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bastringue

bastringue [ bastrɛ̃g ] n. m.
• 1800; 1799 « machine à imprimer les toiles »; 1794 « air de contredanse »; p.-ê. du néerl. bas drinken « boire beaucoup »
Fam.
1Bal de guinguette, dancing populaire. L'orchestre « jetait au loin sa musique de bastringue, maigre et sautillante » (Maupassant).
2Par ext. Orchestre tapageur. Piano bastringue : piano volontairement désaccordé (dans un bar, etc.).
Bruit violent et confus. tapage, vacarme. Arrêtez ce bastringue !
3Choses, affaires (qu'on peut emporter avec soi). attirail, bazar, fourbi. Emporter tout son bastringue.

bastringue nom masculin (origine obscure) Populaire Bal populaire. Musique, orchestre bruyants. Désordre bruyant, tapage. En Suisse, fête ou manifestation de grande ampleur. Ensemble d'objets qu'on emporte ; attirail. Outillage Outil à forer de petits trous. Sylviculture Sorte de grand pied à coulisse en bois qui sert à mesurer le diamètre des arbres. ● bastringue (expressions) nom masculin (origine obscure) Populaire Et tout le bastringue, et tout le reste. ● bastringue (synonymes) nom masculin (origine obscure) Populaire Bal populaire.
Synonymes :
- dancing
- guinguette
Désordre bruyant, tapage.
Synonymes :
- boucan (familier)
- chahut (familier)
- chambard (familier)
- tapage
Ensemble d'objets qu'on emporte ; attirail.
Synonymes :
- attirail
- barda (familier)
- bataclan (familier)
- bazar (familier)
- fourbi (familier)
- fourniment
Sylviculture. Sorte de grand pied à coulisse en bois qui sert...
Synonymes :
- compas forestier

bastringue
n. m.
d1./d Vieilli, Fam. Bal de guinguette; orchestre bruyant.
d2./d Fam. Tapage, vacarme.

⇒BASTRINGUE, subst. masc.
A.— Pop., le plus souvent péj.
1. Bal populaire. Aller au bastringue (Ac. 1835-1932) :
1. M'avançant sous mon faux nom, et persuadé que je compromettais mon ami Fontanes, j'ouïs, à mon grand étonnement, en entrant dans les Champs-Élysées, des sons de violon, de cor, de clarinette et de tambour. J'aperçus des bastringues où dansaient des hommes et des femmes; ...
CHATEAUBRIAND, Mémoires d'Outre-Tombe, t. 2, 1848, p. 13.
2. — Il paraît que c'est toi qui musiquais?
— ...
— Manquait plus que ça.
— ...
— Pour une fois ça passe, mais, si tu travaillais le jour tu penserais moins à nous corner au moment de dormir.
C'est pas un bastringue ici, tu entends?
GIONO, Un de Baumugnes, 1929, p. 158.
SYNT. Bastringue de barrière (ZOLA, Son Excellence E. Rougon, 1876, p. 94; ZOLA, Nana, 1880, p. 1311; E. et J. DE GONCOURT, Germinie Lacerteux, 1864, p. 96; A. BRUANT, Dict. fr.-arg., 1905, p. 124); araignée de bastringue (L. RIGAUD, Dict. de l'arg. mod., 1881, p. 14); Lucrèce de bastringue ([LECLAIR], Les Méditations d'un hussard, 1809, p. 52); ritournelles de bastringue (J. LAFORGUE, Poésies complètes, 1887, p. 11, 91); musique de bastringue (V. LARBAUD, Enfantines, 1918, p. 183; MAUPASSANT, Contes et nouvelles, t. 1, La Femme de Paul, 1881, p. 1226).
Par méton. au fém. :
3. Il avait commencé par bannir de la maîtrise tous les instruments de cuivre, la « bastringue », comme il disait. En peu de temps sa petite troupe de chanteurs atteignit une perfection qui fit accourir de loin les amateurs.
BILLY, Introïbo, 1939, p. 57.
Rem. Pas d'ex. d'un sens mod. où bastringue désignerait le « juke-box », sens pourtant attesté par une chanson bien connue : « Mets deux thunes dans l' bastringue... »
2. P. ext.
a) Vacarme, tapage. Faire du bastringue (Ch.-L. CARABELLI, [Lang. pop.]; A. DELVAU, Dict. de la lang. verte, 1866, p. 25); bagarre :
4. Je m'arc-boutais le dos au mur! ... La soupière en guise de fronde! ... Prêt à bloquer l'agresseur! ... Je poursuivais mon raisonnement. Au premier geste un petit peu drôle, c'est moi qui déclenchais le bastringue! Je visais mon fias en pleine bouille! ... Mais dans la plupart des endroits cette attitude fort résolue suffisait à me préserver ... faisait réfléchir l'amateur...
CÉLINE, Mort à crédit, 1936, p. 507.
b) ,,Dispute conjugale`` (ESN. 1966) :
5. ... je vas reprendre ma femme et lui pardonner (...). Aussitôt dit, aussitôt fait. Mais le bastringue recommença bientôt, et je fus encore un mois sans la revoir.
L.-F. RABAN, MARCO SAINT-HILAIRE, Mémoires d'un forçat, t. 4, 1828-29, p. 183.
B.— Arg. Étui contenant les objets nécessaires à une évasion, et que le détenu s'introduisait dans le rectum; p. méton., scie ou lime fine :
6. Le prisonnier a des fers aux pieds; vous croyez peut-être qu'il songe que c'est avec les pieds qu'on marche? Non, il songe que c'est avec les pieds qu'on danse; aussi, qu'il parvienne à scier ses fers, sa première idée est que maintenant il peut danser, et il appelle la scie un bastringue.
HUGO, Les Misérables, t. 2, 1862, p. 200.
Rem. F. Vidocq (Les Voleurs, 1836, p. 22) donne cette déf. : ,,Etui de fer-blanc, d'ivoire, d'argent et quelquefois même d'or, de quatre pouces de long (...), qui peut contenir des pièces de vingt francs, un passe-port, des scies et une monture, que les voleurs cachent dans l'anus.``
Emploi au fém. ,,N'oublie pas la Bastringue pour Faucher les Balançons`` (ANSIAUME, Arg. en usage au Bagne de Brest, 1821, f. 6, r°, § 59).
Rem. 1. ,,Un sens « canon de vin » (D'H. 1807) a peu vécu; le sens « musiquette » a perduré (Arras, Lyon). Bastringue, bal, lutte, dès 1895, avec guinche. Pour désigner l'étui à lime, PLAN est préféré`` (ESN. 1966). 2. ,,D'Hautel (I, 74) donne des renseignements intéressants sur les sens successifs de bastringue. « Bastringue, nom donné primitivement à une contredanse qui a été longtemps en vogue à Paris; ce mot a reçu depuis peu une plus grande extension; le peuple, à qui il a plu, s'en est emparé et l'a appliqué à des choses de nature différente : un bastringue signifie tantôt un bal mal composé; tantôt un mauvais joueur de violon; puis une maison en désordre, un mauvais lieu »`` (GOUG. Lang. pop. 1929, p. 185).
C.— P. ext.
1. Emplois fam.
a) Matériel, attirail, ce qu'on emporte avec soi. Se mettre le bastringue sur le dos (ESN. Poilu 1919, p. 68) :
7. C'était les transports du bastringue qui nous foutaient tout de suite à cul, des sacs, des bonbonnes, de la came, de tout notre fourniment bizarre. Pour que le jeu vaille la chandelle, il fallait qu'on soye rentrés le soir même au Palais-Royal. Sinon c'était du débours!
CÉLINE, Mort à crédit, 1936, p. 457.
b) Emploi subst. fém. Mécanique; ,,charrette ou mécanique démantibulée`` (VERR.-ON. t. 1 1908, p. 77) :
8. Mon oncle déversait la graisse, en pleine marche, à plein goulot, à travers les bielles, la chaîne et la bastringue. Fallait que ça jute comme un paquebot.
CÉLINE, Mort à crédit, 1936, p. 80.
c) Avec des signif. variées, toujours péj. et qqf. au fém. Événement, situation, boutique, etc. Tout le bastringue. Tout le bataclan, tout le saint-frusquin. Vendre toute la bastringue (BÉL. 1957) :
9. Ou bien on ne s'était pas entendu sur le prix des gages :
— Ah! ... non... des chipies! ... Un sale bastringue... rien à gratter... Elle fait son marché elle-même... Oh! là! là! ... Quatre enfants dans la maison... Plus souvent! Tout cela ponctué par des gestes furieux ou obscènes.
MIRBEAU, Le Journal d'une femme de chambre, 1900, p. 290.
10. — Oui, des tentations, c'est ça que la société nous a donné, poursuivit-il. Des tentations d'un boutte à l'autre. Toute la sacrée bastringue de vie est arrangée pour nous tenter. Et c'est comme ça qu'a nous tient, la gueuse, et qu'a nous tient ben.
G. ROY, Bonheur d'occasion, 1945, p. 70.
Emploi au fém. ,,Je devenais le seul patron de la bastringue et du journal`` (CÉLINE, Mort à crédit, 1936, p. 432).
2. Emplois spéc.
a) CHIM. ,,Appareil dans lequel on prépare le sulfate de soude`` (Ac. Compl. 1842).
Rem. Fém. dans DUVAL 1959.
b) FOREST. ,,Sorte de pied à coulisse pour cuber les bois d'œuvre`` (Lar. 20e).
c) JEU. ,,Nom d'un jeu semblable au billard anglais, mais moins compliqué : on se sert d'une queue et d'une boule qui doit abattre des quilles`` (LITTRÉ).
d) TECHNOL. ,,Toute espèce d'appareil de charge, d'outils, etc.`` (QUILLET 1965); ,,machine imprimant au rouleau les toiles peintes`` (ESN. 1966).
,,Outil à forer des petits trous`` (HANSE 1949); ,,tige destinée à recevoir un outil de forage`` (QUILLET 1965).
Prononc. :[].
Étymol. ET HIST. — 1. a) 1794 « air populaire de contredanse » (Lar. 19e : Le 21 janvier 1794, un an après l'exécution de Louis XVI, les spectacles jouèrent gratis « de par et pour le peuple, en réjouissance de la mort du tyran ». On alla danser autour de l'échafaud, on y revint les jours suivants, et c'est pour ces farandoles que l'air du Bastringue des départements fut composé); b) 1800 « bal, cabaret dansant » (Chanson d'apr. ESN. : aller au bastringue); d'où 1866 p. ext. « dispute » et « vacarme » (supra A2); 2. a) 1799 technol. « machine à imprimer les toiles au cylindre » (SAIN. Lang. par., p. 187 : Nom donné en 1799 par les ouvriers de la manufacture de toiles peintes de Jouy, dirigée par Oberkampf, à une nouvelle machine construite par Samuel Widmer, neveu d'Oberkampf, d'après les modèles anglais : « M. Oberkampf fut le premier à construire par un calcul exact que le produit du bastringue [nom donné par les ouvriers à la nouvelle machine] représentait le travail de 42 graveurs »); b) 1821 arg. « lime fine » (Ansiaume d'apr. ESN.); c) 1900 arg. (NOUGUIER, Notes manuscrites interfoliées au Dict. de Delesalle, p. 29 : Bastringue [...] = Bataclan — bagage, effets mobiliers, ustensiles de ménage).
Orig. inc.; la finale du mot suggère une orig. germ. L'étymon néerl. bas drinken « boire fortement » (REW3, n° 970a) fait difficulté, ce syntagme ne se trouvant d'apr. VALKH., p. 55 dans aucun des grands dict. néerl. ou dialectaux, ce qui prouverait que, même s'il a existé, il n'a jamais été populaire. L'hyp. d'un emploi p. plaisant. à partir de bastringue 2 a « machine à imprimer les toiles » (SAIN. Lang. par., pp. 187-189) fait difficulté du point de vue chronol. : il est au contraire probable que le mot bastringue préexistant et désignant la danse tapageuse a servi à dénommer la nouvelle machine en raison du bruit qu'elle faisait.
STAT. — Fréq. abs. littér. :85.
BBG. — MAT. Louis-Philippe 1951, p. 93, 95. — SAIN. Lang. par. 1920.

bastringue [bastʀɛ̃g] n. m.
ÉTYM. 1794, « air de contredanse »; « machine à imprimer les toiles », 1799; orig. incert. : l'hypothèse de Brunot (cit. 1) semble infirmée par la chronologie; p.-ê. du néerl. bas drinken « boire beaucoup »; les premiers emplois (« contredanse bruyante; machine tapageuse ») impliquent le sémantisme du « bruit »; pour Guiraud, var. de bastingue (d'où bastingage), bastringue ayant d'abord désigné, non un air de danse, mais un bal populaire entouré d'une « barricade », d'un « bâti » de bois — ce qui garantit l'unité du mot.
1 Anciennt. Machine utilisée dans l'industrie des toiles imprimées.
1 Bastringue a (…) une histoire assez curieuse. C'est le nom donné par son inventeur Sam. Widmer, neveu d'Oberkampf, à une machine faite d'après des modèles anglais et qui devait se livrer à des contorsions. Employé par les ouvriers de la manufacture de toiles peintes de Jouy, il fut étendu (par eux ?) aux bals de guinguettes.
Brunot, Hist. de la langue franç., t. IX, p. 1211.
2 Mod., fam. Bal de guinguette. || Courir les bastringues. Bastringuer.
2 (…) j'ouïs, à mon grand étonnement, en entrant dans les Champs-Élysées, des sons des bastringues où dansaient des hommes et des femmes (…)
Chateaubriand, Mémoires d'outre-tombe, II, 1.
3 L'orchestre composé de cinq artistes de banlieue jetait au loin sa musique de bastringue, maigre et sautillante (…)
Maupassant, la Femme de Paul, p. 26.
3.1 On avait la paix depuis que le bastringue avait été fermé par la police.
Louise Michel, la Misère, t. II, p. 271.
3 Fam. Orchestre tapageur, musique grossière. (En ce sens, bastringue est parfois pris au féminin).Piano mécanique.
4 Cette bastringue ataxique, essoufflée, qui, depuis tant d'années déjà, trébuche aux mêmes contretemps, qui nasille, qui larmoie, grince et piaille sur toute la face de la terre.
G. Duhamel, Scènes de la vie future, IX, p. 147.
Par appos. || Piano bastringue : piano volontairement désaccordé (dans un bar, etc.).
(1866). Fam. Boucan, tapage; désordre bruyant. Chambard (fam.), vacarme. || Quel bastringue ! || Un bastringue de tous les diables.
Vx. Violence, dispute.
4 (1821). Argot anc. Petit étui cylindrique pouvant contenir un matériel d'évasion réduit (lime, scie).Par ext. Petite lime, petite scie (cf. Hugo, les Misérables, 1862).
Techn. Outil destiné au forage de petits trous.
5 (1900). a Fam. Choses, affaires (qu'on peut emporter avec soi). Barda, bazar, fourbi. || Emporter tout son bastringue, se tirer avec tout son bastringue.
b Ensemble d'objets hétéroclites. Attirail, bataclan, bazar, saint-frusquin. || Et tout le bastringue : et tout le reste. Bordel.
(Abstrait) Ensemble de faits compliqués, embrouillés, et embarrassants. || On s'est foutu dans un sacré bastringue ! || Un sale bastringue : une sale affaire.
REM. La forme féminine alterne avec le masculin, selon les auteurs, toujours avec une nuance péjorative. Une bastringue : une mauvaise mécanique, boutique, musique (→ ci-dessus, cit. 4), etc.
DÉR. Bastringuer.

Encyclopédie Universelle. 2012.