trottoir [ trɔtwar ] n. m.
• 1577; de trotter
1 ♦ Vx Piste où l'on fait trotter les chevaux.
2 ♦ (XVIIe) Anciennt Chemin élevé le long des quais et des ponts. ⇒ allée. « Les trottoirs garnis d'arbres, qui courent le long du Rhône » (Stendhal).
3 ♦ (1835) Mod. Chemin surélevé réservé à la circulation des piétons (sur les côtés d'une rue). ⇒ accotement, banquette. Se promener sur les trottoirs. « l'absence complète de trottoir étonnait; la chaussée [...] arrivait au ras des maisons » (Robbe-Grillet). Fam. Radio-trottoir.
♢ Loc. (1852) Faire le trottoir : se prostituer, racoler les passants.
4 ♦ (1900) Trottoir roulant : plateforme qui roule sur des rails ou des galets, et sert à transporter des personnes ou des marchandises. Je monterai « au troisième étage, je prendrai le trottoir roulant » (Léautaud). Trottoir roulant accéléré d'une station de métro.
● trottoir nom masculin (de trotter) Partie latérale d'une rue, surélevée par rapport à la chaussée et réservée à la circulation des piétons. ● trottoir (expressions) nom masculin (de trotter) Populaire. Faire le trottoir, se livrer à la prostitution dans la rue.
trottoir
n. m.
d1./d Chemin surélevé de chaque côté d'une rue, d'une voie de passage, aménagé pour la circulation et la sécurité des piétons.
|| Loc. Fam. Faire le trottoir: se prostituer.
d2./d Trottoir roulant: tapis roulant pour les piétons.
⇒TROTTOIR, subst. masc.
A. — 1. Passage surélevé établi pour la circulation des piétons d'un (ou des deux) côté(s) d'une rue, d'un pont, d'un quai, comprenant une bordure et une banquette dallée, bitumée ou asphaltée, et dont la hauteur et la largeur sont habituellement réglementées. Par les rues bitumées et sur les dalles des trottoirs, coulait incessamment le fleuve des hommes sous la lumière blanche des appareils électriques (BLOY, Journal, 1899, p. 307). En 1787, Paris n'avait pas de trottoir pavé pour les piétons, si bien qu'à la moindre averse toute marche dans la rue devenait infiniment désagréable aux hommes et impossible pour une femme élégante (LOWIE, Anthropol. cult., trad. par E. Métraux, 1936, p. 124).
SYNT. Étroit, grand, large, petit trottoir; trottoir boueux, dallé, désert, humide, luisant, ombragé, pavé; trottoir opposé; au coin, au ras, le long du trottoir; contre le trottoir; d'un trottoir à l'autre; trottoir de gauche, de droite, d'en face; trottoir d'une avenue, d'une place, d'un pont, d'un quai, d'une rue; trottoirs de Paris; trottoir d'asphalte, de brique, de pierre, de planches; angle, bord, bordure du trottoir; route, rue bordée de trottoirs, sans trottoirs; attendre, marcher, monter, rester sur le trottoir; arpenter, balayer, encombrer, suivre le trottoir; changer de trottoir.
— Locutions
♦ Battre le trottoir. Arpenter le trottoir dans l'attente de quelque chose ou de quelqu'un. À l'instant même, elle arrivait peut-être dans la rue. Il s'y jeta. Personne! Et il se remit à battre le trottoir (FLAUB., Éduc. sent., t. 2, 1869, p. 98).
♦ Marchand du trottoir. Synon. de camelot. On entendait des cris d'enfants (...) et la voix de quelque petit marchand du trottoir traînant sa charrette à moitié vide (A. DAUDET, Fromont jeune, 1874, p. 171).
♦ Trottoir roulant. Synon. vieilli de tapis roulant. De huit heures du matin à onze heures du soir (...) le trottoir - le trottoir roulant! - se mit à charrier devant mes fenêtres des flots de multitude entassée: hommes, femmes, bonnes d'enfants et soldats (COURTELINE, Article 330, 1900, p. 271). P. métaph. Il n'est pas possible à quiconque est un jour monté sur ce grand Trottoir roulant que sont les pages de Flaubert, au défilement continu, monotone, morne, indéfini, de méconnaître qu'elles sont sans précédent dans la littérature (PROUST, Chron., 1922, p. 194).
2. P. anal.
a) Bord d'un objet évoquant l'aspect d'un trottoir. Ses forts souliers dont la semelle débordait et formait trottoir (ARÈNE, Veine argile, 1896, p. 190). Les enfants mordaient dans leurs tartines à trottoirs: sans beurre sur les bords (HAMP, Champagne, 1909, p. 85).
b) GÉOL. Banquette d'érosion faisant saillie au pied d'une falaise. (Ds Géomorphol. 1979, GEORGE 1984). Devant vous, formant avec lui un angle parfait de 90 degrés, un large trottoir d'un mètre, en beau granit compact, monte tout droit (La Montagne, janv.-févr. 1951, p. 18 ds QUEM. DDL t. 27).
B. — [Le trottoir considéré comme symb.]
1. [Symb. de pauvreté, de misère, de déchéance sociale ou morale, fonctionne comme un substitut de rue ou de pavé] Elle, enfant des trottoirs de Paris (...), hardie (...) comme ces filles du peuple qui montent aux barricades par simple crânerie (MAUPASS., Contes et nouv., t. 2, Champ d'oliv., 1890, p. 77). Ils virent (...) ce Paris féminin et pervers, où le trottoir est aux filles et aux rois sans royaume, où toutes les déchéances coudoient toutes les fortunes (ESTAUNIÉ, Empreinte, 1896, p. 130).
— Loc. Jeter au trottoir. Jeter à la rue. Et maintenant voilà qu'il la jetait au trottoir, qu'il ne voulait même pas lui donner la clef (ZOLA, Travail, t. 1, 1901, p. 39).
2. [Symb. de trivialités, d'usages vulg.] Toutes deux commencèrent à s'injurier en dévotes espagnoles, mêlant le démon et l'enfer à des invectives de trottoir (A. DAUDET, Sapho, 1884, p. 171):
• Tel poète obscur, tel peintre qui veut réussir à Bucarest ou à Séville, doit nécessairement, dans l'état actuel du Vieux Continent, avoir fait un peu de service militaire à la Rotonde ou à la Coupole, deux académies de trottoir où s'enseigne la vie de Bohème, le mépris du bourgeois, l'humour et la soulographie.
FARGUE, Piéton Paris, 1939, p. 149.
— En partic. [Symb. des affaires louches, des magouilles] C'était l'amour triomphant, ce Saccard, ce bandit du trottoir financier (ZOLA, Argent, 1891, p. 245). Derrière lui [Malandrin] comme son ombre, son rusé compère Falempin l'homme de main prêt à tout, un matamore du trottoir, parlant un argot savoureux, et spécialisé dans les plus louches besognes (MARTIN DU G., Souv. autobriogr., 1955, p. LXXVIII).
— Arg. de théâtre. [Fonctionne dans certains cas comme substitut de boulevard]
♦ Grand trottoir. Répertoire classique. J'ai rempli quarante ans, sans qu'on y trouvât à dire, tous les rôles du grand trottoir, à Périgueux, Cahors, Briançon, Quimper, Vire (La Correctionnelle, [18]40 ds LARCHEY, Dict. hist. arg., 2e Suppl., 1883, p. 158).
♦ Petit trottoir. Répertoire courant, comédies et vaudevilles. (Ds DELVAU 1867, FRANCE 1907).
3. [Symb. de la prostitution] Elle regrettait cette vie galante et bohème du trottoir parisien, faite de privations et de caresses payées (MAUPASS., Contes et nouv., t. 1, Ça ira, 1885, p. 1290). Nous devons à Ibsen deux formules (...): « vivre sa vie » et « en beauté ». La première menait les femmes faibles au trottoir ou chez la proxénète. La seconde légitimait toutes les loufoqueries (L. DAUDET, Entre-deux-guerres, 1915, p. 191).
— Loc. et expr.
♦ Fille, femme du trottoir. Racoleuse, prostituée. Il venait justement de me raconter ses dégoûts à propos d'une fille du trottoir, chez laquelle il était monté et qui avait ôté une moitié de ses cheveux et de ses dents (GONCOURT, Journal, 1889, p. 1014). Des femmes du trottoir, boudinées et les cheveux beurrés, l'œil peint (ARAGON, Beaux quart., 1936, p. 353).
♦ Racolage, raccrochage de trottoir. Prostitution. Guys n'a vraiment qu'une valeur, c'est d'être le peintre de la basse putain dans le raccrochage du trottoir (GONCOURT, Journal, 1895, p. 778).
♦ Faire le trottoir. Racoler sur la voie publique. Synon. faire le tapin , faire (de) la retape. Une fille qui fait le trottoir est une pauvre femme, mais n'oublions pas que c'est aussi une grue (RENARD, Journal, 1901, p. 702). C'était une brave petite prostituée, et elle n'a jamais essayé de monter en grade. Elle a vécu trente ans en carte, à faire le trottoir entre la Madeleine et la rue Drouot (MARTIN DU G., Thib., Pénitenc., 1922, p. 839). Var. Être sur le trottoir. — Eh bien, monsieur, dit Hulot (...) cette femme, c'est le libertinage en coupes réglées, je suis certain maintenant qu'elle a trois amants! — (...) Ah! elles ne sont pas toutes sur le trottoir (BALZAC, Cous. Bette, 1846, p. 268).
♦ Jeter, mettre au trottoir. Obliger quelqu'un à se prostituer. L'année prochaine, un nègre de la place Pigalle l'enlèvera à sa cousine pour la jeter au trottoir (AYMÉ, Passe-mur., 1943, p. 118). On dirait qu'ils ont un mec, qui les met sur le trottoir, et les surveille, sans rien faire (GIRAUDOUX, Folle, 1944, I, p. 83).
Prononc. et Orth.:[]. Att. ds Ac. dep. 1694. Étymol. et Hist. 1. a) 1577 au fig. être sur le trottouer « être en vue, être sur le devant de la scène » (VIGENÈRE, trad. de N. Chalcondyle, Hist. de la decadence de l'empire grec d'apr. Le Grand dict. fr.-lat., Genève, J. Stoer, 1625); b) av. 1592 se jeter sur le trottoir « se mettre en évidence » (MONTAIGNE, Essais, II, 6, éd. P. Villey et V.-L. Saulnier, p. 378); c) 1660 « piste où les maquignons font trotter les chevaux » (DUEZ, Dict. ital. et fr., s.v. trottiera d'apr. ROB.); d) 1694 en parlant d'une fille être sur le trottoir « être en âge, en situation de se marier » (Ac.); e) arg. du théâtre 1840 le grand trottoir « le répertoire classique » (La Correctionnelle, loc. cit.); 1866 le petit trottoir « les drames et les vaudevilles » (d'apr. ESN.); 2. a) 1782 « espace surélevé réservé à la circulation des piétons, sur les côtés d'une rue » (MERCIER, Tabl. Paris, t. 1, p. 118); 1900 trottoir roulant (L'Illustration, 16 juin, p. 388b ds QUEM. DDL t. 10); b) 1852 faire le trottoir (H. MEDING, Paris médical, p. 127, ibid., t. 14); 1867 le trottoir « le monde de la prostitution » (DELVAU, p. 398). Dér. de trotter; suff. -oir. Au sens 2 a, les premiers ex. sûrs se trouvent chez MERCIER, loc. cit. Fréq. abs. littér.:1 984. Fréq. rel. littér.:XIXe s.: a) 274, b) 3 905; XXe s.: a) 4 021, b) 3 692. Bbg. QUEM. DDL t. 14, 27.
trottoir [tʀɔtwaʀ] n. m.
ÉTYM. 1577, Montaigne, être sur le trottoir; de trotter.
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1 Vx. Piste où l'on fait trotter les chevaux (Duez, Dict. ital.-franç., 1660, trottiera). — ☑ Fig. (seul emploi signalé par les dict. jusqu'au milieu du XVIIIe). Vx. Se jeter, se mettre sur le trottoir (Montaigne, Charron, etc.) : se mettre en piste, se produire. ☑ Être sur le trottoir : être en vue, être un sujet de conversation; (en parlant d'une fille), être bonne à marier.
2 (XVIIIe). Anciennt. « Chemin élevé, que l'on pratique quelquefois le long des quais et des ponts, pour la commodité des gens qui vont à pied. Les trottoirs du Pont Neuf » (Académie, 1762).
1 Les trottoirs garnis d'arbres, qui courent le long du Rhône, ont une lieue d'étendue.
Stendhal, Mémoires d'un touriste, t. I, p. 154.
3 (1660, Oudin; répandu au XIXe). Mod. Chemin surélevé réservé à la circulation des piétons, ménagé sur les côtés d'une rue, séparé de la chaussée (cit. 1) par une bordure ou une dépression de la chaussée (caniveau), recouvert d'un revêtement d'asphalte (cit. 2), de bitume (cit. 2), etc. ⇒ Accotement, banquette. || Dénivellation du trottoir devant une porte cochère. ⇒ Bateau. || Se promener, déambuler (cit. 2) sur les trottoirs (→ Errance, cit. 3; 2. quart, cit. 4). || Étalages, marchandises sur le trottoir (→ 1. Fruit, cit. 4; marché, cit. 9; mercier, cit. 2). || Balayer, lessiver (cit. 1) les trottoirs (→ Lavage, cit. 1). || Tables de café sur un trottoir. ⇒ Terrasse (cit. 5). — Par compar. || « La conversation (cit. 12) de Charles était plate comme un trottoir de rue ».
2 À la femme de Paris le génie de la démarche ! Aussi, la municipalité lui devait-elle l'asphalte des trottoirs.
Balzac, la Femme comme il faut, in Œ. diverses, t. III, p. 195.
2.1 Les temps du trottoir sont enfin arrivés; les rues de Paris finiront sans doute par en avoir toutes (…) Dans quelques rues, le trottoir n'apparaît encore que de distance en distance (…) on fait dix pas dessus, puis on se retrouve sur le pavé, puis on aperçoit encore un petit bout de trottoir, et ainsi de suite.
Ch. Paul de Kock, la Grande Ville, « Les trottoirs », t. I, p. 49.
2.2 (…) des perspectives de trottoirs brillants d'hiver et de lumière, des masses d'ombre profonde, des angles de rue, des encoignures de porte, et encore des ombres, un peuple d'ombres, toujours inconnues et toujours amies.
M. Aymé, Maison basse, p. 147.
3 Partout (sauf autour de la statue), l'absence complète de trottoir étonnait : la chaussée aux pavés anciens, pleine de creux et de bosses, arrivait au ras des maisons.
A. Robbe-Grillet, le Voyeur, p. 46.
♦ Trottoir où racolent les prostituées (→ Rafle, cit. 1). || Fille de trottoir, du trottoir : prostituée. ⇒ Péripatéticienne. || Il l'avait ramassée sur le trottoir (→ Resucée, cit. 2).
4 Dans la Haute-Rue à Cologne
Elle allait et venait le soir
Offerte à tous en tout mignonne
Puis buvait lasse des trottoirs
Très tard dans les brasseries borgnes.
Apollinaire, Alcools, « Marizibill ».
♦ ☑ Loc. (1852, in D. D. L.). Faire le trottoir : se prostituer. Cf. argot. Faire l'asphalte, le bitume.
5 (…) Paul entra dans une violente fureur, gesticulant, criant qu'il ne tenait pas à devenir le frère d'une grue, et qu'il aimerait mieux qu'elle fît le trottoir.
— Je t'y rencontrerais, riposta Élizabeth, je n'y tiens pas.
Cocteau, les Enfants terribles, p. 118.
4 (1900, l'Illustration, 16 juin). || Trottoir roulant : plate-forme qui roule sur des rails ou des galets, et sert à transporter des personnes ou des marchandises. || Trottoirs roulants d'une station de métro.
6 (…) J'avais à passer au Louvre. Je le dis à Gourmont. « Je vais aller avec vous, me dit-il. Je monterai parler à quelqu'un que je connais, au troisième étage, je prendrai le trottoir roulant ».
Paul Léautaud, Journal littéraire, t. I, p. 216.
Encyclopédie Universelle. 2012.