AUTORITÉ
L’autorité est le pouvoir d’obtenir, sans recours à la contrainte physique, un certain comportement de la part de ceux qui lui sont soumis.
En excluant l’intervention de la force, cette définition fait ressortir le caractère psychique qui s’attache au phénomène d’autorité. Elle souligne également le fait qu’il s’analyse nécessairement dans un rapport entre la source de l’autorité et le sujet dont elle influence la conduite. C’est dire que l’assise psychique de l’autorité ne peut être découverte par la seule analyse des psychologies individuelles. Elle se situe dans une relation entre le commandement et l’obéissance, ce qui permet de considérer l’autorité comme un phénomène social.
S’agissant d’en rendre compte, il y a lieu d’en considérer les manifestations pour tenter d’en comprendre ensuite le mécanisme.
1. Universalité et polymorphisme du phénomène d’autorité
Le trait le plus saillant du phénomène d’autorité réside dans son universalité et son polymorphisme. Il n’est d’ailleurs pas propre aux sociétés humaines. Du troupeau de buffles ou d’éléphants à la bande de babouins entreprenant de piller un jardin jusqu’aux poulaillers de nos fermes, tous les animaux vivant en corps obéissent à l’un d’entre eux qui peut être considéré comme le détenteur de l’autorité. Dans les collectivités humaines, le fait est encore plus constant. L’élève n’obéit pas seulement à l’autorité du maître, il se plie à celle d’un texte; le client est sensible à l’autorité du vendeur; devant le comptoir d’un café, les ouvriers, après le travail, se retrouvent entre égaux et cependant il est rare que leurs propos ne soient pas polarisés par l’autorité de l’un d’entre eux. Et il en va de même dans le compartiment du wagon où les voyageurs acceptent tacitement l’autorité de celui qui propose d’ouvrir la fenêtre ou d’éteindre la lumière. Ces quelques exemples montrent que l’autorité n’existe pas seulement dans les rapports sociaux où elle est institutionnalisée: dans l’entreprise, les bureaux, l’armée, etc. Elle s’impose si spontanément lorsque quelques individus sont réunis que l’on peut se demander si elle ne constitue pas le fondement des relations sociétaires. Cette hypothèse, qui voit dans la société un aménagement global des rapports d’obéissance à autorité, va sans doute à l’encontre de la vision idyllique d’une communauté d’égaux. Elle est cependant confirmée par le fait que là où l’autorité n’est pas exercée par un homme, la société lui substitue une pression collective anonyme qui, bien connue des sociologues sous le nom de contrôle social, contraint les membres du groupe à certaines attitudes imposées par le conformisme ambiant. Au surplus, l’autorité est à ce point indispensable à l’accomplissement de toute œuvre collective que, dans toute entreprise impliquant la convergence des efforts d’une pluralité d’individus, les relations de commandement à obéissance sont, en quelque sorte, artificiellement créées par l’entremise d’une hiérarchie organique grâce à laquelle est assurée la cohésion de l’ensemble. Il en va ainsi aussi bien dans une équipe de football, dans l’atelier de l’usine ou dans les bureaux d’une administration que dans la société globale que forme la société politique. Le réseau des efforts qui constituent le réseau sociétaire peut être plus ou moins dense et plus ou moins complexe, il s’articule toujours selon une échelle de différenciation dont les degrés s’étagent selon l’étendue de l’autorité qui peut y être exercée.
Si nous laissons de côté l’autorité anonyme résultant de la pression du groupe sur les comportements individuels, nous nous trouvons ainsi en présence de deux grands types d’autorité. L’un apparaît spontanément à l’intérieur des groupes sociaux sous la forme de la prééminence dont y bénéficie un individu qui se révèle capable d’influencer l’attitude des autres. C’est l’autorité que nous qualifierons – provisoirement – de personnelle. L’autre s’analyse dans le pouvoir dont sont investies certaines personnes à raison de la fonction qu’elles remplissent dans un cadre institutionnel déterminé. Il s’agit alors d’une autorité fonctionnelle. Les Romains avaient bien le sens de cette différence lorsqu’ils nommaient autoritas l’ascendant du chef pour s’opposer à la potestas qui était le pouvoir légal. Et c’est également de cette nuance que rend compte notre langage courant lorsqu’il dit d’un homme qu’il a de l’autorité et d’un autre qu’il a une autorité.
Encore qu’elle ne soit pas dépourvue d’intérêt pratique, l’analyse de l’autorité fonctionnelle ne soulève guère de difficultés. Il est généralement aisé de dégager de l’examen des institutions, qu’elles soient publiques ou privées, l’identification des individus auxquels elles confèrent l’autorité. Tout au plus y a-t-il lieu de se demander dans quelle mesure la disposition des attributs de l’autorité (qui vont du costume et du cérémonial jusqu’à la compétence officielle pour décider) sont de nature à pallier l’absence d’autoritas. Mais cette question engage déjà sur la voie du vrai problème qui est celui de savoir de quoi est faite l’autorité personnelle.
L’explication oscille entre deux tendances extrêmes: l’une qui voit dans l’autorité une qualité inhérente à la personne de l’individu qui est capable d’en faire preuve; l’autre qui rend compte de l’autorité par une disposition du groupe à l’égard de celui qui commande. Dans le premier cas, le chef trouverait en lui la source de son autorité; dans le second, c’est la collectivité des assujettis qui créerait l’autorité. On voit tout de suite les implications de l’alternative ainsi posée puisqu’elle met finalement en cause la légitimité de l’autorité. Avec la première thèse, les vertus personnelles du chef suffiraient à l’établir; avec la seconde, elle ne pourrait procéder que de son investiture démocratique.
2. Les mécanismes de l’autorité
Une telle option peut-elle être levée par l’étude objective des mécanismes de l’autorité? Les sociologues américains furent les premiers à le penser. Par toute une série d’expériences portant sur des petits groupes, ils se sont attachés à suivre le processus de formation du leadership. Nous conservons le terme, faute de lui trouver un équivalent en français. Cette carence de notre langue est d’ailleurs significative. Elle s’explique par le fait qu’en France, jusqu’à une époque récente, le problème n’avait guère retenu l’attention que des psychologues et des moralistes qui, tout naturellement, plaçaient l’homme qui commande au centre de leurs observations. La notion de leadership fait, au contraire, intervenir le groupe comme facteur de création du leader. Il apparaît, en effet, le bénéficiaire d’une cristallisation des représentations collectives qui, se portant sur sa personne, font de lui le support de l’autorité.
Les enseignements que les expérimentateurs retirèrent de leur entreprise furent riches. Il en ressortait notamment que la cohésion du groupe est favorisée par la représentativité du leader, que son autorité n’est pas polyvalente, car elle est fonction de l’objectif dominant dans la société qui le reconnaît, et qu’enfin l’efficacité du commandement est d’autant mieux assurée que le leader procède plus directement de la collectivité. Cette apologie implicite des procédures démocratiques est assurément séduisante. Il est seulement dommage qu’elle ne soit étayée que par des expériences de laboratoire. Sans doute s’est-on efforcé de travailler sur le réel. On a pris pour champ une classe d’école ou un atelier; mais les sujets sont, en quelque sorte, si bien aseptisés, les rôles définis avec tant de rigueur, le thème délimité avec une si parfaite minutie qu’on est porté à se demander si les conclusions obtenues à la lumière froide de la salle opératoire sont également valables lorsqu’il s’agit de la vie réelle, c’est-à-dire de groupements non conditionnés par les postulats de l’expérimentateur.
Au surplus, sans contester la vertu créatrice de la mentalité collective, il est clair qu’elle ne peut pas créer – sauf des fantoches – avec rien. Toutes les représentations qui se sont cristallisées sur le général Boulanger n’ont pu l’empêcher de se conduire comme un jeune sous-lieutenant tout juste assez pourvu de cervelle pour se la faire sauter sur la tombe de sa belle. On est donc conduit à considérer que si l’attitude du groupe est indispensable pour qu’apparaisse le chef, encore faut-il qu’il y ait en lui l’étoffe nécessaire.
Les qualités ainsi requises pour accrocher l’intérêt du groupe et lui fournir matière à construire le leader constituent ses aptitudes différentielles, en ce sens qu’elles distinguent celui en qui elles sont reconnues de la masse de ceux qu’il domine. Elles peuvent être groupées sous trois rubriques: compétence, popularité ou don de sympathie, ascendant ou prestige. Bien entendu, leur influence en tant que facteurs de promotion du leader est tributaire du groupe, d’une part, des circonstances, d’autre part.
Compétence du leader
La compétence ne joue un rôle important que s’il s’agit d’une société relativement peu nombreuse et constituée pour l’exercice d’une activité spécifique. Alors, en effet, celui en qui on discerne une aptitude particulière à surmonter les difficultés qui se présentent bénéficiera de sa supériorité technicienne pour s’imposer, aux yeux des autres, comme le leader qualifié. Cependant, l’autorité qui trouve sa source dans la compétence est généralement limitée si elle n’est pas renforcée par la popularité ou par le prestige.
Popularité du leader
Les facteurs de la popularité sont nombreux et divers, les recettes permettant d’y prétendre sont par conséquent contingentes. Les causes de la popularité d’un leader dans le Minnesota le rendraient ridicule en Picardie, et tel qui est populaire en temps de paix risque d’être odieux en temps de guerre. Pourtant, en dépit de sa sensibilité aux circonstances, la popularité trouve un fondement constant dans la satisfaction que la plupart des hommes éprouvent lorsque le pouvoir se situe à leur niveau. Un chef est populaire parce qu’il est tenu pour simple, parce qu’il se fait comprendre et parce qu’il libère de ses frustrations le groupe qui le soutient.
Par sa simplicité sincère ou affectée, le chef montre que son élévation ne le différencie pas des autres hommes; sa cordialité ôte à l’obéissance tout parfum de subordination hiérarchique. Les subordonnés ont le sentiment qu’il n’est que l’un d’entre eux. Mais, si la popularité récompense le souci de ne pas se différencier, elle exprime en même temps la secrète jouissance de provoquer la familiarité avec la puissance. Car, pour populaire qu’il soit, le chef n’en demeure pas moins investi des instruments de l’autorité. Et c’est précisément du contraste entre la simplicité des attitudes et l’énormité des possibilités que naît la popularité. Elle exprime la reconnaissance du groupe à qui il est permis d’apprivoiser le pouvoir par l’entremise de l’homme qui l’exerce sans en tirer prétexte pour se distinguer.
C’est au même effet d’égalisation des niveaux que tend le second facteur de popularité: l’aptitude à se faire comprendre. Quitte à falsifier les données des problèmes, le leader ne saurait être populaire s’il ne les mettait à la portée du groupe. «Mettez-vous à ma place», dit le chef. La réussite du procédé est constante puisqu’il flatte l’amour-propre des subordonnés. Mais il y a autre chose que cette satisfaction de vanité; il y a le sentiment d’avoir percé le mystère qui environne le pouvoir, non sans doute pour lui arracher les prestiges qui l’enrobent, mais pour participer à son essence. Il n’est pas vrai qu’en entrant dans la familiarité des dieux l’homme les ravale à son niveau; c’est lui, au contraire, qui pénètre avec eux dans l’Olympe. La popularité associe ainsi étroitement vulgarité et mysticisme.
C’est bien parce que la popularité ne dénature pas l’autorité en la rendant accessible qu’une des voies les plus sûres pour l’atteindre n’est pas de cacher la puissance, mais d’en exagérer les manifestations dans le sens qu’en attend le groupe. Ce qu’il en attend, c’est d’abord d’être délivré d’un complexe d’infériorité. Le chef populaire, c’est celui qui dit non à la difficulté, non aux contraintes, non à toutes les formes d’oppression, technocratiques, économiques, impérialistes. Outre que ce geste fait porter par les «autres» la responsabilité du mal, il donne au groupe l’impression qu’il va être affranchi de sa dépendance. Ainsi la popularité résulte d’une sorte d’appropriation de l’autorité par ceux-là mêmes qui la supportent. En faisant mine d’épouser leurs ressentiments ou d’assumer leurs difficultés, de dire avec autorité ce qu’ils ne peuvent que murmurer dans l’obscurité de leur condition, le chef procure aux individus l’occasion d’un défoulement général. Il prête la puissance aux désarmés, le verbe aux muets, la grandeur aux médiocres et l’assurance aux humiliés.
Prestige du leader
En tant que facteur d’autorité, l’ascendant semble, de prime abord, moins tributaire de l’attitude du groupe. Certaines personnes sont en effet dotées d’une supériorité naturelle qui en impose aux autres. Dans quelque situation qu’elles se trouvent, leur comportement provoque, sinon toujours l’admiration, du moins le respect. En fait, pour que l’ascendant personnel engendre l’autorité, il faut qu’il se mue en prestige, c’est-à-dire que, n’étant plus exclusivement la manifestation de qualités individuelles, il exprime une valeur sociale. Dans la mesure où l’on peut dire alors que le prestige est de l’ascendant socialisé, on retrouve le rôle primordial des représentations collectives comme assise d’une autorité où le caractère intrinsèque du bénéficiaire tient une place moindre que le statut dont l’investit sa situation sociale.
Le rite du potlatch dans les sociétés primitives rend bien compte du lien qui unit l’autorité au prestige et celui-ci au statut social. Par les cadeaux ou la destruction provocante de richesses, il révèle le souci d’une phratrie ou d’un individu d’affirmer son prestige; si le défi n’est pas relevé, ceux qui ne peuvent se montrer aussi prodigues se trouvent vassalisés. Toutes choses égales, le «statut» social, dont, à la suite de Max Weber, les sociologues américains ont édifié la théorie, joue dans les sociétés industrielles un rôle équivalent au potlatch. Lorsque l’individu parvient à se situer dans une sphère à laquelle s’attache une considération sociale, il bénéficie des croyances qui la valorisent. L’autorité va à celui qui, se mettant au niveau des symboles sociaux de la grandeur – que ce soit pour les affronter ou pour s’en réclamer – se place par là même au-dessus de la masse qui les vénère. Sans doute est-ce le chef qui est éclairé par les projecteurs, mais c’est du groupe que vient la lumière qui le grandit.
Si sommaire que soit cette évocation des facteurs essentiels de l’autorité il est clair, d’une part, que, même lorsqu’on la qualifie de personnelle, elle doit être conférée ou reconnue par la collectivité au sein de laquelle elle s’exerce, d’autre part, que le rôle de la psychologie collective, pour décisif qu’il soit dans le phénomène d’investiture, ne fait qu’incarner dans le chef ou le leader une puissance à laquelle le groupe lui-même est subordonné. Il peut choisir de reconnaître l’autorité de Pierre ou de Paul, mais il ne peut pas choisir de se passer de l’autorité. Cette autorité impersonnelle et abstraite dont les phénomènes concrets d’autorité ne sont souvent qu’une monnaie douteuse et assez vile, les uns en trouveront le fondement dans la nécessité sociale, les autres dans les impératifs de la conscience, d’autres encore dans la supériorité de la règle. Le vrai nous paraît être dans la constatation d’une interférence constante entre l’idéal et le vécu: l’autorité dont la raison d’être est de résoudre des conflits est, elle-même, le produit d’une tension. Elle n’est authentique que si elle s’exerce sur des libertés, c’est pourquoi elle ne relève pas d’une approche univoque. L’observation du sociologue ne peut pas supplanter l’intuition du philosophe, et tous deux ne doivent pas dédaigner l’enseignement du spécialiste de la magie. Au surplus, tout phénomène de pouvoir met en cause des croyances, des représentations, des signes et des symboles dont la connaissance objective n’irait pas – parce qu’elle serait démystificatrice – sans compromettre l’accomplissement des fonctions d’autorité dont aucune société ne peut se passer. Il faut donc se résoudre à ce qu’il y ait un mystère de l’autorité qui est du même ordre que celui où se dissimulent les fonctions essentielles à la pérennité des groupes. Ce mystère, l’observation des faits d’autorité ne suffit pas plus à le percer que nous ne sommes renseignés sur l’amour lorsque nous savons comment Pierre et Jeanne en sont venus à s’aimer. Mais le fait que l’autorité n’aille jamais sans masque signifierait-il qu’elle n’a pas de visage?
autorité [ ɔtɔrite ] n. f.
• auctorité 1119 ; lat. auctoritas, de auctor « auteur »
1 ♦ Droit de commander, pouvoir (reconnu ou non) d'imposer l'obéissance. ⇒ commandement, domination, force, puissance, souveraineté. L'autorité suprême. L'autorité du souverain, du chef de l'État. L'autorité du supérieur sur ses subordonnés, du chef sur ses soldats (⇒ hiérarchie) . Autorité paternelle, parentale. Autorité du tuteur sur le mineur. ⇒ tutelle. Autorité légitime, établie; illégale, usurpée. Autorité absolue, despotique, dictatoriale, sans limite, sans contrôle. Régime d'autorité. ⇒ absolutisme, arbitraire, autocratie, autoritarisme, césarisme, despotisme, dictature, domination, oppression, totalitarisme, tyrannie. Soumettre les peuples à son autorité. ⇒ hégémonie. Imposer son autorité. Être jaloux de son autorité. Avoir autorité sur qqn. Être sous l'autorité de qqn, recevoir ses ordres. Abus d'autorité. Avoir autorité pour faire qqch. « La répugnance que j'ai de faire prévaloir mon désir, de faire acte d'autorité, de commander » (A. Gide). Déléguer son autorité. — Autorité de justice : pouvoir permettant aux juges d'ordonner des mesures relatives aux personnes ou aux biens. Décision par autorité de justice.
♢ DE L'AUTORITÉ DE... Agir de sa propre autorité, avec l'autorité, le pouvoir de décision qu'on s'attribue, sans autorisation (cf. Prendre sous son bonnet). — D'AUTORITÉ : d'une manière absolue, sans tolérer de discussion; sans consulter personne. Abrév. fam. (1830) D'AUTOR [ dɔtɔr ]. « ces imbéciles l'avaient classée, d'autorité, dans la catégorie des maniaques » (F. Mauriac).
2 ♦ Les organes du pouvoir. Les actes, les décisions, les agents, les représentants de l'autorité. ⇒ gouvernement; administration. L'autorité législative, administrative, militaire.
♢ Plur. Les autorités : les personnes qui exercent l'autorité. Les autorités civiles, militaires, religieuses. ⇒ dignitaire, officiel. « l'appareil des puissances temporelles, les puissances politiques, les autorités de tout ordre, intellectuelles, mentales même » (Martin du Gard).
3 ♦ Force obligatoire, exécutoire d'un acte de l'autorité publique. Autorité de la loi. ⇒ souveraineté. Autorité de la chose jugée : présomption de vérité qui s'attache à ce qui a été définitivement jugé.
4 ♦ Attitude autoritaire ou très assurée. Il « luttait contre la timidité par des effets d'autorité tranchante » ( Maurois). ⇒ assurance.
5 ♦ Pouvoir de se faire obéir. Avoir de l'autorité, beaucoup d'autorité. Ce professeur n'a aucune autorité sur ses élèves. Manquer d'autorité.
6 ♦ Supériorité de mérite ou de séduction qui impose l'obéissance, le respect, la confiance. ⇒ considération, crédit, empire, influence, magnétisme, poids, prestige, réputation, séduction. Cet homme a une grande autorité. L'autorité dont il jouit. Avoir, acquérir, prendre de l'autorité sur qqn. ⇒ 2. ascendant. — (Choses) Le fait de s'imposer, de servir de référence, de règle, par le mérite reconnu. « Invoquerai-je contre vous l'autorité des deux Testaments ? » (France).
♢ FAIRE AUTORITÉ : s'imposer auprès de tous comme incontestable, servir de règle dans un domaine (⇒ autorisé) . Un historien, un savant, un ouvrage qui fait autorité.
7 ♦ Personne qui fait autorité. Ce chercheur est une autorité dans ce domaine. Alléguer, invoquer une autorité à l'appui de sa thèse. S'appuyer sur une autorité.
⊗ CONTR. Déchéance, discrédit; infériorité, soumission; subordination , sujétion. Anarchie.
● autorité nom féminin (latin auctoritas) Pouvoir de décider ou de commander, d'imposer ses volontés à autrui : Affermir, perdre, rétablir son autorité. Secteur administratif, organisme auquel est confié un pouvoir de décision légalement défini : Autorité judiciaire, municipale. Le pouvoir politique ou les organes qui le représentent pris collectivement : Les représentants de l'autorité. Ensemble de qualités par lesquelles quelqu'un impose à autrui sa personnalité, ascendant grâce auquel quelqu'un se fait respecter, obéir, écouter : Manquer d'autorité personnelle. Crédit, influence, pouvoir dont jouit quelqu'un ou un groupe dans le domaine de la connaissance ou d'une activité quelconque, du fait de sa valeur, de son expérience, de sa position dans la société, etc. ; caractère de quelque chose dont la valeur, le sérieux, communément reconnus, lui permettent de servir de référence : L'autorité des Anciens. Autorité d'un ouvrage, d'une étude. Considération qui s'attache habituellement à certaines choses : L'autorité de l'âge. Auteur, ouvrage dont les opinions sont admises par le plus grand nombre : C'est une autorité en matière de droit civil. ● autorité (citations) nom féminin (latin auctoritas) Maurice Barrès Charmes, Vosges, 1862-Neuilly-sur-Seine 1923 L'autorité, c'est moins la qualité d'un homme qu'une relation entre deux êtres. L'Ennemi des lois Plon Charles de Gaulle Lille 1890-Colombey-les-Deux-Églises 1970 […] Certains hommes répandent, pour ainsi dire de naissance, un fluide d'autorité dont on ne peut discerner au juste en quoi il consiste […] Il en va de cette matière comme de l'amour qui ne s'explique point sans l'action d'un inexprimable charme. Le Fil de l'épée Plon Charles de Gaulle Lille 1890-Colombey-les-Deux-Églises 1970 Rien ne rehausse l'autorité mieux que le silence, splendeur des forts et refuge des faibles […]. Le Fil de l'épée Plon Gustave Le Bon Nogent-le-Rotrou 1841-Paris 1931 La compétence sans autorité est aussi impuissante que l'autorité sans compétence. Hier et demain Flammarion Louis XIV, roi de France Saint-Germain-en-Laye 1638-Versailles 1715 Aussitôt qu'un roi se relâche sur ce qu'il a commandé, l'autorité périt, et le repos avec elle. Mémoires Michel Eyquem de Montaigne château de Montaigne, aujourd'hui commune de Saint-Michel-de-Montaigne, Dordogne, 1533-château de Montaigne, aujourd'hui commune de Saint-Michel-de-Montaigne, Dordogne, 1592 Je n'ai point l'autorité d'être cru, ni ne le désire, me sentant trop mal instruit pour instruire autrui. Essais, I, 26 Napoléon Ier, empereur des Français Ajaccio 1769-Sainte-Hélène 1821 L'homme fait pour les affaires et l'autorité ne voit point les personnes ; il ne voit que les choses, leur poids et leur conséquence. Cité par Las Cases dans le Mémorial de Sainte-Hélène Marie-René Alexis Saint-Leger Leger, dit, en diplomatie, Alexis Leger, et, en littérature Saint-John Perse Pointe-à-Pitre 1887-Giens, Var, 1975 La démocratie, plus qu'aucun autre régime, exige l'exercice de l'autorité. Discours sur Briand New York University Bible Que chacun se soumette aux autorités en charge. Car il n'y a point d'autorité qui ne vienne de Dieu, et celles qui existent sont constituées par Dieu. Saint Paul, Épître aux Romains, XIII, 1 ● autorité (expressions) nom féminin (latin auctoritas) Autorité judiciaire, ensemble des magistrats des juridictions civiles et pénales. Autorité de justice, droit ou obligation qui résultent d'un jugement ou d'une décision exécutoire. Autorité parentale, autorité dévolue par la loi aux père et mère ou à l'un des deux seulement, sur la personne et les biens de leur(s) enfant(s) mineur(s) et non émancipé(s). [Elle s'est substituée à la puissance paternelle par la loi du 4 juin 1970.] D'autorité, de sa propre autorité, sans consulter personne, sans permission. Faire autorité, être considéré comme une référence dans un domaine donné. ● autorité (synonymes) nom féminin (latin auctoritas) Pouvoir de décider ou de commander, d'imposer ses volontés à...
Synonymes :
- empire
- souveraineté
- tutelle
Contraires :
- dépendance
- sujétion
Le pouvoir politique ou les organes qui le représentent pris...
Synonymes :
- pouvoir
Ensemble de qualités par lesquelles quelqu'un impose à autrui sa...
Synonymes :
- aplomb
- décision
Contraires :
- humilité
- modestie
- timidité
Crédit, influence, pouvoir dont jouit quelqu'un ou un groupe dans...
Synonymes :
- emprise
- poids
- réputation
Contraires :
- discrédit
autorité
n. f.
d1./d Pouvoir de commander, d'obliger à quelque chose. L'autorité des lois.
|| Autorité de justice: pouvoir des juges.
|| Loc. D'autorité, de sa propre autorité: en vertu du seul pouvoir qu'on s'attribue.
d2./d Gouvernement, administration publique chargés de faire respecter la loi. Force restera à l'autorité.
|| (Plur.) Les autorités: les personnes qui exercent l'autorité.
d3./d Crédit, influence, ascendant. Il a une grande autorité sur ses élèves.
d4./d Faire autorité: faire loi, servir de règle en la matière. Les travaux de Pasteur sur la prophylaxie font autorité.
⇒AUTORITÉ, subst. fém.
Pouvoir d'agir sur autrui. L'autorité de l'homme sur l'homme :
• 1. L'autorité. — La plus cruelle des « nécessités » pour M. Godeau était celle qui lui venait des autres. Pourquoi se serait-il irrité davantage cependant contre l'autorité d'un homme et moins contre la hauteur d'une montagne qui se dressait devant lui sur son chemin? S'il était fatigué, autant que possible, il l'évitait; s'il ne pouvait l'éviter, il s'élevait par elle au-dessus d'elle. Et quand il avait mis ses deux pieds sur le front de la montagne, pour laquelle il éprouvait plus d'amour que de haine, il se retournait pour voir le paysage du monde et découvrait l'horizon le plus lointain. L'autorité des autres devait être utilisée par M. Godeau comme un moyen : celui qui le commandait devait d'abord le servir.
JOUHANDEAU, M. Godeau intime, 1926, p. 121.
A.— [Autorité acquise en vue du gouvernement des pers. ou des choses]
1. Domaine gouvernemental, admin., etc.
a) [Autorité par voie légale] Pouvoir légalement conféré à une personne, à un groupe humain de régir l'ensemble ou une partie du corps social, de régler les affaires publiques. L'autorité de l'État, du roi :
• 2. Les voilà donc enfin, ces ministres audacieux, décriés par leur ineptie, avilis par leurs déprédations, abhorrés par leurs excès, et proscrits par l'indignation publique! Traîtres à leur maître, traîtres à leur pays, ils ont, à force de forfaits, compromis l'autorité, et poussé l'État sur le bord de l'abîme. Naguère encore leurs lâches suppôts répétaient, avec insolence, que les Monarques ne tiennent leur pouvoir que de Dieu et de leur épée, qu'ils sont maîtres de leur sujets, comme un berger est maître de ses moutons, (...). (...) le temps est passé, où l'homme abruti se croyait esclave. Honteux de leurs funestes maximes, les suppôts de la tyrannie gardent le silence; de toutes parts les sages élèvent la voix, ils répètent aux Monarques, qu'en tout état, la souveraine puissance réside dans le corps de la Nation, que de lui émane toute autorité légitime, que les princes ont été établis pour faire observer les loix, qu'ils y sont soumis eux-mêmes, qu'ils ne règnent que par la justice, et qu'ils la doivent au dernier de leurs sujets.
MARAT, Les Pamphlets, Offrande à la Patrie, 1789, pp. 2-3.
• 3. Là où le pouvoir suprême, la souveraineté, appartient à tous ou à plusieurs, la société est démocratique ou aristocratique; là où un seul est souverain et n'a au-dessous de lui que des pouvoirs subordonnés, elle est monarchique. Mais toujours faut-il une souveraineté, un pouvoir suprême qui ait le droit de commander et à qui l'on doive obéir, pour qu'il existe une société quelconque : et déjà l'on conçoit que toute secte qui refuse de reconnoître un pareil pouvoir, qui nie l'autorité et proclame l'indépendance individuelle, n'est point une société, ...
LAMENNAIS, De la Religion, 2e part., 1826, p. 56.
• 4. ... une diversité de races sociales est alors reconnue à la base de la hiérarchie des fonctions sociales et des relations d'autorité, qu'il s'agisse de l'autorité politique dans l'état ou des autres sortes d'autorité qui interviennent dans la vie sociale et économique du pays. On peut dire qu'au Moyen Âge, l'autorité temporelle était conçue avant tout selon le type de l'autorité paternelle dans les conceptions elles-mêmes sacrales de la famille, (...). (...) le père exerce son autorité comme une fonction sacrée, et revêt pour ainsi dire la personne de Dieu. Le sacre du roi le constitue père de la multitude, et confirme dans l'ordre de la grâce son autorité naturelle de chef de la cité, en attestant qu'il gouverne au temporel au nom du souverain roi.
MARITAIN, Humanisme intégral, 1936, pp. 163-164.
♦ Principe d'autorité (cf. FLAUBERT, L'Éducation sentimentale, t. 2, 1869, p. 241; BARRÈS, Mes cahiers, t. 6, 1908, p. 295).
♦ Régime d'autorité (cf. BAINVILLE, Histoire de France, t. 2, 1924, p. 226 : ... un régime à poigne, un régime d'autorité).
— [L'autorité légale dans ses manifestations extérieures] Une autorité sans bornes, gouverner avec autorité, représenter l'autorité :
• 5. Les traits de rudesse et de tristesse qui l'obscurcissent lui sont imprimés par l'ennui, mais surtout par une position toujours fausse vis-à-vis de la Nation et par la comédie nécessaire de l'autorité. L'autorité absolue qu'exerce un homme le contraint à une perpétuelle réserve. Il ne peut dérider son front devant ses inférieurs, sans leur laisser prendre une familiarité qui porte atteinte à son pouvoir. Il se retranche l'abandon et la causerie amicale, de peur qu'on ne prenne acte contre lui de quelque aveu de la vie ou de quelque faiblesse qui serait de mauvais exemple.
VIGNY, Servitude et grandeur militaires, 1835, p. 25.
• 6. Aurelle imagina les cheveux gris également divisés, les traits fins du général, l'or et la pourpre des parements souillés par la boue ignoble des batailles. « Tant de dignité aisée, pensait-il, tant d'autorité courtoise, et demain une charogne que les soldats fouleront aux pieds sans le savoir. »
MAUROIS, Les Silences du colonel Bramble, 1918, p. 164.
♦ Acte, coup d'autorité. Coup de force manifestant l'exercice d'une autorité absolue (cf. BAUDRY DES LOZIÈRES Voyage à la Louisiane, 1802, p. 280 : ... injustices (...) coups d'autorité).
— P. méton.
♦ Personne, groupe de personnes qui exerce légalement une certaine autorité à l'échelon national ou local. Les autorités compétentes, constituées, locales :
• 7. Les bruits des pas et des voix, le grondement des élèves se levant tous à la fois à l'entrée des autorités, — il entendait tout cela, et l'incertitude et l'anxiété l'affolaient. Et ces bruits se répétaient de proche en proche. Voici que ces messieurs entraient dans la salle voisine. Enfin c'était le tour de la classe de Léniot. Les autorités, en redingote et en chapeau haut de forme, faisaient leur entrée; les élèves et le professeur se levaient. « Asseyez-vous, messieurs », disait le Préfet des études qui prenait un air solennel.
LARBAUD, Fermina Marquez, 1911, p. 50.
♦ Mod. Organisme d'intérêt économique, scientifique, etc. qui exerce officiellement une certaine autorité à l'échelon national ou international :
• 8. Il propose que toutes les étapes dangereuses (du point de vue de la fabrication des armes atomiques) soient soustraites à la compétence des états et confiées à une autorité internationale. Cette autorité serait propriétaire des mines et des matériaux nucléaires et aurait la gestion des usines de production de combustibles nucléaires, ainsi que des piles productrices d'énergie, tandis que des inspecteurs internationaux auraient pour mission de déceler les activités clandestines éventuelles. (...) L'autorité envisagée devait être un organisme supranational possédant en propre une grande industrie, l'exploitant et la développant au nom et dans l'intérêt de toutes les nations; en somme, un échantillon de gouvernement mondial dans une affaire de portée mondiale.
GOLDSCHMIDT, L'Aventure atomique, 1962, pp. 65-66.
— P. ext. Force de tout acte émanant d'une autorité. Les coutumes locales et arbitraires cédaient à l'autorité générale des ordonnances des princes, à l'autorité savante de la jurisprudence romaine. (OZANAM, Essai sur la philos. de Dante, 1838, p. 27).
SYNT. a) Autorité + adj. : autorité centrale, civile, despotique, directe, économique, étrangère, illimitée, légale, militaire, monarchique, municipale, nationale, nécessaire, nulle, publique, responsable, royale, sociale, souveraine, suprême; adj. + autorité : grande, haute, pleine autorité. b) Autorité + des/du + subst. : autorité du comité, des institutions, du patron, du pays; subst. + d'autorité : par voie d'autorité; subst. + de l'autorité : agent, dépositaires, exercice, habitude, représentant, respect, source de l'autorité; subst. + des autorités : intervention des autorités; c) Verbe + autorité : donner autorité (à); verbe + son/l'autorité : admettre, affirmer, conférer, conserver, défendre, établir, étendre, perdre, reconnaître, rejeter, respecter, rétablir, tenir son/l'autorité; verbe + de son/l'autorité : abuser, s'affranchir, revêtir, user de son/l'autorité; verbe + à l'autorité : se soumettre, se soustraire à l'autorité; verbe + aux autorités : s'adresser, faire appel aux autorités. — PARAD. a) (Quasi-)synon. absolutisme, autocratie, césarisme, commandement, despotisme, dictature, domination, férule, majesté, omnipotence, oppression, ordre, suprématie, totalitarisme. b) Anton. anarchie, assujettissement, impuissance, liberté, servitude, soumission, subordination, sujétion.
b) En partic., péj. [Autorité contraire à la loi] Pouvoir qu'une personne s'attribue par voie illégale. Abus d'autorité :
• 9. Tandis que la tyrannie s'étoit glissée à Athènes, elle avoit aussi levé l'étendard en Sicile. Tranquille possesseur d'une autorité usurpée par la ruse, Denys l'Ancien soutint trente-huit années sa puissance par des vices et des vertus; avec les premiers il extermina ses ennemis; avec les secondes il rendit son joug supportable : en cela, comme Auguste, il proscrivit et régna.
CHATEAUBRIAND, Essai sur les Révolutions, t. 2, 1797, p. 125.
— P. méton. Personne qui exerce le pouvoir illégalement :
• 10. Mon fils, sommé par l'autorité et en vertu d'un décret du tyran, d'aller prêter le serment de fidélité, s'est présenté, d'après mes conseils, avec plusieurs de ses camarades à la sous-préfecture, pour déclarer qu'il ne pouvait pas prêter un serment contraire à l'honneur et à la conscience. (...) Il est venu dîner avec ses camarades, satisfaits de leur démarche et de la réponse du Sous-Préfet. Nos révolutionnaires se sont grossièrement trompés, et quoique leur erreur soit bien funeste pour notre repos et recule peut-être de plusieurs années nos progrès vers le bien, elle leur coûtera peut-être encore plus cher qu'à nous. Ils se sont fait une illusion complète sur les dispositions et les sentiments des Français en général, lorsqu'ils ont espéré d'associer la multitude à leurs fureurs, à toutes leurs passions insensées et féroces, à leur haine invétérée pour toute autorité légitime; ...
MAINE DE BIRAN, Journal, 1815, pp. 90-91.
SYNT. Verbe + l'autorité : usurper, prendre l'autorité. — PARAD. (Quasi-)synon. arbitraire, contrainte.
c) Parfois péj. [Autorité sans réf. à la loi, à la légalité] Pouvoir qu'une personne s'attribue sans ratification officielle.
♦ (Agir) de sa propre autorité. (Agir) de son propre chef, sans référence au droit positif, sans consulter personne :
• 11. Ce Wallstein, à la vérité, ne porta jamais les armes que pour la maison d'Autriche : mais l'armée qu'il commandait était à lui, réunie en son nom, payée par ses ordres, et avec les contributions qu'il levait sur l'Allemagne, de sa propre autorité. Il négociait comme un potentat, du sein de son camp, avec les monarques ennemis de l'empereur. Il voulut enfin s'assurer, de droit, l'indépendance dont il jouissait de fait; et s'il échoua dans cette entreprise, il ne faut pas attribuer sa chute à l'insuffisance des moyens dont il disposait, mais aux fautes que lui fit commettre un mélange bizarre de superstition et d'incertitude.
CONSTANT, Wallstein, 1809, p. IX.
♦ (Agir) d'autorité (cf. BARANTE, Hist. des ducs de Bourgogne, t. 1, 1824, p. 143 : agir de force et d'autorité); (Agir) de son propre chef, sans référence au droit positif, sans consulter personne. (agir) de son autorité privée (cf. MICHELET, Hist. romaine, t. 2, 1831, p. 81). (Agir) de son propre chef, sans référence au droit positif, sans consulter personne.
2. Jur. Pouvoir légalement conféré aux magistrats ou à certaines personnes, de régir, conformément à la loi, les individus ou les biens relevant de leur juridiction ou responsabilité. L'autorité (...) des jurisconsultes (COURIER, Pamphlets pol., Pétition aux deux chambres, 1816, p. 5).
— P. méton. Magistrat investi de ce pouvoir :
• 12. ... il déclare qu'il n'y a plus de pouvoir, plus de gouvernement, plus rien, qu'il n'existe qu'une seule autorité : le juge d'instruction armé du cabriolet...
E. et J. DE GONCOURT, Journal, 1896, p. 919.
— P. ext. Force exécutoire de tout acte émanant d'une autorité judiciaire. Autorité d'un jugement :
• 13. L'autorité de l'homme sur l'homme est-elle juste? Tout le monde répond : non; l'autorité de l'homme n'est que l'autorité de la loi, laquelle doit être justice et vérité. La volonté privée ne compte pour rien dans le gouvernement, qui se réduit d'une part, à découvrir ce qui est vrai et juste, pour en faire la loi; d'autre part, à surveiller l'exécution de cette loi.
PROUDHON, Qu'est-ce que la propriété? 1840, p. 152.
♦ Autorité de la chose jugée. Force exécutoire de ce qui est définitivement jugé et ne peut se remettre en cause :
• 14. 1350. La présomption légale est celle qui est attachée par une loi spéciale à certains actes ou à certains faits; tels sont, 1. les actes que la loi déclare nuls, (...); 3. l'autorité que la loi attribue à la chose jugée; 4 la force que la loi attache à l'aveu de la partie ou à son serment.
1351. L'autorité de la chose jugée n'a lieu qu'à l'égard de ce qui a fait l'objet du jugement. Il faut que la chose demandée soit la même; que la demande soit fondée sur la même cause; que la demande soit entre les mêmes parties, et formée par elles et contre elles en la même qualité.
Code civil, 1804, p. 245.
Rem. S'emploie au fig. en parlant du comportement d'une pers. (cf. BALZAC, Eugénie Grandet, 1834, p. 17).
♦ Vente par autorité de justice (FLAUBERT, L'Éducation sentimentale, t. 2, 1869, p. 243).
SYNT. a) Autorité + adj. : autorité judiciaire, législative; b) Autorité + subst. : autorité de la famille, des parents, du père.
B.— [Autorité acquise ou naturelle de manière à exercer une influence d'ordre intellectuel, mor., psychique]
1. Force de considération s'attachant :
a) À une personne, à une collectivité qui représente ou promeut certaines valeurs (généralement reconnues comme telles par une société donnée) et qui joue un rôle important dans l'opinion publique. L'autorité de l'Église, du pape :
• 15. Une situation d'esprit exceptionnelle se paye toujours chèrement. Nous venons de voir la rançon de celle-ci. Elle a aussi ses avantages. Le plus incontestable est l'autorité. L'homme qui possède ce don de l'autorité peut devenir impopulaire. Il peut être haï, calomnié. Il n'en garde pas moins ce prestige singulier, presque indéfinissable, qui ajoute un poids considérable à chaque parole tombée de sa bouche, à chaque écrit échappé de sa plume. Ce qui assure cette sorte de pouvoir au philosophe isolé dans son système, c'est précisément cet isolement et la qualité de certitude qu'il suppose.
P. BOURGET, Essais de psychol. contemp., 1883, p. 162.
• 16. On dirait, ma parole, qu'ils prennent pour une supériorité, non seulement leur fortune, mais leur habitude de bien vivre, leur goût du confort, de la « qualité »! ça devient pour eux un mérite personnel! un mérite qui leur crée des droits sociaux! et ils trouvent parfaitement légitime cette « considération » dont ils jouissent! légitimes, leur autorité, l'asservissement d'autrui! oui, ils trouvent tout naturel de « posséder »!
R. MARTIN DU GARD, Les Thibault, L'Été 1914, 1936, p. 123.
— P. méton. Personne qui jouit d'une grande considération, dont on invoque l'exemple à l'appui d'une thèse :
• 17. Vous me citez des autorités. C'est un argument, mais un faible argument. On a toujours des autorités. J'ai pour ces Hugo, ces Lamartine la plus respectueuse admiration, une admiration que je voudrais dire filiale, mais ils n'obligent pas ma raison. Ils sont de grandes forces sentimentales. Je ne les admire pas s'ils deviennent de grandes forces pleurardes.
BARRÈS, Mes cahiers, t. 6, 1908, p. 333.
b) À une chose. L'autorité d'une chose. Pouvoir de s'imposer comme valeur, référence.
— [Chose concr.] L'autorité de l'Écriture :
• 18. Il importerait d'examiner si ces livres français qui ont tant de popularité en Europe, tant d'autorité, représentent vraiment la France, ...
MICHELET, Le Peuple, 1846, p. 11.
— [Chose abstr.] L'autorité de l'expérience, de la tradition :
• 19. ... elle affirme qu'avec une certaine personne, à elle et à moi connue, je retrouverai le goût à la vie qui s'est trop affaibli en mon cœur. Bref, Philine me répète les exhortations que je me suis maintes fois adressées, mais qui n'ont pour moi de valeur, d'autorité, de gravité que lorsqu'elles me reviennent du dehors. Me défiant absolument de moi-même, j'ai besoin d'être encouragé par l'amitié dans le sens de mes secrètes aspirations.
AMIEL, Journal intime, 1866, p. 125.
♦ Spéc., PHILOS. Méthode d'autorité ou l'autorité. Par opposition à la critique individuelle, au libre examen, à la raison :
• 20. ... il [Jansénius] expose et met en présence les deux méthodes de pénétrer les mystères de Dieu : l'une des philosophes et par la seule raison, voie très-trompeuse, l'autre des Chrétiens, très-sûre, et dans laquelle intervient, que dis-je? à laquelle préside la charité; car il ne distingue pas la méthode dite d'autorité, de cette méthode de charité. (...). De sorte qu'aux philosophes spéculatifs, et qui n'étudient que pour étudier, à ces Chrétiens d'opinion si communs de nos jours et qui, selon le mot de Saint-Cyran, ne veulent que découvrir des terres nouvelles, à ceux-là, pour les rabattre et les humilier dans leur science même et sur le trône si creux de leur intelligence où ils se complaisent, il suffit de dire avec saint Augustin, avec Jansénius, avec ceux qui parlent des Enfants de Dieu, étant eux-mêmes de ces enfants : On ne comprend (absolument, à la limite et dans la plénitude), on ne comprend que ce qu'on croit. On ne comprend que ce qu'on aime.
SAINTE-BEUVE, Port-Royal, t. 2, 1842, p. 125.
— P. méton. Chose qui, par sa valeur reconnue, peut servir de référence, d'appui à une démonstration :
• 21. Je me souviens d'avoir lu dans le livre De L'Esprit, qui n'est pas toujours le livre du bon sens, qu'on pouvait raisonner fort juste en partant d'un principe très-faux. Helvétius, pour démontrer cette proposition, va chercher ses exemples dans l'Inde; que ne citait-il son propre ouvrage? Pour moi, si j'étais chargé de mettre cette vérité en lumière, je me ferais une autorité de la lettre du professeur de Picpus sur le mélodrame. Je ne crois pas qu'il soit possible d'employer plus d'esprit, plus d'adresse et plus d'instruction à défendre une mauvaise cause; ...
JOUY, L'Hermite de la Chaussée d'Antin, t. 5, 1814, p. 274.
— Faire autorité. S'imposer comme règle, avoir force de preuve (cf. R. MARTIN DU GARD, Les Thibault, Épilogue, 1940, p. 954 : faire autorité [...] servir [...] de base aux recherches).
SYNT. a) Autorité + adj. : autorité divine, ecclésiastique, incontestée, infaillible, morale, religieuse, sainte, spirituelle, supérieure. b) Autorité + de + subst. : autorité de l'âge, de la foi, de la religion. c) Verbe + l'autorité : invoquer l'autorité de. — PARAD. a) (Quasi-)synon. appui, célébrité, crédit, éminence, garantie, importance, influence, notabilité, prépondérance, renom, renommée, réputation, témoignage. b) Anton. discrédit, infériorité.
2. Force de caractère qui permet à une personne d'inspirer le respect, l'admiration, d'imposer sa personnalité à son entourage :
• 22. Elle a une autorité singulière, voilà la vérité. Partout où elle passe, elle imprime sa marque. — C'est une femme forte selon l'Évangile... dit l'abbé. — Oui; mais, cette force, j'ai le sentiment qu'elle peut la mettre au service du mal comme au service du bien, et que ce sera la même force, la même violence...
DANIEL-ROPS, Mort, où est ta victoire? 1934, p. 56.
— [L'autorité psychique dans ses manifestations extérieures] Air, geste, ton d'autorité :
• 23. Ses yeux à lui, brillants d'autorité, de maîtrise et d'intelligence, la dominent cette fois, l'intimident et la soutiennent en même temps.
MALÈGUE, Augustin, t. 2, 1933, p. 51.
♦ D'autorité (cf. supra A 1 c). De façon impérative (cf. MAINE DE BIRAN, Journal, 1817, p. 92); arg. d'autor = d'autorité (cf. CÉLINE, Mort à crédit, 1936, pp. 161, 264, 266, 275, 363, 414, 464, 563, 670, 696).
— Péjoratif :
• 24. L'enfant est, pour la mère, un homme indéfini, maniable, sur qui l'imagination travaille sans limites, bref une réduction de l'idéal. C'est pourquoi, aux yeux de la mère, le mari tombe au second rôle, devient un fournisseur de l'enfant, un premier domestique. L'autorité s'est renversée dans le mariage. Les caractères s'étant adoucis, l'homme n'est plus assez ferme pour supporter le chagrin de la femme; il cède par pitié. Le travail s'étant accru, l'homme est trop las pour résister à la volonté obsédante de la femme : il cède par fatigue.
TAINE, Notes sur Paris, Vie et opinions de M. T. Graindorge, 1867, p. 301.
— Rare. Empire sur soi-même. Autorité sur soi :
• 25. Je songeai avec stupeur, avec horreur à ce que j'avais fait, me demandant d'où viennent ces tempêtes de l'âme où l'homme perd toute notion des choses, toute autorité sur lui-même, et agit dans une sorte d'ivresse affolée, sans savoir ce qu'il fait, sans savoir où il va, comme un bateau dans un ouragan.
MAUPASSANT, Contes et nouvelles, t. 2, La Confession, 1884, p. 462.
SYNT. a) Autorité + adj. : autorité méconnue, personnelle; adj. + autorité : douce autorité. b) Subst. + d'autorité : absence, manque d'autorité; c) Verbe + autorité : imposer son autorité. — PARAD. a) (Quasi-)synon. aplomb, arrogance, ascendant, assurance, décision, emprise, énergie, fermeté, fierté, superbe. b) Anton. humilité, modestie, mollesse.
PRONONC. :[] ou [-]. Cf. autoriser et aussi BUBEN 1935, p. 54, § 44. Enq. ://.
ÉTYMOL. ET HIST. — 1. 1121 fig. « texte, écrit authentique, ici : l'Écriture » (PH. DE THAON, Bestiaire, éd. Walberg, 960 ds T.-L. : Mais oz tu, om de Dé, Entent auctorité E oies escripture), seulement au Moy. Âge; XIIIe s. « force obligatoire de ce qui est jugé, décidé » (Livre de justice, 7 ds LITTRÉ : Loys roi dit que costume doit valoir loi; quant aucune doutance est de la loi, ele doit avoir l'autorité des choses qui tozjors sunt jugies...); 2. 1174 « pouvoir d'imposer l'obéissance » (G. DE PONT STE MAXENCE, Vie de St Thomas, éd. Hippeau, 4869 ds T.-L. : De celui [evesque] d'Everwic qui par s'autorité Out sustreit a l'iglise de Sainte Ternité Des reis l'enunctïon); 3. 1267-68 « crédit, réputation d'un auteur ou d'un personnage important auquel l'on se réfère » (BRUNETTO LATINI, Li Livres dou Trésor, liv. III, 1re part., c. 34 ds Dict. hist. Ac. fr. : Porce que li maistres veult plus apertement demonstrer ce que il a dit, metra il uns viels exemples de grant auctorité, sor quoi fu dit par plusors sages); 4. 1559 « crédit, considération dont on jouit et qui impose l'obéissance » (AMYOT, trad. de Plutarque, Vie d'Alcibiade, c. 6, ibid. : Il leur donna secrètement espérance de l'alliance et ligue des Athéniens, et les exhorta de ce faire en parlant avecques ceulx qui avoyent aucthorité et crédit envers le peuple); 5. 1699 « organe du pouvoir, gouvernement » (RACINE, Esther, III, 3 ds LITTRÉ : Quand la suprême autorité Dans ses conseils a toujours auprès d'elle La justice et la vérité); 6. fin XVIIIe s. au plur. « magistrats, hauts fonctionnaires chargés d'une partie quelconque de l'administration publique » (TURGOT, Formation des bureaux de charité, art. Ier, § 1 ds Dict. hist. Ac. fr. : Tous les hommes et toutes les autorités se réuniront sans doute avec empressement pour y concourir).
Empr. au lat. auctoritas attesté dep. la Loi ds XII Tables ds TLL s.v., 1213, 85; cont. jur. usus auctoritas « droit de possession acquis par l'usage »; 1 « garantie de la chose écrite », cont. relig. (TERTULLIEN, Spect., 3, ibid., 1224, 73 : quorundam... fides ... de scripturis auctoritatem exposcit); d'où auctoritas, synon. de Sacra Scriptura (S. AUGUSTIN, Civ., 12, 3, ibid., 1225, 31 : in nostris autoritatibus legitur); 2 « pouvoir d'imposer l'obéissance » (NEP., Milt. 8, 4, ibid., 1215, 74 : in Miltiade erat ... magna auctoritas apud omnes civitates); 3 « garantie, crédit d'un écrivain » (Rhet. Her. 4, 7, ibid., 1223, 4 : probarent quemlibet ... vel poetam vel oratorem, cuius auctoritate niterentur); 5 « autorité du gouvernement » (CICÉRON, Verr., 4, 81, ibid., 1228, 39 : eius omnes res gestas ... publica auctoritate defendimus); 4 « dignité, crédit » (TÉRENCE, Hec., 47, ibid., 1215, 64 : facite ut vestra auctoritas meae auctoritati fautrix adjutrixque sit); 6 au plur. « hauts personnages exerçant l'autorité » (CICÉRON, Verr., 1, 52, ibid., 1225, 38 : circumstant te summae auctoritates).
STAT. — Fréq. abs. littér. :6 654. Fréq. rel. littér. : XIXe s. : a) 12 597, b) 7 144; XXe s. : a) 6 848, b) 9 602.
BBG. — AC.-CAN.-FR. 1968. — ALLMEN 1956. — BACH.-DEZ. 1882. — BARR. 1967. — BASTIN 1970. — BELLET (R.). Formation et développement du vocab. chez Jules Vallés journaliste (1848-1871). In : COLL. DU CENTRE DE LEXICOL. POL. 1968 Saint-Cloud. Cah. Lexicol. 1969, n° 15, pp. 9-10. — BIROU 1966. — BLANCHE 1857. — BOUILLET 1859. — BOUYER 1963. — BRUANT 1901. — CAP. 1936. — DUB. Pol. 1962, pp. 74, 75, 169. — DUPIN-LAB. 1846. — Éd. 1913. — ÉD. 1967. — Foi t. 1 1968. — FOULQ.-ST-JEAN 1962. — GOBLOT 1920. — Gramm. t. 1 1789. — LACR. 1963. — LAFON 1969. — LAL. 1968. — Lar. comm. 1930. — LE BRETON Suppl. 1960. — MARCEL 1938. — Métrol. 1969. — MUCCH. Sc. soc. 1969. — PARÉ (G.). Le Roman de la Rose et la scolastique courtoise. Paris. Ottawa, 1941, pp. 23-25. — PIERREH. Suppl. 1926. — Pol. 1868. — POROT 1960. — RÉAU-ROND. 1951. — ST-EDME t. 2 1825. — SILL. 1965. — SPR. 1967. — SPRINGH. 1962. — TEZ. 1968. — Théol. bibl. 1970.
autorité [otɔʀite; ɔtɔʀite] n. f.
ÉTYM. 1119, auctorité; lat. auctoritas, de auctor « auteur ».
❖
1 Droit de commander, pouvoir (reconnu ou non) d'imposer l'obéissance. ⇒ Commandement, domination, force, puissance, souveraineté, supériorité. || Autorité de droit, de fait. || L'autorité du souverain, du chef de l'État. || L'autorité du monarque sur ses sujets. ⇒ Sceptre (fig.). || La confusion de l'autorité politique et de l'autorité religieuse dans la personne d'un roi. || Confusion entre autorité et pouvoir. → 2. Pouvoir, cit. 13. || L'autorité d'un comité, d'un organisme. || L'autorité du supérieur sur ses subordonnés, du chef sur ses soldats. ⇒ Hiérarchie. || Autorité paternelle, parentale. || Autorité du tuteur sur le mineur. ⇒ Tutelle. || L'autorité du patron sur ses employés. || Autorité légitime, établie, reconnue. || Autorité de fait. || Autorité illégale, usurpée. || Imposer son autorité. || S'arroger une autorité tyrannique. || Autorité absolue, despotique, dictatoriale, discrétionnaire, oppressive, rigoureuse, sévère, sans limite, sans contrôle. || Régime d'autorité. ⇒ Absolutisme, autocratie, autoritarisme, caporalisme, césarisme, despotisme, dictature, domination, omnipotence, oppression, totalitarisme, tyrannie. || Soumettre les peuples à son autorité (⇒ Hégémonie, prééminence, prépotence). || Détenir une autorité. || Avoir autorité sur qqn. || Être sous l'autorité de…, soumis à l'autorité de… || Exercer l'autorité. || Faire acte d'autorité. || User, abuser de l'autorité. || Abus d'autorité. || Donner, conférer, déférer, déléguer l'autorité. || Investir, revêtir d'une autorité. || Perdre, abdiquer l'autorité. || Reprendre, ressaisir l'autorité. || Être jaloux de son autorité. || Brider, contrebalancer, limiter, partager l'autorité. || Refus de l'autorité. ⇒ Anarchisme. || Respecter l'autorité de qqn. || Son autorité s'affaiblit, est contestée.
REM. Autorité, sans compl., peut désigner l'autorité de droit (ci-dessous, cit. 3, 15) ou de fait (cit. 4, 10, etc.); l'autorité divine (cit. 8 : suprême autorité) ou humaine, l'autorité politique, collective (cit. 17, 19, 20) ou privée (cit. 10).
1 L'autorité de l'homme est de peu d'importance,
Et passe en un moment;
Mais cette vérité que le ciel nous dispense
Dure éternellement.
Corneille, l'Imitation de J.-C., I, 5.
2 Que veux-tu que je fasse contre l'autorité d'un père.
Molière, l'Amour médecin, I, 4.
3 Celui qui, sans autorité, tue un criminel, se rend criminel lui-même.
Pascal, les Provinciales, 14.
4 Elle savait persuader et convaincre aussi bien que commander, et faire valoir la raison non moins que l'autorité.
Bossuet, Oraison funèbre de Henriette-Anne d'Angleterre.
5 Charlemagne exerça dans Rome même l'autorité souveraine en qualité de patrice.
Bossuet, Hist., I, 11.
6 C'était leur fermer la bouche par l'autorité du souverain.
Bossuet, Hist. des Variations, 14.
7 De là nous pouvons juger que la première idée de commandement et d'autorité humaine, est venue aux hommes de l'autorité paternelle.
Bossuet, Politique tirée des propres paroles de l'Écriture sainte, t. XXIII, p. 518.
8 Quand la suprême autorité
Dans ses conseils a toujours auprès d'elle
La justice et la vérité (…)
Racine, Esther, III, 3.
9 Vous croyez qu'abusant de mon autorité,
Je prétends attenter à votre liberté (…)
Racine, Mithridate, I, 2.
10 L'autorité seule ne fait jamais bien; la soumission des inférieurs ne suffit pas : il faut gagner les cœurs.
Fénelon, Télémaque, III.
11 Santillane, me dit-il un jour, tu as vu le duc de Serne jouir d'une autorité qui ressemblait moins à celle d'un ministre favori qu'à la puissance d'un monarque absolu (…)
A. R. Lesage, Gil Blas, XI, 8.
12 (…) ne cherchez jamais à employer l'autorité là où il ne s'agit que de raison (…)
Voltaire, Dict. philosophique, Autorité.
13 Quand l'autorité devient arbitraire (…)
Mirabeau (→ Arbitraire, cit. 7).
14 La justice est le point d'appui de l'autorité.
Marmontel, Bélisaire, XV.
15 Le principe de toute souveraineté réside essentiellement dans la Nation. Nul corps, nul individu ne peut exercer d'autorité qui n'en émane expressément.
Déclaration des droits de l'homme, 1791, art. 3.
16 De même que dans la famille l'autorité était inhérente au sacerdoce, et que le père, à titre de chef du culte domestique, était en même temps juge et maître, de même, le grand-prêtre de la cité en fut aussi le chef politique.
Fustel de Coulanges, la Cité antique, III, 9, p. 206.
17 Lorsque l'autorité cesse de paraître juste aux sujets, il faut encore du temps pour qu'elle cesse de le paraître aux maîtres.
Fustel de Coulanges, la Cité antique, III, 9, p. 310.
18 L'autorité publique s'est évanouie : c'est le chaos social et politique.
J. Bainville, Hist. de France, p. 41.
19 Du golfe Persique aux collines d'Harran, et par la Syrie, jusqu'en Égypte, son influence (de Babylone) s'exerçait suivant toutes les nuances de l'autorité, du protectorat ou de la domestication.
Daniel-Rops, le Peuple de la Bible, IV, 1, p. 264.
20 Elle (l'Angleterre) nous a enseigné, et prouvé par l'exemple, que liberté et autorité ne sont pas des notions contradictoires, qu'on peut obéir aux lois de son pays sans sacrifier sa dignité, que liberté ne signifie pas nécessairement désordre, ni autorité tyrannie.
André Siegfried, l'Âme des peuples, IV, 3.
21 Partisans d'une autorité persuasive, ils préconisent leur façon de voir avec la dernière violence.
G. Duhamel, Récits des temps de guerre, t. II, p. 27.
21.1 Qu'est-ce qui m'a retenu de donner ordre ? (…) la crainte de je ne sais quoi, mais surtout l'extrême répugnance que j'ai de faire prévaloir mon désir, de faire acte d'autorité, de commander.
Gide, Voyage au Congo, in Souvenirs, Pl., p. 845.
♦ Autorité de justice : pouvoir permettant aux juges d'ordonner des mesures relatives aux personnes ou aux biens. || Décision par autorité de justice. || Vente par autorité de justice.
22 Elle (l'action) n'a pas lieu dans les ventes faites par autorité de justice.
Code civil, art. 1649.
♦ ☑ Loc. Vx. Coup d'autorité : acte décisif, coup de force contre ceux qui résistent.
23 (…) Je n'y vois plus de remède, si Messieurs de l'Académie ne bannissent, par un coup d'autorité, ce mot barbare de Sorbonne.
Pascal, les Provinciales, I.
24 Quelques coups d'autorité que l'on ait faits de nos jours en France sur les monnaies dans deux ministères consécutifs, les Romains en firent de plus grands (…)
Montesquieu, l'Esprit des lois, XXII, 11.
2 Ensemble des organes du pouvoir. || L'autorité publique. || Les actes, les décisions, les agents, les représentants de l'autorité. ⇒ Gouvernement; administration. || Intervention de l'autorité, de la force armée. || L'autorité législative. || L'autorité administrative. || L'autorité judiciaire. || L'autorité militaire.
♦ Au plur. (1790). || Les autorités : les personnes qui exercent l'autorité. || Les autorités civiles, militaires, religieuses. ⇒ Dignitaire, officiel. || Les autorités constituées. — Au sing. (Rare). || Une autorité.
25 (…) le plaisir de dogmatiser sans être repris ni contraint par aucune autorité ecclésiastique ni séculaire (…)
Bossuet, Oraison funèbre de Henriette-Anne d'Angleterre.
26 (…) ceux qui, sans ordre des autorités constituées (…)
Code pénal, art. 341 (→ Arrêter, cit. 35.).
27 Aux noms d'autorités, corps, pouvoirs, on prend l'habitude (sous la Révolution) d'ajouter « constitués » (…) Cependant, bien entendu, « autorités » s'emploie (encore) seul.
Brunot, Hist. de la langue franç., t. IX, p. 1055.
28 Avec l'assentiment tacite des autorités, les fidèles du gouvernement affichent leur programme sur papier blanc (…)
Georges Lecomte, Ma traversée, p. 30.
29 On devine en lui (Péguy) un de ces hommes pour qui tout l'appareil des puissances temporelles, les puissances politiques, les autorités de tout ordre, intellectuelles, mentales même, ne pèsent pas une once devant un mouvement de conscience propre.
Martin du Gard, Jean Barois, II, Le vent précurseur, II.
3 Force obligatoire d'un acte de l'autorité publique. || L'autorité de la loi. ⇒ Souveraineté. — ☑ Loc. Dr. Autorité de la chose jugée : présomption de vérité qui s'attache à ce qui a été définitivement jugé et qui interdit de le remettre en cause.
30 L'autorité de la chose jugée n'a lieu qu'à l'égard de ce qui a fait l'objet du jugement (…)
Code civil, art. 1351.
4 De l'autorité de…; d'autorité. || Agir de son autorité privée, de sa propre autorité, avec l'autorité qu'on s'attribue, de son propre mouvement, sans droit, sans autorisation de personne.
31 C'est à l'opinion publique à faire justice de ces petits tribunaux qui s'élèvent de leur propre autorité.
Bernardin de Saint-Pierre, Préambule, la Chaumière indienne.
♦ D'autorité : d'une manière impérative, impérieuse, sans donner le temps de répondre ou de réfléchir. ⇒ Autor (d'), fam.
32 On nous arrête d'autorité pour souper chez M. de Marsillac.
Mme de Sévigné, Lettres, 174.
33 Pourtant ces imbéciles l'avaient classée, d'autorité, dans la catégorie des maniaques qui harcèlent les hommes consacrés.
F. Mauriac, le Sagouin, I.
5 Attitude autoritaire ou très assurée. || Un air, un ton d'autorité. || Agir avec autorité. || Une autorité tranchante, sèche.
34 (Télémaque) court à la porte par où Mentor était sorti; il se la fait ouvrir avec autorité.
Fénelon, Télémaque, XI.
35 Sa fière autorité veut de la déférence.
Voltaire, Sémiramis, I, 4.
36 (Il) luttait contre la timidité par des effets d'autorité tranchante qui m'exaspéraient.
A. Maurois, Climats, p. 92.
6 Capacité à se faire obéir. || Ce professeur manque d'autorité. || Avoir de l'autorité, beaucoup d'autorité. || Il est d'un tempérament autoritaire, mais il manque d'autorité.
36.1 (…) par manque d'autorité naturelle, on cherche à régner par la terreur.
Gide, Voyage au Congo, in Souvenirs, Pl., p. 693.
7 Supériorité de mérite ou de séduction qui impose l'obéissance sans contrainte, le respect, la confiance. ⇒ Ascendant, considération, crédit, empire, influence, magnétisme, poids, prestige, réputation, séduction. || Cet homme a une grande autorité. || L'autorité qui émane de sa personne séduit, subjugue tout le monde. ⇒ Charisme. || Son autorité inspire une crainte respectueuse. || L'autorité dont il jouit lui donne voix au chapitre, fait de lui l'arbitre de la situation. || Avoir, acquérir, prendre de l'autorité sur qqn. || Donner de l'autorité à qqn. ⇒ Accréditer. || Prendre de l'autorité sur… → ci-dessous, cit. 37. || Perdre de son autorité. ⇒ Discréditer (se). — (Choses). Fait de s'imposer, de servir de référence, de règle, par le mérite reconnu. || L'autorité de l'Église. || Avoir, prendre de l'autorité; les coutumes acquièrent de l'autorité avec le temps. || Invoquer, s'abriter derrière l'autorité d'une source, d'un auteur, des textes.
37 Ma raison, il est vrai, dompte mes sentiments;
Mais quelque autorité que sur eux elle ait prise,
Elle n'y règne pas, elle les tyrannise (…)
Corneille, Polyeucte, II, 2.
38 Il y a deux manières de persuader les vérités de notre religion : l'une par la force de la raison, l'autre par l'autorité de celui qui parle.
Pascal, Pensées, t. III, 561.
39 (…) cette fable n'est fondée que sur l'autorité de ceux qui disent celle des Septante, qui montre que l'Écriture est sainte.
Pascal, Pensées, t. III, 634.
40 On m'a dit qu'il faudrait lui faire parler encore par des gens qui eussent plus d'autorité sur son esprit.
Racine, Lettres.
41 Saint François, un évêque d'une si grande autorité (…)
42 Que peuvent des évêques qui ont anéanti eux-mêmes l'autorité de leur chaire (…) en condamnant ouvertement leurs prédécesseurs.
Bossuet, Oraison funèbre de Henriette-Anne d'Angleterre.
43 Les chefs, qui le regardaient de près, furent étonnés et éblouis du feu divin qui éclatait dans ses yeux. Il parut avec une majesté et une autorité qui est au-dessus de tout ce qu'on voit dans les plus grands d'entre les mortels. Le charme de ses paroles (…)
Fénelon, Télémaque, IX.
44 Invoquerai-je contre vous l'autorité des deux Testaments ?
France, la Rôtisserie de la reine Pédauque, p. 159.
45 L'autorité se conquiert lentement.
M. Barrès, Leurs figures, p. 17.
46 L'éclat de ses erreurs n'enlevait rien à l'autorité de ses prophéties.
A. Maurois, Bernard Quesnay, I.
47 C'est un splendide moment dans la vie des grands créateurs que celui où ils ont acquis leur autorité, affranchi leur génie en conservant encore la fougue et le charme de la jeunesse.
Éd. Herriot, la Vie de Beethoven, p. 129.
48 Il n'y a d'autorité vraie que basée sur l'amour et le respect, le seul respect profond, le respect intérieur.
G. Duhamel, Récits des temps de guerre, t. II, p. 29.
8 État d'une personne, d'une chose qui se fait croire.
49 Je parle de lui avec une autorité que je ne confonds pas avec l'infaillibilité.
Colette, l'Étoile Vesper, p. 146.
♦ ☑ Loc. Faire autorité : s'imposer auprès de tous comme incontestable, servir de règle dans un domaine. || Ce livre fait autorité. || Un historien, un savant qui fait autorité.
50 Aucune prophétie ne saurait faire autorité pour moi (…)
Rousseau, Émile, IV.
51 Il a droit d'exiger que son témoignage fasse autorité parmi tout un peuple (…)
Rousseau, Émile, III.
♦ (Une, des autorités). Personne, chose (texte…) qui fait autorité. || Ce chercheur est une autorité dans le domaine. || Alléguer, citer, invoquer, mettre en avant une autorité à l'appui de sa thèse (⇒ Citation). || S'appuyer sur une autorité.
52 Ayant établi sa foi sur une autorité si ferme.
53 On se propose, en somme, de rationaliser l'univers, et de construire une véritable science des phénomènes indépendante de toute religion et de toute métaphysique. Une telle entreprise exige le recours exclusif à l'observation et à l'expérience, qui désormais seront tenues pour les seules autorités valables.
Jean Rostand, Esquisse d'une histoire de la biologie, p. 9-10.
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DÉR. Autoritaire.
Encyclopédie Universelle. 2012.