Akademik

trahir

trahir [ trair ] v. tr. <conjug. : 2>
traïr 1080; lat. tradere « livrer »
1Livrer, ou abandonner (qqn à qui l'on doit fidélité). dénoncer, donner, vendre. Judas trahit Jésus. Trahir ses complices. Abandonner (son camp, son armée) en passant à l'ennemi. déserter. Trahir sa patrie ( traître) . Absolt « Capable de tout pour sauver sa peau, de fuir, de trahir » (Sartre).
2Cesser d'être fidèle à (qqn auquel on est lié par une parole donnée ou par solidarité). Trahir un ami. « Si le vizir vous sert ou vous trahit » (Racine). Il a « constamment trahi Alexandre au profit de Napoléon » (Sartre). PROV. On n'est jamais trahi que par les siens. Par ext. Il « l'accusa d'avoir trahi sa confiance » (Musset). Trahir sa promesse.
(Sujet chose) Desservir par son caractère révélateur. « toute fille amoureuse commet une imprudence qui la trahit » (Balzac). Son lapsus l'a trahi.
3Abandonner (une personne aimée) pour une autre. tromper. « À vingt et un ans [...] Augustine se vit trahie pour une femme de trente-six ans » (Balzac).
4(Sujet chose) Lâcher, cesser de seconder (cf. Faire défaut). « Mes nerfs m'ont trahi » (Bourget). abandonner.
Exprimer infidèlement. « le sentiment que les mots m'entraînaient [...] trahissaient ma vraie pensée » (Martin du Gard). Le traducteur a trahi l'auteur.
5Livrer (un secret). divulguer, révéler. « Il trahit, au cours de libations trop capiteuses [...] le secret de la négociation » (Madelin).
Laisser voir (ce qu'on veut cacher). « de peur de trahir l'émotion trop vive » (Musset).
(Sujet chose) Être le signe, l'indice de (une chose peu évidente ou dissimulée). déceler, dénoncer, manifester, révéler. « Une contraction, vite réprimée, du petit visage trahit la déception de l'enfant » (Martin du Gard).
6 V. pron. (réfl.) Laisser apparaître, laisser échapper ce qu'on voulait cacher. Il s'est trahi par cette question. se couper. « je me trahirais; je ne pourrais retenir l'expression du dédain qu'ils m'inspirent » (Stendhal).
(Sujet chose) Se manifester, se révéler. « C'est par lui [l'amour] que se trahit la faiblesse des êtres » (France).
⊗ CONTR. Seconder, servir; 1. cacher.

trahir verbe transitif (latin populaire tradire, du latin classique tradere, livrer) Faire cause commune avec l'ennemi, avec un pays étranger : Il a trahi pendant la dernière guerre. Cesser d'être fidèle à quelqu'un, à un groupe, un parti, une cause, les abandonner. Ne pas respecter l'engagement pris : Vous avez trahi notre confiance. Dénaturer, altérer la pensée de quelqu'un, par un compte rendu incomplet ou infidèle, par une interprétation fausse, etc. : Cette traduction trahit l'original. Être la cause qui révèle la présence, l'identité, un aspect caché de quelqu'un : L'embarras du témoin l'a trahi. En parlant d'une faculté, manquer, faire défaut brusquement à quelqu'un : Ma mémoire me trahit. Être très en deçà, très différent de ce qui était attendu : Les résultats ont trahi nos espoirs. Laisser apparaître involontairement ce qu'on voulait tenir caché : Un léger tremblement trahissait son impatience.trahir (citations) verbe transitif (latin populaire tradire, du latin classique tradere, livrer) Anonyme Tel qui trahit se perd, et les autres avec lui. Ki hume traïst sei ocit e altroi. Chanson de Roland Pierre Corneille Rouen 1606-Paris 1684 Rome, si tu te plains que c'est là te trahir, Fais-toi des ennemis que je puisse haïr. Horace, I, 1, Sabine Jean-Baptiste Massillon Hyères 1663-Beauregard-l'Évêque, Puy-de-Dôme, 1742 Académie française, 1719 Quiconque flatte ses maîtres, les trahit. Sermons, Sur la mort Commentaire La même phrase se retrouve dans le Sermon : Sur les tentations des grands. François Mauriac Bordeaux 1885-Paris 1970 Académie française, 1933 Judas aurait pu devenir un saint, le patron de nous tous qui ne cessons de trahir. La Vie de Jésus Flammarion Henry Millon de Montherlant Paris 1895-Paris 1972 Académie française, 1960 Vivent mes ennemis ! Eux du moins ne peuvent pas me trahir. Malatesta, I, 8, Malatesta Gallimard Maurice Sachs Paris 1906-Hambourg ? 1944 ? On ne trahit bien que ceux qu'on aime. Derrière cinq barreaux Gallimard Armand Salacrou Rouen 1899-Le Havre 1989 On ne trahit pas ce qui n'existe plus. Histoire de rire Gallimardtrahir (expressions) verbe transitif (latin populaire tradire, du latin classique tradere, livrer) Trahir un secret, le révéler. ● trahir (synonymes) verbe transitif (latin populaire tradire, du latin classique tradere, livrer) Cesser d'être fidèle à quelqu'un, à un groupe, un parti...
Synonymes :
- manquer à
- rompre
- tromper
- violer
Contraires :
- soutenir
Ne pas respecter l'engagement pris
Synonymes :
- décevoir
Contraires :
- respecter
Dénaturer, altérer la pensée de quelqu'un, par un compte rendu...
Synonymes :
- dénaturer
- fausser
Être la cause qui révèle la présence, l'identité, un aspect...
Synonymes :
- démasquer
- dénoncer
- signaler
En parlant d'une faculté, manquer, faire défaut brusquement à quelqu'un
Synonymes :
- faire défaut
- lâcher
Laisser apparaître involontairement ce qu'on voulait tenir caché
Synonymes :
- dévoiler
- manifester
- marquer
- montrer
- révéler
Trahir un secret
Synonymes :
- divulguer
- livrer

trahir
v.
rI./r v. tr.
d1./d Livrer ou abandonner par perfidie. Trahir son pays. Trahir un secret.
d2./d Se montrer infidèle, déloyal à l'égard de; tromper. Trahir un ami.
Trahir la confiance de qqn.
d3./d Exprimer d'une manière peu fidèle. Mes paroles ont trahi ma pensée.
d4./d (Sujet n. de chose.) Révéler (ce qu'on voulait dissimuler). Son attitude trahissait son trouble.
|| (Comp. n. de personne.) Faire reconnaître, dénoncer. Cette imprudence a trahi le criminel.
Ne pas seconder, abandonner. Ses forces l'ont trahi.
rII./r v. Pron. Laisser paraître, révéler par inadvertance ce qu'on voulait dissimuler. Il s'est trahi par un mot.

⇒TRAHIR, verbe trans.
I. — Empl. trans.
A. — [Corresp. à trahison]
1. [Le compl. d'obj. désigne une pers., une collectivité]
a) Livrer ou abandonner avec perfidie. Trahir son camp, son chef, sa patrie, son pays; trahir qqn par intérêts. J'ai vu les jours affreux où le cri de déroute: « Nous sommes trahis! » dispersait nos bataillons devant l'envahisseur (CLEMENCEAU, Iniquité, 1899, p. 50). Les généraux nous trahissent (...) et livrent nos armées à l'ennemi (A. FRANCE, Dieux ont soif, 1912, p. 114).
Absol. Faire cause commune avec l'ennemi. Il suffirait d'un capitaine qui trahît ou qui perdît la tête pour que de grandes catastrophes arrivassent (MÉRIMÉE, Lettres ctesse de Montijo, t. 1, 1848, p. 295).
b) Tromper la confiance de quelqu'un; manquer à la foi donnée à quelqu'un, à la solidarité envers quelqu'un. Trahir ses amis, ses camarades. Et cette victoire elle aussi je l'ai donnée, bien des fois, à ceux qui s'en étaient remis à moi de tout leur sort, je la leur ai donnée malgré eux, contre eux, dupé par eux, trahi par eux, trahi par mes maîtres, trahi par mon frère, trahi par mes fils (MONTHERL., Malatesta, 1946, II, 5, p. 476). Quand l'élève trahit le maître c'est tout à l'honneur du maître. Cela prouve que le maître lui a permis de s'opposer à lui et de devenir un homme (CHOISY, Psychanal., 1950, p. 227).
Absol. Quoi de plus simple? Quand on veut trahir, ce ne sont jamais les raisons qui manquent (AYMÉ, Vogue, 1944, p. 143).
Proverbe. On n'est jamais trahi que par les siens. ,,Ce sont les amis (qui ont donné leur foi) et non les ennemis qui trahissent`` (ROB. 1985).
En partic. Abandonner la personne aimée pour une autre personne. Il se crut un homme sensible trahi par une femme infidèle (STAËL, Corinne, t. 3, 1807, p. 310).
Part. passé en empl. adj. Époux trahi. Un murmure passa entre ses dents serrées, le « oh » gémissant et violent de l'amant trahi (VERCORS, Sil. mer, 1942, p. 75).
Part. passé en empl. subst. La vieillesse et la maladie, pour lesquelles j'acquiers une grande répulsion: toutes deux voudront bientôt me serrer de près. D'avance, je me bouche les narines... Les malades d'amour, les trahis, les jaloux doivent sentir la même odeur (COLETTE, Naiss. jour, 1928, p. 12).
2. Trahir qqc.
a) Manquer à quelque chose qu'on doit observer. Synon. rompre, violer. Trahir sa foi, une promesse, la parole donnée, ses engagements. Leur chef avait fait vœu d'une victime humaine, Et puis il avait cru pouvoir impunément Se jouer de Diane et trahir son serment! (DUMAS père, Caligula, 1837, II, 9, p. 78). Lui aussi avait été trompé par ce prêtre, tout souillé de son adultère divin, ayant trahi ses serments, rapportant sur lui des caresses défendues, dont la senteur lointaine suffisait à exaspérer sa continence de bouc qui ne s'était jamais satisfait (ZOLA, Faute Abbé Mouret, 1875, p. 1441).
b) Mal seconder, mal servir quelque chose; agir contre quelque chose, à l'encontre de quelque chose. Synon. desservir3, faire du tort à, nuire à. Trahir une cause, un parti; trahir le droit, la justice, la vérité; trahir les intérêts de qqn. Il a une particularité [le marchand de cognac]: sa dignité de marchand. Il se laissera ruiner plutôt que de trahir la marque (CHARDONNE, Attach., 1943, p. 64). S'il est des injures inexpiables, c'est bien celles que nous reçûmes de ces anciens compagnons de chaîne, qui n'avaient pas même l'excuse de l'ignorance pour trahir notre cause et travestir la vérité (AMBRIÈRE, Gdes vac., 1946, p. 130).
En partic. Ne pas répondre à une attente, rendre vain. Synon. décevoir. La fortune a trahi nos efforts; les événements trahirent ses espérances (Ac. 1835-1935). Sous prétexte de lui faire confiance, tu trahis la confiance que d'autres ont mise en toi (BEAUVOIR, Mandarins, 1954, p. 371).
Part. passé en empl. adj. Ses jeunes traits étaient empreints d'une grâce nébuleuse, son regard attestait des efforts trahis, mille espérances trompées (BALZAC, Peau chagr., 1831, p. 8).
3. Au fig.
a) Trahir qqn. [Le suj. désigne une chose] Faire défaut à, ne pas seconder quelqu'un. Synon. abandonner, lâcher1. Jeanne devint toute pâle et sentit tout son sang affluer à son cœur... Elle voulut se lever, courir à la rencontre de celui qu'elle attendait... Ses forces la trahirent, et elle ne put quitter son siège (PONSON DU TERR., Rocambole, t. 1, 1859, p. 630). Quelle image plus effrayante souhaiter: celle d'un homme que son corps trahit et qui faute d'être mort à temps consomme la comédie en attendant la fin (CAMUS, Sisyphe, 1942, p. 105).
b) Trahir qqn/qqc. [Le suj. désigne une pers.]
— Ne pas être fidèle à l'esprit de quelqu'un. J'ai vu Mme Bartet jouer Antigone à la Comédie-Française. Elle était exquise de goût, de plastique et de douceur, mais elle trahissait Sophocle (BARRÈS, Voy. Sparte, 1906, p. 87). Nietzsche, du moins dans sa théorie de la surhumanité, Marx avant lui avec la société sans classes, remplacent tous deux l'au-delà par le plus tard. En cela, Nietzsche trahissait les Grecs et l'enseignement de Jésus qui, selon lui, remplaçaient l'au-delà par le tout de suite (CAMUS, Homme rév., 1951, p. 104).
— Ne pas traduire fidèlement quelque chose. Synon. déformer, dénaturer, fausser. Mon mari s'est laissé aller à sa vivacité et ses paroles ont sûrement trahi sa pensée (AYMÉ, Cléramb., 1950, II, 8, p. 115). Ce théâtre [de Feydeau] est le direct héritier de la tragédie grecque. Nos classiques en avaient trahi l'esprit, en y introduisant le sentiment et sa gratuité, ses nuances, ses contradictions savamment combinées (MORAND, Eau sous ponts, 1954, p. 99).
Absol. Comment faire tenir en quelques lignes une journée de lectures, de réflexions, d'entretiens? Les faits saillants ne s'expliquent que par tout ce qui manque. Résumer, c'est dénaturer, c'est trahir (GREEN, Journal, 1949, p. 234).
B. — P. ext.
1. [Le suj. désigne une pers.]
a) Trahir qqc. Faire connaître volontairement ce qui devait rester caché. Synon. divulguer, livrer, révéler. Bien sûr elle n'aurait jamais trahi un secret; mais elle n'encourageait pas aux confidences: elle affichait trop de curiosité et témoignait trop peu de sympathie (BEAUVOIR, Mandarins, 1954, p. 541).
b) Région. (Berry, Sologne). Trahir qqn. Découvrir, surprendre quelqu'un. Le soir où il avait colleté, c'était elle [la fillette] qui l'avait trahi cherchant ses places au bois (GENEVOIX, Raboliot, 1925, p. 179).
2. [Le suj. désigne une chose] Faire connaître. Il ne voulait pas être reconnu, mais sa voix l'a trahi (Ac. 1935). Mais un mouvement imprimé au bouton de la porte avait trahi ma présence, et Max l'ouvrit au moment où je battais en retraite (REYBAUD, J. Paturot, 1842, p. 116).
En partic. Laisser apparaître; être le signe, l'indice de quelque chose. Synon. annoncer, déceler, dénoter, indiquer, montrer. Les larges épaules, la taille courte et trapue, les fortes mains trahissaient l'homme habitué à de rudes exercices (PONSON DU TERR., Rocambole, t. 2, 1859, p. 32):
Déjà, il était devant l'étalage des journaux, et, à travers la haute vitre, il apercevait Marie-Jeanne, assise au comptoir, toute pâle, avec un volume ouvert devant elle, dont elle avait sans doute interrompu la lecture, pour causer avec un homme pas très âgé, dont le visage trahissait une usure précoce.
BOURGET, Actes suivent, 1926, p. 121.
♦ [Le compl. d'obj. désigne un état, un sentiment] Un léger tremblement trahissait sa nervosité. Il n'y avait aucun luxe: la grande table, les chaises, un buffet d'acajou; et, seuls, deux fauteuils profonds trahissaient l'amour du bien-être, les longues digestions heureuses (ZOLA, Germinal, 1885, p. 1195). Ses gestes incohérents trahissaient sa fébrilité (MARTIN DU G., Thib., Été 14, 1936, p. 670).
II. — Empl. pronom.
A. — Se livrer, se dénoncer les uns les autres. Malatesta: (...) Je marche au milieu des traîtres comme on marche au milieu des arbres dans une forêt. Isotta: Ils se trahissent d'abord entre eux. C'est pourquoi vous êtes en vie (MONTHERL., Malatesta, 1946, I, 8, p. 461).
B. — Empl. pronom. réfl.
1. Manquer à soi-même, se renier. La science a pour objet l'étude des phénomènes; elle se trahit elle-même, si elle commence par se faire des phénomènes une idée qui les transforme en choses en soi (É. BOUTROUX, Contingence, 1874, p. 32). Mentir; je m'y résignai mal: il me semblait me trahir moi-même (BEAUVOIR, Mém. j. fille, 1958, p. 192).
2. Se faire découvrir. Se trahir en faisant du bruit. (Dict. XIXe et XXe s.).
En partic. Laisser paraître des idées, des sentiments, un état qu'on voulait cacher. Comme l'écrivain, le peintre se met dans son œuvre; il y est présent, il s'y trahit et s'y révèle (SÉAILLES, E. Carrière, 1911, p. 31). La jeune fille souffrait (...), sans discrétion (...) Au reste, eût-elle gardé pour la solitude de sa chambre ses explosions de chagrin qu'elle se fût encore trahie par son silence, ses soupirs, ses yeux rougis (GREEN, Malfaiteur, 1955, p. 78).
C. — Être révélé, se manifester. Eh bien, Modeste est gaie! (...) Cette gaieté se trahit par les notes de sa voix, par des accents que je saisis, que j'explique (BALZAC, Modeste Mignon, 1844, p. 35). Dans l'Oural, le voisinage d'une côte se trahit par la nature arénacée des sédiments du grès d'Artinsk (LAPPARENT, Abr. géol., 1886, p. 211).
REM. Trahisseur, subst. masc., rare. Personne qui trahit. Là sont les trahisseurs mêlés aux parricides, Tous les despotes fous redevenus lucides, L'homme loup et l'homme renard (HUGO, Légende, t. 6, 1883, p. 72).
Prononc. et Orth.:[], (il) trahit []. Att. ds Ac. dep. 1694. Étymol. et Hist. 1. Fin Xe s. « tromper perfidement, manquer de foi envers quelqu'un » (Passion, éd. D'Arco Silvio Avalle, 150: Per que'm trades in to baisol?); ca 1160 traïr (Eneas, éd. J.-J. Salverda de Grave, 1749); 2. ca 1590 fig. trahir « révéler » (MONTAIGNE, Essais, I, 21, éd. P. Villey et V.-L. Saulnier, p. 102). Francisation sur le modèle des verbes en -ir, du lat. tradere « transmettre », « confier »; écrit avec -h- pour séparer les voyelles. Fréq. abs. littér.:3 977. Fréq. rel. littér.:XIXe s.: a) 6 163, b) 4 754; XXe s.: a) 4 642, b) 6 312.

trahir [tʀaiʀ] v. tr.
ÉTYM. 1080, traïr; trades (2e pers. du présent de l'indic.), v. 980; de tradire, du lat. tradere « transmettre, livrer », au sens péj.; de trans-, et dare « donner ».
1 Livrer, ou abandonner (celui à qui l'on doit fidélité). Déceler (vx), dénoncer, donner (fam.), livrer; délation. || Judas trahit Jésus. || Trahir qqn par intérêt. Vendre.Vx. || Trahir qqn à qqn. Donner, livrer.
(1559). Abandonner (son camp, son armée), en passant à l'ennemi. Déserter; déserteur, traître. || Je sais que par sa fuite (cit. 1) il a trahi l'État. || Trahir pour sauver sa peau (cit. 18). || Les Bavarois avaient trahi à leur tour (→ Ouvrir, cit. 14).
2 (XVIe). Manquer à la foi donnée à (qqn), à la solidarité envers (qqn), généralement à son insu. Manquer (à sa parole), mentir (→ fam. Jouer un tour de cochon, faire une vacherie, une saloperie à qqn).« (…) Si le vizir vous sert ou vous trahit » (→ Douter, cit. 12). || Confident (cit. 3) qui trahit son maître (en courtisant sa maîtresse). || Trahir qqn en révélant ses secrets (→ Couvrir, cit. 46; enfiler, cit. 11). || Il trahissait Alexandre au profit de Napoléon (→ Espionnage, cit. 4).
1 (…) on n'a pas le droit de trahir les traîtres mêmes. On n'a jamais le droit de trahir, personne. Les traîtres, il faut les combattre, et non les trahir.
Ch. Péguy, Notre jeunesse, p. 161.
Prov. On n'est jamais trahi que par les siens : ce sont les amis (qui ont donné leur foi) et non les ennemis qui trahissent. || « Quiconque est soupçonneux invite (cit. 9) à le trahir ».
Trahir la confiance (→ Accabler, cit. 18; permettre, cit. 5; publier, cit. 1; reproche, cit. 2), l'hospitalité de qqn (→ Perfidie, cit. 3). Décevoir. || L'amitié trahie (→ Inimitié, cit. 1).
2 Il vint trouver votre père, l'accabla de reproches, l'accusa d'avoir trahi sa confiance et d'avoir causé le refus qu'il avait essuyé.
A. de Musset, les Caprices de Marianne, I, 12.
(Sujet n. de chose). Desservir en livrant un secret. || Ses pleurs l'ont trahi. || Son trouble, sa rougeur le trahit.
3 L'amour n'est pas un feu qu'on renferme en une âme :
Tout nous trahit, la voix, le silence, les yeux;
Et les feux mal couverts n'en éclatent que mieux.
Racine, Andromaque, II, 2.
4 (…) nous serons bien, à nous tous, aussi forts que cette petite personne, et dans un temps donné, toute fille amoureuse commet une imprudence qui la trahit (…)
Balzac, Modeste Mignon, Pl., t. I, p. 454.
3 (V. 1130). Littér. Abandonner (la personne aimée) pour une autre personne. Tromper; infidèle (être). → 2. Garde, cit. 8. || Lui qui me fut si cher et qui m'a pu trahir ! (→ Aimer, cit. 15). || La certitude d'être trahie (→ Soupçon, cit. 1).
5 À vingt et un ans, dans tout l'éclat de la jeunesse et de la beauté, Augustine se vit trahie pour une femme de trente-six ans.
Balzac, la Maison du Chat-qui-pelote, Pl., t. I, p. 54.
4 (1636). Rompre, violer (un engagement librement pris). || Un serment qu'on trahit (→ Abandonner, cit. 3).
Ne plus suivre (qqn, qqch.), agir contre ou combattre (ce à quoi on était fidèle). || Trahir son Dieu, sa foi. Renégat. || Le culte qu'ils ont trahi (→ Insulter, cit. 10). || Il avait trahi les deux ordres auxquels il appartenait (→ Ci, cit. 2). || Trahir une cause, un parti. Défection (faire), transfuge. || Trahir son devoir.Par ext. Agir à l'encontre de (ce qui doit être suivi). || Trahir le droit (→ Absoudre, cit. 5), le bon sens (→ Naturel, cit. 29), la justice (→ Non-sens, cit. 2).(À l'encontre d'une partie de soi-même). || Trahir son cœur. || De s'abaisser (cit. 8) ainsi jusqu'à trahir son âme (Molière). → ci-dessous, se trahir (2.).
6 Tu sais comment l'Amour peut forcer quelquefois
À trahir le devoir et transgresser les lois.
Théophile de Viau, Élégie, « À M. de Pesé ».
7 Je trahirais mon cœur de parler d'autre sorte (…)
Molière, Tartuffe, I, 1.
8 Je subirai cet interrogatoire. M'avez-vous vu, monsieur, trahir la vérité dans quelque occasion que ce fût ?
Beaumarchais, la Mère coupable, III, 8.
5 (Sujet n. de chose). Faire défaut, ne pas seconder. || Ses forces (cit. 11) le trahissent. Abandonner, lâcher.
9 Mon bras, qui tant de fois a sauvé cet empire,
Tant de fois affermi le trône de son roi,
Trahit donc ma querelle, et ne fait rien pour moi ?
Corneille, le Cid, I, 4.
10 Mes nerfs m'ont trahi. J'en suis maître à présent (…)
Paul Bourget, Un divorce, IV.
6 Mal seconder, mal servir (qqch.). Desservir. || Trahir les intérêts de l'accusé (cit. 2). || Paroles qui trahissent la pensée, l'expriment mal (→ Efféminer, cit. 2).
Donner une idée fausse de… Corrompre, dénaturer. || La photo nous flatte ou nous trahit (→ Photogénique, cit. 1). || Citer des échantillons de cette correspondance serait la trahir (→ Oscillation, cit. 4).
11 (…) j'ai toujours été paralysé par le sentiment que les mots m'entraînaient, dénaturaient les nuances, trahissaient ma vraie pensée (…)
Martin du Gard, les Thibault, t. VII, p. 117.
7 (1580). Livrer, révéler (un secret). Divulguer, révéler. || Il a trahi son secret par ses bavardages (cf. Vendre la mèche, manger le morceau). || Trahir un secret au cours de libations (→ Cuisiner, cit. 5), en parlant trop; sous la torture…
Laisser voir (ce qu'on veut cacher). || Ne rien trahir de son secret (→ Bavard, cit. 8), de sa duplicité. || Il pensa (cit. 54) trahir sa joie. || De peur de trahir leur émotion (→ Sympathie, cit. 2).
8 (V. 1587). Sujet n. de chose. Être la marque, le signe, l'indice… (d'une chose peu évidente ou dissimulée). Déceler, manifester, révéler. || Voix qui ne trahit aucune émotion (→ 1. Lire, cit. 23). || Tout en elle trahissait le mensonge (→ Sifflant, cit.). Dénoncer. || Écriture qui trahit un caractère (→ Fleur, cit. 15). Expliquer. || Objets qui trahissent des habitudes (cit. 14). || Rien ne trahissait la vie (→ Contradiction, cit. 6). Indiquer.
12 Je m'efforçai en vain de la consoler par mes caresses; mes propres pleurs trahissaient mon désespoir et ma consternation.
Abbé Prévost, Manon Lescaut, I, p. 70.
13 Une contraction, vite réprimée, du petit visage trahit la déception de l'enfant.
Martin du Gard, les Thibault, t. III, p. 110.
——————
se trahir v. pron.
ÉTYM. (XVIIe).
1 Récipr. Se livrer, se dénoncer les uns les autres.
2 Réfl. Manquer à soi-même, se renier. || Comment demeurer fidèle (cit. 13) à celui qui se trahit lui-même ?
3 Laisser échapper, découvrir ce qu'on voulait cacher. || Il s'est trahi par cette question. || Le menteur finit par se trahir. aussi Couper (se).
14 Un beau jour, je me trahirais; je ne pourrais retenir l'expression du dédain qu'ils m'inspirent.
Stendhal, le Rouge et le Noir, I, XXII.
4 (Av. 1750). Se manifester. || Vocation qui se trahit par l'attitude (→ Critère, cit. 6). || Le défaut (cit. 5) de maturité se trahissait dans ce qu'ils disaient. || Son caractère envieux se trahit (→ Montrer le bout de l'oreille).
15 L'amour suppose chez celui qui l'éprouve le sentiment d'une intime misère. C'est par lui que se trahit la faiblesse des êtres.
France, Thaïs, p. 139.
16 (…) il fit la connaissance d'une femme chez qui l'intelligence ne se trahissait que par une grâce plus subtile (…)
Proust, les Plaisirs et les Jours, p. 62.
——————
trahi, ie p. p. adj.
|| Époux trahi (→ Aspect, cit. 13). || Des vœux trahis (→ Écouler, cit. 13).
CONTR. Aider, fidèle (être). — Respecter, servir, soutenir. — Seconder; cacher.
DÉR. Trahison.

Encyclopédie Universelle. 2012.