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affectation

1. affectation [ afɛktasjɔ̃ ] n. f.
• 1413; du lat. médiév. affectatus « destiné, affecté » 2. affecter
1Destination à un usage déterminé. Décréter l'affectation d'un immeuble à un service public. Affectation d'une somme à un budget. attribution, destination, imputation.
2(1899; d'ab. milit.) Désignation à une unité militaire, à un poste, à une fonction. Affectation spéciale : mobilisation d'un réserviste dans une activité d'ordre économique ou administratif. Affectation de défense : affectation dans un emploi civil d'un citoyen assujetti au service national, mais non soumis aux obligations du service militaire. — Par ext. Rejoindre son affectation, le poste auquel on a été affecté.
3Math. Action d'affecter (3., 3o), de donner à une variable une valeur, un indice.
⊗ CONTR. Désaffectation. affectation 2. affectation [ afɛktasjɔ̃ ] n. f.
• 1541; lat. affectatio « recherche, poursuite de »
1Vx Vif désir; fait de rechercher par-dessus tout. « Cette affectation que quelques-uns ont de plaire à tout le monde » (La Bruyère).
2(mil. XVIIe ) Action d'adopter (une manière d'être ou d'agir) de façon ostentatoire, mais seulement en apparence. étalage, exagération, imitation, simulation. Affectation de vertu. pruderie. Affectation de piété. hypocrisie, pharisaïsme, tartuferie. « Par affectation de bon sens » (Flaubert). « On n'échappe pas au ridicule par une affectation de gravité » (Bernanos).
3Absolt Manque de naturel, de simplicité. afféterie, comédie, pose, recherche. « L'affectation dans le geste, dans le parler et dans les manières » (La Bruyère) . Un style plein d'affectation. préciosité.
⊗ CONTR. Naturel, simplicité.

affectation nom féminin (latin affectatio, attribution) Destination, application de quelque chose à un usage déterminé : Affectation de crédits à la construction d'une école. Action d'assigner un poste ; ce poste lui-même : Rejoindre son affectation. Action de doter une grandeur d'un signe qui en modifie la valeur. Droit Acte ou fait ayant pour conséquence d'incorporer un bien au domaine public. Informatique Attribution d'une valeur à une variable. Sylviculture Dans une forêt traitée en futaie régulière, surface qui doit être régénérée pendant un temps déterminé, appelé période. ● affectation (expressions) nom féminin (latin affectatio, attribution) Affectation hypothécaire, acte par lequel on hypothèque un ou plusieurs immeubles pour garantir une créance. Affectation de défense, attribution d'un emploi, ou emploi donné, dans le service de défense. Affectation de mobilisation, attribution d'un emploi, ou emploi donné à un militaire d'active ou de réserve dans une unité mobilisée. Affectation spéciale, affectation donnée, dans la disponibilité et la réserve du service militaire, à certains personnels, en raison de leur situation civile et de leurs capacités professionnelles, pour faire partie des corps spéciaux ou de cadres d'assimilés spéciaux. ● affectation (synonymes) nom féminin (latin affectatio, attribution) Destination, application de quelque chose à un usage déterminé
Synonymes :
- attribution
- imputation
Contraires :
- désaffectation
Action d'assigner un poste ; ce poste lui-même
Synonymes :
- nomination
Informatique. Attribution d'une valeur à une variable.
Synonymes :
- assignation
affectation nom féminin (de affecté) Manière de se comporter qui manque de naturel, de sincérité : Parler avec affectation.affectation (synonymes) nom féminin (de affecté) Manière de se comporter qui manque de naturel, de sincérité
Synonymes :
- afféterie
- embarras
- étalage
- façons
- manières
- mines
- ostentation
- prétention
- simagrées
Contraires :
- aisance
- naturel
- simplicité
- sincérité
- spontanéité

affectation
n. f.
d1./d Destination (d'une chose) à un usage. Affectation d'une somme à telle dépense.
d2./d Désignation à un poste, une fonction. L'affectation d'un militaire.
d3./d (Afr. subsah.) Syn. de mutation (sens 2). Son directeur a demandé son affectation.
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affectation
n. f.
d1./d Imitation, faux-semblant. Affectation de vertu.
d2./d Manque de naturel, de simplicité. Il parle avec affectation. Syn. afféterie.

I.
⇒AFFECTATION1, subst. fém.
Action d'affecter; résultat de cette action (cf. affecter1).
A.— Rare, vieilli. Affectation de qqc., à qqc. Action de montrer une grande prédilection pour (une chose) (cf. affecter1 A) :
1. L'herbe croît au milieu des allées, et, dans ces mêmes allées abandonnées, les arbres sont taillés artistement selon l'ancien goût qui régnait en France; singulière bizarrerie que cette négligence du nécessaire et cette affectation de l'inutile!...
G. DE STAËL, Corinne, t. 1, 1807, p. 246.
2. La politique, qui laissait percer des ombres sous l'enjouement des convives, n'éclata qu'à la fin comme un orage. Un mot de quelqu'un contre l'affectation à l'Empire rompit la discussion philosophique qui s'était maintenue jusque-là : Cabanis et Chénier eurent de l'éloquence. Des accents tout nouveaux m'apportaient les mots de république, de liberté et de patrie.
Ch.-A. SAINTE-BEUVE, Volupté, t. 1, 1834, p. 195.
B.— Action d'afficher une attitude peu naturelle et le cas échéant peu sincère; p. ext., attitude qui manque de naturel ou de sincérité.
1. Emploi abs. :
3. Vallagnosc se renversait mollement sur le canapé. Il avait fermé les yeux à demi, dans une pose de fatigue et de dédain, où une pointe d'affectation s'ajoutait au réel épuisement de sa race.
É. ZOLA, Au Bonheur des dames, 1883, p. 451.
4. Puig m'adressa la parole en catalan. Une affectation à lui, qui veut dire : « c'est le catalan qui est la langue espagnole, et le castillan n'est qu'un patois. »
H. DE MONTHERLANT, La Petite Infante de Castille, 1929, 1920, p. 625.
5. ... toujours et partout, fuir le style poétique, et faire sentir qu'on le fuit, qu'on déjoue la phrase per se, qui, par le rythme et l'étendue, sonnerait trop pur et trop beau, atteindrait ce genre soutenu que Stendhal raille et déteste, où il ne voit qu'affectation, attitude, arrière-pensées non désintéressées. Mais c'est une loi de la nature que l'on ne se défende d'une affectation que par une autre.
P. VALÉRY, Variété 2, 1929, p. 103.
6. Si l'on nous objecte que l'adoption d'un tel système n'est, de la part de cette société, que l'effet d'une affectation — d'un « snobisme », — nous répondrons que, d'abord, cela ne nous est nullement prouvé, du moins d'une manière absolue, l'attachement d'un grand nombre de ses membres aux œuvres produites par ce système nous paraissant offrir des signes indéniables de sincérité; qu'ensuite, en admettant l'affectation, le fait que cette société juge flatteur d'affecter cette esthétique-là et non une autre suffit à classer ses évaluations.
J. BENDA, La France byzantine, 1945, p. 148.
7. Affectation :ce qui est voulu dans la manifestation de notre caractère et de nos affections; mais encore à la condition que ce que nous affectons d'être tienne par quelque côté à notre naturel. L'hypocrisie n'est pas une affectation, mais on peut affecter d'être hypocrite si on l'est déjà, d'être grossier si on l'est déjà, d'être léger si on l'est déjà; on peut même affecter d'être naturel et simple.
ALAIN, Définitions, [Les Arts et les dieux] Paris, Gallimard, 1961 [1951].
Avec affectation :
8. ... comme la fuite de Régina aurait passé pour un rapt si le nom de Saluce y avait été mêlé, Saluce résolut de revenir hardiment à Rome, comme s'il n'en était jamais sorti, de s'y montrer avec affectation dans les lieux publics et au théâtre, et de démentir ainsi, par sa présence, toute participation à l'événement dont le public allait s'entretenir.
A. DE LAMARTINE, Nouvelles Confidences, 1851, p. 206.
Rem. Cette phrase est typique pour le passage du sens A au sens B.
9. Le soir, il arrivait à Sérianne. Il avait acheté en gare l'Humanité qu'il étalait avec affectation devant le nez de son père.
L. ARAGON, Les Beaux quartiers, 1936, p. 298.
Sans affectation :
10. ... il arrive souvent que c'est une recommandation auprès de lui que de le mépriser souverainement, pourvu que ce mépris soit vrai, sincère, naïf, sans affectation, sans jactance.
CHAMFORT, Maximes et pensées, 1794, p. 39.
11. Qu'il cherche ailleurs, ce jeune homme, dans les écrits de ma jeunesse, des invitations à la joie, à cette exaltation naturelle dans laquelle j'ai longtemps vécu; elles abondent. Mais à présent je ne les pourrais réassumer sans affectation. C'est l'affectation qui me rend insupportables tant d'écrits d'aujourd'hui, et parfois même des meilleurs. L'auteur y prend un ton qui ne lui est pas naturel. C'est là ce que je voudrais éviter. La sincérité doit précéder le choix des mots et le mouvement de la phrase; ...
A. GIDE, Ainsi soit-il, 1951, p. 1165.
2. [Suivi d'un compl. nom. (n. abstr.; prép. de, dans)] :
12. Affectation. Dans le langage elle affaiblit la pensée, comme l'affectation dans les manières affaiblit les grâces et la beauté. L'ignorance vaut mieux qu'un savoir affecté.
Dict. des gens du monde, 1818.
13. Faut-il donc s'étonner si, de nos jours encore, on affecte de confondre la philosophie avec la science? Et cette affectation, il faut le dire, ne doit pas être aujourd'hui imputée aux savants, mais aux philosophes.
A. COURNOT, Essai sur les fondements de nos connaissances, 1851, p. 474.
14. ... laissant errer ses grands yeux bruns à droite et à gauche sans fausse modestie et cependant sans affectation de hardiesse, la coquette enfant s'assit auprès de sa mère avec une aisance et une souplesse élégante qui achevèrent d'exaspérer les jalousies de l'entourage.
A. THEURIET, Le Mariage de Gérard, 1875, p. 79.
15. — J'ai lu d'un peu plus près Desprax. De menues choses charmantes. Deux pièces à un ami mort assez audacieuses. De longues choses embêtantes et surtout un déluge de roses et de pièces genre antique, grec, Théocrite (direction Académie française), à grand renfort de « boucs puants » et « d'amours englués ». Cela me le rend très déplaisant, et aussi son affectation d'alexandrins très classiques, très faciles et très creux — entremêlés d'alexandrins brisés, à enjambements, non moins faciles.
ALAIN-FOURNIER, J. RIVIÈRE, Correspondance, lettre de A.-F. à J. R., févr. 1906, p. 302.
16. — Ah! vraiment, vous supprimez la garde du château Monsieur Rouletabille! et bien, vous m'en voyez toute réjouie, non point qu'elle m'ait jamais gênée! fait Mrs Edith avec une affectation de gaieté (affectation de peur, affectation de gaieté, je trouve Mrs Edith très affectée et, chose curieuse, elle me plaît beaucoup ainsi), au contraire, elle m'a tout à fait intéressée à cause de mes goûts romanesques...
G. LEROUX, Le Parfum de la Dame en noir, 1908, p. 113.
17. Il avait repris avec moi son affectation d'indifférence. Mais, dès cette époque, le mot affectation était peut-être impropre. C'était de l'indifférence vraie.
R. ABELLIO, Heureux les pacifiques, 1946, p. 119.
18. Bleuler a décrit leur « rigidité affective », qui laisse une impression d'affectation, de formalisme, de solennité ou de pédantisme. Kretschmer parle de leur aristocratisme : recherche d'une langue précieuse, affectation dans les soins du corps, ou dans l'habillement, maniérisme.
E. MOUNIER, Traité du caractère, 1946, p. 366.
3. [Suivi d'un inf.]
Affectation à, mettre de l'affectation à :
19. Elle, ne paraissait pas autre que de coutume. Elle manœuvrait, jacassait, cousait comme d'habitude. Il remarqua seulement une certaine affectation à ne pas le voir.
J.-K. HUYSMANS, Les Sœurs Vatard, 1879, p. 276.
20. Ponctuel et dur dans le service, il affectait une ignorance systématique des incidents de famille pouvant plus ou moins troubler la vie du personnel placé sous sa haute direction. Il semblait qu'à ses yeux la pâte humaine dût être exclusivement consommée sous l'espèce administrative. Il mettait de l'affectation à exiger que les congés fussent limités à leur terme réglementaire et sa manière de conduire manquait de bonté.
E. ESTAUNIÉ, L'Ascension de Monsieur Baslèvre, 1919, pp. 7-8.
Affectation de :
21. L'affectation qui est une pédanterie (car j'appelle pédanterie, l'affectation de me parler, hors de propos, d'une robe de Leroy ou d'une romance de Romagnesi, tout comme l'affectation de citer Fra Paolo et le concile de Trente à propos d'une discussion sur nos doux missionnaires); la pédanterie de la robe et du bon ton, la nécessité de dire sur Rossini précisément la phrase convenable, tuent les grâces des femmes de Paris...
STENDHAL, De l'Amour, 1822, p. 208.
22. Je jurerais que ce garçon est un petit roué qui a joué une vilaine comédie. Remarquez cette ostentation, cette affectation de venir le jour, c'est-à-dire dans les meilleures conditions pour être vu.
L.-É. DURANTY, Le Malheur d'Henriette Gérard, 1860, pp. 109-110.
Rem. 1. Sur l'oppos. à/de + inf., voir ces prép. Cette oppos. est celle du subst. précédé de l'art. déf. (ou de son équivalent l'adj. dém.), qui demande la prép. de, et du subst. précédé d'un autre art. (indéf., part.) ou d'un autre adj. pronom. (poss., indéf.), qui demande la prép. à. 2. La règle pourrait aussi se formuler en termes d'équivalence : a) l'affectation de < le fait que (qqn, on, il, etc.) affecte de; b) mettre de l'affectation à < montrer une préférence ostentatoire pour. — Dans le 1er cas (a), affectation est très proche de l'aspect imperf. du verbe correspondant exprimant le déroulement de l'action, et il en garde la constr.; dans le second cas (b), l'idée imperf. a passé dans le verbe introducteur (mettre) ou s'est éteinte, affectation signifiant alors « état de quelqu'un qui affecte », et la prép., par oppos. avec l'usage précédent, est alors à. 3. Sauf dans la loc. mettre de l' (ou son) affectation à, à est obligatoire, l'oppos. est parfois subtile et le choix dépend, chez les usagers qui ont le sens de la lang., de la représentation qu'ils se font de l'affectation avant de recourir à la tournure subst. + inf. 4. Assoc. paradigm. relevées : arrière-pensée (ex. 5), attitude, formalisme, maniérisme (ex. 18), parti-pris, pédanterie (ex. 21), pédantisme, recherche, solennité. L'afféterie est un cas partic. de l'affectation.
II.
⇒AFFECTATION2, subst. fém.
1. Vx. (Correspond à affecter2 I A 1). État d'une personne affectée d'une manière pénible :
1. ... que peuvent signifier pour moi tous ces petits soupirs qui gonflent votre poitrine parfumée, robuste coquette? Et toutes ces affectations apprises dans les livres, et cette infatigable mélancolie, faite pour inspirer au spectateur un tout autre sentiment que la pitié? En vérité, il me prend quelquefois envie de vous apprendre ce que c'est que le vrai malheur.
Ch. BAUDELAIRE, Petits poèmes en prose, La Femme sauvage, 1867, p. 55.
2. Chez Barbey d'Aurevilly. Manières affectées; p. méton. Personne maniérée :
2. Allé chez Ap[olline] où j'ai dîné par accident. Cette petite femme déjà rencontrée est venue roucouler ses affectations.
J. BARBEY D'AUREVILLY, Deuxième Memorandum, 1838, p. 232.
3. J'ai échangé cela pour un dîner avec ma tante, que j'ai trouvée écharpée d'un provincial (...) un bel esprit ridicule. (...) il a accepté toutes mes sornettes, les plus extravagantes. C'est le seul plaisir (plaisir de moquerie solitaire et sérieuse, qui me devient assez familier) que j'aie eu pour me dédommager d'un mauvais dîner entre deux affectations, mâle et femelle.
J. BARBEY D'AUREVILLY, Deuxième Memorandum, 1838 p. 234.
3. Action de modifier une quantité par un coefficient (cf. affecter2 II).
Rem. Dans le discours, la constr. du mot avec ce sens est pratiquement impossible, à cause de la rencontre possible ou obligatoire de 2 compl. introd. par la prép. de. Affecter un salaire d'un certain coefficient deviendrait : affectation d'un salaire d'un certain coefficient, phrase grammaticalement correcte, mais sémantiquement confuse et donc non recevable. D'où le passage de la constr. attendue à la constr. (et quelque peu au sens) de affectation3 :
4. Les salaires des autres catégories professionnelles sont déterminés par l'affectation, au salaire du manœuvre ordinaire, d'un coefficient correspondant aux diverses qualifications professionnelles prévues, soit par la réglementation, soit par des conventions collectives.
Ch. DE GAULLE, Mémoires de guerre, L'Unité, 1956, pp. 577-578.
III.
⇒AFFECTATION3, subst. fém.
DR. ADMIN. (CIVIL OU MILIT.). Décision par laquelle une autorité destine ou assigne quelque chose ou quelqu'un à un usage ou à un emploi précis; fait d'être affecté à un usage ou à un emploi précis.
1. [L'obj. de l'affectation désigne à la fois des choses et des pers.] :
1. Par suite de l'affectation à la 10e armée de tous les moyens disponibles, la 5e armée ne disposera que de moyens restreints.
F. FOCH, Mémoires, t. 2, 1929, p. 157.
2. [L'obj. de l'affectation est une chose] Destination officielle d'une chose à un usage précis.
a) [La chose affectée consiste en sommes d'argent] :
2. Les dépenses vraiment communes et humaines, dépenses pour les travaux publics, pour l'instruction à tous ses degrés, pour l'assistance et l'assurance sociales, ne représentent encore qu'une faible fraction des budgets d'État. Et ce n'est pas seulement par l'affectation des ressources, c'est par la manière de se les procurer que le budget de l'État bourgeois a un caractère de classe.
J. JAURÈS, Études socialistes, 1901, p. 176.
b) [La chose affectée est (plus fréquemment) un immeuble ou une partie d'immeuble] :
3. ... on apportera à la loi de séparation, les trois modifications que l'Église demande :
1. L'orthodoxie des cultuelles.
2. Un règlement plus raisonnable de l'affectation des édifices consacrés au culte.
3. La possibilité pour l'Église de posséder.
M. BARRÈS, Mes Cahiers, t. 12, juill. 1919-juin 1920, p. 180.
P. ext. L'affectation est le fait d'une décision de particulier :
4. ... il a le génie de l'inconfort : où qu'il soit, il semble être de passage : la chambre qu'il occupe prend aussitôt l'aspect d'un campement. Les meubles disparates sont placés n'importe où, et détournés de leur affectation normale. L'accès de la fenêtre est obstrué par une vieille toilette de marbre surchargée de livres; le linge est entassé dans le secrétaire en bois de rose; le fauteuil de bureau, à dossier droit, ne lui sert qu'à suspendre ses foulards, ses cravates.
R. MARTIN DU GARD, Notes sur André Gide, 1951, p. 1385.
c) Emplois spéc.
ADMIN. FORESTIÈRE. ,,Faculté temporaire, accordée à un établissement industriel, de prendre à prix réduit dans les forêts de l'État le bois nécessaire à son exploitation.`` (Lar. 19e).
DR. CANONIQUE. ,,Attribution exclusive d'une place, d'un bénéfice ou d'une prébende à certains sujets.`` (LITTRÉ).
SYLVIC. Aménagement de l'exploitation d'une forêt; ,,division d'une forêt aménagée en futaie, comparable à une sole en agriculture, et dont l'exploitation est différente suivant son âge.`` (Lar. encyclop.).
d) Syntagmes.
Affectation administrative. Affectation d'une chose domaniale à une fin publique :
5. L'affectation administrative, variée dans ses aspects, peut impliquer l'utilisation d'une chose ordinaire : 1° à un service public, que ce service relève ou non de l'administration ayant dans ses attributions la gestion du patrimoine administratif auquel se rattache l'immeuble affecté. Ex. : affectation d'un immeuble du domaine de l'État à un service public d'État; affectation d'un immeuble départemental ou communal à un service public d'État ou réciproquement; 2° à un particulier ou à une société privée, collaborateurs de l'administration pour des œuvres d'intérêt général (par ex. : à des œuvres privées de bienfaisance reconnues d'utilité publique); 3° à une institution d'utilité générale (par ex. affectation d'immeubles communaux aux bourses du travail).
CAP. 1936.
Affectation domaniale. ,,Acte public qui affecte des terrains ou parcelles de terrain, faisant partie du domaine de l'État, au service d'une administration publique.`` (Lar. 19e).
Affectation hypothécaire. ,,Affectation d'un immeuble à la garantie d'une créance.`` (CAP. 1936).
Affectation. Charge qui résulte de l'affectation hypothécaire :
6. Le vendeur ne transmet à l'acquéreur que la propriété et les droits qu'il avait lui-même sur la chose vendue : il les transmet sous l'affectation des mêmes privilèges et hypothèques dont il était chargé.
Code Civil, 1804, p. 397.
Rem. Dans l'ex. 6, affectation relève de affecter3 « donner une destination ». Mais l'idée de « charge » qui apparaît ici permet de conclure, pour cet emploi, à une influence de affecter2 « porter atteinte ». Il semble d'ailleurs possible de noter une autre interférence dans l'ex. 4 de affectation2 dont le cont. appellerait un subst. affection renvoyant, pour le sens comme pour la constr., à affecter2 (« doter d'un modicatif ») : affection, impossible dans cet emploi (et l'idée de modification étant, en outre, déjà contenue dans « coefficient »), est remplacé en tout par le subst. dér. de affecter1 (affection du salaire par un coefficient → affectation au salaire d'un coefficient).
Affectation légale. ,,Affectation administrative rendue obligatoire pour les agents administratifs par une décision expresse de la loi. La principale application de l'affectation légale vise la jouissance gratuite des édifices du culte accordée aux fidèles et aux ministres du culte pour la pratique de leur religion.`` (CAP. 1936).
Affectation spéciale. ,,(Proc.) Détermination par le juge de la somme à consigner par le débiteur saisi à la garantie de la créance du saisissant pour libérer les biens saisis-arrêtés.`` (CAP. 1936).
3. [L'obj. de l'affectation est une pers.] Assignation de quelqu'un à quelque chose (à un emploi, à un service, à un poste, etc.).
a) Dans le domaine de l'admin. civile :
7. Nous avons eu, Larminat et moi, une explication orageuse au sujet de cette affectation de Birault au service des sérums et j'ai pris, devant le vieux, la résolution ferme de supporter le Birault mais de ne lui donner aucune besogne, de le tenir, somme toute, à l'écart du service où il fera simplement figure de parasite.
G. DUHAMEL, Chronique des Pasquier, Le Combat contre les ombres, 1939, p. 117.
b) Dans le domaine de l'admin. milit. :
8. Après un certain nombre d'allées et venues entre Plémobiers et Paris, je fus enfin muté du 8e escadron du train à la 20e section de secrétaires d'état-major casernée à l'École militaire, avec cette affectation particulière : mission militaire en Grèce.
A. BILLY, Introïbo, 1939, p. 169.
P. ext. Poste auquel un homme est affecté :
9. Moi, pour me tâter, elle me proposa certain soir, le livret d'un père de famille de six enfants, qu'était mort qu'elle disait, et que ça pouvait me servir, à cause des affectations de l'arrière. En somme, c'était une vicieuse.
L.-F. CÉLINE, Voyage au bout de la nuit, 1932, p. 78.
10. Me suis brusquement souvenu de cette plaine blanchâtre (quelque part, au nord-est de Châlons), où nous avons fait halte pour casser la croûte, quand j'ai changé d'affectation, en juin 17.
R. MARTIN DU GARD, Les Thibault, Épilogue, 1940, p. 993.
Affectation de défense :
11. Affectation donnée aux citoyens assujettis au service national qui ne sont pas soumis aux obligations du service militaire ou qui, y étant soumis, n'ont pas d'affectation militaire, ou dont l'appel est différé (ordonnance du 7 janvier 1959). [L'affectation de défense s'exerce au profit d'une administration, d'une entreprise ou d'un corps de défense. La discipline générale des forces armées est applicable aux affectés de défense].
Lar. encyclop. Suppl. 1968.
Affectation de mobilisation. Affectation prévue pour un militaire en cas de mobilisation.
Affectation spéciale. Affectation d'un homme, en cas de mobilisation, à une activité de caractère non strictement militaire, généralement à l'arrière du front (cf. ex. 9).
Prononc. ET ORTH. :[]. — Rem. FÉR. Crit. t. 1 1787 écrit affectation ou afectation avec un seul f. Enq. : /afektasiõ/.
Étymol. ET HIST. — 1. 1413 dr. « attribution » (6 juillet 1413, Ord., X, 155 ds GDF. Compl. : Qu'elles ne puissent estre a aucuns d'eux preferees en l'affectation de plusieurs benefices); 2. 1548 « désir, recherche » (RABELAIS, Quart Livre, nouv. prol., ibid. :Le tresbon Dieu congneut sa syncere et mediocre affectation), sens vieilli; 3. 1611 « action d'adopter, de feindre une manière d'être ou d'agir » (COTGR. : Affectation :over-curious imitation; a foolish desire, or following of, what one hath not, or is not, by nature).
Empr. au lat. affectatio, au sens 2, synon. de studium en lat. impérial : SEN., Epist., 89, 4 ds TLL s.v., 1176, 1 : philosophia sapientiae amor est et adfectatio; devenu péj. à partir de Quintilien qui l'emploie très fréquemment, ainsi : Inst., 12, 10, 40, ibid., 1176, 26 : Quidquid huc sit adiectum, id esse adfectationis et ambitiosae in loquendo iactantiae; 1 seulement en lat. médiév. jur. : fin Xe s.-début XIIIe s., Chart. Naumburgenses, 143 ds Mittellat. W. s.v., 348, 21 : nostre affectationi idoneos adhibuimus testes; attesté aussi au sens de « acte de transport », terme jur. ds NIERM. t. 1 1954-58, s.v.
STAT. — Fréq. abs. litt. :707. Fréq. rel. litt. :XIXe s. : a) 1 460, b) 706; XXe s. : a) 791, b) 906.
BBG. — BAILLY (R.) 1969 [1946]. — BAR 1960. — BARR. 1967. — BÉL. 1957. — BÉNAC 1956. — BOISS.8. — BONNAIRE 1835. — BRUANT 1901. — CAP. 1936. — DAIRE 1759. — DEM. 1802. — DUP. 1961. — FÉR. 1768. — FOULQ.-ST-JEAN 1962. — Gramm. t. 1 1789. — GUIZOT 1864. — LAF. 1878. — Lar. comm. 1930. — LAV. Diffic. 1846. — LE CLÈRE 1960. — MOOR 1966. — RÉAU-ROND. 1951. — ROMEUF t. 1 1956. — SARDOU 1877. — SOMMER 1882. — SPR. 1967. — Synon. 1818.

1. affectation [afɛktɑsjɔ̃] n. f.
ÉTYM. 1413; du lat. médiéval affectatus « destiné, affecté ». → 1. Affecter.
1 Destination (à un usage déterminé). || Disposer d'une somme dont il reste à décider l'affectation. || Décréter l'affectation d'un immeuble à un service public. Attribution, destination, imputation. || L'affectation des ressources. || L'affectation de moyens à une administration, à une armée.
Techn. Aménagement d'une exploitation forestière; division d'exploitation (d'une forêt).
2 (1928; d'abord milit.). Désignation (de personnes) à une unité militaire, à un poste, à une fonction. Nomination. || Il attend son affectation à une unité du génie, à une formation aérienne. || Affectation spéciale : mobilisation d'un réserviste dans une activité d'ordre économique ou administratif. || Affectation de défense : affectation dans un emploi civil d'un citoyen assujetti au service national, mais non soumis aux obligations du service militaire.
Affectation légale : affectation administrative qu'une décision de la loi rend obligatoire.
Par métonymie. Lieu où l'on exerce une fonction; poste où qqn est affecté. || Sa nouvelle affectation. || Rejoindre son affectation, le poste auquel on a été affecté.
Par métaphore :
0 (…) littérateurs, philosophes, cinéastes, scientifiques, techniciens, tous, ils ont leur monde. Un système et une affectation. Tous, sclérosés, vieillis, ayant construit leur armure et s'y mouvant à l'aise.
J.-M. G. Le Clézio, l'Extase matérielle, p. 101.
3 Math. Action d'affecter (→ 3. Affecter, 3.), de donner à une variable une valeur, un indice.
CONTR. Désaffection (d'un édifice). — Déplacement, mutation.
HOM. 2. Affectation.
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2. affectation [afɛktɑsjɔ̃] n. f.
ÉTYM. 1541; du lat. affectatio « recherche, poursuite de », du supin de affectare. → 2. affecter.
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I Vx. (Langue class.). Vif désir, fait de rechercher par-dessus tout (qqch.). || L'affectation de faire qqch.
1 Cette affectation que quelques-uns ont de plaire à tout le monde (…)
La Bruyère, les Caractères de Théophraste, V.
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II
1 (Mil. XVIIe). Action d'adopter (une manière d'être ou d'agir) de façon ostentatoire, et seulement en apparence. Comédie, étalage, exagération, hypocrisie, imitation, simulation. || Une affectation de sensibilité. || Avoir une affectation de douceur. Chattemite (faire la). || Affectation de bravoure. Fanfaronnade, forfanterie. || Affectation de piété. Pharisaïsme, tartuferie. || Affectation de vertu. Pruderie. || Affectation de gravité, d'importance. Emphase, grandiloquence, montre, ostentation, parade, prétention. || Affectation de savoir, de connaissances… Cuistrerie, pédanterie, pédantisme.
2 Il a du bon et du louable, qu'il offusque par l'affectation du grand ou du merveilleux.
La Bruyère, les Caractères, XI, 141.
3 Cette affectation d'un grave intérieur (…)
À quoi bon (…) cette mine modeste
Et ce sage dehors que dément tout le reste ?
Molière, le Misanthrope, III, 4.
3.1 (…) un indéfinissable fonds de vulgarité qu'il (Montherlant) dissimule sous une feinte goujaterie et une affectation de dehors cyniques (…)
Gide, Journal, 11 avr. 1948.
4 On n'échappe pas au ridicule par une affectation de gravité.
Bernanos, les Grands Cimetières sous la lune, p. 217.
Une affectation de délicatesse, d'élégance dans l'allure, l'attitude ( Afféterie, chichi [fam.], contorsion, girie, minauderie, mine, snobisme), dans le langage, le style ( Préciosité).
(Une, des affectations). Manières affectées.
4.1 (…) il considérait parfois cette grosse tête d'Hubert comme une petite tête frivole. Ce qui l'agaçait par-dessus tout, chez lui, c'était le goût affiché des belles relations, un certain usage du monde, l'accent gratin, les affectations du langage, un contentement de soi qui éclatait dans chaque réplique.
Jean-Louis Curtis, le Roseau pensant, p. 25-26.
2 Absolt. Manque de sincérité et de naturel. Apprêt, pose, recherche. || L'affectation dans les manières. || Faire qqch. avec, sans affectation.
5 L'affectation dans le geste, dans le parler et dans les manières est souvent une suite de l'oisiveté ou de l'indifférence; et il semble qu'un grand attachement ou de sérieuses affaires jettent l'homme dans son naturel.
La Bruyère, les Caractères, XI, 146.
6 Celui qui (…) agit simplement, naturellement, sans aucun tour, sans nulle singularité, sans faste, sans affectation (…)
La Bruyère, les Caractères, IX, 146.
7 Il a eu naturellement (…) ce qu'on n'a point par l'étude et par l'affectation, par les mots graves ou sentencieux.
La Bruyère, Discours de réception à l'Académie, 15 juin 1693.
8 Je parle sans affectation — On le voit bien, madame, et que tout est naturel en vous.
Molière, Critique de l'École des femmes, III.
9 Ce n'est que jeu de mots, qu'affectation pure
Et ce n'est point ainsi que parle la nature.
Molière, le Misanthrope, I, 2.
CONTR. Aisance, naturel, simplicité, sincérité.
HOM. 1. Affectation.

Encyclopédie Universelle. 2012.