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La machine est une réalité technique qui joue un rôle dans la production, mais c’est aussi une réalité humaine et sociale qui a des effets profonds sur la vie matérielle des hommes, sur l’organisation du travail et les rapports sociaux. Ce dernier aspect alimente depuis Aristote la réflexion des philosophes dont l’attitude vis-à-vis de la machine s’est modifiée en même temps qu’évoluaient les techniques elles-mêmes. La machine a enfin été un modèle épistémologique pour penser le fonctionnement de l’organisme.

En tant que réalité technique, la machine est une construction artificielle qui consiste en «un assemblage de parties déformables avec restauration périodique des mêmes rapports entre les parties» (G. Canguilhem, La Connaissance de la vie ); elle a pour fonction de transformer de l’énergie provenant d’une source naturelle (eau, vent, vapeur, électricité, pétrole, atome, soleil) et d’utiliser cette transformation. Il faut attendre la Renaissance pour voir apparaître deux caractéristiques essentielles de la machine, l’automatisme et la régulation, ou contrôle par la machine elle-même de son propre mécanisme.

En tant que réalité humaine et sociale, la machine a joué un rôle complexe et a fait l’objet, de la part des philosophes, de représentations variées, souvent contradictoires: moyen d’augmenter le bien-être des hommes, facteur de progrès ou, à l’inverse, engin maléfique susceptible de se retourner contre son utilisateur pour l’asservir. À cet égard, le problème de la machine a une histoire qui peut s’ordonner autour de trois axes principaux, correspondant eux-mêmes à des configurations différentes de la structure sociale et à des étapes du développement des techniques. Aristote a conscience du rôle des machines quand il écrit, dans la Politique (I, 4) que, «si les navettes tissaient d’elles-mêmes et si les plectres pinçaient tout seuls la cithare, alors ni les chefs d’artisans n’auraient besoin d’ouvriers, ni les maîtres d’esclaves». L’absence de machines justifie l’esclavage, par ailleurs fondé en nature selon Aristote, et vice versa l’existence de cette main-d’œuvre abondante et bon marché explique la stagnation du machinisme dans l’Antiquité, phénomène dont rendent compte aussi certains traits caractéristiques de la mentalité hellénique, si l’on se réfère aux textes philosophiques: valorisation suprême de la contemplation par rapport à toute autre forme d’activité et mépris du travail manuel, supériorité affirmée du naturel sur l’artificiel. Cet ordre de valeurs va peu à peu s’inverser au cours des siècles suivants, qui voient s’opérer la réhabilitation progressive de tout ce qui est mécanique. L’utilisation des machines, et notamment de la force hydraulique, connaît un essor important à partir des XVIe et XVIIe siècles. C’est avec Bacon et Descartes que la machine sera considérée essentiellement comme un moyen de libérer l’homme des forces de la nature; la clef de l’amélioration des conditions de l’existence humaine est à chercher dans le développement des techniques, grâce auxquelles nous pouvons «nous rendre comme maîtres et possesseurs de la nature» (Descartes, Discours de la méthode , 5e partie). Ce mouvement se précise au XVIIIe siècle avec la construction des automates (Vaucanson), le perfectionnement des fileuses mécaniques et, surtout, la création et la mise au point de la machine à vapeur (Papin, 1690; Savery, 1698; Newcomen, 1712; Watt, 1763), source d’énergie motrice applicable à tous les travaux industriels et autonome par rapport aux phénomènes naturels, limitant l’intervention humaine à un simple contrôle. En même temps, les encyclopédistes affirment leur confiance dans les inventions techniques et propagent un idéal centré sur la recherche de l’utile et de l’efficace. Les conditions sont réunies pour qu’ait lieu, en Angleterre d’abord, la révolution industrielle. Mais c’est alors, et en raison de ce contexte économique précisément, qu’un nouveau renversement s’effectue dans l’histoire du problème de la machine. À mesure que se développent, tout au long du XIXe siècle, l’industrialisation et la mécanisation, et que se concentrent les usines, les conditions d’existence et de travail de la classe ouvrière se dégradent. Conçue pour libérer l’homme, la machine engendre une nouvelle servitude; en même temps qu’elle augmente la productivité et crée de la richesse, elle répand la misère et le chômage, elle déprécie la main-d’œuvre; en simplifiant le travail, elle le déshumanise. Pour des auteurs comme l’Anglais Robert Owen, ou Proudhon, la machine, qui avait été au XVIIIe siècle la source incontestée de l’amélioration du niveau de vie, est désormais celle de tous les maux de la société. Il est à noter que cette condamnation du machinisme et à travers lui de la rationalité technicienne émane d’horizons politiques très divers, voire opposés, et qu’il s’agit là d’un thème assez ambigu. D’un côté, toute une tradition conservatrice et romantique critique le règne de la machine au nom des valeurs du passé et de la nostalgie de l’Ancien Régime, ou encore d’un retour à la nature posée comme norme. De l’autre, Marx montre comment la détérioration de la condition ouvrière est un effet non du progrès technique en soi, mais de l’accumulation capitaliste; c’est parce que la mécanisation, pourtant conçue pour alléger la peine des hommes, permet l’allongement de la journée de travail, donc l’accroissement de la plus-value, que les ouvriers sont réduits à n’être plus que des «appendices de la machine».

Sur le plan épistémologique enfin, la structure et le fonctionnement de la machine ont longtemps servi à expliquer la structure et le fonctionnement du corps vivant. Si l’assimilation de l’organisme à une machine remonte à Aristote, elle trouve une expression achevée dans la théorie cartésienne de l’animal-machine, reprise par La Mettrie, à une époque où le machinisme est en plein essor et où la mécanique fournit un modèle d’explication pour tous les phénomènes de la nature. L’élaboration du modèle mécanique de la vie permet de légitimer au niveau théorique l’utilisation technique de l’animal et l’assujettissement de la nature tout entière aux fins de la raison humaine. La théorie mécanique de l’organisme, critiquée par Kant dans un passage de la Critique de la faculté de juger , où il montre l’irréductibilité de l’organisme à la machine, est depuis longtemps abandonnée par les biologistes.

machine [ maʃin ] n. f.
XIVe; lat. machina « invention, engin »
IVx Ruse, machination. II(1559) Objet fabriqué, généralement complexe ( mécanisme), destiné à transformer l'énergie ( moteur), et à utiliser cette transformation (à la différence de l'appareil et de l'outil, qui ne font qu'utiliser l'énergie). (Au sens large) Tout système où existe une correspondance spécifique entre une énergie ou une information d'entrée et celles de sortie; tout système utilisant une énergie extérieure pour effectuer des transformations, des exécutions sous la conduite d'un opérateur ou d'un autre système. A(Emplois généraux) Effet, force, puissance, rendement d'une machine. Quantité de travail fournie par une machine. Machine à mécanisme intérieur. automate, robot. Organes d'une machine. commande , mécanisme, moteur, transmission. Bâti d'une machine. charpente, châssis. Pièces et dispositifs d'une machine (arbre, axe, balancier, barre, bielle, bouton, bras, butée, came, cardan, carter, chaîne, chariot, chemise, clapet, collier, courroie, coussinet, crémaillère, culasse, cylindre, engrenage, frein, galet, glissière, hélice, manette, manivelle, palier, papillon, pignon, piston, plateau, ressort, robinet, rouage, roue, soupape, tambour, tige, tourillon, tringle, tube, turbine, tuyau, tuyère, va-et-vient, valve, volant). Mettre une machine en marche. Machine qui tourne, marche, fonctionne. Machine déréglée, détraquée. Machine en panne. Entretien et réparation d'une machine ( 2. maintenance; mécanicien) .
♢ MACHINE À VAPEUR, qui utilise l'expansion de la vapeur d'eau pour produire la force motrice. Machines à vapeur fixes (pompes, compresseurs, chaudières à vapeur), mobiles (locomobiles, locomotives). Machine à vapeur à simple, à double effet. compound.
Machine hydraulique, pneumatique, à air comprimé, électrique, dynamoélectrique ( dynamo) , magnétoélectrique ( 1. magnéto) , électronique ( 2. calculateur) .
BSpécialt
1Mécan. Système de corps transformant un travail en un autre. Machines simples : levier, plan incliné, poulie, treuil, vis. Machine composée : combinaison de machines simples.
2Machines de bureau. Informatisation des machines. bureautique.
(1858) MACHINE À ÉCRIRE. Clavier, touches, chariot, rouleau, tabulateur, ruban d'une machine à écrire. Absolt Secrétaire qui tape une lettre à la machine. dactylo. Machine à boule. Machine à marguerite.
Dispositif de saisie, de traitement ou d'exploitation de l'information. 2. calculateur, 2. ordinateur; informatique. Langage machine. Machine à traitement de texte. Machine à calculer. calculatrice. Machine à calculer portative, de poche. calculette. Machine à traduire. Machine à photocopier. photocopieur.
3(Appareils domestiques) Machine à laver (le linge). lave-linge . Absolt Ce pull passe en machine, peut se laver à la machine. Machine à laver la vaisselle. lave-vaisselle. Machine à coudre : instrument à main ou électrique qui fait des points de couture. La canette, le pied-de-biche d'une machine à coudre. Machine à tricoter, à broder, à repasser.
Machine à café, distributeur automatique. — Machine à billets. distributeur. Machine à sous.
4(Dans l'industr., les métiers) Les machines sont à la base de l'équipement industriel. Objet fait à la machine (opposé à fait à la main). Machine à tisser. métier. Machines élévatrices, machines et appareils de levage. Machines agricoles. (1857) MACHINE-OUTIL : machine dont l'effort final s'exerce sur un outil. Machines-outils déformant la matière par choc, compression, étirage; désagrégeant la matière par enlèvement, cisaillement, usure. Machine à river, cintrer, plier, décolleter, fileter, tarauder. MACHINE-TRANSFERT : ensemble de machines-outils à travers lesquelles les pièces à usiner avancent automatiquement. Des machines-transferts.
5Dispositif assurant la propulsion d'un navire. La salle, la chambre des machines. machinerie. Stopper les machines. Faire machine (en) arrière.
6Véhicule comportant un mécanisme. Cette moto est une belle machine. « Je grimpai donc sur sa machine et en route » (Queneau). Les machines volantes, ancêtres des avions. Spécialt Locomotive. Machine à vapeur. Machine électrique. Machine diesel. Le dépôt des machines.
7Anciennt Machines de guerre : armes complexes d'attaque ou de défense. ⇒ baliste, bélier, bombarde, catapulte, perrière, pierrier. Mod. Engin de guerre. Nous sommes habitués « aux horribles machines de guerre qui sèment la ruine et la mort » (Duhamel). — MACHINE INFERNALE : anciennt dispositif de guerre exceptionnel combinant des armes et des explosifs, et destiné aux grandes destructions; mod. dispositif meurtrier installé et réglé pour perpétrer un attentat. ⇒ 1. bombe.
8Théâtre Décors installés au moyen de machines. Une pièce à machines. féerie; deus ex machina.
9Le machinisme, la mécanisation. Le siècle, la civilisation de la machine, des machines.
IIIFig.
1(1641) Être vivant considéré comme une combinaison d'organes fonctionnant de façon mécanique. La théorie des animaux-machines de Descartes. Personne qui agit comme un automate. robot. — MACHINE À... : ce qui est considéré comme ayant pour fonction unique ou essentielle de (faire, produire qqch.). La machine à penser. Péj. Il n'est qu'une machine à faire de l'argent.
2(1609) Ensemble complexe dont la marche a la régularité d'une machine. Vx La machine ronde : la Terre. — Mod. La machine administrative, économique, politique.
3Vx Grand ouvrage de génie. Mod. Peint. Une grande machine : tableau pompeux.
4(1808) (Pour désigner une femme, une enfant) machin.

Machin, Machine nom (de machine) Familier Mot par lequel on désigne quelqu'un dont le nom ne vient pas immédiatement à l'esprit, qu'on ne sait pas nommer ; Chose, Truc (avec majuscule).

machine
n. f.
rI./r
d1./d Appareil plus ou moins complexe, qui utilise une énergie pour la transformer en une autre, qui accomplit des tâches que l'homme ne pourrait pas accomplir par lui-même, ou qui rend ces tâches plus faciles. Machine à calculer, à écrire.
Machine à laver ou (Belgique) machine à lessiver. Syn. lave-linge, (Belgique) lessiveuse.
Machine à coudre.
Machine agricole.
Machine à bois, qui sert au travail du bois (V. machine-outil).
|| Machine électrique, qui fonctionne à l'électricité ou qui sert à en produire.
Machine à vapeur, dans laquelle l'expansion de la vapeur d'eau produit la force motrice.
d2./d MAR élément moteur de l'appareil propulsif d'un navire. La salle des machines.
|| Par ext. L'appareil propulsif lui-même.
|| Loc. Faire machine arrière.
d3./d Véhicule. Motocycliste dont la machine est en panne.
|| CH de F Locomotive.
|| (Québec) Vieilli Automobile.
d4./d Machine à sous.
|| (Québec) Machine à boules: billard électrique.
rII./r Fig.
d1./d être vivant qui agit de façon purement mécanique. Selon Descartes, les animaux sont de simples machines.
|| Péjor. Il n'est qu'une machine à débiter des sornettes.
d2./d Ensemble organisé qui fonctionne comme un mécanisme. La machine bureaucratique.

⇒MACHINE, subst. fém.
I. A. — [Désigne des objets fabriqués complexes]
1. a) Objet fabriqué complexe capable de transformer une forme d'énergie en une autre et/ou d'utiliser cette transformation pour produire un effet donné, pour agir directement sur l'objet de travail afin de le modifier selon un but fixé. Synon. engin, mécanique, mécanisme. À peine entre-t-on dans la ville [Verrières] que l'on est étourdi par le fracas d'une machine bruyante et terrible en apparence. Vingt marteaux pesants, et retombant avec un bruit qui fait trembler le pavé, sont élevés par une roue que l'eau du torrent fait mouvoir. Chacun de ces marteaux fabrique, chaque jour, je ne sais combien de milliers de clous (STENDHAL, Rouge et Noir, 1830, p. 4). Les machines (...) ont une fonction de même type que celle des outils. Tout comme eux, elles augmentent la productivité du travail humain. Mais alors que l'outil n'est que le prolongement de la main (...) la machine constitue un milieu nouveau, un milieu technique au service de l'être humain collectif, mais distinct de lui (BOUV.-IBARR. 1975):
1. Des évolutions actuelles [des moyens de travail] se situent dans une série de changements quantitatifs dans le cadre d'une répartition donnée des fonctions de la production entre l'homme et la machine (...). Cette évolution des moyens de travail à une certaine étape du développement de la technique (le machinisme) correspond à la diversité des matières travaillées ou utilisées au cours du procès de travail. Cette évolution s'est traduite par une spécialisation des outils et des machines.
DURRAFOURG, Travailler autrement pour vivre autrement ds Issues, sept. 1980, n° 6, p. 72, 73.
SYNT. Actionner, arrêter, employer, inventer, lubrifier, perfectionner, réparer, utiliser une machine; effet, force, puissance, rendement d'une machine; dispositifs, organes, pièces d'une machine; galerie, salle, théâtre des machines; mettre une machine en action, en marche, en mouvement; machine qui fonctionne, marche, tourne; machine en panne; machine automatique, semi-automatique, à commande numérique.
Machine à vapeur. Machine qui utilise la transformation de l'eau en vapeur saturante sous l'effet d'une source de chaleur pour produire de l'énergie mécanique. Si l'invention de la machine à vapeur et sa première réalisation en 1690 sont attribuées au Français Denis Papin, on doit au génie inventif et à l'habileté du mécanicien James Watt les principales améliorations dont nous profitons aujourd'hui (FAUCHER, Phys., Paris, Hatier, t. 1, 1961, p. 279):
2. L'adaptation universelle de la machine à vapeur n'était possible (...) que si l'on pouvait en transformer le mouvement alternatif en mouvement régulier de rotation. (...) le mouvement de rotation régulier ne fut obtenu qu'à partir de la machine à double effet, à deux temps moteur.
DUCASSÉ, Hist. des Techn., Paris, P.U.F., 1974 [1946], p. 92.
SYNT. Machine (à vapeur) à simple, double effet; machine à vapeur à piston; machine à vapeur à plusieurs cylindres; machine à basse, haute, pleine pression; machine (à vapeur) alternative, rotative; machine à vapeur fixe, mobile.
Machine (à vapeur de système/dite) compound. Machine à vapeur à plusieurs cylindres dans lesquels la vapeur agit alternativement. La machine à vapeur connut également quelques développements importants (...) Arthur Woolf mit (...) au point une machine à double expansion et à haute pression, ou machine compound (1811) permettant une économie de combustion (GILLE, Hist. des techn., Paris, Gallimard, 1978, p. 739).
HIST. TECHN. Machine atmosphérique. Machine qui utilisait la force de la vapeur et la pression atmosphérique, et qui correspond à la première étape dans la mise au point de la machine à vapeur. À la machine atmosphérique, il [J. Watt] substitua la machine à simple effet (ARMENGAUD, Moteurs à vapeur, t. 1, 1861, p. 105). Papin (...) imagine, en 1707, une machine atmosphérique à piston flottant (GILLE, Hist. des techn., Paris, Gallimard, 1978, p. 698).
Machine hydraulique. Machine qui utilisait la force de l'eau en mouvement (v. hydraulique I A). Machine à air comprimé, machine pneumatique. Denis Papin avait étudié pour Boyle le perfectionnement de la machine pneumatique (P. GILLE ds Hist. gén. des techniques, Paris, P.U.F., t. 2, 1965, p. 457). Machine à feu. Synon. pompe à feu (v. feu I B 2 c).
Machine électrique. V. électrique B 2 c. Machine électrostatique; machine d'induction.
Machine de Savery, de Papin, de Watt.
b) [Dans l'industrie, dans diverses branches d'activités économiques]
Machine(-)outil.Machine actionnée par une source d'énergie et dont l'effort final s'exerce, au moyen d'une transmission, sur un outil, et qui est destinée à façonner des produits en transformant des matériaux à l'état solide par des procédés physiques, chimiques ou autres. Machine-outil travaillant par enlèvement de la matière, par déformation du métal; industrie de la machine-outil. L'automatisation des processus, touchant le domaine de la machine-outil, faisait apparaître les machines à cycles automatiques et à commande programme, ainsi nommées parce qu'elles permettent une adaptation rapide et une reconversion aisée d'un cycle de travail déterminé (Encyclop. univ. t. 10 1972, s.v. machines-outils). Aux machines-outils classiques, on a substitué des tours de reproduction ou des fraiseuses de reproduction, qui travaillent en reproduisant un modèle (...). Ces machines sont aujourd'hui remplacées par des machines-outils à commande numérique (GILLE, Hist. des techn., Paris, Gallimard, 1978, p. 927):
3. Sous des formes nouvelles, les machines-outils intègrent les outils qui quittent la main des travailleurs et passent dans le corps de la machine, en devenant des instruments mécaniques. (...) les machines-outils ont ainsi constitué la base technique d'un nouveau système de production de grande série (le machinisme) et d'une nouvelle unité productive (la fabrique) fondée sur la coopération développée.
BOUV.-IBAR. 1975, p. 405.
Machines spéciales. On désigne sous le nom de machines spéciales des machines composées d'unités d'usinage autonomes (Encyclop. univ. t.10 1972, s.v. machines-outils).
Machine-transfert. Ensemble de machines-outils à travers lesquelles les pièces à usiner avancent automatiquement. Machine-transfert circulaire, rectiligne; machine-transfert de type continu, séquentiel. C'est le triomphe de la machine automatique. Le terme en est, dans les ateliers, la machine-transfert qui effectue elle-même le déplacement des pièces d'un outil devant un autre outil, ceux-ci se mettant automatiquement en marche lorsque la pièce est devant eux, grâce aux têtes électromagnétiques (E.-H. LACOMBE, 1971 ds GILB. Mots contemp. 1980). En 1953, on utilisa une machine-transfert semi-automatique, avec 13 postes de travail. À l'entrée de la machine, la pièce était fixée, une fois pour toutes, sur un support qui la faisait passer devant tous les postes d'usinage (Les Techn. de la civilisation industr., Paris, P.U.F., t. 5, 1979, p. 145). V. ex. 4 infra.
Machine agricole. V. agricole I B 2.
Machine expérimentale, de laboratoire. [À titre d'exemples] La machine d'Atwood permet de vérifier que le mouvement est uniformément accéléré (Lar. encyclop., s.v. Atwood). Machine (de) Gramme. Machine génératrice à courant continu (Lar. encyclop., s.v. Gramme).
Machine + adj./à + inf. Machine (généralement machine-outil) conçue pour réaliser une série d'opérations très précises en agriculture ou dans l'industrie. Les machines récolteuses ne diffèrent souvent que par leur système cueilleur adapté au produit; certains chercheurs anglo-saxons envisagent de créer une «machine universelle» de récolte des fruits et des légumes sur tiges basses (Encyclop. univ. t. 10 1972, s.v. machinisme agricole). L'apparition de l'acier au creuset, au milieu du XVIIIe siècle (...) et, à sa suite, des machines-outils pour le métal, en particulier les machines à aléser (...) les machines à fileter (pour les vis et les écrous), les machines à raboter, ouvrirent définitivement la voie à la machine de métal (GILLE, Hist. des techn., Paris, Gallimard, 1978, p. 693). C'est encore à Paris, à l'Exposition européenne de 1959, que l'attention des visiteurs fut attirée par une machine sur laquelle le changement des outils s'effectuait automatiquement. Il s'agissait d'une machine à pointer, aléser, fraiser, percer et tarauder (Les Techn. de la civilisation industr. , Paris, P.U.F., t. 5, 1979, p. 147).
SYNT. Machine à battre, faner, moissonner; machine à carder, filer, lainer, peigner; machine à cintrer, cisailler, couper, décolleter, laminer, mortaiser, percer, river, tailler [les engrenages (coniques/droits), les verres, les vis].
Rem. Machine à + inf. est gén. doublé par un dérivé du verbe, ex.: machine à battre = batteuse, machine à fraiser = fraiseuse, machine à carder = cardeuse, etc.
c) Machine (à + inf.). Appareil (aujourd'hui le plus souvent électrique) permettant d'effectuer des opérations domestiques faites auparavant à la main. Synon. appareil ménager. Machine à éplucher (les légumes), à repasser, à tricoter. Ma mère à sa machine piquait, piquait, comme une nonne dit son rosaire (GUÉHENNO, Journal homme 40 ans, 1934, p. 66). La machine à coudre exécute une couture mécanique d'une manière beaucoup plus rapide que lorsque cette couture est faite à la main (BLANQUET, Technol. mét. habill., 1948, p. 140):
4. Le machinisme a littéralement envahi la production industrielle, voire la vie quotidienne et individuelle. Des machines-transfert et auto-adaptatives aux machines à laver le linge ou la vaisselle, des laminoirs continus à l'ouvre-boîte, tout semble tendre à une mécanisation universelle.
Encyclop. univ. t. 10 1972, s.v. machinisme.
Machine à laver la vaisselle. V. lave-vaisselle.
d) ) Instrument de bureau nécessitant la présence d'un opérateur humain. Machine de bureau.
Machine à écrire, p. abrév., machine. Machine (mécanique ou électrique) permettant une écriture typographique par action manuelle sur les touches d'un clavier. Chariot, rouleau, tabulateur, tige de rappel, ruban d'une machine à écrire; machine à écrire électrique; machine à écrire à boules; taper une lettre à la machine. Sa lettre est écrite à la machine. Si la vie était moins courte, je lui dirais volontiers que je ne réponds jamais aux machines, trouvant cela très-mufle (BLOY, Journal, 1904, p. 244). Aujourd'hui nous travaillons à la machine à écrire, mais nous devons savoir que demain, cette machine peut se changer en mitrailleuse (NIZAN, Chiens garde, 1932, p. 220). Les premiers essais de machine à écrire sont anciens (1714), mais les machines ne naquirent véritablement qu'après les travaux de Wheatstone (1851-1860) et de Remington (1876-1878) (GILLE, Hist. des techn., Paris, Gallimard, 1978, p.839).
[Appareil effectuant des opérations logiques] Machine à additionner, à multiplier, à soustraire.
Machine arithmétique. Instrument permettant d'effectuer mécaniquement certaines opérations d'arithmétique. À l'âge de dix-neuf ans, Pascal inventa sa machine arithmétique, destinée à abréger les opérations de calculs (SAINTE-BEUVE, Port-Royal, t. 2, 1842, p. 463).
Machine à calculer. ,,Machine destinée à exécuter des opérations arithmétiques sous la conduite permanente d'un opérateur et sans véritable programme enregistré ou câblé`` (GUILH. 1969). Les machines à calculer ne sont pas considérées comme des calculateurs (...). Toutefois, l'adjonction de dispositifs électroniques de plus en plus puissants (...) les rapproche des ordinateurs de table (GUILH. 1969):
5. Grâce aux machines à calculer de bureau, l'opération [l'addition de deux nombres] sera rendue plus aisée pour l'opérateur, mais le principe reste identique [à celui de la machine arithmétique de Pascal]. Par un jeu de touches la première donnée est mise en mémoire, la manoeuvre d'une touche convenable transfère cette donnée dans les mémoires de cumul, les totaliseurs, et la seconde donnée est mise en mémoire à son tour, puis cumulée par la manoeuvre d'une touche de commande.
DEMARNE ROUQUEROL, Les Ordinateurs électron., Paris, P.U.F., 1975 [1959], p. 7.
Machine comptable. ,,Machine à calculer utilisant des données alphanumériques introduites par clavier et imprimant les tableaux de résultats ou les lignes de compte sur des bordereaux préimprimés`` (LE GARFF 1975).
) ,,Tout dispositif de saisie, de traitement ou d'exploitation de l'information`` (BUREAU 1972). Synon. calculateur, ordinateur. Machine à cartes perforées, mécanographique; machine à traduire. La deuxième génération [des ordinateurs] (...) représente une mutation considérable. Les caractéristiques des machines se sont complètement transformées: tores de ferrite à mémoire (vers 1955), logique à transistors, nouvelle organisation des échanges d'information par les éléments semi-conducteurs marquent l'étape (GILLE, Hist. des techn., Paris, Gallimard, 1978, p. 921). Disposer d'une machine est une chose, l'utiliser au mieux de ses possibilités, c'est-à-dire de façon efficace et rentable, est une autre chose. On ne se persuadera jamais assez de l'importance que revêt l'environnement de l'ordinateur tant au point de vue humain qu'au point de vue matériel (MATHELOT, L'Informat., Paris, P.U.F., 1980 [1969], p. 22).
Machine frontale. ,,Ordinateur chargé de gérer les entrées-sorties d'un système informatique et pouvant effectuer un traitement local`` (LILEN-MORVAN 1976).
Langage machine. Programme machine.
e) HIST. MILIT. Machine (de guerre). Dans l'Antiquité et au Moyen Âge, ensemble des armes de défense et d'attaque, existant avant l'invention de la poudre à canon. Le siège de Carthage que je termine maintenant m'a achevé, les machines de guerre me scient le dos ! je sue du sang, je pisse de l'eau bouillante, je chie des catapultes et je rote des balles de frondeurs (FLAUB., Corresp., 1861, p. 449):
6. Il existe (...) un machinisme nouveau au Moyen Âge: les machines de guerre. Il en est qui sont très anciennes, comme les béliers ou les tours roulantes. Mais c'est un fait que le Moyen Âge a abandonné l'artillerie (...) des Anciens pour une artillerie à contrepoids.
GILLE, Hist. des techn., Paris, Gallimard, 1978, p. 536.
Mod. Synon. de engin de guerre. L'art de la guerre est si perfectionné, que certaines machines peuvent faire quinze cents veuves par coup. La vapeur a extrêmement simplifié l'état civil (GOZLAN, Notaire, 1836, p. 29). Depuis que la machine dominait l'ordre guerrier, comme le reste, la qualité de ceux qui avaient à mettre en oeuvre les machines de guerre devenait un élément essentiel du rendement de l'outillage (DE GAULLE, Mém. guerre, 1954, p. 7).
Au fig. Synon. de machination. À regarder Mehlen, si elle le jugeait capable d'avoir mis sur pied une pareille machine de guerre, elle jugeait que les moyens qu'il devait employer étaient des moyens simples (VIALAR, Brisées hautes, 1952, p. 229).
Machine infernale. Dispositif de guerre combinant des armes et des explosifs, destiné à provoquer de grandes destructions. La perte des Anglais fut évaluée à 150 hommes (...) au nombre des morts se trouva l'ingénieur qui avait inventé cette horrible machine [envoyé pour détruire le port de Saint-Malo, en 1693]. Cet effet n'est pas rare dans les machines infernales, qui sont le plus souvent inoffensives contre les ennemis (Lar. 19e).
Dispositif balistique ou explosif, de fabrication artisanale, destiné à perpétrer un attentat. Il rapporta une toute mignonne théière de Chine famille rose qu'il emplit de poudre à canon, et, par le bec, il introduisit délicatement un long morceau d'amadou, l'alluma, et courut reporter cette machine infernale dans l'appartement voisin (MAUPASS., Contes et nouv., t. 2, Mlle Fifi, 1881, p. 158). En décembre 1800, il avait échappé à l'explosion d'une machine infernale, rue Saint-Nicaise (BAINVILLE, Hist. Fr., t. 2, 1924, p. 107).
f) Machine à sous. Appareil de jeu où l'on peut gagner des pièces de monnaie; p. ext., appareil, jeu automatique qui fonctionne après que l'on a introduit des pièces de monnaie. Synon. juke-box, billard électrique, flipper. Lou joua à la machine à sous. (...) elle plaçait une nouvelle pièce dans la fente et posait la main sur le levier. L'œil aux aguets, l'oreille attentive aux chocs des dents sur les butées (...). Elle était décidée, c'était évident, à jouer le plus grand nombre possible de parties (...); c'était peut-être en effet au coup suivant (...), que le spot tomberait dans la sébile, avec sa cascade de pièces (VAILLAND, La Truite, Paris, Gallimard, 1974 [1964], p. 76).
Rem. Machine est empl. pour désigner tous dispositifs complexes même si ceux-ci ne correspondent pas strictement à la définition de machine mais sont plutôt des appareils (ex. machine à laver), des outils (machine à écrire).
2. a) Système complexe transformant une forme de travail en une autre. Machine élévatoire de Marly. Les machines primitives se fondèrent sur l'utilisation d'éléments simples comme le levier, le treuil, la poutre, le palan (BOUV.-IBAR. 1975). Ces procédés [les plans inclinés provisoires pour les opérations de levage des colonnes, des entablements, etc.] (...) furent remplacés par des machines de levage fondées sur les poulies, les moufles et les treuils (GILLE, Hist. des techn., Paris, Gallimard, 1978, p. 306).
b) MÉCANIQUE
Machine simple. Un des éléments auquel toute machine est réductible. Les Anciens utilisaient, outre le levier, ce qu'ils appelaient les machines simples: poulie et treuil qui sont des combinaisons du levier et de la roue, plan incliné, coin et vis (Encyclop. univ. t. 10 1972, s.v. machinisme).
Machine composée. Machine formée de la combinaison d'au moins deux machines simples:
7. La troisième partie [des Mécaniques d'Héron d'Alexandrie] est consacrée à un certain nombre de machines composées. (...) ce sont d'abord les engins de levage: grue à un mât et une poulie, appareil à deux montants et à moufle (...). Viennent ensuite les écrevisses, pour prendre les pierres, et l'ouvrage se termine par les presses, presse à vis, à vis centrale, à vis et à levier, presse à levier et à treuil.
GILLE, Hist. des techn., Paris, Gallimard, 1978, p. 352.
c) Machines(s) de théâtre. Ensemble des moyens mécaniques qui au théâtre permettent d'opérer sur la scène des changements de décors, des transformations à vue, tout ce qui sert à l'illusion du spectacle. Vivre avec eux [les hommes de génie] (...) c'est vouloir prendre plaisir à regarder les machines de l'Opéra, au lieu de rester dans une loge, à y savourer ses brillantes illusions (BALZAC, Mais. chat, 1830, p. 65). On joue du Scribe. Il ne faut aucun génie aux acteurs, aucune culture littéraire dans le public, point de machines, peu de costumes (VEUILLOT, Odeurs de Paris, 1866, p. 131).
Pièce à machines. Pièce à grand spectacle nécessitant des décors installés et transformés au moyen de machines de théâtre. Comédie, tragédie à machines. (Dict. XIXe et XXe s.).
3. Fam. Véhicule comportant un mécanisme exerçant une traction mécanique. Machine volante; enfourcher une machine. Il tira sa carte (...), le paysan ne savait pas la lire. — C'est pas mon ouvrage. Mais tu me prends dans ta machine [un avion] et je te montre (MALRAUX, Espoir, 1937, p. 809). Un des Nord-Africains qui avait une moto (...) proposa de m'emmener à la ville voisine: j'acceptai. Je grimpe donc sur sa machine et en route. C'est épatant vous savez la moto (QUENEAU, Loin Rueil, 1944, p. 215). Je connais assez mal les choses de l'automobile et, pourtant, chaque fois que je vois un homme installé au volant de sa machine, il me semble que je découvre tout ce qu'il y a de plus secret dans les profondeurs de sa nature (DUHAMEL, Passion J. Pasquier, 1945, p.117).
CHEMIN DE FER. Synon. de locomotive. Machine locomotive; machine diesel, électrique, à vapeur; machine à marchandises, à voyageurs; chauffeur, conducteur de machine; faire machine arrière, en arrière. La petite machine, attelée à son wagon, cornait pour écarter les obstacles, crachait sa vapeur, haletait comme une personne essoufflée qui court; et ses pistons faisaient un bruit précipité de jambes de fer en mouvement (MAUPASS., Contes et nouv., t. 1, En fam., 1881, p. 338):
8. C'était une de ces machines d'express, à deux essieux couplés, d'une élégance fine et géante, avec ses grandes roues légères réunies par des bras d'acier, son poitrail large, ses reins allongés et puissants, toute cette logique et toute cette certitude qui font la beauté souveraine des êtres de métal, la précision dans la force.
ZOLA, Bête hum., 1890, p. 114.
Machine haut le pied. V. haut(-)le(-)pied B.
Machine-tender. Locomotive munie d'un chariot d'approvisionnement. Quels soins (...) pour apprendre aux jeunes gens à distinguer la machine d'express à deux grandes roues couplées de la petite machine-tender aux trois roues basses (A. FRANCE, Vie littér., 1891, p. 323). Les machines destinées à faire des manoeuvres dans les gares ou à remorquer des trains de banlieue (...) sont habituellement des machines-tender, c'est-à-dire qu'elles portent sur elles leur provision d'eau et de charbon (BRICKA, Cours ch. de fer, t. 2, 1894, p. 46).
4. Dispositif assurant la propulsion d'un navire. Chambre, salle des machines; stopper les machines:
9. Le Duncan venait en travers à la lame et ne gouvernait plus. «(...) — À la machine ! à la machine !» cria la voix de l'ingénieur. John se précipita vers la machine et s'affala par l'échelle. Une nuée de vapeur remplissait la chambre; les pistons étaient immobiles dans les cylindres; les bielles n'imprimaient aucun mouvement à l'arbre de couche.
VERNE, Enf. cap. Grant, t. 2, 1868, p. 54.
Faire machine arrière (sens propre et fig.). V. arrière1 II B ex. 18 et 21.
B.Loc. adv. À la machine. Anton. de à la main. Triage à la machine. Recouds-moi ça, dit Anthime. — Travail à la machine: ça ne vaut rien, murmura-t-elle (GIDE, Caves, 1914, p. 686). L'esprit conservateur [des Britanniques] n'accueillait le champagne que sous l'ancien bouchage à la ficelle. Il serrait mieux et ne rouillait pas. On le complétait à la machine par un muselet de trois brins de fil de fer étamé (HAMP, Champagne, 1909, p. 174). Hier, je disais (...) mon horreur du monde moderne, en particulier de tout ce qui est fait à la machine, de tout ce qui ne porte pas la trace de la main humaine (GREEN, Journal, 1942, p. 235). Supra I A 1 d ex. de BLOY, Journal, 1904, p. 244.
C. — Gén. au sing., collectif. Machinisme en tant que phénomène social économique. Règne de la machine; siècle, civilisation de la machine; homme maître, esclave de la machine. Ce n'est plus l'homme qui fait marcher la machine, c'est la machine qui fait marcher l'homme (MICHELET, Journal, 1834, p. 126). Jamais les machines ne remplaceront l'homme d'une manière absolue; grâce au ciel, car ce serait la fin du monde (SAND, Hist. vie, t. 3, 1855, p. 432). Il pense mais il est l'esclave des machines Les trains dictent leurs lois à l'homme dans l'horaire L'homme n'était plus rien c'est pourquoi nous fuyons Pour retrouver un peu de liberté humaine (APOLL., Coul. temps, 1918, II, 1, p. 936).
II. — [Désigne des pers.]
A. — 1. a) Être vivant, tout ou partie de l'être humain considéré comme une combinaison complexe d'organes et dont chaque fonction est mécanique. Cette série de décompositions et de rétablissemens amène, à la longue, la cessation de tout mouvement dans la machine animale, la mort de l'individu (CUVIER, Anat. comp., t. 5, 1805, p. 1). Phérécyde enseignait (...) que les animaux n'étaient que des machines. En restreignant cette expression de machines pour les animaux à la sensation et à l'instinct sans connaissance (P. LEROUX, De l'Humanité, t. 2, 1840, p. 425). La régularité reposante de cette vie domestique, le régime de nourriture (...), restauraient son robuste tempérament. La santé physique était rétablie; mais la machine morale était toujours malade (ROLLAND, J.-Chr., Buisson ard., 1911, p. 1348).
HIST. DE LA PHILOS. Théorie des animaux-machines. ,,Théorie de Descartes et des cartésiens d'après laquelle les animaux sont entièrement assimilables à des machines et n'éprouvent aucune sensation ni aucun état affectif`` (LAL. 1968). Au XVIIe, le nom de Descartes fait songer bien des gens à «l'animal-machine» (...). Le siècle suivant n'hésite pas à mettre en circulation et à la portée de tous une conception d'homme-machine (VALÉRY, Variété V, 1944, p. 242).
b) Organisme humain. Machine corporelle, humaine, physique. La nuit a été très agitée; j'ai eu des quintes de toux, des paroxysmes nerveux; ma pauvre machine se détraque si aisément (MAINE DE BIRAN, Journal, 1817, p. 34). M. Guizot est (...) très réellement malade (...). Il y a affaiblissement effrayant de toute la machine (MÉRIMÉE, Lettres Ctesse de Montijo, t. 1, 1845, p. 130).
2. Personne sans caractère, qui agit mécaniquement; personne soumise à l'influence d'autrui et qui ne semble pas capable de réflexions personnelles. La femme orientale est une machine, et rien de plus; elle ne fait aucune différence entre un homme et un autre homme. Fumer, aller au bain, se peindre les paupières et boire du café, tel est le cercle d'occupations où tourne son existence (FLAUB., Corresp., 1853, p. 135). Il perdait le goût de vivre et du même coup celui d'écrire, il se transformait en machine. Pendant quatre ans il avait été une machine, maintenant il tenait avant tout à redevenir un homme (BEAUVOIR, Mandarins, 1954, p. 14):
10. On introduit dans l'administration ce despotisme sauvage qui déplace les hommes, sans égard à leur position, afin de briser les volontés, et de n'avoir partout que des machines.
CHATEAUBR., Mél. pol., 1816-24, p. 312.
[P. méton.], en emploi adj. apposé. Ils veulent un roi absolu (...), une noblesse de cour, fondée sur la généalogie (...), un peuple ignorant et sans aucun droit, une armée purement machine (STAËL, Consid. Révol. fr., t. 2, 1817, p. 165).
3. Fréq. péj. Personne considérée comme ayant pour fonction essentielle d'effectuer, de produire quelque chose. Machine à penser. Ce qui fait la vertu des campagnards, c'est que leurs femmes sont des machines à enfantement et à allaitement, comme ils sont, eux, des machines à labourage (MUSSET, Confess. enf. s., 1836, p. 54). Je ne suis pas la sale fille que vous croyez tous. J'en ai assez d'être une machine à jouir (GREEN, Moïra, 1950, p. 219):
11. Comment vous rendre tout ce que vous ont pris de pureté et de joie tous ces hommes de ma classe, ces riches effrayants qui ont osé faire de vous leur machine à plaisir.
LARBAUD, Barnabooth, 1913, p. 66.
♦[P. méton.] Le sexe des héros, dans les romans distingués, n'était plus qu'une machine à passion (ZOLA, Dr Pascal, 1893, p.219). Son esprit se désengourdissait. Lentement, la machine à raisonner s'était mise en branle et elle ne s'arrêtait plus (MAURIAC, Noeud vip., 1932, p.206).
Machine à habiter. Immeuble d'habitation conçu plus dans un but de rentabilité que de bien-être. Le George-V n'a rien de la machine à habiter, selon le mot qui fut probablement inventé par de vieilles dames mal adaptées à une époque de machines précises et d'habitations enfin confortables (FARGUE, Piéton Paris, 1939, p. 215).
Loc. adv., littér. Par machine. Par automatisme, de façon mécanique. Je me rends compte (...) que je m'éreintais à de petites besognes qui nous ligotent et qui nous mangent, que je me remuais pour bien des choses. Je m'y obstinais par machine (COCTEAU, Diff. d'être, 1947, p. 176).
B. — 1. a) [En parlant d'une organisation, d'un appareil d'État, de services chargés d'assurer des fonctions dans le domaine publ.] Ensemble qui fonctionne avec la même régularité automatique qu'une machine et qui en a le caractère inhumain. Machine administrative, démocratique, financière, ministérielle, sociale; machine de l'État. Un espion, à quelque étage qu'il soit dans la machine de la police, ne peut pas plus qu'un forçat revenir à une profession dite honnête ou libérale (BALZAC, Splend. et mis., 1844, p. 140). Il se vit arrêté, interrogé, pris par la machine inexplicable de la justice militaire et de procès dont il ne sortirait jamais (NIZAN, Conspir., 1938, p. 90). Il [le percepteur] aurait voulu faire état de ses propres angoisses de contribuable, communier avec ces gens hostiles dans un sentiment de révolte, tout au moins d'inquiétude, à l'égard de la machine fiscale (AYMÉ, Passe-mur., 1943, p. 172).
b) P. ext. Tout système ayant une organisation stricte et des règles. N'étaient priées à déjeuner que les personnes envers lesquelles ils n'avaient pas de devoirs (...). Ces invitations à déjeuner étaient donc à la fois une preuve d'amitié et d'un peu de dédain. Mais François ignorait les rouages complexes de cette machine mondaine (RADIGUET, Bal, 1923, p. 52).
2. Vx ou littér. La machine ronde. La terre. Quand ils [les rois] meurent la terre est folle de douleur; Celui-ci fut un dieu sur la machine ronde (HUGO, Âne, 1880, p. 346).
C. — 1. Vx. Grand ouvrage de génie. La Tragédie d'Héraclius est une belle machine (Ac. 1798-1878). L'Église de Saint Pierre de Rome est une étonnante machine (Ac. 1798-1878).
2. Toute composition artistique. Beaucoup d'autres, sans doute, ont fait de grandes machines; mais ceux-là que j'ai nommés [Rubens, Véronèse, Delacroix, etc.] les ont faites de la manière la plus propre à laisser une trace éternelle dans la mémoire humaine (BAUDEL., Curios. esthét., 1863, p. 298). Il venait de réciter dans un salon une petite machine en vers, qui l'avait fait couvrir d'applaudissements (GONCOURT, Journal, 1885, p. 507).
D. — Personne, chose que l'on ne peut ou ne veut pas nommer précisément. Synon. machin, chose, truc. Tu recevras (...) cette machine d'acier pour faire bouffer les jupes de tes robes (ABOUT, Roi mont., 1857, p. 84). Est-ce que je suis faite pour cette machine [le mariage]? (...) je ne serais plus Nana, si je me collais un homme sur le dos... et, d'ailleurs, c'est trop sale... (ZOLA, Nana, 1880, p. 1457).
III. A. — Procédé ingénieux généralement peu scrupuleux, qui suppose la ruse; machination. Le grand Cointet avait (...) bâti sur cette dette une formidable machine dirigée, comme on va le voir, contre le patient et pauvre inventeur (BALZAC, Illus. perdues, 1843, p. 580):
12. ... Chandelier prévint Léon que le petit pourrait de nouveau lui porter son manger. L'aubergiste l'avait prétendu indisponible pour dégoûter M. de Coantré de la maison du garde, et le pousser à prendre pension chez lui. Sa machine ayant échoué, il regrettait maintenant le manque à gagner que lui causaient les repas pris par Léon à domicile. Léon flaira bien la machine. Il eût voulu refuser (...). Mais il craignit la rancune de Chandelier.
MONTHERL., Célibataires, 1934, p. 886.
B. — [Dans une oeuvre littér.] Ensemble des procédés mis en oeuvre pour atteindre un but. L'oeuvre de grâce est un peu crûment traduite et comme passée à l'état d'appareil dramatique: la machine se voit trop. Pourtant l'effet est produit (SAINTE-BEUVE, Port-Royal, t. 1, 1840, p. 167).
REM. Machiniser, verbe trans., au fig., rare. [Le compl. désigne une pers.] Transformer en machine, réduire à l'état de machine. Une vie sans opposition, dénuée de spontanéité et qui pour tout dire vous machinise (BALZAC, Lys, 1836, p. 231).
Prononc. et Orth.:[]. Att. ds Ac. dep. 1694. Étymol. et Hist. A. 1. 1377 machine corporelle «ensemble d'éléments ayant la complexité d'une machine» (ORESME, Livre du ciel et du monde, éd. A. D. Menut, p. 520, 55); 2. 1637 machine «combinaison d'organes (du corps d'un être animé)» (DESCARTES, Discours de la méthode, 5e partie ds Œuvres philos., éd. F. Alquié, t. 1, p. 628); 3. 1658 «ce qui en l'homme procède d'un automatisme et non de la réflexion» (PASCAL, Pensées, éd. L. Lafuma, section I, Ordre, 5-247); 4. 1566 fig. «oeuvre de grande dimension» (A. DE RIVAUDEAU, Aman, vers 498, 74 ds QUEM. DDL t. 10). B. Techn. 1. 1559 «ensemble de mécanismes combinés de manière à produire certains effets» (AMYOT, Vies Demetrius, 25 ds GDF. Compl.); 1671 au propre machine de guerre (POMEY); 1664 théâtre (MOLIÈRE, Princesse d'Élide, Intermède 6); 1690 machines hydrauliques (FUR.); 1704 machine infernale «bâtiment chargé de poudre, utilisé dans les combats navals» (Trév.); 1801 «dispositif meurtrier pour perpétrer un attentat» (Procès des prévenus de conspiration contre la personne du Premier Consul, t. 1, 36); 1899 machine «machine à écrire» (Mercure de France, n° 114, juin, in fine, Annonce ds QUEM. DDL t. 15); 1903 machine à écrire (HUYSMANS, Oblat, t. 2, p. 57); machine à + inf. désigne l'utilisation de l'instrument: 1801 machine à carder (CRÈVECOEUR, Voyage, t. 1, p. 174); 2. 1770 machine à feu «appareil locomoteur dont la source d'énergie est la vapeur» (BACHAUMONT, Mémoires secrètes, 20. X., 447 ds WEXLER, p. 97 et note 7); puis 1818 machine à vapeur (GALLOIS, Rapport ds Annales des mines 3, 132, ibid., p. 101 et note 30); 1867 faire machine en arrière «faire marcher un train en arrière» (LITTRÉ); 1890 faire machine arrière «id.» (ZOLA, Bête hum., p. 151); 1920 fig. faire machine en arrière (PROUST, Guermantes 1, p. 306); 3. 1867 machine-outil (LITTRÉ); 4. 1654 fig. «ce qui fait progresser l'action dans une pièce de théâtre» (LA FONTAINE, L'Eunuque, Avertissement au lecteur, éd. H. Régnier, t. 7, p. 5); 1656 «ensemble de moyens combinés pour donner une certaine direction aux affaires» (PASCAL, Provinciales, éd. L. Lafuma, 3, p. 382a). C. 1639 «intrigue, procédé ingénieux» (MAIRET, Le Grand et dernier Solyman, III, 3). D. 1807 machine pour désigner quelqu'un ou quelque chose dont le nom échappe, v.machin. Empr. au lat. machina «invention, machination» et au sens concr. (qu'il aurait plutôt fixé en raison de l'existence de dolus «ruse, adresse») de «machine, engin» spécialisé dans les lang. techn. «machine de guerre», «machine à soulever ou remuer des objets pesants», cf. ERN.-MEILLET, également attesté au sens de «structure de l'univers» et «ouvrage composé avec art»; empr. anc. au gr. , forme dorienne de «moyen (en général)» d'où le sens matériel «machine» notamment «machine de guerre» «machinerie de théâtre» mais aussi toute espèce de combinaison, d'invention, parfois pris en mauvaise part, le mot se superposant quelquefois au champ sém. de «tout objet servant à tromper», d'où «ruse, artifice», v. CHANTRAINE. Fréq. abs. littér.:4373. Fréq. rel. littér.:XIXe s.: a) 4280, b) 5858; XXe s.: a) 7364, b) 7377. Bbg. BASTUJI (J.). Aspects de la néol. sém. Langages. Paris. 1974, t. 8, n° 36, p. 14. — ELVERD (R.). Note sur appareil, engin et machine en fr. Cah. Lexicol. 1973, n° 22, pp. 59-67. — GOHIN 1903, p. 233. — MACK. t. 1 1939, p. 106, 127, 172, 182, 192. — QUEM. DDL t. 1, 2, 9, 10, 11. — WEXLER 1955, p. 101, 102, 106, 107.

machine [maʃin] n. f.
ÉTYM. V. 1361; du lat. machina « invention, engin ».
———
I (1629). Vx. Ruse. Machination (→ Aide, cit. 11; fertilité, cit. 4). || « Les machines du démon » (Bossuet).(1668). Procédé ingénieux. || Machines forgées (cit. 4) par Scapin.
1 Ce bloc enfariné ne me dit rien qui vaille (…)
Je soupçonne dessous encor quelque machine.
La Fontaine, Fables, III, 18.
2 (…) j'ai donné dans mille embûches sans jamais en apercevoir aucune (…) Dès lors, je me suis dégoûté des hommes; et ma volonté, concourant avec la leur à cet égard, me tient encore plus éloigné d'eux que ne font toutes leurs machines.
Rousseau, les Rêveries…, 6e promenade.
———
II (1559). Mod. Objet fabriqué, généralement complexe ( Mécanisme), destiné à transformer l'énergie ( Moteur) et à utiliser cette transformation.Au sens large. Tout système où existe une correspondance spécifique entre une énergie ou une information d'entrée et celles de sortie. || La machine à laver est un appareil électrique, la machine à écrire un outil, et la machine à calculer une véritable machine. Appareil, dispositif, engin (cit. 6), instrument, outil.
3 On peut définir la machine comme une construction artificielle, œuvre de l'homme, dont une fonction essentielle dépend de mécanismes (…) Le mécanisme règle et transforme un mouvement dont l'impulsion lui est communiquée (…) Une machine, au sens déjà défini, ne se suffit pas à elle-même, puisqu'elle doit recevoir d'ailleurs un mouvement qu'elle transforme. On ne se la représente en mouvement, par conséquent, que dans son association avec une source d'énergie.
G. Canguilhem, la Connaissance de la vie, p. 126-127.
4 (…) qu'est-ce que la machine ? On peut, on doit, séparer nettement la machine de l'outil. Il ne semble pas, cependant, que cette discrimination fondamentale soit admise aujourd'hui. On parle couramment de machine à écrire, de machine à calculer, alors qu'il y a entre ces deux appareils une différence essentielle : la première est un outil, la seconde une véritable machine.
Daniel-Rops, le Monde sans âme, p. 67.
5 Dans la machine, à la différence de l'outil, la force motrice n'est pas fournie par l'homme, mais par le milieu extérieur : les animaux, l'eau, le vent, le gaz, l'électricité, voire la marée. Si bien que l'homme n'intervient que pour diriger, régulariser, canaliser une force dont l'origine est en dehors de lui. La distinction de l'outil et de la machine est donc extrêmement nette en théorie. Dans la pratique, il en est différemment, comme le prouve l'existence d'une catégorie intermédiaire : les machines-outils. Mais la machine-outil est en réalité une forme perfectionnée et récente du machinisme.
Pirou et Byé, Traité d'économie politique, t. I, p. 31.
A (Emplois généraux).
1 Effet, force, puissance, rendement d'une machine. || Quantité de travail fournie par une machine. || Machine génératrice, réceptrice. || Machine à mécanisme intérieur. Automate (cit. 2). || Machine automatique. || Appliquer (cit. 7) aux machines une découverte mathématique. || La construction des machines, l'une des applications de la science pure. Technique.
tableau Noms d'appareils.
Construction des machines. || Ingénieur qui fait les plans d'une machine, invente une nouvelle machine (→ Effort, cit. 6; législateur, cit. 2). || Les caractéristiques d'une machine. || Organes d'une machine. Commande, mécanisme, moteur, transmission. || Bâti d'une machine. Bâti, châssis, charpente. || Pièces et dispositifs d'une machine. Arbre, axe, balancier, barre, bielle, bouton, bras, butée, came, cardan, carter, chaîne, chaise, chariot, chemise, clapet, collier, courroie, coussinet, crémaillère, cuissard, culasse (cit. 2), cylindre, engrenage, engreneuse, frein, galet, glissière, hélice, manette, manivelle, palier, papillon, pignon, piston, plateau, ressort, robinet, rouage, roue, semelle, soupape, tambour, tige, tourillon, tringle, tube, turbine, tuyau, tuyère, va-et-vient, valve, volant…
6 Par quelle descente aux abîmes ai-je atteint les machines ? (…) Confusément je les revois (…) Lisses et pleins, des corps d'acier, où quelquefois glissait une veine de cuivre; cylindres qui luisaient aux culasses énormes; bielles géantes qui plongeaient dans des trous noirs.
H. Bosco, Un rameau de la nuit, p. 63.
Assemblage, montage d'une machine. Bague, boulon (cit. 2), clavette, clou, écrou, goujon, goupille, joint, rivet, tenon, vis… || Ouvrier qui monte une machine. Ajusteur, monteur. || Mettre une machine en marche. || Machine qui marche, tourne, fonctionne (→ Entraîner, cit. 1). || Entretien, réglage des machines. || Graissage des articulations (cit. 3), des rouages d'une machine. Huile. || Machine en bon état. || Machine déréglée, détraquée, désajustée, disloquée… || Machine en panne. || Réparation d'une machine par un mécanicien.Ouvrier blessé par une machine (accident du travail).
(Avec un adj. caractérisant l'énergie de fonctionnement). || Machine hydraulique. || Machine pneumatique, à air comprimé. || Machine électrique (→ Chimiste, cit. 2). || Machine dynamo-électrique ( Dynamo), magnéto-électrique ( Magnéto). || Machine électronique (→ ci-dessous B., 3.).
(Avec un compl. caractérisant la finalité). || Machine à…, pour… (et inf.). || Machine pour, à sténotyper, calculer, photocopier.Machine de bureau. || Machines d'imprimerie.
REM. Machine à… (et inf.), est plus courant et sert à former de véritables mots composés (voir plus loin).
2 (1794; trad. de l'angl. steam engine; a remplacé machine à feu, pompe à feu). || Machine à vapeur : machine qui utilise l'expansion de la vapeur d'eau pour produire la force motrice. || Machines à vapeur fixes (pompes, compresseurs, chaudières… à vapeur), mobiles. Locomobile (→ ci-dessous D., spécialt), locomotive. || Pièces et dispositifs propres à la machine à vapeur. Balancier, chaudière, condenseur, lumière (d'échappement), presse-étoupe, réchauffeur, régulateur, surchauffeur, tiroir, etc. || Machine à vapeur à simple, à double effet. || Machine à vapeur à plusieurs cylindres ( Compound). || L'invention de la machine à vapeur a donné naissance à la grande industrie.
7 La machine n'a donné tout son rendement que du jour où l'on a su mettre à son service, par un simple déclenchement, des énergies potentielles emmagasinées pendant des millions d'années, empruntées au soleil, déposées dans la houille, le pétrole, etc. Mais ce jour fut celui de l'invention de la machine à vapeur (…)
H. Bergson, les Deux Sources de la morale et de la religion, p. 325.
8 Il faut attendre la fin du XVIIIe siècle pour voir apparaître les premières applications de moteurs thermiques basés sur l'emploi de la force expansive de la vapeur d'eau, remarquée à la fin du XVIIe siècle par Denis Papin. À partir du XIXe siècle, la machine à vapeur se développe rapidement, d'abord sous forme alternative, puis plus tard sous forme rotative (turbine); elle révolutionne la locomotion terrestre par l'invention des locomotives, la navigation maritime par celle des machines marines et fait naître la grande industrie.
Georges Lehr, les Moteurs, p. 5.
Par métaphore :
8.1 (…) elles (les Halles) apparurent comme une machine moderne, hors de toute mesure, quelque machine à vapeur, quelque chaudière destinée à la digestion d'un peuple, gigantesque ventre de métal, boulonné, rivé, fait de bois, de verre et de fonte, d'une élégance et d'une puissance de moteur mécanique, fonctionnant là, avec la chaleur du chauffage, l'étourdissement, le branle furieux des roues.
Zola, le Ventre de Paris, t. I, p. 40.
3 Loc. Machine à sous : appareil où l'on mise et où l'on peut gagner des pièces de monnaie ( Sou).Abusivt. Appareil ou jeu automatique qui fonctionne en y glissant une pièce de monnaie (→ Juke-box, billard électrique). Appareil (à sous).
8.2 La jeunesse du pays, avant de reprendre le travail, est alors groupée autour de la machine à sous ou bien joue au billard.
Robert Pinget, Graal flibuste, p. 35.
B Spécialt.
1 Mécan. Système de corps transformant un travail en un autre.
(1684). || Machines simples : levier, plan incliné, poulie, treuil, vis.
(1690). || Machines composées : machines complexes faites de plusieurs machines simples. || Le rouet, l'horloge sont des machines composées. || Machines couplées, conjuguées.
2 Machines de laboratoire. || Machine d'Atwood, pour étudier la chute des corps. || Machine pneumatique. Trompe. || Machine de Gramme. Dynamo. || Machine d'induction. Bobine. || Frottoirs et plateau d'une machine électrostatique.
9 (…) Marguerite monta au laboratoire (…) Ses yeux horriblement fixes ne quittèrent pas une machine pneumatique. Le récipient de cette machine était coiffé d'une lentille formée par de doubles verres convexes dont l'intérieur était plein d'alcool et qui réunissait les rayons du soleil (…) Le récipient, dont le plateau était isolé, communiquait avec les fils d'une immense pile de Volta.
Balzac, la Recherche de l'absolu, Pl., t. IX, p. 597.
3 Dispositif complexe, en général électronique (→ Cybernétique, cit. 1), capable d'acheminer, de stocker, de transmettre des informations. || Machines à signaux, effectuant des opérations logiques (calcul, etc.) et acheminant des informations. || Machine arithmétique (vx). || Machines statistiques. || Machines comptables à cartes perforées. || Machines mécanographiques ( Mécanographie), électroniques ( Ordinateur).Machine à traduire.
REM. L'emploi du mot machine, pour désigner l'ordinateur, est contrarié par les connotations mécaniques du terme. Il est néanmoins courant, notamment en apposition : langage machine, instruction machine.
(V. 1937). Math., log. || Machine de Turing : machine fictive, décrivant symboliquement un programme d'opérations à effectuer sur des données. Automate. || « Base de la théorie des automates, (les machines de Turing) préfigurent l'étude de la structure logique des ordinateurs en formalisant la notion d'algorithme » (Bouvier et George).
(1879). Vx. || Machine parlante : appareil reproducteur de son (phonographe, etc.).
4 Machine à (et inf. caractérisant le travail fourni) : appareil qui effectue (tel travail).
a (Machines de bureau). || Machine à calculer. Calculer. || Machine à calculer portative, de poche. Calculette.Machine à compter (vx et attesté seulement par quelques emplois isolés).
10 (…) une machine à compter formera total, produit, quotient, bien mieux que le comptable, et sans former aucun nombre véritable, ajoutant et retranchant un et encore un par l'effet d'une roue dentée, d'un doigt de fer, d'un butoir, d'une vis.
Alain, Propos, 5 sept. 1927, Algèbre.
(1857, in Année sc. et industr. 1858, p. 417). || Machine à écrire, et, absolt (1899), machine. Dactylotype (vx). || Clavier, touches, chariot, rouleau, tabulateur, ruban d'une machine à écrire. || Secrétaire qui tape une lettre à la machine. Dactylo(graphe), dactylographie. || Faute de frappe dans un texte écrit à la machine. || Copie obtenue à la machine à l'aide de papier carbone, de stencil ( aussi Duplicateur). || Manuscrit tapé à la machine. Tapuscrit.
11 (…) quelques brèves notes (…) qu'elle tapait ensuite, à l'aide d'une vieille machine à écrire.
Martin du Gard, les Thibault, t. V, p. 28.
Machine à dicter. || Dactylo audiotypiste utilisant une machine à dicter.
b (Appareils domestiques). Appareil. || Machine à laver (le linge). Lave-linge. Absolt. || Linge lavable en machine. Par métonymie, fam. || Faire une machine, une lessive à la machine. || Une machine de blanc.Machine à laver la vaisselle ( Lave-vaisselle), à éplucher les légumes. || Machine à repasser.(1860). || Machine à coudre. Coudre.(1889). || Machine à tricoter.
12 On entendait ronronner la machine à coudre (…)
G. Duhamel, Salavin, I, XIX.
12.1 Les fonctions générales d'une machine à coudre peuvent se définir par trois mouvements : le premier est le mouvement par lequel l'aiguille plonge dans l'étoffe, en entraînant le fil pour fermer la boucle à travers laquelle viendra passer la navette; le deuxième est le mouvement qui fait passer la navette ou un crochet circulaire dans la boucle fermée par le fil de l'aiguille; le troisième est le mouvement de translation de l'étoffe après chaque point fait, et qui varie par conséquent suivant la longueur du point.
G. Leroux, Rouletabille chez Krupp, p. 120.
12.2 Alonso entendait la machine à laver la vaisselle, en bas, passer par les différentes phases de son programme, avec des pauses et des déclics.
J.-P. Manchette, Trois hommes à abattre, p. 17.
5 (Dans l'industrie, les métiers). || Machines agricoles, utilisées dans l'agriculture.
13 (…) tout le travail fait par les machines, charrues doubles armées de disques tranchants, semoirs et sarcloirs, moissonneuses-lieuses, batteuses locomobiles avec élévateur de paille et ensacheur; des paysans qui sont des mécaniciens, un peloton d'ouvriers suivant à cheval chaque machine, toujours prêts à descendre serrer un écrou, changer un boulon, forger une pièce (…)
Zola, la Terre, V, IV.
6 (Machines utilisées dans l'industrie). || Les machines d'une usine, d'un atelier. || Les machines sont à la base de l'équipement industriel (→ Envahir, cit. 6). || Machines élévatrices (cit. 1), machines et appareils de levage. Levage.
Machine à… (et inf.). || Machine à affûter, à carder, à cintrer, à décolleter, à filer, à fileter, à forer, à fraiser, à plier, à raboter, à rectifier, à river, à tailler, à tarauder, à tisser, à tricoter…
14 (…) le dimanche, le contremaître l'emmenait visiter l'usine en détail, lui expliquait le jeu de toutes ces puissantes machines, dont les noms étaient aussi barbares, aussi compliqués que leur physionomie : « Machine à aléser des trous de bouton pour manivelles ». « Machines à creuser des mortaises dans des têtes de bielle. »
Alphonse Daudet, Jack, II, III.
REM. 1. Ce procédé de désignation est en concurrence avec la dérivation en -euse ou -eur sur le radical verbal (voir de nombreux ex. dans le tableau page suivante).
2. Une partie de ces syntagmes désignent des machines-outils.
3. Machine, employé sans qualification, désigne, dans un contexte donné, la machine dont s'occupe un ouvrier, un technicien. L'ingénieur, le conducteur et sa machine.fam. Bécane.
(1857). || Machine-outil : machine dont l'effort final s'exerce sur un outil transformant la matière, à chaud ou à froid (→ ci-dessus, cit. 5). || Soumettre à l'action d'une machine-outil. Usiner; usinage. || Machines-outils déformant la matière par choc, compression, étirage; désagrégeant la matière par enlèvement, cisaillement, usure… || Déplacement de la machine-outil vers la partie à travailler. Avance. || Amenage de la matière à la machine-outil.
14.1 C'est la remarquable diffusion qu'ont prise partout aujourd'hui les machines-outils, c'est-à-dire les machines servant à fabriquer automatiquement tout ce qui a été jusqu'ici l'œuvre exclusive de la main de l'homme.
L. Figuier, Année scientifique et industrielle 1879, p. 449 (1878).
15 Edmond a entendu parler de machines-outils, dont on se sert déjà, paraît-il, en Amérique, et qui se chargent elles-mêmes de la plupart des opérations qui demandent tant de réflexions à un tourneur d'ici, et tant d'expérience de son métier.
J. Romains, les Hommes de bonne volonté, t. IX, p. 34-35.
|| Machine-transfert : ensemble de machines-outils coordonnées par un système de transmission. || Des machines-transfert(s). Transfert.
15.1 Ces machines tours, fraiseuses de reproduction sont aujourd'hui remplacées par des machines-outils à commande numérique. Grâce à l'alimentation automatique de ces machines, on peut les placer à la suite les unes des autres et obtenir ainsi une fabrication continue : ce sont les machines transfert qui ont fait leur apparition à la fin de la dernière guerre (…)
B. Gille, Histoire des techniques, Encycl. Pl., p. 927-928.
tableau Noms de machines.
C (1874). Plur. || Les machines : l'appareil propulsif d'un navire. || La salle, la chambre des machines. Machinerie. || Chauffer les machines. Chauffeur. || Stopper les machines (déb. XXe).
16 Une dernière échelle, descendue à tâtons, les conduisit dans la chambre aux machines, véritable étuve qu'une chaleur mouillée et lourde, mêlée à une forte odeur d'huile, emplissait d'une atmosphère insupportable (…) Les mécaniciens, les aides, (…) allaient, venaient, passaient une revue générale de la machine, s'assurant si toutes les pièces étaient exactes et libres dans leur jeu.
Alphonse Daudet, Jack, II, VIII.
REM. Le sing., rare dans ce sens en emploi autonome (la machine), est fréquent dans la loc. faire machine arrière. Voir ci-après.
Loc. (1867). Faire machine en arrière (rare), faire machine arrière (cour.).Au fig. Arrière (cit. 13).
D Spécialt. (1817).
1 Véhicule comportant un mécanisme.Vieilli. || Un cycliste, un motocycliste sur sa machine. Bécane, vélo; moto. || Piéton qui pour traverser la rue se faufile entre vingt machines (→ Encombrement, cit. 3).Les machines volantes, ancêtres des avions.
17 C'est la motocyclette de M. Olivier. — Une machine allemande, extraordinaire, qui ressemble à une petite locomotive étincelante.
Bernanos, Journal d'un curé de campagne, p. 254.
2 Mod. et cour. Locomotive. || Machine à vapeur. || Machine électrique. || Machine diesel. || Le dépôt des machines (→ Froid, cit. 9). || Machine haut-le-pied. Haut (infra cit. 89. → aussi Frein, cit. 12). || Chauffeur, conducteur de machine.
18 (…) hâtez-vous, le convoi s'apprête, déjà la machine chauffe, la vapeur fume, notre voyageur n'a qu'un instant.
Sainte-Beuve, Causeries du lundi, 15 sept. 1851.
Machine-frein : locomotive utilisée dans les essais de mesure de traction pour régulariser la vitesse. || Des machines-freins.
E (1873). Collectivt. || La machine : le machinisme, la mécanisation. || L'homme maître de la machine (→ Instinct, cit. 33), esclave (cit. 24) de la machine. || La machine, source de prospérité ou de chômage. || Le siècle, la civilisation de la machine. Machinisme.Au plur. || Les machines (même sens).
19 On arrive par des machines à résoudre le problème du bon marché que procure à la Chine le bas prix de sa main-d'œuvre.
Balzac, Illusions perdues, Pl., t. IV, p. 560.
20 Pâle ouvrier qu'esquinte la machine.
Verlaine, Sagesse, I, XII.
21 Ces considérations (chômage, emploi de main-d'œuvre féminine, changement dans le caractère du travail) expliquent l'hostilité violente que montrèrent les ouvriers à l'égard des machines. En Angleterre, en 1769, il fallut voter une loi spéciale pour réprimer les émeutes contre les machines et prononcer contre leurs auteurs la peine de mort. L'histoire industrielle de l'Angleterre, dans la première moitié du XIXe siècle, fournit maints exemples de machines jetées à l'eau. En France, les métiers Jacquart furent brûlés sur une place publique à Lyon.
Pirou et Byé, Traité d'économie politique, t. I, p. 43.
F
1 (1690). Anciennt. || Machines de guerre : armes complexes d'attaque ou de défense, au moyen âge. Spécialt. Armes d'artillerie, avant l'utilisation de la poudre à canon (→ Armes de siège). Baliste, bélier, bombarde, catapulte, mangonneau, onagre, perrière, pierrier, sambuque, scorpion, tortue… Absolt. || Machines.Mod. Engin de guerre. Engin.
22 Éphorus a écrit qu'Artémon, ingénieur, inventa les grosses machines pour battre les plus fortes murailles. Périclès s'en servit le premier au siège de Samos, dit Plutarque (Vie de Périclès).
Montesquieu, Grandeur et décadence des Romains, I (p. 127, note 1).
23 Enfin apparurent les échafaudages des hautes machines : carrobalistes, onagres, catapultes et scorpions…
Flaubert, Salammbô, VI.
24 Nous sommes habitués maintenant aux horribles machines de guerre qui sèment la ruine et la mort sur d'immenses territoires.
G. Duhamel, Refuges de la lecture, p. 39.
2 (1704). Anciennt. || Machine infernale : dispositif de guerre exceptionnel combinant des armes et des explosifs, et destiné aux grandes destructions que les armes courantes ne pouvaient causer. || La machine infernale envoyée par les Anglais pour détruire le port de Saint-Malo.Mod. Dispositif meurtrier installé et réglé pour perpétrer un attentat. Bombe. || Machine infernale à retardement.
25 (…) le Consul se rendant à l'Opéra et passant rue Saint-Nicaise, une épouvantable explosion se produisit. C'était une formidable machine infernale qui venait d'éclater, quelques secondes trop tard pour atteindre le but que l'on s'était proposé (…)
Louis Madelin, Histoire du Consulat et de l'Empire, le Consulat, V.
G Dispositif servant à planter les décors, à réaliser certains effets, certaines illusions.Par ext. Décors installés au moyen de machines. Machiniste.(1650). || Une pièce à machines, qui nécessite une mise en scène complexe utilisant de tels dispositifs, de tels décors ( Deus ex machina).
26 (…) il sortit de dessous le théâtre la machine d'un grand arbre chargé de seize faunes (…)
Molière, la Princesse d'Élide, VIe intermède.
27 Vénus descend du ciel dans une grande machine (…)
Molière, Psyché, Prologue.
———
III Fig.
1 (1641). Être vivant considéré comme une combinaison d'organes rappelant une machine et dont les fonctions s'expliqueraient de façon purement mécanique. || La théorie des animaux-machines de Descartes. Animal (cit. 17 et 19). → Âme, cit. 6; bête, cit. 6. || Les machines vivantes (→ Dessein, cit. 16).(1641). Vx. || La machine de l'homme : l'organisme humain (→ Agencer, cit. 3; agent, cit. 2). || « Je suis une machine usée » (→ Breloque, cit. 4). || L'âme (cit. 2) qui donne la vie et le mouvement à toute la machine.
28 Après la lettre « qu'on doit chercher Dieu » faire la lettre « d'ôter les obstacles », qui est le discours de la « machine », de préparer la machine, de chercher par raison.
Pascal, Pensées, 246.
REM. On trouve un commentaire de cette pensée dans la petite édition Brunschvicg, en note : « Tout ce qui ne procède pas en nous de la pensée réfléchie, obéit à un mécanisme nécessaire dont l'origine est le corps, et qui se traduit dans l'âme même par l'imagination et la passion. Pour ôter les obstacles qui viennent du corps, il faut donc plier le corps, fabriquer en nous une nature artificielle qui suive, au lieu de combattre, la direction de la volonté réfléchie. » — Cf. encore dans l'Introduction aux Pensées (Pet. éd. Brunschvicg, t. 1, p. CCLXI) : « C'est la coutume qui plie la machine… », expression que l'on retrouve dans le fragment ci-dessous :
29 La coutume de voir les rois accompagnés de gardes, de tambours, d'officiers, et de toutes les choses qui ploient la machine vers le respect et la terreur (…)
Pascal, V, 308.
30 (…) elle parla d'un mal de tête affreux, et se mit au lit. — Voilà ce que c'est que les femmes, répéta M. de Rénal, il y a toujours quelque chose de dérangé à ces machines compliquées.
Stendhal, le Rouge et le Noir, I, XII.
31 (…) la vie spirituelle s'oppose dans l'homme à la vie corporelle (…) sa machine devient un accessoire; pour penser plus librement, il la sacrifie, il l'enferme dans un cabinet de travail, il la laisse se déjeter ou s'amollir (…)
Taine, Philosophie de l'art, t. II, p. 300.
2 (Mil. XVIIe). Vieilli. Personne qui agit automatiquement ou obéit aveuglément à l'impulsion d'autrui. || Le sot est automate (cit. 4), il est machine. Mécanique; automatisme.
32 Frédéric voulait que ses soldats fussent des machines militaires, aveuglément soumises (…)
Mme de Staël, De l'Allemagne, I, XVI.
33 Une machine, je le répète, une machine sans âme, chauffée à point, réglée pour marcher longtemps et pour abattre beaucoup de besogne. Pitié fraternelle, assistance affectueuse, communion dans la souffrance. Ah ! comme nous étions loin de tout cela. J'opérais, de mieux en mieux et de plus en plus vite, des hommes qui demeuraient, pour moi, des inconnus (…)
G. Duhamel, Récits des temps de guerre, V, « Le dernier ».
Loc. adv. (1673). Vx. || Par machine : d'une façon mécanique. || Vivre par machine.
3 Machine à… : ce qui est considéré comme ayant pour fonction unique ou essentielle de faire, de produire quelque chose. || La machine à penser (→ Atelier, cit. 10; intelligence, cit. 7). Péj. || Il n'est qu'une machine à fabriquer (cit. 9) de l'argent (→ Crabe, cit. 3).
34 Ce sont (ces femmes) des machines à plaisir, des tableaux qui n'ont pas besoin de cadre, des statues qui viennent à vous quand on les appelle et que l'envie vous prend de les considérer de près.
Th. Gautier, Mlle de Maupin, IX.
35 Ma femme, hé ! mon Dieu, ce ne peut être qu'une machine à enfants; mais l'être sublime, la divinité, ce sera toi (…)
Balzac, les Petits Bourgeois, Pl., t. VIII, p. 161.
36 Elle levait un homme, le contentait et lui extrayait son argent avec une puissance magnifique de machine à faire l'amour en série.
P. Mac Orlan, Quai des Brumes, X.
4 (Déb. XVIe). Vx. || La machine ronde : la Terre.
37 En est-il un plus pauvre en la machine ronde ?
La Fontaine, Fables, I, 16.
38 On ne parle que de la guerre… toute l'Europe est en émotion; on voit bien, comme vous dites, que la pauvre machine ronde est abandonnée.
Mme de Sévigné, 259, 23 mars 1672.
(1609). Ensemble complexe dont la marche a la régularité d'une machine. || La grande machine sociale (→ Engrener, cit. 3). || La machine de l'État (cit. 133). || La machine administrative, ministérielle (→ Expérience, cit. 38). || La machine économique. || « La machine politique » (Robespierre, 1793). || Les ressorts de la machine du gouvernement (→ Gouverner, cit. 7).
39 (…) la machine économique, dont la magie propre est justement d'empêcher que l'on voie les rouages. Une banque est impénétrable pour qui n'est point banquier.
Alain, Propos, 21 janv. 1914.
5 (1566, archit.). Vx. Grand ouvrage de l'esprit. || « La tragédie d'Héraclius est une belle machine » (Académie 5e éd., 1798).Mod. Peint. || Une grande machine : une œuvre peinte de grandes dimensions. (Souvent péj.). || Artiste capable de produire de grandes machines (→ Croquis, cit. 1).
6 (1808). Pour désigner ce que l'on ne veut ou que l'on ne peut pas nommer précisément. Ustensile, chose, personne,… || En voilà une machine ! Machin.
DÉR. Machin, machinal, machiner, machinerie (II.), machinique, machinisme, machiniste.

Encyclopédie Universelle. 2012.