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conjurer

conjurer [ kɔ̃ʒyre ] v. tr. <conjug. : 1>
• 980 « prier »; lat. conjurare « jurer ensemble »
I
1(XIIe) Écarter (les esprits malfaisants) par des prières, des pratiques magiques. charmer, chasser, exorciser. « une vieille oraison qu'on me faisait réciter dans mon enfance, [...] pour conjurer les démons de la nuit » (Bosco).
2(fin XVIe) Détourner, dissiper (une menace), écarter (une catastrophe). Conjurer un péril, le mauvais sort. « Un danger semble très évitable quand il est conjuré » (Proust).
3Littér. Conjurer qqn de (et inf.),le prier avec insistance de... ⇒ adjurer, implorer, supplier. Je vous conjure de me croire; je vous en conjure.
II
1(XIIIe) Vx Préparer par un complot (la ruine, la perte de qqn, spécialt d'un chef). Conjurer la perte, la mort d'un tyran. comploter, conspirer, tramer; conjuration, conjuré. Absolt « Ses ennemis [de Rome] conjuraient contre elle » (Montesquieu).
2Pronom. Littér. S'unir dans une conjuration. Les républicains se conjurèrent contre César. Par ext. S'allier contre. « les circonstances allaient se conjurer pour nous rejeter dans le désordre » (Bainville).
⊗ CONTR. Attirer, évoquer, invoquer.

conjurer verbe transitif (latin conjurare, de jurare, jurer) Littéraire. S'engager avec d'autres par serment à réaliser une action funeste ; projeter ensemble, comploter : Conjurer la ruine de quelqu'un. Écarter quelque chose, quelqu'un (de mauvais) par des serments, des pratiques religieuses, magiques, surnaturelles, etc. ; exorciser : Conjurer le mauvais sort. Écarter une action néfaste, la détourner par un moyen quelconque : Conjurer une crise. Littéraire. Prier quelqu'un, le supplier instamment au nom de quelque chose d'important, de sacré, adjurer, implorer : Je vous conjure de vous taire.conjurer (synonymes) verbe transitif (latin conjurare, de jurare, jurer) Littéraire. S'engager avec d'autres par serment à réaliser une action funeste ;...
Synonymes :
- comploter
- ourdir
- tramer
Littéraire. Prier quelqu'un, le supplier instamment au nom de quelque chose d'important...
Synonymes :
- adjurer
- implorer
- supplier

conjurer
v.
rI./r v. Pron. Se liguer par un complot.
Fig. Des hasards malheureux se conjurent contre nous.
rII./r v. tr.
d1./d écarter, éloigner (une puissance néfaste) par des prières, des pratiques magiques. Conjurer les esprits malfaisants.
d2./d Fig. écarter (un danger, une menace).
d3./d Prier avec insistance, supplier. écoutez-le, je vous en conjure.

I.
⇒CONJURER1, verbe trans.
A.— Écarter les influences néfastes par des procédés surnaturels. Il associe toujours la magie qui conjure les mauvais sorts ou dispose favorablement les génies bienfaisants (L'Univers écon. et soc., 1960, p. 6209).
B.— P. ext.
1. Écarter un danger quelconque par différents moyens. Nous parlerons d'un petit système que j'ai imaginé pour faire venir le beau temps et conjurer la pluie (JARRY, Ubu Roi, 1895, III, 7, p. 64). Pour conjurer ce danger, on peut penser entre autres aux mesures fiscales suivantes (L'Univers écon. et soc., 1960, p. 4815) :
1. Pour la signature des accords, on conjurait le péril par une présentation sous forme circulaire, permettant à chacun de signer au même rang, ...
J. CHAZELLE, La Diplom., 1962, p. 18.
2. Conjurer qqn de + inf. Supplier avec insistance. Je vous conjure d'intercéder pour tous ses besoins (E. DE GUÉRIN, Lettres, 1839, p. 287). Monseigneur, dit la Belcredi, revenez à vous, je vous en conjure (BOURGES, Le Crépuscule des dieux, 1884, p. 213) :
2. Il venoit quelquefois me trouver, fondant en larmes, et me conjurant de l'arracher des bras de la mort; ...
Ph. PINEL, Traité médico-philos. sur l'aliénation mentale, ou la manie, 1801, p. 55.
Absol. On peut penser quel était l'état du prince. Il suppliait, il conjurait (GOBINEAU, Les Pléiades, 1874, p. 98).
Prononc. et Orth. :[], (je) conjure []. Ds Ac. 1694-1932.
DÉR. Conjureur, subst. masc., vx. Celui qui, à l'aide de pratiques magiques, écarte les puissances malfaisantes. Les conjureurs de sorts et les sorcières Que vont trouver les filles-mères (VERHAEREN, Les Villes tentaculaires, Les Campagnes hallucinées, 1895, p. 55). Cf. conjurateur1. []. 1re attest. 1560 (FAREL, du Vrayes usage de la Croix, p. 150, Fick ds GDF.); de conjurer « écarter le mauvais sort », suff. -eur2; dès 1418 conjureur « celui qui appelle, requiert pour entamer une procédure, juger une affaire » (ds Coutumes Lille, éd. Roisin, p. 191), dér. de l'a. fr. conjurer « adresser une semonce à qqn pour venir juger une affaire » (1252 ds GDF.). Fréq. abs. littér. : 1.
II.
⇒CONJURER2, verbe.
A.— Emploi trans., vx. Préparer une conjuration (cf. conjuration2).
P. ext. Collaborer à la réalisation d'un dessein commun. Ils conjurèrent la ruine de leur patrie. Ils ont conjuré votre perte (Ac. 1835-1932).
B.— Emploi intrans. ou pronom. Se lier par une conjuration; s'engager à réaliser ensemble une chose généralement funeste. Tous les personnages de sa cour vont se conjurer pour détruire l'amour d'Arlequin et de Sylvia (ANOUILH, La Répétition, 1950, I, p. 36). Ils se sont conjurés, tous, (...) pour m'écraser (A. ARNOUX, Les Crimes innocents, 1952, p. 107) :
... [à Florence] les Pazzi, irrités de voir toute la puissance aux mains des Médicis, se conjurèrent avec l'archevêque de Pise pour assassiner les deux Médicis, Julien et Laurent, ...
TAINE, Philos. de l'art, t. 1, 1865, p. 175.
P. métaph. Lui [Ronsard] et ses amis, ils avaient conjuré ensemble pour que la langue française eût enfin une haute poésie (SAINTE-BEUVE, Causeries du lundi, t. 2, 1851-62, p. 64).
Prononc. et Orth. :[], (je) conjure []. Ds Ac. 1694-1932. Étymol. et Hist. A. 1. Ca 980 conjurer « prier solennellement [sous l'invocation de Dieu] » (Passion, éd. d'Arco Silvio Avalle, 178); fin XIIe s. (Orson de Beauvais, 3528 ds T.-L. : ... si te conjur de dei onnipotent que...); 2. fin XIIe s. « prononcer des paroles magiques sur quelqu'un, quelque chose pour obtenir tel effet » (ibid., 580); 1397 « écarter un mal, un danger par des pratiques magiques » (Lettre de remission ds DU CANGE, s.v. conjurium). B. Fin XVe s. conjurer « s'unir dans une conjuration, comploter » (Prem. vol. des grans décades de Tit.-Liv., f° 46a ds GDF. Compl.); 1544 se conjurer « s'unir dans une conjuration » (SEYSSEL, trad. d'APPIEN, Guerre Mithridatique, ch. 5 ds HUG.). Empr. au lat. conjurare (proprement « jurer ensemble ») class. « se liguer; conspirer » d'où B; en b. lat. « supplier, adjurer sous l'invocation de quelque chose de sacré, de Dieu » (TLL s.v., 340, 1; v. aussi NIERM. s.v. 9°) d'où A 1; de l'exhortation par invocation d'une puissance sacrée, est issu le sens A 2.
STAT. — Conjurer1 et 2. Fréq. abs. littér. :783. Fréq. rel. littér. :XIXe s. : a) 1 967, b) 960; XXe s. : a) 635, b) 752.
BBG. — COHEN 1946, p. 37.

conjurer [kɔ̃ʒyʀe] v. tr.
ÉTYM. V. 980, « prier »; lat. conjurare « jurer ensemble, comploter », de con- (cum), et jurare. → Jurer.
———
I (Fin XVe). Vx ou littér. Préparer par un complot (la ruine, la perte de qqn, et, spécialt, d'un chef). || Conjurer la perte, la mort d'un tyran. Comploter, conspirer, tramer; conjuration, conjuré. || Conjurer la ruine de sa patrie.
1 Ne faut-il pas que j'aie moi-même conjuré ma perte ?
Bourdaloue, Pensée de la mort, III, in Hatzfeld.
Absolt. Vx. || Conjurer (contre qqn), prendre part à une conjuration (1.). || Conjurer contre l'empereur, contre le tyran.Par ext. Travailler secrètement (contre…).
2 Ses ennemis (de Rome) conjuraient contre elle et elle conjurait contre ses ennemis.
Montesquieu, l'Esprit des lois, XI, 17.
———
II Mod.
1 (XIIe). Écarter (un esprit, les esprits malfaisants) par des prières, des pratiques magiques. Charmer, chasser. || Conjurer les démons. Exorciser.Conjurer un sortilège par un talisman.
3 Cette église a été autrefois bâtie pour conjurer les vénéfices que l'on pratiquait à l'aide d'épines qui poussaient dans ce pays et servaient à transpercer des images découpées en forme de cœur.
Huysmans, Là-bas, XVII, p. 239.
4 (…) les vagues réminiscences d'une vieille oraison qu'on me faisait réciter dans mon enfance, avant de m'endormir, pour conjurer les démons de la nuit.
H. Bosco, Hyacinthe, p. 221.
2 (Fin XVIe). Détourner, dissiper (une menace), écarter (une catastrophe). || Conjurer un péril, un désastre, la foudre, la tempête, le mauvais sort.Au passif. || Le danger est conjuré.
5 Et aucun moyen, hélas ! de conjurer ce malheur, plus intimement cruel à leurs âmes que tous les précédents désastres de fortune.
Loti, Figures et Choses…, « Le mur d'en face », p. 188.
6 Un danger semble très évitable quand il est conjuré.
Proust, À la recherche du temps perdu, XI, p. 187.
3 Littér. ou style soutenu. || Conjurer (qqn) de (qqch.; faire qqch.) : prier (qqn) avec insistance de… Adjurer, implorer, supplier. || Je vous conjure de me croire; je vous en conjure. || Il la conjurait en vain de revenir.
7 (…) je vous en conjure par tout ce qui est le plus capable de vous toucher.
Molière, Dom Juan, IV, 6.
8 Loin de me retenir par des conseils jaloux,
Elle me conjurait de me donner à vous.
Racine, Bajazet, V, 4.
9 (…) le père Barbeau le conjurait, en pleurant, de mieux reconnaître son amitié.
G. Sand, la Petite Fadette, XXXI, p. 207.
——————
se conjurer v. pron.
ÉTYM. (1544).
Vieilli ou littér. S'unir dans une conjuration ( Conjuration, 1.). || Les républicains se conjurèrent contre César.
Par ext. Se liguer, s'allier contre. Coaliser (se). || Partis qui se conjurent pour renverser le ministère.Fig. et littér. (Choses). || Éléments, forces qui se conjurent.
10 (…) les circonstances allaient se conjurer pour nous rejeter dans le désordre.
J. Bainville, Hist. de France, VI, p. 102.
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conjuré, ée p. p. adj. et n.
Coalisé, ligué.
11 Contre le fils d'Hector tous les Grecs conjurés.
Racine, Andromaque, I, 1.
N. (1213). Membre d'une conjuration. || Les conjurés ont préparé un attentat contre le chef de l'État. || Les conjurés, les principaux conjurés ont été arrêtés et condamnés.
12 Et que vos conjurés entendent publier
Qu'Auguste a tout appris, et veut tout oublier.
Corneille, Cinna, V, 3.
CONTR. Attirer, évoquer, invoquer.
DÉR. Conjurateur, conjuratoire.

Encyclopédie Universelle. 2012.