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accident

accident [ aksidɑ̃ ] n. m.
• 1175; lat. accidens, de accidere « survenir »
1Événement fortuit, imprévisible. Vx Un accident heureux, malheureux.
2Mod. Épisode non essentiel. « La poésie n'était pas mon métier; c'était un accident, une aventure heureuse » (Lamartine). Loc. littér. PAR ACCIDENT : par hasard. ⇒ fortuitement. Cour. Accident de parcours.
3Philos. Ce qui « s'ajoute » à l'essence, peut être modifié ou supprimé sans altérer la nature. attribut, phénomène. Dieu, « Substance qui jamais ne reçoit d'accident » (P. Corneille). Par ext. Fait accessoire ( accidentel), secondaire. Je ressentis ces événements, « non comme des accidents ou des phénomènes limités, mais comme des faits significatifs » (Valéry).
4(fin XIIe) Événement fâcheux, malheureux. aventure, calamité, contretemps, coup, ennui, malheur, mésaventure, revers, fam. tuile. « Je crains cent accidents qui peuvent arriver » (Molière). Il a cassé un verre : c'est un petit accident. 1. incident .
(XVIII e) Cour. Événement imprévu et soudain qui entraîne des dégâts, des dangers (blessure, mort). choc, chute, collision, explosion. Accident de voiture ( carambolage) , de chemin de fer ( déraillement) , d'avion ( crash) . Les accidents de la route. Un accident de la circulation. Il a eu un accident, sa voiture est en miettes. Simulation d'accident. anglic. crash test. Accident du travail, qui survient pendant le travail ou qui est occasionné par lui.
5Méd. Phénomène imprévu au cours d'une maladie. Accident primitif, secondaire, tertiaire (de la syphilis). complication, lésion.
6Ce qui rompt l'uniformité. ACCIDENT DE TERRAIN : dislocation ou déformation de tout genre. ⇒ aspérité, mouvement; accidenté . Mus. Altération qui n'est pas à la clé; signe qui l'indique (dièse, bémol, bécarre).

accident nom masculin (latin accidens, de accidere, survenir) Événement fortuit qui a des effets plus ou moins dommageables pour les personnes ou pour les choses : Accident de la route. Événement inattendu, non conforme à ce qu'on pouvait raisonnablement prévoir, mais qui ne le modifie pas fondamentalement : Un échec qui n'est qu'un accident dans une brillante carrière. Trouble morbide survenant de façon imprévue et n'ayant pas nécessairement, si ce trouble survient au cours d'une maladie, de liaison avec elle. Musique Altération rencontrée passagèrement (dièse, bémol, bécarre). Philosophie Selon Aristote, ce qui est inhérent à un sujet et ne peut exister sans lui. Dans la philosophie scolastique, caractère possible et non nécessaire d'une substance, pour autant qu'elle consiste en une manière possible d'être, d'être perçue, d'être au monde. ● accident (expressions) nom masculin (latin accidens, de accidere, survenir) Accident de terrain, inégalité du relief, élévation du sol amenant de la variété dans un paysage uniforme. Littéraire. Par accident, fortuitement, par hasard. Accident de trajet, accident survenu pendant le trajet que le salarié emprunte pour se rendre de son domicile à son travail et vice versa, ainsi que sur le trajet qui le mène au lieu où il prend habituellement ses repas. (Il donne droit aux mêmes réparations qu'un accident du travail.) Accident du travail, accident entraînant une lésion de l'organisme humain, survenu par le fait ou à l'occasion du travail et quelle qu'en soit la cause, alors que la victime se trouvait sous l'autorité de son employeur. (L'accident du travail ouvre droit à réparation ; celle-ci est demandée à l'employeur, mais, depuis 1946, les prestations sont versées directement par les caisses de Sécurité sociale.) Accident tectonique, discontinuité d'origine tectonique au sein d'un ensemble géologique, d'un gisement stratiforme. ● accident (synonymes) nom masculin (latin accidens, de accidere, survenir) Événement fortuit qui a des effets plus ou moins dommageables...
Synonymes :
- mésaventure
- tragédie
Événement inattendu, non conforme à ce qu'on pouvait raisonnablement prévoir...
Synonymes :
Philosophie. Dans la philosophie scolastique, caractère possible et non nécessaire d'une...
Synonymes :

accident
n. m.
rI./r
d1./d épisode sans réelle importance. Son échec au baccalauréat n'était qu'un accident, qu'un accident de parcours.
d2./d PHILO Ce qui n'est pas inhérent à l'être, à la substance. L'essence et l'accident.
d3./d MUS Signe d'altération (dièse, bémol, bécarre) placé devant une note dans le courant d'un morceau.
d4./d Accident de terrain: inégalité du terrain.
Accident tectonique: déformation de l'écorce terrestre.
rII./r événement imprévu aux conséquences fâcheuses.
d1./d événement imprévu, survenant brusquement, qui entraîne des dommages matériels ou corporels. Accident de voiture, d'avion. Accident du travail.
(Afr. subsah., Liban, oc. Indien, Québec) Faire un accident ou (Afr. subsah.) faire l'accident: être la victime ou la cause d'un accident de la circulation.
d2./d MED Affection qui survient brutalement. être victime d'un accident cardiaque, vasculaire, cérébral.

I.
⇒ACCIDENT1, subst. masc.
I.— Ce qui s'oppose à la substance ou à l'essence.
A.— Dans la lang. de la philos. aristotélico-scolast.
1. [P. oppos. à substance] ,,Ce qui existe, non en soi-même, mais dans un autre; (...) par ex., la couleur, la forme, qui ne peuvent être que la couleur, ou la forme de quelque chose subsistant en elle-même.`` (FOULQ.-ST-JEAN 1962) :
1. Attributs, accidens, phénomènes; être, substance, sujet, ce sont des généralisations puisées à la source des deux faits incontestables de la croyance à mon existence personnelle et de la croyance à l'existence du monde extérieur. Maintenant, tout ce qui a été dit du corps et de l'espace, de la succession et du temps, du fini et de l'infini, de la conscience et de l'identité personnelle, tout cela doit être dit de l'attribut et du sujet, des qualités et de la substance, des phénomènes et de l'être.
V. COUSIN, Hist. de la philosophie du XVIIIe siècle, t. 1, 1829, p. 200.
2. Mais de l'homme à Dieu, de l'ordre visible à l'invisible, du naturel au surnaturel, de l'accident visible à la substance invisible, c'est à peine si tu as posé la mystérieuse équation, et le terme connu à côté de l'inconnu...
E. PSICHARI, Le Voyage du centurion, 1914, p. 141.
3. J'étreins la substance enfin au travers de l'accident!
Je comprends maintenant l'échec de cette chose tant de fois essayée,
La combinaison de notre âme avec les choses créées.
P. CLAUDEL, La Messe là-bas, 1919, p. 501.
L'unité et la moralité sont des considérations secondaires, appartenant à la philosophie et non à la poésie, à l'exception et non à la règle, à l'accident et non à la substance...
P. ÉLUARD, Donner à voir, 1939, p. 141.
5. D'après Cassien, en dehors de Dieu, tous les êtres sont nécessairement composés, sinon de matière et de forme, du moins d'essence et d'existence, de potentialité et d'être en acte, de substance et d'accidents.
B. CENDRARS, Bourlinguer, 1948, p. 99.
P. anal. Dans la lang. de la théol. scolast.
,,En termes de théologie, et en parlant du Saint-Sacrement de l'Eucharistie, on appelle Accidens, la figure, la couleur, la saveur, etc. qui restent après la consécration. Tous les accidens qui étoient dans les espèces avant la consécration, subsistent encore après la consécration.`` (Ac. 1798).
♦ ,,En parlant du Saint-Sacrement de l'Eucharistie, il se dit de la figure, de la couleur, de la saveur qui restent, après la consécration et la transsubstantiation. Alors il n'y a plus ni pain, ni vin, mais le corps et le sang de Notre-Seigneur et cependant les accidents du pain et du vin demeurent.`` (GUÉRIN 1892).
♦ ,,Il faut noter qu'il est propre à l'accident, par opposition à la substance, d'exister non en lui-même mais en celle-ci. D'où le problème souvent posé : comment les accidents eucharistiques subsistent-ils, leur substance ayant disparu? Saint Thomas se borne à répondre que le premier de tous les accidents d'un corps étant la quantité étendue, tous les autres accidents du pain demeurent suspendus à celui-là, qui joue, désormais par rapport à eux le rôle qui devrait être celui de la substance.`` (Sum. théol., IIIa q. 88, a. 5 ds BOUYER 1963).
2. [P. oppos. à essence] ,,Ce qui ne fait pas partie de la nature ou de l'essence d'un être et peut devenir autre sans qu'il y ait changement d'espèce. Par exemple le fait d'être assis, ou couché, d'être à Paris, d'être en face de Pierre... Ce qu'il faut entendre par l'accident proprement dit, c'est une particularité qui advient à l'être mais qui n'en provient pas, qu'on ne peut prévoir, qu'on ne peut conclure, qui ne dérive pas de la nature de l'être.`` (FOULQ.-ST-JEAN 1962, p. 6) :
6. Tout poème où le merveilleux est le fond et non l'accident du tableau pèche essentiellement par la base.
F.-R. DE CHATEAUBRIAND, Génie du christianisme, t. 2, 1803, p. 278.
7. L'espèce est définie par le genre et la différence (per genus et differentiam). Dans cette définition : l'homme est un animal raisonnable, l'animalité est le genre, l'humanité l'espèce, la raison la différence. Rire est le propre de l'homme; mais on ne peut pas faire consister dans le rire le caractère essentiel et spécifique de l'humanité. Quand on dit : Achille est blond; Socrate est camus; César est chauve; blond, camus, chauve désignent des accidents individuels.
A. COURNOT, Essai sur les fondements de nos connaissances, 1851, p. 338.
8. Laissons de côté l'analyse du respect, où nous trouverions surtout un besoin de s'effacer, l'attitude de l'apprenti devant le maître ou plutôt, pour parler le langage aristotélicien, de l'accident devant l'essence.
H. BERGSON, Les Deux sources de la morale et de la religion 1932, p. 65.
9. Soit le profond marais odorant d'où une liqueur trouble... suinte,
L'idée essentielle à perte de vue enrichie par la contradiction et l'accident
Et l'artère en son cours magistral insoucieuse des fantaisies de l'affluent.
Il fait marcher à l'infini les moulins, et les cités l'une à l'autre par lui se deviennent intéressantes et explicables.
P. CLAUDEL, Poésies diverses, Le Fleuve, 1952, p. 851.
Sophisme de l'accident. ,,Sophisme consistant à conclure d'un caractère accidentel à un caractère essentiel, par ex. : du fait qu'un homme est mort de la grippe, que cette affection est mortelle.`` (FOULQ.-ST-JEAN 1962).
Loc. par accident. ,,Ce qu'une chose est par soi, elle l'est en vertu de sa nature. Ce qu'elle est par accident, elle l'est pas suite de circonstances indépendantes de sa nature. Un aliment qui est sain par soi peut, par accident (étant donné par exemple l'état organique de celui qui l'absorbe) être malsain.`` (FOULQ.-ST-JEAN 1962) :
10. Les plus hautes figures poétiques, comme les plus hautes formes vivantes, n'arrivent à la lumière que par grâce et pour ainsi dire par accident. Taine.
M. BARRÈS, Mes cahiers, t. 3, 1904, p. 97.
B.— P. ext.
1. GRAMM. (XIXe s.)
,,Accident, s. m. (gramm. hébr.). Il se dit par opposition à racine, de l'élément du mot qui indique les rapports secondaires de genre, de nombre, etc.`` (Ac. Compl. 1842).
,,Par accident des grammairiens anciens entendent une propriété d'un mot qui n'entre point dans la définition essentielle de ce mot. Le dérivé, le composé, le figuré sont des accidents. Le mot primitif, propre, est l'essence même. Il se dit aussi des modifications que subissent les mots sous le rapport du genre, du nombre, de la personne.`` (BESCH. 1845).
,,En termes de grammaire, tous les changements que les mots peuvent éprouver. Les genres et les nombres sont les accidents des noms; les temps, les personnes, les modes, les voix sont ceux des verbes.`` (LITTRÉ).
2. PEINT. Accident de lumière (de clair-obscur)
,,Accident, en termes de peinture, est ce qui ne vient pas de la lumière principale, mais d'une fenêtre opposée, d'un flambeau, etc.`` (Ac. 1798).
,,En termes de peinture, accidents de lumière, effets de lumière partiels que produit le soleil, dans un paysage, lorsque des nuages s'interposent entre cet astre et la terre. Cette locution s'emploie également en parlant des intérieurs, lorsque, par une combinaison ingénieuse des ombres et des lumières, celles-ci se reproduisent dans certains endroits d'une manière inattendue, mais vraie, et indépendamment de la lumière générale. Il y a dans ce tableau des accidents de lumière fort piquants.`` (Ac. 1835) :
11. Ces monstrueux tableaux étaient encore assujettis à mille accidents de lumière par la bizarrerie d'une multitude de reflets dus à la confusion des nuances, à la brusque opposition des jours et des noirs. L'oreille croyait entendre des cris interrompus, l'esprit saisir des drames inachevés, l'œil apercevoir des lueurs mal étouffées. Enfin, une poussière obstinée avait jeté son léger voile sur tous ces objets, dont les angles multipliés et les sinuosités nombreuses produisaient les effets les plus pittoresques.
H. DE BALZAC, La Peau de chagrin, 1831, p. 18.
12. Velasquez et Murillo groupaient des fruits, des vases, des poissons, tous les objets qui leur offraient des couleurs vives et harmonieuses, et s'essayaient à en reproduire tous les accidents de lumière.
P. MÉRIMÉE, Mosaïque, 1833, p. 522.
,,Modification que le peintre apporte à l'effet général d'un tableau dans la disposition de la couleur et de la lumière. Ce mot s'emploie mieux au pluriel... On distingue des accidents de deux sortes : les accidents de lumière ou espaces lumineux éclairés par le soleil lançant ses rayons dans l'intervalle que laissent les nuages; les accidents de clair-obscur, que produisent des circonstances étrangères à la lumière générale de la composition. Ex. : Salvator-Rosa, Rubens, Rembrandt, ont employé les accidents avec une variété et une fécondité inépuisables.`` (BESCH. 1845) :
13. La nature a d'ailleurs le don de tout parer. Il ne lui faut, pour cela, qu'un peu de verdure et quelques accidents de lumière. Les jeux variés du brouillard ou du soleil à travers les portiques à jour, et ces vallées, ces ponts aériens, ces escaliers gigantesques, ces maisons surexhaussées dont les toits fumants pavent l'abîme, tout ce chaos piranésien, de fantaisie orientale et biblique.
J. MICHELET, Sur les chemins de l'Europe, 1874, p. 111.
C.— Dans ces emplois le sens glisse insensiblement vers l'idée générale de variation, de variété, qui pour l'œil de l'observateur rompent la monotonie du fond :
14. Le colosseum est un monde de ruines; tous les accidents que peuvent y produire la lumière, la végétation, le temps, se trouvent là. Rien n'est plus impossible à décrire que ces arceaux brisés, ces escaliers écroulés, ce lierre, ces plantes, ces débris suspendus; la couleur superbe du monument, les grandes lignes de la partie encore debout, tout cela varie de mille manières, selon le jour et l'ombre;...
A.-M. AMPÈRE, Correspondance et souvenirs (de 1805 à 1864), 1824, p. 258.
De là, qq. emplois techn.
1. Dans la lang. de la mus. Tout signe qui indique une élévation ou un abaissement de tons dans le courant d'un morceau. ,,On appelle accidens ou signes accidentels les bémols, dièses et béquarres... des accidens de modulation auxquels l'harmonie n'a aucun égard,...`` (J.-J. ROUSSEAU, Dict. de musique, t. 1, 1768, p. 28, 316). ,,Accident (musique). Il se dit des bémols, dièses ou bécarres, qui, n'étant point à la clef, se trouvent dans le courant d'un morceau.`` (Ac. Compl. 1842) :
15. ... par ce SI modulant, (...) tout le chromatisme moderne s'est introduit dans la musique médiévale, entraînant à sa suite la série des accidents d'écriture...
V. D'INDY, Cours de composition musicale, t. 1, 1897-1900, p. 61.
2. Dans la lang. des patenôtriers (fabricants de chapelets, de boutons, de colliers, etc.). ,,Accident (arts et mét.). Petite élévation que les patenôtriers forment sur les perles factices.`` (Ac. Compl. 1842); ,,Petits dessins en relief que les patenôtriers forment sur les perles factices et sur les grains de chapelets.`` (BESCH. 1845).
3. Parfois dans la lang. de la rhét. :
16. Ce ne sont plus les obscures images de la rêverie et les associations apparemment fortuites des objets dans la vie végétative de la pensée que l'on prétendra substituer à la perception banale des sens et de la raison, mais d'autres accidents :ceux qu'un artisan du verbe obtient en rapprochant des mots selon les seules exigences du rythme, de la sonorité, ou en général d'un plaisir inexpliqué naissant de leur brusque voisinage.
A. BÉGUIN, L'Âme romantique et le rêve, 1939, p. 381.
17. ... Ces remarques rapides ne tendent qu'à montrer qu'une métaphore ne devrait être qu'un accident de l'expression et qu'il y a danger à en faire une pensée. La métaphore est une fausse image puisqu'elle n'a pas la vertu directe d'une image productrice d'expression, formée dans la rêverie parlée.
G. BACHELARD, La Poétique de l'espace, 1957, p. 81.
II.— Événement fortuit, sans motif apparent et sans lendemain, qui affecte une personne ou un groupe de personnes, en interrompant le déroulement normal, probable et attendu des choses :
18. [Accident] C'est un événement qui apparaît comme imprévisible et improbable. Par exemple une voiture au passage à niveau juste en même temps que le train. Un obus qui enlève la tête de l'aviateur. On accuse alors la fatalité, comme si l'événement était un défi aux lois du probable; et cette idée a beaucoup de vrai. Le fatalisme nous console de ce qui est arrivé; mais il ne doit pas diminuer notre prudence.
ALAIN, Définitions, 1951, [Les Arts et les dieux, Paris, Gallimard, 1961, Bibl. Pléiade] p. 1028.
1. Ce sens peut être proche du sens philos. :
19. La pensée humaine est un heureux petit accident des hasards de ses fécondations, un accident local, passager, imprévu, condamné à disparaître, avec la terre, et à recommencer peut-être ici ou ailleurs, pareil ou différent, avec les nouvelles combinaisons des éternels recommencements. Nous lui devons, à ce petit accident de l'intelligence, d'être très mal en ce monde qui n'est pas fait pour nous, ...
G. DE MAUPASSANT, Contes et nouvelles, t. 1, L'Inutile beauté, 1890, p. 1158.
20. Il est dans chaque livre d'histoire certaines propositions sur quoi les acteurs, les témoins, les historiens et les partis s'accordent. Ce sont des coups heureux, de véritables accidents; et c'est l'ensemble de ces accidents, de ces exceptions remarquables, qui constitue la partie incontestable de la connaissance du passé. Ces accidents d'accord, ces coïncidences de consentements définissent les « faits historiques », mais ils ne les définissent pas entièrement.
P. VALÉRY, Variété 4, 1938, p. 132.
2. Il peut désigner un événement non marqué du point de vue affectif :
21. Il y avait eu là comme un éclat de la foudre de l'église tombée à côté d'elle, et qui l'aurait effleurée... Bizarrerie des conversions qui ont leur jour, leur heure, qui peuvent venir d'un contre-coup sans raison, que des années amènent, préparent, et que fait jaillir souvent un accident, un hasard, le rien immotivé qui décide et enlève!
E. et J. DE GONCOURT, Madame Gervaisais, 1869, p. 176.
22. L'art photographique, aux yeux de la plupart des hommes, consiste surtout à capter l'événement fugace, l'accident, le sinistre imprévisible, à immobiliser la minute ou la seconde où le fantastique quotidien fait son apparition. Le photographe de génie — il peut s'en présenter un — se proposera de célébrer de façon indiscutable le prestige de l'instant. La venue de cet informateur de l'inattendu est souhaitée par beaucoup de peintres actuels, un peu fatigués de se livrer à des expériences d'ordre strictement techniques et que tente l'ange du bizarre.
A. LHOTE, Peinture d'abord, 1942, p. 49.
3. Accompagné d'une épithète appropriée il peut désigner un événement heureux :
23. L'illusion de la politique française est de croire que de bons sentiments puissent se maintenir, se perpétuer par eux-mêmes et soutenir ainsi d'une façon constante l'accablant souci de l'état. Les bons sentiments, ce sont de bons accidents. Ils ne valent guère que dans le temps qu'ils sont sentis : à moins de procéder d'organes et d'institutions, leur source vive qu'il faut alors défendre et maintenir à tout prix, ils sont des fruits d'occasion, ils naissent de circonstances et de conjonctures heureuses. Il faut se hâter de saisir conjonctures, circonstances, occasions,...
Ch. MAURRAS, L'Avenir de l'intelligence, 1905, p. 79.
24. Larseneur tomba dans une profonde mélancolie. Peut-être rêvait-il, en secret, à quelque accident heureux. Mais de tels accidents restent le fruit du hasard.
G. DUHAMEL, Chronique des Pasquier, Le Désert de Bièvre, 1937, p. 215.
Cf. aussi sup. ex. 20.
Emploi techn. Au jeu de piquet, l'accident, c'est la combinaison fortuite de cartes distribuées qui vaut des points à qui les détient. ,,Les principaux accidents sont les quatorzes, les quintes, les quatrièmes, les tierces, etc.`` (Lar. encyclop.).
Rem. Pour les règles du jeu de piquet, cf. ALLEAU 1964, p. 402.
4. Le plus souvent, avec ou parfois sans épithète, il désigne un événement fâcheux :
25. Les événements amenés par la combinaison ou la rencontre d'autres événements qui appartiennent à des séries indépendantes les unes des autres, sont ce qu'on nomme des événements fortuits, ou des résultats du hasard. Quelques exemples serviront à éclaircir et à fixer cette notion fondamentale. — Il prend au bourgeois de Paris la fantaisie de faire une partie de campagne, et il monte sur un chemin de fer pour se rendre à sa destination. Le train éprouve un accident dont le pauvre voyageur est la victime, et la victime fortuite, car les causes qui ont amené l'accident ne tiennent pas à la présence de ce voyageur (...)
A. COURNOT, Essai sur les fondements de nos connaissances, 1851, p. 38.
26. Or selon mon opinion les affaires réelles se heurtent à des obstacles d'un tout autre genre. J'ai vu des succès et des faillites, et je crois que l'organisation, comme vous dites, y importait moins que l'événement brut, l'accident, l'imprévu, comme est pour les fourmis un coup de pied dans la fourmilière. C'est au bord de l'événement que je connais l'homme.
ALAIN, Propos, 1933, p. 1138.
Il peut s'agir d'un événement ne mettant pas les jours en danger (accident moindre, petit, quelconque, simple, léger, menu, ridicule, insignifiant, minime, futile, infime, mineur) :
27. Les seuls accidents domestiques dont j'eusse encore été témoin, c'étaient, pour ainsi dire, des accidents de saison qui troublaient la symétrie des habitudes, comme par exemple un jour de pluie venant quand on avait pris quelques dispositions en vue du beau temps.
E. FROMENTIN, Dominique, 1863, p. 27.
28. Paris, 31 octobre. Tous ces temps-ci, c'est une succession de petits accidents hostiles, une conjuration d'ennuis de tous côtés, les taquineries bêtes et à la fin insupportables d'un enguignonnement de tous les jours et de toutes choses, une série de déveines.
À côté des mauvais sommeils, des insomnies, ...
E. et J. DE GONCOURT, Journal, oct. 1865, p. 210.
29. Qu'est-ce qu'une blessure! Ça n'a jamais rien prouvé. Une blessure, c'est un accident.
M. BARRÈS, Mes cahiers, 1914, p. 323.
30. Ils sont sans cesse aux aguets, toujours occupés à surveiller quelqu'un ou à se surveiller eux-mêmes, épiant les accidents, les gaffes ou les erreurs possibles, dragons de vigilance morale s'ils sont moraux — ...
E. MOUNIER, Traité du caractère, 1946, p. 288.
Ou d'un événement grave pouvant entraîner la mort :
31. Mais qu'apprendra au commun des hommes le drame ou le roman qui retrace à leurs yeux les misères qui les assiègent, les accidents qui les menacent? C'est une source d'intérêt inépuisable, je le sais bien, que les dures extrémités ou du péril ou du malheur; et avec des prospérités injustes et d'indignes calamités, on peut remuer aisément tous les ressorts du pathétique. Mais qu'on accumule dans un roman les accidents les plus funestes, des inondations, des naufrages, des incendies, la ruine et la désolation qui accompagnent ces grands désastres, et le désespoir qui les suit, la misère, la solitude, l'abandon, l'esclavage, l'oppression, l'horreur des cachots, le besoin...
J.-F. MARMONTEL, Essai sur les romans, 1799, p. 321.
32. D'ailleurs, on meurt d'accident, chez nous. Mon frère est mort noyé. Et moi aussi, je mourrai d'accident : d'un coup de revolver. J'ai toujours eu cette idée-là.
R. MARTIN DU GARD, Les Thibault, La Belle saison, 1923, p. 970.
33. Le suicide d'un homme est un événement essentiellement inharmonique, mais il n'est pas un événement fortuit. Un accident, comme la mort d'un homme causé par la chute d'une tuile, est à la fois inharmonique et fortuit. Même si l'on n'admet pas l'indépendance absolue des séries dans le hasard, il faut accorder qu'il n'est pas relatif à l'homme, puisque l'éloignement de la racine commune des deux séries, leur fonctionnement pratiquement indépendant, est quelque chose d'objectif.
R. RUYER, Esquisse d'une philosophie de la structure, 1930, p. 337.
34. ... Metchnikoff prétend avoir observé que les vieillards extrêmement avancés en âge désirent de mourir. L'instinct de mort naîtrait ainsi après une longue vie, mais seulement lorsque c'est une mort naturelle qui nous menace; de son côté, l'instinct de conservation ne nous ferait lutter contre la mort que dans la mesure où c'est un accident, une catastrophe, une mort non naturelle qui abrège notre existence. Devant la mort vraiment naturelle, nous n'éprouverions aucun mouvement de répulsion.
J. VUILLEMIN, Essai sur la signification de la mort, 1949, p. 12.
35. Dans ce monde en ordre il y a des pauvres. Il y a aussi des moutons à cinq pattes, des sœurs siamoises, des accidents de chemin de fer : ces anomalies ne sont la faute de personne. Les bons pauvres ne savent pas que leur office est d'exercer notre générosité;...
J.-P. SARTRE, Les Mots, 1964, p. 23.
Rem. On notera plus partic. les loc. où le compl. indique des circonstances de l'accident : - de ch. de fer (cf. ci-dessus), - de voiture, - d'autom., - de chasse, - aérien, - d'avion, - de cheval, -d'autocar, - de bicyclette, - d'ascenseur. On relève fréquemment la loc. accident de ou du.
5. De là, qq. emplois techn.
a) MÉD. Symptôme d'aggravation du mal survenant de manière inattendue dans le cours d'une maladie et mettant la vie en danger.
,,Proprement, accident d'une maladie, ou symptôme accidentel, symptôme qui tend à la rendre plus grave, comme une hémorragie, des convulsions, etc., lorsque ces symptômes ne lui sont point essentiels. Généralement, accident, symptôme accidentel, phénomène qui survient dans le cours d'une maladie, soit que son apparition ajoute ou non à sa gravité : dans ce sens, accident est synonyme d'épiphénomène, qui doit être employé de préférence.`` (LITTRÉ-ROBIN 1865). (Cf. aussi ci-dessus I 2) :
36. Le délire compliquait le mal, et des accidents nerveux l'aggravaient. Les moments lucides devinrent de plus en plus rares; ma pauvre femme semblait avoir perdu le sentiment de ce qui se passait autour d'elle. Des paroles sans suite, des mots entrecoupés, produits d'affreux cauchemars, s'échappaient de sa bouche; des gestes convulsifs attestaient la violence de la lutte et les efforts d'une riche constitution. Depuis que la maladie avait pris cette gravité, je ne quittais plus le chevet de la mourante.
L. REYBAUD, Jérôme Paturot, 1842, p. 443.
34. De fait, je n'ai jamais eu dans la suite le moindre accident, la plus légère menace de récidive.
R. MARTIN DU GARD, Les Thibault, La Consultation, 1928, p. 1101.
Dans la lang. de la fauconn. ,,Se dit des maladies et blessures auxquelles les oiseaux de proie sont sujets.`` (BESCH. 1845).
b) DR. ,,Fait involontaire ou événement fortuit qui cause un dommage aux personnes ou aux choses et qui, s'il résulte de la faute, de l'imprévoyance ou de la négligence de quelqu'un, peut mettre en jeu la responsabilité de celui-ci.`` (Lar. encyclop.).
c) SÉCURITÉ SOC. Accident du travail. ,,L'article 2 de la loi du 30 octobre 1946 précise que l'on doit considérer comme un accident du travail, quelle qu'en soit la cause, l'accident survenu par le fait ou à l'occasion du travail, à toute personne salariée ou travaillant à quelque titre ou en quelque lieu que ce soit, pour un ou plusieurs employeurs ou chefs d'entreprise. La définition précise de l'accident du travail permettant de le distinguer de la maladie professionnelle a été donnée par la Cour de Cassation dans un arrêt du 21 octobre 1941. « L'accident du travail est une atteinte à l'intégrité du corps humain survenue par suite de l'action violente et soudaine d'une cause extérieure ».`` (LAFON 1963) :
38. Le culte de la richesse eut ses martyrs. L'un de ces milliardaires, le fameux Samuel Box, aima mieux mourir que de céder la moindre parcelle de son bien. Un de ses ouvriers, victime d'un accident de travail, se voyant refuser toute indemnité, fit valoir ses droits devant les tribunaux, mais rebuté par d'insurmontables difficultés de procédure, tombé dans une cruelle indigence, réduit au désespoir, il parvint, à force de ruse et d'audace, à tenir son patron sous son revolver, menaçant de lui brûler la cervelle s'il ne le secourait point...
A. FRANCE, L'Île des Pingouins, 1908, p. 401.
39. La législation des accidents du travail et des maladies professionnelles a pour but de protéger les salariés et assimilés contre le risque d'accidents et de maladie résultant de l'exécution de leur travail.
Nouveau répertoire de droit, Paris, Dalloz, t. 1, 1962.
Accident de trajet. ,,La loi du 23 juillet 1957 précise qu'est considéré comme accident du travail l'accident survenu pendant le trajet d'aller et retour entre : a) la résidence principale, une résidence secondaire présentant un certain caractère de stabilité ou tout autre lieu où le travailleur se rend de façon habituelle pour des motifs d'ordre familial et le lieu de travail; b) le lieu de travail et le restaurant, la cantine ou, d'une manière plus générale, le lieu où le travailleur prend habituellement ses repas. Dans tous les cas, le parcours n'a pas dû être interrompu ou détourné pour un motif dicté par l'intérêt personnel, et étranger aux nécessités essentielles de la vie courante ou indépendant de l'emploi.`` (RÉAU-ROND. Suppl. 1962).
Stylistique — Dans ces 2 accept. fondamentales, accident est gén. stable. On note cependant une certaine dévitalisation du sens I (métaphys.) à partir du XVIIIe s.; parallèlement, le sens phys. s'applique à des domaines techn. de plus en plus nombreux (cf. étymol. et hist.).
L'accident peut être personnifié :
40. ... nous avons monté à Passy, moi le soutenant sous le bras, lui marchant fermement, le mouchoir tout rougi, comme un accident ensanglanté qui passe, comme un maçon tombé d'un toit.
E. et J. DE GONCOURT, Journal, févr. 1869, p. 492.
41. ... les tués pour elle c'était rien que des accidents, comme aux courses, y n'ont qu'à bien se tenir, on ne tombait pas. En ce qui la concernait, elle n'y découvrait dans la guerre qu'un grand chagrin nouveau qu'elle essayait de ne pas trop remuer; il lui faisait comme peur ce chagrin; il était comblé de choses redoutables qu'elle ne comprenait pas. Elle croyait au fond que les petites gens de sa sorte étaient faits pour souffrir de tout, que c'était leur rôle sur la terre,...
L.-F. CÉLINE, Voyage au bout de la nuit, 1932, p. 120.
L'adversité peut except. être prise en bonne part :
42. Il disait : J'habite sous le toit des tuiles qui tombent. Peu étonné, car pour lui l'accident était le prévu, il prenait la mauvaise chance en sérénité et souriait des taquineries de la destinée comme quelqu'un qui entend la plaisanterie. Il était pauvre, mais son gousset de bonne humeur était inépuisable. Il arrivait vite à son dernier sou, jamais à son dernier éclat de rire. Quand l'adversité entrait chez lui, il saluait cordialement cette ancienne connaissance; il tapait sur le ventre aux catastrophes; il était familier avec la fatalité au point de l'appeler par son petit nom. — Bonjour, Guignon, lui disait-il.
V. HUGO, Les Misérables, t. 1, 1862, p. 781.
Dans le 1er des ex. suiv. le terme accident est synon. de accessoire (en peint.), dans le second il est associé de façon imagée au vocab. de la géol. (cf. accident2) :
43. Il faut peindre ce tableau-là... Et ne pas oublier quelqu'un de ces accidents intéressants, comme une belle armure brodée par quelque belle et bientôt enlevée à celui qui la porte et devenue la proie d'un ennemi.
A. CHÉNIER, L'Amérique, 1794, p. 128.
44. ... celui qui tient commerce, en ville, de très grands livres : almagestes, portulans et bestiaires; qui prend souci des accidents de phonétique, de l'altération des signes et des grandes érosions du langage;...
SAINT-JOHN PERSE, Exil, 1942, p. 227.
II.
⇒ACCIDENT2, subst. masc.
GÉOGR., GÉOL. Accident de terrain. ,,Le mot dislocation... est réservé d'ordinaire aux accidents nets et localisés, proprement tectoniques. Les dislocations et déformations de tout genre, faibles ou intenses, limitées ou étendues, lentes ou rapides, ont été réunies par G.K. Gilbert (1885, d'après J.W. Powel) sous le nom de diastrophisme... On distingue plus ou moins nettement : des mouvements intenses et localisés donnant naissance aux chaînes de montagnes, mouvements orogéniques... et des déformations modérées, étendues, affectant des continents ou fragments de continents : mouvements ép(é)irogéniques.`` (BAULIG 1956).
Au début du XIXe, le sens garde encore une certaine généralité :
1. Le pays était sans beautés apparentes : je l'avais aimé d'abord pour sa tristesse uniforme, pour le silence de ses vastes plaines. J'avais espéré m'y détacher entièrement de toute sensation vive, de toute admiration exaltée. Avide de repos, je croyais pouvoir sans fatigue et sans danger promener mes regards sur ces horizons aplanis, sur ces océans de bruyères dont un rare accident, un chêne racorni, un marécage bleuâtre, un éboulement de sables incolores venaient à peine interrompre l'indigente immensité.
G. SAND, Lélia, 1833, p. 177.
2. Les monts où je tournoyais ressemblaient à un éboulement des chaînes supérieures, lequel, en couvrant un vaste terrain, aurait formé de petites Alpes offrant les divers accidents des grandes.
F.-R. DE CHATEAUBRIAND, Mémoires d'Outre-Tombe, t. 4, 1848, p. 457.
Il est définitivement plus techn. dans les ex. suiv. :
3. Le pays n'est qu'une suite ininterrompue de vallons et de côtes, une sorte de moutonnement du sol, que le chemin de fer traverse, alternativement, sur des remblais et dans des tranchées. Aux deux bords de la voie, ces accidents de terrain continuels, les montées et les descentes, achèvent de rendre les routes difficiles.
É. ZOLA, La Bête humaine, 1890, p. 29.
4. ... dans les accidents du littoral : le fiord désigne une échancrure étroite et longue; le vik représente une anse arrondie. Tandis que les mots ner et skaji s'appliquent à des promontoires élevés, peut-être plus allongés d'après le second; eyrr est une lande plate et sablonneuse.
P. VIDAL DE LA BLACHE, Principe de géographie humaine, 1921, p. 267.
5. Les phénomènes volcaniques peuvent être considérés comme des accidents (W. M. Davis) qui perturbent le développement du cycle morphologique.
BAULIG 1956.
Prononc. ET ORTH. — 1. Forme phon. :[]. Enq. ://. 2. Dér. et composés : accidence, accidentaliser, accidentalité, accidenté, accidentel, accidentellement, accidenter.
Étymol. ET HIST. — Corresp. rom. : a. prov. accident; n. prov. acidènt; ital. accidènte; esp. accidente; port. acidente; cat. accident; sard. ; roum. accident.
1. Apr. 1160 « événement funeste » (BENOIT, Chr. ducs de Norm. éd. Carin Fahlin, I, 13 763 : Cil qui en sunt mostré a dei, En cui cuers creist e naist deslei, Maleit seit or cil aucidenz Qu'eissi comperent tantes jenz); 1268 « fait du hasard » (BRUNET LATIN, Trésor, éd. Chabaille, 312 ds T.-L. : L'amistiés qui naist par delit ou par profit... est amistié par accident); 2. 1170 « indice, signe extérieur (d'une passion) » (CHRÉT., Cligès, éd. Micha, 1580 : Bien aparçoit et voir li sanble Par les nuances des colors Que ce sont accident d'amors); 3. a) 1237 « modification passagère de l'être, terme philos. » (Roman de la Rose, éd. F. Michel ds T.-L. : Les accidens et les sustances Des choses qui sunt souz la lune); b) 1268 « id. » (BRUN. LATIN, Op. cit., 154 ibid. :cele mer est rouge non mie par nature, mais par accident).
Empr. au lat. accidens subst. neutre (part. prés. subst. de accidere), dep. Sénèque soit au sens d'« événement fortuit » (Epist., 90, 34 ds TLL s.v., 296, 81 : accidentia non aliter excipere quam imperata) soit d'« événement funeste » (ibid., 120, 12, ibid., 82 : vir... perfectus... numquam accidentia tristis excepit) d'où 1. Terme philos. dep. Quintilien (Inst. Orat. 3, 6, 36, ibid., 297, 46 : Theodorus de eo an sit et de accidentibus ei, quod esse constat, id est existimat quaeri) : cf. Boèce ds Porphyr. Vict., 2, ibid., 297 : [tres definitiones] : 1) a. est quod infertur et aufertur sine ejus in quod est interitu, 2) a. est quod contingit alicui et inesse et non inesse, 3) a. est illud quod neque genus sit neque species neque differentia neque proprium, d'où 3 (cf. avec 3 a fin Ve s. CLAUD. MAMERTUS, p. 193, 18 ibid., 73 : corpus substantia est, non accidens; avec 3 b fin IIIe s., début IVe s. CHALCIDIUS, Comm. in Platonis Tim., 284, ibid., 83 : omnia quae fiunt vel secundum naturam suam fiunt vel ex aliquo accidenti) d'où « signe extérieur, symptôme de maladie » dep. IVe-Ve s. (THEOD. PRISCIANUS ds TLL s.v., 298, 22 sq) puis terme gén. (cf. fin IXe s. WOLFHARDUS, Vita Waldburgae, 4 11 ds Mittellat. W. s.v., 87, 68 : res... ex propriis accidentibus discernuntur) d'où 2.
STAT. — Fréq. abs. litt. :2 847. Fréq. rel. litt. :XIXe s. : a) 4 270, b) 3 723; XXe s. : a) 3 746, b) 4 216.
BBG. — BAR 1960. — BARR. 1967. — BAUDHUIN 1968. — BAULIG 1956. — BÉNAC 1956. — BONNAIRE 1835. — BOUYER 1963. — CAP. 1936. — CHABAT t. 1 1875. — CRIQUI 1967. — CROS-GARDIN 1964. — Divin. 1964. — FOULQ.-ST-JEAN 1962. — FRANCK 1875. — GARNIER-DEL. 1961 [1958]. — GOBLOT 1920. — Gramm. t. 1 1789. — GUILB. Aviat. 1965. — JULIA 1964. — KOLD. 1902. — LACR. 1963. — LAFON 1963. — LAL. 1968. — LE BRETON Suppl. 1960. — LE CLÈRE 1960. — LITTRÉ-ROBIN 1865. — MARCEL 1938. — MIQ. 1967. — NYSTEN 1814-20. — PAMART (P.), RIVERAIN (J.). Mots dans le vent. Vie Lang. 1969, n° 210, p. 521. — PARÉ (G.). Le Roman de la Rose et la scolastique courtoise. Paris, 1941, pp. 23-51. — PIGUET 1960. — PLAIS.-CAILL. 1958. — QUILLET Méd. 1965. — RÉAU-ROND. Suppl. 1962. — RITTER (E.). Les Quatre dictionnaires français. Remarques lexicographiques. B. Inst. nat. genevois. 1905, t. 36, p. 339. — ROMEUF t. 1 1956. — ROUGNON 1935. — SILL. 1965. — SPRINGH. 1962. — SUAVET 1963. — Théol. cath. t. 1, 1 1909. — THOMAS 1956.

accident [aksidɑ̃] n. m.
ÉTYM. 1170, « indice, signe »; lat. accidens, accidentis, de accidere « survenir ».
1 (1237). Théol., philos. Ce qui n'est pas essentiel à l'être et qui, par suite, peut être modifié ou supprimé sans altérer la nature, l'essence, la substance. Attribut, phénomène.
1 Il n'y a du plus ou du moins qu'entre les accidents, et non point entre les formes et natures des individus d'une même espèce.
Descartes, Discours de la méthode, I.
Sophisme de l'accident, qui consiste à prendre une qualité accidentelle pour une qualité essentielle.
Vx. || Chose d'accident, qui n'est pas essentielle par soi-même. Accidentel.
2 L'esclavage dans la conquête est une chose d'accident.
Montesquieu, l'Esprit des lois, X, III.
(1268). Fait accessoire ( Accidentel); manifestation contingente.
3 Tout poème où le merveilleux est le fond et non l'accident du tableau pèche essentiellement par la base.
Chateaubriand, le Génie du christianisme, II, I, II.
4 Je ressentis toutefois ces événements distincts non comme des accidents ou des phénomènes limités mais comme des symptômes ou des prémisses, comme des faits significatifs dont la signification passait de beaucoup l'importance intrinsèque et la portée apparente.
Valéry, Regards sur le monde actuel, p. 12.
5 Nul doute : l'erreur est la règle : la vérité est l'accident de l'erreur.
G. Duhamel, Chronique des Pasquier, I, p. 26.
6 Il n'y a eu aucun changement de sens quand on a dit ressembler à au lieu de ressembler. Ce n'est pas autre chose qu'une modification de construction. Elle a le caractère d'un pur accident de forme, qui n'a aucune signification rationnelle ni psychologique.
F. Brunot, la Pensée et la Langue, p. 6.
2 Ce qui advient fortuitement, de façon imprévisible. Vx ou littér. Événement heureux ou malheureux qui vient rompre la marche régulière des choses. || Les accidents de la vie. || Les accidents de la fortune.
7 Il n'y a point d'accidents si malheureux dont les habiles gens ne tirent quelque avantage, ni de si heureux que les imprudents ne puissent tourner à leur préjudice.
La Rochefoucauld, Maximes, 59.
8 Il arrive quelquefois des accidents dans la vie d'où il faut être un peu fou pour se bien tirer.
La Rochefoucauld, Maximes, 310.
Mod. Épisode non essentiel. — ☑ Loc. littér. Par accident : par hasard. Fortuitement.
9 La poésie n'était pas mon métier; c'était un accident, une aventure heureuse, une bonne fortune dans ma vie.
Lamartine, Premières méditations, Préface.
10 Madeleine, j'en étais certain, ne pouvait ressentir aucun intérêt pour un étranger que le hasard avait jeté dans sa vie comme un accident.
E. Fromentin, Dominique, VII.
(1968, d'abord en politique). || Accident de parcours : « événement imprévu qui a perturbé l'évolution normale d'un phénomène économique, social ou politique » (P. Gilbert, 1971).
3 (Fin XIIe). Événement fâcheux ou malheureux. Aventure, calamité, contretemps, coup, ennui, malheur, mésaventure, revers; (vx) malencontre, méchef; (fam.) bûche, tuile.
11 Mais nous ne verrons point de pareils accidents
Lorsque Rome suivra des chefs moins imprudents.
Corneille, Cinna, II, 2.
(XVIIIe). Cour. Événement imprévu et soudain qui entraîne des dégâts, met en danger (de blessure, d'invalidité, de mort). Choc, chute, collision, explosion. || Un accident de voiture, de train, d'avion. || Accident de personnes. || Les accidents de la route, de la circulation. || Déclaration d'accident. || Un léger accident qui n'entraîne que des dégâts matériels (cf. De la tôle froissée). || Un grave, un terrible accident. || Accident mortel. || Prévention contre les accidents de la route (cf. Prévention routière).Situation matérielle créée par un accident (→ ci-dessous cit. 12).
11.1 (…) je ne sais comment l'accident eut lieu, mais il fut écrasé par la voiture qui tomba sur lui.
Balzac, Eugénie Grandet, éd. 1838, p. 8.
11.2 Et les accidents de machine, les déraillements, les rencontres, la mauvaise saison, l'accumulation des neiges, est-ce que tout n'était pas contre Phileas Fogg ?
J. Verne, le Tour du monde en 80 jours, p. 31.
12 L'horreur d'un accident qu'on découvre sur sa route provient de ce qu'il est de la vitesse immobile, un cri changé en silence (et non pas du silence après un cri).
Cocteau, la Machine infernale, p. 12.
13 (…) mot de Valéry : « Combien de gens meurent dans les accidents, pour ne pas lâcher leur parapluie ».
Gide, Journal, 25 janv. 1931.
Accident du travail : « événement imprévu et soudain survenu du fait ou à l'occasion du travail et qui provoque dans l'organisme une lésion ou un trouble fonctionnel permanent ou passager » (Reclus). || Lois sur les accidents du travail. || Accident de trajet.
4 Méd. Phénomène qui se manifeste dans le développement d'une maladie. || Accident primitif, accidents secondaires, tertiaires de la syphilis.Accidents d'origine médicale.Symptôme d'aggravation dans le cours d'une maladie. Complication, lésion.
14 De fait, je n'ai jamais eu dans la suite le moindre accident, la plus légère menace de récidive.
Martin du Gard, les Thibault, IV, 9.
5 Ce qui rompt l'uniformité.
15 (…) les détours de ce chemin pittoresque, dont les moindres accidents réveillent des souvenirs (…)
Balzac, Eugénie Grandet, éd. 1838, p. 29.
a Accident de terrain : dislocation ou déformation de tout genre. Aspérité, mouvement (→ Montée, cit. 9).
16 (…) les différences de perspective, comme un accident de terrain, colline ou château, qui apparaît tantôt à droite, tantôt à gauche, semble d'abord dominer une forêt, ensuite sortir d'une vallée, et révèle ainsi au voyageur des changements d'orientation et des différences d'altitude dans la route qu'il suit.
Proust, le Temps retrouvé, Pl., t. III, p. 970.
b Mus. Signe (dièse, bémol, bécarre) qui, placé dans une phrase musicale sans être indiqué à la clé, élève ou baisse le ton.
DÉR. Accidenté.
COMP. Accidentologie.

Encyclopédie Universelle. 2012.