joli, ie [ ʒɔli ] adj.
• XIIIe; jolif, jolive 1175; probablt de l'a. scand. jôl, nom d'une grande fête du milieu de l'hiver
1 ♦ Vx Qui est agréable par sa gentillesse, son enjouement. ⇒ aimable. — Coquet, élégant. Subst. « Qu'à son âge il sied mal de faire la jolie » (Molière). — Mod. Faire le joli cœur.
2 ♦ (v. 1400) Mod. Très agréable à voir. ⇒ gracieux, mignon. « Elle-même [la Parisienne] se dit point belle, mais jolie » (Verlaine). Jolie fille. Jolie femme. Jolie comme un cœur : très jolie, charmante. Il est joli garçon. Jolie figure. Avoir de jolis traits, de jolies jambes. Loc. fam. Sois poli, si t'es pas joli ! — Abrév. fam. inv. JOJO [ ʒoʒo ]. Elles sont pas jojo !
♢ Une jolie maison. ⇒ 1. beau, charmant, ravissant. Jolie vue. Joli meuble. Aimer les jolies choses. De jolis mouvements. ⇒ gracieux, harmonieux. Le joli mois de mai. — Très agréable à entendre. Jolie voix. Jolie chanson.
♢ Subst. Le joli et le beau. — Adv. Faire joli. ⇒ 1. bien. Ces tableaux font joli sur ce mur. Ça fait joli.
3 ♦ Fam. Digne de retenir l'attention, qui mérite d'être considéré. Une jolie somme. Un joli magot. De jolis bénéfices. ⇒ considérable, coquet. Les employés de restaurant « se font d'assez jolies journées » (A. Gide). Une jolie performance. Réussir un joli coup. Bravo, joli ! Avoir une jolie situation. ⇒ intéressant. — Loc. C'est bien joli, mais... : ce n'est pas sans intérêt, mais malgré tout... Ce n'est, c'est pas joli joli : c'est condamnable, ce n'est pas bien. « C'est pas joli joli la guerre, ça non » (Perec).
4 ♦ Amusant, plaisant. Selon le joli mot de Voltaire. ⇒ 1. piquant. Le plus joli de l'histoire, c'est que...
5 ♦ Par antiphr. Un joli monsieur, un joli coco : un individu peu recommandable. ⇒ 1. beau, charmant. « quelque joli petit crime conduisant droit en cour d'assises » (Stendhal). Nous voilà dans un joli pétrin. Du joli travail. Impers. C'est joli de dire du mal des absents ! — N. m. C'est du joli ! c'est mal (cf. C'est du beau, du propre !). Ça va faire du joli. ⇒ vilain.
⊗ CONTR. Laid.
● joli nom masculin Familier. C'est du joli !, se dit de ce qu'on déplore ou de ce qu'on réprouve. ● joli (expressions) nom masculin Familier. C'est du joli !, se dit de ce qu'on déplore ou de ce qu'on réprouve. ● joli, jolie adjectif (ancien scandinave jôl, nom d'une fête païenne) Dont la vue procure du plaisir, de l'agrément, qui séduit par sa grâce, son charme : Un joli petit chat. Cette robe est très jolie. Qui procure un sentiment, une sensation agréable par ses qualités (surtout dans les domaines auditifs, intellectuels) : Elle a une jolie voix. Un joli film. Familier. Qui est estimable, mérite qu'on y prête attention, qu'on le remarque : Il a un joli coup de crayon. C'est déjà une jolie somme. Ironique. Marque un côté déplaisant, désagréable de quelque chose ou insiste sur le caractère désagréable de quelque chose : Embarquez-moi tout ce joli monde. ● joli, jolie (citations) adjectif (ancien scandinave jôl, nom d'une fête païenne) Sacha Guitry Saint-Pétersbourg 1885-Paris 1957 Quand on dit d'une femme qu'elle est assez jolie, c'est qu'elle ne l'est justement pas assez. La Fin du monde Solar Victor Hugo Besançon 1802-Paris 1885 Vous n'êtes pas jolie, vous êtes pire. Commentaire Paroles adressées par le poète à Marie Dorval ● joli, jolie (expressions) adjectif (ancien scandinave jôl, nom d'une fête païenne) Familier. Ce n'est pas joli, joli, se dit d'une action condamnable. C'est très joli, mais…, introduit une restriction. Joli à croquer, joli comme un cœur, très joli. ● joli, jolie (synonymes) adjectif (ancien scandinave jôl, nom d'une fête païenne) Dont la vue procure du plaisir, de l'agrément, qui séduit...
Synonymes :
- adorable
- affreux
- charmant
- difforme
- gracieux
- hideux
- horrible
- ingrat
- joliet
- laid
- mignon
- séduisant
Contraires :
- affreux
- difforme
- hideux
- horrible
- ingrat
- laid
Qui procure un sentiment, une sensation agréable par ses qualités...
Synonymes :
- agréable
- délicieux
- doux
- mélodieux
- rêvé
- riant
Contraires :
- criard
- déplaisant
- désagréable
- détestable
- vilain
Familier. Qui est estimable, mérite qu'on y prête attention, qu'on le...
Synonymes :
- beau
- gros
- intéressant
- lucratif
- rémunérateur
- rentable
- rondelet (familier)
Contraires :
- dérisoire
- mauvais
- méchant
- minable
- misérable
- modeste
- modique
- petit
- précaire
Marque un côté déplaisant, désagréable de quelque chose ou insiste sur...
Synonymes :
- drôle de
- fichu (familier)
- piteux
- sale
- vilain
● joli, jolie
nom
Mon joli, ma jolie, exclamations de tendresse à l'adresse de quelqu'un.
● joli, jolie (expressions)
nom
Mon joli, ma jolie, exclamations de tendresse à l'adresse de quelqu'un.
joli, ie
adj. et n. m.
d1./d Qui plaît par ses qualités esthétiques, par son élégance, ses formes harmonieuses. Une jolie femme. Un joli garçon. Une jolie bouche.
— Faire le joli coeur: chercher à plaire, à séduire.
|| Agréable à voir, à entendre. Un joli paysage. De jolis vers.
d2./d Fam. Qui présente des avantages, qui mérite de retenir l'attention. Une jolie situation. Une jolie fortune.
d3./d Plaisant, amusant, piquant. Faire un joli mot d'esprit. Le tour est joli.
d4./d Par antiphrase. Peu recommandable; déplaisant, blâmable. Un joli monsieur! Du joli monde!
|| n. m. C'est du joli!
⇒JOLI, -IE, adj.
I. A. — Vieilli. Agréable pour sa gentillesse, son enjouement, sa prévenance. Synon. aimable; anton. déplaisant. Le comte demeura fort tard dans la soirée, tant il se sentait bien dans cette maison, dans ce joli nouveau ménage (MAUPASS., Bel-Ami, 1885, p. 231).
— Joli cœur. Homme galant auprès des femmes. Et si jamais je te trouve avec ton joli cœur, je ferai quatre morceaux de vous deux (POURRAT, Gaspard, 1922, p. 143).
♦ (Faire le) joli cœur. Il ne voulait pas porter des lunettes pour faire le joli cœur devant les dames (DUHAMEL, Maîtres, 1937, p. 188) :
• 1. ... d'une croisée ouverte s'exhalait le gémissement d'une femme en couches (...) qui sentait avec horreur une vie commencer pendant que le père égoïste faisait le joli cœur dans les balançoires.
ARAGON, Beaux quart., 1936, p. 168.
B. — [En parlant d'une réalité concr.]
1. a) Qui suscite, lorsqu'on le regarde, un agrément ou un plaisir, qui peut n'être que superficiel, par son caractère gracieux et bien fait. Anton. laid, vilain. Un joli jardin, chemin, bourg; une jolie route, ville, campagne; une jolie voiture. Sa maison de campagne est très jolie (Ac. 1935). Un joli spectacle, un joli paysage (Ac. 1835-1935). À ma droite le Rhin et le joli village blanc de Leutersdorf, entrevu parmi les arbres (HUGO, Rhin, 1842, p. 105) :
• 2. « Oh! Cher ami, quel joli pantalon vous avez là; d'où vient-il? » Et Régnier, fort agacé, répondait avec dignité et malice : « De chez le teinturier ».
GIDE, Journal, 1904, p. 140.
— Emploi attribut. C'était joli de voir tomber les fléaux en cadence et les épis qui dansent (E. DE GUÉRIN, Journal, 1840, p. 395). Et tu replieras le linge par-dessus pour que ça fasse joli (RAMUZ, Derborence, 1934, p. 226). — Je suis là, dit la voix, sous le pommier... — Qui es-tu? dit le petit prince. Tu es bien joli... — Je suis un renard, dit le renard (SAINT-EXUP., Pt Prince, 1943, p. 468) :
• 3. « ... Et regarde donc ces petites lumières au bord de l'eau, comme c'est joli, — Qu'est-ce que ça a de joli? » dit Nadine. C'était le genre de questions irritantes qu'elle se plaisait à poser. Il haussa les épaules : « Non, sérieusement, reprit-elle, pourquoi trouves-tu ça joli? — C'est joli, c'est tout ».
BEAUVOIR, Mandarins, 1954, p. 89.
— Poét., en position d'épithète postposée. Pourtant j'aime Kate Et ses yeux jolis (VERLAINE, Œuvres compl., t. 1, Romances sans par., 1874, p. 58). Des petites filles fleuries Jetaient en l'air des fleurs jolies (JAMMES, De l'angélus, 1898, p. 109).
— Emploi subst. masc. sing. à valeur de neutre. La campagne n'est décidément pas belle ici. Trop de joli, et pas assez de caractère (SAND, M. Sylvestre, 1866, p. 148).
b) En partic.
) [En parlant d'une pers.] Dont l'aspect (le physique, la mise) est attirant. Synon. mignon, girond; anton. vilain, laid. Un joli enfant. Elle est plus jolie que belle (Ac. 1878-1935). Elles étaient charmantes, surtout l'aînée, une blondine de dix-huit ans, fraîche comme une fleur, et si fine, si mignonne! vraiment, les jolies Anglaises ont bien l'air de tendres fruits de la mer (MAUPASS., Contes et nouv., t. 1, Épave, 1886, p. 721) :
• 4. — Aux Champs-Elysées, elle était avec une autre femme fort jolie. Quelle est cette femme? — Comment est-elle? — Une blonde, mince portant des anglaises; des yeux bleus, très élégante. — Ah! C'est Olympe; une très jolie fille, en effet.
DUMAS fils, Dame Camélias, 1848, p. 246.
— Emploi attribut. À la sortie du bain, elle s'habillait, s'essuyait fort vite, avec une chasteté charmante, gracieuse. Jamais son corps délicat ne me parut si joli (MICHELET, Journal, 1859, p. 480). — Vous trouvez? Elle est jolie à croquer, dit le général qui ne perdait pas Mme de Cambremer de vue (PROUST, Swann, 1913, p. 337). « Mets cette robe de chambre. Celle qui est blanche, elle t'ira mieux. La nuit est fraîche, tu sais... Tu es joli ainsi », ajouta-t-elle avec un sourire charmant (GRACQ, Beau tén., 1945, p. 188) :
• 5. Elle avait la bouche trop longue et le nez trop pointu pour être jolie, mais le jeune homme jugea qu'elle devait, en tout cas, se trouver belle pour se farder de cette façon.
GREEN, Moïra, 1950, p. 3.
— Poét., en position d'épithète postposée. Mais ces fleurs, pour qui sont-elles? Vous le demandez? Pour qui? N'en dites rien à mon mari, Car c'est pour le berger joli Qui loge ici (CRÉMIEUX, Orphée, 1858, I, 1, p. 5).
— Emploi subst. masc. sing. à valeur de neutre. Que ne puis-je trouver une langue pour expliquer comment ce joli-là (les traits si fins de la comtesse R., à Milan) n'est pas le joli français! Tous deux sont séduisants, mais enfin ils sont deux, et fort heureusement pour nous (STENDHAL, Rome, Naples et Flor., t. 1, 1817, p. 118).
— Syntagmes figés
♦ Jolie femme. Cette petite grosse jolie femme m'avait toujours l'air un petit brin sournoise (BALZAC, Corresp., 1821, p. 99). Madame de Constantin savait qu'un homme qui est à ce régime est peu sensible aux grâces d'une jolie femme (STENDHAL, L. Leuwen, t. 2, 1835, p. 288) :
• 6. C'était Mme Belot, l'ancienne jolie femme, à l'heure présente durcie, racornie, poudrée à blanc, ressemblant à un spectre couvert de frimas.
GONCOURT, Journal, 1892, p. 202.
♦ Jolie fille. Un frisson gonfla sa nudité de jolie fille mince (ZOLA, Terre, 1887, p. 92). Un mouvement de curiosité se produisait autour d'une vieille habituée, qui venait de faire son entrée, accompagnée d'une jolie fille brune, dont l'attitude attentive, quoique sans timidité, laissait supposer qu'elle venait là pour la première fois (MARTIN DU G., Thib., Belle sais., 1923, p. 839).
♦ Joli garçon. Il avait été joli garçon, il l'était encore lorsque ma grand'mère se l'attacha : propret, bien rasé, l'œil vif et le mollet saillant. Enfin, il avait une très-bonne tournure de gouverneur (SAND, Hist. vie, t. 1, 1855, p. 58). Je me rappelai un mot de maman : « Ton frère est trop joli garçon ». Jusqu'ici je ne l'avais pas trouvé du tout trop joli garçon, car j'avais gardé mon regard griffeur de petite fille (DRIEU LA ROCH., Rêv. bourg., 1939, p. 265) :
• 7. Le gardien-chef (...) avait quarante-cinq ans environ (...) et quelque chose de l'inverti dans le mouvement de ses hanches grasses. Un ancien joli garçon.
DRUON, Gdes fam., t. 2, 1948, p. 240.
En partic., vx. Être joli garçon. Être en mauvais état ou en mauvaise posture. Entrée des réservistes (...). Favret : (...) ah! vous voilà jolis garçons! Où allons-nous coucher tout ça? Bernot : Je n'en sais rien. Favret : Ni moi non plus (COURTELINE, Gaîtés Esc., 1886, II, 3, p. 28).
♦ Joli sexe. Joli(e) comme un cœur.
♦ Joli homme (vieilli). Je sus bientôt (...) qu'elle allait dans peu se marier, que son amant demeurait de l'autre côté du lac, qu'il était jeune et joli homme (COURIER, Lettres Fr. et Ital., 1809, p. 803). Monsieur du Châtelet possédait toutes les incapacités exigées par sa place. Bien fait, joli homme, bon danseur, savant joueur de billard (...) il savait et ignorait tout (BALZAC, Illus. perdues, 1837, p. 49) :
• 8. ... il sentait croître sans cesse contre lui l'hostilité de Gasparine. Il ne lui avait rien fait pourtant. Elle le détestait comme joli homme, elle le soupçonnait d'avoir toutes les femmes de la maison...
ZOLA, Pot-Bouille, 1882, p. 276.
) [En parlant d'une partie du corps, de l'expression de qqn] Dont l'apparence séduit. Anton. disgracieux, laid, vilain. Joli bras, cou, sein; jolis ongles; jolie bouche, épaule, figure, jambe, main, taille; faire un joli geste; esquisser un joli sourire. Avoir de jolis yeux (Ac. 1935). Sa petite bouche entrouverte laissant apercevoir de jolies dents blanches (ERCKM.-CHATR., Ami Fritz, 1864, p. 58). Elle a des traits réguliers, de jolis cheveux naturellement blonds, et une belle peau (MIRBEAU, Journal femme ch., 1900, p. 27). Il marchait tous les jours pendant deux heures. Il tenait à conserver sa jolie silhouette élégante (GYP, Souv. pte fille, 1928, p. 61) :
• 9. ... je me représente ma mère ayant conservé son aspect de la terre, ses chères boucles blanches, et les lignes droites de son joli profil, que les années m'abîment peu à peu, mais que j'admire encore.
LOTI, Roman enf., 1890, p. 24.
2. Qui suscite de l'agrément et du plaisir (qui peuvent n'être que superficiels) par ses sonorités. Anton. vilain, discordant. Avoir un joli accent, une jolie prononciation. Mon Dieu! Que tu as une jolie voix! Quand tu me parlais tout à l'heure, c'était une musique (HUGO, N.-D. Paris, 1832, p. 542). Se promener dans la forêt, fredonnant ses refrains, et chantant ses plus jolis airs aux fauvettes et aux rossignols (MUSSET ds Revue des Deux Mondes, 1833, p. 488). La femme est charmante avec son joli rire, sa peau délicate et fraîche (HUYSMANS, Art mod., 1883, p. 56) :
• 10. — Antonia? J'aime beaucoup ce nom. — Oh! ... Pas moi! Je ne le trouve pas joli. On ne choisit pas!... Et vous, comment vous appelez-vous? — Pierre. — Celui-là, c'est un joli nom.
ROMAINS, Hommes bonne vol., 1939, p. 87.
3. P. ext.
a) Qui suscite de l'agrément par certains de ses aspects ou apporte de la satisfaction du point de vue de sa finalité. Synon. gratifiant. Un joli petit déjeuner. J'ai bonne idée de ce livre, qui fera un joli cadeau d'étrennes (LAMART., Corresp., 1836, p. 181). La route est unie, et il fait un joli temps d'hiver clair, frais et piquant, mais non trop froid (GAUTIER, Fracasse, 1863, p. 360). Ce n'avait pas été le moindre des bonheurs de Charles de glisser dans sa bourse de jolis louis tout neufs (GONCOURT, Ch. Demailly, 1860, p. 234). Le gigot (...) cuit dans ce joli court-bouillon qui chante (HUYSMANS, Là-bas, t. 1, 1891, p. 206) :
• 11. Le dîner était joli comme tout le reste, servi d'une façon distinguée, en viandes, poissons, gâteaux, vins.
E. DE GUÉRIN, Lettres, 1838, p. 223.
b) [En parlant d'une réalité qui met en cause une capacité d'exécution physique ou intellectuelle] Qui suscite de l'agrément ou de la satisfaction pour l'esprit par certains de ses aspects ou par la manière dont on le réalise. Faire un joli discours; une jolie aventure; un joli coup (v. billard ex. 1). Je voudrais bien que le joli projet de voyage s'accomplît, et que moi je fusse du voyage (E. DE GUÉRIN, Journal, 1835, p. 90). Certitude d'être aimé, quand même. Je lui contai la jolie histoire de la bayadère amoureuse et du jeune saint bouddhiste (MICHELET, Journal, 1849, p. 46) :
• 12. Il y a là-dedans un joli travail de couteau à palette, et des finesses de dentelles curieusement ouvrées.
HUYSMANS, Art. mod., 1883, p. 32.
— Emploi subst. masc. sing. à valeur de neutre. Naudé y ajoutait ces traits de plume à la Mlle Gournay, même des fleurettes, parfois, à la Camus pour le joli des citations (SAINTE-BEUVE, Portr. littér., t. 2, 1844-64, p. 475).
— Expressions
♦ (Quel) joli débarras! [S'emploie pour marquer son contentement de voir disparaître qqn ou qqc. de la situation] Et si la fièvre typhoïde qui règne maintenant à Rouen pouvait m'emporter, ce serait un joli débarras pour moi (FLAUB., Corresp., 1879, p. 150).
♦ C'est joli. [S'emploie pour marquer qu'on se montre satisfait de qqc. qui a eu lieu] Minuit et demi! Cochon de Médard qui devait être ici à onze heures! Du reste, je m'y attendais; comme je lui ai dit très bien : « Tu me fais rire avec tes onze heures; si tu est rentré à minuit, ce sera encore bien joli! (...) (COURTELINE, Conv. Alceste, Cochon de Médard, 1892, I, p. 59). Votre troisième tête. À trente-sept ans c'est joli (AYMÉ, Tête autres, 1952, p. 26).
♦ C'est bien joli, mais... [S'emploie pour marquer qu'on ne saurait se satisfaire de qqc. ou qu'on ne saurait se résigner à qqc.] C'était bien joli d'avoir des complexes mais il fallait savoir les liquider à temps (SARTRE, Mur, 1939, p. 166).
— En partic. Plein d'esprit, amusant. Synon. piquant, plaisant; anton. plat, stupide. Toulouse-Lautrec. Plus on le voit, et plus il grandit. Il finit par être d'une taille au-dessous de la moyenne. Oh! Le joli mot! Il faut mettre ça quelque part. Il fait tant de jolis mots qu'il ne sait plus où les mettre (RENARD, Journal, 1895, p. 265).
♦ Emploi subst. masc. sing. à valeur de neutre. Le côté piquant (de quelque chose). Le joli de l'affaire est que... (Ac. 1835-1935).
c) En partic. [En parlant d'une réalité régie par ou soumise à des critères sociaux] Qui apporte de la satisfaction et de la considération sur le plan social. Synon. avantageux, confortable, intéressant, rémunérateur; anton. médiocre, piteux, pitoyable, précaire. Avoir une jolie situation. Le voilà maintenant dans une très jolie position (Ac. 1878-1935). Deux mois après son départ, il arrangea son affaire et conserva une jolie situation de fortune (REYBAUD, J. Paturot, 1842, p. 406).
4. Spécialement
a) MAR., vx. Jolie brise. Brise intermédiaire entre la petite brise et la bonne brise, dont la vitesse est d'environ sept mètres par seconde. Enfin nous sommes partis dans la nuit d'hier par une jolie brise du sud-est (LAMART., Voy. Orient, t. 1, 1835, p. 119) :
• 13. Le 22, le vent s'établit nettement contraire et si nous examinons la carte de Brault, nous voyons en effet qu'à ce point exact, la possibilité de vents du SW atteignant en force la « jolie brise » et même la « forte brise » est prévue.
CHARCOT, Chr. Colomb, 1928, p. 139.
♦ Joli frais.
b) ETHNOL., FOLKL. Joli mai.
C. — Qui mérite d'être pris en considération par son importance ou sa qualité.
1. [Du point de vue de la quantité] Synon. beau, sacré, fichu (v. ce mot II C), important; anton. insignifiant, mince. Faire un joli raffut, un joli vacarme; avoir une jolie dot; toucher un joli paquet d'argent; ça fait un joli bail. Vous savez que vous êtes mes héritiers, et je vous laisserai, croyez-le, un joli magot, surtout si vous m'aidez à épouser le maréchal (BALZAC, Cous. Bette, 1846, p. 204). En effet, fit alors M. de la Hourmerie que le joli toupet de l'expéditionnaire avait démonté un moment (COURTELINE, Ronds-de-cuir, 1893, 1er tabl., 3, p. 51). M. le Préfet Worms-Clavelin était d'une jolie force au billard (FRANCE, Orme, 1897, p. 208) :
• 14. Il faudrait faire curer le puits. Quarante mètres de profondeur et probablement cinq ou six pieds d'argile... Un joli travail!
BERNANOS, Crime, 1935, p. 797.
2. [Du point de vue de la qualité] Synon. beau, bon. Avoir un joli rhume; un joli sujet d'étude. Toirac (...) a un assez joli talent pour faire le vers léger, le vers des épîtres de Voltaire (FLAUB., Corresp., 1846, p. 356). « Un de nous deux » était un joli euphémisme. Il savait bien que c'était toujours lui qui rompait le premier (MONTHERL., Pitié femmes, 1936, p. 1166).
II. — Par antiphrase. [En parlant d'une réalité dont on sait que l'interlocuteur la juge négativement]
A. — [En parlant de pers.] Déplaisant par ses manières, son comportement. C'est un joli monsieur (Ac. 1935). Puis ils passèrent en revue les convives. — « Le médecin m'a l'air d'un joli poseur! (...) » (FLAUB., Bouvard, t. 1, 1880, p. 53). Brusquement elle l'interrompit, éclatant : — Ah! bien, il est joli, votre monsieur, de s'amouracher de cette fille (ESTAUNIÉ, Simple, 1891, p. 84). C'est une pièce naïvement dure, puisque, pour l'amour, tout ce joli monde accepte de mentir et de duper (BRASILLACH, Corneille, 1938, p. 123).
— En partic. [Modifiant un subst. à valeur péj. ou injurieuse; joue le rôle d'intensif] Synon. drôle de, fichu, foutu (fam.), sacré. Un joli saligaud, un joli fumier; une jolie fripouille. Ce n'est pas parce que vous êtes là, Madame Coupeau, mais votre fille est une jolie pourriture (ZOLA, Assommoir, 1877, p. 733). L'idée de Pierre lui revint en tête : il était un joli coco, lui Armand, avec la bonne amie de son meilleur ami (ARAGON, Beaux quart., 1936, p. 304) :
• 15. « ...— Qu'est-ce que tu as dit? Répète! » dit Lambert. Vincent affermit sa voix : « Je dis qu'il faut que tu sois un joli salaud pour t'être réconcilié avec le type qui a donné Rosa... »
BEAUVOIR, Mandarins, 1954, p. 271.
B. — 1. Dont la vue procure du désagrément ou est difficilement soutenable. Synon. vilain, dégoûtant, beau (p. antiphrase); anton. beau, agréable, charmant. Je ne sais quelle manie j'ai de me fournir ici; on n'y vend que de la drogue. Le joli chapeau! Ne dirait-on pas qu'il a servi d'étalage pendant six mois? (LECLERCQ, Prov. dram., Mar. manqué, 1835, 5, p. 80). Lorsqu'elle fut parvenue à allumer une bougie, ils eurent devant eux un joli spectacle. Coupeau avait rendu tripes et boyaux; il y en avait plein la chambre (ZOLA, Assommoir, 1877, p. 631).
— Expr. Faire une jolie tête. Marquer son désagrément par l'expression de son visage. Synon. faire une sale tête. Tu as dû faire une jolie tête en lisant ça (VALÉRY, Corresp. [avec Gide], 1898, p. 316).
— Emploi subst. masc. sing. à valeur de neutre. C'est du joli; il y a du joli. Dans ce Tabac, c'était du joli. On marchait sur des coquilles d'huîtres, des verres cassés, on pateaugeait dans des confettis (CENDRARS, Dan Yack, Confess. Dan Yack, 1929, p. 221) :
• 16. Une nuit, le sac de foin qui bouchait la lucarne de l'écurie de Fulgence fut tiré, émietté et, au matin il y avait du joli! Le cheval et la vache étaient égorgés (...). Treize brebis étaient éventrées, semblait-il, pour le plaisir de s'agacer les dents dans la laine.
GIONO, Roi sans divertiss., 1947, p. 108.
2. a) Qui suscite du désagrément ou est cause de mécontentement ou d'insatisfaction. Synon. (p. antiphrase) beau, chouette, sacré; anton. gratifiant. Le vieux la regarda en hochant la tête : — Ma pauvre fille, ce n'est pas un joli cadeau que je t'ai fait là (ROLLAND, J.-Chr., Aube, 1904, p. 6). Il fallait empêcher cette scène de tourner à la mélancolie. Il s'écria joyeusement : — Un littérateur, oui, joli cadeau à faire à une enfant! (MONTHERL., Lépreuses, 1939, p. 1403).
— Emploi subst. masc. sing. à valeur de neutre. Elle (...) n'entend que la voix de M. Lajudal qui éclate : — Ah! vous faites du joli, vous, d'arriver sans vous annoncer! (ESTAUNIÉ, Bonne Dame, 1891, p. 111).
b) Qui est source de désagrément pour l'esprit. Synon. (p. antiphrase) beau, chouette; anton. gratifiant. Un joli résultat! Tronquoy : (...) j'ai lu l'autre jour dans le journal qu'un monsieur avait trouvé le moyen de parfumer les fleurs (...) ainsi la rose, à l'avenir, elle sentira l'eau de Cologne. Adèle : Jolie découverte! (LABICHE, Fourchevich, 1859, 1, p. 380). Le bilan est joli depuis un an! Feydau, votre frère, Bouilhet, Sainte-Beuve et Duplan. Voilà les idées qui sont comme autant de tombeaux, au milieu desquels je me promène (FLAUB., Corresp., 1870, p. 120).
— Expr. région. Faire joli. Manifester explicitement son mécontentement (à l'égard de quelque chose/quelqu'un). Synon. pester, rouspéter.
c) En partic. [En parlant d'une réalité s'inscrivant dans un cadre social] Qui est source de désagrément et de déconsidération du point de vue social et entraîne parfois une condamnation d'un point de vue moral. Il vient de faire là quelque chose de joli (Ac. 1835-1935). Il faut avouer que cette maîtresse de pension exerce un joli métier depuis qu'elle est arrivée, et qu'elle doit donner une singulière éducation aux jeunes filles (CHAMPFL., Bourgeois Molinch., 1855, p. 275). Eva : Mais comment donc! Le joli rôle que vous me proposez là! (SARDOU, Rabagas, 1872, I, 14, p. 45). — Pour un joli ratage, tu sais... c'est un joli ratage... exprima monsieur (MIRBEAU, Journal femme ch., 1900, p. 208). — En tout cas, un joli métier! Un joli métier de crève de faim! (RAMUZ, A. Pache, 1911, p. 86) :
• 17. Il avait d'abord connu Fanny, l'aînée d'elles deux, dont il eut une fille nommée Hélène. Il avait déjà sa jolie réputation de coureur, et cette fille fut tout de suite confiée à sa grand'mère...
LÉAUTAUD, In memor., 1905, p. 187.
— Expr., fam.
♦ (Être dans) un joli pétrin, de jolis draps. Être dans une situation embarrassante et difficile. — Moi, je comptais sur vous, dit-elle en terminant. Oh! Vous m'avez laissée dans un joli pétrin! (ZOLA, E. Rougon, 1876, p. 199). — Une fugue d'Agnès (...). Ça nous aurait mis dans de jolis draps pour la rentrée. Vous avez eu raison de veiller au grain. Une agrégée, ça ne court pas les rues (MAURIAC, Passage Malin, 1948, II, 1, p. 65).
♦ Être joli
[En parlant d'une situation] Être préoccupant ou même réprouvable. Il dit que ce serait joli, si toutes ces demoiselles voyaient des hommes dans le sous-sol (ZOLA, Bonh. dames, 1883, p. 559). — Ne me dis pas que tu es contre l'unité d'action, dit Henri. Ça serait joli si la gauche commençait à se diviser! (BEAUVOIR, Mandarins, 1954, p. 22).
[En parlant d'une pers.] Être dans une situation très préoccupante ou même réprouvable. Tu as peur de parler la première? Très bien. Je vais commencer. (Un silence.) Je ne suis pas très joli. Inès : — Ça va. On sait que vous avez déserté (SARTRE, Huis clos, 1944, 5, p. 141). C'est une histoire à nous faire crever du même coup, ton grand-père et moi. Et je te vois joli, après! Je ne te donne pas cinq ans pour être sur la paille (DRUON, Gdes fam., t. 2, 1948, p. 45) :
• 18. Jamais j'ai une minute tranquille! On vient me faire chier même au boulot!... Mes frères se tiennent comme des bagnards! Ma sœur vend son cul en Russie! Mon fils a déjà tous les vices! Je suis joli!
CÉLINE, Mort à crédit, 1936, p. 131.
♦ Emploi subst. masc. sing. à valeur de neutre. Être du joli, faire du joli. Être, faire quelque chose de catastrophique d'un point de vue moral ou intellectuel. Ben, ça n'en f'rait du joli! Merci non!... Faut jamais laisser la vérité à la portée d'un'imbécile... (MARTIN DU G., Gonfle, 1928, I, 7, p. 1196). Parlons-en! C'est le dernier gage que nous tenions contre l'Allemagne. Ah! On aura vite profité de la fatigue de Poincaré pour démolir son œuvre! Ça va être du joli avec ce voyou de Briand... (NIZAN, Conspir., 1938, p. 145).
Prononc. et Orth. : []. Att. ds Ac. dep. 1694. Étymol. et Hist. 1. a) Ca 1140 estre jolif de femmes « être porté à l'amour sensuel » (G. GAIMAR, Hist. des Anglais, éd. Bell, 3592); b) XIIIe s. joli(f) « gai, joyeux » (Romances et Pastourelles, I, 33, 22 ds T.-L.); 2. a) ca 1265 jolif « élégant, paré » (RUTEBEUF, La voie de paradis ds Œuvres, éd. E. Faral et J. Bastin, t. 1, p. 361, 581); b) XIIIe s. joli « qui a de l'agrément extérieur » (Romances et Pastourelles, I, 49, 10 ds T.-L.); 3. a) ca 1550 « considérable, assez grand (en parlant d'une somme d'argent) » (SAINT-GELAIS ds LITTRÉ, s.v. envi); b) 1671 « ingénieux, plaisant (en parlant d'un tour joué à quelqu'un) » (MOLIÈRE, Les fourberies de Scapin, I, 2). Prob. dér. de l'anc. scand. jôl, nom d'une grande fête païenne du milieu de l'hiver; suff. -if sur le modèle d'aisif « agréable », dér. d'aise. Cf. FEW t. 16, p. 286b. Fréq. abs. littér. : 11 122. Fréq. rel. littér. : XIXe s. : a) 15 239, b) 23 339; XXe s. : a) 18 906, b) 10 418. Bbg. ALESSIO (G.). Saggio di etimologie francesi. R. Ling. rom. 1950, t. 17, pp. 181-182. - DELOFFRE (F.). Une Préciosité nouv. Paris, 1955, p. 285. - DUCH. Beauté 1960, p. 5; pp. 26-33, 41-44, 48-49. - DUCHÁ (O.). Joli-beau. Fr. mod. 1961, pp. 263-284. - GALL. 1955, pp. 59-60; p. 400, 453, 527. - GRUNDT (L.-O.). Ét. sur l'adj. invarié en fr. Bergen-Oslo-Tromsø, 1972, p. 80, 223, 239. - QUEM. DDL t. 5, 16, 18. - RAIBAUD (G.). À propos d'une compar. de Rabelais : jolie comme une chouette. R. Universitaire. 1936, t. 45, n° 2, pp. 45-48. - WAGNER (R.L.). B. Soc. Ling. 1976, t. 71, p. 214.
joli, ie [ʒɔli] adj.
ÉTYM. XIIIe; jolif, ive « lascif », v. 1138; jolif « gai, enjoué », v. 1170; probablt de l'anc. scandinave jôl, nom d'une grande fête du milieu de l'hiver. REM. En épithète, l'adj. est le plus souvent antéposé, quand il n'est pas accompagné d'un adverbe ou d'un complément.
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1 a (V. 1360). Vx. Qui est agréable par son esprit, sa gentillesse, son enjouement. ⇒ Agréable, aimable.
1 Vous l'accusez toujours (Coulanges) de n'être joli qu'avec les ducs et pairs; je l'ai pourtant vu bien plaisant avec nous (…)
Mme de Sévigné, 1216, 18 sept. 1689.
♦ (D'une production artistique, littéraire) :
2 À mon gré, le Corneille est joli quelquefois.
Boileau, Satires, III.
b (XIIIe). Vx. Qui plaît ou cherche à plaire par le soin apporté à son physique, à sa toilette. ⇒ Coquet (→ Affiquet, cit. 1), élégant. — N. || Faire la jolie (→ 1. Aller, cit. 41).
♦ Fig. Recherché. || Pline est inégal (cit. 15), Térence un peu joli.
♦ Mod. ☑ Joli cœur. || Ni fier-à-bras (cit. 3), ni joli cœur. || Faire le joli cœur.
3 (…) nous ne sommes pas des savants, des mirliflores, des jolis cœurs; nous sommes des praticiens, des guérisseurs.
Flaubert, Mme Bovary, II, XI.
4 Celui-là, enfin, fait le joli cœur auprès d'une comédienne, et songe avant tout à avancer ses affaires.
Paul Léautaud, le Théâtre de Maurice Boissard, I.
2 (XIIIe). Mod. a Très agréable à voir ou à entendre; très agréable à regarder. ⇒ 1. Beau, bellot, 1. bien, gentil, girond, gracieux, mignon, pimpant; fam. bath, 2. chouette, 1. jojo. — REM. On oppose souvent joli à beau, beau impliquant régularité et majesté, joli, grâce et agrément. — (Personnes). || Il est assez joli. || Un garçon assez joli, un assez joli garçon. — (Surtout en parlant des femmes). || Elle est très jolie, plus jolie que sa sœur. || Personne jolie qui efface des beautés (cit. 39) plus régulières. || Une jolie fille (→ Flatteur, cit. 10), un joli brin de fille. || Une très jolie fille. || Jolie femme (→ Affriander, cit.; auréole, cit. 9; 1. boire, cit. 13; enlaidir, cit. 6; entrée, cit. 8; entreprenant, cit. 5). || Jeune et jolie. ⇒ Désirable (→ Barbon, cit. 1; garçon, cit. 8). — ☑ Jolie comme un amour (cit. 45), comme un cœur, comme un ange, comme un chérubin. ☑ Jolie à croquer (cit. 7). — Une jolie petite fille (→ Coquet, cit. 5), un joli petit garçon. || Elle est charmante, mais pas très jolie. — ☑ Loc. Joli garçon (→ Éduquer, cit. 7; faraud, cit. 3; gâter, cit. 30). (En emploi adj.). || Il est plutôt joli garçon. — Rendre joli. ⇒ Enjoliver (→ 2. Air, cit. 14). — REM. Joli ne s'applique guère qu'en parlant des enfants et des jeunes femmes; dans les autres cas, l'adj. est ironique ou stylistique (→ ci-dessous, cit. 5, La Fontaine, appliqué par le renard au corbeau).
5 Que vous êtes joli ! Que vous me semblez beau !
La Fontaine, Fables, I, 2.
6 Dites. Qu'elle est jolie et qu'elle a les yeux doux !
Racine, les Plaideurs, III, 4.
7 On oppose même quelquefois le joli au beau. Elle n'est pas belle dit-on, mais elle est jolie. Mais joli n'exclut ni le grand, ni le beau, quand on le joint avec femme. C'est une jolie femme (…) On ne dit pas, c'est un joli homme dans le sens qu'on dit, c'est une jolie femme. L'un est une louange, et l'autre une espèce de raillerie.
Dict. de Trévoux, art. Joli.
7.1 Les élèves de Monsieur Rodin étaient peu nombreux, mais choisis; il n'avait en tout que quatorze filles et quatorze garçons. Jamais il ne les prenait au-dessous de douze ans, ils étaient toujours renvoyés à seize; rien n'était joli comme les sujets qu'admettait Rodin. Si on lui en présentoit un qui eût quelques défauts corporels, ou point de figure, il avait l'art de le rejeter sous vingt prétextes (…)
Sade, Justine…, t. I, p. 104.
8 Il faut enfin parler de la Parisienne (…)
Elle-même se dit point belle, mais jolie (…)
Verlaine, Invectives, XLII.
♦ ☑ Fam. Sois poli, si tu n'es (t'es) pas joli !
♦ ☑ Loc. Vx. Joli homme : bel homme. || « Blessé dans sa fatuité de joli homme » (Zola, Rome, p. 389). Syn. mod. : joli garçon.
♦ N. (en appellatif, avec le possessif). || Oui, mon joli. || Ma jolie ! ⇒ 1. Beau, mignon.
♦ (Parties, aspects du corps). || Jolie figure. || Joli minois, joli museau… (→ Fluet, cit. 2; grand, cit. 40). || Avoir de jolis traits. ⇒ Ciselé, délicat. || De jolis yeux (→ Assaisonnement, cit. 8). || Jolie fossette (cit. 2). || Jolies jambes (→ 1. Faire, cit. 261). || Une jolie voix (→ Féminin, cit. 5).
9 Je préfère une jolie bouche à un joli mot, et une épaule bien modelée à une vertu, même théologale; je donnerais cinquante âmes pour un pied mignon, et toute la poésie et tous les poètes pour la main de Jeanne d'Aragon ou le front de la vierge de Foligno.
Th. Gautier, Mlle de Maupin, V.
♦ (1690, Furetière). Animaux. || Un joli petit chat. || De jolis oiseaux (→ Fauvette, cit.).
REM. Plus encore que pour les personnes, l'adjectif est très sélectif et ne s'emploie qu'avec les noms d'espèces jugées agréables, sauf par effet stylistique (une jolie araignée, un joli serpent).
b (V. 1360). Choses. ⇒ Charmant, ravissant. || Un joli pays (→ Appauvrissement, cit. 1). || Une jolie petite ville (→ Fond, cit. 4). || Jolie maison. || Joli spectacle, joli coup d'œil. Par ext. || Joli voyage, jolie traversée (→ 2. Exprès, cit. 2). || Joli mois de mai. — Joli meuble. || Jolie reliure. || Aimer les jolies choses. || Joli tableau. — Très agréable à entendre. || Une jolie musique. || Une jolie chanson. — Par ext. (un peu affecté). Agréable. || Un joli vin gouleyant. — De jolis mouvements. ⇒ Gracieux, harmonieux (→ Cadencé, cit. 4). || Un joli mot (→ Affût, cit. 2; autorail, cit. 1; caravansérail, cit. 2). || Un joli coup, une jolie feinte. || Jolie performance. || Bravo, joli ! très joli !
10 J'ai (…) un secrétaire très joli, dont on m'a remis la clef (…)
Laclos, les Liaisons dangereuses, I.
11 (…) l'endroit se prêterait merveilleusement à une station. À cause du site, qui est très joli (…)
J. Romains, les Hommes de bonne volonté, t. V, XIV, p. 101.
♦ Avec une nuance critique (distingué de beau). || Une peinture qui n'est que jolie (→ Idéalité, cit. 2).
♦ Emplois spéciaux. Mar. || Jolie brise, intermédiaire entre petite brise et bonne brise. || Joli frais.
♦ N. m. || Le joli : ce qui est joli. || Le joli et le charmant. || Le joli et le beau. || Le joli en peinture (→ Contestation, cit. 4).
12 Le beau proprement dit, c'est l'harmonie sensible à l'intelligence, jugée par le goût (…) Le gracieux, le joli, l'élégant, le mignon, le coquet inspirent (…) une sympathie protectrice pour des êtres ou des objets petits et faibles (…) C'est en cela qu'il nous procure un agréable accroissement de notre sentiment du moi : le charme.
Ch. Lalo, Notions d'esthétique, II, IV, III.
3 (V. 1550). Fam. Digne de retenir l'attention, qui mérite d'être considéré. || Une jolie somme. || De jolis bénéfices. ⇒ Considérable, coquet. || Obtenir de jolis résultats. — Vieilli. || Il est d'une jolie force au violon (→ Instrument, cit. 7). — Avoir une jolie situation. ⇒ Avantageux, intéressant.
13 Les employés de restaurant ne sont pas payés, mais avec les « bonnes-mains » se font d'assez jolies journées.
Gide, Journal, 9 mai 1927.
♦ ☑ C'est bien joli, mais… : ce n'est pas sans intérêt, mais malgré tout…
4 (1671, Molière). Spécialt. ⇒ Amusant, piquant, plaisant. || Un joli tour. || Selon le joli mot de Voltaire. || Le plus joli c'est qu'il ignore tout. — N. m. || Le joli de l'histoire, c'est que…
5 Emploi négatif. (Actions, comportement…). Correct, acceptable (moralement). || Ce n'est pas bien joli, ce qu'il a fait là ! — Répété. ☑ Ce n'est pas joli joli.
6 (1673, Molière). Joli s'emploie comme beau en parlant de ce qui est laid, désagréable, mauvais, raté, ridicule. ☑ Un joli monsieur, un joli coco (fam.) : un individu peu recommandable, sans moralité. ⇒ 1. Beau, charmant. || C'est du joli monde, tout ça ! — (Choses). || Elle est jolie leur science ! (→ Il, cit. 16). || Vous avez une jolie idée (cit. 17) de moi ! || Vous êtes joli, affublé de la sorte ! || Nous voilà dans un joli pétrin. || Il nous a joué un joli tour. || « Tout ce joli monde a été conduit au dépôt (I., 3.) ». — Impers. || C'est joli de dire du mal des absents !
14 Je viens d'apprendre là-bas, à la porte, de jolies nouvelles; qu'on se moque ici de mes ordonnances (…)
Molière, le Malade imaginaire, III, 5.
15 Vraiment, mon oiseau, vous faites là un joli métier, répondit en souriant la princesse (…)
Voltaire, la Princesse de Babylone, III.
16 (…) une coquine fieffée, très propre à porter son amant à faire des dettes, puis des faux, et plus tard même quelque joli petit crime conduisant droit en cour d'assises (…)
Stendhal, Romans et Nouvelles, Philibert Lescale.
17 Ma joie serait grande de le pouvoir nommer fripon, fripouille, canaille, crapule, voyou, filou, jolis noms chargés d'évoquer ce que par dérision vous appelez un joli monde.
Jean Genet, Journal du voleur, p. 172.
♦ N. m. ☑ C'est du joli ! : c'est mal. → C'est du beau, du propre. || La grève (cit. 14) générale, ce sera du joli !
18 — Une erreur judiciaire à Monpaillard ! Ah ça va en faire du joli !
A. Allais, l'Affaire Blaireau, p. 44.
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CONTR. Laid.
DÉR. Joliesse, joliet, joliment. — V. Joliveté.
COMP. Enjoliver, jolibois.
Encyclopédie Universelle. 2012.