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glisser

glisser [ glise ] v. <conjug. : 1>
glicier 1190; altér. a. fr. gliier, du frq. °glidan, par infl. de glacier, a. forme de glacer
I V. intr.
1Se déplacer d'un mouvement continu, volontaire ou non, sur une surface lisse ou le long d'un autre corps, les deux surfaces restant en contact permanent. Glisser sur une pente raide. Glisser sur la glace avec des patins ( 2. patiner) , sur la neige avec des skis ( skier; glisse) . Faire une chute en glissant sur un parquet ciré, sur une peau de banane. « Dans la rue les plus dignes sont ceux qui viennent de glisser sur du crottin » (Giraudoux). Son pied a glissé. Voiture qui glisse sur le verglas. déraper. Ce fer à repasser glisse bien. Curseur qui glisse dans sa coulisse. coulisser. Glisser de (qqch.) : tomber accidentellement de. J'ai glissé de ma chaise. Le verre m'a glissé des mains. échapper.
Fig. « le pouvoir avait glissé des mains du roi » (Taine). Il nous a glissé entre les doigts comme une couleuvre, une anguille. filer.
2Avancer régulièrement et sans bruit comme en glissant. Cygne, embarcation qui glisse au fil de l'eau. « un ciel immense où glissent les nuages » (Barrès).
Par métaph. Passer doucement, graduellement, insensiblement. évoluer. L'opinion glisse vers la droite. « plus d'un écrivain glisse à la morale » (Paulhan).
3Fig. Se laisser aller. s'abandonner. Glisser sur une mauvaise pente. Fam. Se laisser glisser : mourir.
4Passer légèrement (sur qqch.). courir, passer. « Ses doigts glissant doucement sur les touches » (Maurois). « un fin grésil, glissant sur les vêtements sans les mouiller » (A. Daudet). Par métaph. effleurer. Regard qui glisse sur les choses. « un sourire glissait sur ses lèvres sévères » (France).
5Fig. Ne pas approfondir, ne pas insister. Glissons sur ce détail. passer. Absolt Glissons.
Glisser sur qqn, ne lui faire qu'une impression faible ou nulle. Un être sur qui tout glisse. indifférent, insensible. Les injures glissent sur lui, ne l'atteignent pas.
II V. tr. Faire passer, introduire adroitement ou furtivement (qqch.). Glisser un levier sous une pierre. engager. Glisser du courrier sous la porte de qqn; un billet dans une enveloppe. « Au revoir, madame, dit Daniel en glissant un billet dans la main de la vieille » (Sartre).
Fig. Glisser un mot à l'oreille de qqn. 1. dire. Tâche de lui glisser que c'est le moment d'agir. Glisser une allusion dans un discours. insinuer. Glisser un regard en coin.
III ♦ SE GLISSER v. pron. Passer, pénétrer adroitement ou subrepticement quelque part. se couler, se faufiler, s'insinuer, s'introduire. Se glisser dans ses draps, sous une clôture. « Elle s'était glissée derrière un mur » (Giono).
Fig. Un soupçon s'était glissé en moi. Une erreur s'est glissée dans le texte. Impers. Il s'est glissé quelques fautes dans l'impression de ce livre.
⊗ CONTR. Approfondir, appuyer, enfoncer, frotter, insister.

glisser verbe intransitif (ancien français gliier, du francique glidân, avec l'influence de glacer) Se déplacer d'un mouvement uniforme et continu sur une surface lisse, unie, sans aspérité, ou donner cette impression : Les patineurs glissent sur la glace. Bateau qui glisse sur l'eau d'un lac. Coulisser plus ou moins bien : Le tiroir glisse bien dans les rainures. Perdre le contrôle de son équilibre, de sa direction en se déplaçant involontairement sur quelque chose de gras, de lisse, déraper ; voir sa trajectoire modifiée : Il s'est cassé la jambe en glissant sur le verglas. La lame a glissé et il s'est coupé. Tomber accidentellement de quelque part : Une tuile a glissé du toit. Être glissant, présenter une faible adhérence : Attention au verglas, ça glisse. Passer insensiblement, légèrement, graduellement à un autre état : Le corps électoral avait glissé à gauche. Ne pas insister sur quelque chose, ne pas en faire état : Glissons sur le passé, voulez-vous ? Ne faire qu'une impression légère ou nulle sur quelqu'un : Les injures glissent sur lui. En chorégraphie, exécuter un parcours en glissant sur le sol ; effectuer une glissade. ● glisser (citations) verbe intransitif (ancien français gliier, du francique glidân, avec l'influence de glacer) Pierre Charles Roy 1683-1764 Sur un mince cristal l'hiver conduit leurs pas : Le précipice est sous la glace ; Telle est de vos plaisirs la légère surface. Glissez, mortels, n'appuyez pas. Commentaire Quatrain placé sous une gravure : le Patinage. ● glisser (expressions) verbe intransitif (ancien français gliier, du francique glidân, avec l'influence de glacer) Glisser des mains, échapper accidentellement des mains, être lâché par mégarde. Glisser entre les mains, entre les doigts de quelqu'un, lui échapper au moment où il croit tenir quelqu'un, quelque chose : Le cambrioleur leur a glissé entre les mains.glisser (synonymes) verbe intransitif (ancien français gliier, du francique glidân, avec l'influence de glacer) Se déplacer d'un mouvement uniforme et continu sur une surface...
Synonymes :
- patiner
Perdre le contrôle de son équilibre, de sa direction en...
Synonymes :
- chasser
- déraper
Tomber accidentellement de quelque part
Synonymes :
- filer
- tomber
Passer insensiblement, légèrement, graduellement à un autre état
Synonymes :
- pencher
- s'incliner
Ne faire qu'une impression légère ou nulle sur quelqu'un
Synonymes :
- effleurer
- frôler
glisser verbe transitif Déplacer quelque chose en le poussant sur une surface unie : Glisser un meuble dans la pièce voisine. Introduire adroitement, doucement ou furtivement quelque chose dans un espace étroit : Glisser une lettre sous la porte. Introduire habilement quelque chose dans un texte, un discours : Il a glissé quelques critiques parmi ses éloges. Dire furtivement quelque chose à quelqu'un : Glisser une confidence à l'oreille d'un ami.glisser (synonymes) verbe transitif Introduire adroitement, doucement ou furtivement quelque chose dans un espace étroit
Synonymes :
- engager
- fourrer (familier)
- introduire
Dire furtivement quelque chose à quelqu'un
Synonymes :
- souffler

glisser
v.
rI./r v. intr.
d1./d Se déplacer d'un mouvement continu sur une surface lisse. Glisser sur la glace. La pirogue glisse sur l'eau. Le plat mouillé lui a glissé des mains.
|| (Québec) Dévaler une pente enneigée ou glacée (sur un traîneau, etc.).
S'amuser à descendre dans une glissoire (sens 2).
|| Loc fig. Glisser entre les mains de qqn, lui échapper.
d2./d Fig. Se diriger insensiblement vers. Glisser vers l'extrémisme politique.
d3./d Passer sans pénétrer sur une surface. La balle a glissé sur la boîte crânienne.
|| Fig. Mes remontrances ont glissé sur lui, n'ont produit aucune impression, aucun effet.
d4./d Fig. Glisser sur (un sujet), ne pas y insister. Glissons là-dessus, voulez-vous? Syn. passer.
d5./d Présenter une surface glissante. Après la pluie, la chaussée glisse.
rII./r v. tr. Mettre, introduire, transmettre adroitement ou furtivement. Glisser une pièce dans la main de qqn.
rIII/r v. Pron.
d1./d Se couler doucement, se faufiler. Les serpents se glissent dans les herbes.
d2./d S'introduire habilement ou subrepticement. Les voleurs s'étaient glissés parmi les invités.
(Choses) Une erreur s'est glissée dans le texte.

⇒GLISSER, verbe
I. — Emploi intrans.
A. — 1. Se déplacer sans secousse (sur la surface d'un corps lisse ou le long d'un autre corps). Glisser sur, dans, le long de qqc.
a) [Par une impulsion donnée] Le traîneau glissait facilement sur la neige dure (HÉMON, M. Chapdelaine, 1916, p. 25). Dans la marche de cette machine, la navette glisse, dans un petit couloir ou glissière, de droite à gauche et de gauche à droite (Lar. mén. 1926, p. 780) :
1. [La console des canons de côte] présente des griffes qui glissent dans les rainures creusées dans la vis et limitent le mouvement de translation...
ALVIN, Artill., Matér., 1908, p. 60.
Faire glisser qqc. Il faisait glisser de son épaule la bandoulière du fusil (GIONO, Colline, 1929, p. 129). Le professeur Émile Lartois fit glisser les doubles-rideaux (DRUON, Gdes fam., t. 1, 1948, p. 115). Elle détacha ses boucles d'oreilles et fit glisser ses bagues (BEAUVOIR, Mandarins, 1954, p. 24).
En partic. Faire des glissades. Les enfants s'amusent à glisser sur la mare qui est gelée (Ac. 1932).
b) [Par l'effet de la pesanteur] Je vis rouler de ses beaux yeux une larme qui glissa rapidement sur sa joue livide et desséchée (VIGNY, Serv. et grand. milit., 1835, p. 167). Un caillou glissa de la crête du mur jusqu'à la mare (BERNANOS, Joie, 1929, p. 615) :
2. Lorsque la lourde coque commençait à glisser sur la pente, de manière à atteindre le plan d'eau, les deux gros câbles se tendaient; et au bout d'un très faible parcours les « bosses » se rompaient successivement et l'effort nécessaire pour les briser, absorbait l'énergie cinétique de la coque...
PERPILLOU, Industr. constr. nav., 1967, p. 13.
Laisser glisser. En arrivant auprès de moi, ma baigneuse laissa glisser sur ses épaules la mantille qui lui couvrait la tête (MÉRIMÉE, Carmen, 1847, p. 19). Sans un mot, il laissait glisser son boubou le long de son petit corps (MARTIN DU G., Thib., Belle sais., 1923, p. 1002).
Se laisser glisser. Il s'avança jusqu'au bord, se coucha sur le dos, et, les pieds en avant, se laissa glisser tout le long jusqu'en bas (FLAUB., Salammbô, t. 1, 1863, p. 90). L'animal comprit, saisit la corde, se laissa glisser rapidement jusqu'à la grève (VERNE, Île myst., 1874, p. 503) :
3. J'aborde au nid; la pie s'envole; je ravis les œufs, je les mets dans ma chemise et redescends. Malheureusement, je me laisse glisser entre les tiges jumelles et j'y reste à califourchon.
CHATEAUBR., Mém., t. 1, 1848, p. 81.
P. métaph. La paresse de l'esprit le pousse à glisser sur la pente aisée de l'imagination plutôt qu'à remonter la pente abrupte de l'introspection (PROUST, Fugit., 1922, p. 465). Nous risquions de glisser sur une pente dangereuse et de confondre, un jour, l'homme avec le symbole de la moyenne ou de l'ensemble des hommes (SAINT-EXUP., Pilote guerre, 1942, p. 378) :
4. Un sentiment juste, exprimé en termes justes, avec simplicité et naturel, et sans glisser sur la pente des exagérations, est chose aussi rare qu'un goût infaillible.
JANKÉL., Je-ne-sais-quoi, 1957, p. 189.
En partic.
) Pénétrer, parvenir (du haut). Un rayon de soleil glissait de la croisée (MAURRAS, Chemin Paradis, 1894, p. 161). Un rayon de soleil glissa entre les branches mouillées des arbres (ROLLAND, J.-Chr., Maison, 1909, p. 1085).
Emploi pronom. réfl. Un jaune trait de soleil se glissait entre les persiennes (DUHAMEL, Suzanne, 1941, p. 107).
) S'infiltrer. L'eau qui se glisse dans toutes les sinuosités d'un rocher (BALZAC, Annette, t. 1, 1824, p. 34).
Au fig. Glisser à/dans. Se trouver entraîné dans, vers; s'abandonner, se laisser aller à; sombrer dans. Il eût redouté ces sublimités d'où quelques-uns, très grands même, comme Swedenborg et Pascal, ont glissé dans la démence (HUGO, Misér., t. 1, 1862, p. 75). On découvrit qu'une bande de toutes jeunes filles, presque des enfants, avaient glissé à la débauche en galopinant dans les rues (ZOLA, Conquête Plassans, 1874, p. 975). Nous aurions pu facilement glisser à la pègre, c'est arrivé à Patrice, il est en prison pour vol de draps dans les hôtels (VAILLAND, Drôle de jeu, 1945, p. 17) :
5. Ou bien il serait procédé d'office et rapidement à un changement notable de la condition ouvrière et à des coupes sombres dans les privilèges de l'argent, ou bien la masse souffrante et amère des travailleurs glisserait à des bouleversements où la France risquerait de perdre ce qui lui restait de substance.
DE GAULLE, Mém. guerre. 1959, p. 18.
Arg. [Avec compl. d'obj. interne] Glisser la pente ou la glisser. Mourir. Canner à l'hosto, les truands s'en branlent. Ce qu'ils n'aiment pas, c'est la glisser à Cusco (SIMONIN, Pt Simonin ill., 1957, p. 160) :
6. Belle façon de la glisser, pour un gonze de son âge! Avaler son bulletin de naissance en lorgnant une si chouette pépée, c'était le rêve!
LE BRETON, Razzia, 1954, p. 157.
Arg. ou pop. Se laisser glisser (ou plus rarement glisser, cf. FRANCE 1907). Même sens. Triste nouvelle. Luciano, le grand truand de Chicago s'est laissé glisser (RIV.-CAR. 1969).
2. [Avec une idée de mouvement non contrôlé]
a) ) Qqn glisse (sur). Perdre soudain l'équilibre (en marchant sur quelque chose de lisse, de gras, etc.). Glisser sur une épluchure, sur une peau de banane, sur le verglas :
7. Je sais. Je sais. L'outrage appelle la majesté. Dans la rue les plus dignes sont ceux qui viennent de glisser sur du crottin.
GIRAUDOUX, Électre, 1937, II, 6, p. 166.
[Le suj. désigne le pied] Le pied lui glissa. Il tomba (POURRAT, Gaspard, 1925, p. 276) :
8. Sur ce roc, où le pied parmi les algues glisse,
Traînant un long filet vers la mer glauque et lisse,
Un pêcheur vient en hâte; et, bien que vieux et lent
Ses muscles sont gonflés d'un effort violent.
LECONTE DE LISLE, Poèmes ant., 1874, p. 172.
Au fig. Le pied lui a glissé. ,,Se dit (...) lorsqu'il est arrivé un accident fâcheux à quelqu'un, ou par son imprudence, ou par malheur`` (Ac.).
P. anal. Un cheval glissa et tomba sur le flanc (ROLLAND, J.-Chr., Foire, 1908, p. 646).
) Qqc. glisse (sur). Déraper. Voiture qui glisse sur le verglas; les pneus ont glissé sur la chaussée mouillée. (Dict. XIXe et XXe s.)
b) ) Qqc. glisse (de, entre). Échapper de, cesser d'être retenu par; ne pas pouvoir être retenu par. Savon qui glisse des mains; poisson, anguille qui glisse des mains. Son tricot lui glissa des mains (RAMUZ, A. Pache, 1911, p. 288). Sans même qu'il s'en rendît compte, le livre lui glissa des doigts, et il s'endormit (GREEN, Moïra, 1950, p. 196) :
9. Les doigts de Lafrogne aîné étaient si gourds et tremblants que le paquet de clefs glissa de ses mains et tomba bruyamment sur le parquet.
THEURIET, Mais. deux barbeaux, 1879, p. 147.
P. métaph. Il avait coutume de dire : « Dans la famille, nous sommes tous légers et joueurs. L'argent nous glisse entre les doigts... » (BARRÈS, Cahiers, t. 11, 1917, p. 244). Nous avons beau faire, votre souvenir s'effiloche et glisse entre nos doigts (SARTRE, Mouches, 1943, II, Ier tabl., 2, p. 48) :
10. ... les ministres tombaient les uns sur les autres; le pouvoir glissait de toutes les mains. Le suprême bon ton était d'être Américain à la ville, Anglais à la cour, Prussien à l'armée, d'être tout, excepté Français.
CHATEAUBR., Mém., t. 1, 1848, p. 187.
Loc. fig. [En parlant d'une pers.] Glisser des mains à qqn.
♦ Fausser compagnie à quelqu'un, lui échapper. On prendra le bateau à Veere pour Zierickzee. De là, le train pour Bergen et Rotterdam. Ne pense pas me glisser des mains ou bien je te prends le gosse et je l'étrangle comme un pigeon (VAN DER MEERSCH, Empreinte dieu, 1936, p. 187).
♦ Trahir sa parole, changer subitement de résolution, de sentiments, d'opinions (d'apr. Ac.). C'est un homme qui vous glissera des mains au moment que vous y songerez le moins (Ac.)
) Qqc. glisse (en dehors de). Se répandre. On lave la colle qui a pu glisser en dehors des éclisses (MAUGIN, MAIGNE, Nouv. manuel luthier, 1929, p. 59).
B. — P. anal.
1. a) Qqc. glisse. Avancer, progresser d'un mouvement continu et sans bruit.
[Le suj. désigne une embarcation] Des badauds se penchaient sur le parapet des quais et regardaient glisser les chalands (ARLAND, Ordre, 1929, p. 398). [P. méton du suj.] :
11. Ainsi tout change, ainsi tout passe;
Ainsi nous-mêmes nous passons.
Hélas!
Sans laisser plus de trace
Que cette barque où nous glissons
Sur cette mer où tout s'efface.
LAMART., Médit., 1820, p. 21.
[Le suj. désigne un animal rampant] J'entends glisser l'aspic et croître la ciguë (HUGO, Fin Satan, 1885, p. 908).
Emploi pronom. P. compar. Louise se glissa comme une couleuvre par la porte entrebaîllée (DUMAS père, Monte-Cristo, t. 2, 1846, p. 523).
P. métaph. S'écouler doucement. Les jours glissaient sans ternir son bonheur (DABIT, Hôtel Nord, 1929, p. 107).
En partic. Entrer, pénétrer doucement. On n'entendit pas le pêne glisser dans la gâche (ZOLA, Bête hum., 1890, p. 63).
Au fig. Qqn ou qqc. glisse à/vers. Passer insensiblement, progressivement à. L'ensemble des électeurs a glissé vers la gauche; la majorité gouvernementale glisse vers la droite. Ils [les secondaires] glissent facilement du sérieux au solennel (MOUNIER, Traité caract., 1946, p. 297).
Emploi pronom., au fig. S'insinuer, entrer peu à peu, insensiblement. Le plus doux espoir se glisse dans son sein (BAOUR-LORMIAN, Ossian, 1827, p. 193). Je sentais se glisser en moi de telles perfidies, que je ne discernais plus dans quelle mesure j'étais coupable ou seulement malheureux (FROMENTIN, Dominique, 1863, p. 205) :
12. Ici le pauvre maître d'école effrayé trembla tellement qu'il chancela sur ses jambes et tomba par terre. Cette frayeur plut au juge, et un sentiment de commisération se glissa dans son âme pour le pauvre maire.
BALZAC, Annette, t. 3, 1824, p. 180.
b) Qqn glisse. Marcher sans bruit, passer furtivement. Une ombre avait glissé sous les noires charmilles (DUMAS père, Monte-Cristo, t. 2, 1846, p. 605). Une forme mince, une silhouette fuyante glissait rapidement dans les ténèbres, cherchant à gagner la porte ouverte sur le jardin (MOSELLY, Terres lorr., 1907, p. 35) :
13. Il commanda à une femme de chambre, qui glissait dans l'appartement sans faire plus de bruit qu'une ombre, d'approcher de la table de jeu un guéridon chargé de zakouskis et de bouteilles de champagne...
G. LEROUX, Roul. tsar, 1912, p. 129.
Au fig. Qqc. glisse. [À propos d'une expression du visage] Se manifester un instant, apparaître furtivement. Un sourire infernal glissa sur les lèvres du vicomte (PONSON DU TERR., Rocambole, t. 1, 1859, p. 51). Une lueur d'orgueil glissa dans son regard (MARTIN DU G., Thib., Épil., 1940, p. 839).
c) Qqn ou qqc. glisse (sur). Passer légèrement sur quelque chose, passer à la surface de quelque chose sans appuyer :
14. Il caresse une barbe hirsute et roule sur nous des yeux tendres. Son regard glisse sur le cognac, se détourne, revient au cognac, vire, suppliant, sur le capitaine.
SAINT-EXUP., Terre hommes, 1939, p. 246.
CHORÉGR. ,,Déplacer les pieds en glissant sur le sol`` (MEUNIER, Danse class., 1931, p. 134). Sa façon de tourner, de glisser (...) le classe à un rang qui, désormais, pourrait bien être le premier (LEVINSON, Visage danse, 1933, p. 41). Elle [Gret Palucca, danseuse] ne glisse pas, mais appuie (LEVINSON, Visage danse, 1933p. 297).
Emploi trans. Glisser un pas. Le marquer légèrement. Il glissait un pas de contredanse, la pointe en dehors (ADAM, Enfant Aust., ,1902, p. 267).
En partic. Qqc. glisse (sur). Passer à la surface sans pénétrer, ne pas entamer profondément. Le poignard glissa et ne lui fit qu'une légère blessure (Ac. 1878-1932). Les projectiles glissaient sur ces masses obliques (FLAUB., Salammbô, t. 2, 1863, p. 92). Les deux aiguillons recourbés glissent inutilement sur les lourdes cuirasses de chitine (MAETERL., Vie abeilles, 1901, p. 73).
Au fig. Glisser sur
) Ne pas insister, ne pas s'attarder (sur un sujet). Je glisse sur le détail, mais que d'exemples, instructifs et charmants, à tirer de la vie parisienne (BARRÈS, Barbares, 1888, p. 185). Je glissais rapidement sur tout cela, plus impérieusement sollicité que j'étais de chercher la cause de cette félicité (PROUST, Temps retr., 1922, p. 871) :
15. Le malentendu est l'interdiction d'approfondir. Les conjurés, qui au demeurant se complaisent dans l'équivoque irrespirable, ont fait serment de rester superficiels et de glisser pudiquement, sans appuyer, sur les dessous de leur machination...
JANKÉL., Je-ne-sais-quoi, 1957, p. 193.
Absol. Glissons! N'insistons pas. (Dict. XIXe et XXe s.).
) Causer peu d'effet, produire peu d'impression. Mes remontrances n'ont fait que glisser sur lui (Ac.). Les encouragements du médecin glissaient sur lui et lénifiaient une région où il n'était pas (MALÈGUE, Augustin, t. 2, 1933, p. 387). Les raisons de Costals avaient glissé sur elle sans l'entamer le moins du monde. Et elle attendait leur conversation dans un grand sentiment de sécurité (MONTHERL., Démon bien, 1937, p. 1263) :
16. Il [l'empereur] nous disait l'autre jour qu'il avait été de marbre pour tous les grands événements, qu'ils avaient glissé sur lui sans mordre sur son moral ni sur ses facultés.
LAS CASES, Mémor. Ste-Hélène, t. 1, 1823, p. 607.
2. Emploi pronom.
a) Se déplacer, marcher d'un mouvement adroit et/ou furtif. Le braco se glissait à travers des genêts serrés (GENEVOIX, Raboliot, 1925, p. 318). La fenêtre de sa chambre était entr'ouverte. Il craignit qu'elle ne prît froid, et se glissa en tapinois vers sa porte, —curieux, en outre, de savoir si elle ne l'aurait pas fermée à clef (MONTHERL., Démon bien, 1937, p. 1338) :
17. Des lumières qui sortent une à une de la grande maison, et qui se glissent entre les arbres, et qui s'avancent, avec des airs traîtres, et qui cernent peu à peu le pavillon...
FARRÈRE, Homme qui assass., 1907, p. 303.
Se glisser hors de. Sortir (d'un lieu) sans bruit et avec précaution. Il se glissa furtivement hors de la maison, comme un paillard qui s'échappe d'un mauvais lieu (BOREL, Champavert, 1833, p. 181). Ils se glissaient furtivement, chacun de son côté, hors du logis (THEURIET, Mais. deux barbeaux, 1879, p. 50).
b) S'introduire, entrer, pénétrer (quelque part, dans quelque chose) avec adresse, avec discrétion ou furtivement.
Se glisser dans. Lesable était entré au ministère furtivement et s'était glissé dans son bureau (MAUPASS., Contes et nouv., t. 1, Hérit., 1884, p. 492). On se demande quel peut bien être le noctambule éperdu qui se glisse dans ces antres sans lumière et sans chair (FARGUE, Piéton Paris, 1939, p. 146) :
18. ... vous savez qu'il y a dans la chambre de monsieur le duc une armure de taille colossale, dressée sur un pivot, casque en tête et visière baissée. Eh bien! je me suis glissé dans l'armure, bien certain qu'on ne songerait point à y regarder.
PONSON DU TERR., Rocambole, t. 4, 1859, p. 194.
Se glisser sous. La porte de la chambre fut tout à coup secouée avec force. C'était M. de Rênal. — Pourquoi t'es-tu enfermée? lui criait-il. Julien n'eut que le temps de se glisser sous le canapé (STENDHAL, Rouge et Noir, 1830, p. 224). Elle sentit une main qui se glissait sous son aisselle et qui lui caressait le sein (SARTRE, Mort ds âme, 1949, p. 163).
Se glisser derrière. On annonça une visite : je me glissai derrière le paravent (DUKAS, Ourika, 1824, p. 52). Je me glisse derrière une haie de verveine (G. LEROUX, Parfum, 1908, p. 122).
Se glisser entre, parmi, au milieu de. Même au milieu des ennemis les plus acharnés des blancs, il pouvait se glisser un espion (SUE, Atar Gull, 1831, p. 28). Gamelin, s'étant glissé dans un de ces groupes, entendit que Marat venait d'être assassiné (A. FRANCE, Dieux ont soif, 1912, p. 96). Des groupes se formaient au coin des rues, des gens de mauvaise mine se glissaient entre les badauds (GREEN, Journal, 1936, p. 60).
Se glisser sous/dans les draps; se glisser dans le lit. Il se glissa dans les draps. Leurs jambes se mêlèrent (ARAGON, Beaux quart., 1936, p. 284). Toute nue dans sa chemise de nuit, elle se glissa dans le lit auprès de sa petite sœur Yvonne (ROY, Bonheur occas., 1945, p. 106). Elle se glissa sous les draps et se serra contre lui sans un mot (BEAUVOIR, Mandarins, 1954, p. 25).
Au fig. Se glisser (dans, sous). S'insinuer, s'introduire subrepticement. La volupté se glisse partout, elle se glisse sous le cilice et sous la haire; elle s'était glissée jusque dans les agapes des festins des premiers chrétiens (CHÊNEDOLLÉ, Journal, 1823, p. 122). Des réclames se glissaient, en forme de recommandations et de conseils (ZOLA, Argent, 1891, p. 185) :
19. Le peuple n'avait pas de pain, le pays était un polygone d'où partaient des boulets; l'intérieur était rongé par le fédéralisme; la trahison se glissait dans les armées, sous les uniformes de Wimpfen et de Custine.
GOZLAN, Notaire, 1836, p. 61.
[L'idée dominante est celle de propagation] L'esprit d'une funeste philosophie s'étoit glissé dans tous les ordres du clergé (BONALD, Législ. primit., t. 1, 1802, p. 217). La pestilence hitlérienne qui se glissait partout (AMBRIÈRE, Gdes vac., 1946, p. 309) :
20. — Le charlatanisme est insolent et corrupteur, et il a donné de tels exemples dans notre siècle et a mené si grand bruit du tambour et de la baguette sur la place publique, qu'il s'est glissé dans toute profession...
VIGNY, Serv. et grand. milit., 1835, p. 148.
En partic., sens passif. On s'explique aisément comment ces erreurs se sont glissées dans la science (Hist. gén. sc., t. 3, vol. 1, 1961, p. 316).
Impersonnellement. Il s'est glissé beaucoup de fautes dans cet ouvrage (Ac.). Il s'était glissé quelques erreurs dans la narration d'Hermann (ABOUT, Roi mont., 1857, p. 6). Il s'était glissé dans ma version d'involontaires réminiscences (BEAUVOIR, Mém. j. fille, 1958, p. 155).
II. — Emploi trans. Qqn glisse qqc.
A. — Faire entrer, faire pénétrer, faire passer quelque chose doucement et adroitement :
21. Nul n'aurait su baigner, masser, parfumer Son Altesse (...); nul, éclater en admiration comme lui, sur la personne du duc Charles, presser sa bottine contre son cœur, s'extasier de ses bras, de ses jambes (...) : sans compter que le maraud était unique à glisser un clystère, tailler les cors et les durillons...
BOURGES, Crépusc. dieux, 1884, p. 68.
Glisser qqc. dans. Glisser un billet dans une enveloppe; glisser un œillet dans sa boutonnière. Le diable amusé le regarde glisser sans bruit la petite clef dans la serrure (GIDE, Faux-monn., 1925, p. 974). Il glissa dans son browning un chargeur de huit balles (VAN DER MEERSCH, Empreinte dieu, 1936, p. 202) :
22. Il retourna le champignon, l'examina, le sentit, trancha avec son couteau la partie du pied piquée des vers, chassa la terre qui y adhérait d'un souffle aussi précautionneux que s'il eût débarrassé d'un moucheron la joue d'un enfant, et le glissa dans son carnier.
CHÂTEAUBRIANT, Lourdines, 1911, p. 26.
Glisser qqc. sous. Glisser le courrier sous la porte. Un soir qu'ils se rendaient au théâtre, et que François, à son habitude, était assis dans l'auto entre ses amis, mal installé et cherchant à se faire un peu de place, il glissa son bras sous celui de Mme d'Orgel (RADIGUET, Bal, 1923, p. 112). La servante glissa un réchaud sous son lit (MAURIAC, Vie Racine, 1928, p. 41). Schneider lui soulève la tête sans un mot et glisse une couverture pliée en quatre sous sa nuque (SARTRE, Mort ds âme, 1949, p. 232) :
23. Le Grec fit signe à trois des plus robustes, qui glissèrent leurs leviers sous la plus grosse masse de rocher. Leurs muscles saillaient comme des cordes sur leurs bras maigres, et ils pesaient de tout leur poids au bout de leur barre de fer.
GAUTIER, Rom. momie, 1858, p. 162.
Pop. Glisser un patin. ,,Donner un baiser sur la bouche avec introduction de la langue`` (CARABELLI, [Lang. pègre]).
B. — Faire entrer, faire pénétrer, faire passer quelque chose discrètement ou furtivement. Glisser qqc. dans qqc.; glisser qqc. à qqn.
1. [Le compl. d'obj. désigne une chose concr.] Glisser une pièce de monnaie dans la main d'un pauvre. Achetaient-ils des fruits, le fruitier leur glissait toujours une figue pourrie, des raisins gâtés, par en-dessous (ARAGON, Beaux quart., 1936, p. 32). Il ne lui aurait pas fallu longtemps pour découvrir qui lui avait glissé un bout de papier dans la poche (SIMENON, Vac. Maigret, 1948, p. 36) :
24. Le lendemain matin, quand il la quitta, elle lui glissa dans les mains une enveloppe, en chuchotant : — Dehors, tu liras cela dehors. Pas ici, je t'en prie.
ARLAND, Ordre, 1929, p. 332.
2. [Le compl. d'obj. désigne une chose abstr.] Glisser une clause dans un contrat (Ac.). Dans la lettre que je t'avais écrite en te renvoyant son volume, je t'y avais glissé deux phrases louangeuses un peu exagérées (FLAUB., Corresp., 1852, p. 405). Il vient un moment dans la vie (...) où le professeur fidèle se demande s'il ne va pas glisser dans les déclinaisons latines quelques cas nouveaux (BRASILLACH, Corneille, 1938, p. 430) :
25. Et, par une coquetterie de peintre qui soigne sa mise en page, Debussy glisse, dans les dernières mesures [de Feux d'artifice], quelques notes de la Marseillaise...
CORTOT, Mus. fr. piano, 1930, p. 44.
a) En partic.
Dire, communiquer quelque chose en confidence ou en cachette :
26. ... Monsieur de Coëtquidan, je vous glisse un tuyau royal. Ce volume-là est actuellement en vente, dépareillé, chez Champion, je viens de le voir sur le catalogue.
MONTHERL., Célibataires, 1934, p. 893.
Glisser qqc. à l'oreille à qqn. La vieille leur ayant glissé quelques mots à l'oreille, ils m'embrassèrent les mains à leur tour (THARAUD, Fête arabe, 1912, p. 218).
Glisser qqc. dans l'oreille de qqn. Une voisine entra tête nue, nous souhaita le bonsoir d'un air apprêté, glissa dans l'oreille de ma mère deux mots mystérieux, et repartit aussitôt (COLETTE, Mais. Cl., 1922, p. 129).
Dire quelque chose incidemment, sans insister; dire quelque chose sans avoir l'air d'y toucher. Vous devriez glisser deux mots de cela au père, mon cher comte, vous qui êtes si bien dans la maison (DUMAS père, Monte-Cristo, t. 2, 1846, p. 244). De temps en temps, il glissait adroitement dans la conversation une idée que les autres développaient (RENARD, Journal, 1893, p. 182).
Glisser que. Voulant me faire reconnaître le terrain (...) il me pria de le parcourir avec lui, ne disant pas un mot des limites ni des restrictions, trouvant le moyen de glisser adroitement que les soldats que je voyais n'étaient autres que la garde ordinaire du gouverneur (LAS CASES, Mémor. Ste-Hélène, t. 2, 1823, p. 505).
Insinuer, suggérer adroitement. Il glissait insidieusement la réponse dans sa façon de poser la question (MOUNIER, Traité caract., 1946, p. 52).
b) Glisser un regard, un coup d'œil (vers qqn ou qqc.). Regarder sans insister, avec discrétion ou à la dérobée. Joseph se gratte la nuque, glisse vers moi un regard sournois... et il dit : — Ça... Je n'en sais rien (MIRBEAU, Journal femme ch., 1900, p. 276). Il glissa vers moi un coup d'œil mélancolique et flatteur (COLETTE, Mais. Cl., 1922, p. 72). Il retira sa main, glissa vers Antoine un coup d'œil malicieux, et se mit à descendre l'escalier (MARTIN DU G., Thib., Consult., 1928, p. 1066).
REM. 1. Glissage, subst. masc. ,,Opération qui consiste à faire descendre sur les glissoirs le long des pentes, les bois abattus`` (Forest. 1946). 2. Glissance, subst. fém., techn. routière. La glissance d'une route est sa susceptibilité à faire apparaître, au contact pneu-route, un coefficient de frottement plus ou moins élevé (A. HERMANT, Lancelot 1937, éd. de la Nouv. revue crit., 1939, p. 273).
Prononc. et Orth. : [glise], (il) glisse [glis]. Ds Ac. 1694-1932. Étymol. et Hist. A. Intrans. 1. fin du XIIe s. glicier « se déplacer d'un mouvement continu, volontaire ou non, sur une surface lisse ou le long d'un autre corps, par une impulsion donnée » (GUI DE CAMBRAI, Vengement Alixandre, éd. B. Edwards, 1516); en partic. 1530 glisser sur la glace (PALSGR., p. 721a); 2. début du XVIe s. « avancer comme en glissant » (FOSSETIER, Cron. Marg., ms. Bruxelles 10511, VII, IV, 13 ds GDF. Compl.); 3. 1671 « ne pas approfondir; ne pas insister » (Mme DE SÉVIGNÉ, Lettres, éd. R. Duchêne, t. 1, p. 175); 4. 1680 « ne faire qu'une impression faible ou nulle sur quelqu'un » (ID., ibid., t. 2 p. 976). B. Trans. 1. ca 1320 glicier « pousser quelqu'un ou quelque chose » (WATRIQUET DE COUVIN, Dits, 386, 162 ds T.-L.); 2. 1636 « faire passer, introduire adroitement ou furtivement quelque chose » (MONET). Issu du croisement de l'a. fr. gliier « glisser » (XIIIe s. ds T.-L., GDF.; de l'a. b. frq. « id. »; cf. le m. néerl. gliden, m. b. all. gliden, m. h. all. glîten, all. gleiten « id. ») et de glacier (v. glacer), attesté en a. fr. et en m. fr. au sens de « glisser » (XIIe s. ds T.-L.). Fréq. abs. littér. : 5 670. Fréq. rel. littér. : XIXe s. : a) 5 107, b) 8 303; XXe s. : a) 8 856, b) 9 980.
DÉR. Glisseur, -euse, subst. a) Celui, celle qui glisse sur la glace. Des glisseurs habiles (Lar. 19e). Les glisseurs et les patineurs (LITTRÉ). P. métaph. Plus d'une fois je m'en rassasiai durant ces jours calamiteux (...) lorsque la glisseuse bergeronnette pousse un cri aigu vers les vermisseaux que son bec n'atteint plus (JAMMES, Rom. du lièvre, 1903, p. 32). b) Bateau glisseur. Synon. de hydroglisseur. [], fém. [-ø:z]. 1res attest. a) 1636 « personne qui glisse sur la glace » (MONET), attest. isolée, de nouv. 1800 (BOISTE), b) 1918 « hydroglisseur » (Lar. mensuel, mai, IV, 448, légende ds QUEM. DDL t. 16), 1920 bateau glisseur (Lar. mensuel, mars, V, 63 b, ibid.); du rad. de glisser, suff.-eur2.
BBG. — CHAUTARD (É). La Vie étrange de l'arg. Paris, 1931, p. 595. - GUERLIN DE GUER (C.). Notes de dialectol. pic. et wallonne. R. du Nord. 1934, t. 20, pp. 29-39.

glisser [glise] v.
ÉTYM. V. 1380; glicier, av. 1191 (sens I, 1.); croisement de l'anc. franç. glier, gliier, d'un francique glîdan, avec glacier, forme anc. de glacer.
———
I V. intr.
A
1 a (Sujet n. de personne). Se déplacer d'un mouvement continu, volontaire ou non, sur une surface lisse ou le long d'un autre corps, par une impulsion donnée ou par l'effet de la pesanteur. || Il empoigna la corde et se laissa glisser jusqu'au sol. Affaler (s'), couler. || Glisser sur une pente raide (→ Couler, cit. 21), glisser à écorche-cul. || Glisser sur la glace avec des patins ( Patiner), sur la neige avec des skis ( Skier). || Vêtements antiglisse, qui évitent à un skieur de glisser sur la piste, lors d'une chute.(Mil. XVIe). Perdre l'équilibre en glissant. || Glisser dans la boue (→ Chaussure, cit. 4), sur le pavé mouillé, sur un parquet ciré, sur une peau de banane. || Personne évanouie (cit. 18) qui glisse et s'affaisse. Tomber.(Par métaphore). || Se laisser glisser : se laisser aller. (Le sujet désigne la partie du corps en contact). || Son pied a glissé (→ Fange, cit. 3). || Le pied lui a glissé. Manquer.
1 Et Rodolphe, insensiblement, se laissait glisser du tabouret jusqu'à terre (…)
Flaubert, Mme Bovary, II, IX.
2 D'assez grand matin nous eûmes le malheur de perdre un homme, qui tomba à la mer. C'était (…) l'un des meilleurs matelots que possédât la goélette. En passant sur l'avant, le pied lui glissa, et il tomba entre deux quartiers de glace pour ne jamais se relever.
Baudelaire, Trad. E. Poe, les Aventures d'A. Gordon Pym, XVII.
3 (…) j'essayai de dégager ma main de celle de mon père; lui, croyant que j'avais glissé, me serra plus fort.
Alphonse Daudet, le Petit Chose, Les babarottes.
4 (…) la piscine où notre roi Agamemnon, le père d'Électre, glissa revenant de la guerre, et se tua, tombant sur son épée.
Giraudoux, Électre, I, 1.
5 L'outrage appelle la majesté. Dans la rue, les plus dignes sont ceux qui viennent de glisser sur du crottin.
Giraudoux, Électre, II, 6.
Absolt (vieilli). Faire une, des glissades. || « Ils manquent l'école pour aller glisser » (Littré).
b (Sujet n. de chose). || Le terrain, le sol a glissé. Glissement.Voiture qui glisse sur le verglas. Déraper.Curseur qui glisse dans sa coulisse. Coulisser. || Encensoir (cit. 1) qui glisse sur sa chaînette. || Une larme glissa sur sa joue. Rouler. || Faire glisser qqch. le long de…, sur…
6 Nous frappons à une grosse porte qui aussitôt glisse dans ses rainures et s'ouvre.
Loti, Mme Chrysanthème, III.
Spécialt (l'objet devant normalement adhérer).
7 De sa blanche et débile main, elle pousse un rabot sur la planche; le rabot glisse et ne mord point.
Rousseau, Émile, V.
8 Ils (les cerfs) se cabraient contre le tronc des arbres pour atteindre les hautes lianes des lierres, leurs pinces glissaient en éraflant l'écorce lisse (…)
M. Genevoix, la Dernière Harde, p. 29.
(Sujet n. abstrait). || Glisser comme une lame sur une cuirasse (cit. 4).
9 Je ne peux plus lire que les livres qui me font travailler. Sur les autres, ma pensée glisse comme une charrue sur du marbre. J'aime labourer.
A. de Vigny, Journal d'un poète, p. 89.
Faire glisser les épaulettes (cit. 1) d'une combinaison (→ Entrevoir, cit. 5). || Vêtements trop larges qui flottent (cit. 8) et glissent d'eux-mêmes. || Chemise (cit. 2) qui glisse de l'épaule à la hanche.
10 Mais dès que Bouboule, d'un tour d'épaules, avait laissé glisser jusqu'à la taille son kimono, personne ne riait plus.
Colette, Belles saisons, p. 131.
(1671). Le sujet désigne un objet lisse. Échapper, tomber. || Le savon glisse des mains, glisse dans la main. || Le verre m'a glissé des mains. || Manche de fléau (cit. 1) poli par l'usure, qui glisse dans les mains.Loc. fig. (Mil. XVIe). Glisser des mains de qqn, lui échapper.
11 N'avez-vous pas été bien surpris, Monsieur, de vous voir glisser des mains M. de Vardes, que vous teniez depuis dix-neuf ans ?
Mme de Sévigné, 915, 28 mai 1683.
12 Non seulement le pouvoir avait glissé des mains du roi, mais il n'était point tombé dans celles de l'Assemblée; il était par terre, aux mains du peuple…
Taine, les Origines de la France contemporaine, Révolution, III, t. I, p. 3.
(Sujet n. de chose ou de personne; abstrait). Échapper.Glisser entre les doigts comme une anguille, une couleuvre, un poisson. Filer (→ Farceur, cit. 8).
13 Ma fille me prie de vous mander le mariage de M. de Nevers : ce M. de Nevers, si difficile à ferrer, ce M. de Nevers si extraordinaire, qui glisse des mains alors qu'on y pense le moins, il épouse (…)
Mme de Sévigné, 119, 10 déc. 1670.
14 Il faut voir dans nos grands combats, Ce corps si souple et si fragile, Ainsi qu'une couleuvre agile, Fuir et glisser entre nos bras.
A. de Musset, Premières poésies, Madrid.
Se mouvoir, fonctionner par glissement. || Huiler, graisser, lubrifier les rouages d'un mécanisme pour qu'ils glissent mieux.Mar. || Faire glisser la chaîne de l'ancre. Riper.
2 (Déb. XVIe). Par anal. Avancer comme en glissant, de manière douce, progressive et régulière. || Cygne (cit. 4), embarcation (cit. 1) qui glisse au fil (cit. 31) de l'eau (→ Amer, cit. 2). || Boa (cit. 1) qui glisse parmi les pierres. Ramper.
15 Entre le laurier-rose et le lotus jaseur Glisse amoureusement le grand Cygne rêveur (…)
Rimbaud, Poésies, V, IV.
16 Elle glisse plus qu'elle ne marche.
R. Rolland, Liluli, p. 7.
17 Il y a des jours où je suis si las que, lorsque je traverse une rue et qu'un tramway en pleine vitesse glisse vers moi, j'ai envie de me laisser tomber entre les rails.
Valery Larbaud, Barnabooth, 7 octobre.
(1607). Avancer, passer, pénétrer de manière régulière, progressive. || Les rayons de soleil, les rayons de lune glissent à travers le feuillage (→ Effiler, cit. 1; enchâsser, cit. 3).(Sujet n. de personne). || Glisser entre les rangs, à travers la foule (→ Cour, cit. 3; engorger, cit. 3).
18 Mais tout à coup j'ai vu dans la nuit sombre Une forme glisser sans bruit.
A. de Musset, Poésies nouvelles, « Nuit de décembre ».
19 Elle (…) vit une lumière éclatante qui glissait par les fentes de la porte (…)
France, Thaïs, II, p. 106.
20 Ô Thébains, la guerre, entre tant d'avantages, recouvre le corps de la femme d'une cuirasse d'acier et sans jointure où ni le désir ni la main ne peuvent glisser (…)
Giraudoux, Amphitryon 38, III, 1.
(1580). Par métaphore (sujet humain). Passer doucement, graduellement, insensiblement. || Glisser du réel au fictif (cit. 2). || La majorité gouvernementale glisse vers la droite.
21 Élisabeth (…) cessant d'être une fille, et devenant une jeune fille, glissait de l'âge où les garçons se moquent des filles à l'âge où les jeunes filles émeuvent les garçons.
Cocteau, les Enfants terribles, p. 75.
22 À qui s'étonne que plus d'un écrivain glisse à la morale, aux affaires, à la politique, l'on doit répondre qu'il s'enfuit comme un émigrant parce qu'il n'a rien à manger.
J. Paulhan, les Fleurs de Tarbes, p. 31.
3 (Av. 1750). Sujet n. de personne. Se laisser aller. Abandonner (s'). || Glisser sur une mauvaise pente (→ Enchaînement, cit. 4). || Glisser dans le vice (→ Encore, cit. 7), dans les abîmes du désespoir ( Sombrer).Fam. Se laisser glisser : se laisser aller; spécialt, se laisser mourir.
23 (…) je ne pouvais souffrir l'idée que cet homme extraordinaire glissât jamais dans le ridicule.
G. Duhamel, Chronique des Pasquier, III, IX.
24 (…) je me demandais si je ne courais pas quelque risque personnel, si je ne glissais pas à une sorte de complicité en n'ayant pas l'air de réprouver tout de suite son entreprise.
Céline, Voyage au bout de la nuit, p. 286.
4 (Mil. XVIe). Sujet n. de chose. Passer légèrement (sur qqch.). Passer. || Frisson qui glisse sur la chair (cit. 22). || Reflets qui glissent sur la glace et s'effacent (cit. 19). Courir.
25 (…) un ciel immense où glissent les nuages (…)
M. Barrès, la Colline inspirée, p. 8.
26 Ses doigts, glissant doucement sur les touches, esquissèrent un air de Schumann.
A. Maurois, Bernard Quesnay, V.
27 Le vent tire en gémissant des nuées pesantes dont l'ombre glisse sur la plaine.
F. Mauriac, le Nœud de vipères, XV.
Par métaphore (le sujet désigne une expression du visage, le regard…) Passer rapidement. Effleurer. || Regard qui glisse sur les choses (→ Auner, cit. 3; chair, cit. 32; espace, cit. 14).
28 (…) un sourire glissait sur ses lèvres sévères.
France, Les dieux ont soif, p. 153.
5 (1671). Sujet n. de personne. Ne pas approfondir, ne pas insister. || N'insistons pas, glissons.
29 (…) je sens tous les jours ce que vous me dites une fois, qu'il ne fallait point appuyer sur ces pensées. Si l'on ne glissait pas dessus, on serait toujours en larmes (…)
Mme de Sévigné, 141, 3 mars 1671.
30 Glissez, mortels, n'appuyez pas.
P. Ch. Roy, Quatrain sur les Patineurs (→ Appuyer, cit. 29).
31 Le lieu, le temps, l'auditoire à ma dévotion, et la magie d'une lecture adroite assurant mon succès, je glissais sur le morceau faible en appuyant sur les bons endroits (…)
Beaumarchais, le Barbier de Séville, Lettre… sur la critique.
32 Il ne faut pas glisser trop légèrement sur une matière aussi importante.
Chateaubriand, le Génie du christianisme, I, III, III.
6 (Fin XVIIe, Mme de Sévigné). || Glisser sur (sujet n. de chose). Ne faire qu'une impression faible ou nulle sur (qqn). → Effleurer, cit. 11. || Un être sur qui tout glisse. Indifférent, insensible (→ Émousser, cit. 7). || Les injures glissent sur eux. → Corps, cit. 40.
33 Les caractères vifs, sur lesquels glissent les peines légères, sont ceux qui résistent le moins aux grands chagrins.
Bernardin de Saint-Pierre, Paul et Virginie, p. 145.
34 Les objets glissaient sur moi inaperçus ou méprisés (…)
Stendhal, Souvenirs d'égotisme, I.
B (Sans compl. prép.).
1 Être glissant (surface, sol). || Attention, il y a du verglas, ça glisse ! || Faites attention, ce parquet glisse. || Cette neige fraîche ne glisse pas.
2 Avoir une adhérence faible ou nulle; être capable de glisser (A., 1.) facilement. || Ces skis glissent mieux. Glisse, n. f.
Loc. fig. et fam. Ça glisse, Alice !
C (Emploi trans. de A., 1.). Le compl. désigne la surface sur laquelle qqn glisse. Fam. || Glisser la pente à toute allure. — ☑ Loc. fig. (argot). Glisser la pente, la glisser : mourir.
———
II V. tr. (V. 1320)
1 Faire passer, introduire adroitement ou furtivement (qqch.) [avec un compl. second introduit par une prép. : dans, sur, sous, entre…] Insinuer, passer. || Glisser un levier sous une pierre. Engager. || On lui glissa une sonde dans la vessie (→ Boutonnière, cit. 2). || Glisser du courrier (cit. 8) sous la porte, un billet dans une enveloppe. || Glisser une main dans sa poche, deux doigts dans son gilet (→ Craindre, cit. 12; défaire, cit. 6). || Glisser un larcin sous son manteau. Dissimuler.
35 (…) avec une crispation de terreur, comme si l'on eût glissé un aspic entre sa plate poitrine d'enfant et son corset.
Barbey d'Aurevilly, les Diaboliques, « Le dessous de cartes… », I.
36 Glisser un mot furtif dans une tendre main (…)
Hugo, les Feuilles d'automne, XVIII.
37 L'abbé glissa ses mains sous sa ceinture.
Martin du Gard, les Thibault, t. I, p. 12.
38 Au revoir, madame, dit Daniel en glissant un billet dans la main de la vieille. Nous vous remercions de votre aimable hospitalité.
Sartre, le Sursis, p. 39.
(1676, Mme de Sévigné). Fig. || Glisser insidieusement une clause dans un contrat. || Glisser une pointe sous des fleurs (cit. 13), un trait d'ironie dans un compliment (→ Aigu, cit. 14). || Glisser un regard entre les cils.
39 Ce serait d'abord une assez sotte chose que de glisser des discussions politiques dans un récit qui doit ou amuser ou intéresser.
Balzac, la Fausse Maîtresse, Pl., t. II, p. 12.
40 Le cabotin diplomate avait même soin de faire toujours glisser dans les réclames une phrase poétique sur la fascination de sa personne et la sensibilité de son âme.
Flaubert, Mme Bovary, II, XV.
(Le compl. désigne l'expression par la parole). || Glisser un mot dans l'oreille de qqn.
41 Est-ce que jamais vous n'avez eu un secret à lui dire et n'avez pour cela soulevé ses boucles, glissé le secret dans l'oreille, puis rabattu la boucle sur l'oreille avec une petite tape ?
Montherlant, le Songe, II.
(Abstrait). Faire pénétrer. || Glisser le doute dans l'esprit de qqn.
2 Glisser qqch. à : donner, faire passer discrètement. → Confiture, cit. 1. — Spécialt. || Glisser un mot, une phrase, des confidences à qqn, à l'oreille de qqn. Dire, souffler (→ Calomnie, cit. 5).
tableau Verbes exprimant une idée de mouvement.
——————
se glisser v. pron.
ÉTYM. (Mil. XVIe).
(Sujet n. d'être animé). Passer, pénétrer adroitement ou subrepticement quelque part. Couler (se), entrer, faufiler (se), insinuer (s'), introduire (s'), mettre (se), pénétrer. || Se glisser comme une souris dans un trou, par un interstice, une fissure (→ Étouffer, cit. 26). || Se glisser dans ses draps (→ Déborder, cit. 16), sous une tonnelle (→ Assourdir, cit. 7). || Gens effrayés (cit. 11) qui se glissent le long des maisons. || Galant qui se glisse dans la chambre d'une fille (→ Escalade, cit. 3). || Se glisser entre, parmi, au milieu de, derrière…
42 (…) Dans le lit il se glisse
En grand silence (…)
La Fontaine, Contes, « Mandragore ».
43 J'ai couru vers le temple, où nos Grecs dispersés
Se sont jusqu'à l'autel dans la foule glissés.
Racine, Andromaque, V, 3.
44 Tantôt, humble serpent, il se glisse sous l'herbe.
Boileau, le Lutrin, V.
45 Comme elle passait la porte de l'hôtel, en se glissant pour attirer moins l'attention, la patronne la héla.
Montherlant, le Songe, XVII.
46 Elle s'était glissée derrière un mur au moment où il allait la saisir (…)
J. Giono, le Chant du monde, II, 5.
(Mil. XVIe). Sujet n. abstrait. S'insinuer. || L'espoir (cit. 10) se glisse dans le cœur. || Un soupçon s'était glissé en moi. || Habitude qui se glisse et s'enracine en nous (→ Endurance, cit. 2). || Une erreur s'est glissée dans le texte.
47 (Caquets) Qui rampent cautement, se coulent et se glissent
Au cœur des auditeurs (…)
Ronsard, Pièces posthumes, Poèmes inachevés.
48 (…) de même, dit ce Père (saint Bernard), que le reptile s'insinue et se coule subtilement, aussi le péché se glisse-t-il comme imperceptiblement dans une conscience où la passion et l'erreur lui donnent entrée.
Bourdaloue, Sermon sur la fausse conscience.
49 Ce mot qui faisait si bonne figure à la troisième ligne de votre chapitre, ce mot que vous considériez avec tendresse, par quelle malice féroce est-il revenu se glisser moins de trois lignes plus bas, avant même la fin de la phrase ?
G. Duhamel, Discours aux nuages, p. 25.
Impers. || Il s'est glissé quelques erreurs dans un texte, quelques fautes dans l'impression d'un livre (→ Errata, cit.; feu, cit. 74).
50 (…) de tout temps, il s'est glissé parmi les hommes de belles imaginations, que (…)
Molière, le Malade imaginaire, III, 3.
——————
glissé, ée p. p. adj.
(Sens II.). || Courrier glissé sous la porte. || Mots glissés en confidence. (1752). Concret. Chorégr. || Un pas glissé. N. m. || Un glissé. Glissade; coulé.
CONTR. Approfondir, appuyer, enfoncer, frotter; appesantir (s'), insister.
DÉR. et COMP. Glissade, glissage, glissance, glissando, glissant, glisse, glissement, glisseur, glissière, glissoir, glissoire. Antiglisse.

Encyclopédie Universelle. 2012.