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CLOWN
CLOWN

On se perd en conjectures sur la date et le lieu de naissance du clown , mot anglais qui signifie paysan, rustre, vilain. On lui donne, selon les pays, des ancêtres différents. Et, à défaut d’établir une filiation continue, on n’a que l’embarras du choix. Certains le font remonter aux bouffons et aux mimes de l’Antiquité; ceux-là, aux fous des cérémonies médiévales; ceux-ci, aux baladins du théâtre. Les derniers, plus prudents, se contentent de ressemblances, sans parler de paternité, avec les types de la commedia dell’arte. Comme tous les comiques populaires disparus avant sa naissance, le clown a trouvé en lui-même sa raison d’être, s’est inventé une technique qu’il a perfectionnée, et qui n’est ni l’appropriation de moyens tombés en déshérence, ni l’imitation d’anciennes traditions.

Naissance de l’art clownesque

Les origines de M. Claune

Chaque peuple crée un personnage caricatural à son image dans lequel il synthétise ses goûts et se moque de ses travers. Aussi, les Allemands rattachent le clown à Hanswurst et au loustic , les Hollandais à Pickled-Herrings, les Anglais à Jack Pudding et au jester . Les Français qui ont connu Jean Potage songent à Jean Farine et à Pierrot à cause de leur face blanche, à Arlequin et à Polichinelle pour leur costume. Les Espagnols ont eu leur gracioso , les Italiens Pagliacio, leur paillasse, mais ceux-ci possèdent tant de types locaux introduits dans le théâtre populaire qu’ils considèrent le clown comme un article d’importation d’usage accidentel. Le clown n’a jamais fait d’étincelles dans la péninsule italienne. C’est hors de leur pays natal que les Grimaldi, les Chiarini, les Cavalini, les Fratellini, les Frediani acquirent leur célébrité.

Les Anglais voient un des prédécesseurs du clown dans Merry Andrew, un valet qui n’est souvent que le serviteur mal vêtu de Pantalon et que Jimmy Warner, célèbre comique, imite en lui empruntant sa collerette et son pourpoint trop long. Ce valet de comédie dépasse bientôt son maître et occupe un rôle de premier plan dans les intermèdes insérés dans les pantomimes-féeries de Noël très goûtées sur les scènes anglaises, rôle que lui ravissent dès leur arrivée les sauteurs et les danseurs de corde de l’arlequinade italienne venus du continent.

Le plus connu des clowns anglais, celui dont des centaines de commentaires entretiennent le souvenir, est Giuseppe Grimaldi, qui a fait son apprentissage de mime sur les foires parisiennes. Il débute à Londres après 1750. Il introduit dans son jeu et ses lazzis (jokes of construction ) un comique d’accessoires dont il connaît toutes les ressources pour les avoir pratiquées dans les pièces à machines du théâtre forain. Il imagine des combinaisons vestimentaires qu’il transforme à vue en matériel à surprises, qui entretient la curiosité et concourt à son succès.

On trouve le mot «clown» pour la première fois exprimé phonétiquement en France dans un petit livre daté de 1816 et consacré au cirque Franconi. Il y est question d’un certain M. Claune, comique équestre. C’est toutefois sous le qualificatif de «grotesques» ou de «paillasses» que sont désignés Philippe Laurent et les siens quand ils débutent au théâtre des Arts de Rouen, en 1820. Ils arrivent du Drury Lane de Londres, avec une pantomime mêlée de danses, Le Diable ermite ou L’Amour triomphant . Philippe Laurent descend de parents français installés en Angleterre à la fin du XVIIIe siècle; c’est un spécialiste de la technique des accessoires comme son père, ancien sauteur, et comme Grimaldi. Engagé au spectacle des Funambules, Philippe Laurent conserve le premier rôle d’Arlequin en titre jusqu’à ce que Deburau le supplante en habit de Pierrot. Passé au Cirque-Olympique, Laurent est, avec Anicet Bourgeois et Ferdinand Laloue, l’un des auteurs des Pilules du diable , pièce à machines qui, reprise plusieurs fois au cours du siècle, totalisera plus d’un millier de représentations. Gaertner, premier grotesque du cirque, et Mazurier, danseur acrobate de la Porte-Saint-Martin, qui jouent les polichinelles, sont des mimes, écuyers ou sauteurs, non des clowns.

Le rôle de Jean-Baptiste Auriol

C’est Auriol (1806-1881) qui assure au clown sa primauté parmi les comiques de la piste et l’acclimate en France après 1830. Il s’inspire pour son costume de la souquenille de Jean Gontard, un grotesque du Cirque-Olympique qui porte un habit conforme aux traditions du bouffon anglais: blouse bouffante, maillot serré aux mollets, béret écossais paré de plumes et garni de grelots. D’une famille de sauteurs et danseurs de corde, Auriol a suivi les Loisset – des écuyers – dans leurs pérégrinations occidentales. Il pratique toutes les disciplines des jeux forains, équilibres, sauts à terre, jonglage, dislocation. Il vole sur la corde et voltige à cheval. Il paraît, selon la coutume, avec ses camarades dans les charivaris acrobatiques et les facéties qui garnissent les temps morts entre deux numéros. Chacun tente de fixer l’attention des spectateurs par un détail curieux de son costume, par le style de son jeu qui l’individualise. S’il n’est pas le créateur de celui qu’on appelle depuis le «clown de reprise» et qui bavarde avec l’écuyère quand son cheval souffle, Auriol impose sa personnalité, incarne un comique nouveau qui se perpétue sous le nom d’«amuseur de tapis» et l’élève à un rôle appelé plus tard moins péjorativement l’«auguste de soirée».

Quelle que soit sa part d’action, il agrémente ses exercices d’un comique de gestes qu’il ponctue d’un cri aigu, le sien, en guise de marque d’origine, respectueux d’une pratique importée dans l’Amphithéâtre anglais d’équitation d’Astley par Billy Saunders, grotesque qui répète inlassablement: a , e , i , o , u (Avez-vous vu?).

La parole et les fausses notes

Le cirque, spectacle visuel, dispense de discours. Auriol n’a rien à exprimer, il soliloque et reprend haleine. Du reste, les autorités interdisent en piste, hormis les pantomimes équestres, tout dialogue qui puisse de près ou de loin rappeler le drame et la comédie dont seuls les grands théâtres ont l’exclusivité. Le clown n’est pas un personnage de comédie; c’est un costume. L’art clownesque n’est pas encore une spécialité.

La multiplication des cirques permet aux clowns britanniques, dont le déclin commence sur les théâtres de leur pays, de trouver du travail sur le continent. Le cirque français jouit alors d’une renommée mondiale, et c’est aux comiques d’Angleterre que Louis Dejean, directeur des Deux-Cirques à Paris, recourt pour amuser les spectateurs. Quels que soient pourtant les pays où il se produisent, les nouveaux venus jargonnent dans une langue qui leur est étrangère. Ils exagèrent un accent qui devient pour eux une source de plaisanteries orales, qu’ils mélangent au pataquès et à l’homophonie, résurgence du galimatias et de l’abracadabra des premiers acteurs italiens de la foire, lors de leurs démêlés avec les comédiens français jaloux de leurs privilèges. William Wheal, Thomas Kemp, James Boxwell, Whytoine, Franck, Candler, en plus de leurs acrobaties, bredouillent un comique de mots ou déclament des vers ou des tirades ridicules, avec un calme stupéfiant qui les fait prendre au sérieux et que ne comprennent ni les écuyères auxquelles ils s’adressent, ni les spectateurs les mieux avertis.

Baptisé clown shakespearien, ce type d’amuseur honoré dans les cirques anglo-saxons – comme W. F. Wallet en Angleterre et Dan Rice aux États-Unis –, lancé prématurément sur les pistes françaises par Boxwell, n’aura aucun succès sur le continent. Au Mexique, l’exemple du clown shakespearien favorisera la naissance d’un paillasse, d’un gracioso de type espagnol, aux attributions spéciales. Il annonce le programme sous la forme de sonnets ou de poésies descriptives de sa composition. José Soledad Aycardo, José-Maria Monroy, Eduardo Martinez, Valentin Gonzalez compteront parmi les meilleurs clowns-poètes du cirque mexicain, au milieu du siècle dernier. En Europe, il faudra attendre les chansonniers des cabarets montmartrois et la satire politique dont il font profession pour que des clowns s’essaient à d’inoffensives allusions d’un humour de circonstance. W. Durow, clown dresseur russe, jouira d’une réputation de «clown politique», pour ses plaisanteries à l’égard du régime tsariste. En Espagne, le chistoso , le clown faiseur de bons mots (chistes ), a toujours la faveur du public populaire.

Le privilège de la musique et de la danse étant réservé à l’Opéra, personne ne peut utiliser en piste les instruments de l’orchestre traditionnel. Pour jouer du violon, les clowns Price se juchent sur une échelle; Auriol joue de la trompette la tête en bas. C’est de l’acrobatie et non de la musique. Le clown anglais recourt à son esprit bricoleur, fabrique des accessoires sonores et percutants, tout un arsenal d’appareils hétéroclites dans la tradition du comique de matériel. C’est le point de départ d’une spécialité nouvelle, le «clown musical», qui s’empare de tous les objets qu’il a sous la main et les transforme en sources sonores. Les clochettes, les casseroles, les verres, les bouteilles, les marteaux, la pompe à bicyclette, les trompes d’autos disputeront leurs fausses notes aux grelottières, au xylophone, à l’ocarina et à la scie musicale. Les Chantrell, les Forest, les Webbs, les Miowsky, les Plattier inventent la parodie musicale et, l’ayant épuisée sous toutes ses formes, la laissent aux excentriques du music-hall, au Suisse Grock, à l’Anglais Noni, à l’Allemand Nuck, et aux fantaisistes intrumentistes internationaux.

Auguste la victime triomphe

La disparition vers 1860 des spectacles de pantomime permet au cirque d’engager les derniers mimes, qui apportent au répertoire clownesque, fort pauvre encore, une somme de canevas et de traditions qui émaillaient et rendaient drôles les arlequinades acrobatiques. Les clowns s’en emparent et les accommodent à l’optique et à l’acoustique du cirque, dès que le décret instituant la liberté des théâtres, en 1865, supprime tous les privilèges et interdictions. Un fonds commun de trouvailles, de facéties, de situations d’inspirations diverses, éprouvées à l’usage, transmises oralement, s’enrichit d’année en année. Les scènes dialoguées ne sont plus prohibées en piste, ni la musique instrumentale, ni la danse, ni le chant. La farce devient entrée clownesque et l’«entrée», sketch à plusieurs personnages.

C’est alors qu’un nouveau type comique survient auquel on donne le nom d’Auguste dans le monde entier, mais celui de Tony en Italie. Il apparaît d’abord comme un personnage subalterne surgi sur des écuries du cirque ou du wagon-dortoir des employés toutes mains d’un chapiteau. Il se mêle à l’action clownesque, sans qu’on sache exactement ce qu’il vient y faire. Tom Belling, en Allemagne, Jimmy Guyon, en France, revendiquent sa paternité. Son costume misérable contraste avec l’habit pailleté du clown, car celui-ci, depuis qu’il joue la farce, dédaigne le maillot et la trousse d’acrobate et porte, désinvolte et crâne, une souquenille de parade. L’auguste, avec l’extravagance de son costume, avec les ridicules de sa silhouette et son goût pour le gigantisme ou le filiforme, bouleverse le rêve et la fantaisie. C’est la réalité qui entre en piste, le pauvre hère promis à toutes les plaisanteries, aux avanies, aux méchancetés de son orgueilleux partenaire. Il y invite d’ailleurs avec une conscience professionnelle, une soumission méritoire, et son rôle, qu’il prend au sérieux, lui assure bientôt une promotion extraordinaire dans l’échelle des amuseurs. Il est l’idiot du village, le niais de la noce, le vagabond qu’on pourchasse, le clochard dégingandé, le pochard des lendemains de fêtes, le tramp américain; il est un intrus, et, conformément à ses origines de palefrenier hirsute, inacceptable dans un milieu d’artistes. Toutes les entrées clownesques sont construites désormais en fonction de ce personnage, dupé, battu et toujours étonné de l’être. Tout le jeu s’organise autour de lui. Au comique de mots, de gestes, d’accessoires, l’entrée clownesque substitue le comique de situations et – sa dernière ressource – le comique de sentiments. À ce jeu-là, les clowns anglais doivent quitter la place. Les clowns latins, les Italiens d’une vivacité imbattable dans l’entrée acrobatique, les Espagnols interprètes des vieilles farces castillanes qu’ils ont découvertes dans les intermeses , les Français descendants des mimes du boulevard du Temple chassent définitivement au début du siècle le clown anglais des pistes parisiennes. Geo-Foottit, le clown du Nouveau-Cirque, et ses enfants, Busby, clown de reprise chez Medrano, seront les derniers représentants du clown de tradition anglaise, avant la Première Guerre mondiale. Le comique d’accessoires reparaît comme une branche d’activité clownesque purement matérielle et visuelle avec les Rastelli et les Folcos.

La pantomime acrobatique, que servaient encore à la fin du XIXe siècle les Hanlon-Lees et Agoust dans leur répertoire personnel et dans des pièces écrites pour eux par les auteurs dramatiques, n’est plus qu’un souvenir. Les clowns musicaux et leurs instruments fantaisistes disparaissent à leur tour. On ne les retrouve, de-ci de-là, que dans quelques vieilles équipes clownesques: les Fratellini avec le flexatone et le jazzo-flûte, les Dario avec les sifflets harmoniques et les pavés sonores.

Après la Première Guerre mondiale, le clown pailleté dispute au régisseur de piste son rôle de meneur de jeu. Il se drape dans une superbe et fragile dignité à la mesure de son autorité grandissante dans le couple, puis dans le trio clownesque. Antonet (Umberto Guillaume) met à contribution la mode féminine pour se parer de fourrures et de plumes d’autruche. Rico Briatore, François Fratellini, Dario Meschi savent encore sauter, mais s’habillent de plus en plus somptueusement. Dès lors, le clown meneur de jeu faire-valoir, dit bientôt «autoritaire» par opposition à l’ancien clown, comique et bon enfant, dit «débonnaire», craint les actions tourmentées où il sème les paillettes de son costume et la sueur qui dilue les fards et le défigure. L’auguste subit ses contraintes, reçoit ses coups de batte, ses gifles, les tartes à la crème et les œufs écrasés. Il accepte son rôle d’amuseur servile, puis se lasse des humeurs de son beau partenaire qui l’envoie dans la sciure, le barbouille d’une mousse savonneuse ou l’inonde à l’occasion, thèmes à variations nombreuses, facéties aqueuses et submergeantes qui restent les ressources du comique anglo-saxon. Le «clown blanc» descend d’année en année les échelons des valeurs comiques où il avait accédé après un siècle de tâtonnements et d’expériences. Les augustes sont disposés à se priver de son concours chaque fois qu’ils le peuvent. Et si le clown, descendu aujourd’hui de son piédestal, reste le symbole du cirque et de sa poésie, c’est vers l’auguste, éternelle victime des occasions perdues, que convergent les rires et les applaudissements.

clown [ klun ] n. m.
• 1823; mot angl. « rustre, farceur »
1 Vx Personnage grotesque de la farce anglaise. bouffon.
2Mod. Comique de cirque qui, très maquillé et grotesquement accoutré, fait des pantomimes et des scènes de farce. 2. paillasse, pitre; 2. auguste. « comme le clown qui du milieu de la piste envoie des serpentins à un cercle d'écuyères » (Romains).
Clown blanc : personnage à la face blanche, à la coiffure tronconique, aux habits pailletés. Le clown blanc et l'auguste.
3Fig. Farceur, pitre. gugusse, guignol. Quel clown ! Elle fait le clown.

clown nom masculin (anglais clown) Artiste comique, maquillé et grotesquement accoutré, qui, dans les cirques, exécute des pantomimes bouffonnes et parfois acrobatiques. Personne qui cherche à se faire remarquer par sa drôlerie, ses pitreries. ● clown (citations) nom masculin (anglais clown) Théodore de Banville Moulins 1823-Paris 1891 Enfin, de son vil échafaud, Le clown sauta si haut, si haut, Qu'il creva le plafond de toiles Au son du cor et du tambour, Et, le cœur dévoré d'amour, Alla rouler dans les étoiles. Odes funambulesques Isaac Félix, dit André Suarès Marseille 1868-Saint-Maur-des-Fossés 1948 L'art du clown va bien au-delà de ce qu'on pense. Il n'est ni tragique ni comique. Il est le miroir comique de la tragédie et le miroir tragique de la comédie. Remarques Gallimardclown (expressions) nom masculin (anglais clown) Clown blanc, personnage comique à la face blanche, au chapeau pointu et au costume pailleté. ● clown (synonymes) nom masculin (anglais clown) Artiste comique, maquillé et grotesquement accoutré, qui, dans les cirques...
Synonymes :
- auguste
- bouffon
- gugusse (familier)
- paillasse
Personne qui cherche à se faire remarquer par sa drôlerie...
Synonymes :
- guignol
- pitre
- singe (familier)
- zouave (populaire)

clown
n. m.
d1./d Acteur bouffon de cirque. Le clown blanc. Numéro de clowns.
d2./d Fig. Faire le clown, le pitre.

⇒CLOWN, subst. masc.
A.— Vx. Paysan, bouffon du théâtre anglais. Le bouffon anglais n'a rien du valet de comédie (...) Le seul personnage avec lequel on puisse le confondre est son compatriote, le clown qui lui survit encore aujourd'hui (THIBAUDET, Réflexions sur la littér., 1936, p. 90).
B.— Usuel. Artiste de cirque au costume et au maquillage extravagants qui emploie ses talents à faire rire les spectateurs au moyen de pitreries diverses, fondées principalement sur la parodie et la dérision. Synon. auguste, paillasse, pitre :
1. Il est l'homme qui, dans un cirque, aux acclamations de la foule, soulève des haltères, ou, plutôt, il est le clown qui, après que les hercules ont terminé leurs passes, les parodie en jonglant, lui aussi, avec des haltères, mais qui sont en carton et creux.
HUYSMANS, L'Art. mod., 1883, p. 159.
SYNT. Clown nain; clown musicien (ou musical); clown dresseur, parleur, sauteur; costume (ou maillot) de clown; numéro de clown; maquillage (ou grimage) de clown; perruque de clown; agilité, légèreté, talent de clown.
Spéc. Clown blanc. Artiste au costume richement brodé et recouvert de paillettes, au visage plâtré, au bonnet conique, ayant pour rôle de provoquer ou de mettre en relief le ridicule de son partenaire (cf. Hist. des spectacles, 1965, p. 1539).
C.— Au fig.
1. Personne qui prête à rire ou qui amuse les autres par son apparence physique ou son comportement. Quel clown! faire le clown; ressembler à un clown; avoir l'air, l'allure d'un clown. Bille de clown (arg.) :
2. Ah! Certes, il était drôle, le père Pavilly, avec ses grandes jambes d'araignée et son petit corps, et ses longs bras, et sa tête en pointe surmontée d'une flamme de cheveux rouges sur le sommet du crâne. C'était un clown, un clown paysan, naturel, né pour faire des farces, pour faire rire, pour jouer des rôles, des rôles simples puisqu'il était fils de paysan, paysan lui-même, sachant à peine lire.
MAUPASSANT, Contes et nouvelles, t. 1, Les 25 francs de la Supérieure, 1888, p. 251.
[Empl. comme compl. déterminatif] De clown. Qui est destiné à faire rire :
3. ... ils [les enfants anglais] vivent avec Alice au pays des merveilles et Peter Pan. Nulle part, une telle prodigalité de fantaisie n'est mise à la disposition du premier âge. De mon temps, nous n'avions pas cette littérature de clown...
BARRÈS, Mes cahiers, t. 13, 1921-22, p. 181.
Emploi adj. Un peu clown. Un peu ridicule. [Lui] dégingandé, un peu clown, blagueur qui voulait nous accompagner jusqu'à Carnot (GIDE, Voyage au Congo, 1927, p. 771).
Littér. [Le clown, symbole de tristesse dissimulée sous le rire] Clown malheureux, sombre, triste; pauvre clown. Des clowns succédèrent, enfarinés, presque tragiques de sérieux même dans leurs pantomimes folles (P. BOURGET, Études et portraits, Études anglaises, 1888, p. 331). Il en fait (Fernand René du rôle de Goffard dans la dame aux gants verts) une sorte de très curieux clown douloureux et déshonoré (COLETTE, La Jumelle noire, 1938, p. 100) :
4. Un rire triste comme un clown en habit noir.
RENARD, Journal, 1890, p. 65.
Rem. Dans cet ex., il est fait allusion au clown en habit noir, spécialité angl. (cf. Lar. 19e Suppl. 1878).
2. Péj. Personne qui ne peut être prise au sérieux à cause de son attitude irréfléchie, de son incompétence ou de son inconsistance dissimulée sous une fausse assurance. Prendre pour un clown, traiter de clown. Synon. fantoche, guignol, marionnette, pantin. — J'attends la défaite française, me dit Savine avec tranquillité. Que voulez-vous faire avec des clowns pareils à la tête d'un pays? (ABELLIO, Heureux les pacifiques, 1946, p. 298) :
5. ... c'est ce que le Parti Radical commence à comprendre; mais si habiles que soient ses clowns, il aura de la peine à en trouver qui sachent éblouir les gros banquiers juifs aussi bien que le font Jaurès et ses amis.
SOREL, Réflexions sur la violence, 1908, p. 79.
Rem. 1. On rencontre ds la docum. 2 ex. chez Huysmans du fém. clownesse au sens fig. à valeur péj., dont l'un est répertorié ds GUÉRIN 1892; ROB. Suppl. 1970 (avec la mention ,,rare et litt.`` et un ex. de P. Guth) et Lar. Lang. fr. (avec la mention ,,peu usité`` et un ex. d'un des Goncourt) enregistrent le sens de femme clown qui est l'expr. la plus cour. 2. On rencontre ds la docum. le subst. clownisme, méd. [P. réf. aux gesticulations d'un clown] Suite de mouvements incohérents et d'apparence ridicules exécutés par un malade au cours d'une crise d'hystérie (cf. Méd. Biol. t. 1 1970); attesté aussi ds GUÉRIN 1892 qui attribue le mot à Charcot) et l'adj. corresp. clownique. Qui caractérise les mouvements d'un malade atteint de clownisme. Charcot détermine très bien les phases de l'accès [d'hystérie], note les attitudes illogiques et passionnelles, les mouvements clowniques; il découvre les zones hystérogènes (HUYSMANS, Là-bas, t. 1, 1891, p. 234).
Prononc. et Orth. :[klun]. Pour la francisation de ce mot cf. KAMM. 1964, p. 73 et aussi MART. Comment prononce 1913, p. 343 : ,,Nous réduisons facilement ow à ou dans clown, teagown, cowpox ou browning``. Cependant les gens du cirque eux-mêmes défendent la prononc. [klo:n]. Admis ds Ac. 1932. Étymol. et Hist. 1823 (A.-D. D'ARCIEU, Diorama de Londres, p. 158 ds Fr. mod., t. 17, p. 287 : le Pierrot, que les Anglais appellent clown); 1884 fém. clownesse (HUYSMANS, À rebours, p. 138). Angl. clown, attesté dep. la 2e moitié du XVIe s. sous les formes cloyne, cloine, puis clown au sens de « homme rustre, paysan » d'où « bouffon, fou » et plus spéc. à partir du XVIIIe s. « pantomime, personnage des arlequinades et du cirque » (NED), peut-être d'orig. b. all. (NED; KLEIN Etymol.). Fréq. abs. littér. :172. Bbg. BAUDEZ (J.). Le Cirque et son lang. Vie Lang. 1962, p. 241. — WEIL (A.). En Marge d'un nouv. dict. R. Philol. fr. 1932, t. 45, p. 14.

clown [klun] n. m.
ÉTYM. 1823; claune, 1817; angl. clown « rustre, farceur ».
1 Vx (ou hist.). Personnage grotesque de la farce anglaise. Bouffon. || Le rôle des clowns chez Shakespeare.
2 Mod. Comique de cirque qui, très maquillé (jusqu'à être méconnaissable) et habillé de manière grotesque, fait des pantomimes et des scènes de farce. Bouffon (cit. 2), paillasse, pitre. || Le personnage appelé couramment clown est en termes techniques de cirque un auguste. || Cabrioles, contorsions, grimaces de clown. || Lazzis, facéties, farces, tours d'un numéro de clown. || Types de clowns : clowns blancs, augustes et excentriques. || Un clown triste. || Clowns musiciens. || Le maquillage, le grimage du clown.
1 La maréchale entraîna Frédéric, Hussonnet faisait la roue, la Débardeuse se disloquait comme un clown, le Pierrot avait des façons d'orang-outang (…)
Flaubert, l'Éducation sentimentale, II, I.
2 Elle se donnait ainsi des airs de maîtresse de maison animée, presque pétulante; comme le clown qui du milieu de la piste envoie des serpentins à un cercle d'écuyères.
J. Romains, les Hommes de bonne volonté, II, XIV, p. 185.
Spécialt (techn. : cirque). || Clown blanc, et, absolt, clown (opposé à l'auguste et aux autres pitres) : personnage à la face blanche, à la coiffure tronconique, aux habits pailletés. || Des clowns et des augustes.REM. Graphie plais. cloune :
3 Je le rejoignis quinze jours plus tard et m'y fis engager comme cloune.
R. Queneau, Loin de Rueil, p. 71.
tableau Noms de métiers.
3 (1858). Personne dont les gestes ou les paroles ressemblent au comportement d'un clown. Farceur. || Quel clown ! Pitre. || Faire le clown. Charlot, guignol.Personne qu'on ne peut prendre au sérieux, à cause de son incompétence ou de son inconsistance. Fantoche, marionnette, pantin. || Prendre qqn pour un clown.
Adj. || Être un peu clown, un peu ridicule.
4 L'un (un porteur) en particulier, une sorte de grand diable, l'air d'un Mohican (…) dégingandé, un peu clown, blagueur.
Gide, Voyage au Congo, in Souvenirs, Pl., p. 771.
DÉR. Clownerie, clownesque, clownesse.

Encyclopédie Universelle. 2012.