne peut être cédé ni loué (Code civil, 1804, p. 116). En cédant le bail, on obtiendrait sans doute du nouveau locataire les deux termes en retard (ZOLA, L'Assommoir, 1877, p. 651).
2. Plus rarement. Céder qqn (à qqn) :
• 2. Si, (...) un maître est défaillant, il peut céder son apprenti à un autre maître du même métier; mais l'apprenti ne peut pas changer de maître par rupture de contrat avec le premier.
FARAL, La Vie quotidienne au temps de st Louis, 1942, p. 71.
3. [En incise, avec superposition de l'idée de « dire »] « Soit! » céda le prince dans l'espoir de restituer une partie de son patrimoine à Corysandre (J. PÉLADAN, Le Vice suprême, 1884, p. 261).
B.— Rare. [Le suj. désigne un inanimé] Céder qqc. (à qqc.). Libérer, répandre une émanation, un dégagement de quelque chose (vers une autre chose) :
• 3. ... les nébuleuses ne s'échauffent pas quand les soleils leur envoient de la chaleur, mais c'est parce qu'elles cèdent à leur tour de la chaleur à une source encore plus froide, le vide dont la température absolue est nulle.
H. POINCARÉ, Leçons sur les hyp. cosmogoniques, 1911, p. 255.
II.— Emploi intrans.
A.— [Le suj. désigne un animé]
1. [Avec un compl. subst. précédé de la prép. à ou pron. sans prép.]
a) Céder à qqn. Laisser l'avantage à quelqu'un, se soumettre à la domination ou à l'emprise de quelqu'un. Céder à un ennemi, à un rival; céder à l'autorité, à ses supérieurs. Céder une fois à un maître chanteur, c'est se préparer à lui céder toujours (ABELLIO, Heureux les pacifiques, 1946, p. 241).
♦ Céder en qqc. à qqn. Il lui cède en mérite, en expérience (Ac. 1798-1932).
— Spéc. [Le suj. désigne une femme] S'abandonner à un homme, lui accorder les dernières faveurs. De notre temps, les jeunes femmes cédaient à leurs maris avec le sentiment d'accomplir un devoir difficile (AYMÉ, Travelingue, 1941, p. 160) :
• 4. Oui, l'amour enfin me charme,
Contre lui, je n'ai plus d'arme.
Cédons!
Je lui cède avec ivresse,
J'attends tout de sa caresse
Et mes lèvres sont mes dons.
APOLLINAIRE, Casanova, 1918, III, pp. 1015-1016.
♦ Emploi abs. Qui croyez-vous que je sois? Une femme qui cède ainsi, en trois minutes, affaire de passer le temps en taxi? (DRUON, Les Grandes familles, t. 2, 1948, p. 80).
b) Céder à qqc. S'abandonner à une impulsion, une passion, un sentiment, cesser de résister à une contrainte par faiblesse ou par raison. Monsieur ne résiste plus! Il cède complètement à ses vices!... Monsieur se laisse emporter!... Il roule au ruisseau! (CÉLINE, Mort à crédit, 1936, p. 490) :
• 5. Je sais qu'il est dur, pour un capitaine de céder à la menace d'une femme. Tiens, je suis bonne fille. Sans doute aimeras-tu mieux céder à mes prières?
AYMÉ, Vogue la galère, 1944, p. 155.
SYNT. Céder à son instinct, à son penchant, à la tentation; céder au caprice, à la colère, au découragement, à la facilité, à la fureur, à l'habitude, à l'impatience, à l'irritation, à la passion, à la peur, à la rancune; céder à la fatigue, à la lassitude, au sommeil; céder aux circonstances, à la force, à la menace, au nombre, à l'opinion, à la violence; céder à l'évidence, à la nécessité, à la raison; céder aux instances, aux intimidations, aux larmes, aux objurgations, aux pressions, aux prières, aux sollicitations, aux vœux de quelqu'un.
2. Emploi abs. Renoncer à résister, se soumettre. Être contraint, forcé, obligé de céder; ne pas vouloir céder; céder sans combattre, sans résister. Je refuse tout nouveau combat. Je cède, vous comprenez, je renonce. Je fais la paix (G. DUHAMEL, Chronique des Pasquier, Les Maîtres, 1937, p. 252).
♦ Céder sur qqc. Il faut y aller, et puis surtout ne pas céder sur les prix! (R. BAZIN, Le Blé qui lève, 1907, p. 191). Fuir, céder, lâcher, mais oui, regarde, c'est toute ma vie! Céder sans cesse sur le secondaire pour rester fort sur l'essentiel (MONTHERLANT, Les Olympiques, 1924, p. 318).
B.— [Le suj. désigne un inanimé]
1. [Avec un compl. subst. précédé de la prép. à]
a) Céder à qqc.
— Ne pas résister à un effort, à une poussée. C'est la croûte extérieure qui éclate, cédant à une irrésistible poussée (BERGSON, Essai sur les données immédiates de la conscience, 1889, p. 134) :
• 6. Dures grenades entr'ouvertes
Cédant à l'excès de vos graines,
Je crois voir des fronts souverains
Éclatés de leurs découvertes!
VALÉRY, Charmes, 1922, p. 146.
— Disparaître, s'estomper en laissant la place à autre chose. Le civil prend le pas sur le militaire; l'épée cède à la plume (LARBAUD, Ce Vice impuni, la lecture, Domaine français, 1941, p. 41) :
• 7. Chaque matin, la caravane se met en marche, à l'heure où les ombres et la lumière se combattent, avant que toutes les étoiles aient cédé au soleil...
BARRÈS, Un Jardin sur l'Oronte, 1922, p. 130.
b) Céder à qqn. Tout cède à ce redoutable conquérant (Ac. 1932).
2. Emploi abs.
a) Ne pas résister sous l'action d'une force, d'une poussée, s'enfoncer, fléchir, plier ou se rompre. Les étançons flexibles [pour cultivateurs] cèdent sans se fausser grâce à leur flexibilité (PASSELÈGUE, Les Machines agric., 1930, p. 81). Je passai devant et poussai. Le verrou céda et un gros plâtras tomba sur le sol (BOSCO, Le Mas Théotime, 1945, p. 201).
— Céder sous qqc. Il me semblait que quelque chose cédait doucement sous mon poids comme du sable mouvant (GRACQ, Le Rivage des Syrtes, 1951, p. 172).
b) Cesser de se manifester, disparaître, s'estomper. Le mal paraissait céder; la douleur céda (Ac. 1878, 1932). Eh bien! Lureux, il va geler cette nuit, si le vent cède? (R. BAZIN, Le Blé qui lève, 1907, p. 6). Il respira profondément plusieurs fois, comme si l'air lui manquait; puis sa pâleur céda un peu : il faisait effort pour se dominer (DANIEL-ROPS, Mort, où est ta victoire? 1934, p. 354).
— Céder devant qqc. :
• 8. ... le style gothique cédait déjà devant un art nouveau, alors que les gens de la péninsule [la Bretagne] s'appliquaient encore à ciseler les fioritures de leurs gracieux clochers à jour.
L. HOURTICQ, Hist. gén. de l'Art, La France, 1914, p. 59.
Prononc. et Orth. :[sede], (je) cède []. La conjug. est celle de abréger pour l'alternance é/è. Demi-longueur pour la voyelle de cède ds PASSY 1914. Ds Ac. 1694-1932. Étymol. et Hist. 1. 1377 « (le sujet désignant un inanimé) s'effondrer sous l'effet d'une pression » (ORESME, Livre du ciel et du monde 160 d 72 — 16 ds Medieval studies, Toronto, t. 5, 1943, p. 298); à nouv. au XVIIIe s. 1798 « s'affaisser sous le poids, casser » (Ac.); 2. 1511 ceder a « abandonner, renoncer à » (LEMAIRE DE BELGES, Schismes et Conciles, 3e part. ds HUG.); 1534 trans. « transférer ses droits sur quelque chose à » (RABELAIS, Gargantua, 32, éd. Marty-Laveaux); 1673 part. prés. subst. « celui qui transfère son droit » (Edit, mars ds ISAMBERT, Recueil gén. des anc. lois fr., Paris, t. 19, 1829, p. 78); 1537 ceder lieu en « laisser la place à » (Le Courtisan — de B. Castiglione; trad. de Jean Chaperon? — Livre I, 11 r° ds QUEM.); 1662 céder la place à (PASC., Pens., V, 6 ds DG); 1671 ceder le pas à qqn (POMEY, s.v. pas); 1671 fig. Ie ne luy cede en rien « je ne lui suis inférieur en rien » (POMEY); 1690 « abandonner quelque chose pour un temps ou par civilité » (FUR.); d'où av. 1866 emploi fig. céder le haut du pavé, le pavé « laisser primer » (P.-L. Courier ds Lar. 19e); 3. a) 1580-92 « ne plus résister, diminuer d'importance, s'effacer devant une puissance supérieure » (MONT. II, 87 ds LITTRÉ); b) 1673 absol. « se soumettre » (RAC. Mithr. III, 1 ds LITTRÉ); 1890 en parlant d'une femme « s'abandonner à un homme » (DG). Empr. au lat. class. cedere « s'en aller » puis au sens 2 « renoncer »; « concéder »; 3 « se soumettre, le céder à »; 1 « (d'un inanimé) s'affaisser sous « l'effet d'une pression ». Fréq. abs. littér. :4 479. Fréq. rel. littér. :XIXe s. : a) 5 955, b) 4 739; XXe s. : a) 6 396, b) 7 581. Bbg. DUCH. 1967, § 53. 3. — GOTTSCH. Redens. 1930, p. 113.
céder [sede] v. tr. et intr. [CONJUG. je cède, nous cédons; je céderai (voir tableau des conjug.).]
ÉTYM. 1377; lat. cedere « s'en aller ».
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I V. tr.
1 Abandonner, laisser (une chose, un droit…) à qqn. ⇒ Abandonner, accorder, concéder, donner, livrer, passer (fam.), transmettre; refiler (fam.). || Céder sa place, son tour à qqn. || Céder la parole à qqn. ☑ Céder le pas à qqn, s'effacer devant lui; au fig., reconnaître sa supériorité, s'incliner devant lui. || Céder un objet auquel on tient.
1 Alexandre, par générosité, lui céda l'objet de ses vœux.
Molière, le Sicilien, 11.
2 Je leur cède (aux grands) leur bonne chère (…) mais je leur envie le bonheur d'avoir à leur service des gens qui les égaient (…)
La Bruyère, les Caractères, IX, 3.
3 Voici Britannicus : je lui cède ma place.
Racine, Britannicus, I, 2.
4 Napoléon s'est bien perdu pour ne pas céder un village.
Stendhal, De l'amour.
5 À la voir debout dans le métro parisien, le plus enragé butor lui céderait une place assise.
G. Duhamel, Scènes de la vie future, XI, p. 164.
♦ ☑ Loc. Céder du terrain : reculer, laisser le terrain à un ennemi qui avance. ⇒ Battre (en retraite). — Au fig. Faire des concessions, un compromis. ⇒ Composer (→ fam. Mettre les pouces).
♦ ☑ Céder le haut du pavé : laisser la première place (⇒ Pavé).
2 Dr. (En général sans compl. en à). Transporter la propriété de (un bien, une chose) à une autre personne. ⇒ Concéder, dessaisir (se), livrer, rétrocéder, transférer, vendre. || Céder un magasin, un fonds, un bail. || Céder ses droits. || Céder une créance. || Céder l'usufruit d'un domaine (⇒ Cédant; cession; cessionnaire; concession). || Un bien qu'on ne peut céder (⇒ Incessible).
6 Le preneur a le droit de sous-louer, et même de céder son bail à un autre, si cette faculté ne lui a pas été interdite.
Code civil, art. 1717.
6.1 Il paraît que tu leur as proposé de leur céder ton appartement (…)
N. Sarraute, le Planétarium, p. 173.
3 ☑ Fig. et vieilli. Le céder à qqn, être inférieur à lui, se reconnaître au-dessous de lui. — Sans compl. (Vx). || Le céder en habileté, en grâce, en mérite. — ☑ Mod. Il ne le lui cède en rien : il est son égal. || « Il ne le cède à personne en courage » (Académie).
7 Il aurait été tenté de nous regarder comme des intelligences supérieures, s'il n'avait éprouvé combien nous lui cédions à d'autres égards (…)
7.1 Le prince Camaralzaman ne voulut pas céder au jardinier en générosité, et ils eurent une grande contestation là-dessus.
A. Galland, les Mille et une Nuits, t. II, p. 149.
———
II V. tr. ind. et intr.
1 (Sujet n. de personne). || Céder à… : s'abandonner à (qqch. ou qqn), ne plus résister. ⇒ Acquiescer, consentir, déférer, faiblir, fléchir, incliner (s'), obéir, plier (se), résigner (se), soumettre (se). || Céder au sommeil, à la fatigue. || Céder à une impulsion, à un mouvement du cœur. || Céder à la tentation. ⇒ Succomber. || Céder aux circonstances, à la pression. || Céder à ses obligations, à son devoir, à la nécessité, à la force, à la raison. ⇒ Écouter, obéir.
8 Je sais ta passion, et suis ravi de voir
Que tous ses mouvements cèdent à ton devoir.
Corneille, le Cid, II, 2.
9 Une mode (…) est abolie par une plus nouvelle, qui cède elle-même à celle qui la suit (…)
La Bruyère, les Caractères, XIII, 15.
10 (…) nous cédons à des tentations légères dont nous méprisons le danger.
Rousseau, les Confessions, II, p. 87.
11 (…) ils (les hommes d'élite) domptent la paresse, ils se refusent aux plaisirs énervants, ou n'y cèdent qu'avec une mesure indiquée par l'étendue de leurs facultés.
Balzac, la Muse du département, Pl., t. IV, p. 213.
12 Quand elle (Thaïs) cédait à la volupté, il lui semblait tout-à-coup qu'un doigt glacé touchait son épaule nue et, toute pâle, elle criait d'épouvante dans les bras qui la pressaient.
France, Thaïs, II, p. 105.
13 Il cédait plus volontiers aux impulsions du cœur qu'aux remontrances de la raison (…)
G. Duhamel, le Temps de la recherche, XVI, p. 225.
♦ Céder à qqn, à ses prières, à ses larmes, à ses menaces, à sa tyrannie. || Céder au vainqueur, à un rival. || Céder à un enfant. || Céder à qqn en qqch. || Elle lui cède en tout, toujours.
14 (…) Souvenez-vous que je cède à vos lois (…)
Racine, Bérénice, I, 4.
15 Vous le prenez bien haut, monsieur ! Sachez que quand je dispute avec un fat, je ne lui cède jamais. — Nous différons en cela, monsieur; moi je lui cède toujours.
Beaumarchais, le Barbier de Séville, III, 5.
16 En venant ce soir, il n'a fait que céder aux sollicitations de la cour d'Annam; la terreur était telle que, sans lui, les parlementaires n'auraient pas osé se présenter au camp des Français.
Loti, Figures et Choses…, Trois journées de guerre en Annam, IV.
17 (…) après ces quelques jours d'isolement, d'inaction, dans l'état de faiblesse physique où il se trouve, c'est un soulagement pour lui de céder au despotisme du libraire.
Martin du Gard, les Thibault, t. VIII, p. 129.
♦ V. intr. ⇒ Capituler, composer, fléchir, lâcher (lâcher pied…), mollir, obéir, reculer, rendre (se), renoncer; fam. caler, caner (cf. Avoir le dessous). || Céder par faiblesse, par lassitude. || Il faut céder. || Mieux vaut céder que rompre. || Il ne cède pas facilement, il se fait tirer l'oreille. || Il cède volontiers. || Céder sans résister. || Il cède toujours ! || Céder devant la menace.
18 Céder sans paraître obéir, voilà, dans les temps de faiblesse, quelle doit être la politique des gouvernements.
19 (…) j'aurais la plus grande répugnance à entrer dans une famille qui rougirait de moi et ne céderait que par faiblesse et compassion.
G. Sand, la Petite Fadette, XXXVI, p. 234.
20 (…) ils avaient cédé par indifférence, oubli des choses matérielles.
Flaubert, Bouvard et Pécuchet, Pl., p. 144.
21 Une seconde fois, elle résisterait, une troisième, puis elle céderait (…)
Paul Bourget, Un divorce, V, p. 164.
22 Quoi qu'il arrive, c'est fini, je peux vous l'affirmer, je ne sens plus d'animosité pour personne. Je refuse tout nouveau combat. Je cède, vous comprenez, je renonce. Je fais la paix.
G. Duhamel, Chronique des Pasquier, VI, p. 485.
23 Nous marchandons, et finissons par céder, sans sauver la situation et sans nous faire aimer (…)
Maurois, le Cercle de famille, p. 292.
♦ Céder sur qqch. || Il ne cédera pas sur ce point.
♦ Spécialt. (Le sujet désigne une femme). S'abandonner à un homme. || Elle lui a cédé.
2 (Le sujet est un n. de chose). Ne plus résister à la pression, à la force, s'enfoncer, ployer (choses élastiques) ou rompre. ⇒ Écrouler (s'), enfoncer (s'), rompre. || Une branche qui cède sous le poids des fruits, qui s'affaisse, ploie et menace de céder. ⇒ Fléchir. || La porte céda sous la poussée. || Céder à la pression, sous la pression. || Céder devant une force irrésistible.
24 (…) il la toucha légèrement sur le haut de sa poitrine; la chair un peu froide céda avec une résistance élastique.
Flaubert, Salammbô, XI.
25 (…) la porte de la salle céda; un brouhaha de séance parlementaire : des étudiants, en grappes, riant, s'interpellant, se pressaient les uns contre les autres (…)
Martin du Gard, les Thibault, t. III, p. 275.
26 J'ai l'impression de frapper contre un mur. Le mur ne cède pas encore, mais, à force de m'y acharner (…)
Montherlant, les Jeunes Filles, p. 187.
3 (Sujet n. de choses abstraites). ⇒ Cesser, diminuer, tomber. || La fièvre a cédé aux antibiotiques, ou, absolt, a cédé.
27 Thérèse tremblait de colère. Mais cette irritation céda bientôt pour faire place à un frémissement mystérieux.
M. Barrès, la Colline inspirée, XI, p. 183.
28 Les vomissements ont enfin cédé à la piqûre de morphine que nous lui avons faite hier soir.
Gide, Voyage au Congo, in Souvenirs, Pl., p. 801.
♦ Céder à qqch., devant qqch. : laisser place à (qqch.).
29 Un orage effrayant se prépare, et l'enchantement cède à la crainte.
Gide, Voyage au Congo, in Souvenirs, Pl., p. 707.
4 Absolt. Mus. || Cédez : retenez le mouvement.
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CONTR. Conserver, disputer, garder, réserver (se), retenir. — Acquérir. — Résister. — Cabrer (se cabrer contre), entêter (s'), obstiner (s'obstiner contre), opposer (s'opposer à), repousser, révolter (se), tenir (bon), vaincre.
COMP. Concéder, recéder, rétrocéder.
Encyclopédie Universelle. 2012.