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pudeur

pudeur [ pydɶr ] n. f.
• 1542; lat. pudor
1Sentiment de honte, de gêne qu'une personne éprouve à faire, à envisager ou à être témoin des choses de nature sexuelle, de la nudité; disposition permanente à éprouver un tel sentiment. décence, vx honnêteté, pudicité. « J'ai naturellement beaucoup de pudeur » (Romains). pudique. Pudeur déplacée. Fausse pudeur. pruderie, pudibonderie. Spectacle qui blesse, offense la pudeur. Dr. Attentat, outrage public à la pudeur (puni par la loi).Loc. fam. Jouer les pères la pudeur : s'offusquer de la nudité, de la sexualité.
Une, des pudeurs : réaction inspirée par ce sentiment. « Ces réserves, ces pudeurs qui s'interposent dans les relations » (Lamartine).
2Gêne qu'éprouve une personne délicate devant ce que sa dignité semble lui interdire. délicatesse, discrétion, réserve, retenue. Cacher son chagrin par pudeur. Sans aucune pudeur. « cette pudeur d'honnête homme qui a horreur de parler de soi » (Stendhal). modestie. Avoir la pudeur de (et inf.). Ayez au moins la pudeur de vous taire.
⊗ CONTR. Impudeur, indécence; cynisme.

pudeur nom féminin (latin pudor) Disposition à éprouver de la gêne devant ce qui peut blesser la décence, devant l'évocation de choses très personnelles et, en particulier, l'évocation de choses sexuelles : Manquer de pudeur. Discrétion, retenue qui empêche de dire ou de faire quelque chose qui peut blesser la modestie, la délicatesse : Il a eu la pudeur de ne pas parler de son aventure.pudeur (citations) nom féminin (latin pudor) Honoré de Balzac Tours 1799-Paris 1850 L'amour véritable s'enveloppe toujours des mystères de la pudeur, même dans son expression, car il se prouve par lui-même ; il ne sent pas la nécessité, comme l'amour faux, d'allumer un incendie. Les Petits Bourgeois Gustave Flaubert Rouen 1821-Croisset, près de Rouen, 1880 Académie française, 1880 Les affections profondes ressemblent aux honnêtes femmes ; elles ont peur d'être découvertes, et passent dans la vie les yeux baissés. L'Éducation sentimentale Charles de Secondat, baron de La Brède et de Montesquieu château de La Brède, près de Bordeaux, 1689-Paris 1755 La pudeur sied bien à tout le monde ; mais il faut savoir la vaincre et jamais la perdre. Mes pensées Paul Morand Paris 1888-Paris 1976 Académie française, 1968 La pudeur leur va si bien quand elles en ont, si bien quand elles n'en ont plus, que je ne conçois guère de femmes qui ne désirent pas en avoir. Fermé la nuit Gallimard Gérard Labrunie, dit Gérard de Nerval Paris 1808-Paris 1855 [Ne pas] offenser la pudeur des divinités du songe. Notes manuscrites Germain Nouveau Pourrières 1851-Pourrières 1920 Frère, n'est-ce pas là la femme que tu veux : Complètement pudique, absolument obscène, Des racines des pieds aux pointes des cheveux ? Sonnets du Liban, Musulmanes Gallimard Isaac Félix, dit André Suarès Marseille 1868-Saint-Maur-des-Fossés 1948 La pudeur est le parfum de la volupté. Voici l'homme Albin Michelpudeur (difficultés) nom féminin (latin pudor) Registre Ces deux mots sont synonymes, mais pudeur (latin pudor) est du registre courant, alors que pudicité (de pudique, d'après le latin pudicitia) est du registre soutenu ou littéraire. → impudeurpudeur (expressions) nom féminin (latin pudor) Attentat à la pudeur, aujourd'hui agression sexuelle autre que le viol ou atteinte sexuelle commise sans violence, ni contrainte, ni menace, ni surprise sur un mineur de moins de 15 ans. Outrage public à la pudeur, exhibition sexuelle imposée à la vue d'autrui dans un lieu accessible aux regards du public. ● pudeur (synonymes) nom féminin (latin pudor) Disposition à éprouver de la gêne devant ce qui peut...
Synonymes :
- pruderie
- pudibonderie
- pudicité (littéraire)
- vertu
Contraires :
- indécence
- lascivité
- lubricité
- paillardise
Discrétion, retenue qui empêche de dire ou de faire quelque chose...
Synonymes :
- décence
- discrétion
- modestie
- réserve
Contraires :
- cynisme
- effronterie
- immodestie
- impudence
- impudeur
Attentat à la pudeur
Synonymes :
- bonnes moeurs

pudeur
n. f.
d1./d Tendance à éprouver de la gêne, de la honte devant ce qui touche à la sexualité.
|| DR Outrage public à la pudeur: délit qui consiste à se livrer, volontairement ou non, à une exhibition impudique.
Attentat à la pudeur: acte puni de peines criminelles, qui consiste en un viol ou une tentative de viol ou en un acte impudique tenté ou exécuté sur la personne d'autrui.
d2./d Retenue, réserve. La pudeur de sentiment.
|| Délicatesse. Il a eu la pudeur de taire ce triste événement.

⇒PUDEUR, subst. fém.
A. — 1. Disposition, propension à se retenir de montrer, d'observer, de faire état de certaines parties de son corps, principalement celles de nature sexuelle, ou de montrer, d'observer, de faire état de choses considérées comme étant plus ou moins directement d'ordre sexuel; attitude de quelqu'un qui manifeste une telle disposition. Synon. pudicité; anton. indécence, impudeur, impudicité. Pudeur chaste, comique, émouvante, évidente, excessive, farouche, naturelle; pudeur d'autruche; défaut, manque de pudeur. Toujours l'idée qu'un homme l'accoucherait, l'avait révoltée. C'était en elle une pudeur maladive de femme coquette (ZOLA, Joie de vivre, 1884, p. 1080). Les fenêtres sont grillées jusqu'à mi-hauteur par de petites lattes de frêne, comme la pudeur musulmane l'exige (FARRÈRE, Homme qui assass., 1907, p. 104). L'on se soulageait partout et n'importe où, dans les rues comme dans les champs, sans pudeur aucune (GREEN, Journal, 1953, p. 224):
1. ... il avait connu une distinguée et charmante fille qui (...) avait fait naufrage et était restée dix-huit jours sur un radeau. Elle confessait qu'au bout de trois ou quatre jours, toute pudeur était évanouie et que l'on faisait ses besoins l'un devant l'autre...
GONCOURT, Journal, 1888, p. 801.
Expr. fam. Père la pudeur. Homme dont la morale s'effarouche facilement. (Dict. XIXe et XXe s.).
DR. Attentat, outrage à la pudeur; attenter à la pudeur (de qqn).
[Avec un compl.]
♦ [indiquant ce qui manifeste la pudeur] Cette pornocratie qui depuis trente ans a fait reculer en France la pudeur publique (PROUDHON, Pornocratie, 1865, p. 3).
♦ [indiquant ce qu'on retient de faire, de dévoiler] Il est beaucoup plus contre la pudeur de se mettre au lit avec un homme qu'on n'a vu que deux fois, après trois mots latins dits à l'église, que de céder malgré soi à un homme qu'on adore depuis deux ans (STENDHAL, Amour, 1822, p. 51). N'y a-t-il donc que la pudeur du corps? Pourquoi la pudeur de l'âme n'existerait-elle pas? « J'hésite à montrer ces nudités à mon directeur », dit-elle (VIGNY, Journal poète, 1843, p. 1204). Les filles de treize à quinze ans, celles qui n'avaient encore ni peur de l'homme, ni pudeur corporelle (COLETTE, Chambre d'hôtel, 1940, p. 40).
2. Gén. au plur. Manifestation de pudeur. La pièce n'est qu'un prétexte pour mettre en scène, à chaque acte, un salon de bordel. Rien que des pudeurs d'actrices déshabillées à coups de ciseaux, des jupons courts et des corsets de rien (GONCOURT, Journal, 1860, p. 864). Elle avait des délicatesses de sentiment, rares comme ses dentelles, avec des amulettes sur la peau et des pudeurs dans la dépravation (FLAUB., Éduc. sent., t. 2, 1869, p. 209).
B. — 1. Disposition, propension à se retenir de montrer, d'observer, de faire état de ce qui met en jeu (ou d'agir lorsque cela met en jeu) quelque chose qui touche de près à la personnalité, à la vie intime de quelqu'un, ou à l'essence de quelque chose; attitude de quelqu'un qui manifeste une telle disposition. Synon. décence, honte, réserve, retenue; anton. impudeur, inconvenance, indécence. Il était travaillé d'une pudeur, l'idée qu'on pourrait dévisager la jeune fille, l'aborder, plaisanter peut-être lui causait un insupportable malaise (ZOLA, L'Œuvre, 1886, p. 112). Tous les vrais musiciens d'église ont éprouvé cette sorte de pudeur devant le texte sacré (POTIRON, Mus. église, 1945, p. 115). Une pudeur, une gaucherie, une inhibition irrépressibles l'empêchaient de les importuner (ARNOUX, Double chance, 1958, p. 213):
2. Quel dommage qu'un métier comme le nôtre ne fasse au fond qu'une part si médiocre à l'inspiration! Il y a en moi quelque chose, une sorte de préjugé — pis encore — un respect humain, une pudeur, voilà le mot — oui, une pudeur imbécile qui me retient d'utiliser franchement un rêve.
BERNANOS, Crime, 1935, p. 833.
SYNT. Pudeur admirable, aimable, altière, charmante, craintive, étrange, extrême, fière, gênante, hypocrite, indéfinissable, invincible, naïve, ombrageuse, orgueilleuse, première, profonde, sauvage, simple, singulière, suprême, timide, touchante, vaine, véritable, vraie; fausse, grande pudeur.
Sans pudeur. Sans vergogne. Anton. honteusement (v. ce mot B). Le fabricant (...) sacrifie toujours sans pudeur et sans scrupule à ses calculs les intérêts de la population (Monopole et impôt sel, 1833, p. 9). En Amérique, les politiciens gaspillent sans pudeur de gros impôts (SOREL, Réflex. violence, 1908, p. 78). Une pléiade de dessinateurs (...) démarquent sans pudeur l'œuvre des artistes d'autrefois (VIAUX, Meuble Fr., 1962, p. 161).
a) [Avec un compl. indiquant ce qui manifeste de la pudeur]
[Le compl. est adnominal] La pudeur de l'écrivain consiste à dévoiler le faux, et l'impudeur à dévoiler le vrai! (LAMART., Nouv. Confid., 1851, p. 7). Souvent il ne perd pas un seul de vos mouvements; mais il fait le mort, comme les insectes. Cette pudeur d'esprit est belle (ALAIN, Propos, 1923, p. 556). Une pudeur d'homme presque toujours plus délicate, plus sincère que la nôtre (COLETTE, Pays. et portr., 1954, p. 40).
[Le compl. est un adj.]. Quant à Jos-Mari (...) par timidité et par pudeur virile, il cachait lui-même ses obscurs débats (PEYRÉ, Matterhorn, 1939, p. 245). D'autres comme la Suisse ou les États-Unis d'Amérique, lui opposent une sorte de pudeur constitutionnelle (MOUNIER, Traité caract., 1946, p. 126).
b) [Avec un compl. indiquant ce qu'on se retient de faire, de dévoiler]
[Le compl. est une prop. inf.] Un vieux cœur qui s'éprend d'un jeune être éprouve une pudeur à lui témoigner le besoin qu'il a de lui (ROLLAND, J.-Chr., Nouv. journée, 1912, p. 1501).
Loc. Avoir/n'avoir pas de (la) pudeur de + inf. Il y entra et ne vit pas dix personnes dans cette salle immense. Il eut quelque pudeur de se trouver là (STENDHAL, Chartreuse, 1839, p. 95). Et n'ont-ils [les Français] donc pas de pudeur de montrer ainsi leur âme nue (TOULET, Tendres mén., 1904, p. 172). Certains avaient bien la pudeur de balbutier quelques regrets (MARTIN DU G., Thib., Été 14, 1936, p. 561).
Loc. Avoir/n'avoir pas la pudeur à l'endroit/vis-à-vis de qqc. En raison de la minime somme engagée par eux au début de l'entreprise, [ils] ne touchaient que très peu (...). C'est ce que la comtesse ignorait, Arnica ayant, de même qu'Amédée, grande pudeur à l'endroit du porte-monnaie (GIDE, Caves, 1914, p. 764).
c) [Avec un compl. indiquant l'origine de la pudeur] Il s'arrête au seuil [de la mosquée] M. Fromentin a de ces pudeurs d'éducation et de nature (SAINTE-BEUVE, Nouv. lundis, t. 7, 1864, p. 116). Elle ne faisait aucune allusion à la possibilité de rencontrer Christophe. Par pudeur de souvenir et par fierté, elle ne pouvait se résoudre à le revoir (ROLLAND, J.-Chr., Nouv. journée, 1912, p. 1504). Grandeur d'âme. Le mot tombe, lentement, sur nos pudeurs de sentiment (L. FEBVRE, Blondel, [1940] ds Combats, 1953, p. 375).
d) [Subst. exprimant ce par quoi se manifeste la pudeur + de pudeur] Instinct, sentiment de pudeur. Des larmes de pudeur, qui roulèrent entre les beaux cils de Mme Hulot, arrêtèrent net le garde national (BALZAC, Cous. Bette, 1846, p. 11). Mme Leuillet fit un petit « oh! » de pudeur et se cacha encore plus étroitement dans la poitrine de son mari (MAUPASS., Contes et nouv., t. 1, Vengeur, 1883, p. 913):
3. ... il s'aperçut alors que la main de Praileau tremblait assez fort, et par un mouvement de pudeur instinctive, il recula comme s'il eût vu quelque chose qu'il ne devait pas voir.
GREEN, Moïra, 1950, p. 27.
2. Gén. au plur. Marque(s), expression(s) de pudeur. Entre inconnus qui s'abordent, la politesse se libère aisément des pudeurs inutiles (ESTAUNIÉ, Ascension M. Baslèvre, 1919, p. 104). L'indifférence du moment présent à l'égard des pudeurs et réticences du dernier siècle reçoit aussi, dans ce livre, l'une de ses illustrations les plus complètes (Arts et litt., 1936, p. 42-3):
4. Tout s'avouait ensemble, tout ruisselait: les aveux confus brisés de pudeurs, les incises, les retours sur soi-même, les arrêts subits, suivis d'analyses pour expliquer son cas.
MALÈGUE, Augustin, t. 2, 1933, p. 459.
Prononc. et Orth.:[]. Att. ds Ac. dep. 1694. Étymol. et Hist. 1. 1542 « appréhension de ce qui peut porter atteinte à la dignité personnelle, au respect de soi-même » (P. DE CHANGY, Instit. de la femme chrest., p. 213 ds GDF. Compl.); 2. a) 1580 « appréhension, gêne devant les réalités sexuelles » (MONTAIGNE, Essais, II, 15, éd. P. Villey et V. L. Saulnier, p. 615); b) 1635 spéc. « vertu d'une femme chaste » (CORNEILLE, Médée, I, 4); c) 1690 « la décence telle qu'elle est définie par les convenances ou les règles d'une société donnée » (FUR.: le Magistrat doit empêcher ce qui est contre la pudeur et l'honnesteté publique); 3. a) 1606 « sentiment d'honneur » (GUILLAUME DU VAIR, Suassion de l'arrest pour... la loi salique, 513 ds Actions... oratoires, éd. R. Radouant, p. 126: tous ceux qui se disent encores François et qui ont quelque reste de pudeur); b) 1673 « retenue qui empêche de manifester ses sentiments, ses idées » (BOILEAU, Epîtres, III, 5 ds Œuvres, éd. F. Escal, p. 110: Si toûjours dans leur ame [des Protestants] une pudeur rebelle, Prests d'embrasser l'Eglise, au Presche les rappelle); 4. a) 1607 « sentiment de honte, de confusion devant ce qui peut choquer, blesser la délicatesse » (E. PASQUIER, Recherches de la France, Paris, Laurent Sonnius, p. 651... (chose pleine de honte et de pudeur) Ogine veusve de Charles, convola en secondes nopces avecq Aldebert); b) 1668, 27 déc. « modestie; peur des louanges excessives » (CHAPELAIN, A. M. DE GRONOVIUS ds Lettres, éd. Ph. Tamizey de Larroque, t. 1, p. 610b). Empr. au lat. pudor, pudoris « sentiment de réserve, de retenue, de honte, de délicatesse; honneur; honte, déshonneur, opprobre ». Fréq. abs. littér.:1 907. Fréq. rel. littér.:XIXe s.: a) 2 895, b) 2 849; XXe s.: a) 2 912, b) 2 361.

pudeur [pydœʀ] n. f.
ÉTYM. 1542; lat. pudor.
1 (1580). Sentiment de honte, de gêne qu'une personne éprouve à faire, à envisager ou à être témoin des choses de nature sexuelle; disposition permanente à éprouver un tel sentiment. Décence, honnêteté (cit. 12), honte, modestie, pudicité. || La pudeur selon les psychologues et les moralistes (→ Changer, cit. 35.3; endroit, cit. 11; mystérieux, cit. 2). || La pudeur des femmes (→ Convention, cit. 8; naturel, cit. 28). || Pudeur virginale, angélique (cit. 2), innocente (→ Arme, cit. 34), naïve (→ Mêler, cit. 16). || Avoir de la pudeur (→ Condition, cit. 3; libertin, cit. 9). || Oublier, secouer toute pudeur (→ Enivrer, cit. 25; faiblesse, cit. 45). || Les devoirs que la pudeur exige (→ Abandonner, cit. 21). || Pudeur affectée Pudibonderie. || Fausse pudeur (→ Écarter, cit. 13). || Rougir de pudeur, par pudeur. || Chose qui blesse, offense, alarme la pudeur (→ Honnête, cit. 11). || Pudeur outragée, offensée.
(1810). Dr. || Attentat (cit. 7 et 8) à la pudeur; outrage public à la pudeur (puni par la loi). Par ext. || Geste, langage plein de pudeur (→ Attirer, cit. 29). || La pudeur des mots (→ Adoucir, cit. 11).
1 Toujours notre pudeur combat dans ces moments
Ce qu'on peut nous donner de tendres sentiments.
Quelque raison qu'on trouve à l'amour qui nous dompte,
On trouve à l'avouer toujours un peu de honte (…)
Molière, Tartuffe, IV, 5.
2 Cette noble pudeur colorait son visage.
Racine, Phèdre, II, 5.
3 Aussitôt que la femme devint la propriété de l'homme, et que la jouissance furtive d'une fille fut regardée comme un vol, on vit naître les termes pudeur, retenue, bienséance.
Diderot, Suppl. au voyage de Bougainville, IV.
4 La pudeur n'est rien; elle n'est qu'une invention des lois sociales pour mettre à couvert les droits des pères et des époux, et maintenir quelque ordre dans les familles.
Rousseau, Lettre à d'Alembert.
5 La pudeur des femmes n'est que leur politique. Tout ce qu'elles cachent ou déguisent, n'est caché ou déguisé que pour en augmenter le prix, quand elles le donnent.
Restif de La Bretonne, cité par Ricard, l'Amour, les Femmes et le Mariage, Pudeur.
6 La pudeur est on ne sait quelle peur attachée à notre sensibilité, qui fait que l'âme, comme la fleur qui est son image, se replie et se recèle en elle-même, tant qu'elle est délicate et tendre, à la moindre apparence de ce qui pourrait la blesser par des impressions trop vives ou des clartés prématurées.
Joseph Joubert, Pensées, VI.
7 D'où venez-vous, Pudeur, noble crainte, ô Mystère,
Qu'au temps de son enfance a vu naître la terre,
Fleur de ses premiers jours qui germez parmi nous,
Rose du Paradis ! Pudeur, d'où venez-vous ?
A. de Vigny, Livre mystique, « Éloa… », III.
8 (…) partout et de tout temps, les actes érotiques furent accomplis secrètement, afin de ne pas causer dans le public des émotions violentes et contraires (…) Ainsi naquit la Pudeur, qui règne sur tous les hommes, et particulièrement chez les peuples lascifs.
France, le Mannequin d'osier, in Œ., t. XI, VI, p. 301.
(1843). (Une, des pudeurs). Réaction inspirée par ce sentiment (→ Après, cit. 5; comprimer, cit. 6; interposer, cit. 2). || C'est à l'homme de savoir endormir (cit. 11) les pudeurs qu'il rencontre. || Fausses ou véritables pudeurs (→ Gêner, cit. 16).
9 Des pudeurs lui venaient. Elle était toute rouge. Personne ne pouvait la voir, pourtant; la chambre s'emplissait de nuit derrière eux, tandis que la campagne déroulait le silence et l'immobilité de sa solitude. Jamais elle n'avait eu une pareille honte.
Zola, Nana, VI.
2 (1614). Gêne qu'éprouve une personne devant ce que sa dignité semble lui interdire. Délicatesse, discrétion (cit. 9 et 10), réserve, respect, retenue. || Cacher ses sentiments, sa bonté par pudeur (→ Apitoiement, cit. 1). || Pudeur qui empêche un homme d'étaler (cit. 24) sa souffrance, qui souffre qu'on exprime (cit. 9) en public un sentiment. || « Petits hommes qui vous donnez sans pudeur de la hautesse (cit. 1) et de l'éminence » (La Bruyère). Impudemment. || Afficher sans pudeur sa vanité. || Il n'a aucune pudeur quand il s'agit de se mettre en valeur. || Sans pudeur ni contrainte. || Flatteurs qui louent (→ 1. Louer, cit. 3) sans pudeur. || Accueillir sans pudeur les plus grossiers compliments ( Confusion, gêne, embarras…). || De la pudeur, pas de larmes ! (→ Mélodrame, cit. 4). || Pudeur des sentiments (→ Dissimuler, cit. 8). || Cette pudeur hautaine (cit. 10) de l'émotion. || La pudeur qu'il y a dans l'humour (cit. 7) véritable. || La pudeur de…, suivi de l'inf. (→ Ami, cit. 3). || Vous pourriez avoir au moins la pudeur de vous taire.
10 (…) qu'est-ce qu'une charité qui n'a point de pudeur avec le misérable, et qui, avant que de le soulager, commence par écraser son amour-propre ?
Marivaux, la Vie de Marianne, I.
11 (…) j'ai besoin de vaincre à chaque instant cette pudeur d'honnête homme qui a horreur de parler de soi.
Stendhal, Souvenirs d'égotisme, 7.
Littér. Réaction inspirée par ce sentiment. || Son culte (cit. 10) pour sa mère avait ses délicatesses et ses pudeurs (→ aussi Étaler, cit. 25).
12 Bouvard, au premier moment, avait ressenti comme un heurt en pleine poitrine. Puis une pudeur l'empêcha de faire un seul geste; des réflexions douloureuses l'assaillaient.
Flaubert, Bouvard et Pécuchet, X.
CONTR. Impudeur, indécence, malhonnêteté. — Cynisme.
DÉR. Pudibond, pudique.
COMP. Impudeur.

Encyclopédie Universelle. 2012.