FLÛTE
La flûte est sans doute un des instruments dont les origines remontent le plus haut dans l’histoire de l’humanité. Le roseau des marais, le bout de bois creux offerts aux vents subtils ou féroces furent des objets dont les effets ne pouvaient échapper à l’observation.
Notre flûte n’est certes plus ce roseau que connurent les premiers hommes. Elle est le résultat de recherches techniques persévérantes. Sa sonorité est stable, son étendue vaste, sa justesse appréciable. Elle est d’ivoire, d’or, d’argent, de cristal ou de bois précieux. Et pourtant le son est semblable à ce qu’il était autrefois. Un son que l’on peut qualifier volontiers pour le moment de pur, tant il agit sur nous en raison de sa limpidité, tant il nous séduit en ce qu’il rejoint sans doute en nous une qualité de notre être qu’il nous semble essentiel de préserver et de cultiver.
«Que seulement je fasse de ma vie une chose simple et droite, pareille à une flûte de roseau que tu puisses emplir de musique» (Rabindranath Tagore). Ce roseau, comment les premiers hommes s’y sont-ils attachés? Tout comme la peau tendue offerte au martèlement de la main, ce roseau, ou bien encore cet os devenu peu à peu flûte, parlera un langage compris par tous, nuancé au possible, l’instrumentiste donnant son souffle, l’instrument son timbre. La flûte fera partie intégrante de la vie quotidienne de l’homme. Elle sera intimement mêlée aux rites, aux sacrifices; elle conduira au supplice, elle participera aux grands cycles de la vie, elle accompagnera l’homme à la chasse ou à la guerre, elle sera chanson éternelle. Sous des formes diverses, on la trouvera probablement partout où il y aura trace humaine. Et sans doute furent-ils multitude à l’avoir découverte.
1. Le souffle et le son
Toutes les formes de flûtes, si dissemblables d’aspect soient-elles, découlent du même principe acoustique ; la projection d’une lame d’air contre une arête, biseau ou labium.
Dans le cas de la flûte à bec, l’air est canalisé par un conduit et vient buter sur le biseau, l’instrumentiste tenant le bec entre les lèvres.
Dans le cas des autres flûtes (de Pan, droite, traversière), l’instrumentiste applique l’orifice de la flûte contre la lèvre inférieure. Le souffle est canalisé directement par les lèvres et vient buter le côté opposé de l’orifice qui fait office de biseau où se produit de part et d’autre une alternance dans la répartition du souffle, alternance qui provoque l’ébranlement de la colonne d’air. Le son est alors émis, quasi pur, parce que ne donnant que peu d’harmoniques. Une pression accentuée du souffle provoque l’émission de partiels; si l’on bouche tous les trous, on obtient facilement les cinq ou six premiers. La flûte est à considérer comme un tuyau ouvert aux deux bouts; le tampon n’intervient que pour l’accord intérieur de l’instrument. Plus la fraction de l’orifice recouverte par la lèvre est grande, plus le son baisse. On connaît toutefois une flûte conique à bout fermé résonnant comme un tuyau ouvert (Congo). La forme de la perce est de la plus haute importance; la matière (maillechort, argent, diverses espèces de bois tels grenadille, ébène, buis, etc.) ne joue aucun rôle acoustique, à proprement parler.
Le son est entretenu le temps voulu par l’instrumentiste. Il n’y a aucun intermédiaire entre celui-ci et son instrument. La qualité du son est influencée par l’orientation donnée au souffle par les lèvres et par la pression du souffle. Le son sera directement lié à la personnalité de l’instrumentiste.
2. La flûte et son histoire
L’Antiquité
Dès l’ère paléolithique, on trouve de nombreuses traces de flûtes en os, percées ou non de trous. Parmi les plus anciennes que l’on ait découvertes, celles d’Isturitz (Pyrénées, 20 000 ans environ av. J.-C.).
Les flûtes sans trous pouvaient donner des mélodies issues des harmoniques. Les flûtes à trous offraient cependant plus de possibilités: elles marquent une évolution certaine. Vers 2700 avant J.-C. les Chinois connaissent plusieurs types de flûtes: la flûte droite, la syrinx à cinq tuyaux, la flûte traversière à embouchure quasi centrale et percée de trous de part et d’autre (tche ). Les Égyptiens se représentent tenant la flûte droite et la flûte oblique proches de celles qu’utilisent les instrumentistes populaires au XVIe siècle et en Roumanie encore de nos jours (caval ); ils jouaient sans doute aussi d’un instrument du type de la flûte à bec, mais la confusion est possible avec un instrument à anche. Ils employaient également une flûte droite de métal. On trouve des flûtes en Mésopotamie, où apparaît l’okarina chez les juifs (ugab ), en Étrurie (flûte traversière), en Perse (al nay ), chez les Grecs, chez les Romains... Ces derniers, ainsi que les Grecs, jouaient surtout de la flûte dans la musique populaire, alors que les anches étaient réservées à la musique officielle et sacrée. La confusion de tous ces instruments sous la dénomination générale de flûte est une erreur constante de presque tous les traducteurs jusqu’à la fin du XIXe siècle.
Le Moyen Âge
En Europe occidentale, la pratique de la flûte sous diverses formes primitives est une tradition dont il est impossible de préciser l’origine.
Vers le XIIe siècle, de l’Orient, par l’Europe centrale, nous arrivent les flûtes traversières et les flûtes à bec. À la fin du Moyen Âge nous comptons: le flageolet simple ou double (du type de la flûte à bec), la flûte traversière appelée flûte allemande parce qu’originaire de l’Est, la flûte de Pan en roseaux ou bien taillée dans un bloc de bois ou de terre cuite, la flûte à trois trous (galoubet provençal, chistu basque ou silbote andine) tenue de la main gauche et accompagnée de la main droite au tambour ou au triangle.
Ces instruments, qui n’ont guère changé de forme, sont à la base de la musique populaire encore exécutée de nos jours dans les bassins de la Méditerranée et de la mer Noire.
La Renaissance
La Renaissance est une époque où prolifèrent les flûtes. Les premiers grands luthiers ont pour berceau Venise et la vallée de l’Eure, non loin d’Anet. Ces luthiers offrent aux musiciens un vaste éventail de flûtes: trois membres de la famille des flûtes traversières plus le fifre ; éventail qui se déploie jusqu’à neuf dans la famille des flûtes à bec et dont les dimensions vont de 10 cm à 2,64 m de longueur. Michael Praetorius (Syntagma musicum , 1619) et le père Mersenne (Harmonie universelle , 1636) nous décrivent aussi des familles de flageolets et de flûtes en quatre et huit pieds (en quatre pieds, c’est-à-dire sonnant à l’octave aiguë de la flûte ordinaire) et mentionnent la possibilité de les utiliser séparément ou ensemble comme des registres d’orgue. Charles Burney, en 1733, parle d’une quarantaine de flûtes à bec vues à Anvers, destinées à un ensemble. On n’en avait plus joué depuis plus de cent ans.
On constate donc une grande liberté dans l’emploi de ces instruments, qui doublaient ou remplaçaient les voix; une grande liberté aussi dans l’interprétation des œuvres exécutées avec une technique nuancée d’articulation adéquate, permettant une ornementation extrêmement variée du point de vue rythmique et mélodique.
La sonorité de la flûte est pleine, stable, douce, et relativement peu colorée. Elle se marie remarquablement avec la plupart des instruments de l’époque.
Baroque et classicisme
Le début du XVIIe siècle indique une tendance accentuée vers une expression plus marquée des sentiments. Cela incite les compositeurs, en particulier Claudio Monteverdi, à considérer les instruments notamment sous l’angle de leurs possibilités interprétatives, d’où l’éclipse momentanée des flûtes, cromornes, etc., en faveur des cordes, cornet, orgue, clavecin, et ce jusqu’au milieu du siècle.
À Versailles, vers 1660, des luthiers, dont Jean Hotteterre, construisent des flûtes de facture nouvelle, mieux adaptées au style de l’époque: flûtes à bec, flûte alto en fa en trois parties (tête de perce cylindrique, corps et pied coniques), flûte traversière en ré de même perce avec clé de mi bémol, d’abord en trois, puis en quatre parties, avec corps de rechange (jusqu’à sept), selon les diapasons. Toutes ces flûtes sont d’une sonorité plus colorée grâce à l’emploi des fourches et permettent une grande agilité. Ces instruments se répandent dans l’Europe entière.
La littérature pour la flûte traversière est très abondante. On trouve, outre les noms des plus grands maîtres, tels que Antonio Vivaldi ou Jean-Sébastien Bach, ceux de Jacques Hotteterre le Romain (1684 env.-1762), Michel Blavet (1700-1768), Johan Joachim Quantz (1697-1773), Frédéric II (1712-1786). C’est pour cet instrument qu’ont encore écrit Joseph Haydn, François Devienne (1759-1803), Wolfgang Amadeus Mozart (ses deux concertos de 1778). On peut signaler l’introduction de la flûte à l’opéra par Jean-Baptiste Lully dans le Triomphe de l’amour en 1672.
Ces compositeurs se sont servi avec autant de bonheur de la flûte à bec, tant dans la musique de chambre et d’église que dans la musique d’opéra. À partir de 1680, remplaçant le flageolet, la flûte à bec jouit en Angleterre d’une grande vogue dans tous les milieux.
À partir de 1760, et tandis que la flûte à bec est à son déclin, quelques clés apparaissent sur la flûte traversière, d’abord en Angleterre, puis sur le continent. La flûte conique à cinq clés, qui permet la gamme chromatique sans fourches, marque une évolution réelle surtout sur le plan de l’égalité sonore.
La flûte de Mozart dans le concerto pour flûte et harpe, celles de Ludwig van Beethoven et de Franz Schubert utilisent deux clés supplémentaires (celles de do dièse et de do naturel graves). Au courant du XIXe siècle, l’adjonction d’autres clés, surtout en Allemagne (Max Schwedler) et en Angleterre (Nicholson), accroît encore les ressources de l’instrument, mais ces clés seront peu à peu supprimées. Cette flûte classique se sera prêtée à la plus grande virtuosité (L.-F. Drouet 1792-1873, J.-L. Tulou 1786-1865, Boehm).
Theobald Boehm et la flûte moderne
Entre-temps, 1832 marque une révolution dans l’histoire de la flûte. Theobald Boehm (1794-1881) apporte une conception nouvelle de l’instrument fondée sur des données acoustiques: trous plus larges, perce d’abord conique, puis, en 1847, cylindrique, pour des raisons d’intensité et de qualité de son, avec tête parabolique, celle-ci surtout pour faciliter l’émission des notes graves. Boehm invente un mécanisme ingénieux de plateaux, d’anneaux, d’axes longitudinaux, qui permettent d’obturer les treize principaux trous disposés le long de l’instrument. Ces trous correspondent aux quatorze demi-tons fondamentaux.
Depuis Boehm, peu de changements ont été apportés (clé de sol dièse fermée, de si bémol pour le pouce), mais certains facteurs sont toujours actuellement en quête d’améliorations. Aujourd’hui, la grande flûte a 19 mm de diamètre intérieur et 67 cm de long. Son corps cylindrique se démonte en trois parties; il est percé de seize trous. La tessiture de la flûte en ut est de trois octaves (ut 3ut 6). Il existe une flûte grave en sol (sol 2sol 5) et une flûte piccolo (ré 4-si bémol 6).
La flûte occupe une place importante dans l’orchestre symphonique.
Le XIXe siècle voit l’apparition de la flûte Boehm; le XXe en saisit toutes les richesses, et c’est sans doute grâce à elle que l’on assiste à une réévaluation de la littérature de l’instrument. Comparée à la flûte conique en cours de disparition, la flûte Boehm (la flûte en métal est de plus en plus demandée) est d’une sonorité plus libre, plus intense, plus timbrée. Claude Debussy, un des premiers compositeurs à tirer parti du caractère de cette flûte, ouvre largement, avec Anton Webern, la voie aux musiciens d’avant-garde (Pierre Boulez, Luciano Berio, Bruno Maderna, Luigi Nono, Luis de Pablo, John Cage...). Ces derniers tirent de la flûte des possibilités jusqu’alors insoupçonnées (frappe des doigts sur les clés sans envoyer de souffle provoquant des sons brefs et précis, apparition de doubles sons dans un même souffle). Des possibilités nouvelles sont aussi tirées de la flûte à bec (Paul Hindemith, Berio, Lennox Berkeley...). Igor Stravinski et Maurice Ravel sont les premiers à insérer dans l’orchestre la flûte alto en sol et à employer des effets particuliers (Flatterzunge , harmoniques).
Si les flûtes n’ont, de par le monde, jamais cessé de remplir leur rôle toujours si vivant en tant qu’instrument populaire, on assiste au XXe siècle à un regain d’intérêt pour les musiques anciennes. Le père Mersenne, Quantz sont lus, discutés, en vue d’une authenticité plus rigoureuse dans l’interprétation des œuvres passées.
D’un point de vue plus modeste mais non moins efficace, on accorde à la flûte à bec – déjà Rabelais nous l’indiquait – des vertus éducatives, à tel point que son enseignement fut imposé dans certains pays.
Quel chemin parcouru depuis la préhistoire par nos flûtes tour à tour intimes, brillantes, modestes et champêtres. Toujours présentes, sans doute resteront-elles longtemps encore «le chant sinueux que les bêtes suivaient [et qui] laissait entendre autre chose: nul n’osait se demander quoi» (Pierre Emmanuel).
1. flûte [ flyt ] n. f.
• flehute XIIe; cf. provenç. flaüto, d'o. i., p.-ê. onomat., avec l'initiale du lat. flare « souffler »
1 ♦ Instrument à vent formé d'un tube percé de plusieurs trous, ou de tubes d'inégale longueur. Flûte de Pan, faite de roseaux de longueur décroissante. ⇒ syrinx. La flûte, instrument de musique traditionnel des bergers. ⇒ chalumeau, diaule , 1. flageolet, flûtiau, galoubet, pipeau. Petite flûte en bois encore utilisée dans la musique militaire. ⇒ fifre. Flûte à l'oignon. ⇒ mirliton. « La Flûte enchantée », opéra de Mozart. — Flûte à bec ou flûte douce : flûte en bois, en plastique, à embouchure en forme de bec. — Flûte traversière ou grande flûte : flûte en métal (souvent précieux), à ouverture latérale, tenue parallèlement aux lèvres. — Petite flûte. ⇒ piccolo. Être du bois dont on fait les flûtes. — Vx Accorder ses flûtes.
2 ♦ (1793) Pain de forme mince et allongée, plus petit que la baguette et plus gros que la ficelle.
3 ♦ (1669) Verre à pied, haut et étroit. Une flûte à champagne.
4 ♦ (1808) Fam. Plur. Les jambes. Jouer des flûtes. ⇒ courir. Se tirer des flûtes. ⇒ se sauver.
5 ♦ (1858) Vieilli Interjection marquant l'impatience, la déception, la désapprobation. ⇒ mince, zut.
flûte 2. flûte [ flyt ] n. f.
• fluste 1559; p.-ê. néerl. fluit
♦ Anciennt Navire de guerre qui servait au transport du matériel. Les flûtes de la marine royale.
● flûte nom féminin (peut-être néerlandais fluit) Gros navire de charge utilisé aux XVIIe-XVIIIe s. pour les transports des approvisionnements nécessaires aux navires en campagne et aux stations lointaines. Gros navire de charge des ports de Hollande, plat de fond et très renflé de formes. ● flûte (difficultés) nom féminin (peut-être néerlandais fluit) Orthographe Avec un accent circonflexe sur le u. De même pour les dérivés flÛtiste, flÛtiau, flÛter. ● flûte (synonymes) nom féminin (peut-être néerlandais fluit) Gros navire de charge utilisé aux XVII e - XVIII...
Synonymes :
● flûte (citations)
nom féminin
(onomatopée a-u, évoquant le bruit d'un souffle d'air dans un tuyau, avec l'influence du latin flare, souffler)
Jean Giono
Manosque 1895-Manosque 1970
Laisse-toi vivre dans la vie sans penser que tu joues de la flûte, et alors tu joueras.
Que ma joie demeure
Grasset
● flûte (expressions)
nom féminin
(onomatopée a-u, évoquant le bruit d'un souffle d'air dans un tuyau, avec l'influence du latin flare, souffler)
Flûte à bec, flûte à embouchure terminale, de perce conique, dont la tessiture couvre deux octaves.
Flûte de Pan ou flûte polycalame, flûte droite sur laquelle la variation des hauteurs s'obtient avec des tuyaux de longueurs inégales.
Flûte traversière, flûte à embouchure latérale.
● flûte (synonymes)
nom féminin
(onomatopée a-u, évoquant le bruit d'un souffle d'air dans un tuyau, avec l'influence du latin flare, souffler)
Pain long et mince.
Synonymes :
- baguette
FlÛte de Pan ou flÛte polycalame
Synonymes :
- syrinx
flûte
n. f. (et Interj.)
rI./r
d1./d Instrument de musique à vent composé d'un tube creux percé de trous. Flûte traversière, à embouchure latérale. Flûte à bec. Jouer de la flûte.
|| Jeu de flûte: un des registres de l'orgue.
d2./d Flûte de Pan, faite de tuyaux d'inégales longueurs juxtaposés par rangs de taille.
d3./d Par ext. En France, pain long et fin.
d4./d Verre à pied, long et fin. Flûte à champagne.
d5./d (Plur.) Fam. Longues jambes grêles.
d6./d (Suisse) Biscuit salé en forme de fine baguette.
rII./r Fam. Interjection marquant le mécontentement, l'agacement, etc. Flûte alors! V. graine (sens II), patate (sens II).
I.
⇒FLÛTE1, subst. fém.
A.— MUSIQUE
1. Instrument à vent généralement constitué d'un tube en bois ou en métal percé de trous, dans lequel l'impact du souffle sur l'arête de l'embouchure (dont la place varie selon le type) produit le son et où le jeu d'ouverture et de fermeture des trous produit les hauteurs différentes du son. Le timbre éthéré, transparent, suave de la flûte, avec son charme poétique et sa placidité (LAVIGNAC, Mus. et musiciens, 1895, p. 212). C'était la fille de Jephté qui s'en va au-devant de son père avec des tambours et des flûtes (BARRÈS, Colline insp., 1913, p. 145) :
• 1. ... un été, Scyros fut infestée par les rats (...) les habitants de la ville crurent en mourir. Mais, un jour, vint un joueur de flûte. (...) Il se mit à jouer de la flûte et tous les rats vinrent se presser autour de lui.
SARTRE, Mouches, 1943, III, 6, p. 108, 109.
SYNT. Flûte champêtre, pastorale, rustique; flûte de buis, de roseau; la flûte du berger, du charmeur de serpents; un solo de flûte; un duo de flûte et violon; un concerto pour flûte et harpe; flûte éolienne, indienne, lydienne, phrygienne; un air, un chant de flûte.
♦ Flûte à bec ou flûte douce. Flûte en bois où l'embouchure en forme de bec est située à une extrémité du tube, le souffle parvenant à l'arête par un canal (cf. Mus. 1976).
♦ Flûte traversière (ou grande flûte). Flûte en argent, en or ou en platine, tenue parallèlement aux lèvres, où l'embouchure est une ouverture latérale pratiquée sur le tube. Cet instrument (...) fait très bien (...) la partie de clarinette et celle de flûte traversière (NODIER, Fée Miettes, 1831, p. 183). Flûte piccolo ou petite flûte. Flûte traversière sonnant à l'octave supérieure. Jeu de flûtes. ,,La partie d'un jeu d'orgue qui imite les sons de la flûte`` (Ac. 1932).
— Spécialement
♦ Flûte à l'oignon. Mirliton, instrument populaire ou enfantin. Flûte à l'oignon, fait d'un tube de roseau fermé aux deux bouts par une pellicule de baudruche, ou une peau d'oignon (BRENET, Dict. prat. et hist. mus., 1926, p. 260).
♦ Flûte de Pan. ,,Elle consiste en 7 ou 12 tuyaux bouchés, collés de manière que leurs extrémités ouvertes soient dans le même plan`` (BOUASSE, Instrum. à vent, 1930, p. 92). La flûte polycalame que l'on nomme flûte de Pan ou syrinx (SCHAEFFNER, Orig. instrum. mus., 1936, p. 279). Loc. En flûte de Pan. En forme de flûte de Pan. Des verres rangés en flûte de Pan. Une famille anglaise, avec tous ses enfants à la suite par rang de taille :« une famille en flûte de Pan » (GONCOURT, Journal, 1858, p. 531).
— Au fig. ,,Accordez vos flûtes, soit en parlant à un humain qui ne paraît pas d'accord avec lui-même dans ce qu'il dit, soit en parlant à plusieurs personnes qui ne s'entendent pas sur les moyens de faire réussir quelque chose`` (Ac. 1932). Aller aux flûtes de qqn. Faire toutes ses volontés (d'après LITTRÉ).
— Proverbes. ,,Toujours souvient à Robin de ses flûtes, on se rappelle volontiers les goûts, les penchants de sa jeunesse`` (Ac. 1835, 1878). ,,Ce qui vient de la flûte s'en retourne au tambour, le bien acquis trop facilement ou par des voies peu honnêtes se dissipe aussi aisément qu'il a été amassé`` (Ac.). Cf. M. LEIRIS, Fourbis, Paris, Gallimard, 1955, pp. 226-227.
— Péj. Un joueur de flûte. Celui dont le talent consiste à plaire, mais se trouve limité par le manque d'assise, de profondeur. Bergotte est ce que j'appelle un joueur de flûte (PROUST, J. filles en fleurs, 1918, p. 473).
Loc. Être du bois dont on fait les flûtes.
2. P. méton. Celui qui joue de la flûte dans un orchestre. La petite flûte est un bossu, un chafouin desséché (TAINE, Notes Paris, 1867, p. 45) :
• 2. Il allait passer la journée chez un ami, une flûte d'un petit théâtre, où des amateurs faisaient le dimanche de la musique de chambre...
ZOLA, Bonh. dames, 1883, p. 522.
B.— [P. anal.]
1. [de sonorité]
a) [En parlant des oiseaux, du vent, etc.] La flûte du merle, des crapauds. Au fond de l'air tremble la flûte d'une source (GIONO, Colline, 1929, p. 94).
b) [En parlant d'une pers.] La flûte d'une voix, avoir une voix de flûte. Le petit garçon (...) qui donnait la réplique à la fillette (...) avait en effet (...) une voix d'ange, d'une légèreté cristalline, filant à l'aigu des sons délicieux de flûte (ZOLA, Travail, t. 2, 1901, p. 212). Une voix en flûte qui s'échappait de dessous une pesante armure (HUGO, N.-D. Paris, 1832, p. 457).
2. [de forme]
a) Pain mince et long. (Quasi-)synon. baguette, ficelle. Vimeux déjeunait d'une simple flûte et d'un verre d'eau (BALZAC, Employés, 1837, p. 98).
b) Verre long, mince et étroit. Une flûte à champagne. Georgette qui ne dédaignait pas le vin mousseux, se laissa tenter et vida une flûte tout entière (THEURIET Mariage Gérard, 1875, p. 195).
c) Bouteille à col très allongé. Une flûte d'Alsace (cf. QUILLET, 1965). Pop., vx. ,,Bouteille de vin, — dans l'argot des ouvriers`` (DELVAU 1866, p. 614).
d) Au plur., fam. Les jambes. Il [Ernest] rentrait ses longues flûtes et ses pieds sous sa chaise (L. DAUDET, Rech. beau, 1932, p. 69). Expr. ,,Être monté sur des flûtes. Avoir des jambes longues et grêles`` (Ac. 1878). ,,Mettre les flûtes (à son cou, sans doute), (1918). Se sauver`` (ESNAULT, [Commentaire (IGLF 1950) de l'ouvrage de J. Lacassagne, L'Arg. du « milieu » (1928)], p. 271). Jouer des flûtes, se tirer des flûtes. S'enfuir rapidement. Franchir la frontière suisse, en tous cas me tirer des flûtes (ARNOUX, Gentilsh. ceinture, 1928, p. 107).
C.— Interj., fam. Marque l'impatience, la déception. Synon. zut! — Eh! flûte! s'exclama Bobouroche qui prit congé de la caissière en ces termes plutôt concis (COURTELINE Bobouroche, 1893, p. 17). Des flûtes. Synon. du flan! (Cf. FRANCE 1907).
REM. 1. Flûtage, subst. masc. Manière de produire des sons comparables à ceux de la flûte. P. anal. [Le merle] sifflait, de son plus doux flûtage (RICHEPIN, Glu, 1881, p. 132). 2. Flûterie, subst. fém. Flûterie, air, joué avec la flûte ou la cornemuse (rare). « Mais à quoi est-ce que tu as pensé pendant ma flûterie? » (VINCENT, Lang. et style Sand, 1916, p. 116). 3. Flûteriot, subst. masc. Flûteriot, petite flûte faite avec un roseau (...) « Voilà pourquoi, depuis qu'il a inventé ce flûteriot, il s'absente tous les dimanches... » (VINCENT, Lang. et style Sand, 1916, p. 116). 4. Flûtencul, subst. masc., fam., péj. Apprenti-droguiste, mauvais apothicaire, pharmacien. Hilaire Dupoignet est un héros, flûtencul de la guerre du Tonkin, où il se signala comme infirmier (BLOY, Désesp., 1886, p. 271). 5. Flûtis, subst. masc. Son comparable à celui d'une flûte. Flûtis léger des notes aiguës [de l'accordéon] (GIONO, Solit. pitié, 1932, p. 89).
Prononc. et Orth. :[flyt]. Ds Ac. 1694-1932. La finale [-yt] ne prend d'accent circonflexe que dans flûte et affûte (de affûter). Étymol. et Hist. 1. a) ca 1165 fläute « instrument de musique à vent percé de trous » (CHR. DE TROYES, G. d'Angleterre, éd. W. Foerster, 1913); b) 1220 fleuste (ROBERT DE CLARI, La Conquête de Constantinople, éd. Ph. Lauer, LXXXV, 37); 2. 1669 fleuste « verre à boire de forme allongée et étroite » (WIDERHOLD Fr. —all.); 3. a) 1756 jambes de flutte à l'ognon (d'apr. ESN.); b) 1808 « jambes longues et maigres » (HAUTEL); 4. a) 1806 pain en flûtes (Alm. des gourmands, 267 ds QUEM. DDL t. 2); b) 1817 « pain mince et long » (MERLE et BRAZIER, Préville et Taconnet, iii ds QUEM. DDL t. 2); 5. 1858 interj. (LARCHEY, in R. anecdotique, 501, ibid., t. 3). Onomatopée évoquant par la suite vocalique a-u (cf. aussi l'a. prov. flaüt[a]) la modulation du son dans un tuyau. Les consonnes initiales fl auraient pour orig. les mots dérivés du lat. flare « souffler » (cf. flageolet). Fréq. abs. littér. :991. Fréq. rel. littér. :XIXe s. : a) 1 071, b) 1 076; XXe s. : a) 1 858, b) 1 267. Bbg. BRÜCKER (Fr.). Die Blasinstrumente in der altfranzösischen Literatur. Giessen, 1926, p. 30, 36, 39. — GEORGE (K.E.M.). Arg. jouer du violon « scier ses fers » ... Romania. 1969, t. 90, pp. 540-541. — ORR (J.). Qq. étymol. scabreuses. In : Words and sounds. Oxford, 1953, pp. 225-243. — QUEM. DDL t. 3, 9, 10. — SAIN. Arg. 1972 [1907], p. 264; Sources t. 2 1972 [1925], pp. 53-54, 279; t. 3 1972 [1930], p. 235, 403.
II.
⇒FLÛTE2, subst. fém.
MAR., vieilli. Bâtiment de guerre dont on se sert ordinairement pour porter les vivres et les munitions. Synon. corvette de charge. Nous mouillâmes à côté d'une flûte française (Voy. La Pérouse, t. 2, 1797, p. 316). Je pense à ces voyageurs, déportés par ordre ou exilés volontaires qui, débarquant des flûtes du Roy, découvraient cette malsaine France d'Amérique [la Louisiane] (MORAND, Air indien, 1932, p. 263).
— Expr. Équiper un vaisseau en flûte. Transformer un vaisseau de guerre en bâtiment de charge (cf. Ac.).
Prononc. et Orth. :[flyt]. Ds Ac. 1718-1932. Cf. flûte1. Étymol. et Hist. [1559 fluste « gros navire de charge (?) » (AMYOT, P. Aemil., 13 ds DG), var. fuste, cf. KEMNA, p. 201, à lire peut-être fuste]; 1636 (CLEIRAC, Explication des termes de marine, p. 11). Mot d'orig. incertaine. Il pourrait être empr. au néerl. fluit, de même sens, qui n'est cependant attesté qu'en 1681 (cf. FEW t. 15, 2, p. 151b). Une déformation de fuste sous l'infl. de flûte1 est moins probable. Bbg. SAIN. Sources t. 1 1972 [1925], p. 183; t. 3 1972 [1930], p. 10.
1. flûte [flyt] n. f.
ÉTYM. 1220, fleuste; flaüte, 1165, Chrétien de Troyes; et aussi flehute, XIIe; cf. provençal flaüto; d'orig. incert., sans doute onomatopéique, avec l'initiale du lat. flare « souffler » (Guiraud évoque un comp. de flaer et huter, onomatopéique).
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1 Instrument à vent formé d'un tube de bois ou de métal, percé de plusieurs trous. ⇒ aussi Flûtet, galoubet. || Flûte double de l'Antiquité. ⇒ Diaule. || L'aulète, joueur de flûte dans l'Antiquité. || Petite flûte. ⇒ Flûteau, (vx) larigot. || La flûte, instrument de musique traditionnel des bergers (→ Concert, cit. 14). || Flûte champêtre (→ Bocager, cit. 2; écho, cit. 7; églogue, cit. 3). || Petite flûte en bois utilisée dans la musique militaire. ⇒ Fifre. || Pifferaro jouant de la flûte (ital. piffero). || La raïta, petite flûte arabe (→ Exaspérer, cit. 5). — ☑ Loc. Flûte à l'oignon. ⇒ Mirliton. — La Flûte enchantée, opéra de Mozart.
1 Elle a vécu, Myrto, la jeune Tarentine !
Un vaisseau la portait aux bords de Camarine;
Là, l'hymen, les chansons, les flûtes, lentement
Devaient la reconduire au seuil de son amant.
André Chénier, Bucoliques, XXI.
2 Viens ! — une flûte invisible
Soupire dans les vergers.
— La chanson la plus paisible
Est la chanson des bergers.
Hugo, les Contemplations, II, XII.
3 Aussitôt l'étranger tira de son sac une flûte de bronze (…) il commença à jouer un air étrange, et tel que jamais flûteur allemand n'en a joué.
Mérimée, Chronique du règne de Charles IX, in Romans et nouvelles, Pl., p. 51.
♦ Spécialt (flûtes occidentales modernes). || Flûte à bec, flûte douce : flûte en bois, à embouchure en forme de bec (instrument ancien). || Flûte alto, soprano, sopranino. — Flûte traversière ou grande flûte : flûte en métal (souvent en métal précieux), à clés, qui se place presque horizontalement (parallèle à la bouche). — Petite flûte : flûte traversière dont le registre est d'une octave au-dessus de la grande flûte. ⇒ Piccolo.
♦ Absolt. || La flûte : la grande flûte. || Premier prix de flûte au Conservatoire de Paris.
4 La flûte est, de tous les instruments à vent, le plus agile, celui qui se prête le mieux aux combinaisons de notes rapides, traits, trilles, arpèges, notes répétées. Son timbre, qui peut passer pour froid devient singulièrement expressif dans le médium, et les notes graves de la flûte rendent des sonorités d'un velouté et d'une mystérieuse tristesse que rien n'égale.
Initiation à la musique, p. 161.
♦ ☑ Loc. Flûte de Pan : instrument formé par une série de tubes de longueur décroissante. ⇒ Syrinx. || La flûte de Pan est utilisée aujourd'hui dans plusieurs traditions musicales, notamment dans la musique populaire roumaine.
4.1 (…) une large flûte de Pan qui, cintrée autour de son menton, comprenait un ensemble vertical de tuyaux régulièrement étagés par en dessous du plus grand au plus petit.
Raymond Roussel, Impressions d'Afrique, 1932, p. 85.
♦ ☑ Loc. prov. Être du bois dont on fait les flûtes. — ☑ Vieilli. Accorder, ajuster ses flûtes (→ Accord, cit. 18; et aussi accorder ses violons). — ☑ Prov. Ce qui vient de la flûte s'en va par le tambour.
♦ Par métonymie. Personne qui joue de la flûte. ⇒ Flûtiste. || Il, elle est première flûte à l'Opéra.
♦ Par anal. Son analogue à celui d'une flûte. || La flûte des crapauds.
♦ Techn. Câble à géophones pour l'enregistrement des mouvements sismiques marins (on dit aussi flûte marine).
2 (1817; pain en flûte, 1806). Pain de forme allongée (⇒ Baguette).
5 (…) il acheta pour son dîner une flûte d'un sou chez un boulanger (…)
Hugo, les Misérables, III, IX, II.
3 (1669). Verre à pied, haut et étroit. || Une flûte à champagne.
6 Et il leva son verre de champagne, qui n'était pas la coupe bête et païenne par laquelle on l'a remplacé, mais le verre élancé et svelte de nos ancêtres, qui est le vrai verre de champagne, — celui-là qu'on appelle une flûte, peut-être à cause des célestes mélodies qu'il nous verse souvent au cœur !
Barbey d'Aurevilly, les Diaboliques, « Le plus bel amour », III.
4 Régional (Suisse). a Biscuit salé en forme de baguette très fine que l'on sert à l'apéritif. || Flûtes au sel, au cumin.
b Bouteille à long col réservée aux vins fins.
5 (1756). Fam. (Plur.). Les jambes. ⇒ Quille. ☑ Jouer des flûtes. ⇒ Courir. ☑ Se tirer des flûtes. ⇒ Sauver (se).
6.1 Ej' vas sous les sapins, aux buttes,
Là j'allong' mes flûtes
Et j' m'endors.
A. Bruant, Dans la rue, p. 201.
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II (1858; origine inconnue). Interjection marquant l'impatience, la déception. ⇒ Zut ! || Flûte alors ! j'ai perdu mon stylo.
7 Eh ! Flûte ! s'exclama Boubouroche qui prit congé de la caissière en ces termes plutôt concis (…)
Courteline, Boubouroche, Nouvelles, I.
➪ tableau Principales interjections.
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DÉR. Flûteau, flûter, flûtet, flûteur, flûtiste.
HOM. 2. Flûte.
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2. flûte [flyt] n. f.
ÉTYM. 1559, fluste; p.-ê. du néerl. fluit attesté plus tard.
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♦ Marine ancienne
1 Navire de guerre qui servait au transport du matériel. || Armer, équiper un vaisseau en flûte, pour en faire un navire de transport.
0 Des barques se dirigeaient vers le large (…) Une flûte de la marine royale manœuvrait pour aborder près de la digue des Espagnols.
P. Mac Orlan, l'Ancre de miséricorde, p. 173.
2 En Hollande, Grand navire de transport à fond plat.
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HOM. 1. Flûte.
Encyclopédie Universelle. 2012.