MARI
Mari (aujourd’hui tell Hariri) est à 12 kilomètres au nord-nord-ouest d’Abou-Kémal, ville de la République syrienne, à quelques kilomètres de la frontière de l’Iraq, sur la rive droite de l’Euphrate, qui coule actuellement à l’est à 2,5 km, alors que dans l’Antiquité il bordait étroitement la ville. On a pu identifier tell Hariri comme étant le site de Mari, dès 1934, grâce aux fouilles françaises commencées en cet endroit en décembre 1933, à la suite d’une découverte fortuite: une statue acéphale dégagée par des paysans. Mari était le nom d’une capitale de l’Antiquité mésopotamienne, siège d’une dynastie, la dixième après le Déluge, si l’on en croit les listes chronologiques dressées au début du IIe millénaire par des scribes historiographes. Les campagnes de fouille se sont succédé avec les seules interruptions dues à la Seconde Guerre mondiale et aux troubles qui, à plusieurs reprises, secouèrent le Moyen-Orient. Les résultats des travaux sont considérables: il s’agit de la réapparition d’une des plus grandes capitales de l’Antiquité, non seulement centre politique déterminant, mais aussi foyer d’un art extraordinaire qu’illustrent des sculptures et des peintures, rendu plus présent encore grâce à une bibliothèque de plus de vingt mille textes cunéiformes, dépositaires de secrets que l’on croyait à jamais révolus et qui font pénétrer dans la «vie quotidienne» d’il y a quatre mille ans.
Mari avant les fouilles
La documentation était singulièrement restreinte. Dans les tablettes chronologiques de Nippour et de Kish , on trouve cette première mention: «Les armes d’Adab furent renversées. La royauté passa à Mari. À Mari régna Ansud, trente années.» Le prisme chronologique d’Oxford porte: «À Mari Ansud règne trente années.» Suivent cinq rois avec cette finale: «Six rois, dont les années furent cent trente-six.» Cette dynastie fut remplacée par une autre, établie à Kish. Le seul objet remontant à cette période se trouve au British Museum: une statue acéphale (no 90828), inscrite au nom d’Iku-Shamash, un roi que l’on peut placer dans la première moitié du IIIe millénaire.
À l’époque d’Agadé, il existe deux mentions de Mari, sous les règnes de Sargon et de Nar m-Sin, venus faire campagne en moyenne ou haute Mésopotamie.
Les textes sont muets sur Mari jusqu’à la fin du IIIe millénaire. Un «homme de Mari», Ishbi-Irra, fonde à Isin, en plein pays de Sumer, une dynastie qui osera se mesurer à Ur, la capitale sumérienne. Nous voici arrivés au temps de Hammourabi, roi de Babylone (1792-1750), qui commémore dans deux années de règne d’abord la défaite (33e), puis l’anéantissement (35e) de Mari, dont les murailles sont détruites.
Nouveau silence jusqu’au XIIIe siècle avant J.-C., lorsque les Assyriens installent à Mari une «tête de pont». Un de leurs gouverneurs, Shamash-resh-usur, se fait gloire, sur une stèle découverte à Babylone, d’avoir planté à Mari des palmiers dattiers et acclimaté des abeilles. Cette occupation pacifique ne doit cependant pas faire oublier que les Assyriens, installés sur l’Euphrate, ne sont là que pour assurer la surveillance de la grande voie de communication entre golfe Persique et Méditerranée et, partant, le contrôle de l’Occident.
À l’époque gréco-romaine, Mari n’est plus qu’une bourgade qui a perdu son nom antique qui transparaît sous celui de Merrhan, mentionné dans l’itinéraire d’Isidore de Charax, entre Doura Europos (Salihiyé) et Giddan (Hindani), à peu près Abou-Kémal. Qui aurait pu songer que Merrhan, localité obscure, avait succédé à Mari?
Stratigraphie de la ville
Jusqu’en 1971, il n’a pas été possible de faire une fouille réellement stratigraphique, c’est-à-dire en un seul endroit de la ville, car à chaque tentative (1934 et 1964) des découvertes si importantes ont été faites qu’elles ont contraint à modifier les plans. Cependant, après une série de campagnes, les diverses périodes de la ville ont été repérées et replacées dans une séquence chronologique complète.
Période séleucide : maisons de médiocre apparence; tombes en céramique (IIIe s. av. J.-C. et IIIe s. apr. J.-C.).
Période assyrienne : maisons, nécropoles installées dans les ruines des constructions antérieures; tombes en pleine terre ou en céramique (XIIIe-VIe s. apr. J.-C.).
Période des rois de Hana (après Hammourabi): installations très pauvres (XVIIIe-XVIIe s. av. J.-C.).
Période des rois de Mari , contemporains des rois d’Isin, de Larsa et de Babylone I (XXIe-XVIIe s. av. J.-C.): palais, ziggourat temples (Ishtar, Dagan, Ninhursag, Shamash).
Période des gouverneurs contemporains de la IIIe dynastie d’Ur (XXIIe-XXIe s. av. J.-C.): palais, ziggourat temples (Dagan, Nihursag, Shamash, massif Rouge).
Période d’Agadé (XXVe-XXIIIe s. av. J.-C.): temple de Ninhursag et sanctuaires «anonymes».
Période «présargonique» (Early Dynastic III-I , XXIXe-XXVe s. av. J.-C.): palais présargoniques (PP 1 et PP 2), temples (Ishtar, Ninhursag, Shamash, Ishtarat, Ninni-Zaza, Dagan), massif Rouge.
Période de Djemdet Nasr ou protodynastique : couches profondes du temple d’Ishtar, du temple de Shamash; 5 mètres de stratigraphie existent encore sous le palais présargonique (PP 2), découvert en 1964.
Résultats des fouilles
Architecture
Le tell antique cachait dans ses flancs maisons et architecture monumentale. Le matériau fragile, essentiellement en brique crue, avait en se délitant constitué un véritable manteau protecteur. Les installations les plus importantes étaient soit des palais, soit des temples. La vie politique ayant connu à Mari deux phases bien distinctes d’activité, avec de véritables dynasties, il était normal que celles-ci aient laissé sur le sol la marque de leur puissance.
Deux palais ont été découverts. Le plus récent avait été la résidence de la dynastie dont Zimri-Lim, vaincu par Hammourabi, fut le dernier représentant (1790-1760 av. J.-C.). Complexe architectural gigantesque, long de près de 200 mètres, large de 100, qui s’étendait sur 2,50 ha. Dans les zones centrales, les murs avaient encore 5 mètres de hauteur, sur les 10 mètres à l’origine. Il fut possible d’identifier la salle d’audience, la salle du trône, les appartements privés, plusieurs sanctuaires ou chapelles, deux salles d’école, les cuisines, les ateliers, la pièce aux archives, le quartier des fonctionnaires.
Ce palais remontant au IIe millénaire en recouvrait un autre, de quelque six cents ans plus ancien, repéré seulement en 1964 et appartenant à la dynastie «postdiluvienne» des listes royales. On a parlé d’un palais; en réalité, il y en a deux , directement superposés, l’un et l’autre remontant à cette période présargonique, une des plus brillantes qu’ait connues la Mésopotamie au cours du IIIe millénaire. Au spectacle de ces murs épais de plus de 2 mètres, hauts encore de 4 mètres, on ne saurait douter de la puissance politique et économique qui en assura et en permit l’exécution. Malgré son dégagement incomplet – 5 000 mètres carrés de superficie, une cinquantaine de chambres –, le plus ancien palais de Mari est une révélation exceptionnelle si l’on songe que jusqu’à présent les vestiges des résidences royales mésopotamiennes retrouvées (Kish, Eridu) n’avaient jamais plus de 50 centimètres.
Les sanctuaires de Mari appartenaient de même aux deux grandes périodes: de la période présargonique (IIIe millénaire) relèvent les temples d’Ishtar, déesse de la guerre et de l’amour, retrouvé en bordure de la ville, au sud-ouest, adossé au rempart; de Ninhursag, construit au cœur de la cité; de Shamash, contigu au précédent; d’Ishtarat et de Ninni-Zaza, côte à côte, dont le plan rappelle celui d’une maison (mais le temple n’est-il pas la «maison» du dieu?); de Dagan, réapparu sous l’esplanade d’une ziggourat, c’est-à-dire d’une de ces tours à étages, dont la Mésopotamie fut la terre d’élection et dont la Bible a gardé le souvenir avec le récit de la tour de Babel. On verra la richesse de ces sanctuaires, qui montrent que Mari fut un prodigieux foyer d’art et en même temps le centre d’une école artistique originale.
La deuxième grande période (fin du IIIe millénaire-début du IIe millénaire) était tout aussi riche de temples. Malheureusement, l’érosion avait causé de graves dégâts, et il n’est plus question à leur sujet d’évoquer des restes spectaculaires. Des sanctuaires subsistaient, généralement construits sur les installations plus anciennes: Ishtar, Ninhursag, Shamash, Dagan. Rien ne fut retrouvé correspondant à Ishtarat-Ninni-Zaza du IIe millénaire, sinon une «tour de Babel», massive et très mutilée. De l’architecture assyrienne, rien jusqu’ici n’a été repéré dans le domaine palatial ou religieux.
Sculptures
Les installations énumérées ci-dessus recélaient des trésors d’art. Le palais de Zimri-Lim contenait encore plusieurs grandes statues: celle d’une déesse «au vase jaillissant», d’Ishtup-Ilum, «gouverneur de Mari», toutes deux grandeur nature. Non loin, d’autres statues plus petites: Idi-Ilum, encore un «gouverneur» de Mari; L asg n; la tête d’un guerrier à mentonnière. Ce n’était encore que peu de chose à côté des richesses des sanctuaires où, par dizaines, réapparaissaient les ex-voto déposés par les fidèles du IIIe millénaire: rois, fonctionnaires, prêtres et prêtresses, demeurés dans l’anonymat. On citera en particulier: Lamgi-Mari, roi de Mari (découvert en 1934 et dont l’inscription assura l’identification de tell Hariri avec Mari); Ebih-il l’intendant; Idi-n rum le «meunier»; trois statuettes découvertes dans le temple d’Ishtar dites Ush, c’est-à-dire viriles. Du groupe des sanctuaires construits au centre de la ville, signalons la statue du roi Iku-Shamagan; de la «grande chanteuse» Ur-Nanshe (ou Ur-Nina); de Salim, frère aîné du roi; de Nani; de Meshigirru «gouverneur du pays» et de combien d’autres, que des inscriptions permettent d’identifier avec de hauts fonctionnaires de la cour dont on a dégagé le palais. Et aussi d’autres sculptures, anonymes, faute d’inscriptions, mais précieuses entre toutes. Y a-t-il quelque chose de plus émouvant que ce «couple enlacé», que la mutilation antique a privé de ses têtes mais qui demeure à jamais le témoignage éloquent de «l’éternelle symphonie»?
Peinture
La surprise de la fouille fut la réapparition de peintures murales, nouveau chapitre de l’histoire de l’art antique. Les cours et plusieurs salles du palais du IIe millénaire étaient ornementées de peintures à la détrempe. Si, le plus souvent, il ne restait que des lambeaux, d’autres fois la décoration avait survécu aux méfaits de la nature mais aussi aux destructions du fait des guerres. Les scènes les plus complètes ont été dégagées, cour 106 (investiture, sacrifice du taureau), salle d’audience 132 (le roi officiant). Des fragments (cour 106, cour 31) attestaient tout au moins la multiplicité comme aussi l’originalité d’un décor qui repose le problème des relations entre Crète et Mésopotamie et illustre l’impact sémitique sur une civilisation d’origine sumérienne.
Arts somptuaires
Les arts somptuaires mériteraient plus qu’une mention, car cet art témoigne d’une maîtrise rivalisant sans difficulté avec tout ce qu’avaient produit les ateliers proprement «sumériens». On songe surtout au travail de la coquille de nacre dont les Mésopotamiens ont fait grande consommation. Ce qui est sorti de Mari ne redoute pas la comparaison avec ce qui est connu par Ur (par exemple l’«étendard»), Kish et Lagash. Plusieurs panneaux en mosaïque de nacre étaient suspendus aux murs des temples (Ishtar-Ush, Ishtarat, Shamash) et au cœur du palais présargonique, précisément dans un secteur où l’on reconnaît une installation cultuelle. Chaque campagne de fouilles voit s’agrandir le butin et la documentation se renouvelle sans cesse. On ne s’arrête pas ici au «trésor» d’Ur, sorti d’une jarre cachée dans une cour du palais; très vraisemblablement, ce n’est pas l’œuvre d’ateliers mariotes, mais celle de fabriques sumériennes.
Les archives
La découverte des archives de la ville, ramassées dans le palais du IIe millénaire, a fait sensation. Il s’agit de quelque
15 000 tablettes cunéiformes qui permettent de faire toute l’histoire du monde mésopotamien, en cette période cruciale où Hammourabi fait de Babylone la capitale d’un empire. Les archives de Mari permettent de revivre tout cela, mais, à côté de la «grande histoire», c’est aussi, avec ces textes, l’existence quotidienne, non seulement de la famille royale, mais des habitants de la ville: Hammourabi tentait alors de devenir le maître du monde. Pour s’y opposer, Mari s’était dressée avec l’énergie du désespoir. L’exploration de la capitale du moyen Euphrate, en dégageant ces murailles calcinées, ces statues cassées, a rendu toute proche cette page dramatique d’hommes luttant contre l’envahisseur.
Les nouvelles campagnes de fouille
André Parrot, qui mourut en 1980, conduisit encore en 1972 et 1974 deux campagnes qu’il consacra à la poursuite du dégagement du palais présargonique. En 1978, la direction du chantier fut confiée à Jean-Claude Margueron. Les opérations furent alors diversifiées: à la fouille classique (neuf campagnes de 1979 à 1993) s’est ajoutée une prospection systématique des vallées de l’Euphrate et du bas Khabur destinée à étudier l’implantation des hommes et leur environnement à l’époque du royaume de Mari. À la suite de ces opérations, notre connaissance de l’histoire, de l’urbanisme et du rôle de l’ancienne capitale de la moyenne vallée de l’Euphrate s’est considérablement enrichie.
L’histoire de Mari
Les origines de la cité sont maintenant à placer au XXVIIIe siècle avant J.-C. (fin Dynastique archaïque I ou Dynastique archaïque II); il s’agit d’une ville neuve édifiée vraisemblablement sur l’ordre d’une autorité politique qui désirait contrôler le commerce qui utilisait les voies de l’Euphrate et du Khabur entre la Syrie, le Taurus et la Mésopotamie. Si l’histoire des premiers siècles est encore assez mal connue, il apparaît assez clairement d’après les fouilles que, à la suite d’une première période de prospérité au temps de la fondation, une seconde période faste a caractérisé le Dynastique archaïque III; elle se prolonge au début de l’empire d’Agadé. De ce moment datent les temples d’Ishtar, de Ninni-Zaza, d’Ishtarat, de Shamash, le massif Rouge et son sanctuaire, le palais et son enceinte sacrée. Un synchronisme avec Ebla est assuré grâce à une quarantaine de tablettes retrouvées dans une maison du chantier B. Après un temps d’abandon dont la durée n’est pas facile à établir, la cité gouvernée par les Shakkanakku se couvrit de nouveaux monuments grandioses: la Haute Terrasse et son temple aux Lions, le temple de Shamash, le grand bâtiment du chantier E, qui a pu servir un temps de caserne, le palais des Shakkanakku construit pour abriter les tombes royales et qui a sans doute hébergé le roi pendant la construction du grand palais royal. Tous ces monuments mettent clairement en évidence, et ce malgré l’absence de tablettes, la puissance de la ville à cette époque. Reste encore mal connu le passage de l’époque des Shakkanakku à la dernière dynastie dont les représentants principaux sont Iahdun-Lim et Zimri-Lim, avec une domination temporaire de Samshi-Adad, roi de haute Mésopotamie; ces dernières trente années de l’histoire de Mari sont les mieux connues grâce à l’importante récolte de tablettes réalisée dans le palais et complétée par des séries retrouvées dans le palais de Shakkanakku. Avec la mainmise de Hammourabi de Babylone sur la ville, suivie moins de deux années plus tard de la destruction volontaire de tous ses monuments, y compris de ses remparts (1760 av. J.-C.), c’en est fait du rôle international de Mari, mais non de son existence.
Étude régionale
L’étude de l’environnement a mis en évidence que la fondation de la cité s’était accompagnée d’un aménagement très poussé de la vallée. Ce fut d’abord la construction sur la rive droite d’un canal d’irrigation vraisemblablement alimenté par un lac de barrage établi dans le wadi es-Souab. Sur la rive gauche, c’est un grand canal de navigation d’un gabarit de 11 mètres unissant le Khabur à l’Euphrate, qui a été à la fois aménagé dans la vallée et creusé dans le plateau; il facilitait grandement les échanges économiques entre les pôles syrien et mésopotamien. C’est ce canal qui est certainement à l’origine de la fondation de Mari dont la fonction première était de contrôler l’axe des échanges.
Les palais
Le palais proche-oriental, institution fondamentale dans l’économie et la société de type palatial que connaît alors la Mésopotamie, est mieux connu grâce à la poursuite des recherches conduites à l’emplacement du grand palais royal du IIe millénaire et de son prédécesseur du IIIe.
Du palais du IIe millénaire on connaît désormais l’organisation et le fonctionnement; l’identification de la cour du Palmier (cour 106) dotée d’un auvent qui protégeait les peintures de la façade méridionale, celle des appartements du roi situés à l’étage, en relation et à proximité immédiate de la salle du Trône, enfin le dégagement de la citerne de la cour 131, qui assurait l’approvisionnement en eau, et la mise en évidence d’un réseau de canalisations destiné à récupérer l’eau de pluie ont donné une image très claire des grands palais de cette époque.
La poursuite de l’exploration du palais du IIIe millénaire a permis de définir l’existence des différentes phases de l’histoire de l’édifice avec ses réaménagements et une reconstruction partielle lors de la dernière. Le dégagement de la salle aux Piliers – sans doute la salle du Trône de l’époque agadéenne –, de deux quartiers et de la porte principale permet de mieux comprendre l’économie interne et l’extension de l’édifice qui semble occuper la même surface et avoir la même importance dans la cité que le palais qui lui a succédé. Sa durée de vie n’a sans doute pas excédé deux siècles (XXVIe-XXIVe), et il est maintenant assuré que ce palais n’est pas le plus ancien: une autre installation, qui reste à découvrir, l’a précédé.
Un autre palais datant de l’époque des Shakkanakku a été dégagé. De plus petites dimensions que le grand palais royal, il a néanmoins fourni des renseignements précieux sur l’architecture palatiale; sa salle du Trône apparaît comme l’archétype de toutes celles qui ont été utilisées en Mésopotamie et sur l’Euphrate à l’époque des royaumes amorites; l’appartement royal forme un ensemble très ordonné, avec une salle de séjour, une cuisine, deux chambres et une salle de bains pourvue d’une cheminée. La qualité architecturale de ce monument était d’ailleurs exceptionnelle, avec un usage répandu des sols plâtrés et la première attestation, dans l’histoire de l’architecture, d’un plafond à caissons pour la salle du Trône. Mais la particularité la plus remarquable vient de l’existence de deux grands tombeaux voûtés en encorbellement installés l’un sous la salle du Trône, l’autre sous une autre salle; retrouvés malheureusement pillés, ils manifestent cependant clairement l’importance que l’on accordait à partir de la fin du IIIe millénaire, comme l’atteste aussi la ville d’Ur, à l’inhumation des souverains dans le palais lui-même ou dans un bâtiment spécialisé.
La ville
L’urbanisme de la cité apparaît avec des caractéristiques de très grand intérêt pour notre connaissance de la civilisation mésopotamienne.
Les fondateurs ont donné à la cité nouvelle un plan absolument circulaire de 1,9 km de diamètre; ils l’ont éloignée de l’Euphrate et construite sur la terrasse holocène de façon à la mettre à l’abri des inondations annuelles, et, pour empêcher les ravages des inondations qui envahissaient parfois toute la vallée, ils l’ont entourée d’une digue de tracé circulaire sur laquelle se trouvait sans doute le premier mur d’enceinte. L’impérieuse nécessité d’une liaison avec l’Euphrate pour les besoins quotidiens en eau et pour la circulation commerciale conduisit à relier la ville au fleuve par un canal de dérivation. Sur la rive droite du canal se trouve le cœur religieux et politique de la cité, comprenant le palais, les temples et la Haute Terrasse; de part et d’autre du canal s’étendait la ville basse et les quartiers liés aux activités d’échanges; des jardins bordaient certainement le canal avant son entrée dans la ville; il y en avait sans doute également à l’intérieur de l’espace clos par la digue circulaire. Le réseau de circulation est de type rayonnant comme il convient à une cité de forme circulaire, et des voies de raccordement en diagonale rejoignaient les grands axes. Cette organisation a subsisté tout au long du millénaire de l’histoire de la cité.
Les recherches concernant l’urbanisme se poursuivent, et de grands chantiers ont été ouverts pour définir ses caractéristiques et son évolution. L’analyse des installations concernant l’évacuation des eaux usées met clairement en évidence l’existence de périodes de prospérité qui marquent un réel souci d’hygiène, mais aussi des moments où les particularismes l’emportent sur le sens communautaire. À la première de ces situations se rattachent les réseaux d’évacuation du Dynastique archaïque III retrouvés en plusieurs points de la cité; à l’autre, la multiplication des puisards domestiques, donc sans implication du collectif, caractéristiques de l’époque des Shakkankku et des royaumes de l’époque amorite.
Après une trentaine de campagnes de fouilles, Mari apparaît comme un site clé pour comprendre la civilisation mésopotamienne du IIIe millénaire et du début du IIe. Grâce à elle, on mesure mieux l’extraordinaire puissance de la civilisation sumérienne qui a ajouté aux premières expériences de vie urbaine celle de l’aménagement régional, et l’on découvre aussi l’intensité de la vie dans les villes et dans les palais de l’époque de Hammourabi de Babylone.
mari [ mari ] n. m.
• XIIe; lat. maritus
♦ Homme uni à une femme par mariage. ⇒ conjoint, époux; marital. Choisir, prendre un mari. ⇒ se marier. Le mari de Mme X. Mon mari. Le mari de sa fille (⇒ gendre) , de sa sœur (⇒ beau-frère) . — Le mari et la femme. Un bon mari. Mari complaisant. Le premier, le second mari d'une veuve, d'une divorcée. C'est son ancien, son ex-mari. (En attribut) Il est plus amant que mari. — Vivre comme mari et femme. ⇒ concubinage, 1. union (libre); maritalement.
⊗ HOM. Marri.
● mari nom masculin (latin maritus) Homme uni à une femme par le mariage. ● mari (citations) nom masculin (latin maritus) Jacques Audiberti Antibes 1899-Paris 1965 Un bon mari ne se souvient jamais de l'âge de sa femme, mais de son anniversaire, toujours. La Poupée Gallimard Isaac de Benserade Paris ?vers 1613-Gentilly 1691 Académie française, 1674 Amants agneaux deviennent maris loups. Poème sur l'accomplissement du mariage de Leurs Majestés Georges Feydeau Paris 1862-Rueil 1921 Les maris des femmes qui nous plaisent sont toujours des imbéciles ! Le Dindon, I, 1 Le Bélier Jean de La Bruyère Paris 1645-Versailles 1696 C'est trop contre un mari d'être coquette et dévote : une femme devrait opter. Les Caractères, Des femmes Jean de La Bruyère Paris 1645-Versailles 1696 Un mari n'a guère un rival qui ne soit de sa main, et comme un présent qu'il a autrefois fait à sa femme. Les Caractères, Des femmes Pierre Choderlos de Laclos Amiens 1741-Tarente 1803 Pour ce qu'on fait d'un mari, l'un vaut toujours bien l'autre ; et le plus incommode est encore moins gênant qu'une mère. Les Liaisons dangereuses André Maurois Elbeuf 1885-Neuilly 1967 Académie française, 1938 Un mari glorieux ne fait pas nécessairement un mari aimable. Olympio ou la vie de Victor Hugo Hachette Jean-Baptiste Poquelin, dit Molière Paris 1622-Paris 1673 Ah ! que j'ai de dépit que la loi n'autorise À changer de mari comme on fait de chemise ! Sganarelle, 5, la femme de Sganarelle Charles de Secondat, baron de La Brède et de Montesquieu château de La Brède, près de Bordeaux, 1689-Paris 1755 Tous les maris sont laids. Mes pensées ● mari (homonymes) nom masculin (latin maritus) marie forme conjuguée du verbe marier marient forme conjuguée du verbe marier maries forme conjuguée du verbe marier marri adjectif ● mari (synonymes) nom masculin (latin maritus) Homme uni à une femme par le mariage.
Synonymes :
- conjoint
- époux
- homme (familier)
Contraires :
- épouse
- femme
Mari
n. m. Homme uni à une femme par le mariage. Syn. conjoint, époux.
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Mari
(Mârî) anc. v. de Mésopotamie, sur le moyen Euphrate (site archéologique de Tell Harîrî, Syrie). Contemporaine de la civilisation sumérienne d'Ourouk (v. 3 000 av. J.-C.), cette cité puissante, dominée successivement par les Akkadiens, les Amorrites et les Assyriens, fut prise (XVIIIe s. av. J.-C.) par le Babylonien Hammourabi.
— Vestiges du palais royal (début du IIe millénaire av. J.-C.), bien conservé, qui recèle de nombr. temples et a livré des tablettes cunéiformes.
⇒MARI, subst. masc.
Homme uni à une femme par les liens du mariage (cf. femme II). Synon. époux (v. ce mot I A 1 a). Lucien (...) avait entendu par la croisée le colloque de la femme et du mari (BALZAC, Illus. perdues, 1843, p. 544). Nos fous rires l'étonnaient: ce jeune mari heureux, c'était pourtant son fils, si longtemps fermé, si dur (MAURIAC, Noeud vip., 1932, p. 63). Ne regrettez pas le Silvio que vous avez connu. C'était un mauvais garçon qui eût fait un mauvais mari (SALACROU, Terre ronde, 1938, II, 3, p. 207). V. accepter ex. 6, complaisant ex. 1, copain ex. de Beauvoir, exiger ex. 7:
• 1. — J'avais pensé que nous pourrions dîner à la maison? — Oui, dînons à la maison, dis-je. Mon coeur se serra; il avait dit «à la maison» comme si nous avions été mari et femme: et il nous restait deux jours à vivre ensemble.
BEAUVOIR, Mandarins, 1954, p. 323.
SYNT. Mari affectueux, aimable, amoureux, débonnaire, empressé, fidèle, passionné; mari bafoué, cocu, commode, complaisant, encombrant, infidèle, ivrogne, jaloux, malheureux, querelleur, soumis, soupçonneux, trompé; bon, excellent mari; futur, vieux mari; mari modèle; tendresse d'un mari; complaisance(s), emportement(s), impatience(s), incompréhension, indifférence(s), jalousie, trahison d'un mari; devoirs, droits d'un mari; choisir, prendre un mari; trouver un mari (à/pour qqn); être en puissance de mari; accepter, refuser de prendre pour mari; vouloir qqn pour mari; changer de mari, avoir eu plusieurs maris.
— En partic. [Le rapport d'appartenance créé par les liens du mariage entre les conjoints s'exprime par le recours à l'adj. poss.]
♦[Poss. + femme] Le mari buvait, battait sa femme, courait les chanteuses des cafés-concerts de Montsou (ZOLA, Germinal, 1885, p. 1218).
♦[Poss. + mari] Elle me suivit jusqu'à la porte de son boudoir, appuyée au bras de son mari, droite, assurée sur ce ferme soutien (FROMENTIN, Dominique, 1863, p. 210). Le penchant irrésistible qui entraîne la veuve de l'Inde à suivre son mari dans la mort (DURKHEIM, Division trav., 1893, p. 174). Henriette est la séduction même et je crois que son mari l'aimera passionnément (BERNSTEIN, Secret, 1913, I, 3, p. 6):
• 2. La femme peut, avec l'autorisation de son mari, (...) donner ses biens dotaux pour l'établissement des enfans qu'elle aurait d'un mariage antérieur...
Code civil, 1804, art. 1555, p. 287.
SYNT. Faire de qqn son mari; adorer, aimer, estimer, perdre, pleurer son mari; berner, quitter, tromper son mari; être attachée, fidèle, plaire à son mari; être heureuse avec son mari; être éprise de son mari; être abandonnée, séparée de son mari.
Prononc. et Orth.: []. Att. ds Ac. dep. 1694. Étymol. et Hist. Ca 1145 «celui qui est uni à une femme par le mariage» prendre mari «épouser» (WACE, Conception N. D., 1154 ds T.-L.). Du lat. class. maritus «id.» (lui-même dér. de mas, maris «mâle») qui a éliminé vir «homme», d'où «mari, époux». Fréq. abs. littér.: 12524. Fréq. rel. littér.: XIXe s.: a) 17945, b) 25331; XXe s.: a) 21041, b) 11720.
mari [maʀi] n. m.
ÉTYM. V. 1155; du lat. maritus.
❖
♦ Homme uni à une femme par le lien du mariage. ⇒ Conjoint, époux (cit. 1 et rem.). || Devoirs et droits du mari. ⇒ Conjugal (cf. Code civil, Art. 212 et suivants). || Adultère (cit. 3) du mari.
1 Les paroles de la bénédiction nuptiale (paroles que Dieu même prononça sur le premier couple du monde), en frappant le mari d'un grand respect, lui disent qu'il remplit l'acte le plus important de la vie; qu'il va, comme Adam, devenir le chef d'une famille, et qu'il se charge de tout le fardeau de la condition humaine.
Chateaubriand, le Génie du christianisme, I, I, X.
2 L'obligation d'assumer ces charges (du mariage) pèse, à titre principal, sur le mari.
Code civil, art. 214.
♦ Autrefois le père choisissait un mari pour sa fille (cit. 4). || Donner un mari à sa fille (→ Épouser, cit. 6). || Le mari de sa fille. ⇒ Gendre. || Chercher, prendre un mari. ⇒ Marier (se). || Refuser un mari, un homme proposé pour mari (→ Impertinence, cit. 6). || Accepter de prendre qqn pour mari. || Le mari de Mme X. || Mon mari (→ Histoire, cit. 52). → (plais.) Mon seigneur et maître; fam. mon homme, mon jules, mon mec…
♦ Vx. || Monsieur mon mari (→ Gentilhomme, cit. 1).
♦ Le mari et la femme. — (Qualifié). || Jeune, vieux mari. || Un bon mari. || Mari docile, qui porte les jupes (→ Culotte, cit. 4). || Mari fidèle, infidèle (cit. 9), volage (→ Infidélité, cit. 13); jaloux (→ Guitare, cit. 1; jubilant, cit. 2), soupçonneux. || Mari complaisant, commode (→ Corne, cit. 2). || Mari trompé (→ Égayer, cit. 11; indice, cit. 9). ⇒ Cocu. || Mari grossier et brutal (→ Félin, cit. 3), mari qui bat (cit. 2) sa femme. — Brouiller, réconcilier un mari avec sa femme. || Incompatibilité (cit. 2 et 3) entre un mari et sa femme. || Mari qui a perdu sa femme. ⇒ Veuf. || Le premier (→ Défaire, cit. 20), le second mari d'une veuve, d'une divorcée. || C'est son ancien, son ex-mari. || Elle change (cit. 36) de mari comme de chemise. || Son mari travaille, est au chômage, travaille à mi-temps pour s'occuper des enfants. — ☑ Prov. Les maris sont comme les melons, il faut en essayer plusieurs pour en trouver un bon.
3 Oui, son mari, vous dis-je, et mari très marri (…)
Molière, Sganarelle, IX.
4 Comment ? parce qu'un homme s'avise de nous épouser, il faut d'abord que toutes choses soient finies pour nous, et que nous rompions tout commerce avec les vivants ? C'est une chose merveilleuse que cette tyrannie de Messieurs les maris (…)
Molière, George Dandin, II, 2.
5 Un mari n'est qu'une espèce de manœuvre qui tracasse le corps de sa femme, ébauche son esprit et dégrossit son âme.
Chamfort, Maximes et pensées, Sur les femmes et le mariage, XXVII.
6 La femme est pour son mari ce que son mari l'a faite.
Balzac, la Physiologie du mariage, Pl., t. X, p. 770.
7 (…) elle a déjà eu trois maris, et l'on pense que, sans la honte d'en avoir un quatrième, elle prendrait Le Prévost; elle est romantique comme on ne l'est pas à Paris (…)
Sainte-Beuve, Correspondance, 124, 13 mai 1830.
8 (…) tu ressembles à ces cornichons de jeunes maris qui se flattent « d'étudier leur femme » alors qu'elle a pris leur mesure, en long et en large, du premier coup.
Bernanos, Journal d'un curé de campagne, p. 106.
♦ (Dans d'autres civilisations). || Les maris d'une femme polyandre.
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DÉR. Marital.
HOM. Marri. — Formes du v. marier.
Encyclopédie Universelle. 2012.