séduire [ sedɥir ] v. tr. <conjug. : 38>
• 1440; suduire 1120; lat. seducere « séparer », sens moral lat. relig.
1 ♦ Vx Détourner (qqn) du bien, du droit chemin. ⇒ corrompre. « J'ai tenté de corrompre sa justice, en séduisant madame Goëzman par des propositions d'argent » (Beaumarchais). ⇒ acheter, suborner.
2 ♦ (1538) Littér. Amener (une femme) à des rapports sexuels hors mariage. ⇒ débaucher, déshonorer, fam. 1. tomber. Chercher à séduire une femme. « Le rêve d'un jeune précepteur laïque, nourri de philosophie matérialiste, est de séduire la fille de la maison » (Romains). — Vieilli Séduite et abandonnée.
3 ♦ Vieilli Détourner du vrai, faire tomber dans l'erreur. ⇒ abuser, égarer, tromper. Être séduit par des apparences.
4 ♦ Convaincre (qqn), en persuadant ou en touchant, avec l'intention de créer l'illusion, en employant tous les moyens de plaire. ⇒ conquérir. « Toutes ces femmes parées voulaient plaire, séduire, et tenter qqn » (Maupassant). ⇒ appâter, enjôler, entortiller, vamper. « l'apparence de ces preuves ou astuces, par quoi nous tentons de séduire un adversaire » (Paulhan). — Absolt « La volonté de séduire, c'est-à-dire de dominer » (Colette). « Le visage humain est avant tout l'instrument qui sert à séduire » (Bachelard).
5 ♦ (Sujet chose) Attirer de façon puissante, irrésistible (sans créer ni entretenir d'illusion). ⇒ attacher, captiver, charmer, entraîner, 2. fasciner, plaire (à). Une formule qui séduira les plus exigeants. Son projet a séduit tout le monde. « toutes les qualités humaines qui peuvent nous séduire isolément » (Maupassant). Sa proposition ne me séduit pas. Une vie qui m'aurait séduit. ⇒ tenter. Absolt « Quand il s'agit d'un art du langage, séduire c'est à la fin persuader » (Caillois).
⊗ CONTR. Choquer, déplaire.
● séduire verbe transitif (latin seducere, tirer à l'écart) Attirer fortement quelqu'un, le tenir comme sous un charme, s'imposer à lui par telle qualité : Une femme qui séduit par sa beauté. Enchanter, tenter quelqu'un, lui plaire : Le lieu m'a séduit, j'ai décidé de m'y fixer. Exercer sur quelqu'un tous les moyens de plaire, en particulier pour l'abuser, faire illusion, le faire agir dans un sens bien précis, etc. : Ces hommes politiques nous séduisent par leurs promesses. Amener quelqu'un à avoir des relations intimes hors du mariage. ● séduire (citations) verbe transitif (latin seducere, tirer à l'écart) Alain René Lesage Sarzeau 1668-Boulogne-sur-Mer 1747 Une fille prévenue est à moitié séduite. Le Diable boiteux ● séduire (difficultés) verbe transitif (latin seducere, tirer à l'écart) Conjugaison Comme conduire. ● séduire (synonymes) verbe transitif (latin seducere, tirer à l'écart) Attirer fortement quelqu'un, le tenir comme sous un charme, s'imposer...
Synonymes :
- captiver
- conquérir
- envoûter
- fasciner
Enchanter, tenter quelqu'un, lui plaire
Synonymes :
- ravir
Contraires :
- déplaire
Exercer sur quelqu'un tous les moyens de plaire, en particulier...
Synonymes :
- enjôler
Amener quelqu'un à avoir des relations intimes hors du mariage.
Synonymes :
- abuser
- débaucher
- déshonorer
séduire
v. tr.
d1./d Litt. ou plaisant (Souvent avec connotation d'abus.) En parlant d'un homme, amener (une femme) à lui accorder ses faveurs hors mariage.
|| Mod. (Sans connotation défavorable.) Plaire à (qqn) et obtenir amour ou faveurs.
d2./d Conquérir l'admiration, l'estime, la confiance de (qqn). Ce chanteur de raï a séduit le public parisien.
|| Convaincre par le charme, la persuasion, le savoir-faire, fût-ce en créant l'illusion. Cet escroc a séduit des épargnants.
d3./d Captiver, charmer. Ce petit village nous a séduits.
⇒SÉDUIRE, verbe trans.
A. — Rare. Séduire de. Détourner, séparer de. Il y a les sentiments qui (...) nous déconduisent, qui nous déramènent, qui nous séduisent de Dieu (PÉGUY, Myst. charité, 1910, p. 147).
B. — 1. Vx. Induire en erreur, abuser. Synon. égarer, tromper. Quoiqu'il [le public] sache très bien que nos gazettes n'expriment par conséquent que la pensée des entrepreneurs de cette censure, cependant il se laisse séduire par des mensonges incessamment répétés (CHATEAUBR., Corresp., 1818, p. 27). Julie est ma cousine (...) Il y a des gens que cette quasi-fraternité pourrait séduire (FROMENTIN, Dominique, 1863, p. 228).
2. Détourner du droit chemin, du bien. Ce prestidigitateur a complètement séduit Lucien, il l'a entraîné dans une existence sans dignité sur laquelle, malheureusement pour lui, l'amour a jeté ses prestiges (BALZAC, Illus. perdues, 1843, p. 574). Puisque vous aimez la mythologie chrétienne, demandez à la gnose de vous expliquer le mystère de la génération des êtres. Séduites par le serpent du désir, les âmes goûtent le fruit défendu de la volupté qui les fait tomber dans les bas-fonds de la matière (MÉNARD, Rêv. païen, 1876, p. 121).
— En partic. Amener une femme à se donner en dehors du mariage. Synon. abuser, déshonorer, suborner, tomber (pop. et fam.). Cet homme l'aima (...) il pouvait la séduire, en faire sa maîtresse, puis l'abandonner; il l'épousa (DUMAS père, C. Howard, 1834,V, 8e tabl., 4, p. 310). En Grèce, Jupiter s'incarnait en taureau pour séduire Europe. Pasiphaé se donnait à un taureau blanc, qui la rendait mère du minotaure (MONTHERL., Bestiaires, 1926, p. 511).
3. Convaincre en mettant en œuvre tous les moyens de plaire. Le Prince de Schwarzenberg passe pour avoir été totalement séduit par les caresses de Napoléon, à Paris (...) se laisser séduire par Napoléon et se mettre réellement de son parti, c'est un peu fort (J. DE MAISTRE, Corresp., 1812, p. 210). Les bureaux d'Orsenna, séduits par l'économie substantielle qu'elles apportaient dans la gestion de cette base dérisoire, fermaient les yeux depuis longtemps sur ces pratiques peu guerrières (GRACQ, Syrtes, 1951, p. 26).
— Absol. Le gouvernement ne disposait pas encore non plus de cette multitude infinie de faveurs, de secours, d'honneurs et d'argent qu'il peut distribuer aujourd'hui; il avait donc bien moins de moyens de séduire aussi bien que de contraindre (TOCQUEVILLE, Anc. Rég. et Révol., 1856, p. 192). Bossuet, Bourdaloue cherchaient à frapper. Chateaubriand, Hugo cherchent à étonner. Flaubert, ensuite, cherchera à séduire (L. DAUDET, Ét. et mil. littér., 1927, p. 83).
— Séduire qqn à qqc., à faire qqc. Les théories d'un artiste le séduisent toujours à aimer ce qu'il n'aime pas et n'aimer pas ce qu'il aime (VALÉRY, Litt., 1930, p. 110). Dans l'état actuel du monde, le danger de se laisser séduire à l'Histoire est plus grand que jamais il ne fut (VALÉRY, Regards sur monde act., 1931, p. 43).
C. — Attirer de façon irrésistible. Le régent: Vous êtes revenu ici au péril de votre tête? Gaston: Monseigneur, je dois l'avouer, la liberté m'a d'abord séduit; mais (...) j'ai réfléchi! (DUMAS père, Fille du régent, 1846, IV, 4, p. 239):
• L'étranger qui arrive, séduit par la beauté des fraîches et profondes vallées qui l'entourent, s'imagine d'abord que ses habitants sont sensibles au beau; ils ne parlent que trop souvent de la beauté de leur pays: on ne peut pas nier qu'ils n'en fassent grand cas; mais c'est parce qu'elle attire quelques étrangers dont l'argent enrichit les aubergistes, ce qui, par le mécanisme de l'octroi, rapporte du revenu à la ville.
STENDHAL, Rouge et Noir, 1830, p. 9.
Prononc. et Orth.:[], (il) séduit [-]. Ac. 1694, 1718: seduire; dep. 1740: sé-. Étymol. et Hist. 1. Déb. XIIe s. trans. « entraîner quelqu'un à commettre des fautes » (St Brendan, éd. I. Short et B. Merrilees, 310); 2. ca 1470 « induire en erreur, faire s'égarer » (GEORGE CHASTELLAIN, Chron., éd. Kervyn de Lettenhove, t. 3, p. 249); 3. 1538 « abuser, déshonorer une femme, une jeune fille » (EST.); 4. 1542 seduisant part. prés. adj. « propre à plaire » paroles seduisantes (E. DOLET ds DELB. Notes mss); 1698 trans. « charmer quelqu'un, l'attirer irrésistiblement en lui plaisant beaucoup » qui seduit & qui plaist (BOILEAU, Satires, éd. A. Cahen, XI, 96). Réfection d'apr. le lat. eccl. seducere « séduire, détourner du droit chemin », v. BLAISE — en lat. class. « amener à part, à l'écart » (d'où chez Marot séduire qqn du droict chemin « le détourner du droit chemin »; cf. aussi séduire qqn de Dieu, PÉGUY, loc. cit.) — de l'a. fr. souduire « id. », att. dès ca 1100 au part. prés. adj. traitur suduiant (Roland, éd. J. Bédier, 942), lui-même du lat. « soulever; retirer » qui a dû prendre le sens de « séduire » en lat. pop., cf. de même l'ital. soddurre auj. en recul devant sedurre. Fréq. abs. littér.:2 032. Fréq. rel. littér.:XIXe s.: a) 3 960, b) 2 333; XXe s.: a) 2 628, b) 2 429.
séduire [sedɥiʀ] v. tr. [CONJUG. conduire.]
ÉTYM. 1440; suduire, 1120 au sens 3; du lat. seducere « mener à part, séparer », sens moral dans le lat. ecclés.; de ducere « conduire ».
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1 Vx. Détourner (qqn) du droit chemin, détourner du bien, faire tomber en faute. ⇒ Corrompre (cit. 11). || Démons attentifs (cit. 15) à vous séduire. || « … De séduire le cœur d'une faible mortelle » (→ Gloire, cit. 35, Racine). || Séduire par de l'argent. ⇒ Acheter (→ Délation, cit. 2). || Séduire des témoins (vx). ⇒ Suborner.
1 Pallas de ses conseils empoisonne ma mère;
Il séduit chaque jour Britannicus mon frère.
Racine, Britannicus, II, 1.
2 Sur les plaintes qu'on prétend que M. Goëzman, conseiller au parlement, fait de moi, disant que j'ai tenté de corrompre sa justice, en séduisant madame Goëzman par des propositions d'argent qu'elle a rejetées, je déclare que l'exposé fait ainsi est faux (…)
Beaumarchais, Mémoires… dans l'affaire Goëzman, p. 24.
2 (1538). Mod. Amener (qqn) à se donner sexuellement (spécialt, en parlant d'un homme qui amène une femme à s'abandonner à lui, hors mariage). ⇒ Abuser, apprivoiser (vx), débaucher, déshonorer, mal (mettre à), suborner, tomber. || Chercher à séduire une femme (→ Cajoler, cit. 6; façon, cit. 51; honnête, cit. 14; renfermer, cit. 1). || Elle cherche à séduire tous les hommes. ⇒ Vamper (fam.). || Femme qui se laisse séduire.
3 Probablement quand il l'aurait séduite, Jacqueline, et qu'elle serait enceinte, le scandale serait si formidable, surtout si l'on songe à la vocation ecclésiastique du Don Juan, que son père serait obligé d'écarter Armand pour quelque temps de Sérianne.
Aragon, les Beaux Quartiers, I, XIV.
3 Vx (vieilli au passif). Détourner du vrai, faire tomber dans l'erreur. ⇒ Abuser, décevoir, éblouir, égarer, piper, tromper. || Être séduit par des apparences (cit. 19), de spécieux prétextes, des arguments captieux. || Les hérétiques qui veulent séduire les fidèles (→ Fortifier, cit. 5).
4 — Quoi ? ses discours vous séduiront au point…
— Tais-toi, pendard (…)
Molière, Tartuffe, III, 6.
5 Tu le savais. Pourquoi me laissais-tu séduire ?
De leur furtive ardeur ne pouvais-tu m'instruire ?
Racine, Phèdre, IV, 6.
4 (XVIIe). Convaincre (qqn), en persuadant ou en touchant, avec l'intention plus ou moins consciente de créer l'illusion, en employant tous les moyens de plaire. ⇒ Conquérir. || Chercher à séduire qqn. ⇒ Affriander, allécher, amorcer, appâter, cajoler, embobeliner, enjôler, entortiller, flatter; et aussi briller (faire), chatoyer (faire), miroiter (faire). || Séduire un client par des boniments. ⇒ Engager, prendre (→ aussi Enjôleur, cit. 4; moralité, cit. 5). || Forcer (cit. 6) les électeurs ou les séduire. || Elle l'a séduit à force d'agaceries (→ Manège, cit. 9). ⇒ Filet (attirer dans ses). — Absolt. || La volonté de séduire, c'est-à-dire de dominer (→ But, cit. 15; et aussi éloquence, cit. 7; enchantement, cit. 7; menteur, cit. 5).
6 Elle le séduisit à force de paroles, elle l'entraîna par ses lèvres doucereuses.
Bible (Segond), Proverbes, VII, 21.
7 Toutes ces femmes parées voulaient plaire, séduire, et tenter quelqu'un. Elles s'étaient faites belles pour les hommes, pour tous les hommes, excepté pour l'époux qu'elles n'avaient plus besoin de conquérir.
Maupassant, Pierre et Jean, V.
8 Observez encore que l'argument n'a point du tout l'apparence de ces preuves ou astuces, par quoi nous tentons de séduire un adversaire.
J. Paulhan, Entretien sur des faits divers, p. 140.
9 (…) le visage humain est avant tout l'instrument qui sert à séduire. En se mirant, l'homme prépare, aiguise, fourbit ce visage, ce regard, tous les outils de séduction.
G. Bachelard, l'Eau et les Rêves, I, II.
♦ Littér., rare. || Séduire qqn à qqch. : l'y entraîner par séduction.
9.1 Pour nous séduire à la dictature, il faudra trouver autre chose.
Francis Ponge, le Parti pris des choses, p. 113.
5 a (Sujet n. de chose). Attirer de façon puissante, parfois irrésistible (sans créer ou entretenir d'illusion). ⇒ Attacher, captiver, charmer, entraîner, fasciner, plaire. || Ce qui l'inquiétait tout en le séduisant (→ Garder, cit. 63). || Une vie qui m'aurait séduit. ⇒ Tenter (→ Excentricité, cit. 6; 1. part, cit. 16). || Plans, projets, thèses qui séduisent l'esprit (→ Exécution, cit. 12; population, cit. 4). || Ce collier la séduisait. ⇒ Œil (donner, taper dans l').
10 On aime un type (de femme ou d'homme), c'est-à-dire la réunion, dans une seule personne, de toutes les qualités humaines qui peuvent nous séduire isolément dans les autres.
Maupassant, Fort comme la mort, II, IV.
b (Sujet n. de personne). || Être séduit par qqn, par sa personnalité. — Absolt. || Elle avait tout pour séduire (→ Épanouir, cit. 24).
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séduit, ite p. p. adj.
♦ (Au sens 2 du v.). || Femme, fille séduite. || Séduite et abandonnée.
♦ (Sens 3 du v.). || Séduit par la vanité, leurré par l'espérance (→ Allécher, cit. 2).
♦ (Sens 4 et 5 du v.). Convaincu, persuadé. || Être amusé et séduit par qqn (→ 1. Part, cit. 28).
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CONTR. Choquer, déplaire.
DÉR. Séduisant.
Encyclopédie Universelle. 2012.