ÂME
Dans le monde occidental, la notion d’âme s’est constituée lentement et ne remonte pas à la nuit des temps. On peut suivre les étapes qui jalonnent l’émergence d’un principe spirituel du vivant et qui aboutissent à sa justification philosophique par Platon et Aristote. Souvent remise en cause dans les écoles postérieures au profit de théories matérialistes ou mécanistes de l’âme, mais reprise avec éclat par le néo-platonisme, cette notion de l’âme a trouvé dans le judéo-christianisme son achèvement.
1. Émergence d’un principe spirituel du vivant
Chez Homère, notre plus ancien témoin qu’il faut situer au-delà de 700 avant J.-C., ce que nous appelons «âme» (du latin anima , apparenté au grec 見益﨎猪礼﨟, vent, souffle) est en fait dédoublé et exprimé par deux mots grecs: le 羽猪礼﨟, qui signifie passion, volonté, esprit, et s’apparente au verbe 羽諸 (s’élancer), évoque un flot de sang chaud; au contraire, la 祥羽﨑兀, qui signifie vie et s’apparente au verbe 祥羽﨑諸 (respirer), évoque le souffle de la respiration animale. Ainsi, les fonctions de la conscience et celles de l’esprit, qui caractérisent la personnalité individuelle, relèvent davantage de ce phénomène psychophysiologique exprimé par le 羽猪礼﨟; en revanche, la vie indifférenciée qui rend tout corps vivant est la 祥羽﨑兀.
Dans l’expérience de la mort, c’est la 祥羽﨑兀, la vie, qui abandonne le vivant par la bouche (souffle) ou toute blessure de son corps, et s’en va chez Hadès. Après la mort du vivant, la 祥羽﨑兀 est donc conçue comme son double, sorte de fantôme à la ressemblance du défunt, car le sentiment soit de crainte soit d’affection qui unit au mort fait imaginer son existence dans l’au-delà comme un double plus ou moins personnalisé de l’individu.
L’analyse du langage homérique aboutit donc à ce résultat paradoxal que le même mot 祥羽﨑兀 a une double signification: dans le vivant, il désigne le phénomène de la vie en général; chez les morts, les 祥羽﨑見晴 sont les doubles de vivants, réduits à la vie ralentie du royaume des ombres. Et il n’y a aucune continuité entre les deux significations. Ce que nous appelons maintenant «âme» et qui est le 羽猪礼﨟, meurt avec l’individu; ce qui survit après lui, c’est la vie végétative impersonnelle, qui devient son fantôme amical ou hostile et qui apparaît, en particulier, dans les rêves.
On le voit: chez Homère, cet unique principe spirituel que nous appelons une âme n’est pas encore clairement dégagé, et la croyance en la divinité de l’âme et en son immortalité n’est pas du tout formulée. Le manque de documents littéraires nous empêche de suivre dans le détail le processus très lent par lequel la nécessité d’exprimer l’unité du vivant a déterminé l’absorption du 羽猪礼﨟 par la 祥羽﨑兀. Ce fut probablement pour une part importante l’effet des religions à mystères, qui étaient très populaires et qui prétendaient procurer à l’initié le «bon espoir» d’une immortalité bienheureuse «au château de Chronos» ou «dans l’île des Bienheureux» (Pindare). Cette espérance n’a évidemment de sens que si l’on suppose la survie de l’âme et son identité ici et là-bas.
Cette évolution se trouve achevée vers le VIe siècle avant J.-C. Comment comprendre autrement qu’Anacréon puisse dire à son amant: «Tu tiens les rênes de ma 祥羽﨑兀»; Simonide: «Ose donner du bon temps à ta 祥羽﨑兀», et Eschyle: «Accordez à vos 祥羽﨑見晴 la joie que chaque jour vous offre.» Pour le philosophe de Milet, Anaximène, «notre 祥羽﨑兀, qui est air, nous rassemble sous son commandement». La 祥羽﨑兀 désigne maintenant toute la personnalité de l’homme vivant, ce que nous appelons, aujourd’hui encore, son âme, et c’est à cette âme que les mystères proposent la conversion qui, d’un seul coup, lui assurera le bonheur éternel.
Tous ces textes nous montrent clairement qu’aux VIe et Ve siècles avant notre ère une véritable révolution s’est opérée dans l’anthropologie depuis Homère: corps et âme sont corrélatifs dans l’homme vivant et, pour le temps de la vie mortelle, l’âme est chez elle dans le corps. Pourtant, une autre révolution devait encore voir le jour avant Platon: dans cette conception pacifiée de la nature humaine, une guerre allait se déclarer entre le corps et l’âme, dressés l’un contre l’autre comme frères ennemis.
L’influence du chamanisme
Au début du VIe siècle, l’ouverture de la mer Noire au commerce et à la colonisation grecques amena pour la première fois la civilisation hellénique au contact du chamanisme. On peut reconstituer la ligne d’une tradition spirituelle de chamanisme grec qui part de la Scythie et de la Thrace (Abaris, Aristée, Orphée), traverse l’Hellespont, arrive en Asie Mineure (Hermotime de Clazomènes), se combine peut-être avec quelques traditions minoennes survivantes en Crète (Épiménide), émigre dans le «Far West» avec Pythagore, et achève son mouvement avec le Sicilien Empédocle. Tous ces hommes sont les prophètes d’une nouvelle croyance: ils enseignent, et ils montrent par leurs activités chamanistiques, qu’il y a en l’homme une âme ou un «moi» d’origine divine, qui peut par des techniques appropriées quitter le corps, que ce «moi» existait avant le corps et durera après lui. Les activités de cette âme et celles du corps sont directement inverses, corps et âme sont mis en opposition radicale. D’où une psychologie nouvelle dans laquelle le corps est l’ennemi de l’âme: c’est déjà le dualisme.
Avec le chamanisme grec, nous sommes donc en présence d’un large phénomène spirituel qui, réagissant lui-même sur le donné religieux traditionnel, détermina plusieurs mouvements qui, par-delà un fonds commun relativement simple, se réclamèrent chacun d’un antécédent chamanistique connu ou inconnu. Les plus célèbres s’appellent l’orphisme et le pythagorisme, mais beaucoup de ces mouvements chamanistiques, dont nous parle Platon quand il invoque un «discours sacré», une «tradition antique» ou des «prêtres divins», sont restés anonymes, semble-t-il.
Ramenée à ce fonds commun, la nouvelle anthropologie se compose de trois éléments résultant chacun d’une interprétation moralisante des pratiques des chamans;
– la liberté dont l’âme peut jouir dans le sommeil, ou si le chaman entre en transe, et, à la limite, à la mort corporelle, révèle une opposition fondamentale entre le corps et l’âme;
– le «noviciat», auquel se soumettent les chamans, met en valeur les pratiques d’ascèse volontaire à base d’abstinences et d’exercices spirituels;
– les histoires de chamans disparaissant puis réapparaissant, les migrations magiques de l’esprit d’un chaman dans un autre conduisent tout naturellement à la croyance en une âme démonique, indestructible, qui se réincarne et peut passer de corps en corps.
Ces trois éléments se relient logiquement. Si le corps, c’est le mal, il faut le mépriser, le réduire pour libérer l’âme. Cette purification se fait progressivement par le moyen des réincarnations successives qui purgent l’âme et l’amènent enfin à la délivrance du cycle des naissances et au retour à son origine divine. Ce que les mystères accordaient en une seule fois, la métensomatose le procure par une purification lente. Platon nous apporte l’écho de ces doctrines: «J’ai entendu parler des hommes [...] savants dans les choses divines. Ce qu’ils disent, c’est que l’âme de l’homme est immortelle et que tantôt elle aboutit à un terme (c’est précisément ce que l’on appelle mourir) et tantôt elle recommence à naître, mais que jamais elle n’est anéantie» (Ménon , 81 a); «il existe une vieille tradition [...] c’est que, d’ici, les âmes s’en sont allées là-bas, et qu’à nouveau elles s’en viennent ici, et qu’elles naissent à partir de ceux qui sont morts» (Phédon , 70 c); «l’âme est dans le corps comme dans une prison» (Gorgias , 525 a; Phédon , 62 b), «ou même dans une tombe» (allitération 靖諸猪見- 靖兀猪見, Gorgias , 493 a; Cratyle , 400 c). L’extrême pointe de ce pessimisme se révèle au mieux dans l’ironie sinistre d’Aristophane, lorsqu’il désigne les vivants par cet euphémisme: «Les morts d’en haut» (Grenouilles , 420). Si ce mot fait rire, c’est justement parce qu’il raille un sentiment profond que chacun prend très au sérieux.
À la fin du Ve siècle, en Grèce, la notion d’âme, principe spirituel du vivant, d’origine divine, promise à l’immortalité, faisait partie des croyances bien établies. La philosophie pouvait s’en emparer pour lui donner un fondement rationnel.
2. Avènement de la «psychologie» avec Socrate, Platon et Aristote
La mission de Socrate auprès de ses contemporains était de les rappeler «au soin qu’il faut prendre de son âme» (Apologie , 24 d; 30 a) pour la rendre meilleure, car «l’homme, c’est son âme» (Alcibiade , 130 c).
Héritier de Socrate, Platon organise sa doctrine en une véritable psychologie. Mettant en scène son maître dans la prison au moment où il va mourir, il saisit cette occasion dans le Phédon pour nous enseigner la vraie nature de l’âme et les arguments qui fondent son immortalité. Il développe quatre preuves:
– Tout changement a lieu d’un contraire à un autre, et il doit pouvoir s’accomplir dans un sens ou dans l’autre, car, si le passage n’avait lieu que dans un seul sens, tout finirait par se confondre dans une unité immobile. Appliquons ce principe à l’opposition de la vie et de la mort, il en résulte qu’il ne doit pas y avoir seulement passage de la vie à la mort, mais aussi de la mort à la vie (70 c-72 c);
– La vie intellectuelle de l’âme, qui est une réminiscence, suppose une connaissance des Idées dans une vie antérieure à notre existence présente (72 c-77 a);
– L’âme qui connaît les Idées est de la même famille que celles-ci, car le semblable est connu par le semblable. Comme l’Idée, l’âme est donc simple, de nature divine, et la simplicité de son essence comme l’immatérialité de son opération impliquent l’impossibilité de sa dissolution et la certitude de son immortalité. Précisons: la partie de l’âme qui connaît l’Idée, le 益礼羽﨟, est donc immortelle (78 b, 80 c);
– Chaque chose est ce qu’elle est par participation à une Idée, et une Idée déterminée ne peut admettre son contraire. L’âme a pour essence la vie, elle exclut par conséquent son contraire, la mort. Donc l’âme est immortelle (105 b-107 a). «C’est donc réellement que nos âmes à nous existent éternellement dans les demeures d’Hadès» (107 a).
On voit bien que les prémisses de ces raisonnements rappellent les données de la tradition: l’opposition de l’âme et du corps et de leurs fonctions respectives, l’Hadès considéré comme réservoir des âmes, la possibilité d’une vie antérieure dans cet Hadès ou dans le monde, le souvenir de cette vie dans les acquisitions de la mémoire. La mise en forme rigoureuse du raisonnement aboutit à un double argument: un argument «de fait» selon lequel, d’après la loi générale du devenir, l’état de l’âme après la vie corporelle doit être semblable à l’état qui a précédé cette vie; la doctrine des Idées implique que l’âme, avant son entrée dans le corps, a contemplé le monde intelligible; il faut donc qu’il en soit de même après la mort; et un argument «de droit» selon lequel l’intelligible, l’Idée, appelle une intelligence; cette intelligence, pensée de l’intelligible, est nécessairement simple et éternelle comme l’Idée (Ménon , 86 a). Telle fut la grande prédication de Platon du début à la fin de sa vie, et un beau texte du Timée nous rappelle ces vérités sur un mode presque lyrique: «Au sujet de l’espèce d’âme qui est la principale en nous, il cpnvient d’observer que c’est Dieu qui la donne à chacun comme un 嗀見晴猪諸益, c’est ce Génie dont nous avons dit qu’il habite dans la partie la plus élevée de notre corps. Or, en vertu de son affinité avec le ciel, cette âme, notre Génie, nous tire loin de la terre, car nous sommes une plante non pas terrestre mais céleste. En effet, c’est du côté où, pour la première fois, notre âme a pris naissance, que la divinité a suspendu notre tête, qui est ainsi la racine de tout le corps.» (90 a).
Plus difficile est la théorie platonicienne sur la nature de l’âme, dans laquelle on a cru pouvoir déceler quelque contradiction. On vient de voir que la nature de l’âme est totalement simple dans le Phédon ; mais, dans La République (IV), Platon expose une doctrine des parties de l’âme, qui sont comme des canaux en lesquels se partage son activité, l’intellect, le désir, la passion; d’autre part dans le Timée (35 a-b) le démiurge constitue l’âme de trois éléments, l’indivisible, le divisible et le mélange des deux. Il faut remarquer, toutefois, que c’est la condition corporelle de l’âme qui introduit dans cette composition le déséquilibre fatal décrit dans le mythe du Phèdre (246 a-249 b) et qui provoque la chute de l’âme. Platon renonce au surplus à exprimer rationnellement cette chute et ses raisons; il a recours au mythe qui compare l’âme à un cocher qui mène deux chevaux, l’un bon, l’autre mauvais. Ainsi nous donne-t-il à entendre que seule la partie supérieure de l’âme, celle qui est apparentée au divin et qui permet à l’homme d’accéder à la vie philosophique, est, selon lui, immortelle. Elle doit se purifier petit à petit par le cycle des naissances, et ce n’est que dans l’eschatologie que l’âme, ayant retrouvé sa simplicité divine dans la maîtrise parfaite de ses puissances inférieures, se trouve digne d’être «assimilée au divin» (Théétète , 176 b). Peut-être ces difficultés ont-elles poussé Platon à formuler, dans le Phèdre (245 c-246 a), une nouvelle preuve de l’immortalité de l’âme fondée sur son privilège d’être à soi-même source de son propre mouvement et principe du mouvement de tous les corps.
Cette dernière remarque préparait évidemment Aristote à exprimer l’essence de l’âme dans les catégories de sa propre doctrine du mouvement, de la puissance et de l’acte. «L’âme est la forme ou l’acte du corps dont c’est la nature de pouvoir vivre» (De anima , II, 1, 412 a, 20 et 28). L’application d’une autre doctrine fondamentale, l’hylémorphisme, lui permet de surmonter tout dualisme, en expliquant que l’âme est unie au corps comme la forme à sa matière: c’est la théorie du composé humain. Du même coup, il peut faire dériver toute la connaissance de la perfection sensorielle et hiérarchiser les degrés de la connaissance tout en réservant le cas du 益礼羽﨟, l’intellect, qui vient du dehors (De generatione animalium , II, 3, 736 b, 28), et grâce auquel «l’homme ne doit pas, comme les poètes nous le recommandent, parce qu’il est homme, ne penser qu’aux choses humaines, ni parce qu’il est mortel ne penser qu’aux choses mortelles, mais autant qu’il le peut, il doit vivre une vie divine» (Éthique à Nicomaque , X, 7, 1177 b, 31). Car le 益礼羽﨟 seul est dans l’âme séparable, car, seul, il est essentiellement acte (De anima , III, 5, 430 a, 17), il survit à la mort du corps (Métaphysique , XII, 3, 1070 a, 24-26), il est l’âme immortelle et divine.
Avec Platon et Aristote, nous avons atteint un corps complet de doctrines sur l’âme, les premières psychologies scientifiques. C’est toujours par rapport à eux que se situeront toutes les théories psychologiques du Moyen Âge plus aristotélicien et de la Renaissance plus platonicienne, jusqu’aux profonds renouvellements de la psychologie expérimentale ou de la psychologie des profondeurs aux XIXe et XXe siècles.
3. Éclipse et retour des doctrines sur l’âme à la période hellénistique et romaine
Après la mort d’Alexandre le Grand (323 av. J.-C.), le monde hellénique se trouva plongé dans un bouleversement sans précédent: on passait sans transition de la petite cité grecque à la totalité de la «terre habitée»; l’homme, défini par Aristote comme «le vivant qui habite une cité», devenait subitement «œcuménique», citoyen du monde et solidaire de l’univers, partout chez lui et infiniment libre, c’est-à-dire aussi bien partout seul et réduit à soi. À la recherche de sa situation cosmique, l’homme de ce temps est le plus souvent un agnostique et un sceptique. Quant à l’intelligentsia, elle s’abandonne aux consolations du mysticisme astrologique. De toute façon, c’est le déclin du rationalisme.
Le stoïcisme fut essentiellement la philosophie d’un homme placé dans un monde considérablement agrandi: philosophie du cosmos ( 礼靖猪礼﨟) conçu comme un gigantesque vivant, philosophie de la «sympathie» ou des harmonies préétablies et des correspondances secrètes entre les parties du monde. En référence à ce monde, l’homme perdu en son intérieur cherche à se situer en lui et se définit comme un «microcosme», réduction du monde immense, dont les membres correspondent aux différentes parties de l’univers. L’idée d’une «âme du monde», qui dans la philosophie platonicienne exprimait le finalisme du système, est reprise dans le stoïcisme, mais détachée de sa justification dialectique et appuyée seulement sur une analogie biologique empruntée aux Présocratiques. Parallèlement l’âme de l’homme n’est plus qu’une étincelle de vie cosmique, un feu de l’intelligence cosmique, «un fragment détaché du Dieu cosmique» (Épictète), qui retourne au grand Tout à la fin de chaque période ramenant la conflagration universelle.
Quant à Épicure, pour libérer le sage de la crainte de la mort, il le persuade que corps et âme sont un agencement provisoire d’atomes, les uns plus épais, les autres plus subtils, qui se défait naturellement à la mort, mettant fin à un destin qui n’a aucun droit à l’immortalité. C’est la négation pure et simple de la nature spirituelle et de l’immortalité de l’âme.
Dans le même temps, ceux qui dans la tradition platonicienne continuaient à croire à la survie de l’âme, commençaient à l’envoyer après la mort, non plus sous terre chez Hadès, mais dans les étoiles au sein du ciel. Les découvertes astronomiques et une meilleure connaissance du ciel permettent de donner de la consistance à cette croyance. On explique maintenant que les âmes descendent et remontent, et l’on s’interroge sur les raisons de la descente et le choix de vie. On rapporte également à la traversée par les âmes au cours de leur descente des sept sphères planétaires les caractéristiques qu’elles présentent: elles empruntent en passant aux planètes des qualités ou des vices qu’elles leur rendent au retour.
Au début de l’ère chrétienne, se produit un retour à l’étude des grands auteurs, Platon et Aristote. Alors se constitue le schéma d’un traité scolaire de l’âme, qui deviendra un élément constant de tout système philosophique. Il comporte quatre parties:
– nature, puissances et activités de l’âme;
– origine, temps et mode de l’incarnation;
– sort de l’âme incarnée;
– eschatologie.
Dans ce cadre se coulent les traités que nous trouvons dans les Hermetica , chez Aetius ou Jamblique, comme aussi chez Tertullien.
Dans le néo-platonisme, l’âme est l’une des trois hypostases divines (Un, Intellect, Âme: Plotin, Ennéade , V, 1) et, de ce fait, elle est de nouveau conçue comme immatérielle et éternelle. Toute son ascèse consiste à «fuir vers le haut» et à rejoindre sa patrie. Fortement impressionné par cette doctrine, saint Augustin a consacré une grande partie de ses recherches à démêler ce qui en elle était conciliable avec le christianisme.
Pourtant une difficulté insurmontable demeurait entre païens et chrétiens. Pour les néo-platoniciens, le nombre total des âmes, égal à celui des astres, est déterminé une fois pour toutes. Ce dogme, d’une part, rend nécessaire la doctrine de la métempsychose, d’autre part, il exclut qu’il y ait, à proprement parler, une histoire et il confirme la conception cyclique du temps. On peut lire chez Olympiodore (VIe s.) cette affirmation significative: «La doctrine relative à la métempsychose, ou métensomatose, est une nécessité, dès lors que l’on admet ces deux autres: l’éternité du monde et l’immortalité de l’âme. Car si ces deux doctrines doivent être tenues, il faut qu’il y ait métempsychose pour que l’infini n’existe pas en acte» (In Phaedonem , X, 1, p. 137, Westerink). L’aveu est éloquent: si le nombre des âmes est limité, celles-ci ne peuvent être que livrées à un cycle perpétuel. C’est une sorte de limite imposée à Dieu. Pour les chrétiens au contraire, Dieu, en créant continuellement de nouvelles âmes, ajoute ainsi perpétuellement des éléments nouveaux qui permettent le développement de l’histoire et rendent possible une conception linéaire du temps.
4. La notion d’âme dans la révélation judéo-chrétienne
La Bible présente constamment l’homme comme composé de trois éléments: la néfesh , le basar et la ruah . La néfesh , c’est la gorge, l’organe de la respiration, qui en est venu rapidement à désigner tout appétit et désir et finalement à recouvrir tout le moi. La néfesh , c’est la personne. Le basar , c’est la manifestation concrète de la néfesh , c’est-à-dire le cœur, les reins, le foie, bref le corps en tant qu’il exprime les sentiments de la néfesh . Mais ce qui assure l’existence du composé néfesh-basar , c’est la ruah , c’est-à-dire l’Esprit communiqué par Dieu (Genèse, II, 7). La ruah est donc le lien de l’homme à Dieu, la présence de Dieu dans l’homme.
Pour saint Paul (I Corinthiens, XV, 35-53), comme pour la tradition biblique, la 祥羽﨑兀 (néfesh ) est le principe de vie qui anime le corps; elle est son âme vivante et peut servir à désigner tout l’homme. Mais elle est dominée par le 﨎羽猪見 (ruah ) pour que l’homme soit rempli de vie divine. Cette possession de l’homme par le 﨎羽猪見 commence dès cette vie mortelle par le don du Saint-Esprit (Romains, V, 5), mais n’obtient son plein effet qu’après la mort. Aussi le christianisme conçoit-il l’immortalité dans la restauration intégrale de l’homme, c’est-à-dire dans la résurrection du corps par l’Esprit, don que Dieu a retiré de l’homme à la suite du péché (Genèse, VI, 3) et qu’il lui rend par l’union au Christ ressuscité. La 祥羽﨑兀 se transfigure en quelque sorte en 神益﨎羽猪見, qui opère la glorification et l’incorruptibilité du corps de l’homme. À l’inverse, donc, de la philosophie grecque, la révélation chrétienne enseigne une sorte de transformation de l’âme et du corps dans l’immortalité divine. Aussi la résurrection des corps a-t-elle été la première pierre d’achoppement pour les philosophes païens (Actes des Apôtres, XVII, 32).
On peut aussi présenter la doctrine chrétienne comme un aboutissement de la philosophie grecque. L’âme, principe spirituel, perfectionnée par le don de l’Esprit-Saint procuré par Jésus, est rendue capable d’immortaliser son propre corps. Déjà dans le cours du Ier siècle avant J.-C., l’influence grecque se fait fortement sentir dans les livres sapientiaux de la Bible. Les Pères de l’Église, tant grecs que latins, pour exprimer les vérités de foi, ont eu souvent recours aux catégories de pensée du monde gréco-latin. Il est même arrivé que le mode de pensée païen prenant le dessus entraîne la théologie chrétienne dans les déformations du gnosticisme.
Il n’en reste pas moins que le christianisme, en enseignant l’incarnation du Fils de Dieu, et en l’expliquant par l’union de la nature divine et de la nature humaine, corps et âme, a utilisé et du même coup renforcé la doctrine de l’âme élaborée par des siècles de philosophie grecque. Et la parole de Jésus: «Qui veut sauver sa vie ( 祥羽﨑兀) la perdra, mais celui qui perd sa vie à cause de moi la trouvera» (Matthieu, XVI, 25), a toujours été entendue par le croyant comme un appel divin à devenir en Jésus homme parfait, corps et âme.
En 1956, dans son livre Immortalité de l’âme, ou Résurrection des morts? , Oscar Cullmann a établi (justement, selon nous) que le Nouveau Testament enseigne, sur le sort individuel de l’homme après la mort, non pas l’immortalité de l’âme mais la résurrection des morts. Cette thèse a ouvert un grand débat qui n’est pas clos. On peut, toutefois, avancer qu’il n’y a peut-être pas autant de contradiction entre les deux formules que n’en voit Cullmann. Ces deux vues complémentaires sur l’au-delà ne sont pas à situer au même niveau épistémologique. Mais il nous semble vrai de maintenir que, seule, la résurrection des morts fait l’objet d’une révélation au sens fort du mot.
5. La notion d’âme, de la Renaissance à l’époque contemporaine
La Renaissance
Marsile Ficin, à côté d’une âme rationnelle et libre, ne renonce pas à l’«âme des astres», en somme à une conception psychocosmique. Paracelse évoque un corps astral des âmes et entre les âmes, Patrizi une pampsychia , Giordano Bruno une âme universelle. Chez Cornelius Agrippa, l’intellect, c’est l’âme du monde: il est vrai qu’Agrippa se livre à la hiérarchisation décroissante pur intellect-raison-âme sensitive. Ailleurs, il platonise avec une âme substance divine dans les corps. Ici donc on trouve deux sortes d’âme: l’une d’essence spirituelle, l’autre plus proche de la vie, sinon de la matière. Pour Nifo, l’âme correspond à une activité psychique spiritualisante. Pomponazzi parle d’une âme intellective qui se distingue par sa poly-influence sur le corps: il s’agit d’une psychophysiologie à tous les niveaux. Si Fracastori consent à poser l’individualité d’une âme «séparée et abstraite du corps», c’est qu’il se place au regard de Dieu, ce qui ne l’empêche pas, selon La Forge (1666), d’en venir presque à la corporéifier, en l’assimilant «aux choses qu’elle se représente». Guillaume Postel s’adonne à une analyse fouillée de la notion, distinguant l’anime , intellect agent, de l’«âme», intellect patient. La première est une âme intellective impérissable unie à l’âme proprement dite, produit naturel du sang. Elle est mue par la mente , elle-même lumière pour les théologiens, âme dirigée par l’esprit selon les philosophes.
Le XVIIe siècle
Gassendi n’est pas loin de ces opinions; il pense – peut-être, car l’interprétation de sa philosophie appelle nuances et prudence – à une forme animant l’esprit et le corps. Cependant, où se situerait exactement ce et ? En tout cas, Descartes, lui, sépare nettement les deux, l’union âme-corps posant problème. C’est précisément cette union que s’efforceront, sinon d’éclaircir complètement, du moins d’étudier avec passion et rigueur, les cartésiens. À ce titre, citons d’abord La Forge, qui analyse les opérations tant de l’esprit, «faculté» de l’âme, que du cerveau, corporel, sans omettre le cas des états ou des notions plus ou moins intermédiaires. Cordemoy travaille sur le même thème: «de l’union de l’Esprit et du corps... de la distinction du corps et de l’âme», mais son originalité apparaît principalement dans un Discours physique de la parole , où, en matière de signe , il tâche de donner à l’âme (esprit, pensée) son rôle le plus objectif. C’est toujours l’«union» qui préoccupe Rohault, Cally, Regis... et Malebranche. Celui-ci, attaché à une nature spirituelle, garde à l’âme sa généralité, qui renvoie à des corrélats tels que conscience, connaissance, sentiment intérieur; et il emploie plutôt «esprit» dans une acception plus fonctionnelle. Cependant, il ne s’acharne pas à établir de systématiques distinguos. Francis Bacon, se référant au «souffle» de la Genèse, aboutit à la distinction entre l’âme rationnelle, venant de Dieu, et l’âme engendrée, commune aux hommes et aux animaux. Hobbes interprétera ledit souffle dans le sens d’une dominante matérielle. Spinoza semblerait ne pas attacher trop d’importance au principe et à la finalité de la notion d’âme. Il considère bien comme distinctes l’âme et l’idée de l’âme, mais il les voit unies en tant qu’unique attribut de la pensée ou, plus profondément, comme étant soit essence attribut de Dieu, soit engagement dans l’«ordre commun de la nature», cette alternative se résolvant, si l’on peut dire, dans le Deus sive Natura bien connu. Une étude informatique leibnizienne (Monado 74 , A. Robinet) met en évidence un groupage sémantico-métaphysique âme, substance, idées; pour «raison», il y a différenciation. L’âme «simple» est, au demeurant, la limite du monde, une unité unifiante. Locke trouvait ardu le problème de l’âme, de sa nature immatérielle ou matérielle. Toutefois, il procède à un exercice analytique et pense rencontrer, d’une part, une «table rase» avec potentialité; d’autre part, une âme réceptrice active ou passive.
Le XVIIIe siècle
Au XVIIIe siècle, les dominantes seraient, outre le dualisme strict corps et âme devenu scolaire, une conception rationalo-empiriste, ou une manière de «pananimisme». Chez Hume, on envisage un «ensemble de perceptions», la raison, quant à elle, se trouvant être un «instinct» de l’âme. Pour Lignac, il s’agirait de témoigner d’un sens intime de l’existence. On a affaire à une psychophysiologie chez Lossius, à une âme faculté représentative chez D. Tiedermann et Sulzer. Du côté d’un certain globalisme, on évoquera le Vicaire savoyard de J.-J. Rousseau, où l’âme désignerait plutôt, sinon la vie, du moins l’existence; l’âme est connue inévitablement par la pensée, mais en même temps par le sentiment, remarquable par sa valeur potentialisante et par son immortalité. Parfois Voltaire se contenterait d’un «apsychisme», regardant comme inutile de placer entre le corps humain et Dieu un «petit être subalterne». Wolf et Crusius y consentent, mais on croirait qu’ils voient une commodité, pour ainsi dire pédagogique, à distinguer, le premier diverses acceptions psychologiques et métaphysiques, l’autre les idées de l’âme et celles des sens. Fichte uniformise en posant une intersubjectivité. Von Creuz hésite à se prononcer: l’âme n’est pas simple en soi, mais elle devient plus simple en proportion de la rationalité de son hôte. Kant trouve parfaitement discutable la conception d’une substance non décomposable. Il repousse donc, dans un premier temps, ce qu’il appelle une apparence, puis il retrouve l’âme dans l’extase et la nécessité pratique de la morale, cette dernière exigeant la justification de l’immortalité.
Le XIXe siècle
Très riche XIXe siècle! Il y a le renouveau thomiste des «vingt-quatre thèses», avec la distinction des âmes (1. âmes de l’ordre végétatif et sensitif; 2. âme humaine...) et la reconnaissance de l’âme raisonnable comme force substantielle du corps. Le type globalisant, généralisant, intégralisant subsiste et se développe avec l’unité dynamique du vivant de Schelling, après la relation établie entre âme et univers par Mesmer, et la définition de Dieu comme «âme universelle des êtres» par Volney. Fourier, au lieu de l’âme individuelle, considérerait une âme universelle socio-passionnelle. A. Comte, en revanche, renonce à un «principe vital ou âme» au profit de l’explication par une harmonie positiviste de toutes les fonctions de l’organisme. Ici il ne s’agit plus de l’univers cosmique: on s’en tient au tout individuel. Celui-ci peut se révéler être, avec Schopenhauer, une harmonie résultant d’un principe sentimental et poétique. Maine de Biran se demande s’il y a un rapport entre âme, esprit, entendement, raison. Oui, apparemment, avec un ensemble philosophico-sémantique embrassant volonté, effort, acception spirituelle. Hegel déplore qu’on sépare rationnellement, et, croit-il, artificiellement, âme et corps, esprit et matière. Il rencontre pourtant une contradiction dans une âme qui serait un concept universaliste. Cependant, il recourt au terme et à la notion d’âme pour les besoins de son analyse philosophico-politique: dynamisme du vivant, moteur social, âme idéelle (esthétique), pensée en exercice (dialectique), inconscient individuel ou collectif... Il est certes à peine besoin de signaler que, pour la notion d’âme, le XIXe siècle a subi l’influence, dans des proportions diverses, du romantisme, ou s’est trouvé confronté avec lui. C’est au sein de ce contexte que Léon Ollé-Laprune, dans son explication de la connaissance, en réfère à l’homme tout entier et plus spécialement à l’âme comme sentiment et raison ensemble .
Le XXe siècle
L’âme confondue avec la matière nous amène au XXe siècle, à la psychologie comme science positive d’Ardigo. Freud affirme l’existence d’une science des faits psychiques, regardant l’âme en tant que généralité psychique observable et analysable par l’esprit (raison). Que nous sommes loin d’un Ravaisson, mort en 1900, et de sa conception spiritualiste! À l’opposé, et bien plus tard, Sartre refuse l’âme, car, pour lui, le corps est le seul objet psychique. Max Scheler tient pour l’existence de l’âme comme fait s’imposant à nous, à l’exclusion de tout concept de substance personnalisante. Léon Brunschvicg professe une sorte de rationalisme spiritualisé dans une réflexion et une recherche strictes et appliquées: l’âme est mouvement et énergie spirituelle immanents, un ensemble intellectuel et (ou) affectif... Gaston Bachelard n’est pas étranger à une phénoménologie de l’âme. Il considère celle-ci comme non substantialisable; et, par ailleurs, il trouve en elle une des deux composantes de l’androgyne cosmique. L’âme, pour Maurice Merleau-Ponty, serait un agent général cogitatif... et, chez lui, une vision gestaltiste condamne la distinction entre l’âme et le corps. Selon Heidegger, l’âme est une essence, selon une acception affective et vague. Le dualisme persiste (Husserl)... la question de l’âme aussi, même tout aujourd’hui, malgré le règne des «sciences humaines».
âme [ am ] n. f. I ♦
1 ♦ Relig. Principe spirituel de l'homme, conçu comme séparable du corps, immortel et jugé par Dieu. Sauver, perdre son âme. Prier pour l'âme, le repos de l'âme de qqn. Dieu ait son âme ! — Loc. Âme damnée. Comme une âme en peine. Vendre son âme au diable, lui promettre son âme en échange d'avantages terrestres.
2 ♦ Un des deux principes composant l'homme, principe de la sensibilité et de la pensée. « Nous sommes composés de deux natures opposées, [...] d'âme et de corps » (Pascal). Le corps humain « cache notre réalité [...] La réalité c'est l'âme » (Hugo). — Loc. Se donner corps et âme. Ils s'y sont dévoués corps et âmes. De toute son âme (cf. De tout son cœur).
3 ♦ Principe de la vie morale, conscience morale. La paix de l'âme. Force, grandeur d'âme. « Le peuple n'a guère d'esprit, et les grands n'ont point d'âme » (La Bruyère). « J'ai l'habit d'un laquais et vous en avez l'âme » (Hugo). — Loc. En mon âme et conscience. Iron. Les bonnes âmes : les bien-pensants hypocrites.
4 ♦ (Vx en psychol.) Ensemble des fonctions psychiques et des états de conscience. ⇒ conscience, esprit. État d'âme : sentiment éprouvé; spécialt, réaction affective considérée comme déplacée. Le ministre a des états d'âme. Être musicien dans l'âme, profondément. « De telles passions dévastent l'âme » (R. Rolland). — Vague à l'âme. À fendre l'âme. La mort dans l'âme.
5 ♦ Principe de la vie végétative et sensitive. « Imaginer que l'âme des bêtes soit de même nature que la nôtre » (Descartes). — Loc. Rendre l'âme : mourir. Avoir l'âme chevillée au corps.
♢ Laudatif Sentiment, vie. Chanter avec âme. Une maison triste et sans âme.
6 ♦ Être vivant, personne. Avoir charge d'âme(s). Une ville de plus de dix mille âmes. ⇒ habitant. « Les Âmes mortes », roman de Gogol. — Loc. Ne pas trouver (voir, rencontrer) âme qui vive : ne trouver... personne. « On n'apercevait âme qui vive » (Loti). Iron. Rencontrer l'âme sœur, une personne avec laquelle on a beaucoup d'affinités sentimentales.
♢ T. d'affection (Vx) Mon âme, ma chère âme.
II ♦
1 ♦ Ensemble des états de conscience communs aux membres d'un groupe. L'âme d'un peuple. « Une nation est une âme » (Renan).
2 ♦ Personne qui anime une entreprise collective. Il était l'âme de la conjuration.
3 ♦ Psychisme que, par une sorte d'animisme, nous prêtons aux choses inanimées. « Objets inanimés, avez-vous donc une âme ? » (Lamartine).
III ♦ (Concret) Partie essentielle, vitale (d'une chose).
♢ (1680) Mus. Petit cylindre de bois qui réunit la table et le fond d'un instrument à cordes.
♢ (1676) Noyau d'une statue.
♢ (1611) Évidement intérieur d'une bouche à feu. L'âme d'un canon.
♢ Techn. Partie médiane ou principale. ⇒ centre, noyau. L'âme d'une poutre, d'un rail, d'un conducteur électrique, d'une machine.
♢ Hérald. Légende qui explique la figure d'une devise.
● âme nom féminin (latin anima, souffle, vie) Principe de vie, de mouvement et de pensée de l'homme, différent de l'esprit, conçu comme activité intellectuelle et fréquemment opposé au corps, du moins dans la tradition judéo-chrétienne. Littéraire. Siège de l'activité psychique et des états de conscience de quelqu'un, ensemble des dispositions intellectuelles, morales, affectives qui forment son individualité, son moi profond ; esprit, intellect, cœur, conscience : Connaître l'âme humaine. Avoir l'âme d'un poète. Littéraire. Ensemble des manières de penser ou d'agir propres aux membres d'un groupe social et qui le caractérisent : L'âme slave. Ce qui donne à quelque chose son originalité, ce qui l'anime et fait qu'il touche la sensibilité : Une ville sans âme. Être humain, personne vivante ; habitant : Il n'y a pas âme qui vive. Un village d'un millier d'âmes. Personne considérée sous l'angle de ses qualités morales ou psychologiques fondamentales : Un roman qui devrait plaire aux âmes sensibles. Personne qui anime une entreprise, une action collective, un groupe, qui y joue un rôle déterminant : Il a été l'âme de la résistance à l'occupant. ● âme (citations) nom féminin (latin anima, souffle, vie) Émile Chartier, dit Alain Mortagne-au-Perche 1868-Le Vésinet 1951 L'âme, c'est ce qui refuse le corps. Définitions Gallimard Émile Chartier, dit Alain Mortagne-au-Perche 1868-Le Vésinet 1951 Cette autre vie qu'est cette vie dès qu'on se soucie de son âme. Histoire de mes pensées Gallimard Henri Frédéric Amiel Genève 1821-Genève 1881 Un paysage quelconque est un état de l'âme. Journal intime, 31 octobre 1852 Marcel Arland Varennes-sur-Amance 1899-Saint-Sauveur-sur-École, Seine-et-Marne, 1986 Académie française, 1968 Le corps est un des noms de l'âme, et non pas le plus indécent. Où le cœur se partage Gallimard Félix Arvers Paris 1806-Paris 1850 Mon âme a son secret, ma vie a son mystère. Mes heures perdues Gaston Bachelard Bar-sur-Aube 1884-Paris 1962 C'est à l'animus qu'appartiennent les projets et les soucis, deux manières de n'être pas présent à soi-même. À l'anima appartient la rêverie qui vit le présent des heureuses images. La Poétique de la rêverie P.U.F. Commentaire Distinction classique, reprise des philosophes grecs, entre anima (alogon), c'est-à-dire l'âme en tant que principe vital distinct du corps, et animus (logikon), siège de la pensée, de l'intelligence. Maurice Barrès Charmes, Vosges, 1862-Neuilly-sur-Seine 1923 Une œuvre d'art, c'est le moyen d'une âme. Mes cahiers Plon Henri Bergson Paris 1859-Paris 1941 La morale de l'Évangile est essentiellement celle de l'âme ouverte. Les Deux Sources de la morale et de la religion P.U.F. Georges Bernanos Paris 1888-Neuilly-sur-Seine 1948 L'espérance […] est la plus grande et la plus difficile victoire qu'un homme puisse remporter sur son âme. La Liberté, pour quoi faire ? Gallimard Léon Bloy Périgueux 1846-Bourg-la-Reine 1917 Combien d'âmes réellement vivantes dans ce grouillement d'êtres humains ? Dans les ténèbres Mercure de France Charles Bonnet Genève 1720-Genthod, près de Genève, 1793 L'âme humaine placée dans le cerveau de l'huître, y acquerrait-elle jamais des notions de morale et de métaphysique ? Essai analytique sur les facultés de l'âme Henri Bosco Avignon 1888-Nice 1976 Il est d'un esprit économique de l'âme de réserver une part de désir jusqu'à la fin. L'Âne Culotte Gallimard Alexis Carrel Sainte-Foy-lès-Lyon 1873-Paris 1944 Le corps et l'âme sont des vues prises du même objet à l'aide de méthodes différentes. L'Homme, cet inconnu Plon Louis Ferdinand Destouches, dit Louis-Ferdinand Céline Courbevoie 1894-Meudon 1961 L'âme, c'est la vanité et le plaisir du corps tant qu'il est bien portant. Voyage au bout de la nuit Gallimard Louis Ferdinand Destouches, dit Louis-Ferdinand Céline Courbevoie 1894-Meudon 1961 On choisit parmi les rêves ceux qui vous réchauffent le mieux l'âme. Voyage au bout de la nuit Gallimard Sébastien Roch Nicolas, dit Nicolas de Chamfort près de Clermont-Ferrand 1740-Paris 1794 Académie française, 1781 Pour être heureux en vivant dans le monde, il y a des côtés de son âme qu'il faut entièrement paralyser. Maximes et pensées François René, vicomte de Chateaubriand Saint-Malo 1768-Paris 1848 Les biens de la terre ne font que creuser l'âme et en augmenter le vide. Génie du christianisme François René, vicomte de Chateaubriand Saint-Malo 1768-Paris 1848 […] la réhabilitation de ce pauvre corps, si calomnié par l'âme. Mémoires d'outre-tombe Malcolm de Chazal Vacoas 1902-Port-Louis 1981 Nous n'accordons une âme aux gens que lorsqu'ils n'ont plus de corps. Sens plastique Gallimard Paul Claudel Villeneuve-sur-Fère, Aisne, 1868-Paris 1955 Se servir d'une seule âme pour être deux. Journal Gallimard Paul Claudel Villeneuve-sur-Fère, Aisne, 1868-Paris 1955 O âme, pour qui rien n'existait de trop grand ! Tête d'or, III, le roi Mercure de France Paul Claudel Villeneuve-sur-Fère, Aisne, 1868-Paris 1955 […] Toute âme est une très vile comédie. Tête d'or, III, le roi Mercure de France Jean Cocteau Maisons-Laffitte 1889-Milly-la-Forêt 1963 Académie française, 1955 Le corps est un parasite de l'âme. La Comtesse de Noailles, oui et non Perrin Jean Commerson Paris 1802-Paris 1879 À son lit de mort, l'homme songe plutôt à élever son âme vers Dieu que des lapins. Pensées d'un emballeur Pierre Corneille Rouen 1606-Paris 1684 Je suis jeune, il est vrai ; mais aux âmes bien nées La valeur n'attend point le nombre des années. Le Cid, II, 2, Rodrigue Pierre Corneille Rouen 1606-Paris 1684 Un peu de dureté sied bien aux grandes âmes. Suréna, V, 3, Suréna Léon Daudet Paris 1867-Saint-Rémy-de-Provence 1942 Un fou peut parfaitement garder son âme intacte. Paris vécu Gallimard Eugène Delacroix Saint-Maurice, Val-de-Marne, 1798-Paris 1863 Point de règles pour les grandes âmes : elles sont pour les gens qui n'ont que le talent qu'on acquiert. Journal, 27 avril 1824 René Descartes La Haye, aujourd'hui Descartes, Indre-et-Loire, 1596-Stockholm 1650 J'appelle vices des maladies de l'âme, qui ne sont point si aisées à connaître que les maladies du corps, parce que nous faisons assez souvent l'expérience d'une parfaite santé du corps, mais jamais de l'esprit. Cogitationes privatae René Descartes La Haye, aujourd'hui Descartes, Indre-et-Loire, 1596-Stockholm 1650 Les plus grandes âmes sont capables des plus grands vices aussi bien que des plus grandes vertus. Discours de la méthode Denis Diderot Langres 1713-Paris 1784 Une belle âme ne va guère avec un goût faux. Lettres, à Falconet Denis Diderot Langres 1713-Paris 1784 Il n'y a que les passions et les grandes passions, qui puissent élever l'âme aux grandes choses. Pensées philosophiques saint François de Sales château de Sales, près de Thorens, Savoie, 1567-Lyon 1622 Ô mon âme, tu es capable de Dieu, malheur à toi si tu te contentes de moins que de Dieu ! Introduction à la vie dévote Jean Grosjean Paris 1912 Plus l'âme entre en ténèbres mieux le dieu la voit comme plus le dieu s'exténue et mieux l'âme le respire. La Gloire Gallimard José Maria de Heredia La Fortuna, près de Santiago de Cuba, 1842-château de Bourdonné, près de Houdan, 1905 Académie française, 1894 La moitié de mon âme est dans la nef fragile Qui sur la mer sacrée où chantait Arion Vers la terre des Dieux porte le grand Virgile. Les Trophées, Antoine et Cléopâtre Lemerre Victor Hugo Besançon 1802-Paris 1885 Tout est plein d'âmes. Les Contemplations, Ce que dit la bouche d'ombre, VI, 26 Victor Hugo Besançon 1802-Paris 1885 Mêlez toute votre âme à la création ! Les Feuilles d'automne, Pan Victor Hugo Besançon 1802-Paris 1885 Je vais vous expliquer. Cet homme n'a point d'âme. Ruy Blas, V, 3, Ruy Blas Victor Hugo Besançon 1802-Paris 1885 L'âme française est plus forte que l'esprit français, et Voltaire se brise à Jeanne d'Arc. Tas de pierres Éditions Milieu du monde Victor Hugo Besançon 1802-Paris 1885 L'instinct, c'est l'âme à quatre pattes ; la pensée c'est l'esprit debout. Tas de pierres Éditions Milieu du monde Georges Charles, dit Joris-Karl Huysmans Paris 1848-Paris 1907 Chacun doit être l'aide-jardinier de sa propre âme […]. En route Plon Jean de La Bruyère Paris 1645-Versailles 1696 Une grande âme est au-dessus de l'injure, de l'injustice, de la douleur, de la moquerie ; et elle serait invulnérable si elle ne souffrait par la compassion. Les Caractères, De l'homme Jean de La Ceppède Marseille 1550-Avignon 1622 Mon âme est un enfer tout noir d'aveuglement […]. Théorèmes spirituels Jules Laforgue Montevideo 1860-Paris 1887 Mon corps, ô ma sœur, a bien mal à sa belle âme […]. Derniers Vers, Dimanches Jules Laforgue Montevideo 1860-Paris 1887 L'âme, cet infini qu'ont lassé tous ses dieux […]. Poèmes posthumes, les Têtes de morts Alphonse de Prât de Lamartine Mâcon 1790-Paris 1869 Objets inanimés, avez-vous donc une âme Qui s'attache à notre âme et la force d'aimer ? Harmonies poétiques et religieuses, Milly ou la Terre natale Alphonse de Prât de Lamartine Mâcon 1790-Paris 1869 Un grand peuple sans âme est une vaste foule ! Premières Méditations poétiques, Ressouvenir du lac Léman Patrice de La Tour du Pin Paris 1911-Paris 1975 L'âme haute et l'esprit pur Se nourrissent de rancune. Une somme de poésie Gallimard Marie François Pierre Gontier de Biran , dit Maine de Biran Bergerac 1766-Paris 1824 Notre âme a plus de capacité pour le plaisir que pour la douleur. Journal, 1793 Stéphane Mallarmé Paris 1842-Valvins, Seine-et-Marne, 1898 Toute âme est une mélodie, qu'il s'agit de renouer […]. Variations sur un sujet, Crise de vers Louis Massignon Nogent-sur-Marne 1883-Paris 1962 […] La mort laisse la vie de l'âme se maintenir entre ceux qui aiment. Lettre à Hélène Maspero Hommage à Massignon l'Herne Jules Michelet Paris 1798-Hyères 1874 Le style n'est que le mouvement de l'âme. Journal, 4 juillet 1820 Gallimard Michel Eyquem de Montaigne château de Montaigne, aujourd'hui commune de Saint-Michel-de-Montaigne, Dordogne, 1533-château de Montaigne, aujourd'hui commune de Saint-Michel-de-Montaigne, Dordogne, 1592 Les moins tendues et plus naturelles allures de notre âme sont les plus belles. Essais, III, 3 Napoléon Ier, empereur des Français Ajaccio 1769-Sainte-Hélène 1821 Quand on connaît son mal moral, il faut savoir soigner son âme comme on soigne son bras ou sa jambe. Cité par Las Cases dans le Mémorial de Sainte-Hélène Gérard Labrunie, dit Gérard de Nerval Paris 1808-Paris 1855 Les âmes sont les idées de Dieu. Paradoxe et vérité Blaise Pascal Clermont, aujourd'hui Clermont-Ferrand, 1623-Paris 1662 Dans une grande âme tout est grand. Discours sur les passions de l'amour Blaise Pascal Clermont, aujourd'hui Clermont-Ferrand, 1623-Paris 1662 L'éternuement absorbe toutes les fonctions de l'âme […]. Pensées, 160 Commentaire Chaque citation des Pensées porte en référence un numéro. Celui-ci est le numéro que porte dans l'édition Brunschvicg — laquelle demeure aujourd'hui la plus généralement répandue — le fragment d'où la citation est tirée. Francis Ponge Montpellier 1899-Le Bar-sur-Loup 1988 Notre âme est transitive. Il lui faut un objet, qui l'affecte, comme son complément direct, aussitôt. Nouveau Recueil Gallimard Jean Racine La Ferté-Milon 1639-Paris 1699 […] Et que derrière un voile, invisible et présente, J'étais de ce grand corps l'âme toute-puissante. Britannicus, I, 1, Agrippine Raymond Radiguet Saint-Maur-des-Fossés 1903-Paris 1923 Les manœuvres inconscientes d'une âme pure sont encore plus singulières que les combinaisons du vice. Le Bal du comte d'Orgel Grasset Jean-François Paul de Gondi, cardinal de Retz Montmirail 1613-Paris 1679 Il y a certains défauts qui marquent plus une bonne âme que certaines vertus. Mémoires Arthur Rimbaud Charleville 1854-Marseille 1891 Ô saisons, ô châteaux Quelle âme est sans défauts ? Derniers Vers, Ô saisons… Romain Rolland Clamecy 1866-Vézelay 1944 L'ennemi mortel de l'âme c'est l'usure des jours. Jean-Christophe, l'Adolescent Albin Michel Armand Salacrou Rouen 1899-Le Havre 1989 Pourquoi, après une âme, nous avoir offert un corps ? J'aurais mieux aimé n'être qu'une âme — ou seulement un corps, mais pas les deux à la fois ! Une femme trop honnête Gallimard Pierre Teilhard de Chardin Sarcenat, Puy-de-Dôme, 1881-New York 1955 L'âme humaine est faite pour n'être pas seule. Écrits du temps de la guerre Le Seuil Pierre Teilhard de Chardin Sarcenat, Puy-de-Dôme, 1881-New York 1955 En son fourmillement d'âmes, dont chacune résume un monde, l'Humanité est […] l'amorce d'un Esprit supérieur. Écrits du temps de la guerre Le Seuil Paul Verlaine Metz 1844-Paris 1896 Votre âme est un paysage choisi Que vont charmant masques et bergamasques […]. Fêtes galantes, Clair de lune Messein Sénèque, en latin Lucius Annaeus Seneca, dit Sénèque le Philosophe Cordoue vers 4 avant J.-C.-65 après J.-C. Une grande âme convient à une grande condition. Magnam fortunam magnus animus decet. De la clémence, I, 5 Sénèque, en latin Lucius Annaeus Seneca, dit Sénèque le Philosophe Cordoue vers 4 avant J.-C.-65 après J.-C. C'est d'âme qu'il faut changer, non de climat. Animum debes mutare, non caelum. Lettres à Lucilius, XXVIII Spartien, en latin Aelius Spartianus IIIe s. Petite âme errante, caressante. Animula vagula, blandula. Commentaire Vers que l'empereur Hadrien aurait composés au moment de sa mort, marquant son peu de foi dans l'existence de l'âme. Baruch Spinoza Amsterdam 1632-La Haye 1677 L'âme humaine ne peut pas être absolument détruite avec le corps, mais il en demeure quelque chose qui est éternel. Mens humana non potest cum Corpore absolute destrui, sed ejus aliquid remanet, quod aeternum est. L'Éthique, Livre V Baruch Spinoza Amsterdam 1632-La Haye 1677 Notre âme en tant qu'elle perçoit les choses d'une façon vraie, est une partie de l'intelligence infinie de Dieu. Mens nostra quatenus res vere percipit, pars est infiniti Dei intellectus. L'Éthique, Livre II Baruch Spinoza Amsterdam 1632-La Haye 1677 Le bien suprême de l'âme est la connaissance de Dieu ; et la vertu suprême de l'âme, c'est connaître Dieu. Summum Mentis bonum est Dei cognitio, et summa Mentis virtus Deum cognoscere. L'Éthique, Livre III Aristote Stagire 384-Chalcis 322 avant J.-C. Car l'âme est l'essence et l'acte d'un corps. Métaphysique, VIII, 3 (traduction J. Tricot) Platon Athènes vers 427-Athènes vers 348 ou 347 avant J.-C. L'incorrection du langage n'est pas seulement une faute contre le langage même : elle fait encore du mal aux âmes. Phédon, 115e (traduction L. Robin) Plutarque Chéronée, en Béotie, vers 50 après J.-C.-Chéronée, en Béotie, vers 125 Il disait que l'âme d'un homme amoureux vivait dans un corps étranger. Vies parallèles, Vie de Caton l'Ancien, IX (traduction D. Ricard) Caton Bible Je tiens mon âme en paix et en silence, comme un enfant contre sa mère. Ancien Testament, Psaumes CXXXI, 2 Commentaire Citation empruntée à la « Bible de Jérusalem ». Juvénal, en latin Decimus Junius Juvenalis Aquinum, Apulie, vers 60 après J.-C.-vers 130 Une âme saine dans un corps sain. Mens sana in corpore sano. Satires, X, 356 Vittorio Alfieri Asti 1749-Florence 1803 Vivre sans âme est le moyen le plus court et le plus sûr de vivre longtemps et en sécurité sous une tyrannie. Il vivere senz'anima è il più breve e il più sicuro compenso per lungamente vivere in sicurezza nella tirannide. Della tirannide, II, 2 Anonyme La nuit, c'est le salut de l'âme. Les Mille et Une Nuits, Histoire de Douce Amie et d'Ali-Nau Joseph d'Arbaud Meyrargues 1874-Aix-en-Provence 1950 Dans le corps malade, l'âme se sent toute seule. Dins lou cors malaut l'amo se sènt souleto. Le Laurier d'Arles Graham Greene Berkhamsted 1904-Vevey 1991 Il faut aimer toutes les âmes comme si chacune était celle de son propre enfant. One must love every soul as if it were one's own child. La Puissance et la Gloire, II, 1 Tom Kristensen Londres 1893-Svendborg 1974 Crains l'âme, mais ne la cultive pas, car elle ressemble à un vice. Gâchis Friedrich Nietzsche Röcken, près de Lützen, 1844-Weimar 1900 L'âme aristocratique a le respect de soi. Die vornehme Seele hat Ehrfurcht vor sich. Le Gai Savoir Francisco Gómez de Quevedo y Villegas Madrid 1580-Villanueva de los Infantes 1645 La dernière vilenie de l'âme est la crainte de son devoir. La última villanía del ánimo es temer su obligación. La constancia y paciencia del santo Job William Shakespeare Stratford on Avon, Warwickshire, 1564-Stratford on Avon, Warwickshire, 1616 L'amour ne voit pas avec les yeux, mais avec l'âme. Love looks not with the eyes, but with the mind. Le Songe d'une nuit d'été, I, 1, Helena Anton Pavlovitch Tchekhov Taganrog 1860-Badenweiler, Allemagne, 1904 Il n'y a rien dans la vie qui vaille la peine de donner au Malin la plus petite parcelle de son âme. Le Cordonnier et la Puissance des ténèbres bienheureux Jan Van Ruusbroec, dit l'Admirable Ruusbroec, près de Bruxelles, 1293-Groenendaal, près de Bruxelles, 1381 L'âme humaine est capable d'une faim sans assouvissement. De l'ornement des noces spirituelles, le quiétisme John Greenleaf Whittier près de Haverhill, Massachusetts, 1807-Hampton Falls, New Hampshire, 1892 La porte du ciel est fermée pour celui qui vécut seul ; Sauve une âme, et elle sauvera la tienne. Heaven's gate is shut to him who comes alone Save thou a soul, and it shall save thy own. Maud Muller ● âme (expressions) nom féminin (latin anima, souffle, vie) Avec âme, avec une grande sensibilité. Bonne âme, personne simple et compatissante ou, ironiquement, personne peu charitable, malveillante, hypocrite. Dans l'âme, par nature, de façon essentielle : Être commerçant dans l'âme. De, avec toute son âme, de tout son être, de toutes ses forces. En mon (ton, son) âme et conscience, en toute honnêteté ; en se laissant guider par son seul sentiment de justice. (Errer, être) comme une âme en peine, être ou paraître désemparé, en proie à l'inquiétude, à l'ennui, au désœuvrement. État d'âme, impression ressentie, sentiment éprouvé ; scrupule de conscience remettant en question une ligne d'action. Force, grandeur d'âme, fermeté, noblesse de caractère. Rendre l'âme, mourir. Vendre son âme (au diable), sacrifier une valeur morale essentielle pour quelque avantage. ● âme (synonymes) nom féminin (latin anima, souffle, vie) Principe de vie, de mouvement et de pensée de l'homme...
Synonymes :
Littéraire. Siège de l'activité psychique et des états de conscience de...
Synonymes :
- coeur
- esprit
- moi
- pensée
Être humain, personne vivante ; habitant
Synonymes :
- être
- habitant
- homme
- individu
- personne
Personne considérée sous l'angle de ses qualités morales ou psychologiques...
Synonymes :
- coeur
- esprit
Personne qui anime une entreprise, une action collective, un groupe...
Synonymes :
- agent
- moteur
● âme
nom féminin
(de âme)
Évidement intérieur d'une bouche à feu.
Partie centrale de certains objets (panneau de contreplaqué, porte plane, électrode de soudage, cathode d'électrodéposition, câble, corde, etc.).
Petite pièce de sapin cylindrique placée à l'intérieur des instruments à cordes frottées pour soutenir la table et transmettre les vibrations des cordes au fond.
Noyau, en général de bois, d'une figure, complété par un revêtement soit de feuilles de métal, soit de plâtre ou de stuc. (Techniques médiévales.)
Fil, généralement synthétique, incorporé, lors de la filature, au centre du filé fabriqué. (L'enrobage en fibres peut être de nature quelconque.)
● âme (expressions)
nom féminin
(de âme)
Âme d'un fer profilé, partie de ce fer située entre deux ailes.
Âme d'une poutre, partie médiane verticale, pleine ou évidée, qui relie les deux ailes ou semelles d'une poutre composée.
Âme d'un rail de chemin de fer, partie située entre le patin et le champignon.
âme
n. f.
rI./r
d1./d Principe spirituel, agent essentiel de la vie, qui, uni au corps, constitue l'être vivant.
— Rendre l'âme: mourir.
— âme abandonnée, âme damnée, âme en peine.
|| Par anal. L'âme d'une nation, d'un peuple.
|| Par ext. être vivant. Un village de 500 âmes.
— Ne pas rencontrer âme qui vive: ne rencontrer personne.
d2./d RELIG Essence spirituelle de l'individu, qui subsiste après la mort. Prier pour le repos de l'âme de quelqu'un.
d3./d Principe des facultés morales, sentimentales, intellectuelles; siège de la pensée et des passions. En mon âme et conscience. Avoir l'âme sensible. Chanter avec âme, avec émotion et chaleur.
rII./r élément essentiel d'une chose, d'un instrument. L'âme d'un soufflet, la soupape de cuir pour l'entrée de l'air. L'âme d'un violon, le petit cylindre de bois placé entre le fond et la table, qu'il soutient. L'âme d'un canon, d'un fusil, l'intérieur du tube. L'âme d'un câble, d'une poutre, sa partie centrale.
rIII/r
d1./d L'âme d'un complot, son instigateur.
d2./d L'âme damnée de quelqu'un, celui qui l'incite à faire le mal.
⇒AMÉ, ÉE, adj. et subst.
Vx, ou par arch. littér., rare
I.— Adj. Aimé :
• 1. ... Nous, Henri de Valois, (...) approuvons, par le présent acte rédigé par notre féal et amé cousin Henri de Lorraine, (...) l'association connue sous le nom de la Sainte-Union...
A. DUMAS Père, Henri III et sa cour, 1829, IV, 6, p. 184.
• 2. Notre bon souverain Philippe Le Grand
Éprouvait de temps en temps
Le besoin de remonter le moral
De son peuple amé et féal,
Tout de même un peu ramoiti!
Par une allocution bien sentie, ...
P. CLAUDEL, Poèmes et paroles durant la guerre de trente ans, Un peu plus tard, 1943, p. 572.
Rem. Utilisé autrefois ds l'anc. chancellerie, amé figure aux XIXe, XXe s. dans des contextes d'inspiration hist. et prend parfois une nuance iron. (cf. ex. 2).
II.— Subst. (gén. par iron.). Ami, partisan :
• 3. ... de faiblesse en faiblesse, M. Sylvain se trouva, un autre beau matin, huguenot et grand serviteur et amé du jeune roi de Navarre.
G. SAND, Les Beaux Messieurs du Bois-Doré, 1858, p. 13.
Prononc. ET ORTH. :[ame] (cf. PASSY 1914).
Étymol. ET HIST. — Part. passé adjectivé de l'a. fr. amer (aimer), demeuré en usage comme terme de chancellerie, ce dernier fait signalé en lexicogr. dep. Ac. 1718 : ,,Vieux mot qui n'est plus en usage qu'en style de chancellerie, dans les Lettres, et dans les Ordonnances du Roy.``
STAT. — Fréq. abs. litt. :2.
BBG. — BÉL. 1957. — BOISS.8. — FÉR. 1768.
amé, ée [ame] adj. et n.
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1 Adj. Aimé (terme utilisé autrefois dans la chancellerie). || Féal et amé.
2 N. (Vx). Ami, partisan.
Encyclopédie Universelle. 2012.