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guinder

guinder [ gɛ̃de ] v. tr. <conjug. : 1>
windéXIIe; scand. winda « hausser »
1Mar. Hisser (un mât) au moyen d'un palan. Guinder un mât de hune.
Techn. Élever (un fardeau) avec une machine (grue, poulie). 1. lever.
2(XVIe) Littér. Donner une tenue, une allure raide à. Guinder son allure. Pronom. « Sa dignité se guinda » (Balzac). « Le récit se guinde un peu » (Sartre).
⊗ CONTR. Abaisser, laisser (aller).

guinder verbe transitif (ancien scandinave vinda, enrouler) Donner à quelqu'un une allure rigide ou affectée : Son costume le guinde. Donner à un mode d'expression un aspect ampoulé ; emphatique, pompeux : Les inversions guindent son style. Lever, hisser quelque chose au moyen d'une grue, d'une poulie, d'un guindeau, d'une guinde, etc.

guinder
v.
d1./d v. tr. TECH élever au moyen d'un engin de levage.
d2./d v. Pron. Adopter une rigueur affectée, se raidir.

⇒GUINDER, verbe trans.
A. — Soulever (un fardeau) au moyen d'un instrument, d'une machine appropriée. Synon. élever, hisser. Guinder des pierres avec une poulie, avec une grue (Ac.). Les treuils, les moufles et les grues Guindent les lourds matériaux (POMMIER, Paris, 1866, p. 130).
MAR. Dresser (un mât) au moyen d'une drisse ou d'un palan. Les deux corvettes s'occupaient à guinder leurs mâts de hune et à remettre toutes choses en place (DUMONT D'URVILLE, Voy. Pôle Sud, t. 9, 1846, p. 329).
B. — P. anal.
1. Hisser quelqu'un (sur quelque chose). Avec l'aide de ses femmes, elle [Cléopâtre] le guinda [Antoine] jusqu'à une fenêtre, d'où elles le redescendirent dans le mausolée (MICHELET, Hist. romaine, t. 2, 1831, p. 326). Les matelots ont pris le prince sur leurs épaules et l'ont guindé sur le rocher (MÉRIMÉE, Lettres Duchesse de Castiglione, 1870, p. 36).
Emploi pronom. réfl. Une petite grotte où nous autres hommes nous nous sommes guindés, non sans quelques écorchures (STENDHAL, Mém. touriste, t. 2, 1838, p. 229). Le lieutenant offrit la main à miss Lydia, puis aida le colonel à se guinder sur le pont (MÉRIMÉE, Colomba, 1840, p. 13). Il était indispensable de déplacer le pupitre pour avancer l'escabeau où je me guindais (FABRE, Xavière, 1890, p. 163).
2. Dresser quelque chose (sur quelque chose). Si la colonne peut très bien se passer de base, à plus forte raison ne faut-il pas la guinder sur un piédestal (Ch. BLANC, Gramm. arts dessin, 1876, p. 130). Avec une force surhumaine, elle parvint à guinder la grande échelle de toit (LA VARENDE, Amours, 1944, p. 39).
Emploi pronom. réfl. Je sentais tous mes muscles qui se guindaient (DUHAMEL, Confess. min., 1920, p. 14). Chaque muscle de son corps travaille, s'étire, se hausse, se guinde (LEVINSON, Visages danse, 1933, p. 288).
C. — Au fig.
1. Rare. [Le suj. désigne un inanimé abstr.] Élever (quelqu'un) moralement, intellectuellement. Songez à nos amours! Songez à la hauteur où, parmi les amants, notre gloire nous guinde! (ROSTAND, Princesse loint., 1895, p. 188). Une espèce d'ordination m'avait sacré et guindé au-dessus de la multitude et du quotidien (ARNOUX, Algorithme, 1948, p. 17).
Emploi pronom. Une âme active comme celle de X, quand elle veut s'élever à la contemplation poétique ou philosophique, ne s'y peut guinder (VIGNY, Journ. poète, 1834, p. 996). Ce bon sens, qui ne manquait ni de subtilité ni de dialectique, devait faire mille efforts, surtout s'il y était provoqué, pour se guinder jusqu'à ce génie (SAINTE-BEUVE, Portr. littér., t. 1, 1844-64, p. 41).
2. [Le suj. désigne une pers. ou un inanimé concr.]
a) Rendre moins sensible (un caractère), plier (un sentiment, un comportement...) à une discipline morale ou intellectuelle. Synon. discipliner, durcir, endurcir. Cet excès de force où l'on prétend toujours guinder son caractère. On s'exerce à durcir son cœur, on se cache de la pitié (VIGNY, Serv. grand. milit., 1835, p. 121). L'architecte contient et guinde sa fantaisie pour élever au centre de la ville la maison symbolique de l'autocratie (FAURE, Hist. art, 1914, p. 495).
Emploi pronom. réfl. Il faut toujours se guinder, toujours se renier. On ne doit ni rire ni pleurer quand on en a envie ni faire ce qui vous tente ni penser ce qu'on pense (BEAUVOIR, Mandarins, 1954, p. 348) :
Je vois que tu souffres plus que tu ne l'avoues; tu t'es guindée pour écrire cette lettre. N'est-ce pas que tu as bien pleuré avant? Elle est brisée...
FLAUB., Corresp., 1846, p. 214.
b) Péj. Donner un tour affecté (à une pensée, un sentiment), conférer (à une physionomie) un aspect apprêté, une raideur compassée. Guinder son style (Ac. 1835-1932). Et c'est cette malice (...) qui lui faisait, j'en suis sûr, donner la pose même du portrait et qui le guindait prétentieux et campé, le poing sur la hanche (LORRAIN, Phocas, 1901, p. 382). Avec tout cela, encore l'accent de la province dans l'habillement, les revers pas comme tout le monde, et le col un peu trop haut, le guindant (ARAGON, Beaux quart., 1936, p. 277).
Emploi pronom. réfl. Sa gaieté même alors est forcée; il se guinde et se gourme jusqu'aux dents (SAINTE-BEUVE, Chateaubr., t. 2, 1860, p. 114). Gustave cessa de feindre et de se guinder; d'une minute à l'autre, il était devenu naturel (DRIEU LA ROCH., Rêv. bourg., 1939, p. 229).
Prononc. et Orth. : [], (il) guinde []. Att. ds Ac. 1694-1932. Étymol. et Hist. 1. 1160-74 winder « hisser (un mât, etc.) au moyen d'un treuil » (WACE, Rou, éd. A. J. Holden, III, 9854); 2. 1580 guindé « serré (dans des vêtements) » (MONTAIGNE, Essais, I, 14, éd. A. Thibaudet, p. 81); 3. 1643 guindé « qui manque de naturel en s'efforçant de paraître digne, grave » (CORNEILLE, Examen de Cinna ds Œuvres, éd. Ch. Marty-Laveaux, t. 3, p. 381). De l'a. nord. vinda « enrouler, tresser; agiter, brandir », d'où « hisser au moyen d'un treuil » en français. Fréq. abs. littér. : 44.
DÉR. 1. Guindage, subst. masc. a) Action de guinder (un fardeau). (Ds Ac., DG, ROB.). b) Au fig. Action de guinder (une pensée, une physionomie), de se guinder; résultat de cette action. Nul ne jouissait mieux de gai caquetage Effleurant vingt sujets sans gêne et sans guindage (POMMIER, Qq. vers pour elle, 1877, p. 67). J'avance dans le Memorandum, et m'amuse plus que je ne veux me l'avouer au guindage perpétuel de ce style (GIDE, Journal, 1906, p. 214). []. Att. ds Ac. 1762-1932. 1res attest. a) Fin du XIVe s. [ms.] vindage « ensemble des cordages, des poulies qui servent à élever des fardeaux » (Droit maritime d'Oléron, ms. de Troyes, éd. H. Zeller, p. 17), b) 1611 « action d'élever des fardeaux » (COTGR.); de guinder, suff. -age. 2. Guinderesse, subst. fém., mar. Gros cordage servant à guinder un mât. Gilliatt courut aux guinderesses et fila du câble (HUGO, Travaill. mer, 1866, p. 316). []. 1re attest. 1525 (Doc. ap. JAL1); de guinder, suff. -(er)esse (THOMAS (A.) Nouv. Essais, p. 108), cf. encore polie guinderesse (1573, DUPUYS).
BBG. — BAIST1903, pp. 257-258. - LA LANDELLE (G. de). Le Lang. des marins. Paris, 1859, p. 78, 132, 416. - SJÖGREN (A.). Le Traitement du W germ. en norm. Z. fr. Spr. Lit. 1930/31, t. 54, p. 320.

guinder [gɛ̃de] v. tr.
ÉTYM. XIIe, windé, p. p.; winder, v. 1155; empr. au scandinave winda « hausser ».
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I
1 Mar. Hisser (un mât) au moyen d'un palan ( Guinderesse). || Guinder un mât de hune.
0.1 Au tiers du châssis, sur l'avant, se dressait un mât très élevé, sur lequel s'enverguait une immense brigantine. Ce mât, solidement retenu par des haubans métalliques, tendait un étai de fer qui servait à guinder un foc de grande dimension.
J. Verne, le Tour du monde en 80 jours, p. 280.
2 Élever (un fardeau) avec une machine (grue, poulie…). Élever, hisser, lever; guindage, 1. guindal.Plus génér. Hisser.Au p. p. || Colonnes guindées sur d'énormes bases (→ Écraser, cit. 16).
1 Sinon, il consentait d'être en place publique
Guindé, la hart (corde) au col, étranglé court et net (…)
La Fontaine, Fables, VI, 19.
2 (…) nous admirâmes les peines qu'ils eurent sans doute à guinder leur canon si haut (…)
Saint-Simon, Mémoires, t. I, XXIII.
Pron. || Se guinder sur ses pattes (→ Contrefaire, cit. 6).
2.1 Plus haute encore, dans les rochers dépouillés de végétation, est une petite grotte où nous autres hommes nous nous sommes guindés, non sans quelques écorchures.
Stendhal, Mémoires d'un touriste, II, p. 167.
3 Par métaphore (vx). Hausser.Pron. || Se guinder : se hisser, se hausser.
3 (…) les machines qui l'avaient guindé si haut (…) sont encore toutes dressées pour le faire tomber dans le dernier mépris (…)
La Bruyère, les Caractères, VIII, 32.
4 Il mit cinq ans à l'achever et parachever, et ce ne fut pas sans peine qu'il le guinda à cette hauteur de ridicule souverain et inaccessible où nous le voyons.
Th. Gautier, les Grotesques, IV, p. 136.
5 Pourquoi jouer avec moi-même une dangereuse comédie, uniquement pour me guinder jusqu'à des couronnes que je pourrais fort bien manquer (…)
A. de Gobineau, les Pléiades, I, I, p. 10.
4 (XXe). Techn. (théâtre). Utiliser une guinde pour attacher un élément de décor.
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II (XVIe). Fig. Littér. Donner une élévation, une tenue factice qui s'accompagne de raideur, d'un manque de naturel. || Guinder son allure. || « Guinder son style » (Académie).Pron. (1837). Plus cour. (mais seul le p. p. est usuel). || Se guinder : devenir guindé (→ infra, Guindé). || Se guinder pour dire de bons mots. Travailler (se).
6 Sa dignité se guinda, sa royauté la rendit précieuse et quintessenciée.
Balzac, Illusions perdues, Pl., t. IV, p. 500.
7 Elles (les lettres de Saint-Évremond et de Ninon) sont d'une parfaite sincérité, et la nature humaine ne s'y déguise et ne s'y guinde en rien (…)
Sainte-Beuve, Causeries du lundi, 26 mai 1851, t. IV, p. 185.
8 Le récit se guinde un peu et tout ce qu'on nous rapporte du héros prend l'allure d'informations solennelles et publicitaires.
Sartre, Situations I, p. 20.
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guindé, ée p. p. et adj.
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I (Correspondant au sens I de l'actif). → ci-dessus.
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II (Au sens II).
1 (1666). Personnes. Qui manque de naturel en s'efforçant de paraître digne, grave, d'un niveau supérieur.Par ext. Peu naturel, mal à l'aise. Contraint, gourmé. || Personne guindée. Affecté, étudié (→ Collet monté). || « Cet homme est toujours solennel et guindé » (Académie, art. Solennel). || Avoir un air guindé. → Avoir l'air d'avoir avalé sa canne; être toujours monté sur ses échasses. || Être guindé dans une tenue de cérémonie. Corseté, engoncé, raide.
9 Il est guindé sans cesse; et dans tous ses propos,
On voit qu'il se travaille à dire de bons mots.
Molière, le Misanthrope, II, 4.
10 Il n'a rien de vrai, ni de naturel, il est guindé et outré en tout (…)
Fénelon, Dialogues des morts, Anc. dial., 24.
2 (1654). Affecté, ampoulé. || Style guindé. Académique, apprêté, boursouflé, empesé, emphatique, pompeux. || Écrivain guindé (→ Alambiquer, cit. 5).N. m. (Littér.). || Le guindé d'un style, d'un comportement.
11 À beaucoup d'égards, nous préférons la piété amusante et spirituelle de Pierre Camus, l'ami de François de Sales, à la tenue raide et guindée qui est devenue plus tard la règle du clergé français (…)
Renan, Souvenirs d'enfance…, IV, I.
12 (…) les quelques pages que j'avais écrites à Neuchâtel; elles se ressentent de l'effort et le ton m'en paraît guindé.
Gide, Journal, 5 janv. 1948, p. 282.
13 Y a-t-il un art de ne pas lasser ? Le grand secret est le naturel. Toute posture guindée est pénible à tenir et d'ailleurs toujours sans beauté.
A. Maurois, Un art de vivre, II, 5.
3 (1580). Serré (dans ses vêtements).
14 Trapu, un peu guindé dans des vêtements noirs (…)
Martin du Gard, les Thibault, t. V, p. 93.
4 Par métaphore. (Choses). Raide comme une personne guindée.
15 Malgré sa Rambla plantée d'arbres, ses belles rues alignées, Barcelone a un air un peu guindé et un peu roide, comme toutes les villes lacées trop dru dans un justaucorps de fortifications.
Th. Gautier, Voyage en Espagne, p. 288.
16 Je vois une grande bâtisse muette, guindée dans sa solennité provinciale.
Sartre, les Mouches, I, 2.
CONTR. Abaisser, descendre. — Laisser (aller). — Aisé, naturel.
DÉR. Guindage, 1. guindal, guindant, 1. guinde, guindeau, guinderesse.

Encyclopédie Universelle. 2012.