Akademik

démon

démon [ demɔ̃ ] n. m.
daemon 1546; demoygne XIIIe; lat. dæmonium; lat. ecclés. dæmon, gr. daimôn « génie protecteur, dieu »
I
1(XVIe) Myth. Être surnaturel, bon ou mauvais, inspirateur de la destinée d'un homme, d'une collectivité. dieu, esprit, génie. Le démon familier de Socrate : génie, voix qui, selon Socrate, lui dictait toutes ses résolutions.
2Vx ou littér. Puissance, force spirituelle; inspiration. C'est son mauvais démon, son démon familier. « Cette sinistre puissance : le démon de la solitude » (Michelet).
Loc. fig. LES VIEUX DÉMONS : les tentations qu'on croyait disparues, les sujets anciens de discorde. Réveiller les vieux démons. « la construction d'une nouvelle synagogue et d'un centre scolaire plus moderne fait ressurgir les vieux démons » (L'Express, 1989).
IICour. (terminologie relig. jud. et chrét.)
1Ange déchu, révolté contre Dieu, et dans lequel repose l'esprit du mal. diable; incube, succube. Évocation des démons par la magie, l'occultisme. Des démons « erraient autour des solitaires, afin de les induire en tentation » (France).
2 ♦ LE DÉMON : Satan, prince des démons, chef des anges révoltés contre Dieu. Le démon, appelé aussi Belzébuth, Lucifer. malin, maudit, mauvais, tentateur (cf. Esprit du mal, prince des ténèbres). Le démon tenta Ève sous la forme du serpent. Être habité, possédé du démon. démoniaque. « La culture positive de Vincent le retenait de croire au surnaturel; ce qui donnait au démon de grands avantages » (A. Gide).
3(1653) Personne néfaste, méchante. Cette femme est un vrai démon ( furie, harpie) . Par ext. Ce garçon est un petit démon, il est très espiègle. ⇒ diable.
4 ♦ LE DÉMON DE : personnification d'une mauvaise tentation, d'un défaut. Le démon du jeu; de la curiosité. Le démon de midi (Bible) :tentation de nature affective et sexuelle qui s'empare des humains vers le milieu de leur vie.

démon nom masculin (latin daemon, du grec daimôn, -onos, dieu, génie) Chez les Anciens, esprit, bon ou mauvais, que l'on supposait attaché à la destinée de l'individu, de la communauté. Diable, ange déchu qui habite l'enfer et tente les hommes ; Satan. Littéraire. Génie familier qui semble nous guider : Un démon intérieur lui suggérait toujours cent sottises à faire. Personnification des tentations, des vices, des instincts : Le démon de la curiosité. Personne dangereuse : Cette femme est un démon. Enfant turbulent, espiègle : Oh ! le petit démon.démon (citations) nom masculin (latin daemon, du grec daimôn, -onos, dieu, génie) Jean Cocteau Maisons-Laffitte 1889-Milly-la-Forêt 1963 Académie française, 1955 Je voudrais que l'intelligence fût reprise au démon et rendue à Dieu. Lettre à Jacques Maritain Stock Georges Charles, dit Joris-Karl Huysmans Paris 1848-Paris 1907 Le démon ne peut rien sur la volonté, très peu sur l'intelligence, et tout sur l'imagination. L'Oblat Plon Henri Michaux Namur 1899-Paris 1984 Qui a rejeté son démon nous importune avec ses anges. Tranches de savoir Cercle des Arts Henry Millon de Montherlant Paris 1895-Paris 1972 Académie française, 1960 Il y a un démon qui a nom confiance. Don Juan, IV, 1 Gallimard Paul Verlaine Metz 1844-Paris 1896 Mortel, ange ET démon, autant dire Rimbaud […]. Dédicaces, à Arthur Rimbaud Messein Thomas Mann Lübeck 1875-Zurich 1955 La musique est le domaine des démons. C'est l'art chrétien au mode négatif. Die Musik ist dämonisches Gebiet. Sie ist christliche Kunst mit negativem Vorzeichen. L'Allemagne et les Allemands démon (expressions) nom masculin (latin daemon, du grec daimôn, -onos, dieu, génie) Le démon de midi, désir sexuel qui s'empare des êtres humains vers le milieu de leur vie. Les vieux démons, tendances négatives sous-jacentes et susceptibles de se manifester à nouveau : Le réveil des vieux démons xénophobes.

démon
n. m.
d1./d MYTH Génie bon ou mauvais.
|| Le démon de Socrate: la voix intérieure (personnifiant la conscience morale) qui, selon Socrate, lui inspirait sa conduite. (On dit aussi le daïmôn socratique.)
d2./d Ange déchu, chez les chrétiens et les juifs.
Spécial. Le démon: le diable, Satan.
d3./d Fig. Personne méchante, mauvaise. Méfiez-vous d'elle, c'est un démon.
|| C'est un petit démon, un enfant turbulent, bruyant.
d4./d Le démon de...: l'instinct mauvais qui pousse vers... Le démon du jeu.
|| Le démon de midi: le désir violent d'avoir des aventures amoureuses, éprouvé au milieu ("midi") de la vie.

⇒DÉMON, subst. masc.
A.— MYTHOLOGIE
1. Esprit bon ou mauvais qui préside aux destinées de l'individu, de la communauté :
1. Ces âmes humaines divinisées par la mort étaient ce que les Grecs appelaient des démons ou des héros. Les Latins leur donnaient le nom de lares, mânes, génies.
FUSTEL DE COULANGES, La Cité antique, 1864, p. 20.
2. P. ext.
a) Génie qui détermine les sentiments, les comportements humains, qui inspire les productions artistiques. Étouffez les conseils du démon qui vous pousse (DELAVIGNE, Enf. d'Édouard, 1833, I, 6, p. 37) :
2. ... car ce sont eux qu'on retrouvera, quand ils auront trop cruellement porté la peine de leur affectation, passant toute une vie à essayer vainement de réparer, par une tenue sévère, protestante, le tort qu'ils se sont fait quand ils étaient emportés par le même démon qui pousse des jeunes femmes du faubourg Saint-Germain à vivre d'une façon scandaleuse, à rompre avec tous les usages, à bafouer leur famille, ...
PROUST, Sodome, 1922, p. 623.
3. ... dans l'excitation du jeu et du succès, porté par sa propre musique, il [Mozart jouant ses concertos] dépassait d'un bond ce qu'il avait conçu, ce qu'il venait d'exécuter, il lâchait son démon...
GHÉON, Promenades avec Mozart, 1932, p. 262.
Expressions
Le Démon de Socrate. Le génie inspirateur de Socrate. Puisque Socrate avait son bon démon, pourquoi n'aurais-je pas mon bon ange (...)? Il existe cette différence entre le démon de Socrate et le mien, que celui de Socrate ne se manifestait à lui que pour défendre, avertir, empêcher, et que le mien daigne conseiller, suggérer, persuader (BAUDEL., Poèmes prose, 1867, pp. 216-217).
Démon familier. Bon génie souvent attaché à une personne. Tes démons familiers ont accompli ton vœu! (LECONTE DE LISLE, Poèmes trag., 1886, p. 136) :
4. En prenant les noms des figurants de notre troupe, ce matin, nous sommes étonnés de la quantité de garçons et de filles qui portent le nom de Zigla. C'est aussi le nom d'un démon familier de la brousse que vont invoquer (et auquel vont sacrifier un cabri) les femmes qui attendent en vain un enfant. Si elles obtiennent enfin une grossesse, elles font vœu de donner à l'enfant le nom du génie.
GIDE, Le Retour du Tchad, 1928, p. 886.
Avoir de l'esprit comme un démon. Avoir de l'esprit, être spirituel :
5. LA COMTESSE. — Oh! que je voudrais voir un bal masqué, ...!
MARTON. — ... elle qui, à visage découvert, a de l'esprit comme un ange, sous le masque, elle en aurait comme un démon.
DUMAS père, Un Mariage sous Louis XV, 1841, II, 7, p. 142.
b) En partic. (avec influence de B). Personnification d'un vice, d'un défaut. Démon de la jalousie, de l'orgueil. Ces dérisions amères caractérisent ce véritable démon de la guerre (MICHELET, Hist. romaine, t. 2, 1831, p. 47) :
6. Le démon de la luxure m'a tenté toute ma vie de diverses manières, et les plus rudes tentations ne me vinrent pas de la rencontre d'une femme, même belle et parfumée. Elles me vinrent de l'image d'une femme absente.
A. FRANCE, L'Île des pingouins, 1908, p. 25.
3. Au fig.
Démon, petit démon. Enfant vif, espiègle, turbulent :
7. (...) j'aime mieux
Cet essaim d'innocents, petits démons joyeux [les enfants]
(...)
Que la foule acceptant le crime en pleine fête
(...).
HUGO, L'Art d'être grand-père, 1877, p. 227.
Comme un démon. Vigoureusement, énergiquement, avec ardeur. Je travaille comme un démon, me levant à trois heures et demie du matin (FLAUB., Corresp., 1835, p. 21).
Faire le démon (vieilli). Faire du bruit, tourmenter. Elle a donc bien fait le démon? (LECLERCQ, Proverbes dram., 1835, 8, p. 88).
B.— RELIG. [Dans la tradition chrétienne]
1. Ange révolté contre Dieu, damné, qui pousse les hommes à faire le mal. Œuvre du (d'un) démon; piège du démon; possédé du (par un) démon :
8. Persévère, Antoine! C'est par la pénitence que tu vaincras le démon. Fais-toi souffrir, mortifie-toi, macère-toi!
Et quand le cal sera venu sur la croûte sèche de tes plaies et que ton esprit n'imaginera plus rien pour tourmenter ta chair fatiguée, va-t'en, cours au martyre!
FLAUBERT, La Tentation de St-Antoine, 1849, p. 272.
9. ... et l'enfer s'ouvrait sous ses pieds. Elle en ressentait les horreurs, ce feu si vif, si dévorant, les hurlements rauques des damnés, et ces effroyables profondeurs de ténèbres et de brasiers. Sa pensée s'arrêtait sur les démons; elle eût voulu être l'un d'eux, car ils sont seulement bourreaux, et les tourmenteurs, assurément, souffrent moins que les tourmentés.
BOURGES, Le Crépuscule des dieux, 1884, p. 258.
Rem. Le Démon, subst. déterminé par l'art. déf., signifie le Prince des démons. Synon. Le Diable, Belzébuth, Lucifer, Satan :
10. Les anges sont tombés à cause de la faiblesse de leur volonté. Les philosophes ont appelé le diable le Prince des démons.
Théol. cath., t. 4, 1, 1920, p. 347.
2. P. anal. Individu qui incarne le mal; personne méchante, néfaste :
11. ... cet homme est un démon. Et elle demeura comme foudroyée par ce dénouement imprévu, en se demandant si elle ne luttait point avec l'enfer en personne, ...
PONSON DU TERRAIL, Rocambole, t. 3, 1859, p. 201.
Rare. Monstre.
12. Elle accoucha en plein champ par un matin de printemps. Quand les sarcleuses, accourues à son aide, virent la bête qui lui sortait du corps, elles s'enfuirent en poussant des cris. Et le bruit se répandit dans la contrée qu'elle avait mis au monde un démon. C'est depuis ce temps qu'on l'appelle « La Diable ».
MAUPASSANT, Contes et nouvelles, t. 2, La Mère aux monstres, 1883, p. 369.
3. Au fig. Démon de midi. Exacerbation sentimentale et sexuelle qui se manifeste chez les êtres humains, en particulier chez les hommes, vers le milieu de leur vie :
13. ... et sa prière faite, il se remettait à écrire. Rien d'aussi pacifiant. Écrire, c'est-à-dire, vivre sans vivre, s'occuper de soi et s'oublier. Après la prière, les anciens moines copistes n'avaient pas d'arme plus sûre contre le démon de midi. Ainsi de nos solitaires.
BREMOND, Hist. littér. du sentiment relig., t. 4, 1920, p. 249.
Rem. On rencontre ds la docum. a) Le subst. masc. démoncule. Petit démon. Je défie les fées et les satanilles, le paludisme et les démoncules (ARNOUX, Rhône, 1944, p. 354). b) Le subst. fém. démonisation. Action de rendre démon, démoniaque. La possibilité du consentement ne peut être comprise que si l'on fait abstraction de cette divinisation du vouloir, qui est en réalité sa démonisation (RICŒUR, Philos. volonté, 1949, p. 27). c) Le subst. fém. démone, rare. Démon féminin; femme méchante. Sous le faix de tresses enlacées en haut de la nuque laiteuse, elle se riait des propos, des sourires, des brocards et des louanges, telle une démone ironique sachant les causes inconnues de l'univers, des hommes et de leurs esprits (ADAM, Enf. Aust., 1902, p. 394).
Prononc. et Orth. :[]. Ds Ac. dep. 1694. Accord sur la forme d'un éventuel fém. démone (cf. DUPRÉ 1972). Étymol. et Hist. 1. Début XIVe s. « divinité, idole » demoygne (Psautier, BN 1761, f° 126e ds GDF. Compl. [Ps 105, 38 : sacrificaverunt sculptilibus Chanaan]); spéc. 1690 dans la tradition chrét. « ange déchu, condamné au feu charnel » prince des démons (FUR.); 1663 « personne qui a les attributs d'un démon » (MOLIÈRE, Etourdi, I, 10 ds LITTRÉ); 2. 1546 bons Daemons « êtres intermédiaires entre les dieux et les hommes » (RABELAIS, Tiers Livre, éd. Marty-Laveaux, II, p. 17); spéc. 1552 le Daemon de Socrate (RABELAIS, Quart Livre, II, 505); fig. 1652 « génie qui préside à la destinée d'une collectivité » (BALZAC, Socr. chrétien, disc., 10 ds LITTRÉ : la peine et la recompense sont les deux démons qui gouvernent les choses humaines); 3. fig. 1694 « personnification d'un défaut » le demon du jeu (BOILEAU, Sat., 10 ds DG). Empr. au lat. daemon (empr. au gr. ) impérial « esprit, génie », chrét. « esprit impur, mauvais ange, diable; idole ». La forme demoygne d'apr. le lat. deamonium même sens. Fréq. abs. littér. :2 309. Fréq. rel. littér. :XIXe s. : a) 3 009, b) 2 857; XXe s. : a) 3 689, b) 3 501.
DÉR. Démonerie, subst. fém. Action, agissement de démon. Se livrer à des démoneries ridicules (Lar. 19e-20e). P. méton. Croyance aux agissements de démon. En tout, ne saurait-on avoir le Socrate sans les démoneries, comme dit Montaigne? (SAINTE-BEUVE, Port-Royal, t. 3, 1848, p. 274). Ex. cité ds LITTRÉ et GUÉRIN 1892. 1res attest. a) 1588 ses ecstases et ses demoneries [de Socrate] (MONTAIGNE, Essais, éd. A. Thibaudet, III, XIII, p. 1256); b) 1850 « frénésie, ardeur démoniaque » (SAINTE-BEUVE, Caus. lundi, t. 3, p. 168); de démon, suff. -erie. Fréq. abs. littér. : 1.
BBG. — GOTTSCH. Redens. 1930, p. 358, 361. — HENNING (C. N.). Mortel, ange et démon. Mod. Lang. Notes. 1938, t. 53, p. 119.

démon [demɔ̃] n. m.
ÉTYM. 1546, daemon; demoygne, déb. XIVe; lat. impérial dæmon « esprit, génie », en lat. chrét. « esprit impur, diable », grec daimôn « esprit, génie » (→ ci-dessous, I., 1., b); la forme demoygne est issue du lat. dæmonium, grec daimonion.
———
I
1 a (Déb. XIVe). Être surnaturel, divinité, génie bon ou mauvais qui présidait à la destinée d'un homme, d'une collectivité, et l'inspirait. Dieu, esprit, génie; mythologie (djinn, lamie, lutin, monstre…).
1 Que l'honneur de mon prince est cher aux destinées !
Que le démon est grand qui lui sert de support !
Malherbe, Sonnet à Mgr le Dauphin.
2 Ô ciel ! Quel bon démon devers moi vous envoie,
Madame (…)
Corneille, Héraclius, V, 2.
3 Un plus puissant démon veille sur vos années.
Corneille, Cinna, II, 1.
4 (…) les trois Furies, les trois Parques, les mauvais démons, la roue d'Ixion, le vautour de Prométhée sont des chimères absurdes (…)
Voltaire, Dialogues, XXIII.
5 Si le démon gardien de Raphaël lui avait expliqué (non pas montré) ce que devait tenter plus tard Van Gogh (…)
Malraux, les Voix du silence, I, V.
b (1552; grec daimôn). || Démon ou, didact., daimôn : génie, voix qui, selon Socrate, lui dictait ses résolutions.
6 On ne convient pas de ce qu'était ce génie appelé ordinairement le démon de Socrate, d'un mot grec qui signifie quelque chose qui tient du divin, conçu comme une voix secrète.
Charles Rollin, Hist. ancienne, IV, 359.
7 Socrate avait son Daimôn. Descartes se donne un Diable pour les besoins de son raisonnement (…) Dans le récit qu'il nous a laissé des songes de la fameuse Nuit du 10 novembre 1619, figure aussi un Génie « qui lui prédit ces songes avant qu'il ne se mette au lit » et un mauvais Génie auquel il attribue une douleur qui l'éveille et le dessein de le séduire.
Valéry, Variété V, p. 236.
Par ext. || Le démon de qqn, son génie protecteur. || Il a confiance en son démon familier.
8 Houel et Jeanfin avaient un démon familier qui leur donnait toujours des as quand ils jouaient aux cartes.
Voltaire, Philosophie de l'histoire, III, 148, in Littré.
2 Vx ou littér. Puissance, force spirituelle, inspiration. || C'est son mauvais démon, son démon familier.
9 Tous les jours de ses vers, qu'à grand bruit il récite,
Il met chez lui voisins, parents, amis, en fuite;
Car, lorsque son démon commence à l'agiter,
Tout, jusqu'à sa servante, est prêt à déserter.
Boileau, Satires, VIII.
10 Celui qu'un vrai démon presse, enflamme, domine,
Ignore un tel supplice, il pense, il imagine (…)
A. Chénier, Poèmes, « L'invention ».
11 « Levez-vous vite, orages désirés, qui devez emporter René dans les espaces d'une autre vie ». Ainsi disant, je marchais à grands pas, le visage enflammé, le vent sifflant dans ma chevelure, ne sentant ni pluie ni frimas, enchanté, tourmenté, et comme possédé par le démon de mon cœur.
Chateaubriand, René.
———
II (XIIIe). Dans la terminologie judaïque et chrétienne.
1 Ange déchu, révolté contre Dieu, et dans lequel repose l'esprit du mal.REM. Démon a fait double emploi dès le XIIIe s. avec diable. Mais peu à peu démon s'est spécialisé dans les emplois sérieux (théologiques, philosophiques…) au détriment de diable qui est resté vivant dans beaucoup d'expressions figurées et familières. Diable, génie (du mal), incube, succube. || Évocation des démons par la magie, l'occultisme. Magie, occultisme (→ Apparition, cit. 11). || Troupe de démons. || Démons hideux, grimaçants, gesticulants (→ Aspect, cit. 2). || Conjurer (cit. 4) les démons.
12 Alors on lui présenta un possédé aveugle et muet, et il le guérit, en sorte qu'il commença de parler et de voir (…) mais les pharisiens, entendant cela, dirent : Cet homme ne chasse les démons que par Béelzébub, prince des démons. Mais Jésus, connaissant leurs pensées, leur dit : Tout royaume divisé contre lui-même sera détruit (…) Et si Satan chasse Satan, il est divisé contre lui-même; comment donc son royaume subsistera-t-il ?
Bible (Sacy), Évangile selon saint Matthieu, XII, 22-24-25-26.
13 (…) il y a des démons de plusieurs espèces; et cette différence (…) vient des différentes espèces de péchés où ces esprits de ténèbres ont coutume de nous porter.
Bourdaloue, Sermon pour le dimanche, « Sur l'impureté ».
14 (…) des démons, ayant pris des figures d'Éthiopiens ou d'animaux, erraient autour des solitaires, afin de les induire en tentation.
France, Thaïs, p. 5.
15 Toi qui, forte comme un troupeau
De démons, vins, folle et parée (…)
Baudelaire, les Fleurs du mal, Spleen et idéal, XXI.
16 (…) le démon Asmodée, amoureux terrible de Sara, est l'Aesma-Daeva des Perses, le diable de la luxure (…)
Daniel-Rops, le Peuple de la Bible, IV, I, p. 277.
2 Le démon : Satan, prince des démons, chef des anges révoltés contre Dieu. || Le démon, appelé aussi Belzébuth, Lucifer. || Désignations du démon : l'adversaire, l'esprit malin, le malin, l'esprit du mal, le maudit, le mauvais, le prince des ténèbres, le prince de ce monde, le roi des enfers, le séducteur, le tentateur, l'esprit immonde, l'esprit impur. || Le démon, inspirateur du péché. || Les ruses, la malice, la fourberie du démon. || Tentations, séductions que le démon fait subir aux hommes pour les inciter au mal. || Le démon tenta Ève sous la forme du serpent. || Saint Michel terrassant le démon. || Craindre, redouter, fuir le démon. || Évoquer le démon. || Évocation du démon (Méphistophélès) par Faust. || « Eh bien, pauvre démon ! Fais-moi voir tes merveilles ! » (Berlioz, la Damnation de Faust). || Signer un pacte (cit. 5) avec le démon. || Être inspiré, obsédé par le démon. || Être habité, possédé du démon. Démoniaque, énergumène. || Cérémonie par laquelle on chasse le démon d'un lieu, d'une personne. Conjuration, exorcisme. || L'exorciste, clerc des ordres mineurs, dont le rôle est de conjurer le démon. || Culte du démon. Magie (magie noire), messe (messe noire).
17 Vil esclave toujours sous le joug du péché,
Au démon qu'il redoute il demeure attaché (…)
Boileau, Épître, XII.
18 Qu'il devait venir un libérateur qui écraserait la tête au démon, qui devait délivrer son peuple de ses péchés, ex omnibus iniquitatibus.
Pascal, Pensées, XI, 736.
19 Ce Démon, ce glorieux Lucifer, n'est-ce pas le même qui, avec tous les charmes de la séduction et sous un air de vague ennui, se glissant encore sous l'arbre d'Éden, a pris sa revanche en plus d'un endroit des scènes troublantes de Chateaubriand ?
Sainte-Beuve, Causeries du lundi, 27 mai 1850, t. II, p. 157.
20 (…) j'espérais, à force de travail, arriver à reconstruire notre fortune; mais le démon s'en mêle !
Alphonse Daudet, le Petit Chose, I, IV, p. 42.
21 Je suis esclave de l'Époux infernal, celui qui a perdu les vierges folles. C'est bien ce démon-là. Ce n'est pas un spectre, ce n'est pas un fantôme.
Rimbaud, Une saison en enfer, « Délires I ».
22 La culture positive de Vincent le retenait de croire au surnaturel; ce qui donnait au démon de grands avantages.
Gide, les Faux-monnayeurs, I, XVI, p. 183.
Fig. || Un vacarme de démon (La Fontaine, VI, 3). || Démons domestiques (→ Attentif, cit. 15).
Loc. fig. Avoir de l'esprit comme un démon : avoir un esprit vif et malicieux, avoir beaucoup d'esprit. — ☑ Faire le démon : être actif, turbulent, bruyant, tapageur (vieilli).
23 Le maréchal de Créquy fait toujours le démon dans Trèves.
Mme de Sévigné, Lettres, 440, 4 sept. 1675.
24 Il a de l'esprit comme un démon.
Molière, les Précieuses ridicules, 11.
Le démon de…, suscité par… (→ aussi 4., au fig.).
3 (1653). Personne qui a les attributs d'un démon : personne néfaste, méchante, dangereuse, rusée… ou simplement espiègle. || Cette femme est un vrai démon ( Furie, harpie). || Ce visage d'ange pourrait bien cacher un démon.Par ext. || Ce garçon est un petit démon, il est très espiègle, très turbulent. Diable.
4 (1694). || Le démon de, personnification d'une mauvaise tentation, d'un défaut (le compl. désignant la cause qui pousse à mal faire). || Le démon de la chair (→ Concupiscence). || Le démon du jeu; le démon de la curiosité, de l'envie, de la jalousie, de la vengeance. — ☑ Le démon de midi (Bible, Psaumes, XC) : tentation de nature affective et sexuelle qui s'empare des humains vers le milieu de leur vie. || Le Démon de midi, roman de Paul Bourget (1914).Fam. || Elle a pris un nouvel amant à cinquante ans : c'est le démon de midi.
25 Dans cet être charmant et bon (Charlotte Corday), il y eut cette sinistre puissance : le démon de la solitude.
Michelet, Hist. de la Révolution franç., II, p. 654.
26 Si vous vous êtes pris vivement aux choses de la société, si l'ambition vous a une fois mordu le cœur, si le démon littéraire vous a irrité et piqué, si les autres passions factices et secondaires se sont logées en vous et vous ont inoculé leur fièvre, vous êtes moins propre en effet à la solitude, au commerce avec la nature.
Sainte-Beuve, Chateaubriand…, t. I, IV, p. 110.
27 (…) c'est qu'à certains moments de notre existence (en particulier au temps de l'adolescence et à celui du Démon de Midi) nous nous trouvons en état de réceptivité (…)
A. Maurois, Études littéraires, t. I, Proust, IV, p. 131.
28 (…) les hommes valent moins que des chiens, quand le démon de la chair les tourmente.
P. Mac Orlan, la Bandera, XVI, p. 196.
29 Figurez-vous que la vérité, c'est qu'elle ne voulait plus de moi. Elle avait son démon de midi. Elle voulait un autre homme.
L. Pauwels, l'Amour monstre, p. 49.
30 Voilà encore un problème, un drame auquel l'homme échappe. Pour lui le vieillissement n'est pas un handicap et le démon de midi n'est qu'un bon diable auquel il peut obéir sans déchoir. Le beau-frère de Pasquale a cinquante-deux ans. Il fornique avec une starlette de vingt-deux ans qu'il se prépare à épouser.
Benoîte et Flora Groult, Journal à quatre mains, p. 88.
DÉR. Démone, démonerie, démonial, démonicole, démonique, démonisme, démoniste, démonographe, démonographie, démonolâtre, démonolâtrie, démonologie, démonologue, démonomane, démonomanie, démonopathie. — REM. Démoniaque, démonialité, etc. viennent directement de dérivés latins.

Encyclopédie Universelle. 2012.